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AFPP – DIXIÈME CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR LES RAVAGEURS EN AGRICULTURE MONTPELLIER – 22 ET 23 OCTOBRE 2014 OBSERVATION DU PATHOSYSTEME PITTOSPORUM TOBIRA / APHIS FABAE ET CHOIX DE L'AUXILIAIRE Y. VILAIN (1) , L. IFFAT (2) et J.-M. DEOGRATIAS (2) (1) Agrocampus Ouest, Centre d’Angers Institut National d’Horticulture et du Paysage, 2 rue André Le Nôtre, 49045 Angers cedex 1, France [email protected] (2) GIE Fleurs et Plantes du Sud-Ouest, 71 Avenue E. Bourleaux BP 81, 33883 Villenave-d’Ornon, France [email protected] [email protected] RÉSUMÉ Le puceron noir de la fève, Aphis fabae est un puceron polyphage et ubiquiste infestant plus de 200 genres et espèces végétales. Différentes espèces d’auxiliaires de ce puceron ont été testées pour déterminer leurs efficacités sur une production de Pittosporum tobira et ce à différentes échelles. Dans les essais en culture hors-sol, six auxiliaires ont été testés et les niveaux d'attaque et de dégâts ont été suivis. Il apparaît que Chrysoperla carnea est l'auxiliaire le plus efficace. Parallèlement, des tests de prédation ou de parasitisme ont été réalisés à l’échelle de la plante entière et d’une feuille détachée. Aucun des parasitoïdes testés ne parasite Aphis fabae dans ces conditions. Chrysoperla carnea possède un taux de prédation de 3,1% sur plante entière et de 21,5% sur feuille détachée et Chrysoperla lucasina un taux de prédation de 8,3% et de 22,2%. Un nouvel essai axé exclusivement sur les chrysopes est prévu pour valider leur efficacité vis-à-vis de Aphis fabae. Mots-clés : Protection Biologique intégrée, Chrysoperla lucasina, Chrysoperla lucasina, culture hors- sol, prédation. ABSTRACT OBSERVATION OF THE PATHOSYSTEM PITTOSPORUM TOBIRA / APHIS FABAE AND CHOICE OF THE BENEFICIAL INSECTS The black bean aphid, Aphis fabae is a very common aphid with a huge number of host plants. Different beneficial insects against the black bean aphid have been tested to evaluate their respective performance in a production of Pittosporum tobira and this at variable scales. In the soilless studies, six beneficial insects have been tested, and attack rate and injury rate of thirty plants have been followed. Chrysoperla carnea seems to be the most efficient biological agent. At the same time experiments of predation and parasitism have been done at the scale of an entire plant and at the scale of a detached leaf. None of the parasitoid parasitizes Aphis fabae in this condition. Chrysoperla carnea have a predation rate of 3.1% in entire plant and of 21.5% in detached leaf, C. lucasina have in a predation rate of 8.3% and of 22.2. A new study based only on the lacewing could allow us to a better knowledge of their efficiency against Aphis fabae. Keywords: Integrated Pest Management, Chrysoperla lucasina, Chrysoperla lucasina, soilless culture, predation.

AFPP DIXIÈME CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR LES … · Star JP FT MOD3 SF avec une fertilisation incorporée de 3 kg/m3 d'Osmocote PRO 8/9 mois plus 2 kg/m 3 d'Osmocote PRO 12/14

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AFPP – DIXIÈME CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR LES RAVAGEURS EN AGRICULTURE MONTPELLIER – 22 ET 23 OCTOBRE 2014

OBSERVATION DU PATHOSYSTEME PITTOSPORUM TOBIRA / APHIS FABAE

ET CHOIX DE L'AUXILIAIRE

Y. VILAIN(1), L. IFFAT(2) et J.-M. DEOGRATIAS(2)

(1) Agrocampus Ouest, Centre d’Angers Institut National d’Horticulture et du Paysage, 2 rue André Le Nôtre, 49045 Angers cedex 1, France

[email protected]

(2) GIE Fleurs et Plantes du Sud-Ouest, 71 Avenue E. Bourleaux BP 81, 33883 Villenave-d’Ornon, France

[email protected] [email protected]

RÉSUMÉ Le puceron noir de la fève, Aphis fabae est un puceron polyphage et ubiquiste infestant plus de 200 genres et espèces végétales. Différentes espèces d’auxiliaires de ce puceron ont été testées pour déterminer leurs efficacités sur une production de Pittosporum tobira et ce à différentes échelles. Dans les essais en culture hors-sol, six auxiliaires ont été testés et les niveaux d'attaque et de dégâts ont été suivis. Il apparaît que Chrysoperla carnea est l'auxiliaire le plus efficace. Parallèlement, des tests de prédation ou de parasitisme ont été réalisés à l’échelle de la plante entière et d’une feuille détachée. Aucun des parasitoïdes testés ne parasite Aphis fabae dans ces conditions. Chrysoperla carnea possède un taux de prédation de 3,1% sur plante entière et de 21,5% sur feuille détachée et Chrysoperla lucasina un taux de prédation de 8,3% et de 22,2%. Un nouvel essai axé exclusivement sur les chrysopes est prévu pour valider leur efficacité vis-à-vis de Aphis fabae. Mots-clés : Protection Biologique intégrée, Chrysoperla lucasina, Chrysoperla lucasina, culture hors-sol, prédation.

ABSTRACT OBSERVATION OF THE PATHOSYSTEM PITTOSPORUM TOBIRA / APHIS FABAE AND CHOICE OF THE BENEFICIAL INSECTS The black bean aphid, Aphis fabae is a very common aphid with a huge number of host plants. Different beneficial insects against the black bean aphid have been tested to evaluate their respective performance in a production of Pittosporum tobira and this at variable scales. In the soilless studies, six beneficial insects have been tested, and attack rate and injury rate of thirty plants have been followed. Chrysoperla carnea seems to be the most efficient biological agent. At the same time experiments of predation and parasitism have been done at the scale of an entire plant and at the scale of a detached leaf. None of the parasitoid parasitizes Aphis fabae in this condition. Chrysoperla carnea have a predation rate of 3.1% in entire plant and of 21.5% in detached leaf, C. lucasina have in a predation rate of 8.3% and of 22.2. A new study based only on the lacewing could allow us to a better knowledge of their efficiency against Aphis fabae. Keywords: Integrated Pest Management, Chrysoperla lucasina, Chrysoperla lucasina, soilless culture, predation.

INTRODUCTION Le puceron noir de la fève, Aphis fabae (Scopoli, 1763) est un puceron très polyphage et ubiquiste infestant plus de 200 genres et espèces végétales dont des plantes ornementales comme le pittosporum du Japon, Pittosporum tobira (Thunb.) W. T. Aiton. Les pucerons entraînent des déformations foliaires et apicales sur cette plante. Ces dégâts d’ordre esthétiques sont fortement dommageables pour la qualité commerciale des plantes à feuillage persistant. Des moyens de lutte doivent donc obligatoirement être mis en oeuvre pour limiter ces infestations. La tendance actuelle est la réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires au profit de solutions alternatives. La lutte biologique par apport d'auxiliaires est l'une des possibilités envisagées pour réduire l'utilisation des produits phytosanitaires. Il existe de nombreux ennemis naturels du puceron noir de la fève, les Coccinellidae avec par exemple, Scymnus spp., Cryptolaemus montrouzieri (Mulsant, 1853) et Coccinella septempunctata (Linnaeus, 1758), des chrysopes (Chrysoperla, Chrysopa et Hemerobiidae), ainsi que le parasitoïde Lysiphlebus testaceipes (Cresson, 1880 ; Pons et Lumbierres, 2001). Il existe peu d'informations concernant l'influence des plantes hôtes sur la dynamique des populations d'Aphis fabae et sur celle des auxiliaires naturellement présents ou apportés pour lutter contre le puceron. Or, il convient d’identifier dans le cadre de la lutte biologique pour chaque plante hôte une stratégie de lutte adaptée aux conditions de culture et aux auxiliaires. C'est dans cet objectif que cette étude a été réalisée. Elle a pour finalité de déterminer l’auxiliaire le plus efficace contre Aphis fabae en culture hors-sol de Pittosporum tobira. En effet, il est souvent reporté dans la littérature qu’un auxiliaire efficace en conditions contrôlées peut perdre de son efficacité en conditions extérieures (Höller et Haardt, 1993). Trois échelles d'analyse ont été testés dans cette étude pour identifier l'efficacité des auxiliaires, au niveau de la parcelle en

conditions extérieures, au niveau d'une plante entière dans un cylindre fermé 'insect-proof' et au

niveau d'une feuille détachée en boîte de Petri. Le choix des auxiliaires à tester est fait en fonction d'éléments bibliographiques indiquant leur efficacité contre Aphis fabae et de leur disponibilité commerciale. Les chrysopes dites « vertes » sont des insectes de l'ordre des Névroptères, de la famille des Chrysopidae et du genre Chrysoperla. On les nomme souvent toutes Chrysoperla carnea (Stephens, 1836), mais il existe très certainement un complexe d’espèces comprenant sous le même nom plusieurs espèces. La nomenclature française des espèces de ce complexe peut se présenter ainsi ; Chrysoperla carnea sensu Thierry, Chrysoperla lucasina (Lacroix, 1912), Chrysoperla affinis (Stephens, 1836) et Chrysoperla agilis (Henry, Brooks, Duelli & Johnson, 2003), ces différentes espèces ont été identifiées grâce à leur chant de cour qui varie suivant l'espèce (Henry et al. 1996, Henry et al. 2002), néanmoins les auteurs ne sont pas tous d'accord actuellement sur le nom des espèces (Villenave, 2006). Une remise en question de la bibliographie antérieure aux identifications de ces chrysopes s'impose, car ces études portent en fait sur Chrysoperla carnea sensu lato, sans identification des différentes espèces de ce complexe. Les chrysopes sont des auxiliaires polyphages. La larve peut s'attaquer à de nombreux ravageurs comme les pucerons, les thrips, les aleurodes, les acariens, les cochenilles, les œufs et larves de papillons et certaines larves de mouche mineuse (Caldumbide et al., 2001). Les Chrysoperla carnea sont parmi les chrysopes vertes, les auxiliaires les plus largement commercialisés pour la lutte contre les pucerons. De ce fait, elles ont été choisies pour cette étude. Des éléments bibliographiques montrent une efficacité de Chrysoperla lucasina contre Aphis fabae sur la culture d'artichaut en Bretagne (Maisonneuve et al., 2003). C’est pourquoi, nous avons choisi de comparer la capacité de ces deux espèces pour lutter contre ce bioagresseur. D’autres auxiliaires peuvent aussi s’alimenter de pucerons. Des hyménoptères parasitoïdes tel que Aphidius matricariae (Haliday, 1834) présente au regard de la bibliographie (Tahriri et al., 2007,

2010) un intérêt pour la régulation d’Aphis fabae. Des conditionnements de différentes espèces d’endoparasitoïdes et d’ectoparasitoïdes sont disponibles sur le marché (BasilProtect – Viridaxis). Ainsi, nous avons testé en condition de culture extérieure, l'application de l'un de ces conditionnements en choisissant le tube contenant la plus grande proportion d’Aphidius matricariae. Pour les tests sur plante entière et sur feuille détachée, seuls les parasitoïdes présents dans le tube de BasilProtect et ayant une efficacité probable sur Aphis fabae sont testés. Il s’agit de Aphidius matricariae, Aphidius colemani (Viereck, 1912), Aphelinus abdominalis (Dalman, 1820) et Praon volucre (Haliday, 1833).

MATERIEL ET MÉTHODE

MATERIEL VEGETAL L'essai est mené sur Pittosporum tobira (Thunb.) W. T. Aiton. Les plantes réceptionnées sous forme de jeunes plants en godet sont ensuite empotées en conteneurs de trois litres dans un substrat Star JP FT MOD3 SF avec une fertilisation incorporée de 3 kg/m3 d'Osmocote PRO 8/9 mois plus 2 kg/m3 d'Osmocote PRO 12/14 mois. Les plantes sont empotées au mois de mars et sont installées en condition extérieur en avril 2013. L'essai se termine dès que le stade commercial de la plante est atteint (fin novembre 2013). Les plantes utilisées pour les tests en cylindre ‘insect-proof’ et en boîte de Petri suivent le même itinéraire cultural que les plantes en hors sol et sont séparées géographiquement des autres plantes. Ces plantes sont soit infestées naturellement soit inoculées à l'aide d'adultes aptères d'Aphis fabae issus d’une population naturelle prélevés sur des Pittosporum tobira, indépendant des parcelles expérimentales en milieu extérieur.

METHODE En culture hors-sol en milieu extérieur, six modalités expérimentales sont testées. Ces modalités correspondent à différentes stratégies de lutte contre Aphis fabae. Modalité n°1 lutte conventionnelle, la parcelle expérimentale est traitée avec un produit

phytosanitaire utilisé dans le lutte contre ce puceron (flonicamid 500g/kg à une dose de 0,140 kg/ha) et présentant peu d’effets secondaires sur les différents stades des insectes auxiliaires ainsi qu’une faible persistance dans le temps (inférieur à 1 semaine). Les traitements sont réalisés lorsque le seuil d’intervention est atteint soit l’observation de 50% de plante infestées par un niveau 3 ou 4 d’attaque de pucerons dans la modalité. La modalité à été traité une seule fois lors de l’essai, le 28/06/2013.

Modalité n°2 Chrysoperla carnea, avec un apport de 10 individus/m² toutes les trois semaines. Les larves de chrysopes sont achetées sous forme de Chrysopa-System (Biobest, France) ou de Chrysopa (Koppert, France) respectivement sous forme de plaquettes cartonnées ou de flacons contenant des larves.

Modalité n°3 Chrysoperla lucasina, avec un apport de 10 individus/m² toutes les trois semaines. Les chrysopes sont obtenues sous forme de larve venant d'émerger (IF Tech, France).

Modalité n°4 Aphidius matricariae avec un apport de 2 individus/m² toutes les deux semaines. Les parasitoïdes sont obtenus auprès de Biobest sous forme de momies de pucerons prêtes à émerger.

Modalité n°5 tube de Basilprotect (Koppert, France), contenant les parasitoïdes Aphidius colemani, Aphidius matricariae, Aphidius abdominalis, Aphidius evri (Halliday, 1833), Praon volucre et Ephedrus cerasicola (Stary, 1962), avec l'apport d'un tube/200 m², le tube est changé toutes les deux semaines. Les tubes sont obtenus auprès de Koppert.

Modalité n°6 associe les Chrysoperla lucasina avec un tube de Basilprotect, le tout avec les mêmes fréquences et doses d'apport.

Les premiers apports sont effectués le 22 mai 2013 pour les modalités Chrysoperla carnea et Aphidius

Figure 1 : Niveaux d'attaque d'Aphis fabae sur Pittosporum tobira Attack rates of Aphis fabae on Pittosporum tobira De gauche à droite, niveau 0 : absence de puceron ; niveau 1 : présence de fondatrice ailée; niveau 2 : présence d'une fondatrice ailée avec quelques larves ; niveau 3 : colonie avec plusieurs fondatrices aptères ; et niveau 4 : colonie avec plusieurs fondatrices aptères et une ou plusieurs fondatrices ailées.

matricariae, le 23 mai pour la modalité BasilProtect et le 3 juin pour la modalité Chrysoperla lucasina. Cette dernière n’a pas été positionnée sur les Pittosporum en même temps que les Chrysoperla carnea suite à un problème de livraison. Afin de respecter la dose d'apport, les auxiliaires ont été apportés sur la culture à l'aide d'un pinceau. Les doses ont été choisies en fonction des doses recommandées par les fournisseurs. Toutes les modalités ont reçu un traitement au flonicamid 500g/kg à 0,140 kg/ha le 07 mai 2013 en début d'essai pour éliminer les pucerons déjà présents et pouvoir évaluer les nouvelles infestations naturelles et suivre d’apparition de pucerons et de dégâts. Pour les tests sur plantes entières et feuilles détachées, les différents macro-organismes utilisés sont : Chrysoperla carnea, Chrysoperla lucasina et Cryptolaemus montrouzieri (Muls) ainsi que les Aphidius matricariae, les Aphidius colemani, les Aphelinus abdominalis et les Praon volucre.

DISPOSITIF EXPERIMENTAL L'essai est réalisé sur une plateforme de culture hors-sol de la station de recherche et développement GIE Fleurs et Plantes du Sud-Ouest à Bordeaux/Astredhor, France, chaque modalité est constituée d’une parcelle unitaire de 45 plantes et une parcelle élémentaire mesure 4,8m². Sur les 45 plantes, 30 plantes sont suivies au cours de l'essai, les 15 autres servent de bordures. Trois plantes de service sont ajoutées dans chaque modalité, afin d'observer leurs effets sur les auxiliaires et sur les ravageurs. Il s’agit de Ribes rubrum (L., 1753), Potentilla fructicosa (L., 1753) et Hieracium pilosum (Scleich. ex Froël, 1838). Le choix de ces plantes est en lien avec les essais menés à la station d’expérimentation de l'Arexhor Pays de la Loire (Angers). Dans le cas de dépassement du seuil de nuisibilité dans une modalité en lutte biologique qui est de 50% plantes au niveau 3 ou 4 d’attaque de puceron, un traitement chimique est appliqué. C’est le cas pour les modalités Aphidius matricariae, BasilProtect et BasilProtect + Chrysoperla lucasina le 02/07/2013. Ces modalités sont traitées indépendamment lors de l’analyse des données à partir de cette date.

ÉVALUATION DE L'EFFICACITE DES AUXILIAIRES VIS-A-VIS D'APHIS FABAE Niveau d'attaque et classe de dégâts

Toutes les deux semaines à partir du 07 mai 2013 jusqu'à la fin de l'essai, le niveau d'infestation et la classe de dégâts de l'apex le plus infesté de chaque plante suivie sont notés. Les auxiliaires présents sur l'ensemble de la plante sont aussi quantifiés. Cinq niveaux d’infestation sont établis : niveau 0 : absence de puceron niveau 1 : présence de fondatrice ailée niveau 2 : présence d'une fondatrice ailée avec quelques larves niveau 3 : colonie avec plusieurs fondatrices aptères niveau 4 : colonie avec plusieurs fondatrices aptères et une ou plusieurs fondatrices ailées Ces niveaux sont illustrées figure 1.

Les classes de dégâts sont au nombre de quatre : classe 0 : absence de dégâts classe 1 : quelques déformations foliaires classe 2 : apex et/ou feuilles déformés classe3 : pousse bloquée et jaunissement du bord des feuilles Ces classes sont illustrées figure 2.

Mesure de hauteur Des mesures de hauteur en cours d’essai sont réalisés afin d’évaluer si la croissance des P. tobira est impactée par les pucerons en fonction de l’auxiliaire utilisé.

Classes commerciales Les classes commerciales des plantes de chaque modalité sont relevées le 28 septembre 2013. Les classes sont : classe A : Sans défaut commercial classe B : Avec quelques défauts mais commercialisable classe C : non commercialisable Ces relevés montrent l'influence du choix de l'auxiliaire sur la qualité finale des plantes. Ces classes sont illustrées figure 3.

Figure 2 : Classes de dégâts d'Aphis fabae sur Pittosporum tobira Classes of damage of Aphis fabae on Pittosporum tobira De gauche à droite, classe 0 : absence de dégâts ; classe 1 : quelques déformations foliaires ; classe 2 : apex et/ou feuilles déformés ; classe3 : pousse bloquée et jaunissement du bord des feuilles.

Figure 3 : Classes commerciales de Pittosporum tobira Commercial classes of Pittosporum tobira De gauche à droite, classe A : sans défaut commercial; classe B : avec quelques défauts mais commercialisable ; classe C : non commercialisable

TESTS DE PREDATION/PARASITISME Tests sur plantes entières

Une plante est placée dans un cylindre ‘insect-proof’ (62,5*28 cm) pendant 24 h, les pucerons présents sur la plante sont comptés au début et à la fin de l'expérience. Un prédateur (Chrysoperla lucasina, Chrysoperla carnea ou Cryptolaemus montrouzieri) ou un parasitoïde (Aphidius matricariae, Aphidius colemani ou Aphelinus abdominalis) est mis sur la plante et est retiré à la fin de l'expérience. Chaque test est répété six fois pour chaque modalité. Dans le cas des parasitoïdes, les momies de pucerons sont comptées une semaine plus tard. Tous les auxiliaires déjà présents sur la plante sont retirés pour ne pas perturber l’essai. Un témoin sans auxiliaire est réalisé parallèlement pour pouvoir observer la mortalité naturelle des pucerons dans les conditions expérimentales. Le taux de prédation ou de parasitisme est calculé pour chaque répétition (nombre de pucerons consommés ou parasités sur le nombre de pucerons présents initialement).

Tests sur feuilles détachées Une feuille infestée par vingt pucerons est placée dans une boîte de Petri (8*1,5 cm) fermée à l'aide de parafilm, pendant 24 h. Un prédateur ou un parasitoïde (mêmes auxiliaires que pour les tests en plantes entières) est mis dans chaque boîte et est retiré à la fin du test. Ceci est répété vingt fois pour chaque modalité. Les comptages suivent les mêmes modalités que ceux réalisés en cylindre ‘insect-proof’ et le taux de prédation ou de parasitisme est calculé de la même façon.

TRAITEMENT STATISTIQUE Tous les tests statistiques réalisés l'ont été avec un risque de première espèce alpha de 0,05. Les données brutes concernant les niveaux d'attaque et les classes de dégâts sont analysées séparément pour chaque date de relevé. Les données sont analysées en utilisant un test du Khi² en comparant deux classes : absence de pucerons ou de dégâts et présence de pucerons ou de dégâts. Les moyennes pondérées obtenues pour chaque modalité sont ensuite comparées grâce à une analyse de variance. Si les données respectent les postulats de l'ANOVA, ce test est employé, sinon un test non paramétrique Kruskal-Wallis est appliqué. Si des différences significatives sont observées suite à ces tests, un test de comparaison multiple, sera mis en place (test de Turkey HSD pour l'ANOVA ou un test de Nemenyi pour l’ANOVA non paramétrique). Les données de hauteur des modalités sont analysées grâce à une ANOVA ou un test de Kruskal-Wallis. Dans le cas de différences significatives, on applique la même procédure statistique que pour les données de niveau d'attaque et de classe de dégâts. Les classes commerciales sont analysées grâce à un test du Khi². Les moyennes de taux de prédation et de parasitisme sont comparées grâce à une ANOVA ou un test de Kruskal-Wallis. Dans le cas de différences significatives, la même procédure statistique que pour les données de niveau d'attaque et de classe de dégâts est appliquée. RESULTATS

ÉVALUATION DE L'EFFICACITE DES AUXILIAIRES VIS-A-VIS D'APHIS FABAE EN MILIEU EXTERIEUR

Niveau d'attaque et classe de dégâts Les modalités Aphidius matricariae, BasilProtect et BasilProtect + Chrysoperla lucasina ont

nécessité un traitement phytosanitaire (02 juillet) pour contrôler la progression des populations de pucerons. En effet, les auxiliaires seuls n’ont donc pas pu réguler efficacement les populations de pucerons.

Il existe des différences significatives entre les modalités aux dates du 29 mai, 11 juin, 25 juin et 09 juillet pour les niveaux d’attaque et du 11 juin, du 25 juin, du 09 juillet et du 23 juillet pour les classes de dégâts.

Concernant les niveaux d’attaque, en analysant les composantes de la statistique du khi² on observe que les modalités diffèrent principalement car la modalité C. carnea présente moins de plante infectées par Aphis fabae aux dates du 11 juin, du 25 juin et du 09 juillet, le 29 mai les différences entre les modalités s’explique par les modalités C. lucasina et BasilProtect qui présentent une plus forte infestation (figure 4).

Figure 4 : Evolution du niveau d’attaque de puceron sur Pittosporum tobira Time variation of attack rates of aphids on Pittosporum tobira Le pourcentage de dégâts (effectif des classes 1, 2, 3 et 4 sur l’effectif total multiplié par cent) de chaque modalité est représenté pour chaque date. La modalité Chrysoperla carnea présente au cours de l’essai un pourcentage d’attaque plus faible que les autres modalités, inférieur à 40% pour toutes les dates de relevés.

Concernant les classes de dégâts, en analysant les composantes de la statistique du khi² on

observe que les modalités diffèrent car la modalité C. carnea présente moins de plantes endommagées par Aphis fabae aux dates du 11 juin, du 25 juin et du 09 juillet, le 23 juillet ce sont les modalités C. carnea et C. lucasina ensemble qui présente moins d’infestation que le témoin en lutte conventionnelle (figure 5).

Figure 5 : Evolution des classes moyennes de dégât sur Pittosporum tobira Time variation of mean injury rates on Pittosporum tobira Le pourcentage de dégâts (effectif des classes 1, 2 et 3 sur l’effectif total multiplié par cent) de chaque modalité est représenté pour chaque date. La modalité Chrysoperla carnea présente au cours de l’essai un pourcentage de dégât assez faible, inférieur à 10% hormis pour la date du 20 août.

Mesure de hauteur Les mesures de hauteur effectuée lors de cet essai ne montrent aucune différence significative quelles que soient les dates de notation.

Classes commerciales Les résultats de notation des classes commerciales en fin d’essai pour chaque modalité sont représentés sur la figure 6. Figure 6 : Classes commerciales sur Pittosporum tobira Commercial classes on Pittosporum tobira

Seules les modalités BasilProtect et BasilProtect + C. lucasina sont différentes du témoin (lutte conventionnelle). La modalité BasilProtect diffère du témoin principalement par son nombre de classe A (inférieur) et de classe C (supérieur). La modalité BasilProtect + C. lucasina se détache du témoin par son nombre de classe A (supérieur) et de classe C (supérieur). Par ailleurs ces deux modalités sont celles qui présentent les effectifs en classe C les plus importants, soit le plus grand nombre de plantes de mauvaise qualité.

TESTS DE PREDATION OU DE PARASITISME Tests sur plantes entières et sur feuilles détachées

Les tests de parasitisme en cylindre ‘insect-proof’ ne permettent pas de mettre en évidence du parasitisme sur Aphis fabae et ce pour tous les parasitoïdes testés. Seul un test avec Aphidius matricariae permet d'obtenir un taux de parasitisme de 1,6%. Les résultats des tests de prédation sont présentés dans le tableau 1, on obtient des niveaux de prédation en cylindre ‘insect-proof de 3,1% pour C. carnea et de 8,3% pour C. lucasina. Pour ce qui est des boîtes de Petri, la prédation est de 21,5% C. carnea et de 22,2% pour C. lucasina.

Auxiliaires Chrysoperla carnea Chrysoperla lucasina

% Prédation cylindre ‘insect-proof’ 3.1ns 8.3ns

% Prédation boîte de Petri 21,5ns 22.2ns

Des tests similaires ont été effectués pour la coccinelle Cryptolaemus montrouzieri. Aucune prédation n'a été observée par cet auxiliaire dans les tests sur feuilles détachées, néanmoins sur plantes entières une réduction importante des populations de pucerons est observée. Dans les tests sur plante entière un comportement de fuite des pucerons a pu être observé.

Tableau 1 : Pourcentage de prédation d'Aphis fabae en cylindre ‘insect-proof’ et boîte de Pétri, ns = non significatif entre cylindre ‘insect-proof’ et boîtes de Pétri. Percentage of predation of Aphis fabae in insect-proof box and Petri dishes, ns = no difference between ‘insect-proof’ box and Petri dishes.

DISCUSSION Les objectifs de cette étude étaient de d’étudier les performances de diverses espèces d’auxiliaires pour lutter contre Aphis fabae.

Dans notre étude, 10 Chrysoperla carnea/m² ont été appliquées et le contrôle d'Aphis fabae a été satisfaisant tout au long de l'essai. Les Chrysoperla lucasina positionnés plus tardivement, présentent une plus faible efficacité. Ces faibles performances sur Pittosporum tobira s'expliquent par le décalage dans les périodes de lâchers. En effet, les niveaux d’attaque sont plus élevés pour la modalité C. lucasina lors du lâcher du 3 juin (53% des plantes infestées au 11 juin) par rapport au lâcher de C. carnea réalisé le 22 mai (2% des plantes infestées au 22 mai). Ces observations semblent montrer que les lâchers de Chrysopes contre Aphis fabae sont plus efficaces lorsqu’ils sont réalisés à des niveaux d’attaque faibles. Les tests sur plantes entières et sur feuilles détachées ne mettent pas en évidence de différence de prédation de Aphis fabae entre C. carnea et C. lucasina ce qui appuie l’hypothèse du manque d’efficacité de C. lucasina sur les parcelles expérimentales consécutif à des lâchers plus tardif sur des populations de Aphis fabae plus importantes. Des études ont montré l'efficacité de Chrysoperla lucasina vis-à-vis de Aphis fabae en culture d'artichaut en Bretagne (Maisonneuve et al., 2003) et de Chrysoperla carnea en culture de fraise en Aquitaine (Turquet et al.,2009) et en conditions contrôlées (Khan et Zaki, 2008). Dans leur expérience, Turquet et al. (2009) ont montré que l'application de 3,8 Chrysoperla carnea/m² toutes les deux semaines permettait un contrôle d'Aphis fabae sur fraisier. Aucun parasitisme n’est observé sur plantes entières, même pour Aphidius matricariae. Les essais en extérieur confirment ces résultats. Les modalités utilisant des parasitoïdes ont de plus nécessité un traitement avec un aphicide. Ces modalités présentent une valeur commerciale plus faible que le témoin traité chimiquement. Nos résultats ne montrent donc pas d’efficacité des parasitoïdes testés vis-à-vis de Aphis fabae en culture hors-sol. Ces résultats s'accordent avec ceux de Tahriri et al. (2010) en culture de fève qui montrent qu'une femelle d'Aphidius matricariae issue d’une momie de puceron de Aphis fabae ne produit que 16 à 20 œufs. Saljoqui et Emden (2003) ont observé quant à eux que ce nombre d’œufs était de 200 sur Myzus persicae. De plus l’expérience de Tahriri et al. (2010) montre aussi des différences significatives entre les performances d'Aphis fabae et d'Aphidius matricariae suivant le cultivar de fève utilisé. Dans notre essai, nous avons utilisé des Pittosporum tobira, ces plantes pourraient avoir un effet négatif sur les performances d'Aphidius matricariae et d’autres parasitoïdes. Hagvar et Hofsang (1994) ont montré que le parasitoïde Ephedrus cerasicola a en situation de choix une préférence pour une plante en particulier et une espèce de puceron. En effet, si l’on observe les environs de la parcelle d’essai, il y a d'autres plantes hôtes d'Aphis fabae et d'autres espèces de pucerons, comme Aphis spiraecola (Patch, 1914), qui peuvent être plus appétants pour les parasitoïdes utilisés. Cela peut être l'une des raisons de la faible performance de ces derniers. Néanmoins, des momies de pucerons sont observées en extérieur et en nombre important. Ces momies sont pour la plupart des momies dues au parasitisme d'Aphidius spp. et de Lysiphlebus sp., un parasitoide indigène. Le parasitisme est donc possible sur le couple Aphis fabae/Pittosporum tobira mais l’efficacité d’une stratégie de lutte basée uniquement sur les parasitoïdes reste cependant incertaine.

CONCLUSION

Nous avons pu montrer l’intérêt des chrysopes pour la lutte contre le puceron noir de la fève. Mais il reste encore énormément de recherches à effectuer sur les interactions plante/ravageur/auxiliaire compte-tenu du peu d’information disponible sur Aphis fabae et sur les auxiliaires de ce puceron sur Pittosporum tobira. Ce programme de recherche appliquée continue afin de déterminer les performances des différentes espèces de chrysopes vis-à-vis de Aphis fabae en tenant compte des

stades de développement des végétaux et du climat afin de définir des seuils d’intervention optimaux pour les lâchers d’auxiliaires. Dans les études futures, seules les espèces de chrysopes seront étudiées et afin d'affiner les résultats de nombreuses répétitions vont être menées en boîtes de Petri et en cylindres ‘insect-proof’. De plus, l’impact du parasitisme naturel en favorisant un environnement propice à l’installation de Lysiphlebus sera mis à l’étude BIBLIOGRAPHIE Caldumbide C., Faessel L., Travers M., Thierry D. & Rat-Morris E., juillet-août 2001 - Les chrysopes communes, auxiliaires polyvalents. D'abord qui sont-elles ? Et peut-on les protéger en hiver ? PHYTOMA ; La défense des Végétaux, 540, 14-19. Henry C. S., Brooks S. J., Duelli P., Johnson J. B., mars 2002 - Discovering the true Chrysoperla carnea using song analysis, morphology, and ecology. Annals of the Entomological Society of America, 95, 2, 172-191. Henry C. S., Brooks S. J., Johnson J. B., Duelli P., 1996 - Chrysoperla lucasina: a distinct species of green lacewing, confirmed by acoustical analysis. Systematic Entomology, 205-218. Höller C., Haardt H., 1993 - Low field performance of an aphid parasitoid Aphelinus abdominalis, efficient in the laboratory. Entomophaga, 115-124. Khan A. A., Zaki F.A., 2008 - Predatory response of Chrysoperla carnea feeding on the Euonymus aphid, Aphis fabae solanella in Kashmir. Journal of Biological Control, 22, 1, 149-154. Maisonneuve J. C., Hugon N., Lolivier F., 2003 - Biological control with Chrysoperla lucasina against Aphis fabae on artichoke in Britany. Integrated Control in Field Vegetable Crops, IOBC wprs, 26, 3, 149-153. Pons X., Lumbierres B., 2001 - Aphids on ornamental shrubs and trees in an urban area of the Catalan coast: bases for an IPM programme. Aphids in a new millennium. Proceeding of the Sixth International Symposium on Aphids, Rennes, France, 359-364. Saljoqi A.U.R., Emden H.F., 2003 - Differential susceptibilities of peach-potato aphid, Myzus persicae and its parasitoid Aphidius matricariae to foliar insecticides on partially resistant and susceptible potato cultivars. Pakistan Journal of biological Science, 6, 4, 386-393. Tahriri S., Talebi A. A., Fathipour Y., Zamani A., 2007 - Host stage preference, functional response and mutual interference of Aphidius matricariae on Aphis fabae. Entomological Science 10. 323-331 Tahriri S., Talebi A. A., Fathipour Y., Zamani A., 2010 - Life history and demographic parameters of Aphis fabae and its parasitoid, Aphidius matricariae on four sugar beet cultivars. Acta entomologica serbica, 15, 1, 61-73. Turquet M., Pommier J.J., Piron M., Lascaux E., Lorin G., 2009 - Biological control of aphids with Chrysoperla carnea on strawberry. Proceeding of the Sixth International Strawberry Symposium, 641-644. Villenave J., 2006 - Étude de la Bio-Écologie des Névroptères dans une perspective de Lutte Biologique par Conservation. Thèse de Doctorat en Biologie des Organismes : Institut National d'Horticulture, 241.