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AGRICULTEURS ET ACTEURS LOCAUX AUTOUR D’UN CONTRAT TERRITORIAL De février 2000 à juin 2001, sept réseaux associatifs (Accueil Paysan, l’Afip, la Fncivam, la Fncuma, l’Interafocg, le MRJC et l’UNCPIE) se sont intéressés à la dimension territoriale des CTE. «Parent pauvre» du dispositif à ses débuts, le territoire est devenu incontournable, du moins dans les discours… Cette recherche-action s’est appuyée sur dix démarches collectives favorisant l’ouverture à des acteurs locaux non agricoles. Les réflexions et les résultats qui suivent s’adressent aux agriculteurs, aux structures d’appui qui les accompagnent et indirectement, à l’administration, aux élus locaux, environnementalistes ou encore représentants d’associations de consommateurs. Elles ont pour objectif d’inciter à conduire des démarches territoriales ambitieuses, en utilisant les CTE ou d’autres procédures. Jusqu’à présent, le bilan d’ensemble reste assez mitigé. La dimension territoriale du CTE ne s’est pas développée comme les réseaux associatifs l’auraient souhaité. Elle reste encore très insuffisamment prise en compte. Les résultats, parfois très significatifs, obtenus dans quelques uns des dix sites choisis démontrent pourtant qu’une telle approche est possible et qu’elle a des effets particulièrement intéressants. N° 197 • 25 septembre 2001 - 2 e tirage I AGRICULTEURS ET ACTEURS LOCAUX AUTOUR D’UN CONTRAT TERRITORIAL Dossier réalisé par l’Afip, à partir du travail de recherche-action mené par un groupe d'adhérents et partenaires associés du Celavar : Accueil Paysan, Afip, Fncivam, Fncuma, Inter-Afocg, MRJC, UNCPIE.

AGRICULTEURS ET ACTEURS LOCAUX AUTOUR D’UN … · la Ligue de protection ... agréé dans le domaine de la salmo-niculture, ... Afocg 70 - tél. : 038 47 66 27 0 . E• La Drôme

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AGRICULTEURS ET ACTEURS LOCAUXAUTOUR D’UN CONTRAT TERRITORIALDe février 2000 à juin2001, sept réseauxassociatifs (AccueilPaysan, l’Afip, laFncivam, la Fncuma,l’Interafocg, le MRJC etl’UNCPIE) se sontintéressés à la dimensionterritoriale des CTE.«Parent pauvre» dudispositif à ses débuts,le territoire est devenuincontournable, du moinsdans les discours… Cetterecherche-action s’estappuyée sur dixdémarches collectivesfavorisant l’ouverture àdes acteurs locaux nonagricoles. Les réflexions et lesrésultats qui suivent s’adressent auxagriculteurs, aux structures d’appui quiles accompagnent et indirectement, àl’administration, aux élus locaux,environnementalistes ou encorereprésentants d’associations deconsommateurs. Elles ont pour objectifd’inciter à conduire des démarchesterritoriales ambitieuses, en utilisant lesCTE ou d’autres procédures.Jusqu’à présent, le bilan d’ensemble

reste assez mitigé. La dimensionterritoriale du CTE ne s’est pasdéveloppée comme les réseauxassociatifs l’auraient souhaité. Elle resteencore très insuffisamment prise encompte. Les résultats, parfois trèssignificatifs, obtenus dans quelques unsdes dix sites choisis démontrentpourtant qu’une telle approche estpossible et qu’elle a des effetsparticulièrement intéressants.

N° 197 • 25 septembre 2001 - 2e tirage

I

AGRICULTEURS ET ACTEURS LOCAUXAUTOUR D’UN CONTRAT TERRITORIALDossier réalisé par l’Afip, à partir du travail de recherche-action mené par un groupe d'adhérents et partenaires associésdu Celavar : Accueil Paysan, Afip, Fncivam, Fncuma, Inter-Afocg, MRJC, UNCPIE.

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II

Les démarches étudiées sont trèsvariées : certains groupes se sontconstitués autour d’un projet deCTE, leurs membres étant intéresséspar la dimension collective et terri-toriale de l’outil ; parfois, ladémarche de projet de territoire estantérieure au CTE et celui-ci a pu ounon constituer un outil pertinentpour la mise en œuvre du projet ;ailleurs, une concertation locales’est engagée autour du CTE, maiselle tend à s’en éloigner, pour yrevenir peut-être plus tard.Par ailleurs, ces démarches avaient,au moins initialement, un«ancrage» soit agricole soit envi-ronnemental. Dans les deux cas,elles cherchaient à déterminer com-ment rencontrer «l’autre». La diversité des démarches est inté-ressante. Il faut le souligner afind’éviter la tentation de normaliserles approches territoriales.

A• Dans le Haut-Bocage(Deux-Sèvres), des dialogues constructifsFort de son expérience passé enmatière de Plan de développementdurable (PDD), le Civam du Haut-Bocage a pu élaborer, en partena-riat avec d’autres associations dedéveloppement agricole, un contrattype «Agriculture Durable Bocage»qui a été validé en janvier 2000.Depuis, cinq CTE ont été signés,neuf sont en attente d’instructionpar l’Adasea et trente-cinq agricul-teurs se sont inscrits à une forma-tion pour l’élaboration collective deleurs projets individuels de CTE.Une collaboration très fructueuses’est développée avec une grandevariété de partenaires. Lors de laphase de préfiguration des CTE, leRéseau agriculture durable de Poi-tou-Charentes (Civam, Ardear, pro-ducteurs fermiers, associations degestion, Afipar...) a organisé une

journée d’informa-tion sur le CTE etd’échange sur lesenjeux de terri-toire. Ont parti-cipé à cettejournée des repré-sentants d’AgrobioPoitou-Charentes, duMouvement des agricul-teurs biologiques de Cha-rente, du Conservatoiredu littoral, du CFPPA deMelle, du Forum desmarais Atlantiques, dela Ligue de protectiondes oiseaux, du Groupeornithologique desDeux-Sèvres, deVienne Nature, deDeux-Sèvres NatureEnvironnement, deCharente Nature, duSepronas, du CPIE de Fouras, duCPIE de Gâtine poitevine, de SOSRivières Charente maritime et de laFédération de pêche et de chasseCharente.Cette collaboration a notammentnourri le diagnostic de territoire quele Civam a réalisé fin 1999, puis adébouché sur la rédaction de«Douze propositions clés» pour leHaut-Bocage. Sur un plan tech-nique, des propositions relatives àla gestion des haies ou à la biodi-versité ont par exemple été élabo-rées conjointement par desagriculteurs, des techniciens agri-coles et des environnementalistes.C o n t a c t : CIVAM du Haut-Bocage - tél. : 054 98 18 02 9 .

B• Pour le CPIE du Velay(Haute-Loire), l’impressiond’un retour en arrièreAlors qu’il avait multiplié les colla-borations depuis 4 ans avec lasphère agricole dans le cadre de lamise en œuvre des mesures agro-environnementales, le CPIE du Velay

n’intervient pour le moment que surquelques dossiers : la participationà l’élaboration du cahier descharges d’un projet collectif de CTEagréé dans le domaine de la salmo-niculture, un projet de CTE indivi-duel sur la valorisation paysagèred’une colline (pelouse sèche) et,surtout, la mise en œuvre de Natura2000 dans le département, en lienavec les CTE.Pour le CPIE, cette situation résulted’une part de la difficulté qu’ont lesorganisations agricoles à s’ouvrirvers le milieu non agricole et,d’autre part, de la priorité donnéede fait par l’administration aux CTEindividuels, dans une logique deguichet et au détriment des CTE col-lectifs. Un espoir toutefois : alorsqu’il semblait oublié de tous, le dia-gnostic territorial que le CPIE a réa-lisé en 1999 pour la haute-vallée del’Allier vient de ressortir des tiroirs.Ce document vient en effet d’êtremis en avant par le bureau d’étudequi a été chargé de réaliser un nou-

Localisation des sites

Des actions diversement couronnées de succès

A

G

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I

B E

Ministère de l’Agriculture et de la PêcheRéalisation : DERF/Sous-direction de sections régionales et rurales

Sources : ARP / Septembre 2001

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III

veau diagnostic à la demande de lacommunauté de communes. C o n t a c t : CPIE du Velay - tél. : 047 10 30 11 7 .

C• L’association Pâturagesdu Coglais (Ille-et-Vilaine)se fait progressivementr e c o n n a î t r eDepuis juillet 1999, l’associationPâturages du Coglais regroupe desagriculteurs, des élus et des chargésde missions (chambre d’agriculture,collectivités territoriales, orga-nismes techniques). Animée parl’AFIP Bretagne, cette instanceréfléchit à la place de l’agriculturedans le développement du pays.Deux enjeux prioritaires sont identi-fiés : la préservation du paysagebocager et l’amélioration de la qua-lité de l’eau, très détériorée. Cestravaux débouchent sur l’élaborationd’un cahier des charges et le dépôtd’une déclaration d’intention, bien-tôt validée par la CDOA.Cette validation a été suivie, en juin2001, par la signature de trois CTE.Une vingtaine d’autres sont atten-dus d’ici à 2003. Le bassin versantconcerné totalisant 360 exploita-tions, ce résultat quantitatif est desplus modeste. Il n’en demeure pasmoins que l’ouverture initiée pardes agriculteurs trouve son pendantchez les élus : Pâturages du Coglaiscontribue à leur faire mieux prendreconscience des difficultés et descontraintes des agriculteurs. À par-tir de ce cahier des charges exi-geant, un projet de valorisation dulait est à l’étude, par le biais decontrats avec des laiteries.C o n t a c t : AFIP Bretagne - tél. : 029 94 18 85 8 .

D• La démarche exemplai-re du Groupe agriculturedurable de Haute-SaôneLe contrat-type élaboré par leGroupe agriculture durable (GAD),avec le soutien de l ’AFOCG deHaute-Saône, le CFPPA de Vesoul etla Chambre d’Agriculture, pour lescinq cantons de Lure, Noroy-le-Bourg, Saulx-de-Vesoul, Vesoul Estet Villersexel, a été validé le 3 avril2000. Au 1e r juin 2001, sept CTE

étaient validés dont cinq signés,trois projets d’exploitation étaientdéposés et onze autres étaient encours d’élaboration. Si les préoccupations collectivesétaient au départ axées sur l’agri-culture durable, la réalisation d’undiagnostic de territoire, par les agri-culteurs en partenariat avec lesélus, une association de développe-ment local, des environnementa-listes, des représentants de filièresagricoles a permis de mettre un toutautre enjeu en évidence : le main-tien de la population rurale, clé devoûte de la dynamique locale pourun département à relative faibledensité de population. De là ont étédéclinés d’autres enjeux, agricolesou non. Ainsi, le diagnostic de ter-ritoire a entre autre mis en évidencele peu d’infrastructures touristiquessur le territoire. Forts de près dedeux ans de réflexions communes,les agriculteurs du GAD ont doncdécidé de réfléchir à la mise enplace d’un réseau touristique sur leterritoire. Démarche qui a débuté àl’automne 2000.C o n t a c t : Afocg 70 - tél. : 038 47 66 27 0 .

E• La Drôme des collinesavance sans les organisa-tions professionnellesComposée de 85 communes (dont70 structurées en six communautésde communes), la Drôme des col-lines s’est dotée d’un syndicatmixte. Il lui faut maintenant affir-mer son identité dans un départe-ment déjà riche en terr itoiresrenommés (vallée de la Drôme, val-lée du Rhône, Royans-Vercors,Drôme provençale). Pour le CPIE,cela passe par la mise en valeur deson patrimoine spécifique. Et pourcet acteur non agricole, il va de soique l’agriculture locale peut joueren ce sens un rôle essentiel de parses produits de qualité et de par lamise en valeur qu’elle assure auxpaysages vallonnés.Cette analyse est partagée par leCivam «En avant la Drôme des col-lines», lequel est notamment à l’ori-gine, en 1993, des journées «Deferme en ferme». L’objectif de cette

opération est de valoriser les pro-ductions fermières en invitant lespopulations (en particulierurbaines) à visiter les lieux où ellessont élaborées. Le CPIE et le Civam se sont ainsiretrouvés sur la mise en placeconjointe d’un projet de valorisationdu patrimoine rural à traversl’accueil à la ferme. Ce projet per-mettra de développer différents par-tenariats, notamment avec lesyndicat mixte, des administrations(DDAF et DRAF, mais égalementDRAC), des Offices du tourisme.. Enrevanche, les contacts restentpauvres avec la Chambre d’Agricul-ture et l’Adasea. Basé sur uneapproche filière, le contrat-type dela Drôme des collines a été élaborépar la seule Chambre d’Agriculture. C o n t a c t : CPIE Drôme des collines - tél. : 047 50 53 02 2 .

F• Un travail de longuehaleine dans le Bocageouest-normandConstitué au départ d’une douzainede militants du MRJC, majoritaire-ment des jeunes agriculteurs, legroupe qui a pris l’initiative d’élabo-rer un contrat-type CTE pour leBocage ouest-normand a réussi àmobiliser sur ce projet une dizaine destructures agricoles et d’associationsenvironnementalistes. Il a obtenu lesoutien du Fond de financement duCTE pour mettre en place le cadred’un projet collectif de CTE et a orga-nisé à l’automne 2000 des réunionslocales d’information-sensibilisation.Le diagnostic participatif réaliséavec des acteurs locaux dans diffé-rentes parties du bocage en janvieret février 2001 a permis de dégagersix enjeux territoriaux pour leBocage ouest-normand : le maintiende sa spécificité bocagère ; l’emploi(notamment la transmission-reprisedes exploitations agricoles) ; laqualité de l’eau ; le lien agricul-teurs-consommateurs (avec à la cléune diversification des activités) ;la valorisation de produits de qua-lité et à haute valeur ajoutée ; lapréservation de la biodiversité.Enrichi d’informations sur les zonesconcernées par des programmes

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IV

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environnementaux (ZNIEFF et Natura2000) et sur les mesures déjà enplace concernant la qualité de l’eau(Contrats ruraux et SAGE principale-ment), ce travail de diagnostic adébouché sur un projet de contrat-type qui sera soumis aux CDOA etaux DDAF à l’automne 2001.C o n t a c t : ANFIPAR - tél. : 023 10 60 73 0 .

G• Cap’Eau Nort : la concertation territorialeprend formeLa Chambre d’Agriculture et la Fédé-ration départementale des Civam deLoire-Atlantique ont élaboréconjointement une déclarationd’intention. Intitulée «La dyna -mique de l’eau et du périurbain dansla région de Nort-sur-Erdre et la Val-lée de l’Erdre à travers la communica-tion citoyenne et durable», cettedéclaration d’intention a été validéele 18 mai 2000. Sur une zone sou-mise à une très forte pressionurbaine, les deux principaux objec-tifs de ce projet de «gestion durableet concertée d’un territoire» sont demettre le CTE au service du dialogueville-campagne et, d’autre part, d’enfaire un élément de résolution desconflits qui tendent localement às’envenimer (le territoire couvre unenappe phréatique qui alimente700 000 personnes en eau potable).Différents contacts ont été noués avecdes organisations de protection del’environnement et de consommateursainsi qu’avec des élus locaux. Sixréunions publiques ont été organisées.L’importance des divergences qui ontété exprimées à ces diverses occasionsa mis en évidence les questionnementsd’un grand nombre d’agriculteurs, tan-dis qu’une minorité a choisi la voie dela radicalisation. Aussi le grouped’agriculteurs (FDCIVAM et CA 44) por-teur du projet de CTE a décidé de favo-riser la concertation avec l’ensembledes acteurs territoriaux.C o n t a c t : FDCIVAM Loire Atlantique - tél. : 024 07 93 29 3 .

H• Une démarche rigoureuse en vallée de la MeuseLe CPIE Woëvre Côtes de Meuse a

été choisi comme opérateur d’unsite Natura 2000 de la vallée de laMeuse. Cette zone de prairies inon-dables héberge des espèces floris-tiques et faunistiques menacées etprotégées. Ses 2 410 ha relèvent dequatorze communes, lesquelles sontregroupées au sein de deux commu-nautés de communes.Les pratiques extensives ont ten-dance à régresser dans cette vallée.Le CPIE a estimé que le projet col-lectif CTE représentait un excellentoutil pour les développer et lespérenniser. Les deux objectifs assi-gnés à la définition d’un contrat-type pour ce terr itoire sont lemaintien d’une agriculture viablegarantissant la conservation dupatrimoine naturel ainsi qu’uneforte articulation avec les autresdispositifs existants ou annoncés(plan de développement des com-munautés de communes, mise enplace d’un pays, programmes euro-péens).Le CPIE a conduit sur ce site un tra-vail de diagnostic qui a égalementconstitué une phase de sensibilisa-tion-mobilisation des agriculteursconcernés, mais aussi d’autresacteurs du territoire. Cettedémarche continue à être animéepar le CPIE, en concertation étroiteavec la chambre d’agriculture, laDDAF et l’Adasea. Afin qu’elle soitpleinement participative, le groupede travail Agriculture, composé demembres du comité de pilotage(majoritairement liés à des associa-tions de protection de la nature), aété doublé d’un groupe de travailspécifique aux agriculteurs. En juin2001, ce second groupe réunit unequarantaine d’exploitants possédantdes parcelles sur le site. Ces exploi-tants participent à la mise en œuvredu contrat-type CTE.C o n t a c t : CPIE Woëvre Côtes de Meuse - t é l . : 03 2 98 73 66 5 .

I• En Charente, «l’espritCTE» se heurte à la logiquedes rapports de forcesL’accompagnement d'un groupe dejeunes agriculteurs qu’a réalisél'AFIPAR a débouché sur l’élabora-

tion d’un projet de contrat-type CTEpour le canton de Villefagnan. Cetteproposition a été présentée à laCDOA le 21 juillet 2000, laquelle ademandé que lui soit apporté uncertain nombre de précisions. Lesréponses fournies (voir en annexe)ont été examinées par la CDOA du23 novembre 2000, mais le projetde contrat-type a été rejeté aumotif principal que le découpageterritorial retenu (canton de Villefa-gnan) ne correspondait pas auxpriorités décidées par la commissionsur la base de critères environne-mentaux (bassins versants) ou éco-nomiques (filières territorialisées).Une forme de dérogation a néan-moins été accordée puisque la CDOAa accepté d'examiner les CTE indivi-duels présentés par les membres dugroupe, à condition qu’ils soientconstruits au moyen des contrats-type existant sur une partie du ter-ritoire de Vi llefagnan (un CTE«qualité de l'eau» et un CTE «biodi-versité»). L’invite la plus claire aété de travailler en lien avec lesgroupes de développement qu’animela Chambre d’Agriculture...C o n t a c t : AFIPAR - tél. : 054 92 91 59 6 .

J• Le Civam de Valençay(Indre) défrichepatiemment le terrainLa valorisation des fonds de valléesde la région de Valençay supposeque des activités agricoles y soientconduites. Ce point de vue est par-tagé par une grande diversitéd’acteurs locaux : des agriculteurs,bien évidemment, mais égalementles syndicats de rivières et les asso-ciations de pêcheurs, les offices dutourisme, des élus, les associationsde randonneurs... Pour tous, l’accèsà ces territoires (notamment auxberges), la lutte contre l’érosion despentes ou encore la qualité de leurspaysages doivent être améliorés parune relance des activités viticoles etherbagères. Le Civam de Valençay etdu pays de Bazelle a activementcontribué à cette prise deconscience en animant, depuis1994, des actions de sensibilisationet de remise en valeur du patri-

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V

Il peut paraître surprenant de posercette question, mais il se trouve queplusieurs des groupes engagés dansnotre recherche-action y ont étéconfrontés. Dans les projets étudiés,des acteurs extérieurs au milieuagricole ont été invités à se joindreà la démarche : des élus, des mili-tants associatifs (notamment desreprésentants des consommateurs etdes «usagers de la nature» tels quedes chasseurs, des pêcheurs, desrandonneurs...), des représentantsd’administrations (Diren, services duConseil général ou du Conseil régio-nal...), des agents de développe-ment local...Or le «droit à la parole» des acteursnon agricoles a été plusieurs foismis en cause par des responsablesou des institutions agricoles quiestiment que «le CTE est une affaireagricole». La marginalisation desreprésentants non agricoles dansnombre de CDOA relève de cetteapproche. De plus, le fait de ne pasappartenir à une structure reconnuepar les organisations agricolesmajoritaires dans le département aposé problème à certains groupesagricoles. Un même «légitimisme»se retrouve chez nombre d’élus quine peuvent envisager d’aborder unequestion agricole qu’avec laChambre d’Agriculture, «interlocu-teur habituel et légitime».Les groupes réputés minoritaires oumarginaux peuvent pourtant trouverune légitimité dans le fait de

contribuer au renouvellement ducontrat liant l’agriculture et lasociété La reconnaissance de cettelégitimité suppose notamment queleur démarche leur permette dedémontrer la valeur de leurapproche et de leurs propositions.Elle suppose aussi, pour ce quiconcerne plus particulièrement l’ins-truction de leur projet par la CDOA,qu’ils bénéficient de soutiens : lesprojets à ancrage environnementaldevront accroître autant que pos-sible leur «portage agricole»(sachant toutefois que cette condi-

tion n’est pas simple à remplirquand l’environnement agricoles’avère très «verrouillé») ; les pro-jets à ancrage agricole, quant à eux,renforceront leur légitimité en déve-loppant les soutiens extérieurs : trèsconcrètement, et même si les textesne le prévoient pas, on pourrait, parexemple, imaginer de joindre à unedemande individuelle de CTE destextes d’environnementalistes, deconsommateurs, d’élus, etc., expli-quant pourquoi, et à quelles condi-tions, ils soutiennent le projetprésenté.

Un manque de concertationL’analyse critique qu’a réalisée l’Afipar de la démarche qu’elle anime surle canton de Villefagnan (Charente), pour expliquer les difficultésrencontrées, est particulièrement éclairante : «Le travail a été mené avec trop peu d'ouverture sur l'extérieur, que ce soitrural non agricole ou agriculteurs. Les agriculteurs engagés dans le projetont d’abord craint d’une confrontation avec d’autres acteurs qu’elledébouche sur l’imposition de contraintes supplémentaires, parméconnaissance du métier d’agriculteur. Cette crainte s’est en partiedissipée dès la première rencontre Pourtant, la concertation avec desacteurs locaux a mis du temps à être acceptée par les agriculteurs dugroupe, qui ne voyaient pas ce qu’ils pouvaient en attendre. De ce fait,nous avons manqué de soutien et de légitimité devant la CDOA. Les enjeuxde territoire mis en avant sont avant tout posés par nous, même si larencontre de mars 2000 avec les acteurs non agricoles a permis à cesderniers de les valider mais pas vraiment de les partager ou se lesapproprier.»

moine local, tant naturel que bâti. La démarche impulsée par le Civamse heurte malheureusement au mor-cel lement extrême du foncier.Depuis 2000, un laborieux travail decartographie, de repérage desvignes préexistantes, d’identifica-tion des propriétaires, puisd’échanges à l’amiable a été entre-pris. Cette phase préparatoire s’est

d’emblée inscrite dans la perspec-tive d’une agriculture très intégréeau territoire. L’utilisation de l’outil CTE n’est doncpas encore tout à fait à l’ordre dujour. Le Civam a toutefois engagéun travail de concertation avec unCETA et un GDA afin d’examiner lespossibilités qu’offre aux fonds devallées le contrat-type que la

Chambre d’Agriculture de l’Indre aélaboré pour la petite région natu-relle du Boischaut Nord. Parailleurs, quand le moment sera venu(sans doute courant 2002), l’élabo-ration de CTE bénéficiera del’énorme travail de concertation etde réflexion collective engagé parles Civam.C o n t a c t : Civam de Valençay - tél. : 025 40 01 39 9 .

En quête de légitimité

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Quant aux acteurs non agri-coles, ils doutent souvent depouvoir réellement peser surles choses. Beaucoup d’entreeux considèrent que le CTErelève à la fois d’une méca-nique lourde et complexedans sa définition nationaleet d’un cadrage profession-nel très rigide au niveaudépartemental. Persuadésqu’ils ne pourront pas béné-ficier d’un minimum demarges de manœuvre, ilspréfèrent alors rester enretrait.Pourtant, certains espacesexistent. Par exemple, les réussitesde la Haute-Saône et du Haut-Bocage (voir encadré) prouvent quel’association d’une grande variétéd’acteurs peut enrichir considérable-ment la réflexion et permettre enconséquence de construire unedémarche solide et cohérente. Pour les acteurs environnementaux,il est stratégique de trouver desrelais auprès des élus : c’est à tra-vers ce type d’appui qu’ils augmen-teront leur légitimité aux yeux desagriculteurs. L’échelon départemen-tal, via le Conseil général, peutconstituer une bonne ported’entrée, qui peut-être ensuiterelayée par les structures intercom-munales. Ce qui pose la question dela légitimité des élus à «se saisir»des questions agricoles.

■ La légitimitéspécifique des élusAvec le développement économique,l’aménagement de l’espace constitueune des deux compétences obliga-toires des communautés de com-munes. De fait, les élus descollectivités locales s’avèrent êtredes acteurs de plus en plus impor-tants de la problématique agricole.Nombre d’entre eux travaillent surce dossier en étroite concertationavec les organisations agricoles,voire en se déchargeant sur ces der-nières de leurs responsabilités en lamatière… Mais d’autres peuventpasser outre.Certaines collectivités locales ontainsi compris qu’elles pouvaient

s’ouvrir à des interlocuteurs noninstitutionnels, si elles souhaitaientexplorer de nouvelles approches ouquand elles se sont heurtées à l'atti-tude fermée et peu coopérante desorganisations professionnelles agri-coles…. C’est le cas, par exemple,du Pays du Bocage bressuirais, quifinance l’aménagement paysager dessièges d’exploitation contribuant àla valorisation du patrimoine local.Sollicité par le Civam pour la phasede diagnostic territorial puis pour lesoutien à la mise en oeuvre demesures paysagères, le Pays s'estsenti partenaire de ce projet collec-tif. Les élus intercommunaux ont enrevanche vite compris qu' ilsn’étaient pas les bienvenus dans undispositif piloté par la Chambred'agriculture, et se sont en consé-quence tournés vers le Civam duHaut-Bocage pour bâtir des partena-riats autour de projets de dévelop-pement agricole, en s'appuyant surle Contrat de ruralité. Le Pays aainsi invité le Civam du Haut-Bocage à participer au groupe deréflexion sur le contrat de ruralitéqu’il a programmé pour la période2000-2002.Il est rare, malgré tout, que descommunes aient été associées àl’élaboration des contrats-types deCTE. Mais cela ne leur interdit pasd’intervenir en aval, par exemple enfinançant une mesure spécifique quin ’avait pas été prévue dans lecontrat-type. Dans les Deux-Sèvres,par exemple, un élu de la communede Bressuire travaille avec le Civamdu Haut-Bocage à la mise en œuvre

d'une mesure spécifiquepour les parcelles situéesen bordure de cours d'eau,alors que cette mesuren’avait pas été prévuedans le contrat-typedéposé par le Civam. Cetype de partenariat avecles collectivités localespeut permettre de faireévoluer les contrats, de lesaméliorer, sans devoiraffronter à Bruxelles lalourdeur administrative ducomité STAR...

■ Des stratégies de«contournement»Il reste complexe, pour les collecti-vités, d’intervenir dans le dispositifCTE. Aussi, certaines collectivitéslocales traitent directement avecdes agriculteurs, en «contournant»l’outil CTE, ou en utilisant d’autresoutils. En ce domaine, le cas dePâturages du Coglais mérite atten-tion. Soucieuse de la qualité de sonapprovisionnement en eau, la Villede Rennes cherche à rémunérer deséleveurs dont les exploitations bor-dent la Loisance et la Minette. Dufait de sa puissance d’intervention,elle est en mesure de traiter à peuprès comme elle l’entend avec desagriculteurs qui, de plus, ne sontmême pas situés sur son propre ter-ritoire. Les Parcs influent eux-aussi sur lesactivités agricoles, notamment dansune perspective de développementtouristique. Ils le font par exempleen favorisant la promotion de cer-taines productions typées, enencourageant certaines pratiquesfavorisant la qualité des paysagesou encore en subventionnant la pré-servation du bâti agricole tradition-nel.De plus en plus, la contractualisa-tion avec les agriculteurs risque dese développer hors des servicesagricoles et de leurs dispositifs spé-cifiques. Le CTE est-il capable des’ouvrir pour être en phase aveccette évolution ? Quelle place le CTEaura-t-il à l’avenir dans la territoria-lisation de l’agriculture ?

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VII

La construction d’un véritable parte-nariat ne peut pas s’apparenter à laprésentation d’un projet déjà ficelé.L’ implication active dans unedémarche commune suppose aucontraire une association très pré-coce à la définition de ses objectifs,de ses modalités de mise en œuvre,des moyens nécessaires à sa réalisa-tion, de ses critères d’évaluation...Il est nécessaire de prendre dutemps pour initier un travail deconfrontations d’idées et de pen-sées, entre des partenaires ayantdes points de vue et des intérêtsdifférents. Les éléments de typolo-gie présentés ci-après peuvent en cesens éclairer la construction d’unpartenariat qui prenne réellementen compte la diversité des acteurs

concernés. Dans les dix départe-ments concernés par nos observa-tions, l’administration se montreplutôt ouverte à une approche réel-lement territoriale du CTE. Elle estnéanmoins sensible aux rapports deforce départementaux. Les organisa-tions professionnelles défendentpour la plupart une approche aminima du CTE. Il est toutefois inté-ressant de pointer certainesnuances entre, par exemple, laChambre d’Agriculture et l’Adasead’un même département.Alors qu’el le a été le principalmoteur de la construction commu-nautaire, la politique agricole estdésormais présentée comme un bou-let financier pour l’Union euro-péenne. Tous n’en bénéficient pas,

mais nombre d’agriculteurs suppor-tent mal d’être davantage rémuné-rés par les contribuables que par lesconsommateurs.L’objectif central du CTE est de com-battre ce sentiment d’incompréhen-sion en posant les bases d ’uneredéfinition des rapports (écono-miques, mais aussi sociaux, voiresymboliques) entre l’agriculture etla société Le problème est qu’unepartie significative des agriculteurs(relayée, parfois, par l’administra-tion) rejette cette proposition deremède : ouvrir la sphère agricole (àd’autres regards, à d’autres opportu-nités, à d’autres modes de recon-naissance...) ne peut, selon eux,que la fragiliser.

Les élus se divisent en deux catégo-ries. D’une part, la petite frange deceux qui étaient déjà impliquésdans une démarche territoriale (Parcnaturel régional, projet intercom-munal.. .) et qui s’impliquent.D’autre part, la très grande majoritéque constituent les autres et qui,avec des nuances, ne se sententguère concernés, n’y comprennentpas grand chose, estiment que c’estaux agriculteurs de régler cesaffaires entre eux...

Les environnementalistes et lesreprésentants d’associations deconsommateurs sont souvent perdusdevant la technicité des dossiersagricoles. Manquant de temps et demoyens, ils ne sont pas non plusaccueillis à bras ouverts (c’est lemoins qu’on puisse dire...) dans lesorganismes et les instances s’occu-pant de questions agricoles. Enfin,si certains environnementalistespréfèrent l’observation des milieux àla visite attentive d’une porcherie,d’autres se sont donnés les moyensde dénoncer ceux qui polluent et decontribuer à l’élaboration de pra-tiques agricoles plus respectueusesde l’environnement.

Confronter les points de vues

Une analyse des systèmesd’action, par François Léger1

«L’analyse en terme de systèmes d’action concrets des projets CTEélaborés dans 22 départements montre une très grande diversité,dépendant étroitement des acteurs porteurs des projets territoriaux etdes structures de coordination sur lesquelles ils s’appuient. Auxdifférents types que nous avons pu définir s’associent des conceptionsde la multifonctionnalité de l’agriculture, des interprétations duconcept de territoire, des utilisations du dispositif CTE nettementtranchées. Cependant, on observe que les types institutionnels, portéspar les organisations professionnelles départementales, demeurent lesplus fréquents. Cette situation traduit en même temps le poids de cesinstitutions, les difficultés de mettre en oeuvre une approche nouvelledu développement dans un contexte de forte instabilité réglementaire,l’effet de la normalisation administrative imposée par l’ajustementnécessaire entre dispositifs national et européen. Les cas étudiésmontrent cependant que le retour à des logiques descendantes, audépens des logiques ascendantes préconisées par la loi, n’est pasnécessairement irrémédiable.»1 - Mise en œuvre territoriale de la multifonctionnalité de l’agriculture dans un échan-tillon de projets collectifs de CTE. François Léger, séminaire CEMAGREF-INRA, 12-13décembre 2000

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VIII

En ce qui concerne plus précisémentles CTE, des écologistes mettent endoute l’intérêt de certains agricul-teurs pour l’environnement : cetintérêt ne serait affiché que dans lebut de faciliter l’accès à un soutienfinancier. Une telle crise deconfiance semble fréquente. Lesblocages qu’elle engendre priventd’une part les agriculteurs de pré-cieuses ressources en termes deconnaissance des milieux naturelset coupent d’autre part les environ-nementalistes de ceux qui restentdes acteurs essentiels en matière degestion des espaces ruraux. Pour lesenvironnementalistes et les repré-sentants d’associations de consom-mateurs, le CTE représente unepossibilité de trouver de nouveauxrelais dans la sphère agricole.Fondées sur des intérêts objectifs,ces motivations différentes peuventpourtant justifier la recherche d’unpartenariat : les oppositions quiexistent sont peut-être moins déter-minantes que le profit qu’attendentde cette collaboration les diffé-rentes parties prenantes.

■ Des problèmes decompréhension

Lorsqu’i ls partagent certainesvaleurs et certains objectifs et qu’ilsveulent travailler ensemble, cestrois groupes d’acteurs se heurtent àdes problèmes de compréhension.Chacun d’entre eux a en effet saculture, sa manière de voir leschoses, et met en avant sa légiti-mité. Les élus affirment par exemple qu’ilsont une vision globale du territoireparce qu’ils sont désignés par le suf-frage universel. Étant à ce titregarants de l’intérêt commun, aucundomaine ne peut leur être étranger.Les agriculteurs affirment quant àeux qu’ils ont une vision globale duterritoire parce qu’ils sont les prin-cipaux gestionnaires de l’espace

rural. Leur activité mêle naturelle-ment des dimensions environne-mentales, économiques, sociales,esthétiques... Les environnementa-listes affirment enfin qu’ils ont unevision globale du territoire parcequ’ils en ont une approche scienti-fique et qu’ils prennent en compteles intérêts de l’ensemble de lapopulation (y compris des généra-tions à venir).Ces trois cultures conduisent à nepas mettre les mêmes choses der-rière le mot «territoire». Pour lesélus, ce dernier est communal ouintercommunal ; pour les agricul-teurs, il se situe essentiellement àl’échelle communale ; pour les envi-ronnementalistes, le niveau d’ana-lyse pertinent est plutôt celui dubassin versant, de la vallée, du pla-teau... Il semble urgent d’entamer un tra-vail qui risque fort de prendre beau-

coup de temps : une meilleure com-préhension réciproque des concep-tions des uns et des autres. Cetravail peut par exemple se basersur une comparaison des définitionsrespectives de mots tels que «terri-toire», «environnement», «durabi-lité»… Il peut en outre passer parune meilleure information surNatura 2000, les organisations de lasphère agricole, les mesures agro-environnementales...

■ Dépasser la simpleconsultationUne fois légitimée la participationd’acteurs extérieurs au monde agri-cole, se pose la question de leurplace dans le dispositif CTE : sont-ils simplement consultés, demanière très ponctuelle, sur lesenjeux du territoire, par exemple,en début de projet, ou sont-ils asso-ciés à l’élaboration des mesures-types et, de manière plus pérenne, àla mise en œuvre et au suivi descontrats individuels (par exemple enparticipant au comité de pilotagedu projet collectif) ?Les agriculteurs recherchent-ils àtravers cette ouverture à d’autresune simple caution ou sont-ils prêtsà accepter une remise en cause decertaines pratiques, voire de leursystème de production ?Une fois ces questions clarifiées,reste celle des moyens dont dispo-sent les acteurs non agricoles pours ’impliquer dans de telspartenariats : ils manquent en effetencore trop souvent de temps et deformation. Enfin, il serait intéressant de com-mencer à poser dès maintenant laquestion des critères d’évaluationqui pourraient être retenus pourmesurer les effets d’une approcheterritoriale des CTE. Avancer surcette question permettrait bien évi-demment de débattre des objectifspoursuivis...

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IX

Croiser des approches complémentaires

■ Une démarchemobilisatriceLes diagnostics de territoire réalisésdans les sites répondent à deuxapproches différentes : la premières’appuie sur une expertise scienti-fique, à partir de données «objec-tives» collectées par une tiercepersonne, consultant, expert, exté-rieure au projet. Dans la secondeapproche, ce sont les acteurs duprojet qui construisent le diagnos-tic, à partir de différents documentsexistants, et en allant interrogerdes acteurs–clés sur leur vision duterritoire : l’objectif est moins dansle résultat du diagnostic que dansce qu’il produit en terme de dyna-mique de territoire, par le dia-logue et les débats qu’il susciteentre les acteurs locaux.

L’exercice d’élaboration du diagnos-tic remplit tous ses objectifs (dres-ser un état des lieux le plus fidèlepossible du territoire, de ses atoutset de ses contraintes d’une part,

sensibiliser etmobiliser lesacteurs locaux d’autrepart), quand ces deux approchessont utilisées de manière complé-

m e n t a i r e .C’est ce qu’ont

expérimenté lessites, notamment en Haute-Saôneet dans la Meuse (voir encarts).

Partager le diagnostic de territoire

Dans la vallée de la Meuse, lediagnostic a croisé différentesapproches.■ Sur le terrain : identificationdes entités paysagères, des zonesnaturelles remarquables, despressions liées aux activitéshumaines… La retranscription desdonnées recueillies a été écrite,cartographique et photographique.■ Dans les groupes de travailthématiques mis en place :identification des projets et desdynamiques du territoire, desconflits et des synergies entreacteurs, des objectifs de chacun de

façon thématique. Retranscriptionsous forme de plan d’actions.■ Lors d’entretiens individuels :prise en compte de la position, desmotivations et des connaissanceset compétences de chacun parrapport au projet. Le questionnaireétait plus exhaustif quant auxconflits potentiels sur le territoire.Les réponses enregistrées sont trèsutiles pour déterminer les domainesd’intervention de chacun dans lefutur projet de gestion du site.Ces trois étapes ont été conduitesde manière transversale et sontrecoupées au fur et à mesure de

l’avancée du projet. Le diagnostic auquel a procédé leCPIE avait notamment pour but derecenser les agriculteurs possédantdes parcelles sur le site visé par leprojet, ceux désireux de plusd’information sur la procédure encours et ceux intéressés par la miseen place d’un projet collectif surleur territoire. La phase dediagnostic s’est ainsi d’embléeconfondue avec une phase desensibilisation-mobilisation et apermis de repérer rapidement lesacteurs les plus directementconcernés.

carte 1GN

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■ Définir le territoirepertinentAvant même de s’intéresser à la com-position et au périmètre de ce terri-toire, une épineuse questionpréalable se pose : quelle doit êtresa taille ? la commune ? le canton ?la communauté de commune ? lebassin versant ? la vallée ? le bassinde vie ? le pays ? le massif monta-gneux ?...En matière de développement local,cette même question est débattuedepuis un bon quart de siècle.Quelques éléments de réflexion sontrégulièrement avancés : il n’existepas une réponse universelle à cettequestion ; la manière dont cettequestion est traitée (par qui ?q u a n d ? dans quel cadre ?...) estfondamentale ; il est important detravailler simultanément à plusieurséchelles de territoire, voire dans desconfigurations différentes suivant lesthèmes : les communes bordant unerivière pour ce qui concerne la qua-lité de l’eau ; les communes concer-nées par une même production typéepour ce qui relève de la valorisationde celle-ci... ; le périmètre d’un ter-ritoire est susceptible d’évoluer dansle temps1 ; un territoire restreintfavorise la mobilisation et la partici-pation des acteurs concernés, maisagir de manière cohérente et signifi-cative suppose généralement de tra-vailler à l’échelle d’un territoire plusvaste...1 - Notons à ce sujet que le périmètred’étude d’un pays est provisoire : un desenjeux du diagnostic préalable est de déter-miner les “ frontières ” de ce pays.

Le territoire c’est «l’endroit où lesagriculteurs vivent, tout en conser-vant une unité paysagère, agricole etsociale», définit un agriculteurhaute-Saônois. Cette définitionreflète une approche assez généralechez les agriculteurs : le point dedépart de chacun d’entre eux étantbien évidemment son exploitation,ils cherchent à déterminer le ou lesensembles naturels dans lesquelselle s’inscrit (sur les plans géolo-gique, pédologique, hydrologique,floristique...) ainsi que ce quiconstitue son environnement écono-mique (l’évolution d’une filièreet/ou d’un bassin de productioninflue sur chaque exploitation quien fait partie) et humain (la vitalitédu tissu local n’est pas sans inci-dence sur la viabilité et la pérennitéde l’exploitation. Dans le cas de laHaute-Saône, où les délimitationsgéographiques et économiques nesont pas franchement marquées,l’arbitrage entre proximité et ouver-ture a conduit à opter pour uneaction à l’échelle de cinq cantons.

Pour le Civam de Valençay, la géo-graphie (des vallées), une logique deproduction agricole (un petitvignoble en VDQS, une AOC froma-g è r e2), l’histoire (un château attrac-tif), l’existence d’une communauté decommunes (dont le périmètre se

trouve être celui du canton...) et lesvicissitudes des découpages adminis-tratifs (ce canton se situe en limitede département) se conjuguent detelle sorte que la question du terri-toire ne se pose même pas. Pourautant, le fait de se reconnaître unemême identité territoriale ne signifienullement que tous les acteursauront la même perception et lamême conception de ce territoire.

Le Coglais se situe dans un cas defigure assez semblable, mais il fautremarquer qu’une portion de ce ter-ritoire très actif et très structuréintéresse des acteurs extérieurs (laVille de Rennes en l’occurrence)sous un autre nom : celui de bassinversant de la Loisance et de laMinette. La différence des appella-tions traduit ici de manière limpidela différence des points de vue, maistous les acteurs parlent bien d’unmême sujet : le devenir de l’agricul-ture de ce territoire.Les CPIE privilégient une approchebasée sur la valorisation des res-sources locales (naturelles et cultu-relles), liée à un projet de territoiretant que possible structuré (commeles syndicats mixtes de la haute-val-lée de l’Allier et de la Drôme descollines). 2 - Le «territoire» de cette AOC est plusvaste que celui concerné par notre projet.

Le territoire : une diversitéd ’ a p p r o c h e s

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XI

Diagnostics collectifs des exploitations : la démarche de la Haute-SaôneLa démarche conduite par le Groupe agriculture durable de Haute-Saône démontre l’intérêt d’un diagnosticd'exploitation effectué en groupe. Dans ce cas, les agriculteurs intéressés par un même projet collectif deCTE sont invités à analyser ensemble leurs exploitations respectives. Mais sont également conviés à cesvisites d’autres acteurs pouvant apporter des éléments importants pour le diagnostic : sur les haies, leszones humides, la biodiversité, les bâtiments, etc. La participation de personnes qui ne connaissent pasl'exploitation ou le territoire, voire le monde agricole, permet d’obtenir des regards complètementdifférents de celui du groupe, ce qui peut être très intéressant parce que cela sollicitera des questionsoriginales.

■ Présentation del'exploitation

Avant d’accueillir le groupe,l'agriculteur «diagnostiqué» etl'animateur de la démarchepréparent un document deprésentation de l'exploitation, quiporte sur son historique, lesbâtiments, le parcellaire,l'organisation du travail, lesproductions végétales et animales,les résultats économiques.La présentation de l'exploitationest complétée par les résultatsd’un diagnostic agri-environnemental et par uneréflexion sur le territoire :l'agriculteur doit essayer de mettreen évidence les atouts et lescontraintes de son exploitationdans son environnement à partirdes thèmes qui ont étépréalablement traités lors dudiagnostic de territoire. Ce dernierpoint permet à l'agriculteur deréfléchir au diagnostic deterritoire en fonction de sonexploitation et, symétriquement,d’identifier les enjeux du territoirequi concernent son exploitation.Toutes ces informations sontensuite envoyées à chaquemembre du groupe afin qu'ilpuisse en prendre connaissanceavant la visite collective.

■ Visite d'exploitation

Cette visite dure en moyenne deuxheures, elle est le momentprivilégié pour donner la parole àdes acteurs du territoire nonagricoles et resituer l’exploitationdans son territoire. Suite à laprésentation et à la visited’exploitation, chaque participant(qu’il soit ou non agriculteur) estinvité à définir cinq atouts etpoints forts et cinq contraintes etpoints faibles de l’exploitationpour chacun des thèmes suivant :viabilité, vivabilité,reproductibilité, transmissibilité1.Ce balayage systématique permetd’aborder les domaineséconomique, social,environnemental et territorialainsi que la transmissibilité del’exploitation. Les participantsfont part de leurs réflexions lorsd’un tour de table, l'agriculteurpouvant réagir.

■ Projet d’exploitation

Des pistes de travail envisageablespour le projet sont ensuitedéterminées à partir de tout cequi est mis en évidence, à partirdes points faibles et descontraintes de l'exploitation etdes objectifs personnels del’exploitant et/ou des associés.Ceci doit permettre à l'exploitantd’une part de vérifier la cohérenceentre son projet, le diagnostic deson exploitation et d'avoir deséléments concrets pour pouvoiraffiner son projet et vérifier quel’idée qu'il en a répond bien auxenjeux identifiés collectivementtant pour son exploitation quepour le territoire.

Le document du diagnosticd'exploitation qui doit être déposéà la DDAF en référence au contrattype du territoire reprend leséléments de présentation del'exploitation ainsi que lesréflexions du groupe sur les quatrethèmes. Il peut aussi comprendrel'avis d'experts sur certains pointstrès précis et importants pour leprojet.

1 - Cette grille reprend un question-naire qui est présenté dans L’arbre del’agriculture durable, outil que diffuseTrame.

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XII

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■ Un contexte peufavorable auxdémarches deconcertationDans certains cas, les projets collec-tifs portés par les sites ont été éla-borés avant que le dispositif CTE nesoit défini au niveau départemental.Ils ont alors participé à la définitiondu cadre départemental. En Haute-Saône par exemple, la démarche detravail du GAD (et notamment le tra-vail autour du diagnostic de terri-toire) a été reprise pour l’élaborationdes autres contrats-type sur led é p a r t e m e n t .Mais, au fur et à mesure que la miseen œuvre du dispositif se précise auniveau départemental, il devient deplus en plus difficile pour lesdémarches collectives de faire recon-naître le travail d’animation réaliséen amont de la contractualisation :alors que l’approche territoriale estpar essence collective, les CTE indi-viduels sont presque toujours privilé-g i é s .

■ Une demande designatures nombreuseset rapides

Pour l’administration, une des condi-tions essentielles du succès du dis-positif CTE est sa rapide montée enpuissance. Pour les organisationsagricoles, s’ouvrir à de nouvellesdimensions et à de nouveaux inter-locuteurs ne peut qu’allonger etrendre plus complexes l’instructiondes dossiers et les procéduresd ’ a g r é m e n t .S’ils abordent le CTE simplement entermes de rentabilité immédiate dutemps investi, les agriculteurs n’ontpas forcément intérêt à se lancerdans une démarche lourde : mieuxvaut alors se raccrocher à des for-mules “ clé en main ” et, surtout,

peu exigeantes. Il est beaucoup plussimple d’élaborer un argumentaireéconomique que de construire unprojet à caractère environnemental(il faut alors se conformer à un épaiscatalogue de mesures et le champdes adaptations ou des innovationspossibles s’avère très réduit).

■ Le temps, unequestion à tiroirsL’approche territoriale nécessite untrès important travail d’identifica-tion et d’information des partenairespotentiels, de rencontres (d’abordbilatérales, puis plus collectives),d’enquête sur le terrain, de concerta-tion, d’élaboration des termes d’uncontrat, d’évaluation... Les diffé-rents acteurs impliqués dans un pro-jet de CTE vont devoir mobiliser dutemps, et ce sur une période d’aumoins plusieurs mois. Un tel inves-tissement suppose de la motivation,mais également des moyens maté-riels et humains. Or tous les acteursconcernés ne disposent pas forcé-ment de la disponibilité souhaitablepour s’investir dans une démarchequi, par ailleurs, ne constitue pastoujours pour eux une priorité abso-lue. Ainsi, le CPIE Woëvre Côtes deMeuse note que «la constitution desgroupes de travail est telle que les

projets présentés et les intérêts dechacun peuvent être très divergentsles uns des autres. Il s’agit donc d’untravail de long terme pour arriver àconcilier les objectifs de chacun, sanspour autant trouver des compromisqui pourraient être caduques.»Il ajoute que «la vitesse de mise enplace des projets est différente d’unorganisme à l’autre, et certains sesont déjà engagés dans la probléma -tique de CTE avant même que soitmise en place la procédure Natura2000. Ils n’ont naturellement pasinterrompu leur démarche, et la diffi -culté résidera alors dans la “synchro -nisation” de tous les partenaires.»Plus généralement, toute démarcheterritoriale doit s’articuler aux autresinitiatives et procédures qui peuventconcerner le même territoire, ainsique les différents échelons de ce ter-ritoire (de la commune au pays, enpassant par le niveau intercommu-nal. Or certaines de ces initiativesou procédures sont pleinement opé-rationnelles, d’autres sont en fin devie, d’autres viennent de débuter,d’autres ne sont qu’annoncées ouencore espérées...Enfin, le CPIE du Velay a constatéqu’une étude peut «dormir» dix-huitmois, puis être de nouveau mise enavant par un acteur local : un tempsde «latence» est souvent nécessaireà la maturation d’une démarche.

Un important travail d’animation et de médiation

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XIII

Visant à favoriser une redéfini-tion des rapports agriculture-société, le CTE incite lesproducteurs concernés à faireévoluer leurs pratiques, mais éga-lement certaines de leurs concep-tions. En particulier, sadimension territoriale doit lesamener à approfondir des ques-tions ayant trait notamment à

l’environnement ou à l’économielocale. Dans nombre de sites, denouvelles connaissances en géo-logie, en botanique, en zoologieou encore en économie du tou-risme doivent ainsi êtrea c q u i s e s : de la vie du saumondans le Haut-Allier aux spécifici-tés d’une zone bocagère en Nor-mandie ou dans les Deux-Sèvres,en passant par l’histoire du patri-moine local dans la Drôme descollines ou l’hydrologie dans leCoglais, les thèmes techniquessont pour le moins divers !

Sur un plan méthodologique, lescontenus sont moins variés d’unsite à l’autre : partout, il fautconduire une démarche collec-tive, réaliser un diagnostic deterritoire et un diagnosticd’exploitation, rédiger un cahierdes charges puis un projet decontrat-type, défendre sonapproche devant l’administrationet la CDOA, évaluer régulièrementles résultats de la démarche...

L'action de formation peut inter-venir dès le début de ladémarche, offrant ainsi un cadrepour la définition et la mise enplace d'un projet collectif. L'ac-tion de formation peut aussi êtreorganisée (ou poursuivie) aprèsque le contrat-type ait été validépar la CDOA. Par exemple, ceuxqui se sont le plus fortementinvestis dans l’élaboration duprojet collectif peuvent proposersous cette forme un appui auxagriculteurs pour l'élaboration deleurs projets individuels.

Le couplage avec des actions de formation

■ L’intérêt d’un comité de pilotage (ou de suivi)Dans le cas de la Haute-Saône, ladémarche est née et s’est dévelop-pée sans comité de pilotage ouvertà des acteurs extérieurs au GAD, cequi ne l’a pas empêchée d’être sou-tenue par de nombreux partenaires(agricoles, politiques, environne-mentalistes). Toutefois, au bout d’un an et demi,l’appui de certains s’est estompé etla constitution formelle d’ungroupe de pilotage commençait àêtre envisagée. La constitution d’un tel comitéfavorise un accompagnement dansla durée des agriculteurs engagésdans la démarche.

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XIV

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une démarche de formation-action

La formation ne peut suffire àfinancer l’animation

L'Afipar a organisé en 2001, enétroite collaboration avec lesporteurs de projets locaux, uneformation-action de six jours pourles agriculteurs du territoire deVillefagnan (Charente). Ceux-ci onttravaillé pendant une journée avecla Chambre d'Agriculture et avecl'association Charente Nature àpartir de leurs contrats-typesrespectifs (contrat-type Aume-

Couture, axé sur la qualité de l'eau,pour la Chambre ; contrat-typebiodiversité, axé sur la protectionde l'avifaune de plaine, avecCharente Nature). Ensuite, legroupe, qui avait déjà pris contactavec différents acteurs locaux lorsde la phase de diagnostic deterritoire, les a rencontrés ànouveau pour leur présenter lesprojets individuels ainsi que

l’impact qui peut en être attendupour le territoire. Un des objectifspoursuivis par ces rencontres estde développer des partenariats quipermettent la mise en œuvre demesures complémentaires à cellesretenues dans les contrats-typeexistant sur le territoire. (voir enannexe le projet de formation -action de développement présentépar l'Afipar au FAFEA en mai 2000).

Qu’elle se situe en amont ou enaval de la signature du CTE, laformation continue desagriculteurs est un outilfréquemment utilisé pourl'animation locale et le suivi desprojets. En l'absence d'autressources de financement, elleconstitue un moyen importantd'animation (le ministère del'Agriculture insiste pourtant surla distinction qu’il faut établirentre actions de formation etactions d'animation et dedéveloppement...). Toutefois, ellene peut pas être le seul supportd'une démarche de territoire, neserait-ce que parce qu'elle n'est

pas ouverte aux acteurs nonagricoles.Le Fonds de financement du CTE(FFCTE) est censé compléterl'approche formation par lefinancement des phasesd'animation du projet collectif.Souvent insuffisants – ouinsuffisamment accessibles ? -,ces crédits sont attribués demanière très variable selon lesdépartements. Il faut pourtantrappeler que les difficultés definancement de l'animation localedes projets collectifs de CTEreprésentent un des principauxfreins des dynamiques deterritoire.

Enfin, les agriculteurs ne sont nul-lement les seuls à avoir besoin deformation pour s’investir dans laconstruction d’un CTE : s’ils veulenttravailler avec eux, leurs partenairesdoivent de leur côté mieux com-prendre certaines réalités agricoles.Entre les cycles de production, lescontraintes techniques, les méca-nismes économiques ou encore lessubtilités des rouages profession-nels, le programme est plutôtchargé ! Des élus, des représentantsdes consommateurs et des environ-nementalistes qui siègent en CDOAont commencé à s’y atteler dans lecadre de sessions formelles mais, làencore, l’essentiel de cette forma-tion s’inscrit plutôt dans unelogique d’ateliers coopératifs : c’esten travaillant ensemble, avec cha-cun ses connaissances et sesméthodes, que les différents acteursimpliqués apprennent les uns desautres et inventent ensemble denouvelles réponses. Ou peut-être,qui sait, de nouvelles agricultures...

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XV

L’exposé des motifs qui fondait cetterecherche-action n’est pas remis encause : «Pour parvenir à faire du CTE unlevier de développement territorial, ilimporte que soient mises en place desconcertations entre les différents acteursdes territoires, afin que ceux-ci soientassociés à la définition des enjeux, auchoix des objectifs et à l’évaluation despratiques à mettre en œuvre. Il noussemble indispensable que les agriculteursdéveloppent des partenariats en dehorsdu milieu agricole afin d’enrichir lesprojets de CTE et de les valider.»Les réflexions et analyses présentéesdans ce dossier résultent d’unedynamique collective conduite pendantla phase de démarrage du CTE. Elles sont en conséquence marquées parce contexte, accordant notamment unegrande attention à la définition descontrats-types. Aujourd’hui, en septembre 2001, cetteétape est franchie, la procédure au

niveau départemental a été définie, lecadre posé Mais de nouvelles questionssurgissent : comment transmettre ladynamique d’un contrat-type définicollectivement à des postulants quin’ont pas participé à sa définition ? Comment faire perdurer une telledynamique collective du côté desagriculteurs et (surtout ?) despartenaires non agricoles ? Quelles formes d’accompagnement est-ilsouhaitable d’assurer aux signatairesd’un CTE ? En particulier, quelles modalités etquels contenus de formation sont-ils lesplus adaptés à leurs besoins ? Quelscritères et quelles modalitésd’évaluation permettront d’assurer lemeilleur suivi des CTE ?...

Ces nouvelles questions appellent lamobilisation de toutes les énergies pourélaborer de nouveaux éléments deréponse.

En guise de conclusion…

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XVI

Quelques références bibliographiques : ■ Mise en œuvre territoriale de la multifonctionnalité de l’agriculture dans un échantillon de projets collec -tifs de CTE. François Léger, in Actes du séminaire. Premiers regards sur la multifonctionnalité de l’agricultureau travers de la mise en place des CTE ”. CEMAGREF-INRA, 12-13 décembre 2000

■ CTE et territoires, démarches territoriales pour la mise en œuvre des CTE.,MATE, MAP, DATAR, octobre 2000.

■ CTE et territoires : démarches territoriales pour une articulation entre le CTE et d’autres dispositifs, Guiderepère, ministère de l’agriculture (DERF), Ministère de l’aménagement du territoire et de l’environnement,DATAR, juillet 2001.

■ Gestion concertée dans les espaces ruraux, Guide repère, CEDAG, octobre 2000.

■ CTE collectifs, le guide, Entraid’, supplément au n°214, septembre 2000.

■ Les CTE, un paysage de contrastes, dossier paru dans Transrural Initiatives, n°180, janvier 2001.

■ Développer les territoires ruraux par la démocratie participative, Actes d'un Forum organisé par ARTERE, avril 2001.

■ Contrat territorial d’exploitation : transformer l’essai, Transrural Initiatives 128

■ Vers un CTE de qualité, Transrural Initiatives 143

■ Agriculture, territoire et société, Transrural Initiatives 154

■ L’émergence de territoires organisés, Transrural Initiatives 185.

Sigles utilisés : ADASEA assocation départementale pour l'aménagment des structures et exploitations agricolesAFIP association de formation et d’information pour le développement d’initiatives ruralesAFOCG association de formation collective à la gestionAOC appellation d’origine contrôléeARDEAR association régionale pour le développement de l’emploi agricole et ruralCDOA commission départementale d’orientation agricoleCELAVAR comité d’études et de liaison des associations à vocation agricole et ruraleCETA centre d'étude des techniques agricolesCFPPA centre de formation professionnelle et de promotion agricoleCIVAM centre d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu ruralCPIE centre permanent d’initiative pour l’environnementCUMA coopérative d’utilisation du matériel agricoleDDAF direction départementale de l’agriculture et de la forêtDIREN direction régionale de l’environnementDRAC direction régionale des affaires culturellesDRAF direction régionale de l’agriculture et de la forêtFAFEA fonds d’assurancede formation des exploitants agricolesFFCTE fonds de financement du contrat territorial d’exploitationGAD groupe agriculture durableMRJC mouvement rural de jeunesse chrétiennePDD plan de développement durableZNIEFF zone naturelle d'intérêt écologique faunistique et floristique.

La recherche-action support de ce dossier a été réalisée avec le soutien financierdu Ministère de l’agriculture, Direction de l’espace rural et de la forêt.

Contact : AFIP - 2, rue Paul Escudier - 75009 Paris - tél. 01 48 74 52 88 - fax 01 42 80 49 27 - E-mail : [email protected]

N° 197 • 25 septembre 2001 - 2e tirage