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Africanisme comme discours: Liminaire Author(s): V. Y. Mudimbe Source: Canadian Journal of African Studies / Revue Canadienne des Études Africaines, Vol. 20, No. 1 (1986), pp. 1-3 Published by: Taylor & Francis, Ltd. on behalf of the Canadian Association of African Studies Stable URL: http://www.jstor.org/stable/484692 . Accessed: 15/06/2014 12:50 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Taylor & Francis, Ltd. and Canadian Association of African Studies are collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Canadian Journal of African Studies / Revue Canadienne des Études Africaines. http://www.jstor.org This content downloaded from 185.44.79.62 on Sun, 15 Jun 2014 12:50:19 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

Africanisme comme discours: Liminaire

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Africanisme comme discours: LiminaireAuthor(s): V. Y. MudimbeSource: Canadian Journal of African Studies / Revue Canadienne des Études Africaines, Vol.20, No. 1 (1986), pp. 1-3Published by: Taylor & Francis, Ltd. on behalf of the Canadian Association of African StudiesStable URL: http://www.jstor.org/stable/484692 .

Accessed: 15/06/2014 12:50

Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at .http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp

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Africanisme comme discours: Liminaire

V.Y. Mudimbe

Le theme de l'Africanisme comme discours a probablement surpris plus d'un durant la r6union de l'African Studies Association a Los Angeles, il y a deux ans. C'est que nous sommes habitu6s A lier notre connaissance de

l'Afrique a l'histoire des parcours concrets de l'arrangement de l'espace et des etres en Afrique sous la colonisation. Notre guide est, g6n6ralement et de maniere exemplaire, l'anthropologie qui, comme miroir, disait et dit encore refl6ter les structures r6elles des pouvoirs traditionnels et

l'organisation de la production dans les anciennes soci6tes africaines. C'est cette evidence que nous avons voulu interroger et dont t6moignent, entre

autres, les articles repris en ce num6ro. Ii n'est pas 6vident que l'Africanisme tel qu'il s'exerce encore ne repose

pas, pour ne pas dire plus, sur un malentendu majeur. De maniere essen-

tielle, il demeure le signe d'une conquete qui, parce que forte de son propre code, s'est 6tablie en source de savoir et fondement d'une connaissance. La

magnifique collaboration entre l'anthropologie appliqu6e et la colonisation

semble, a beaucoup, avoir 6te un cas extreme et exceptionnel de quadrillage conceptuel et politique. D'ailleurs, pour la plupart d'entre nous, c'est un

exemple du pass6 et ses signatures meme dans la chair d'hommes et de femmes d'Afrique ne d1livrent plus rien, a part les cons6quences de l'efficace des registres coloniaux et de leurs terribles proprietes. En fait, nous oublions, parce que nous voulons bien oublier, que ce qui s'est constitu6 ou

marqu6 li n'indique pas seulement des signes d'un pouvoir qui a disparu avec la d6colonisation officielle, mais plut6t, et probablement de maniere

Nous avons reuni sous ce titre deux communications presentees a la 27eme reunion annuelle de l'African Studies Association du 25 au 28 octobre 1984 A Los Angeles. Une troisibme communication initialement prevue, n'6tant pas prete pour la publication, a di etre retiree la derni re minute. Nous associons g ce dossier le texte de J. Copans qui parait dans la section "Debats et Commentaires." Un autre choix de communica- tions portant sur le meme theme parait dans la revue suisse Geneve-Afrique.

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2 CJAS / RCEA XX:I I1986

plus importante, un symbole: comme une robe de bure, le discours anthro-

pologique s'est rajeuni, redefini, et retrouve en son essence et en ses ambi- tions de naguere.

En effet, nous 6tions nombreux, dans les ann6es 196o, a souhaiter la fin de l'Africanisme, et singulierement de l'anthropologie, A cause de ce qu'ils incarnaient a nos yeux. Nous venions de pays et de milieux les plus diff6rents et, ideologiquement, nous nous savions tous fils ou petit-fils de Marx. La fin de la colonie signifiait pour nous l'universalisation de la libert6, de ses signes et la possiblit6 d'un nouveau discours sur l'homme qui n'aurait ni les clauses de l'exploitation, ni les pleonasmes a propos d'oppositions c61ebres entre Civilisation et Sauvagerie.

Aujourd'hui, nous ne pouvons que constater l'6chec de nos raves. Les alibis des discours savants sur les "sauvages" sont plus propices que jamais. Ils d6chiffrent, a present, la g6n6rosit6 tragique des d6ferlements intellectu- els qui, autrefois, ont remis en question la souverainet6 du Meme, au nom des ins6curit6s et des droits de l'Autre. D'autre part, afin de fonder la cri-

tique de cette subversion, la n6tre, qui aurait, malencontreusement, intro- duit le doute dans l'usage des normes du Meme, la preuve par la raison et la

parole - hier, c'6tait par la force - se donne, aujourd'hui, dans l'6vidence de la fragilit6 des systemes politiques et humains africains, et de leurs aberra- tions.

Et je me suis dit: je suis et, en ce contexte, je ne peux etre qu'un "sau-

vage," comme tous les miens. Mais qu'est-ce qui sanctionne donc ce

qualificatif? Et dans le discours scientifique, oii s'articule exactement l'6cart qui, en verit6 et validit6, signiferait et justifierait les figures de l'incoh6rence dans l'exercice du pouvoir en Afrique? Et comment le penser, cet 6cart, sans remettre radicalement en cause, d'une part, l'h6ritage du quadrillage colo- nial, et d'autre part, les proc6dures intellectuelles qui, d'abord, ont "invente" l'Afrique et sa "sauvagerie," ensuite ordonn6 les grilles et m6thodes d'une science africaniste et ses objectifs?

Ainsi, lorsque avec le concours du Joint Committee on African Studies of the Social Science and the American Council of Learned Societies, j'ai conqu les ateliers sur I'Africanisme qui se tinrent '

Los Angeles, mon projet 6tait premierement, de susciter une interrogation sur la pertinence des discours d6crypteurs de l'Afrique. Deuxiemement, a tort ou a raison, je pen- sais qu'a la veille du vingt-cinquieme anniversaire des ind6pendances, il etait utile de reexaminer les conquetes et mystifications conceptuelles qui ont reuni en un meme elan renovation de l'espace africain et materialisme dialectique.

Au lendemain de la rencontre, le plus clair 6tait que les participants, qui, ideologiquement, venaient de tous les horizons de la recherche africaniste, dissociaient le discours scientifique ou litteraire sur I'Afrique de la pratique

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3 Mudimbe: Africanisme comme discours

politique africaine. Nous le savions deja dans les annees 196o et, c'est pour cela qu'avec naivete, peut-&tre, mais avec une sinc6rit6 reelle, notre

g6n6ration reva de concilier scene politique et coherence intellectuelle. De nos all6gories et espoirs, seule l'anthropologie que nous voulions tuer sem- ble avoir surv6cu, altiere, plus orgueilleuse que jamais et de1ivrant, magis- tralement, des discours polys6miques sur des lieux communs a propos d'etre Africain en cette fin du vingtieme siecle.

Les articles r6unis en ce num6ro indiquent des figures d'un d6sir discret mais fort, en deca ou au-dela des debats faciles. Ils ne d6noncent aucun mal en soi, n'exhibent aucune ouverture miraculeuse. Mais, j'aimerais esperer que, dans la patience de leurs h6sitations, le lecteur attentif pourra sentir les raisons qui cherchent et esquissent signes et sc6narios pour des trajectoires possibles a venir. Et je suis, personnellement, infiniment reconnaissant aux

organismes qui nous ont permis ce dialogue de Los Angeles sur la dignit6 des fr6n6sies verbales de l'Africanisme et l'ardeur de son pouvoir pour demain.

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