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a Greenpeace : l’amiral Lacoste confirme Dans son livre, Un amiral au secret, l’ancien patron des services secrets français confirme les révélations du Monde sur l’attentat perpétré en 1985 contre le Rainbow-Warrior. p. 8 a Contre l’ETA Le gouvernement espagnol s’apprête à diffuser dans dix-sept pays une cassette vidéo dénonçant le terrorisme de l’ETA. p. 3 a La surenchère de Promodès Dans sa tentative de rachat du groupe de distribution Casino, Promodès aug- mente son offre de 340 à 375 francs l’action. p. 19 a Hôpitaux à risque Médecins et professionnels de la santé ripostent à l’enquête de Science et Avenir sur les hôpitaux à risque. p. 7 a L’Asie du Sud-Est asphyxiée La péninsule malaise, Bornéo et le sud de l’archipel philippin sont asphyxiés par la fumée des milliers de feux de forêt. p. 30 a Les Etats-Unis et l’intégration Les Américains s’interrogent sur de nouvelles méthodes de lutte contre les inégalités raciales. p. 2 a M. Chirac en Russie Le président de la République commence, jeudi 25 septembre, une visite de trois jours en Russie. p. 3 a « Le Monde » en tête Selon l’étude « Ipsos hauts revenus 1997 », Le Monde est le quotidien le plus lu par les lecteurs aisés. p. 20 a Tourisme en Birmanie Les professionnels du tourisme s’inter- rogent sur le boycottage des pays, comme la Birmanie, où les droits de l’homme sont violés. p. 22 a La Ryder Cup en Espagne Les meilleurs golfeurs américains et eu- ropéens s’opposent pour la première fois en Espagne, sur le parcours de Valderrama. p. 25 CINQUANTE-TROISIÈME ANNÉE – N o 16380 – 7,50 F FONDATEUR : HUBERT BEUVE-MÉRY – DIRECTEUR : JEAN-MARIE COLOMBANI VENDREDI 26 SEPTEMBRE 1997 Allemagne, 3 DM ; Antilles-Guyane, 9 F ; Autriche, 25 ATS ; Belgique, 45 FB ; Canada, 2,25 $ CAN ; Côte-d’Ivoire, 850 F CFA ; Danemark, 14 KRD ; Espagne, 220 PTA ; Grande-Bretagne, 1 £ ; Grèce, 400 DR ; Irlande, 1,40 £ ; Italie, 2900 L ; Luxembourg, 46 FL ; Maroc, 10 DH ; Norvège, 14 KRN ; Pays-Bas, 3 FL ; Portugal CON., 250 PTE ; Réunion, 9 F ; Sénégal, 850 F CFA ; Suède, 15 KRS ; Suisse, 2,10 FS; Tunisie, 1,2 Din ; USA (NY), 2 $ ; USA (others), 2,50 $. LE MONDE DES LIVRES a Debord, d’abord a Voyage initiatique avec McCarthy International ............. 2 France .......................... 6 Société ......................... 8 Régions ........................ 10 Carnet ........................... 11 Horizons ...................... 12 Budget .......................... 15 Entreprises ................. 19 Communication ........ 20 Finances/marchés ..... 21 Aujourd’hui ................ 22 Jeux ............................... 25 Météorologie............. 26 Culture......................... 27 Guide ............................ 29 Abonnements ............ 30 Kiosque........................ 30 Radio-Télévision ....... 31 Les Stones roulent toujours a LE PLUS GRAND groupe de rock’n’roll a commencé sa tournée mondiale à Chicago devant 54 000 personnes, alors que sort son nouvel album, Bridges to Babylon. Dans une arène surmontée d’un écran géant, Mick Jagger danse et chante de vieux tubes et des morceaux rarement joués. Sex-symbol provocant, il or- chestre un spectacle hollywoodien avec poupées gonflables, esclaves nues et explosions pyrotechniques. Rendez-vous à Paris au Stade de France, après la Coupe du monde de football. Dans nos pages culture, les photo- graphies de Ré Soupault sur la Tunisie des années 30, pour la première fois en France, à l’Institut du monde arabe, et le Turandot de Puccini repris par le chef Georges Prêtre à l’Opéra-Bastille. Lire pages 27, 28 et 29 Une madone en enfer LE VISAGE de cette mère qui a perdu ses huit enfants dans le massacre, lundi 22 septembre, de Bentalha a fait la « une » dans le monde entier. Hocine, l’auteur de ce document, ra- conte la vie de photographe en Algérie. Une partie de la presse algérienne conteste le bilan offi- ciel (85 morts) du massacre. El Watan fait état de 252 morts. La- houari Addi, sociologue, ex- plique qu’un pays qui livre ses enfants à « l’assassinat collectif n’est plus souverain à l’intérieur de ses frontières ». Lire pages 5, 12 et 13 Le denier du culte des « narcos » mexicains MEXICO de notre correspondant Pourquoi l’Eglise catholique, qui manque cruellement de ressources pour aider les plus pauvres, critiquerait-elle les œuvres sociales des « narcos » si leurs contributions finan- cières servent à « faire le bien » ? En posant publiquement la question, le 19 septembre au détour d’une homélie, le chanoine Raul Soto a déclenché une polémique dont la hiérarchie catholique se serait bien passée. Comme chaque année, à la même date, en mémoire des vingt mille victimes du séisme de Mexico il y a douze ans, des centaines de fa- milles avaient pris place dans les travées de la basilique de la Vierge de la Guadalupe pour écouter le message de l’Eglise en faveur des disparus. Le Père Soto leur rappela le grand mouvement de solidarité qui avait suivi la tra- gédie. « L’aide au prochain est la seule manière de parvenir à la salvation », expliqua-t-il. Pour illustrer son propos, il évoqua le soutien ap- porté par le plus grand trafiquant de marijua- na de l’époque, Rafael Caro, qui accorda une aide financière généreuse aux organisations religieuses chargées d’aider les victimes. « Les pécheurs aussi peuvent faire de bonnes actions », ajouta-t-il. Les fidèles n’étaient pas encore revenus de leur surprise lorsque le cha- noine entreprit d’exalter « les œuvres sociales grandioses » réalisées en faveur de son village par le plus célèbre des « narcos » mexicains, Amado Carrillo, décédé en juillet des suites d’une opération de chirurgie esthétique de grande envergure. « Nous aimerions bien pou- voir en faire autant que ces gens peu re- commandables, mais, s’empressa-t-il de nuan- cer, cela ne veut pas dire que la vie des trafiquants de drogue doive servir d’exemple. » La presse locale, toujours très attentive aux multiples déclarations de la hiérarchie catho- lique depuis le rétablissement des relations di- plomatiques entre le Mexique et le Vatican en 1992, s’est aussitôt emparée de ce morceau de choix. L’Eglise émarge-t-elle au budget des « narcos », a-t-elle demandé ? Quelque peu ir- rité, l’archevêque de Mexico, Mgr Norberto Rivera, a assuré que l’Eglise considérait le tra- fic de stupéfiants « comme l’un des fléaux de l’humanité » et qu’il n’avait « personnellement jamais reçu un sou des narcotrafiquants ». L’archevêque a invité ses interlocuteurs à demander des explications au Père Soto, dont l’autorité au sein de l’Eglise mexicaine est lar- gement reconnue puisqu’il est tout à la fois professeur à l’Université pontificale, membre du tribunal ecclésiastique et aumônier des pri- sons depuis quarante-cinq ans. Loin de renier ses propos, le chanoine a confirmé qu’il avait voulu dire que « les prisonniers et les pécheurs étaient capables de faire preuve de solidarité », ce qui ne devrait scandaliser personne. « Quant au dilemme entourant le problème du trafic de stupéfiants, a-t-il précisé, l’Eglise préfère rester pauvre plutôt que de recevoir de l’argent mal acquis. » Le Père Soto a cepen- dant ajouté in fine : « Il faut bien admettre que le narcos’est infiltré au sein de l’Etat, de l’ar- mée et peut-être même de l’Eglise, qui reste mal- gré tout l’institution la moins corrompue. » Voilà qui ne fera pas plaisir aux autorités mexi- caines, déjà soumises à de très fortes pres- sions de la part des Etats-Unis depuis que les cartels mexicains sont devenus les principaux transporteurs de la cocaïne colombienne des- tinée au marché américain. Bertrand de la Grange Un « vétéran » sur Mir LE PREMIER Français de l’es- pace devait à nouveau s’envoler, vendredi 26 septembre, à bord de la navette américaine Atlantis. Di- rection : la station Mir. Jean-Loup Chrétien avait déjà passé trois se- maines dans la station orbitale russe en 1988. Lire page 24 JEAN-LOUP CHRÉTIEN Le déménagement du territoire EN ACCEPTANT d’ouvrir le capi- tal d’Air France, Jean-Claude Gays- sot avait apporté la preuve qu’on pouvait être à la fois communiste et sensible aux impératifs des entre- prises confrontées aux dures lois de la compétition mondiale. Le feu vert donné, mardi 23 septembre, par le ministre de l’équipement, des trans- ports et du logement à l’extension de Roissy s’inscrit dans la même ligne « réaliste » : le gouvernement se range aux arguments de rentabi- lité et aux critères économiques et commerciaux défendus par les compagnies aériennes et toutes les entreprises de transport, d’hôtelle- rie, de services, de logistique qui se développent à un rythme rapide dans leur sillage. Ce faisant, en renforçant le po- tentiel et le pouvoir d’attraction de l’Ile-de-France, l’élu de Seine-Saint- Denis et Lionel Jospin, qui lui a don- né son aval, privilégient une orien- tation qui va à l’encontre d’une po- litique judicieuse d’aménagement du territoire. Car, au-delà des aspects touchant aux infrastructures, à l’explosion du trafic aérien, à la pollution et aux nuisances, à la vie quotidienne des riverains et à la redistribution de la manne fiscale, l’extension de l’aéro- port Charles-de-Gaulle participe di- rectement de la politique d’aména- gement du territoire. Navrée autant que courroucée, Dominique Voynet ne s’y est pas trompée en déclarant en substance que les efforts dé- ployés (avec des fortunes diverses) depuis au moins deux décennies pour déconcentrer l’Ile-de-France et aérer le pays, bref pour rééquilibrer le territoire vers la province, se trouveraient presque réduits à néant. Terrible aveu d’échec politique et personnel dans la bouche du mi- nistre officiellement en charge de cette politique, qui se fait ravir dans les faits par son collègue, « patron » du très puissant corps des ingé- nieurs des ponts et chaussées, le pi- lotage effectif des infrastructures qui, à long terme, vont redessiner l’image du pays. Au même moment, l’institution qui applaudit le plus fort au plan Gayssot n’est autre que la très influente chambre de commerce de Paris, pour qui tout investissement supplémentaire en Ile-de-France est bon à prendre, fût-ce au prix d’une boulimie égoïste, voire d’une thrombose mortelle. François Grosrichard Lire la suite page 14 AFP Budget 1998 : consensus sur Maastricht et polémique sur les hausses d’impôts Le gouvernement évalue le surcroît de prélèvements à 14 milliards de francs, l’opposition à plus de 50 b Notre dossier complet sur les recettes et les dépenses : les nouvelles mesures fiscales et les priorités du gouvernement p. 15 à 18 b La polémique sur la hausse des impôts p. 6 b L’intervention de M. Chirac sur les crédits de la défense p. 6 b Le décryptage politique du budget et notre éditorial p. 14 LE PROJET de loi de finances pour 1998, approuvé mercredi 24 septembre par le conseil des mi- nistres, est conforme aux objectifs de Maastricht, en limitant les défi- cits publics à 3 % du produit inté- rieur brut. Pour y parvenir, le gou- vernement a augmenté les impôts en ponctionnant les entreprises (9 milliards de francs) et les mé- nages les plus aisés (5 milliards de francs). Ces hausses font l’objet d’une vive controverse entre le gouvernement et l’opposition. Porte-parole du RPR, Nicolas Sarkozy, estime que les hausses d’impôts sont comprises entre 37 et 50 milliards de francs tandis que l’ancien secrétaire d’Etat au bud- get, François d’Aubert, évoque le chiffre de 72 milliards. Les experts de droite ajoutent au décompte of- ficiel l’effet sur 1998 de la hausse récente de l’impôt sur les sociétés, soit 17 milliards de francs supplé- mentaires, ainsi que l’effet sur les prélèvements de la montée en puissance de la CSG, soit 5 mil- liards de francs. Les hausses d’im- pôt approcheraient donc au mini- mum 32 milliards de francs, et davantage encore, si l’on prend en compte diverses autres disposi- tions dont la baisse promise par Alain Juppé de l’impôt sur le reve- nu. Le gouvernement conteste ce calcul et fait valoir que les prélève- ments obligatoires, après avoir at- teint un niveau historique en 1997, à 46 % du produit intérieur brut, baisseront, ensuite, à 45,9 %, en 1998. Au conseil des ministres, Jacques Chirac a donné un bon point au gouvernement pour s’en être tenu à un déficit public de 3 % du PIB en 1998, mais il a exprimé ses inquié- tudes sur le plafonnement des allo- cations familiales et les restrictions budgétaires concernant les crédits de la défense. L’opposition a criti- qué un projet de budget qui, selon elle, pénalise les classes moyennes. Tout en exprimant quelques ré- serves, la majorité lui a réservé un bon accueil, Henri Emmanuelli (PS) le jugeant « nettement orienté vers davantage de croissance et de justice fiscale ».

a et polémique sur les hausses d’impôts...nouvel album, Bridges to Babylon. Dans une arène surmontée d’un écran géant, Mick Jagger danse et chante de vieux tubes et des morceaux

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    CINQUANTE-TROISIÈME ANNÉE – No 16380 – 7,50 F FONDATEUR : HUBERT BEUVE-MÉRY – DIRECTEUR : JEAN-MARIE COLOMBANIVENDREDI 26 SEPTEMBRE 1997

    Allemagne, 3 DM ; Antilles-Guyane, 9 F ; Autriche,25 ATS ; Belgique, 45 FB ; Canada, 2,25 $ CAN ;Côte-d’Ivoire, 850 F CFA ; Danemark, 14 KRD ;Espagne, 220 PTA ; Grande-Bretagne, 1 £ ; Grèce,400 DR ; Irlande, 1,40 £ ; Italie, 2900 L ; Luxembourg,46 FL ; Maroc, 10 DH ; Norvège, 14 KRN ; Pays-Bas,3 FL ; Portugal CON., 250 PTE ; Réunion, 9 F ;Sénégal, 850 F CFA ; Suède, 15 KRS ; Suisse, 2,10 FS ;Tunisie, 1,2 Din ; USA (NY), 2 $ ; USA (others), 2,50 $.

    LE MONDE DES LIVRES

    a Debord, d’aborda Voyageinitiatiqueavec McCarthy

    Les Stonesroulent toujours

    LE PLUS GRAND groupe de

    Une madoneen enfer

    LE VISAGE de cette mère qui

    LMEXICO

    de notre correspondantPourquoi l’Eglise catholique, qu

    Un « vétéran »sur Mir

    LE PREMIER Français de l’es-

    JEAN-LOUP CHRÉTIEN

    Le déméndu terr

    EN ACCEPTANT d’ouvrir le capi-

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    P

    Budget 1998 : consensus sur Maastrichtet polémique sur les hausses d’impôts

    Le gouvernement évalue le surcroît de prélèvements à 14 milliards de francs, l’opposition à plus de 50LE PROJET de loi de finances mum 32 milliards de francs, et

    b Notre dossier complet sur les recettes et les dépenses : les nouvelles

    pour 1998, approuvé mercredi24 septembre par le conseil des mi-nistres, est conforme aux objectifsde Maastricht, en limitant les défi-cits publics à 3 % du produit inté-rieur brut. Pour y parvenir, le gou-vernement a augmenté les impôtsen ponctionnant les entreprises(9 milliards de francs) et les mé-nages les plus aisés (5 milliards defrancs). Ces hausses font l’objetd’une vive controverse entre legouvernement et l’opposition.

    Porte-parole du RPR, NicolasSarkozy, estime que les haussesd’impôts sont comprises entre 37et 50 milliards de francs tandis quel’ancien secrétaire d’Etat au bud-get, François d’Aubert, évoque lechiffre de 72 milliards. Les expertsde droite ajoutent au décompte of-ficiel l’effet sur 1998 de la hausserécente de l’impôt sur les sociétés,soit 17 milliards de francs supplé-mentaires, ainsi que l’effet sur lesprélèvements de la montée enpuissance de la CSG, soit 5 mil-liards de francs. Les hausses d’im-pôt approcheraient donc au mini-

    e denier du culte des « narcos » mexicains

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    davantage encore, si l’on prend encompte diverses autres disposi-tions dont la baisse promise parAlain Juppé de l’impôt sur le reve-nu.

    Le gouvernement conteste cecalcul et fait valoir que les prélève-ments obligatoires, après avoir at-teint un niveau historique en 1997,à 46 % du produit intérieur brut,baisseront, ensuite, à 45,9 %, en1998.

    Au conseil des ministres, JacquesChirac a donné un bon point augouvernement pour s’en être tenuà un déficit public de 3 % du PIB en1998, mais il a exprimé ses inquié-tudes sur le plafonnement des allo-cations familiales et les restrictionsbudgétaires concernant les créditsde la défense. L’opposition a criti-qué un projet de budget qui, selonelle, pénalise les classes moyennes.Tout en exprimant quelques ré-serves, la majorité lui a réservé unbon accueil, Henri Emmanuelli(PS) le jugeant « nettement orientévers davantage de croissance et dejustice fiscale ».

    mesures fiscales et les priorités du gouvernement p. 15 à 18b La polémique sur la hausse des impôts p. 6b L’intervention de M. Chirac sur les crédits de la défense p. 6b Le décryptage politique du budget et notre éditorial p. 14

    a perdu ses huit enfants dans lemassacre, lundi 22 septembre,de Bentalha a fait la « une »dans le monde entier. Hocine,l’auteur de ce document, ra-conte la vie de photographe enAlgérie. Une partie de la pressealgérienne conteste le bilan offi-ciel (85 morts) du massacre. ElWatan fait état de 252 morts. La-houari Addi, sociologue, ex-plique qu’un pays qui livre sesenfants à « l’assassinat collectifn’est plus souverain à l’intérieurde ses frontières ».

    Lire pages 5, 12 et 13

    es explications au Père Soto, dont

    cruellement de ressources pour aider les pluspauvres, critiquerait-elle les œuvres socialesdes « narcos » si leurs contributions finan-cières servent à « faire le bien » ? En posantpubliquement la question, le 19 septembre audétour d’une homélie, le chanoine Raul Soto adéclenché une polémique dont la hiérarchiecatholique se serait bien passée.

    Comme chaque année, à la même date, enmémoire des vingt mille victimes du séisme deMexico il y a douze ans, des centaines de fa-milles avaient pris place dans les travées de labasilique de la Vierge de la Guadalupe pourécouter le message de l’Eglise en faveur desdisparus. Le Père Soto leur rappela le grandmouvement de solidarité qui avait suivi la tra-gédie. « L’aide au prochain est la seule manièrede parvenir à la salvation », expliqua-t-il. Pourillustrer son propos, il évoqua le soutien ap-porté par le plus grand trafiquant de marijua-na de l’époque, Rafael Caro, qui accorda uneaide financière généreuse aux organisationsreligieuses chargées d’aider les victimes.

    actions », ajouta-t-il. Les fidèles n’étaient pasencore revenus de leur surprise lorsque le cha-noine entreprit d’exalter « les œuvres socialesgrandioses » réalisées en faveur de son villagepar le plus célèbre des « narcos » mexicains,Amado Carrillo, décédé en juillet des suitesd’une opération de chirurgie esthétique degrande envergure. « Nous aimerions bien pou-voir en faire autant que ces gens peu re-commandables, mais, s’empressa-t-il de nuan-cer, cela ne veut pas dire que la vie destrafiquants de drogue doive servir d’exemple. »

    La presse locale, toujours très attentive auxmultiples déclarations de la hiérarchie catho-lique depuis le rétablissement des relations di-plomatiques entre le Mexique et le Vatican en1992, s’est aussitôt emparée de ce morceau dechoix. L’Eglise émarge-t-elle au budget des« narcos », a-t-elle demandé ? Quelque peu ir-rité, l’archevêque de Mexico, Mgr NorbertoRivera, a assuré que l’Eglise considérait le tra-fic de stupéfiants « comme l’un des fléaux del’humanité » et qu’il n’avait « personnellementjamais reçu un sou des narcotrafiquants ».

    L’archevêque a invité ses interlocuteurs à

    l’autorité au sein de l’Eglise mexicaine est lar-gement reconnue puisqu’il est tout à la foisprofesseur à l’Université pontificale, membredu tribunal ecclésiastique et aumônier des pri-sons depuis quarante-cinq ans. Loin de renierses propos, le chanoine a confirmé qu’il avaitvoulu dire que « les prisonniers et les pécheursétaient capables de faire preuve de solidarité »,ce qui ne devrait scandaliser personne.

    « Quant au dilemme entourant le problèmedu trafic de stupéfiants, a-t-il précisé, l’Eglisepréfère rester pauvre plutôt que de recevoir del’argent mal acquis. » Le Père Soto a cepen-dant ajouté in fine : « Il faut bien admettre quele “narco” s’est infiltré au sein de l’Etat, de l’ar-mée et peut-être même de l’Eglise, qui reste mal-gré tout l’institution la moins corrompue. » Voilàqui ne fera pas plaisir aux autorités mexi-caines, déjà soumises à de très fortes pres-sions de la part des Etats-Unis depuis que lescartels mexicains sont devenus les principauxtransporteurs de la cocaïne colombienne des-tinée au marché américain.

    Bertrand de la Grange

    a rock’n’roll a commencé satournée mondiale à Chicago devant54 000 personnes, alors que sort sonnouvel album, Bridges to Babylon.Dans une arène surmontée d’un écrangéant, Mick Jagger danse et chante devieux tubes et des morceaux rarementjoués. Sex-symbol provocant, il or-chestre un spectacle hollywoodienavec poupées gonflables, esclavesnues et explosions pyrotechniques.Rendez-vous à Paris au Stade deFrance, après la Coupe du monde defootball.

    Dans nos pages culture, les photo-graphies de Ré Soupault sur la Tunisiedes années 30, pour la première foisen France, à l’Institut du monde arabe,et le Turandot de Puccini repris par lechef Georges Prêtre à l’Opéra-Bastille.

    Lire pages 27, 28 et 29

    International ............. 2France .......................... 6Société ......................... 8Régions ........................ 10Carnet ........................... 11Horizons ...................... 12Budget.......................... 15Entreprises ................. 19Communication ........ 20

    Finances/marchés..... 21Aujourd’hui ................ 22Jeux ............................... 25Météorologie............. 26Culture......................... 27Guide ............................ 29Abonnements ............ 30Kiosque........................ 30Radio-Télévision ....... 31

    tal d’Air France, Jean-Claude Gays-sot avait apporté la preuve qu’onpouvait être à la fois communiste etsensible aux impératifs des entre-prises confrontées aux dures lois dela compétition mondiale. Le feu vertdonné, mardi 23 septembre, par leministre de l’équipement, des trans-ports et du logement à l’extensionde Roissy s’inscrit dans la mêmeligne « réaliste » : le gouvernementse range aux arguments de rentabi-lité et aux critères économiques etcommerciaux défendus par lescompagnies aériennes et toutes lesentreprises de transport, d’hôtelle-rie, de services, de logistique qui sedéveloppent à un rythme rapidedans leur sillage.

    Ce faisant, en renforçant le po-tentiel et le pouvoir d’attraction del’Ile-de-France, l’élu de Seine-Saint-Denis et Lionel Jospin, qui lui a don-né son aval, privilégient une orien-tation qui va à l’encontre d’une po-litique judicieuse d’aménagementdu territoire.

    Car, au-delà des aspects touchantaux infrastructures, à l’explosion dutrafic aérien, à la pollution et auxnuisances, à la vie quotidienne desriverains et à la redistribution de lamanne fiscale, l’extension de l’aéro-port Charles-de-Gaulle participe di-

    gement du territoire. Navrée autantque courroucée, Dominique Voynetne s’y est pas trompée en déclaranten substance que les efforts dé-ployés (avec des fortunes diverses)depuis au moins deux décenniespour déconcentrer l’Ile-de-France etaérer le pays, bref pour rééquilibrerle territoire vers la province, setrouveraient presque réduits ànéant.

    Terrible aveu d’échec politique etpersonnel dans la bouche du mi-nistre officiellement en charge decette politique, qui se fait ravir dansles faits par son collègue, « patron »du très puissant corps des ingé-nieurs des ponts et chaussées, le pi-lotage effectif des infrastructuresqui, à long terme, vont redessinerl’image du pays. Au même moment,l’institution qui applaudit le plusfort au plan Gayssot n’est autre quela très influente chambre decommerce de Paris, pour qui toutinvestissement supplémentaire enIle-de-France est bon à prendre,fût-ce au prix d’une boulimieégoïste, voire d’une thrombosemortelle.

    François Grosrichard

    Lire la suite page 14

    pace devait à nouveau s’envoler,vendredi 26 septembre, à bord dela navette américaine Atlantis. Di-rection : la station Mir. Jean-LoupChrétien avait déjà passé trois se-maines dans la station orbitalerusse en 1988.

    Lire page 24

    a Greenpeace :l’amiral LacosteconfirmeDans son livre, Un amiral au secret,l’ancien patron des services secretsfrançais confirme les révélations duMonde sur l’attentat perpétré en 1985contre le Rainbow-Warrior. p. 8

    a Contre l’ETALe gouvernement espagnol s’apprête àdiffuser dans dix-sept pays unecassette vidéo dénonçant le terrorismede l’ETA. p. 3

    a La surenchèrede PromodèsDans sa tentative de rachat du groupede distribution Casino, Promodès aug-mente son offre de 340 à 375 francsl’action. p. 19

    a Hôpitaux à risqueMédecins et professionnels de la santéripostent à l’enquête de Science etAvenir sur les hôpitaux à risque. p. 7

    a L’Asie du Sud-Estasphyxiée

    La péninsule malaise, Bornéo et lesud de l’archipel phil ippin sontasphyxiés par la fumée des milliers defeux de forêt. p. 30

    a Les Etats-Uniset l’intégrationLes Américains s’interrogent sur denouvelles méthodes de lutte contre lesinégalités raciales. p. 2

    a M. Chirac en RussieLe président de la Républiquecommence, jeudi 25 septembre, unevisite de trois jours en Russie. p. 3

    a « Le Monde »en têteSelon l’étude « Ipsos hauts revenus1997 », Le Monde est le quotidien leplus lu par les lecteurs aisés. p. 20

    a Tourismeen BirmanieLes professionnels du tourisme s’inter-rogent sur le boycottage des pays,comme la Birmanie, où les droits del’homme sont violés. p. 22

    a La Ryder Cupen EspagneLes meilleurs golfeurs américains et eu-ropéens s’opposent pour la premièrefois en Espagne, sur le parcours deValderrama. p. 25

  • LeMonde Job: WMQ2609--0002-0 WAS LMQ2609-2 Op.: XX Rev.: 25-09-97 T.: 11:01 S.: 111,06-Cmp.:25,12, Base : LMQPAG 14Fap:99 No:0420 Lcp: 196 CMYK

    L’exemple des Asiatiques donne des arguments aux partisans de l’abolition de l’« action positive »

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    I N T E R N A T I O N A LLE MONDE / VENDREDI 26 SEPTEMBRE 1997

    Le geste symbolique de Bill ClintonLe président Bill Clinton devait ouvrir symboliquement, jeudi

    25 septembre, le portail du lycée de Little Rock (Arkansas) aux neufanciens élèves noirs, aujourd’hui quinquagénaires, qui l’avaientfranchi il y a quarante ans sous la protection de l’armée et de lagarde nationale et sous les cris haineux d’une foule de Blancs.

    Le geste symbolique du président Clinton, qui a lancé cette annéeun ambitieux programme de dialogue entre les races, précédera unimportant discours qui « soulignera les choses positives nées de ce mo-ment traumatique » de l’histoire du mouvement des droits civiquesaux Etats-Unis, a indiqué la Maison Blanche.

    Le président a souvent fait référence au fait d’avoir grandi dansun Etat du Sud, régi par la ségrégation et a fait de la réconciliationraciale, un des objectifs de son deuxième mandat. Il l’avait réaffir-mé, en juin, à San Diego (Californie) où il s’était prononcé en faveurd’une relance de la politique de préférence ethnique.

    Le 25 septembre 1957, l’armée intervient pour protéger neuf écoliers noirs à Little RockWASHINGTON

    de notre correspondantEn ce début septembre 1957, la polé-

    mique faisait rage dans le sud des Etats-Unis, mais elle avait pris un tour pas-sionné à Little Rock, en Arkansas, unEtat pauvre et réputé arriéré. Cetteconfrontation entre partisans et adver-saires de l’intégration raciale dans lesécoles était particulièrement sensible àCentral High School, une école pourBlancs. La Cour suprême avait affirmé àl’unanimité, en 1954 (un arrêt qui allaitdonner naissance au mouvement pourles droits civiques des années 60 et 70),que la ségrégation était inégalitaire, cequi interdisait de facto l’enseignementséparé dans les écoles publiques.

    Le 5 septembre, neuf enfants noirs seprésentent aux portes de l’école, ainsique l’avait ordonné un tribunal fédéral.L’Arkansas venait d’élire un nouveaugouverneur, Orval Faubus, lequel ne ca-

    chait pas son hostilité envers l’intégra-tion. Lorsque les enfants veulent entrerdans l’établissement, ils se heurtent à lagarde nationale, requise par le gouver-neur, et ils doivent faire demi-tour.L’épreuve de force entre un gouverneursudiste, dont la « sensibilité » est àl’unisson de celle de la population localeblanche, et le président Eisenhower,commence. Celui-ci annonce qu’il ferarespecter la Constitution par tous lesmoyens à sa disposition.

    UNE FOULE HAINEUSEQuatre jours plus tard, les agents du

    FBI remettent un rapport au juge dudistrict, recommandant au gouverne-ment fédéral de faire respecter la loi.C’est fait le 20 septembre : le juge rendune ordonnance enjoignant au gouver-neur de céder. Les neuf enfants entrentdans l’école le 23. Mais, dehors, unefoule haineuse d’environ un millier de

    Blancs menace d’aller les chercher, voirede les lyncher. De violentes échauffou-rées ont lieu. Craignant que la situationne dégénère, la municipalité ordonneaux enfants de quitter l’établissement.De toute façon, les organisations noiresaffirment que ceux-ci ne retournerontpas en classe tant que le président n’au-ra pas pris les moyens de les protéger.

    L’Etat fédéral va réagir prompte-ment : 1 000 parachutistes de la 101 e di-vision aéroportée arrivent sur les lieux,baïonnette au canon. Ils dispersent fa-cilement la foule, d’autant que, dans lavi l le, i ls sont épaulés par10 000 membres de la garde nationale.Les élus blancs du Sud, dont la mentalitéreste profondément marquée par lessouvenirs de la guerre de Sécession etqui ne supportent pas de voir des sol-dats yankees maintenir l’ordre dansleurs rues, sont déchaînés : le sénateurJohnson (Caroline du Sud) conseille au

    gouverneur Faubus de se mettre en étatd’insurrection et le sénateur Talmadge(Georgie) compare l’intervention destroupes fédérales à celles des charsrusses à Budapest.

    L’AUTOSÉGRÉGATIONMais cette démonstration de force a

    eu raison des extrémistes : le 25 sep-tembre, les neuf enfants Noirs pé-nètrent dans l’école, cette fois pour debon. Quarante ans après, les choses ont-elles changé à Little Rock ? Les Noirs re-présentent aujourd’hui 58 % des élèvesde Central High School et, a priori, l’in-tégration raciale, aidée par une poli-tique d’affirmative action (l’action posi-t ive en faveur des minorités)particulièrement volontariste, est unsuccès. A Little Rock, ville de 175 000 ha-bitants, 65 % de la population estblanche ! Mais, en moyenne, les résul-tats scolaires des Noirs sont deux fois

    inférieurs à ceux des écoliers blancs ; ilsont deux fois plus de chances d’aban-donner l’école avant la fin de la scolaritéet ils reçoivent une part disproportion-née des sanctions disciplinaires.

    L’hebdomadaire US News & World Re-port a récemment publié un reportagemontrant que, localement, les Blancs re-présentent une très large proportiondes classes regroupant les élèves les plusbrillants. « La fabrication raciale desclasses renforce l’autosegrégation existantdans différents aspects de la vie scolaire,souligne l’hebdomadaire. La plupart desNoirs viennent à l’école à pied ou en buset entrent par la porte principale. La plu-part des Blancs arrivent avec leur voitureet entrent par une porte latérale, près duparking. Les Noirs prennent leur repas àl’intérieur de l’école, alors que les Blancsdéjeunent à l’extérieur. »

    Laurent Zecchini

    BLANCSNON HISP.

    BLANCSNON HISP.

    NOIRS

    HISPANIQUES

    NOIRS

    HISPANIQUES

    ASIATIQUES

    ASIATIQUESAUTRES AUTRES

    1996

    ÉVOLUTION POUR L'ENSEMBLE DES ÉTATS-UNIS

    2050

    400

    300

    200

    100

    0

    1900

    1910

    1920

    1930

    1940

    1950

    1960

    1970

    1980

    1990

    2000

    2010

    2020

    2030

    2040

    2050

    La forte croissance des Américains d'origine hispanique

    RÉPARTITION DE LA POPULATION

    12% 13,6%

    3,5%

    8,2%0,7% 0,4%

    10,7%

    73,1% 52,8% 25%

    Source : Census Bureau

    en millions

    en %

    76

    263

    394

    NEW YORKde notre correspondante

    Conçue à l’origine pour les Noirs,l’affirmative action (action positive)s’est étendue à d’autres catégoriesde la population susceptibles desouffrir de la discrimination, lesautres minorités ethniques et lesfemmes. Mais l’inégalité de la pro-gression de ces divers groupes au fildes années fournit aujourd’hui desmunitions aux partisans de l’aboli-tion de l’« action positive » : lesAméricains d’origine asiatique, enparticulier, ont dans de nombreuxsecteurs rattrapé les Blancs, quandils ne les ont pas dépassés.

    Dans l’enseignement supérieur,leurs performances ont atteint untel niveau qu’une majorité des étu-diants asiatiques voient désormaisdans l’affirmative action un frein

    plutôt qu’un instrument de progrès :en Californie, où les Asiatiquesconstituent 10 % de la population, ilsaccusent souvent ce système de fa-voriser les Noirs à leur détriment, enleur réservant des places dans lesmeilleures universités, qu’ils au-raient pu obtenir, eux, plus nom-breux, sur la base de leur seul mériteet de leurs dossiers scolaires, maisqui, du coup, leur sont fermées.

    La question se pose avec d’autantplus d’acuité que la populationd’origine asiatique s’accroît àgrande allure aux Etats-Unis, toutparticulièrement dans les Etats del’Ouest, sur la côte pacifique, où ré-sident la moitié des Asiatiques amé-ricains ; dans l’ensemble du pays,leur nombre s’est multiplié par deuxdepuis 1980.

    Comme les Américains d’origine

    hispanique, les Asiatiques sont pourl’essentiel des immigrés, dont ils ontla mentalité et la volonté, alors queles Noirs ont à assumer l’héritage del’esclavage ; de plus en plus, les im-migrés asiatiques arrivent en outreavec un niveau d’instruction large-ment supérieur à celui des autres ettransmettent à leurs enfants uneéthique de la réussite scolaire quileur est propre.

    DEUX PROBLÉMATIQUESLa problématique est donc diffé-

    rente pour les Noirs et pour lesautres minorités ethniques, dontl’intégration paraît plus facile,comme en témoignent les chiffressur les mariages mixtes révélés parle recensement de 1990 : dans latranche d’âge de 25 à 34 ans, deuxcinquièmes des Hispaniques et la

    moitié des Asiatiques sont mariésavec un conjoint d’une autre race,alors que cette proportion est infé-rieure à 10 % chez les Noirs.

    S’ils peuvent se considérer, dumoins pour une partie d’entre eux,comme victimes de l’affirmative ac-tion au niveau des admissions àl’Université, de la même manièreque des Blancs se plaignent aussid’en être victimes, les Asiatiques onten revanche considérablement bé-néficié économiquement de l’« ac-tion positive » dans le cadre del’embauche et de l’octroi de contratspublics. Selon des chiffres officielsobtenus récemment par le WallStreet Journal, les Américains d’ori-gine asiatique ont plus que doubléen dix ans leur part de contrats ac-cordés par l’agence fédérale desPME dans le cadre des contrats pu-

    blics réservés aux petites etmoyennes entreprises appartenantà des membres des minorités eth-niques tandis que, dans le mêmetemps, les chefs de PME noirsvoyaient leur part baisser de plusd’un quart, passant de 50,5 % en1986 à 36,7 % en 1996.

    En 1986, 10,6 % de ces contratsavaient été attribués à des Asia-tiques, contre 23,7 % en 1996. Danscertaines villes, comme New York,la progression des entrepreneursasiatiques a été encore plus specta-culaire puisqu’ils ont décroché64,1 % des contrats publics réservésaux minorités là où, il y a dix ans, ilsn’en avaient que 3,5 %

    En fait, ils ont même un avantagesur les chefs de PME blancs : le chefde PME asiatique qui démarrait uneentreprise entre 1978 et 1987 le fai-

    sait avec un capital moyen de53 600 dollars, alors que le chef dePME blanc ne s’appuyait que sur uncapital de 32 000 dollars. Et 57,8 %des entrepreneurs asiatiques avaientun diplôme universitaire, ce quin’était le cas que de 37,7 % de leurscollègues blancs. Enfin, l’un des sec-teurs où les Asiatiques américainsréussissent particulièrement bien estun domaine très porteur dansl’économie des Etats-Unis : c’est ce-lui des hautes-technologies ; là aus-si, ils ont parfaitement bénéficié descontrats publics réservés à l’affirma-tive action. Mais nul ne s’étonnera,face à de telles performances, que lanotion de « catégorie désavanta-gée » paraisse un tantinet dénatu-rée...

    S. K.

    INÉGALITÉS Bill Clinton, devaitprononcer, jeudi 25 septembre à LittleRock (Arkansas), un discours consacréà l’intégration raciale, qui divise l’opi-nion publique américaine. La volonté

    du président des Etats-Unis de relan-cer la politique d’affirmative action– « action positive » en faveur des mi-norités – se heurte à un courant d’opi-nion qui depuis plusieurs années es-

    time que la race ne doit pas fairel’objet d’une quelconque discrimina-tion, positive ou négative. b LA CALI-FORNIE, après avoir été pionnière enmatière d’affirmative action, a été la

    première à la remettre en cause, sui-vie par le Texas. Les effets ont été im-médiats, le nombre d’étudiants issusdes minorités ethniques admis dansles troisièmes cycles des universités a

    dramatiquement chuté. b LES PARTI-SANS de l’abolition de cette politiquede préférence ethnique citent enexemple la réussite des Américainsd’origine asiatique.

    Les Etats-Unis s’interrogent sur leur politique d’intégration racialeComme pour la réforme de l’aide sociale, les Noirs sont les principales victimes de la remise en cause de l’« affirmative action » en faveur des minorités.

    Bill Clinton, hostile à l’abolition de cet instrument de lutte contre les inégalités, propose d’amender les textes en vigueur depuis trois décenniesNEW YORK

    de notre correspondanteC’est, comme dit le président

    Clinton, « une tâche ancienne etinachevée », qui revient régulière-ment torturer l’Amérique : malgrétous les progrès accomplis depuisles jours fiévreux de Little Rock,lorsque neuf lycéens noirs nedurent qu’à la force des baïon-nettes leur intégration dans uncollège blanc, l’égalité racialereste un chantier imparfait auquelintellectuels, magistrats et politi-ciens n’en finissent pas de s’atte-ler.

    La législation contre la discrimi-nation raciale est encore utiliséequotidiennement devant les tribu-naux, et la question de la déségré-gation ou de la reségrégation re-devient d’actualité. Mais c’estl’« affirmative action », ou « actionpositive », instrument essentiel dela lutte contre les inégalités ra-ciales depuis trois décennies, quisoulève aujourd’hui les débats lesplus profonds.

    Introduite par le présidentJohnson pour tenter de remédieraux discriminations historiquesdont était victime la minoriténoire en accordant aux membresde cette minorité, sous certainesconditions, une priorité dans

    l’emploi et l’éducation, elle n’apas été épargnée par les grandesremises en cause des années 90.L’année 1997 se révèle une annéecharnière pour l’affirmative action,sérieusement contestée par les te-nants d’un retour à la responsabi-lité individuelle. Comme souventdans les phénomènes sociaux auxEtats-Unis, c’est de Californie,l’Etat le plus ethniquement divers,que viennent les plus forts coupsde butoir.

    Après neuf mois de batailles de-vant les tribunaux, la « proposition209 », adoptée en novembre 1996

    par référendum par les électeurscaliforniens, est entrée en vigueuril y a trois semaines. Pour la pre-mière fois dans un Etat américain,une loi abolit donc les préférencesraciales à l’embauche dans les em-plois d’Etat, dans l’attribution descontrats d’Etat et dans l’éducationpublique. Il est, bien sûr, encoretrop tôt pour juger des effets decette mesure qui ne devrait pasêtre pleinement appliquée avantquelques années tant les implica-tions juridiques en sontcomplexes, mais le coup d’envoiest donné, rendant presque déri-soire les protestations du révé-rend Jesse Jackson qui, à la têted’une marche sur le Golden Gate

    Bridge de San Francisco le jour del’entrée en vigueur de la loi, ex-horta ses partisans à « un grandcombat pour l’âme de l’Amé-rique ».

    DES CHIFFRES ÉLOQUENTSL’abolition de l’« action posi-

    tive » est en revanche vécue beau-coup plus concrètement cet au-tomne, avec des effets draconiens,dans deux prestigieuses facultésde droit d’universités d’Etat, cellede Berkeley en Californie et celledu Texas, à Austin. A Berkeley, ladécision a été prise par le conseild’administration de l’université en1995 et, appliquée pour la pre-mière fois cette année, neconcerne pour l’instant que lesadmissions en troisième cycle.

    Les chiffres parlent d’eux-mêmes : la promotion 2000compte 268 étudiants, dont unseul Noir (contre 20 en 1996), au-cun Indien (contre 4), 7 hispa-niques (contre 28) et 32 asiatiques(contre 38), soit le plus petitnombre de membres de minoritésethniques depuis le milieu des an-nées 60, comme l’a souligné avecregret la doyenne de la faculté,Herma Hill Kay. « Nous ne nousattendions pas à des résultats aussisévères », a-t-elle reconnu.

    Même phénomène à l’universi-té du Texas où, là, l’abandon del’affirmative action découlait d’unjugement rendu par une courd’appel fédérale : sur 468 étu-diants de troisième cycle en droit,il n’y a cette année que 4 Noirs,contre 31 en 1996, et 26 hispa-niques, contre 42 en 1996, alorsque les minorités ethniquesconstituent au Texas 40 % de lapopulation. A Berkeley comme àAustin, plusieurs dizaines d’étu-diants noirs et hispaniques, admisen troisième cycle, ont en fait pré-féré rejoindre d’autres universitésaméricaines plutôt que de risquerde se retrouver dans un environ-nement si majoritairement blanc :« j’aurais eu l’impression d’aller àun country club », a confié l’un

    d’eux. Quelques étudiants blancsont suivi la même démarche, refu-sant de faire leurs études dans unmilieu si dissemblable de celuidans lequel ils seraient appelés àtravailler plus tard.

    Plus lourde de conséquencesencore sera la décision de la Coursuprême, qui a accepté de se saisircet hiver d’une affaire hautementsymbolique : le recours formulépar une enseignante blanche li-cenciée du lycée de Piscataway(New Jersey) en 1989, dans lecadre d’une réduction d’effectifs,au profit d’une collègue noire,d’ancienneté égale, parce quecette dernière, seule enseignantenoire de l’établissement, devaitêtre maintenue en fonctions aunom de la diversité ethnique.C’est, cette fois-ci, sur les fonde-ments mêmes de l’affirmative ac-

    tion que va devoir statuer la Coursuprême ; l’importance de cetteaffaire n’a pas échappé à l’admi-nistration Clinton qui, dans l’ar-gumentaire que son représentantdéfendra devant les neuf juges,vient d’opérer un revirement sub-til, après avoir longtemps soutenula décision du lycée : la directionde l’établissement a eu tort, enl’espèce, de licencier le professeurblanc, plaidera l’avocat du gou-vernement, mais le principe del’« action positive » doit êtreconservé. Ce compromis se situedans la droite ligne de l’attitudeadoptée depuis deux ans, aprèsmûre réflexion, par Bill Clintonsur l’affirmative action : « mend it,don’t end it » – « l’assouplir, maisne pas l’abolir ». Le courant en fa-veur du maintien du principe d’unsystème de priorités fondées sur

    le critère racial tant que la discri-mination n’aura pas disparu restevigoureux, y compris auprès derépublicains modérés. La re-cherche d’alternatives à l’« actionpositive » s’accentue néanmoins :le Texas, par exemple, a adoptéune loi offrant d’office des placesdans les universités de l’Etat auxmeilleurs élèves du secondaire,quelles que soient les disparitésentre leurs lycées, afin de per-mettre aux élèves des ghettos ur-bains d’accéder à l’enseignementsupérieur. D’autres préconisentun système de préférences fondésur les inégalités économiquesplutôt que sur les inégalités ra-ciales.

    RENFORCER L’ENSEIGNEMENT PRIMAIREUne autre proposition, sédui-

    sante mais sans doute plus diffi-cile à mettre en œuvre, est entrain de gagner du terrain : la so-lution se trouve en amont, sou-tiennent notamment un profes-seur de Harvard et sa femme dansun livre qui vient de paraître,America in Black and White : OneNation Indivisible ; elle consiste àrenforcer l’éducation primaire etsecondaire. Abigail et StephanThernstrom démontrent que lesclasses moyennes noires ontcommencé à se former avant1970, donc avant que l’affirmativeaction ne porte ses fruits, maisque le fossé entre les résultatsscolaires des enfants blancs et desenfants noirs a recommencé à secreuser entre 1988 et 1994, vrai-semblablement en raison de laviolence dans les ghettos urbainset parce que les faiblesses du sys-tème éducatif américain handi-capent davantage les enfants desmilieux défavorisés. « Sans éduca-tion, renchérit Hugh Price, pré-sident de la National UrbanLeague, il ne peut pas y avoir depouvoir économique : le statu quodans les écoles urbaines n’est plusacceptable. »

    Sylvie Kauffmann

  • LeMonde Job: WMQ2609--0003-0 WAS LMQ2609-3 Op.: XX Rev.: 25-09-97 T.: 10:23 S.: 111,06-Cmp.:25,12, Base : LMQPAG 14Fap:99 No:0421 Lcp: 196 CMYK

    I N T E R N A T I O N A L LE MONDE / VENDREDI 26 SEPTEMBRE 1997 / 3

    Russie : le « déciblage » des têtes nucléairesplonge les responsables français dans l’embarras

    M. Chirac, en visite à Moscou, pourrait annoncer un geste pour rendre la politesse à M. EltsineJacques Chirac est arrivé, jeudi 25 septembre endébut d’après-midi à Moscou, pour un voyageofficiel de trois jours qui le conduira également

    à Saint-Pétersbourg. Il pourrait en profiter pourrépondre à la décision de Boris Eltsine, annon-cée à Paris en mai, de « décibler » les têtes nu-

    cléaires russes. Outre les discours d’usage, leprésident de la République inaugurera le lycéefrançais dans la capitale russe.

    A L’OCCASION de la signaturesolennelle de l’Acte fondamentalentre l’OTAN et la Russie, le27 mai à Paris, Boris Eltsine avaitabandonné le texte de son dis-cours préparé à l’avance et annon-cé qu’à partir de ce jour les mis-siles nucléaires russes ne seraientplus pointés sur les Occidentaux.

    A la surprise générale, y comprisde ses collaborateurs, perplexessur le sens de cette déclaration.Elle faisait suite à des décisions si-milaires des Etats-Unis et de laGrande-Bretagne. C’est ce qu’onappelle le « déciblage ». Militaire-ment, la mesure n’a sans doutepas beaucoup de sens car la tech-nique permet de « recibler » lesmissiles dans un temps très bref,mais sa portée symbolique est in-déniable.

    Mise à part la Chine, la Francereste donc la seule puissance nu-cléaire à ne pas avoir annoncé unetelle décision qui concerne lesmissiles embarqués sur les sous-marins, puisque les fusées sol-soldu plateau d’Albion ont été dé-mantelées. L’affaire plonge lesresponsables français dans l’em-barras pour des raisons à la foisde doctrine et d’opportunité.

    Le « déciblage » est-il compa-tible avec la stratégie tous azi-muts qui a été le fondement de lapolitique française depuis deGaulle ? D’autre part est-il oppor-tun de donner l’impression de serallier à des décisions déjà annon-cées par les autres puissances nu-cléaires ? Sur un sujet apparte-nant par nature au « domainepartagé », il est d’autant plus dif-

    ficile de trancher en période decohabitation.

    Jacques Chirac profitera-t-il deson voyage à Moscou pour rendrela politesse à son ami Boris ? Leprogramme officiel lui fournit uneoccasion avec le grand discoursqu’il doit prononcer, vendredi26 septembre, la soirée du jeudiétant consacrée à un dîner privé,pour les deux couples présiden-tiels, dans un restaurant de la ca-pitale. En fait, le président de laRépublique devrait faire allusionde manière indirecte à la questiondu déciblage, en expliquant que laFrance ne considère plus depuislongtemps la Russie comme uneennemie sur laquelle serait bra-qué son arsenal. Moscou auraitsouhaité plus.

    Par exemple que le sujet fasse

    l’objet d’une déclaration à l’issuede la première session du Conseilconjoint OTAN-Russie qui se réu-nit le 26 septembre à New York,en marge de l’Assemblée généraledes Nations unies. Les Occiden-taux n’auraient pas été mé-contents non plus d’entraîner laFrance dans cette discussion.Mais Paris a veillé à ce que la sûre-té nucléaire mise à l’ordre du journe concerne que la Russie. Il au-rait été en effet paradoxal que,pendant trente ans, la France re-fuse catégoriquement de parler destratégie nucléaire dans le cadrede l’OTAN et qu’elle accepte unediscussion sur sa doctrine mili-taire dans ce même forum élargi àla Russie.

    Daniel Vernet

    Le gouvernement espagnoldiffuse une vidéo-cassette

    dénonçant l’ETALes formations nationalistes basques protestent

    MADRIDde notre correspondante

    Ce sont des images en noir etblanc de tireurs masqués par des ca-goules qui s’entraînent dans unecampagne anonyme. Un titre s’af-fiche ensuite sur un fond aussi noirque le dossier : El rostro de la ETA (levisage de l’ETA). C’est ainsi que dé-bute un film vidéo de quinze mi-nutes réalisé par le ministère espa-gnol de l’intérieur, qui a provoquéun tollé dans les rangs des forma-tions nationalistes basques, et quidevrait être remis aujourd’hui auxambassades espagnoles dans dix-sept pays dont la France. Outre lespartenaires de l’Union européenne,figurent également sur la liste desdestinataires des pays d’Amériquelatine qui pourraient abriter desmembres ou des collaborateurs del’ETA comme le Mexique, le Vene-zuela, le Chili, l’Argentine ou l’Uru-guay, mais aussi les Etats-Unis et leMaroc.

    Le gouvernement de José MariaAznar entend sensibiliser les auto-rités et les opinions publiques de cespays, « combler un déficit d’informa-tion » sur l’organisation séparatistebasque armée ou son « bras poli-tique », la coalition indépendantistebasque Herri Batasuna. La produc-tion a été programmée à dessein cardans une dizaine de jours, le 6 octo-bre, commencera au tribunal su-prême à Madrid, le procès des vingt-trois dirigeants de la coalition indé-pendantiste et celle-ci mène aussiune campagne internationale desoutien contre un procès qu’ellequalifie de « politique ».

    La vidéo du ministère de l’inté-rieur, qui sera envoyée par les char-gés de presse des ambassades d’Es-pagne aux autorités et aux grandsmédias des dix-sept pays réperto-riés, a été visualisée intégralementsur le petit écran espagnol par deuxchaînes de télévision. Quelques mil-lions de citoyens ont pu ainsi jugersur pièce un film d’un quart d’heure,aux images d’une rare violence, quialimente aujourd’hui la discordeentre le gouvernement basque et legouvernement de José Maria Aznar.Cadavres, corps mutilés, ferrailles etmares de sang se succèdent, avec lesattentats les plus meurtriers del’ETA et d’autres images fortes : ledernier otage de l’ETA libéré par lagarde civile (532 jours de détention),famélique, et, à côté, la silhouetteterrible d’un rescapé du camp deBuchenwald avec deux dates : 1945-1997.

    Il y a aussi cette musique angois-sante avec un chiffre qui s’étale surtout l’écran, l’ETA : 761 morts dont19 enfants depuis 1968. Et pourtant,l’Espagne est depuis vingt ans unedémocratie, un pays modernisé, quia procédé à de grandes réformespolitiques dont la constitution dedix-sept autonomies, explique lavoix off sur les images de cette nou-velle Espagne, celle du TGV, del’adhésion à la Communauté euro-péenne ou du sommet de l’OTAN,mais aussi celle d’un Pays basquequi jouit de la plus grande autono-mie. Mais, « la bande terroriste detype mafieux », l’ETA, continue à se-mer la mort, explique le com-mentaire. A quelques jours du pro-

    cès de la direction collégiale de HerriBatasuna (HB), accusée « d’apologiedu terrorisme » et « de collaborationavec bande armée », le ministère del’intérieur a souhaité montrer unmeeting de HB où des hommes ca-goulés brûlent les drapeaux de l’Es-pagne et de la France. Il s’agit decontrecarrer la campagne interna-tionale de la coalition indépendan-tiste, ont expliqué les responsablesde la sécurité.

    Le 6 octobre,commenceraau tribunal suprêmeà Madrid le procèsdes 23 dirigeantsde la coalitionindépendantisteHerri Batasuna

    La direction de cette coalition estpoursuivie pour avoir diffusé unecassette vidéo de l’organisation sé-paratiste basque lors des meetingsélectoraux de 1996 et avoir justifiécertains assassinats de l’ETA. Elle aannoncé une campagne de mobili-sation en Espagne et à l’étranger.Rappelant qu’elle est une formationlégale qui représente 15 % de l’élec-torat au Pays basque, elle affirmeavoir obtenu le soutien de septcents personnalités dont la moitié àl’étranger. Les noms de GerryAdams, du Sinn Fein, la branche po-litique de l’IRA ou des grands-mèresde la Place de Mai de Buenos Airessont cités. HB demande la présenceà ce procès, qui fait trembler toutela classe politique espagnole, d’unevingtaine d’observateurs internatio-naux.

    Aux nationalistes basques, qui cri-tiquent la vidéo et demandent sonretrait en accusant le gouvernementespagnol de donner une image ter-rible du Pays basque et de toute l’Es-pagne, qui pourrait faire fuir les tou-ristes et les investisseurs, le ministrede l’intérieur répond : « Les imagessont dures mais la réalité est encoreplus dure. » Il a confirmé que la vi-déo serait bien distribuée à l’étran-ger et notamment dans les pays oùexistent des « opinions simplistes etinfondées » sur l’ETA. Les argumentsdu ministre n’ont pas convaincu leParti nationaliste basque (PNV), quigouverne au Pays basque et dont lesrelations avec le gouvernement es-pagnol se sont nettement détério-rées ces dernières semaines. Le chefde file de cette formation, Javier Ar-zalluz, a affirmé lundi dernier que« le PNV et le Parti populaire de JoséMaria Aznar ne sont plus liés désor-mais par le pacte signé en 1996 ». Lerefus opposé par Madrid à la reven-dication du gouvernement basquede gérer son Institut national pourl’emploi a fait déborder la coupe etla vidéo sur l’ETA serait, selon leporte-parole de ce parti, une « utili-sation perverse de la violence ». –(Intérim.)

    Protestants et catholiques irlandaiss’engagent sur un compromis

    UN COMPROMIS entre les ca-tholiques et les protestants a ou-vert la voie, mercredi 24 septembreà Belfast, au lancement des pre-mières négociations de fond surl’avenir de l’Irlande du Nord ja-mais tenues entre catholiques na-tionalistes et protestants unio-nistes. Après quinze mois dediscussions stériles, le vote sur letexte lançant les discussions aconstitué un délicat exercice depragmatisme et de compromispour toutes les parties, qui préfi-gure sans doute la difficulté de lasuite des travaux, censés se dérou-ler jusqu’à mai 1998.

    Ce vote signifie que commence-ront lundi des discussions sur le fu-tur de la province déchirée parvingt-huit années de troubles, lespremières ayant réuni autourd’une table depuis 1921 les défen-seurs du maintien de l’Ulster dansle Royaume-Uni et les partisans del’unification de l’Irlande. Toute lajournée de mercredi avait étéconsacrée à des ajustements sur lamotion fondatrice qui a été adop-tée sous les applaudissements desparticipants.

    UN JOUR HISTORIQUE« C’est un jour historique », a dé-

    claré le leader du Sinn Fein, GerryAdams. Le ministre britannique àl’Irlande du Nord, Mo Mowlam, ajugé que la journée était « uneétape cruciale non seulement pourles pourparlers, mais au regard del’Histoire ». Le représentant de Du-blin, le secrétaire d’Etat JohnO’Donoghue, a estimé qu’« unrayon de lumière brille sur l’en-semble de l’île d’Irlande, qui va illu-miner le cœur de son peuple ». Ledirigeant du principal parti unio-niste d’Ulster, David Trimble, apourtant voulu voir dans le lance-ment des négociations « les pre-miers pas du Sinn Fein vers l’accep-tation de la partition » de l’Irlande.

    Le parti de M. Trimble, l’UUP, aaccepté de mettre entre paren-thèses son exigence d’un désarme-ment de l’IRA avant tout accord fi-nal à Stormont. Aucun des partisreprésentant les paramilitaires ca-

    tholiques ou protestants n’auraitété prêt à accepter une telle de-mande. Aux termes de l’accord,une commission de supervision dudésarmement des paramilitairesdes deux camps, en parallèle auxnégociations, a également été miseen place, avec à sa tête le généralcanadien John de Chastelain.

    Les nationalistes, SDLP et SinnFein, minoritaires dans la province,ont de leur côté bataillé contre unemention du « consentement » de lamajorité comme « principe guidantles négociations ». Les gouverne-ments britannique et irlandais au-ront attendu jusqu’à la dernièreminute pour annoncer le rejet de lamotion d’expulsion déposée parl’UUP contre le Sinn Fein. Il ne fai-sait aucun doute que Londres etDublin allaient maintenir le SinnFein dans les pourparlers, où il aété admis à la suite du cessez-le-feu décrété en juillet par l’IRA.Seuls deux petits partis unionistesradicaux boycottent les pourpar-lers. – (AFP.)

    La déroute du français sur les terres russesMOSCOU

    correspondanceC’est une victime tout à fait inattendue de la

    chute du régime soviétique. On le croyait so-lidement implanté sur la terre de ces grandsécrivains qui, comme Tolstoï, le maniaient à laperfection. Mais son recul a été brutal. Alorsqu’à l’époque soviétique 20 % des élèves ap-prenaient le français, aujourd’hui ils ne sontplus que 7 % à s’y initier dans les écoles. Car,avec la libéralisation du régime amorcée en1991, le système des quotas, qui garantissait àla langue française sa troisième place dansl’enseignement, derrière l’anglais (50 % desélèves) et l’allemand (30 %), a été supprimé. Etil y a eu une véritable hémorragie, en dépit desefforts déployés jusque-là par Paris pour « dif-fuser la culture française ». Grâce aux bonnesrelations entre Moscou et Paris, la France avaitréussi à être le seul « pays capitaliste », selon laterminologie de l’époque, qui pouvait envoyerdes professeurs aux quatre coins de l’Unionsoviétique. Dans les années 70, il y avait ainsi

    plus de soixante-dix Français servant la causede la francophonie, jusque dans les villes lesplus reculées.

    INVASION DE L’ANGLAISMais cette politique volontariste n’eut pas

    les retombées attendues. Et l’anglais consolidasa suprématie dès que les Russes purent choi-sir librement. « Il y a des phénomènes de fondsur lesquels nous n’avons pas de prise », re-connaît un linguiste. Car le français ne ré-gresse pas uniquement dans l’enseignement,mais aussi dans le secteur du livre. Les biblio-thèques n’ont plus d’argent pour acheter deslivres et les maisons d’édition ont arrêté depublier des ouvrages en français.

    Devant cette situation, le ministère françaisdes affaires étrangères tente de limiter les dé-gâts avec un programme d’aide à la publica-tion d’ouvrages français et de diffusion delivres dans les bibliothèques. De plus, neuf« centres de langue française » ont été mis enplace localement, des filières francophones

    sont ouvertes dans des universités moscovites,et le lycée français va prochainement s’agran-dir. La France a en effet obtenu que lui soitrestitué le bâtiment abritant l’école françaiseet dévolu au KGB après la révolution. JacquesChirac doit, jeudi, apposer une plaque surcette bâtisse du quartier de la Loubianka.

    Toutes ces actions maintiennent une cer-taine présence, mais ne sauraient contrer l’in-vasion de l’anglais, facilitée par les membresdu Peace Corps, ces coopérants américainsdisséminés dans tout le pays. Cela étant, laRussie n’est pas jugée prioritaire par le Quaid’Orsay pour la diffusion du français, contrai-rement aux pays membres de l’Union euro-péenne. Parallèlement, l’enseignement durusse en France souffre d’un manque d’inté-rêt. Le nombre d’élèves baisse dans le public etdes postes d’enseignants sont supprimés.L’enseignement du russe recule donc au mo-ment de l’ouverture du marché russe.

    Brigitte Breuillac

    Les Serbes de Bosniesont parvenus à un accord

    LES SERBES de Bosnie se sontengagés, mercredi 24 septembre, àmettre un terme à la lutte sansmerci qui oppose depuis près detrois mois les partisans du dirigeantultra-nationaliste Radovan Karad-zic à Biljana Plavsic, la présidentede l’entité serbe soutenue par lacommunauté internationale. Réu-nis à Belgrade à l’initiative de Slo-bodan Milosevic, président de laRépublique fédérale de Yougo-slavie (Serbie et Montenegro), Bil-jana Plavsic et le chef de file des ul-tra-nationalistes de Pale, MomciloKrajisnik, sont en effet parvenus àun accord qui devrait faire retom-ber la tension.

    Les deux parties sont convenuesd’organiser des élections législa-tives, le 15 novembre, et présiden-tielle, le 7 décembre. Le Parlementnouvellement élu devra ensuitenommer une commission chargéed’organiser l’élection du chef del’Etat, ainsi que celle destinée à dé-signer le nouveau représentantserbe à la présidence collégiale deBosnie, fonction détenue depuis unan par Momcilo Krajisnik.

    De plus, les signataires se sontengagés à recréer « un espace mé-diatique commun ». Objet de luttesacharnées avant les élections muni-cipales des 13 et 14 septembre, lejournal de la radio-télévision del’entité serbe, soumis jusqu’àprésent à la propagande quasi ex-clusive des fidèles de Radovan Ka-radzic, sera ainsi diffusé alternati-vement par les studios de BanjaLuka, siège de la présidence, et parceux de Pale.

    En arrachant un compromis àceux qui, jusqu’à ce jour, parais-saient irréconciliables, SlobodanMilosevic s’affirme comme le seularbitre capable de mettre de l’ordredans le camp serbe. Ainsi,Mme Plavsic se résigne au principede l’élection présidentielle, un anavant la fin légale de son mandat.En échange de cette concession, les« durs » de Pale n’exigent plus queles scrutins présidentiel et législa-tifs soient organisés simultané-ment. Surtout, ils acceptent de re-mettre en jeu leur représentation à

    la présidence bosniaque tricéphale(musulman, serbe et croate). Appa-remment satisfaite du résultat decette rencontre, Mme Plavsic a dé-claré à la presse que « les solutionstrouvées », grâce au rôle « assez im-portant », joué par M. Milosevicpermettront de « stabiliser la Répu-blique serbe jusqu’aux législatives ».

    De nombreux pays occidentaux,Etats-Unis en tête, qui soutiennentMme Plavsic depuis le début de lacrise, souhaitaient l’organisationd’un seul scrutin législatif. Ils s’op-posaient sur ce point à la Russie fa-vorable à la convocation d’élec-tions simultanées. Un responsablede l’OTAN avait toutefois indiqué,mercredi 24 septembre à Bruxelles,qu’une décision à ce sujet devaitêtre prise, jeudi à New York, lorsd’une réunion des ministres des af-faires étrangères des pays membresdu groupe de contact sur la Bosnie(Russie, France, Grande-Bretagne,Etats-Unis, Allemagne), en margede l’Assemblée générale de l’ONU.

    MISES EN GARDE En outre, les principales puis-

    sances engagées dans la pacifica-tion de la Bosnie ont menacé, mer-credi, de suspendre l’aideinternationale aux Serbes, aux Mu-sulmans et aux Croates qui ne res-pecteraient pas les accords de paixde Dayton. Une nouvelle mise engarde a, par ailleurs, été adressée àRadovan Karadzic. Le chef d’état-major interarmes américain, le gé-néral John Shalikashvili, a assuré,mercredi, que « tout sera fait en finde compte » pour arrêter et jugerl’ancien chef des Serbes de Bosnieinculpé de crimes de guerre et degénocide.

    Ces mises en garde interviennentalors que plusieurs pays occiden-taux estiment nécessaires de pro-longer leur présence militaire enBosnie au-delà du terme prévupour le 30 juin 1998. Les Etats-Unisse préparent à se rallier à cette op-tion. Le Congrès a ainsi fourni,mercredi, au président Bill Clintonla possibilité de maintenir lestroupes américaines sur place. –(AFP, AP.)

  • LeMonde Job: WMQ2609--0004-0 WAS LMQ2609-4 Op.: XX Rev.: 25-09-97 T.: 11:11 S.: 111,06-Cmp.:25,12, Base : LMQPAG 14Fap:99 No:0422 Lcp: 196 CMYK

    Hun Sen menace d’entraverl’action de l’ONU au CambodgePARIS. L’homme fort du Cambodge, Hun Sen, a implicitement menacé,mercredi 24 septembre, lors d’une visite à Paris, de ne pas prêter sonconcours aux Nations unies pour la tenue des élections législatives de1998 si l’organisation internationale persistait à déclarer vacant le siège duCambodge, à New York. « Si on nous refuse ce siège, qui est notre propriété,je ne vois pas comment les Nations unies pourraient jouer le rôle de coordi-nation des observateurs étrangers au scrutin de 1998 », a déclaré Hun Sen,en ajoutant que « la mission des droits de l’homme de l’ONU à PhnomPenh, elle aussi, n’aurait plus de sens ».Depuis le coup de force du début juillet, le Cambodge est isolé sur lascène internationale. Les ministres des affaires étrangères de l’Asean ontconfirmé, jeudi, leur décision d’ajourner l’entrée du Cambodge en leursein, tandis que le Fonds monétaire international et la Banque mondialeont décidé, mercredi, de suspendre leurs programmes à Phnom Penh.

    Un Français et un Belgeont été arrêtés à KinshasaKINSHASA. Deux Européens, un Français et un Belge, ont été placés engarde à vue par la police de Kinshasa dans le cadre d’une enquête sur lesmassacres présumés de réfugiés hutus rwandais dans l’ex-Zaïre, a-t-onappris, mercredi 24 septembre, de sources diplomatiques et humani-taires. Les deux hommes seraient officiellement entendus en qualité detémoins. Le Français, Jean-Marie Bergesio, et le Belge, Antoine De Klerk,résidaient et travaillaient à Kisangani, dans l’est du Zaïre, théâtre présuméde plusieurs massacres. Le premier a été arrêté le 10 septembre, le second,le 16.M. Bergesio est soupçonné d’avoir dissimulé des photographies et desenregistrements vidéo de massacres perpétrés dans la zone de Kisangani,selon une source proche de l’ambassade de France à Kinshasa, tandis queM. De Klerk est entendu à propos d’une pelleteuse que les troupes deLaurent-Désiré Kabila lui auraient « empruntée » afin de l’utiliser près dusite présumé d’un massacre. – (Reuter.)

    La France vend cinq chasseursde mines à la TurquiePARIS. La France va vendre à la Turquie cinq chasseurs de mines d’occa-sion, pour un montant de l’ordre d’une cinquantaine de millions de dol-lars (environ 300 millions de francs). Le contrat a été signé, mercredi24 septembre, en Turquie, par le ministère turc de la défense et DCN In-ternational (DCNI), la branche commerciale de la direction des construc-tions navales (DCN) en France.Les cinq navires de type Circé (500 tonnes pour 50 mètres de long) sontdes unités retirées récemment du service par la marine française. Ils se-ront livrés en 1998 à la marine turque après avoir été rénovés par la DCNdans ses arsenaux de Brest. Ils seront équipés d’un système de chasse auxmines incluant le système de traitement des informations tactiques (Mi-netac) et des robots sous-marins immergés et pilotés à distance pour dé-tecter et détruire les mines. C’est la première fois que la France vend deséquipements navals à la Turquie.

    Réconciliation des patriarches orthodoxesde Moscou et de ConstantinopleODESSA. Le patriarche œcuménique Bartholomée Ier de Constantinopleet le patriarche Alexis II de Russie se sont rencontrés, mercredi 24 sep-tembre, à Odessa en Ukraine. Cette rencontre était la première depuis lapolémique ouverte, le 29 février 1997, par le rattachement de l’Eglise d’Es-tonie à Constantinople. Le patriarche Bartholomée est venu en Ukrainesoutenir la position d’Alexis II dans le conflit qui oppose l’Eglise ortho-doxe russe à l’Eglise orthodoxe ukrainienne du patriarcat de Kiev et àl’Eglise orthodoxe ukrainienne indépendante. Ces deux dernières sontconsidérées comme dissidentes par le patriarcat de Moscou. Les repré-sentants du patriarcat de Kiev, désireux d’avoir la bénédiction de Bartho-lomée Ier de Constantinople, ont été empêchés par les autorités de l’ac-cueillir dans le port d’Odessa. – (AFP).

    EUROPEa FINLANDE : le comité directeur du Parti social-démocrate du pre-mier ministre finlandais Paavo Lipponen a approuvé, mercredi 24 sep-tembre, l’adhésion du pays à l’ Union économique et monétaire (UEM).Le Parlement d’Helsinki devrait voter, a priori sans problèmes, cette adhé-sion au début de l’an prochain, en dépit de l’opposition d’une légère ma-jorité de l’opinion publique. – (Corresp.)

    ASIEa VIETNAM : les députés vietnamiens ont élu, mercredi 24 septembre,Trân Duc Luong à la présidence de la République pour un mandat de cinqans. Agé de soixante ans, M. Luong, vice-premier ministre depuis dix ans,remplace à ce poste le général Lê Duc Anh, soixante-dix-sept ans, dont lasanté avait décliné ces derniers mois. Homme de dossier, M. Luong estréputé favorable à la poursuite de la réforme économique. – (AFP.)

    PROCHE-ORIENTa ÉGYPTE : le procureur militaire a formellement interdit, à partir demercredi 24 septembre, toute publication d’informations relatives à l’at-tentat du Caire qui a causé, jeudi 18 septembre, la mort de neuf touristes.Par ailleurs, des membres de l’organisation intégriste armée Gamaat Isla-miya actuellement en prison ont appelé, mercredi, à un arrêt de la vio-lence. Plusieurs appels en ce sens ont été lancés par des responsables em-prisonnés des Gamaat depuis le 5 juillet. – (AFP.)a IRAK : une centaine de chars et de véhicules militaires turcs ontpénétré, mardi 23 septembre, dans le nord de l’Irak, par le poste frontalierturco-irakien de Habur, afin de mener une opération contre les sépara-tistes turcs kurdes du Parti des travailleurs du Kurdistan basés dans cetterégion, a-t-on appris de sources locales. – (AFP, Reuter.)a ISRAËL : un nouvel ambassadeur des Etats-Unis en Israël a éténommé, mercredi 24 septembre, en remplacement de Martin Indyks. Ed-ward Walker, entré dans la carrière diplomatique en 1967, a été en postedans de nombreuses capitales duProche-Orient. Sa nomination parBill Clinton doit maintenant êtreconfirmée par le Sénat. – (AFP.)

    AFRIQUEa MAROC : le ministre de l’inté-rieur a annoncé, mercredi 24 sep-tembre, que les élections législa-tives, initialement prévues en sep-tembre mais reportées à la de-mande de l’opposition, auraient fi-nalement lieu le 14 novembre, se-lon l’agence de presse officielleMAP. – (Reuter.)

    4 / LE MONDE / VENDREDI 26 SEPTEMBRE 1997 I N T E R N A T I O N A L

    Les destructions de maisons palestinienness’accélèrent dans les territoires occupés

    Un institut israélien de défense des droits de l’homme dénonce la politique de M. Nétanyahou

    Nouvelles constructionsdans les colonies juives

    Le premier ministre israélienBenyamin Nétanyahou a an-noncé, mercredi 24 septembre,la prochaine construction detrois cents logements dans lacolonie d’Efrat près de Beth-léem en Cisjordanie. « Noussommes en train de construire enJudée et Samarie », a-t-il indiquéà des étudiants religieux decette colonie. Le porte-paroledu département d’Etat améri-cain, qui souhaite un gel de lacolonisation, a aussitôt jugé quece projet n’est pas « compa-tible » avec la reprise des négo-ciations israélo-palestiniennes.– (AFP.)

    Alors que le premier ministre israélien a annon-cé, mercredi 24 septembre, la construction denouveaux logements dans une colonie juive de

    Cisjordanie, l’institut israélien de défense desdroits de l’homme Betselem a rendu public unrapport sur la politique de démolition de mai-

    sons palestiniennes par Israël dans les territoiresoccupés. Il souligne que la relance de ces des-tructions alimente le terrorisme.

    JÉRUSALEMde notre correspondant

    « Discrimination, asphyxie, dé-possession, démolition. » Tellessont, selon Betselem, le principalinstitut israélien de défense desdroits de l’homme, « lesconstantes de la politique israé-lienne » à l’encontre des Palesti-niens des territoires occupés. Sanscompter les destructions interve-nues dans la partie arabe occupéede Jérusalem ni « les centaines dedynamitages punitifs de maisonsabritant les familles de ceux qui ontcommis des actes terroristes contreIsraël, explique Eitan Felner, di-recteur de l’institut, au moins millehuit cents logements ont été dé-truits par l’armée pour raisons “ad-ministratives” depuis dix ans ».« Au moins dix mille personnes » sesont retrouvées sans abri, fournis-sant aux extrémistes islamistes« un vaste réservoir de kamikazespotentiels ».

    Le phénomène n’est « pas nou-veau » , remarquait, mercredi24 septembre, M. Felner en pré-sentant à la presse son rapport in-titulé « Démolir la paix ». Il s’était

    passablement ralenti sous le gou-vernement travailliste, mais, de-puis le retour au pouvoir du Li-koud et de ses alliés religieux, lavalse des bulldozers et de la dyna-mite a repris de plus belle : 140 lo-gements démolis en 1996 (contre

    43 en 1995), 110 maisons déjà ra-sées depuis le début de cette an-née et « 750 autres à venir »puisque tel est le nombre de fa-milles qui ont, à ce jour, reçu unavis de démolition.

    Officiellement, ces destructions,« légitimées par la Cour suprêmed’Israël qui se conduit trop souventcomme une branche législative del’appareil répressif d’occupation »,sont décidées parce que lesdits lo-gements ont été édifiés sans per-mis de construire. Betselem necontredit pas ce fait, mais rappellequ’« il est pratiquement impossiblepour une famille palestinienne pro-priétaire d’un terrain d’obtenir despermis de construire ». En re-vanche, « les milliers de logementsconstruits sans permis par les co-lons dans les territoires occupés fi-nissent toujours par être légalisés ».

    UNE « ORDONNANCE DE 1942 »La « machine bureaucratique »,

    écrivent les auteurs du rapport,« s’appuie notamment sur une or-donnance militaire britannique da-tant de 1942 ». Pratiquement, cetexte « permet à l’armée de faire

    exactement ce qu’elle veut ».Toutes les terres domaniales deCisjordanie, qui appartenaientsouvent et collectivement aux vil-lages agricoles et servaient de pâ-turages aux fermiers palestiniens,sont devenues « terres d’Etat » àla disposition de la force oc-cupante.

    Plus grave, les propriétaires ter-riens palestiniens qui n’avaientpas pris soin, avant la conquête de1967 par Israël, de faire enregis-trer leurs terrains auprès de l’au-torité jordanienne d’alors n’ontplus, aujourd’hui, la possibilité derégulariser leur situation. Israël acertes hérité des registres officielslaissés par la Jordanie, mais,comme l’affirme Betselem, ceux-ci ont été immédiatement « ge-lés » en l’état. Ainsi de nombreuxpropriétaires de terres confis-quées n’ont-ils jamais pu faire re-connaître par les tribunaux israé-liens des titres de propriétéremontant parfois à la période ot-tomane qui a précédé l’occupa-tion britannique.

    Patrice Claude

  • LeMonde Job: WMQ2609--0005-0 WAS LMQ2609-5 Op.: XX Rev.: 25-09-97 T.: 11:11 S.: 111,06-Cmp.:25,12, Base : LMQPAG 14Fap:99 No:0423 Lcp: 196 CMYK

    I N T E R N A T I O N A L LE MONDE / VENDREDI 26 SEPTEMBRE 1997 / 5

    Plus de 6 000 personnes ont été tuéesen huit mois au Rwanda, selon Amnesty International

    AU MOINS six mille personnes,en majorité des civils désarmés, ontété tuées au Rwanda entre janvieret août 1997, selon un rapport pu-blié, jeudi 25 septembre, par Am-nesty International, qui déplore le« silence » de la communauté inter-nationale. « Beaucoup de mortsn’étant pas signalées, le bilan réelpourrait être considérablement plusélevé », ajoute l’organisation de dé-fense des droits de l’homme baséeà Londres. « Nombre de gouverne-ments continuent de croire que lesréfugiés peuvent retourner au Rwan-da en sécurité, ce n’est pas vrai »,ajoute Amnesty qui, dans un pré-cédent document publié le 7 août,affirmait qu’au moins 2 300 civilsavaient été tués en mai, juin et juil-let.

    Dans ce nouveau rapport, l’orga-nisation dénonce des « massacres

    de civils et autres meurtres commispar des soldats de l’Armée patrio-tique rwandaise (APR), des tueriesdélibérées menées par des groupesd’opposition armée, des arrestationsarbitraires et des mauvais traite-ments infligés aux prisonniers dansdes centres de détention surpeu-plés ». Amnesty International re-lève que « plusieurs gouvernements,tels ceux des Etats-Unis et d’Afriquedu Sud, ont fourni au Rwanda équi-pements ou entraînements militairesen 1996 et 1997 sans considérationpour les agissements des forces de sé-curité rwandaises en matière de (...)droits de l’homme ».

    D’autres informations, poursuitl’organisation, font état de la four-niture illégale d’armes et de muni-tion aux groupes d’opposition ar-mée via la Républiquedémocratique du Congo (ex-Zaïre).

    « La communauté internationale aencore permis à la mort de devenirune banalité au Rwanda », déploreAmnesty, en appelant les « Etats-Unis et les autres gouvernements in-fluents à dénoncer publiquement lestueries continues et exiger qu’il soitmis fin aux violences contre les civilsdésarmés ».

    Des régions entières, « en parti-culier le Nord-Ouest, sont pratique-ment inaccessibles, en raison de l’in-sécurité », rendant très rares lesinformations indépendantes enprovenance de ces zones, poursuitle rapport. « Des réfugiés rapatriésde force au Rwanda depuis des paysvoisins sont parmi les victimes,ajoute Amnesty, et aucun gouver-nement ne devrait renvoyer de forcedes réfugiés au Rwanda, et qui-conque le fait doit être conscient desconséquences. » – (AFP.)

    Français et Américains amorcentun dialogue sur la crise algérienne

    NEW YORK (Nations unies)de notre correspondante

    Silencieux en public sur l’Algérie,le ministre français des affairesétrangères a néanmoins consacréune bonne partie de son séjour àNew York à cette question. En ren-dant compte de l’entretien, mercre-di 24 septembre, entre Hubert Vé-drine et son homologue américainMadeleine Albright, le porte-paroledu département d’Etat a annoncéque les deux ministres sont conve-nus de consacrer davantage d’ef-forts à la crise algérienne : « Ils sontd’accord sur le fait que l’Algérie estun sujet sur lequel la France et lesEtats-Unis pourraient amorcer undialogue de fond », a indiqué JamesRubin. Selon lui, « sans entrer dansle détail » des options pour uneéventuelle action commune, « ilsont discuté pour savoir s’ils pouvaientfaire quelque chose de précis ».

    Que des démarches définiessoient décidées ou non, il est désor-mais évident que la pression montepour une internationalisation duconflit algérien, et ce pour la pre-mière fois depuis cinq ans. Selon undiplomate de haut rang du départe-ment d’Etat, les Etats-Unis ne de-vraient pas jouer un « rôle direct »en Algérie. « La question algérienneest une affaire intérieure », dit-il, enajoutant aussitôt : « Cela ne veut pasdire que la communauté internatio-nale n’a pas de responsabilités. »Quant au rôle éventuel de l’ONUdans ce pays, il explique : « En règlegénérale, l’internationalisation desconflits profite plutôt aux insurgés.Nous comprenons que le gouverne-ment d’Alger refuse d’être traité de lamême façon que l’opposition. »

    Sur la possibilité d’enquêtes indé-pendantes sur les massacres, le di-

    plomate américain répond : « Je nepeux pas écarter cette idée. » Enfin,interrogé sur le fait que l’ambassa-deur sortant des Etats-Unis en Al-gérie, Robert Neumann, a récem-ment soutenu l’action dugouvernement algérien en se pro-nonçant pour « les mesures mili-taires compatibles avec un Etat dedroit pour protéger les civils », il priede « faire plus attention auxnuances » des propos diploma-tiques : « Ces déclarations peuventêtre lues d’une autre manière »,dit-il.

    LA PRESSION S’ACCENTUEEtonnant pour les médias qui

    considèrent l’Algérie comme un su-jet brûlant de cette Assemblée gé-nérale, le silence du ministre fran-çais des affaires étrangères est« absolument compréhensible » pourses homologues et les diplomates :« Que voulez-vous exactement que leministre français dise sur l’Algé-rie ? », indique un ministre arabedes affaires étrangères qui admetcependant que la pression s’accen-tue sur les Occidentaux, « surtout lesEuropéens ». « La peur de la reprisedes attentats en France n’est pas né-gligeable », estime un diplomate qui« comprend tout à fait » la positiondélicate du gouvernement français.Quant à la presse, l’unique questionqui est évoquée lors des rencontresquotidiennes avec M. Védrine, c’estl’Algérie.

    Par ailleurs, à l’image de cettenouvelle Assemblée générale del’ONU, l’intervention officielle duministre français à la tribune était,mercredi 24 septembre, sans pas-sion et sans grande initiative. Dansle nouvel esprit de « dépassionnali-sation » des relations franco-améri-

    caines, le chef de la diplomatie fran-çaise s’est défendu, contrairement àla plupart de ses homologues, decritiquer ouvertement Washingtonpour sa dette envers l’ONU. « Cequi est dû à l’ONU doit être payé entotalité, à temps, et sans condition »,a-t-il dit. Quant à la réforme duConseil de sécurité, la France a,pour la première fois, précisé claire-ment sa position. Expliquant que lacomposition actuelle du Conseil desécurité « ne reflète plus qu’impar-faitement la géographie politique dumonde actuel », M. Védrine s’estprononcé pour l’entrée de l’Alle-magne et du Japon en tant quemembres permanents, mais aussi,a-t-il ajouté, trois pays du Sud. Pa-ris, contrairement à Washington,est également en faveur de siègesnon permanents supplémentairesau sein d’un Conseil élargi.

    L’essentiel du discours de M. Vé-drine a été axé sur l’avenir de l’or-ganisation. Il l’a encouragée à don-ner un rôle plus grand aux acteursrégionaux pour le règlement desconflits. A propos de la Bosnie, il adéclaré que la construction « d’unEtat doté d’institutions démocra-tiques et viables reste encore très in-certaine dans ce pays ». Devant lesmédias, il a prôné la fermeté à l’en-contre des principaux responsablesde crimes de guerre en Bosnie : « Ilfaut faire ce qu’il faut pour que lescriminels aient à rendre compte deleurs actes devant le tribunal deLa Haye. » Par contre, sur la créa-tion d’un tribunal pénal internatio-nal et permanent, les propos deM. Védrine ont été jugés « trèstièdes » par les organisations desdroits de l’homme.

    Afsané Bassir Pour

    Paris accusé de mener un « double jeu »Le secrétaire général de l’Organisation nationale des moudja-

    hidine (ONM) – les anciens combattants –, Mohamed Chérif Ab-bas, un proche du président Zéroual, a estimé que la France joue« un double jeu » avec l’Algérie. Dans un entretien à un quotidienégyptien, dont Le Moudjahid, le quotidien gouvernemental algé-rien, se fait l’écho, jeudi 25 septembre, M. Chérif Abbas assureque « les groupes terroristes collectent des fonds, se déplacent entoute lilberté et tiennent même des conférences de presse » enFrance. L’ONM est l’un des principaux groupes de pression algé-rien.

    En Algérie, une alliance se dessine entre la branche militaire du FIS et l’arméeL’arrêt des combats annoncé, mercredi 24 septembre, par l’AIS pourrait permettre de réduire les Groupes islamiques armés (GIA).

    Le camp du président Zeroual sort affaibli de cet accord entre les généraux et les combattants islamiquesL’arrêt des combats, ordonné dimanche21 septembre, par Madani Mezrag, lechef de l’Armée islamique du salut(AIS), la branche armée du FIS, est ac-cueilli par un mélange de satisfaction et

    de scepticisme par la presse algérienne.« La portée attendue de cet appel serasans doute de faire basculer les réseauxde soutien du GIA, anciennement mili-tants ou sympatisants du FIS », écrit,

    jeudi 25 septembre, El Watan , quiajoute : « Ce communiqué rend caducsles appels d’internationalisation, reprisà la faveur du massacre de Bentalha, etrecentre la crise que vit le pays sur la

    scène nationale ». De son côté, Libertés’interroge : « Quelle contrepartie Ma-dani Mezrag a-t-il obtenu pour sestroupes ? », tandis que La Tribune, aprèsune appréciation positive de l’accord,

    ajoute que le geste du chef de l’AISpeut « laisser une marge importante aupessimisme [car il suggère] un rappro-chement bien équivoque entre le pou-voir et les islamistes ».

    L’ORDRE donné dimanche21 septembre et rendu public mer-credi par Madani Mezrag, l’« émirnational » de l’Armée islamique dusalut (AIS), la branche militaire del’ex-Front islamique du salut (FIS),de cesser les combats à partir du1er octobre, va-t-il être suivi d’ef-fet ? A vrai dire, une trêve de factoexiste déjà dans certaines régions.Sur la corniche kabyle de Jijel,comme dans toute cette région Est,les affrontements ont cessé depuisplus de deux mois. Les combat-tants de l’AIS et les militaires s’ob-servent, chacun campant sur sespositions. « On peut voir les soldatsde l’AIS jouer paisiblement au foot-ball, raconte un habitant de la ré-gion. Ils ont planté un drapeaublanc. Les militaires n’inquiètentplus les gens qui leur donnent àmanger, au contraire, ils les encou-ragent à le faire. Dans certaineszones, ce sont les militaires eux-mêmes qui leur apportent le ravitail-lement. Mais en règle générale, ilsévitent le contact. Chacun reste danssa zone et évite d’aller chez l’autre.La population retrouve peu à peu sa

    sérénité. » C’est dans cette régionde Jijel que sont nés les premiersmaquis islamistes au lendemain del’interruption des élections législa-tives en janvier 1992. Pour en venirà bout, l’armée n’aurait pas hésité,selon certaines sources, à avoir re-cours au napalm. C’est égalementdans cette même zone de Jijelqu’ont commencé les affronte-ments entre l’AIS et les Groupes is-lamques armés (GIA). Une partiesanglante qui s’est terminée en fa-veur de l’AIS dont les troupes bé-néficiaient de l’appui de la popula-tion locale.

    Si la trêve est respectée sans dif-ficulté à Jijel, dans d’autres régions,en proie elles aussi à des troubles,elle aurait davantage de mal à s’im-poser. Dans la région d’Annaba,non loin de la frontière algéro-tu-nisienne, l’« émir » local – qui n’estautre que le frère de Rabah Kebir,le président de l’instance exécutivedu FIS à l’étranger – aurait émisdes réserves. Dans l’Oranais, autrebastion de l’AIS, l’arrêt unilatéraldes combats ordonné par MadaniMezrag se heurterait également àl’opposition de certains chefs lo-caux.

    Dans l’Algérois, la situation estdifférente. L’AIS y est, semble-t-il,moins bien implantée que le GIAet, de ce fait, l’arrêt des combatss’annonce moins spectaculaire.Mais il n’est pas exclu que le ré-gime s’appuie sur les troupes del’AIS pour tenter de venir à boutdes combattants du GIA.

    « EN CAS DE DÉMISSION »Quoi qu’il en soit, les militaires

    ont d’ores et déjà des motifs de sa-tisfaction. Adversaires résolus desislamistes, ils les ont considérable-ment affaiblis en obtenant de leurchef militaire un arrêt unilatéraldes combats. Entre les dirigeantspolitiques du FIS et son bras arméde l’AIS, le fossé s’est par ailleurscreusé.

    Mais le clan des militaires – sym-bolisé par le chef de la sécurité mi-litaire, le général Tewfik Médiène,et le chef d’état-major, MohamedLamari – a également marqué unpoint sur le président Zéroual, unhomme placé par eux à la tête dupays. Accusés, lui et son entourage,de vouloir trop s’émanciper, le chefde l’Etat doit prendre acte d’un ac-cord avec l’AIS auquel il n’a pas étéassocié.

    La volonté de la hiérarchie mili-taire d’affaiblir le président Ze-roual est manifeste. Elle pourraitexpliquer l’inaction des forces desécurité lors des derniers mas-sacres commis dans la Mitidja, ausud d’Alger. Car si l’armée ou lagendarmerie n’ont pas coutumed’intervenir en pareil cas, les ser-vices disposent dans une caserneimplantée à Châteauneuf, sur leshauteurs d’Alger, de plusieurs cen-taines d’hommes entraînés et équi-pés pour ce type de missions.Qu’ils n’aient rien tenté ne serait-

    ce que pour retrouver certains desassaillants – GIA, miliciens... – ali-mente les rumeurs les plus follessur l’identité des tueurs. L’imagedu pouvoir officiel n’en sort pasgrandie.

    Lorsque le gouverneur duGrand-Alger est venu rendre visiteaux rescapés de Bentalha (252morts selon le journal El Watan dejeudi), il s’est fait huer. « Vous nousavez abandonnés », a crié la foule.Quant à Mahfoud Nahnah, le chefdes islamistes « modérés » (dont leparti, le MSP, est représenté augouvernement), il s’est fait insulter.« Je vais voir Zeroual de ce pas », a-t-il lancé avant de quitter les lieux.

    Les militaires vont-ils dans lafoulée chercher à se débarrasser endouceur du président Zeroual ? Le23 octobre, des élections commu-nales et régionales auront lieu en

    Algérie, clôturant un processus dereplâtrage démocratique entamépar l’élection du président de laRépublique au suffrage universel.Les futurs élus locaux désignerontà leur tour certains des membresdu conseil de la nation, une sortede Sénat mais doté de plus de pou-voirs que l’Assemblée nationale.

    Or, le président de ce conseil serale deuxième personnage de l’Etat.« En cas de démission » du pré-sident de la République, prévoit laConstitution, c’est à lui que revientla charge du pays. Les militairesimposeront-ils un homme à eux ?Ou le président Zeroual parvien-dra-t-il à placer un de ses fidèles ?Ce choix éclairera, pour unegrande part, les luttes à la tête durégime algérien.

    Jean-Pierre Tuquoi

  • LeMonde Job: WMQ2609--0006-0 WAS LMQ2609-6 Op.: XX Rev.: 25-09-97 T.: 11:14 S.: 111,06-Cmp.:25,12, Base : LMQPAG 14Fap:99 No:0424 Lcp: 196 CMYK

    UN BUDGET, ça doit bien sûrêtre équilibré, rigoureux, sincère,efficace, et favoriser la croissance.Un budget de gauche, ça doitnaturellement être juste, discrète-

    ment « eurocompatible », favori-ser les salariés et les moins privi-légiés. Un budget jospiniste, çadoit en plus être expliqué demanière « déstressante », sans« hystériser la présentation ». Lesoir, pas trop de télés pour ne pas« surmédiatiser ». Le reste dutemps, laisser toute sa place àl’opposition, puisque, contraire-ment à ce que colporte la rumeur,« le gouvernement n’a pas un egodémesuré ». Les consignes avaientété largement diffusées au sein dugouvernement. Qu’on se le dise :l’heure est à la « pratique anti-pil-hanienne » de la communication.

    C’est aussi ça, le changement :1997 doit être l’anti-1996. Et Jos-pin l’anti-Juppé. Bien sûr, le céré-

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    F R A N C ELE MONDE / VENDREDI 26 SEPTEMBRE 1997

    Jacques Chirac « met en garde »Lionel Jospin sur la défense

    APRÈS avoir tracé, à deux re-prises, le cadre de ses « droits » et« devoirs » de président de la Ré-publique cohabitant, le 7 juin àLille et le 14 juillet à l’Elysée,Jacques Chirac a saisi l’occasion dedeux conseils des ministres, le20 août et le 24 septembre, pouraffiner sa critique de l’action gou-vernementale.

    Alors que son « dernier mot »– notion que lui conteste LionelJospin – était attendu, fin août, surla réduction des crédits d’investis-sement des armées envisagée parle gouvernement, M. Chirac avaitpréféré porter le fer contre le pro-jet de Martine Aubry pour l’em-ploi des jeunes. Cette critique feu-trée a trouvé son prolongementdevant l’opinion publique, le22 septembre, à Troyes, quand lechef de l’Etat a laissé entendre quele plan du ministre de l’emploi est« fallacieux » (Le Monde du 24 sep-tembre).

    Mercredi 24 septembre,M. Chirac a pris la parole aprèsM. Jospin pour adresser au gou-vernement « une recommandationet une mise en garde », dont la te-neur a été rendue publique parCatherine Colonna, porte-parolede l’Elysée. La présentation duprojet de loi de finances pour 1998achevée, le président de la Répu-blique a déclaré : « Je comprendsque le gouvernement a fait sienl’objectif des 3 % pour être au ren-dez-vous de la monnaie unique en1998. Je ne peux que m’en féliciter. »Le gouvernement, a-t-il ajouté, apris « ses responsabilités » et fait« ses choix » ; il est aisé decomprendre que ce ne sont pasceux du président.

    Pour preuve, sa recommanda-tion sur la famille, « repère le plussolide » dans la société, « richessede notre communauté nationale »,« élément essentiel de la cohésionsociale ». Face à « certaines me-sures » restrictives sur les alloca-tions familiales et les aides à do-micile, M. Chirac exprime soninquiétude. « Je souhaite, dit-il,que le gouvernement apprécie bienles conséquences que pourraientavoir de nouvelles décisions suscep-tibles d’aggraver la situation des fa-milles. »

    Le chef de l’Etat est passé en-suite à la défense, en sa qualité dechef des armées qui s’était porté« personnellement garant » du res-pect de la loi de programmationmilitaire. Artisan de la réforme dela défense, en février 1996, il nelaissera pas mettre en cause l’unde ses « trois piliers indissociables »– sa professionnalisation, la mo-dernisation de son équipement etla restructuration de son indus-trie –, car « la communauté mili-taire (...) le ressentirait très dure-ment ». En vertu de quoi, ildemande au gouvernement defaire en sorte que les réductionsde crédits « revêtent un caractèreexceptionnel et ne portent donc quesur l’année 1998 ».

    « S’il en était autrement, c’estl’efficacité même des armées et lacohérence de notre politique de dé-fense qui seraient gravementcompromises, ce qui porterait at-teinte à la place, à l’influence et auxintérêts de la France en Europe etdans le monde », a conclu le chefde l’Etat.

    Olivier Biffaud

    « Il n’y a pas que l’argent dans la vie ! »

    RÉCITLe gouvernement veutprésenter son budget« de manière déstressante »

    monial budgétaire a ses étapesobligées. Il commence par leconseil des ministres. DominiqueStrauss-Kahn prend la parole lepremier. Le ministre de l’écono-mie donne la « touche » supplé-mentaire à la méthode globale :« DSK », c’est la pédagogie enplus. Christian Sautter, secrétaired’Etat au budget, lui succèdecomme son ombre. Lionel Jospinfait la synthèse, élargit, et a ledernier mot. Le dernier ? Pas toutà fait. Un jour comme celui-là,Jacques Chirac ne veut pas restermuet : « Aujourd’hui, dit-il, je sou-haite faire une recommandation etune mise en garde. » En toutesérénité.

    A midi, déjeuner léger à Bercy.Autour de plateaux-repas – il nefaut pas choquer les fameusesclasses moyennes –, DSK et Chris-tian Sautter expliquent leur projetà quelques journalistes spéciali-sés. Puis, en dépit de ce qu’un col-laborateur appelle un « jet lagentre les oreilles » – le décalagehoraire à son retour de Hong-kong, mardi –, les deux ministress’en vont présenter leur texte à lacommission des finances del’Assemblée nationale. A nou-veau, « DSK » déploie sa cour-toise pédagogie, s’adresse àl’opposition davantage que ne lerequiert le simple intérêt poli-tique, au point que PhilippeAuberger, porte-parole du groupeRPR, félicite les deux ministressocialistes pour « leur ton plusmesuré qu’avant l’été ».

    « ON PEUT DÉBATTRE »Jacques Barrot, ancien ministre

    centriste des affaires sociales,confirme, dans les couloirs duPalais-Bourbon : « C’est beaucoupplus calme qu’au mois de juillet. Onpeut débattre, maintenant. » Etlorsque Pierre Méhaignerieconteste un point technique dudossier transmis aux députés,DSK accepte sans barguignerd’envisager une « erreur de sesservices ». Du coup, personne nese formalise de ce que l’emploi dutemps des ministres ne leur per-mette pas de répondre, cetteannée, à davantage de questions.

    Pas touché par le nouveau cli-mat, Nicolas Sarkozy ignore laréunion de la commission, maispas les journalistes. Pendant que

    ses collègues planchent, l’épauledélicatement éclaboussée d’unrayon de soleil dans les jardins del’hôtel de Lassay, il s’adresse,devant les caméras, aux « télé-spectatrices », devant les micros,aux « auditrices », et, une foisceux-ci éteints, aux journalistesféminines, pour leur expliquerqu’elles sont les « cœurs de cible »de ce nouveau budget, qu’ellesvont être spoliées et renvoyéespar leurs maris dans leurs foyerspar la faute de la politique fami-liale du gouvernement. Les« cœurs de cible » en ont des fris-sons dans le dos.

    Cool. Les alliés pluriels sont audiapason et applaudissent sans sefaire prier. Mercredi, la majorité« plurielle », saisie par un état degrâce automnale, a perdu sa ner-vosité. En commission, lecommuniste Jean Tardito, de sonaccent chantant, rassure genti-ment Augustin Bonrepaux, porte-parole du groupe socialiste, quiregrette certaines « timidités » dubudget : « Nous aiderons le gou-vernement à les vaincre. » AlainBocquet, président du groupecommuniste, ne se montre pas. Legroupe des Radicaux, Citoyens etVerts (RCV) baisse d’un ton.Henri Emmanuelli, président (PS)de la commission des finances,d’ordinaire plus sévère, concède :« Le gouvernement fait un premiereffort et je comprends qu’il n’aitpas voulu brusquer les choses. »Même Julien Dray (PS, Essonne)se refuse à briser cette harmonie :« Je n’ai pas eu le temps de lire [lebudget]. Je n’en pense rien. » Toutjuste quelques défenseurs d’inté-rêts particuliers s’inquiètent-ils,qui de la retraite des agriculteurs(Michel Suchod, RCV, Dordogne),qui de la construction navalecivile après la suppression desquirats (Jean-Marc Ayrault, PS,Loire-Atlantique).

    L’opposition, malgré tout, sesouvient qu’elle doit s’opposer.Après le solo de Nicolas Sarkozy,elle déclenche « l’opération réac-tions », mais en service minimum.Le RPR Philippe Auberger douteque le gouvernement parvienne àrespecter les critères de conver-gence. Le l ibéral Françoisd’Aubert affirme que les nou-veaux prélèvements dépassent les70 milliards de francs. Le centriste

    Pierre Méhaignerie assure que« trop d’astuces tuent l’astuce »,mais son ami Jacques Barrot, quia flairé l’air du temps, préfère« creuser les choses » plutôt quede « se lancer à la figure les petitesastuces ». Cool...

    LEÇON DE GRAMMAIREIls répètent l’exercice au Sénat.

    Comme le temps presse, on pro-met aux sénateurs de renouvelerl’exercice. Retour à Bercy. Tou-jours inséparables, les deuxministres dispensent leur ensei-gnement aux élèves journalistes– parmi lesquels l’épouse de DSK,Anne Sinclair –, aux banquiers,chefs d’entreprise et ambassa-deurs qui se pressent dansl’« amphi Mendès-France ».D’abord, l’inévitable leçon degrammaire jospinienne : le res-pect des engagements, la vérité, ladurée, la délibération collective,etc. Peu de sourires. On ne semoque pas de l’ancienne majo-rité, et à peine de Martine Aubry.

    Puis, graphiques animés surécran géant à l’appui – une révo-lution à Bercy... –, les détails tech-niques : trois orientations ; quatrepoints ; cinq mesures. Non, il nes’agit pas d’