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Du même auteur La Mémoire tatouée, Denoël, Lettres Nouvelles, 1971; collection 10/18, 1979 La Blessure du nom propre, Denoël, Lettres nouvelles, Paris, 1974. Vomito blanco (Le sionisme et la conscience malheureuse), collection 10/18, 1974. Le Lutteur de classe à la manière taoïste (poème), Sindbad, 1976. Le Prophète voilé (théâtre), L'Harmattan, 1979. Le Livre du sang (roman), Gallimard, 1979. Le Roman maghrébin (réédition), SMER, Rabat, 1979. De la mille et troisième nuit (tirage limité), SMER, Rabat, 1980. Maghreb pluriel, Denoël, 1983. Le même livre (avec J. Hassoun), Éditions de l'Éclat, 1985. Dédicace à l'année qui vient, Fata Morgana, 1986. L'Art calligraphique arabe (avec M. Sijelmassi), Chêne, 1976, réédition en 1980. Amour bilingue, Fata Morgana, Montpellier, 1983.

Abdelkebir Khatibi Figures de l'étranger

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Du même auteur

La Mémoire tatouée, Denoël, Lettres Nouvelles, 1971; collection 10/18, 1979

La Blessure du nom propre, Denoël, Lettres nouvelles, Paris, 1974.

Vomito blanco (Le sionisme et la conscience malheureuse),

collection 10/18, 1974. Le Lutteur de classe à la manière taoïste (poème),

Sindbad, 1976. Le Prophète voilé (théâtre), L'Harmattan, 1979.

Le Livre du sang (roman), Gallimard, 1979. Le Roman maghrébin (réédition), SMER, Rabat, 1979.

De la mille et troisième nuit (tirage limité), SMER, Rabat, 1980.

Maghreb pluriel, Denoël, 1983. Le même livre (avec J. Hassoun), Éditions de l'Éclat, 1985.

Dédicace à l'année qui vient, Fata Morgana, 1986. L'Art calligraphique arabe (avec M. Sijelmassi), Chêne,

1976, réédition en 1980. Amour bilingue, Fata Morgana, Montpellier, 1983.

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Abdelkebir Khatibi Figures

de l'étranger

dans la littérature française

Denoël

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© by Éditions Denoël, 1987 19, rue de l'Université, 75007 Paris

ISBN 2-207-23358-8

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L'étranger dans la littérature

française

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Ce livre est le voyage d'un voyage. Dès ses premiers pas, cet itinéraire au second degré s'est limité à une interrogation sur la représentation de l'étranger dans l'imaginaire littéraire français, en particulier dans ce qu'on appelle l'exotisme. L'exotisme n'est pas, ici, un folklorisme de surface, mais un secret de toute littéra- ture, de ses paradigmes.

J'avais fixé mon attention sur un corpus limité de textes modernes consacrés aux pays étrangers à la France par des différences de langue, de civilisation, d'imagi- nation religieuse ou artistique. A partir de ce corpus, sur lequel j'aurai à revenir, je me suis posé cette ques- tion : Comment, jusqu'à maintenant, la littérature fran- çaise a-t-elle parcouru ces différences?

La perspective de la recherche aura changé au cours de cet itinéraire : plus j'avançais dans mes lectures, plus j'explorais cette littérature dite exotique sur différentes régions du monde (surtout l'Extrême-Orient et l'Orient arabe), et plus je me heurtais à un foisonnement de textes d'inégale valeur : alors que l'Asie est l'objet de beaux textes de Claudel, Perse, Michaux, Barthes, mais surtout Segalen, alors que toute cette richesse me faisait rêver et travailler, je ne découvris, par exemple, aucun texte de valeur sur l'Afrique noire. Les journaux de voyage de Gide à propos du Congo et du Tchad ne

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constituent pas une œuvre originale, ni par la forme ni par une pensée de la différence culturelle. Je fus presque amusé lorsque je m'aperçus que le meilleur texte fran- çais sur l'Afrique est Impressions d'Afrique. Or, ce livre de Raymond Roussel est totalement imaginaire, étant construit sur un jeu entre deux mots : « billard » et « pil- lard ». Je me dis encore : l'Afrique est vraiment un conti- nent noir dans cet imaginaire, une sorte de planète inconnue.

Il m'avait fallu changer de route et cerner de plus près la notion d'exotisme sous son double versant : inté- rieur et extérieur, car l' exotisme du dedans est inhérent à toute littérature. Aussi avais-je été conduit à suivre cette littérature selon son voyage dans l'espace et le temps, à reconstituer le sillage d'une mémoire textuelle sous le regard de la poésie. J'avais appelé ce sillage « la France ». Mais quelle France pour elle-même et pour tout étranger qui l'aborde de l'intérieur et de l'exté- rieur?

En repensant maintenant au sillage de cette recherche, à son frayage (recherche commencée il y a trois ans dans le nouveau Collège international de philosophie), je m'aperçois, avec ce recul, que j'avais pris le large vis- à-vis des questions trop pressantes, trop actuelles. Ce voyage dans l'inactuel et le mémorial — qui est certes une reconstitution ponctuelle de ma propre mémoire — m'avait dirigé vers une question antique, et qui est, dans l'arrière-scène de la littérature française et de son his- toire, une question inoubliable et qui supporte le destin de cette littérature et certains de ses paradigmes struc- turaux, dans la mesure où le lecteur accepte notre pre- mière hypothèse, à savoir que cette question antique et radicale est constitutive du « concept » de littérature européenne, de ses genres, formes et stylistiques.

Or, nous savons que le récit homérien, premier récit

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occidental et qui est un passage de la littérature vocale à la littérature écrite, est une initiation à l'extranéité, c'est-à-dire au monde en tant que narration du dehors, de l'étrange, de l'étranger, du barbare. Ce récit est autant le noyau mythique de la figure des autres qu'un itinéraire de voyages merveilleux; il est autant cette initiation qu'une pensée magique sur les modes de se représenter, de se dire ce qu'est le dehors (territorial, langagier, culturel, spatial, cosmique) que les Grecs ima- ginaient. Et ce dehors — dans le récit homérien — est aussi ce voyage qu'aucun retour (du récitant, du voya- geur) ne peut détourner. Je dirai plus loin ceci : je viens de loin et l'étranger vient de plus loin au cœur de ma mémoire et de sa dispersion soit dans la nostalgie, soit dans la méconnaissance et la dénégation.

Une anamnèse est à l'œuvre de part et d'autre de la Méditerranée : sillage circulaire, ainsi qu'un chapelet dont les grains sont des îles de rêverie et de prière dans le secret des mains. Écrire renvoie au rappel de cette mémoire solaire.

Ulysse, ce premier récit, a été placé sous le signe du voyage, du récit en tant que métaphore du voyage. Ce n'est pas un hasard si Joyce — il n'est pas le seul — construit sa révolution intertextuelle en détournant Ulysse de son voyage initial. L'écriture joycienne est un monumental récit des langues. Le seuil de la modernité qu'il visait est une nouvelle tour de Babel voyageant dans ce temps des traductions, des codes, des langages informatisés et des nouvelles technologies.

Mon voyage aura été fait en un mouvement alter- natif : un pas dans le sillage de la mémoire textuelle, et un autre vers cette mémoire en devenir dans le texte moderne et ses explorations de l'imaginaire.

Je me dis encore : réévaluer le « concept » de litté- rature n'est-ce pas la tâche de toute écriture digne de

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ce nom? Et cette réévaluation, à partir donc de telle rupture ou de telle transformation opérée par tout écri- vain novateur, n'est-elle pas intérieure à l'œuvre elle- même? Oui, assurément; mais voici le point stratégique de ma recherche : entre le récit homérien et le récit européen moderne, il y a des lignes de force quant à la représentation imaginaire de l'étranger en sa forme littéraire. Ces lignes de force, appelons-les figures mythiques, étant supposé ici que le mythe est le récit d'un secret que la mémoire entretient avec son passé le plus archaïque, le plus nocturne. Voici trois mythes : celui du bon sauvage (indien, africain), celui de la passion du barbare (qui caractériserait l'Orient arabe et islamique), et celui de l' art du mystérieux (Chine, Japon). Loin d'être inconsistants, ces mythes sont la capture d'un secret. Un tel secret introduit l'imaginaire des Français à son espace illisible, à ses sillages de longue mémoire.

Au-delà de leur insistance, de siècle en siècle, ces mythes m'ont guidé vers l' exotisme du dedans qui rend toute littérature étrangère à elle-même et à son cadre national ou patriotique. Ils m'ont obligé à distinguer la littérature de la paralittérature. Je rappellerai, à la fin de cet ouvrage, que celle-ci est une reproduction monu- mentale de la doxa, alors que le paradoxe de la litté- rature est le secret de la construction des formes, de leurs paradigmes.

Un long apprentissage de la lecture (je suis tantôt écrivain, tantôt lecteur) me fit errer, sinon déambuler parfois dans la mémoire littéraire de la France. Depuis la Chanson de Roland jusqu'à La Goutte d'Or de Tournier ou au Captif amoureux de Genet (texte longuement ana- lysé dans mon ouvrage), je découvris que la France est une terre inconnue en son archéologie la plus souter- raine. Écrivain moi-même, un peu à la marge, peut-être étais-je à même d'observer les transformations que la

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littérature française connaît à travers le monde. Pour- suivant mes lectures, je remontais le temps de ma mémoire, à la marge de cette constatation : la France classique est une unité imaginaire entre la langue cour- tisane, le pouvoir charismatique et le nationalisme théolo- gique. Plus tard, j'ai dû assouplir cette constatation et prendre en charge — pour mon compte — toute mémoire textuelle capable d'adoucir le paradoxe de l'illisibilité. Ma France aura été une grille de lecture.

Marchons avec les voyageurs : eux seuls m'ont guidé, dans cette carte littéraire du temps et de l'espace, dans toute métaphore de déplacement, de marge, d'exil. Pour approcher ces figures de l'étranger, il me fallut emprun- ter leur parcours, leurs chemins de traverse, leur errance, et leur retour à une France paradoxale. L'œuvre de Victor Segalen fut une chance, une exception remar- quable (j'y reviendrai).

Mais avant cette découverte, j'avais l'impression de lire le même livre. Par exemple, la littérature écrite sur les Arabes et les musulmans. La Rose de sable de Mon- therlant, en son ambiguïté sexuelle, me renvoyait à la période coloniale et à ses récits : qu'avais-je à faire avec cette femme prostituée en plein désert si l'amour désertique était le mythe de cet auteur? Or, je lisais, je relisais les livres à partir de leur « extranéité intérieure » (Valéry), c'est-à-dire leur dehors le plus intime, le plus réceptif. Car, comment recevoir l'étranger sans lois d'hospitalité dans sa propre langue d'amour? Je me pose aussi cette question : comment se redécouvrir devant l'abîme de son identité? La chance d'un texte est la capture d'un secret, mais comment partager un secret avec l'étranger sans pouvoir, sans désirer le rencontrer au plus lointain de lui-même, comme une limite, un trait qui transforme mon identité en devenir? Aller vers cette rencontre est une promesse. Alors vient peut-être

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le chant du fond des villes, des pays et des paysages que nous avons traversés selon l'itinéraire imaginaire de notre vie. Je dois le dire maintenant : Baudelaire, Ner- val, Rimbaud, Mallarmé, Proust, Segalen, ont reçu l'étranger en tant que l'imaginaire d'une langue. En pleine expansion industrielle et coloniale, ces écrivains se tournent vers un internationalisme littéraire. Ainsi, cette affinité fut mon voyage — celui de la mémoire — le plus proche de la France, de ses résonances intimes, de sa carte du sensible. Ma mémoire reconnut alors ces « affi- nités électives » qui traversent les frontières. Leur texte fut un chant. Le dépaysement commençait avec chaque phrase.

Dès lors, il me fallut lire la littérature dite « exotique » selon un principe majeur : celui de la mémoire poétique. Plus je soumettais cette littérature à l'analyse, plus je la voyais se solidifier en un paysage imaginaire, souvent en ruine. Ni Les Lettres persanes, ni Le Roman de la momie, ni Salammbô, ni Eden eden eden ne pouvaient guider mon voyage. Il m'a fallu encadrer autrement ce voyage. J'ai choisi des textes du XX siècle, un corpus limité à six textes et qui soit suffisant pour vérifier mon hypothèse première tout en me guidant vers l'inconnu. Ce corpus appartient à deux univers : l'Extrême-Orient et le monde arabe, qui m'est plus familier, donc plus réel et problé- matique. La publication récente du dernier livre de Jean Genet, Un captif amoureux, m'a été une grâce doulou- reuse. Ce texte propose la construction d'une figure plus élaborée de l'étranger, celle de l 'étranger profession- nel. Ce dernier chant est l'horizon d'une migration lit- téraire admirable.

Mais me suis-je trompé de route? Ai-je trop erré autour d'une seule question? d'une seule lancinance? Peut-être faut-il répéter ceci : l'ordonnance de ce livre est celle d'un voyage de voyage que le bref dialogue imaginaire

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entre le critique et l'auteur de ces pages reprendra en guise de conclusion à cet ouvrage. Conclusion à quoi? Disons : conclusion sans exclusion du tout étranger, de toute identité en devenir dans un nouvel internatio- nalisme littéraire.

Victor Segalen a été parmi les fondateurs de cette internation, de cette modernité littéraire. Son œuvre voulait faire sortir la littérature française de son ethno- centrisme et de ses domaines trop nationalistes. Elle met- tait ainsi enjeu cette littérature dans des « formes » d'art irréductibles à toute vérité (de territoire, de langue, de civilisation). Formes qui puiseraient dans un dehors tout à fait concret (peuples, langues, sites) une plus grande expérience du monde en tant qu'exploration du langage littéraire. Segalen se soumet à l'exigence du dehors, il en fait une loi d'écriture. Il ne peut écrire que sur ce dehors, sur les étrangers. Dehors du territoire et marges du livre français, dehors des valeurs de l'écrivain, de son système de référence. Tel est cet exercice d'une altérité et d'une altération en marche. Il s'agit de se désenclaver par rapport à la tradition de son pays d'origine. En ce sens, l'Exote ne fait pas d'exotisme : « ... C'est l'histoire totale de la littérature (française) qu'il faudrait compo- ser », écrit-il dans ses notes sur l'exotisme.

Une telle épreuve ne veut pas fonder un mode folk- loriste d'un type nouveau. Le concept de « littérature » s'y engage : cadres, formes, hiérarchies. Selon cette direction, il conviendrait de relire cette littérature selon ses capacités de voyages dans le temps et l'espace, de parcourir les différences, surtout celles qui lui résistent en lui révélant l'espace de son illisibilité. Mais qui se réclame encore, disons-nous, de l'unité de la langue française? Qui parle encore, aujourd'hui, de LA litté- rature française? Sans doute, il y en a plusieurs. Les- quelles, diriez-vous?

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Textes analysés au cours de ce voyage : Victor Segalen : Équipée, Gallimard, collection L'Imaginaire, 1983. Roland Barthes : L'Empire des signes, Skira, 1970. Marguerite Duras : L'Amant, Minuit, 1984. Louis Aragon : Le Fou d'Elsa, Gallimard, 1963. Claude Ollier : Marrakch medine, Flammarion, 1979. Jean Genet : Un captif amoureux, Gallimard, 1986.

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Célébration de

l'Exote

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CONSEILS AU BON VOYAGEUR

Ville au bout de la route et route prolongeant la ville : ne choisis donc pas l'une ou l'autre, mais l'une et l'autre bien alternées.

Montagne encerclant ton regard le rabat et le contient que la plaine ronde libère. Aime à sauter roches et marches; mais caresse les dalles où le pied pose bien à plat.

Repose-toi du son dans le silence, et, du silence, daigne revenir au son. Seul si tu peux, si tu sais être seul, déverse-toi parfois jusqu'à la foule.

Garde bien d'élire un asile. Ne crois pas à la vertu d'une vertu durable : romps-la de quelque forte épice qui brûle et morde et donne un goût même à la fadeur.

Ainsi, sans arrêt ni faux pas, sans licol et sans étable, sans mérites ni peines, tu parviendras, non point, ami, au marais des joies immor- telles,

Mais aux remous pleins d'ivresses du grand fleuve Diversité.

Segalen, Stèles.

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Survie d'une œuvre

Un an avant sa mort, Victor Segalen écrit de Singa- pour à sa femme : «... Je me suis fêté hier ma quaran- taine, que je porte, ma foi, fort bien... J'ai trois drames, dix romans, quatre essais, deux théories du monde, une poétique, une exotique, une esthétique, un traité des Au-delà, une vingtaine d'ouvrages inclassables, et quatre mille soixante-trois articles de deux cents à deux mille lignes à donner avant de prendre ma vraie retraite. Après quoi, je préparerai une édition entièrement contradictoire de mes œuvres — afin que l'on choisisse » (lettre du 15 janvier 1918).

Il meurt en mai 1919 sans avoir eu le temps de s'offrir ce don contradictoire ni de signer la survie de son œuvre. En dehors des Immémoriaux, Stèles, Peintures et de quelques autres textes brefs et moins marquants, tout le reste est posthume. Une importante et volumineuse correspondance (dont certains fragments ont vu le jour) poursuit une survie énigmatique, contradictoire, quelque peu bizarre : comment sera-t-elle un jour intégralement publiée ? Grâce aux soins de sa fille Annie Joly-Segalen, de nombreux inédits, souvent inachevés, sont publiés chez plusieurs éditeurs, dans des conditions parfois pro- blématiques : par exemple, on publie aux éditions Rou-

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gerie un Dossier pour une fondation sinologique comme on aurait publié un livre, ou bien on réunit des notes en formant un simulacre de livre. La correspondance éclate en petits livres non prévus, non pensés par l'auteur. En toute rigueur, il conviendrait plutôt de la publier telle quelle et de l'annoter pour préparer une lecture exacte. Le genre épistolaire est un genre littéraire qui obéit à son autonomie, à sa tradition, à ses lieux de destination. Segalen était extrêmement attentif à la construction d'une œuvre, la sienne en particulier. Construction aussi bien sur le plan formel que matériel. Aussi participait- il lui-même à la fabrication de ses livres. Dans sa note aux Lettrés d'Extrême-Orient (relative à la création d'une Collection coréenne en 1914), il précise la forme matérielle de l'ouvrage : format, caractères, papier, reliure, etc. Ainsi, la forme d'un texte devait être intégrale, corps et esprit : achevée, elle serait réalisée dans le spectacle de la lecture, dans une beauté palpable, pliable vers le secret d'un voyage initiatique, vers la rencontre avec l'Étranger. Avec son double texte — en caractères latins et en idéogrammes — Stèles (son principal ensemble de poèmes) porte, dès sa première édition (1912), ce désir du bilinguisme et des intersignes migrateurs d'une civi- lisation à l'autre. L'écrivain-exote écrit à la trace de cette rencontre.

Un reclassement de cette œuvre, publiée ou inédite encore, serait nécessaire pour suivre la métaphore entre le Livre et le Voyage qui anime sa passion de l'Étranger. Mais peut-être l'héritage d'un revenant, rendu aux cendres de la postérité, doit-il encore, avant d'être approprié et fixé en une figure mythique, continuer le périple de ses métamorphoses ainsi que le cycle des morts dans l'Égypte antique. Comparaison insuffisante pourtant, car aucun écrivain mort ne délègue un double

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qui lirait à sa place : il y a un lieu vide, un atopos entre l'écrivain et tout lecteur. En analysant l'Équipée et l' Essai sur l'exotisme, nous

laissons ouverte la question du reclassement1 de cette œuvre, d'autant plus que les références au voyage, ici décisives, déplacent une partie de la littérature française de son sol natal, de sa langue mère; elles la déstabilisent par rapport à sa centralité, à son ethnocentralité : plus d'unité entre l'espace littéraire et l'identité d'un peuple, d'une nation, d'un pays, d'un État. Rien qu'une écriture en marche au rythme du Dehors.

Oui, que reste-t-il de cette œuvre inachevée? de cette lettre adressée à sa femme ? De quelle survie s'agit-il? On pourrait dire que chaque œuvre, fidèle à ses pro- messes, porte en elle-même, et dès le commencement, un regard sur son retrait. Elle survit dans cette attente, d'abord pour elle-même, dans l'énergie consumée qui lui donne cette beauté sculptée dans le graphe, celui du signataire. Mais de son avenir, bien indéterminable en tout cas, peut-elle, cette œuvre, se soucier sans que le signataire, durant sa vie, aille jusqu'aux limites de la force qui supporte le voyage initiatique de cette vie à la mort et à la survie? Il faut ajouter que l'œuvre de Segalen constitue justement un conflit vertigineux entre le réel et l'imaginaire, le natal et l'extra-natal, le Même et l'Autre. Conflit parfois affolant mais qui a soutenu une grande force de vie en la transformant, au bout même de ses possibilités et de ses défaillances. Cette œuvre a résisté au temps, à l'oubli. C'est pourquoi l'écri- vain peut rêver sa survie en tant qu'horizon de lecture. Il peut la rêver en tant que polygraphie d'une anamnèse,

1. Pour le moment, il convient de se référer à l'indispensable travail de Henry Bouillier, publié au Mercure de France (2 édition, 1986).

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que la lecture, à son tour, reconstruit dans les plis de sa mémoire, de son récit.

L'œuvre de Segalen est regard vers le Dehors, exil de soi. Elle s'est constituée, de bout en bout, en un déplacement entre deux lieux de l'imaginaire, celui d'une civilisation lointaine et celui de la littérature fran- çaise. En dédiant son œuvre à la Polynésie et surtout à la Chine impériale, Segalen poursuit une expérience unique par sa force d'extranéité dans l'espace littéraire français. Expérience d'un exotisme « exacerbé » (écrit- il), un exotisme au second degré, qui viendrait réveiller à l'intérieur de la langue mère d'autres formes du Dict. Cette œuvre qui se construit en se déplaçant, se déve- loppe en un art ex-centrique, soutenu continuellement par le terrain lui-même : Tahiti, Chine; vie de voyage et de belles aventures, quête initiatique : «Je suis né pour vagabonder, voir et sentir ce qu'il y a à voir et sentir au monde. » Il passa, en effet, la moitié de sa vie à voyager. Suivons d'abord ce voyage dans le chemi- nement du nom propre lui-même.

Itinéraire d'un nom propre Segalen appelait sa femme : Yvonne; et, en même

temps, un secret de prénomination les lie au cœur de l'œuvre. A sa naissance, il s'appelle Victor Désiré Ambroise Segalen : Victor comme son père (un enfant naturel), Ambroise comme sa mère Ambroisine et Désiré, le ménage ayant été déçu quatre fois. Or, il signe son premier écrit important les Immémoriaux sous le pseudonyme de Max-Anély. Max est le prénom d'un ami d'enfance, Anély est la transformation d'un des prénoms de sa mère : Yvonne Marie Amélie Hébert. A partir de 1912, il supprime l'accent aigu de son nom.

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D'autre part, le prénom de sa fille Annie Joly-Segalen, née à Tien-tsin, est une adaptation d'Anély. Filiation au féminin transitant par un pseudonyme et le nom du père dégagé de son accent : tel est le jeu de miroir de cette identité divisée. La notion de voyage est déjà ins- crite dans cet itinéraire. On peut dire de Victor Segalen ce qu'écrit Jean Starobinski à propos de Stendhal : « Ainsi, à chaque voyage hors de France, Stendhal aura le sentiment de rejoindre son vrai monde, et il se plaira à vivre hors de son pays comme il aime à vivre hors de son nom. La manie de voyager, le plaisir des fugues, sont chez lui parfaitement superposables à la pseudo- nymie 2 »

Par la pseudonymie, Segalen se divise, échappant ima- ginairement à son milieu et à son métier (il était méde- cin). En tant qu'écrivain, il transforme cette division en une œuvre habitée par l'ex-centrement, le différent, l'opposition de soi à soi, le dédoublement et la palinodie. Dans son roman pékinois (René Leys), Segalen s'amuse à siniser son nom d'appartenance bretonne : « Il (le per- sonnage) dit également le mien (mon nom) : " Monsieur Sié C'est le monosyllabe choisi parmi les noms clas- siques des " Cent Familles " auquel se réduit mon nom occidental, extrême-occidental, du bout de la terre, du " Finistère "... mon nom breton de Segalen. Mon pré- nom chinois hérite des deux derniers sons. Le tout se prononce : " Sié-Ko-lan ", et me déplaît sur peu, car, traduisant, j'obtiens sans erreur (outre le mot " Sié nom de famille) Ko-lan, " orchidée du Pavillon des Vierges ". Je prise davantage mon " Épi de Seigle " bre- ton 3 »

2. L'Œil vivant, Gallimard, 1985, pp. 193-194. 3. René Leys, Gallimard, 1978, pp. 64-65.

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L'Exote

Voilà donc un écrivain qui affirme être né pour voya- ger. Tour du voyageur, re-tour d'écriture : de l'un à l'autre, une langue musculaire, du rythme et d'un souffle planétaire, de l'Occident à l'Extrême-Orient, la méta- phore même de ce voyage, de cette marche, du double pas, de la dé-marche d'un style, d'un déplacement, d'une entrée dans le territoire réel et imaginaire de l'Étran- ger. Voyager ? Écrire? Pourquoi doit-on voyager pour écrire? Qu'est-ce que l'Exote?

D a n s ses n o t e s s u r l ' e x o t i s m e 4 il p r é c i s e la n o t i o n d e

l ' E x o t e ( n é o l o g i s m e q u ' i l i n v e n t e ) auss i b i e n q u e les v a r i a n t e s d e l ' e x o t i s m e , e n p a r t i c u l i e r d a n s la l i t t é r a t u r e

f r a n ç a i s e . E x o t i s m e d a n s le t e m p s , d a n s l ' e s p a c e . Il y p r é c i s e auss i les c o n d i t i o n s d a n s l e s q u e l l e s u n e di f fé-

r e n c e d e c iv i l i s a t ion e s t à a p p r o c h e r d a n s sa s i n g u l a r i t é

i r r é d u c t i b l e , s i n o n d a n s s o n i m p é n é t r a b i l i t é ; s i n g u l a r i t é q u e l ' E x o t e se d o i t ( d e v o i r d ' é c r i t u r e e t d ' e s t h é t i q u e ) d e t r a n s f o r m e r , d e r é - i n v e n t e r s e l o n d e n o u v e l l e s f o r m e s

l i t t é r a i r e s . A p a r t i r d e s n o t i o n s d e la Sensation, d u Divers

(qu ' i l s u b s t i t u e s o u v e n t a u D i f f é r e n t , à l ' I n c o n n u ) , Sega - l e n e s q u i s s e le p r o g r a m m e d ' u n e é c r i t u r e d e s di f fé- r e n c e s d ' u n e c iv i l i s a t ion à l ' a u t r e , e t q u i so i t a d a p t a b l e

à c h a q u e t e r r a i n , à c h a q u e d é c o u v e r t e , à c h a q u e résis- t a n c e q u ' o p p o s e à l ' E x o t e la p u i s s a n c e d u D e h o r s . O u i , q u ' e s t - c e q u e l ' E x o t e ?

D ' a b o r d le m o t , sa c o m p o s i t i o n : « Exo : d é f i n i t i o n d u p r é f i x e Exo d a n s sa p l u s g r a n d e g é n é r a l i s a t i o n poss ib l e .

4. Essai sur l'exotisme. Une esthétique du divers, Fata Morgana, 1978. Notes écrites entre 1908 et 1916, fragments d'un livre longtemps rêvé, mais resté inachevé, très fragmentaire. Nous ferons appel à d'autres éléments de son œuvre à propos de l'Exote.

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T o u t ce q u i e s t " e n d e h o r s " d e l ' e n s e m b l e d e n o s f a i t s d e c o n s c i e n c e a c t u e l s , q u o t i d i e n s , t o u t c e q u i n ' e s t p a s n o t r e " T o n a l i t é m e n t a l e c o u t u m i è r e " (p. 20 ) . » C e

d e h o r s , c ' e s t - à - d i r e le p a y s v is i té , e s t saisi p a r la S e n s a -

t i o n , n o t i o n b i e n é q u i v o q u e c h e z S e g a l e n . S e n s a t i o n q u i

n ' e s t p a s p u r e m e n t i n t u i t i v e , i n s t a n t a n é e , m a i s a t t e n t i v e

à la p l u s p e t i t e d i f f é r e n c e q u i j a i l l i t d a n s la d i v e r s i t é d e s

v isages , d e s si tes , d e s r e n c o n t r e s . A u c o u r s d e ses v o y a g e s e t d e ses r a n d o n n é e s , l ' E x o t e f ixe le t r a c é d e c e t t e s e n -

s a t i o n d a n s s o n c a r n e t d e v o y a g e ; il s ' e n s é p a r e d è s l ' i n s t a n t o ù ce s se la j o u i s s a n c e d e v o i r , d e s e n t i r . P l u s

d o n c q u e d e s i m p l e s i m p r e s s i o n s , ce s p r e m i è r e s n o t e s m a r q u e n t les h a l t e s e n t r e le v o y a g e e t le l i v re , le d e h o r s e t le d e d a n s , l ' a t t r a i t e t le r e t r a i t . P o u r é c r i r e à p a r t i r

d u t e r r i t o i r e r é e l e t i m a g i n a i r e d e l ' é t r a n g e r , l ' E x o t e se

p l i e à u n e d i s c i p l i n e s t r i c t e : v o i r , é c o u t e r , g o û t e r , j o u i r e n é c r i v a n t d e h a l t e e n h a l t e d a n s u n e f o r m e l i t t é r a i r e

e n c o r e i n c o m p l è t e , m a i s q u i c o n t i n u e à v o y a g e r p o u r a ins i d i r e , r e c u e i l l a n t e n e l l e le r y t h m e d e la m a r c h e ,

d e l ' e s c a l a d e : t o u t e m é t a p h o r e d u d é p l a c e m e n t .

S u i v o n s c e t t e m a r c h e . Il e x i s t e d e s v o y a g e u r s - n é s q u e S e g a l e n n o m m e : E x o t e s . E t il c o n ç o i t c e t e x o t i s m e d a n s

sa d i m e n s i o n p l a n é t a i r e , c o s m i q u e , h u m a i n e e t i n h u - m a i n e . A e n t e n d r e ici : « L ' I n h u m a i n : s o n v é r i t a b l e

N o m es t l ' A u t r e . » C ' e s t p o u r t a n t là u n m o n d e , u n u n i -

v e r s s a n s a u - d e l à d i v i n e t t h é o l o g i q u e ; r i e n q u ' u n e x e r - c i ce d ' a l t é r i t é a r t i s t i q u e .

S e g a l e n d i s t i n g u e t r o i s a t t i t u d e s vis-à-vis d e s é t r a n - g e r s ; ce l l e d u t o u r i s t e ( fût- i l u n g r a n d a r t i s t e ) , d u fo lk -

l o r i s t e e t d e l ' E x o t e . D i s t i n c t i o n q u i p a r t a g e , s e l o n n o t r e a u t e u r , aus s i b i e n le c h a m p d e la l i t t é r a t u r e q u e c e l u i

d e la p e n s é e . S u r ce t o u r i s t e , S e g a l e n n ' a r i e n à d i r e , s i n o n s o n i n d i g n a t i o n : c ' e s t fa i t .

A u n d e g r é p l u s d i g n e , le f o l k l o r i s t e ( é c r i v a i n o u

e t h n o l o g u e ) , e x c i t é p a r le s p e c t a c l e d e s c u r i o s i t é s , p o s e

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sur les autres un regard qui se croit neutre, impersonnel. Il suffit ici de comparer rapidement Le Mariage de Loti (1880) aux Immémoriaux (1907) pour bien marquer cette distinction. Pierre Loti intitule son livre : « récit sau- vage ». Quelle sauvagerie? On peut interpréter ce récit en tant que résidu idéologique, parfaitement transpa- rent d'une époque et d'une mythologie européennes bien déterminées. Tout se passe dans la rêverie de cette époque en pleine expansion industrielle et technique. Ce livre — qui était un best-seller (sinon un long seller) — est le croisement entre deux mythes : celui de l'amour « romantique » (dans sa forme de feuilleton) et celui de la « bonne sauvage », incarnée par la jeune Maorie, fan- taisie de la jouissance éternelle et de l'extase tropicale : plante, animal barbare, et pourtant domestiquée (par les Missions, par les colonisateurs), fleur de rhétorique déjà si fanée à la fin du siècle dernier, de quelle femme étrangère parle Loti de lui à lui?

Segalen nomme « lotiforme » ce genre de littérature folklorique, qui est un prétexte à quelque couleur locale. Par un acte de décision remarquable, il introduit une rupture dans la littérature française. En voici les lignes de force, dégagées par un seul exemple : les Immémo- riaux.

Segalen se considérait comme le témoin d'une culture colonisée et détruite dans sa parole : « Car on sait qu'aux changements des êtres, afin que tout soit irrévocable, doit s'ajouter l'extermination des mots, et que les mots périssent en entraînant ceux qui les ont créés. » Paroles mortes, mort qui signe sinon celle d'un peuple, plutôt sa survie réelle, la destruction de ses mythes et de ses structures sociales. L'Exote se donne pour tâche d'écrire cette survie, de l'exprimer dans sa force.

Ce récit qui est assez inclassable (ni romanesque, ni historique, ni ethnologique) et qui témoigne sur la déca-

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« Ce livre est le voyage d'un voyage. Dès ses premiers pas, cet itinéraire au second degré s'est limité à une interrogation sur la représentation de l'étranger dans l'imaginaire littéraire français, en particulier dans ce qu'on appelle l'exotisme. L'exotisme n'est pas, ici, un folklorisme de surface, mais un secret de toute littérature, de ses paradigmes. «J'avais fixé mon attention sur un corpus limité de textes modernes consacrés aux pays étrangers à la France par des dif- férences de langue, de civilisation, d'imagination religieuse ou artistique. A partir de ce corpus, je me suis posé cette question : comment, jusqu'à maintenant, la littérature française a-t-elle parcouru ces différences ? « Entre le récit homérien et le récit européen moderne, il y a des lignes de force quant à la représentation imaginaire de l'étranger en sa forme littéraire. Ces lignes de force, appelons-les figures mythiques, étant supposé ici que le mythe est le récit d'un secret que la mémoire entretient avec son passé le plus archaïque, le plus nocturne. Voici trois mythes: celui du bon sauvage (indien, africain), celui de la passion du barbare (qui caractérise- rait l'Orient arabe et islamique), et celui de l'art du mystérieux (Chine, Japon). Loin d'être inconsistants, ces mythes sont la capture d'un secret. Un tel secret introduit l'imaginaire des Français à son espace illisible, à ses sillages de longue mémoire. « Les textes analysés au cours de ce voyage m'ont permis de dégager plusieurs modalités d'être étranger, dont celle de l'étranger professionnel, qui s'observe en observant du dehors sa propre société. »

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