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A- Médias et guerre du Vietnam Jalon n°5 : Information et propagande en temps de guerre, les médias et la guerre du Vietnam PB : Comment les médias ont-ils été instrumentalisés pendant la guerre du Vietnam ? Mais au Vietnam, dès le départ les médias devaient obtenir une accréditation et un véritable ministère de l’Info local fut mis en place (JUSPAO : Joint United States Public Affairs Office) chargé de fournir les infos officielles à la presse qui seraient relayées aux familles américaines le soir. Au début, les médias américains subissaient la censure de Washington et de l’armée. Au début : pas de remise en question C’est la Guerre froide : « le bien contre le mal », objectif : détruire l’autre, l’armée se bat pour défendre l’ « American way of life » ; lorsque Johnson implique l’armée de terre en 1965 à l’apogée de la puissance américaine, personne ne remet en cause les EU. L’objectif est d’asphyxier le FNL (Front de Libération Nationale) au sud et pilonner le Nord dans la tactique du « containment » et de la théorie des dominos qui peut toucher l’Asie du sud. Parmi les nombreux journalistes présents (600 en 1968), une minorité couvrait les combats (80) ; du fait de la nature des combats (guérilla), les combattants du Viêt-Cong (communistes) apparaissent peu. C’est la 1 ère guerre filmée en continu dont les images sont diffusées le soir au JT (CBS). Pour la première fois dans l'histoire, grâce aux nouvelles techniques de communications, la guerre entre chez les gens par l'intermédiaire de la télévision. On l'appelle même « The living room war », " la guerre des salons ". Aux Etats-Unis, en 1960, 95.7 millions de foyers possédaient un poste de télévision, soit 52% de la population de l'époque et en 1968, 98% des foyers en étaient équipés. La guerre est rendue compte alors par des journalistes qui sont localisés en villes mais pas dans la jungle ; de plus les ils s’intéressent surtout aux GI (soldats américains), le conflit et le sort des Vietnamiens ne les intéressent pas tant la lutte contre le communisme semblait légitime. Les journalistes insistent surtout non pas sur l’instrument politique de la guerre mais sur le fait que c’est un terrain d’action humaine : « nous, notre… », guerre virile…mais les victimes n’ont pas de noms, on ne les montre pas. Les images arrivent en différée et sont présentées aux Américains le soir avec des présentateurs comme Walter Cronkite. Tournant avec l’offensive du Têt : une 42 e de villes sont attaquées par le Viêt-Cong, dont Saigon ; le conflit est porté en villes, nouvelles images de la guerre. Les journaliste assistent à des scènes de guérillas : choc ; ils suivent les soldats lors des combats, beaucoup de clichés. Sentiment d’absurdité de la guerre, images sur les dégâts physiques et psycho se multiplient et on assiste à un retournement de l’opinion publique. Pendant le conflit vietnamien les téléspectateurs assistent à des reportages sur les bombardements, les patrouilles, voire les combats rapprochés. Des images de carnages franchissent l’océan pour se répandre dans les foyers à l’heure de grande écoute du « prime-time ». De cette version télévisée de la guerre, Lyndon Johnson dira en 1968 qu’elle a installé le défaitisme chez les Américains https://www.youtube.com/watch?v=Dn2RjahTi3M : Le président Lyndon Johnson aurait même dit à la suite de cet éditorial : « Si j'ai perdu Cronkite, j'ai perdu l'Amérique », autrement dit, si Cronkite ne le suit pas, l'Amérique ne suivra pas non plus Plus tard, le bilan de cette offensive montrera qu’elle avait mis le FNL à genoux, ayant perdu la majorité de ses hommes, la quasi-totalité de son encadrement ainsi que la confiance de la majorité de la population, terrifiée par les exactions commises pendant les combats. Mais c’était trop tard. Le 27 février 1968, l’éditorialiste de CBS, Walter Cronkite, de retour de Hué, appelle à l’ouverture de négociations. Le général Westmoreland est limogé, le président Lyndon Johnson annonce qu’il ne se représentera pas. Les Américains ont perdu la guerre. Dans leur salon, les Américains sont convaincus que leurs soldats participent à une guerre civile où ils n'ont rien à faire. L'exécution sommaire à Saïgon d'un prisonnier Vietcong par le chef de la police du Sud (sujet d'une célèbre photo d'Eddie Adams) finit d'horrifier. De

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A- Médias et guerre du Vietnam

Jalon n°5 : Information et propagande en temps de guerre, les médias et la guerre du Vietnam

PB : Comment les médias ont-ils été instrumentalisés pendant la guerre du Vietnam ?

Mais au Vietnam, dès le départ les médias devaient obtenir une accréditation et un véritable ministère de l’Info local

fut mis en place (JUSPAO : Joint United States Public Affairs Office) chargé de fournir les infos officielles à la presse qui

seraient relayées aux familles américaines le soir. Au début, les médias américains subissaient la censure de Washington

et de l’armée.

Au début : pas de remise en question

C’est la Guerre froide : « le bien contre le mal », objectif : détruire l’autre, l’armée se bat pour défendre l’ « American

way of life » ; lorsque Johnson implique l’armée de terre en 1965 à l’apogée de la puissance américaine, personne ne

remet en cause les EU. L’objectif est d’asphyxier le FNL (Front de Libération Nationale) au sud et pilonner le Nord dans la

tactique du « containment » et de la théorie des dominos qui peut toucher l’Asie du sud. Parmi les nombreux

journalistes présents (600 en 1968), une minorité couvrait les combats (80) ; du fait de la nature des combats (guérilla),

les combattants du Viêt-Cong (communistes) apparaissent peu.

C’est la 1ère guerre filmée en continu dont les images sont diffusées le soir au JT (CBS). Pour la première fois dans

l'histoire, grâce aux nouvelles techniques de communications, la guerre entre chez les gens par l'intermédiaire de la

télévision. On l'appelle même « The living room war », " la guerre des salons ". Aux Etats-Unis, en 1960, 95.7 millions de

foyers possédaient un poste de télévision, soit 52% de la population de l'époque et en 1968, 98% des foyers en étaient

équipés.

La guerre est rendue compte alors par des journalistes qui sont localisés en villes mais pas dans la jungle ; de plus les ils

s’intéressent surtout aux GI (soldats américains), le conflit et le sort des Vietnamiens ne les intéressent pas tant la lutte

contre le communisme semblait légitime. Les journalistes insistent surtout non pas sur l’instrument politique de la

guerre mais sur le fait que c’est un terrain d’action humaine : « nous, notre… », guerre virile…mais les victimes n’ont pas

de noms, on ne les montre pas.

Les images arrivent en différée et sont présentées aux Américains le soir avec des présentateurs comme Walter

Cronkite.

Tournant avec l’offensive du Têt : une 42e de villes sont attaquées par le Viêt-Cong, dont Saigon ; le conflit est porté en

villes, nouvelles images de la guerre. Les journaliste assistent à des scènes de guérillas : choc ; ils suivent les soldats lors

des combats, beaucoup de clichés. Sentiment d’absurdité de la guerre, images sur les dégâts physiques et psycho se

multiplient et on assiste à un retournement de l’opinion publique. Pendant le conflit vietnamien les téléspectateurs

assistent à des reportages sur les bombardements, les patrouilles, voire les combats rapprochés. Des images de

carnages franchissent l’océan pour se répandre dans les foyers à l’heure de grande écoute du « prime-time ». De cette

version télévisée de la guerre, Lyndon Johnson dira en 1968 qu’elle a installé le défaitisme chez les Américains

https://www.youtube.com/watch?v=Dn2RjahTi3M: Le président Lyndon Johnson aurait même dit à la suite de cet

éditorial : « Si j'ai perdu Cronkite, j'ai perdu l'Amérique », autrement dit, si Cronkite ne le suit pas, l'Amérique ne suivra

pas non plus

Plus tard, le bilan de cette offensive montrera qu’elle avait mis le FNL à genoux, ayant perdu la majorité de ses hommes,

la quasi-totalité de son encadrement ainsi que la confiance de la majorité de la population, terrifiée par les exactions

commises pendant les combats. Mais c’était trop tard. Le 27 février 1968, l’éditorialiste de CBS, Walter Cronkite, de

retour de Hué, appelle à l’ouverture de négociations. Le général Westmoreland est limogé, le président Lyndon Johnson

annonce qu’il ne se représentera pas. Les Américains ont perdu la guerre. Dans leur salon, les Américains sont

convaincus que leurs soldats participent à une guerre civile où ils n'ont rien à faire. L'exécution sommaire à Saïgon d'un

prisonnier Vietcong par le chef de la police du Sud (sujet d'une célèbre photo d'Eddie Adams) finit d'horrifier. De

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surcroît, à Hué, le taux des pertes de certaines unités américaines atteint 70 % : le même que celui des Français à

Verdun...

Des analyses différentes aujourd’hui.

Certains évoquent le fait que les journalistes ont exprimé leurs propres craintes.

D’autres comme le général Robert Scales, théoricien des combats urbains, rapporte cet adage : "Si ça saigne, ça baigne",

attribué aux médias, accusés d'avoir trahi l'Amérique pour faire de l'audience. "Vietnam, la trahison des médias", un

documentaire de Patrick Barbéris.

Certains évoquent la manipulation des journalistes par GIAP pour en faire des idiots utiles, image prime sur l’info.

Conclusion :

Les images ont un rôle dans les conflits même si elles ne font pas l’histoire.

Après la Guerre du Vietnam, le contrôle de l’information en temps de guerre est renforcé.

Au cours de la 1Guerre du Golfe en 1990-1991, seuls les médias américains sont autorisés à suivre l’armée américaine à

l’instar de la CNN. Les armées deviennent la principale source de diffusion des images, comme en 2001 ou 2003.

Aujourd’hui avec les NTIC, il est plus difficile de contrôler l’information : les réseaux sociaux sont souvent les seules

sources sur le terrain, les populations civiles n’hésitent plus à témoigner et montrer ce qu’il se passe et évitant la

censure : ex la Guerre de Syrie. Mais sont-ils vraiment sûrs ?