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Agriculture paysanne 18 \ Campagnes solidaires • N° 281 février 2013 Bastien Oustry produit des poulets, pintades et œufs à Chavannes-sur- Suran, dans l’Ain. Installé depuis 2004, il s’est engagé dès le départ dans une démarche d’autonomie alimentaire et technique dans ses pratiques d’élevage et cultures végétales. B astien Oustry s’est ins- tallé en 2004 sur la ferme du Moulin, celle des grands-parents de son épouse Karine qui ne l’ex- ploitaient plus depuis plu- sieurs années. Il s’installe seul, même si Karine s’asso- cie au projet et aide Bastien sur la ferme, tout en gardant un emploi à temps complet à l’extérieur. Dès le départ, le choix de l’agriculture biologique s’impose au nou- veau paysan, car il correspond à ses valeurs et à sa façon de concevoir son métier. Bastien valorise 36 hectares de terres, dont six en propriété. Sur ces six hectares de prairie, il élève des poulets et des pin- tades. Depuis quelques mois, il a com- mencé un atelier de 150 poules pondeuses. Pour l’alimentation des volailles, il cultive 20 hectares en rotation. Les animaux sont abattus sur la ferme, et la totalité de sa production est écoulée en vente directe, sous différentes formes : au marché de Bourg-en-Bresse, deux fois par semaine, à deux amaps de la région, ainsi qu’à un autre système de vente de paniers et à un magasin de producteurs. Depuis 2004, la ferme a subi peu de chan- gements majeurs. Le principal investisse- ment a été l’achat du bâtiment d’exploita- tion, en octobre 2011, loué jusque-là. Cela a permis d’aménager l’atelier d’abattage afin de gagner en autonomie et en coût (prestation, transport…). La même année, Bastien a arrêté l’élevage de moutons, pour recentrer son activité sur les volailles, démar- rant l’atelier de poules pondeuses. Pour lui, le principal moteur dans la conduite de sa ferme est l’autonomie. Une autonomie qui lui permet une liberté de décisions, mais a aussi pour objectif de diminuer les coûts pour une meilleure effi- cacité économique à terme. Il produit sur la ferme maïs, féverole et un mélange triticale-pois, qui apportent une ration équilibrée aux volailles. Une seule entorse, minime, à cette quasi-autarcie, la ration de soja : Bastien achète le tourteau ; mais pour « équi- librer » cet achat, il produit la même quantité de soja en grain qu’il revend. En termes sanitaires, l’éleveur a aussi choisi de privilégier l’au- tonomie, par une gestion en amont et globale de lutte contre les maladies et parasites. La race de poulet choisie, bien que non rustique (race label « cou nu rouge »), est bien adaptée à son environnement et résistante aux maladies. En outre, la densité d’animaux est minime : 450 volailles sur un demi-hec- tare. L ’équilibre de la ration ali- mentaire est vérifié chaque année par un laboratoire. De tout cela découlent très peu de traitements sanitaires aux animaux. Bastien souhaite aussi assurer une auto- nomie dans ses productions végétales. Une rotation des cultures céréales-légu- mineuses permet de limiter les besoins en azote ; les apports consistent unique- ment en lisier pour le triticale-pois, et en fumier (des volailles et bovin) pour le maïs. Il recherche également une auto- nomie en termes de semences, et produit la moitié de celles en féverole, et les quatre cinquièmes pour le triticale-pois. Enfin, il n’apporte aucun traitement phytosani- taire à ses cultures. L ’éleveur favorise également la biodiversité sur sa ferme, par l’entretien des haies et bos- quets, le maintien des prairies permanentes, la variété de ses cultures végétales et un cheptel de poules pondeuses comptant de multiples races, label et rustiques. Si la ferme n’a pas encore trouvé son rythme de croisière en termes économiques et financiers, elle a déjà en projet de déve- lopper l’atelier de poules pondeuses afin que Karine s’installe à son tour. Ce sera le signe que la ferme du Moulin est un modèle d’agriculture paysanne en termes technique et environnemental, mais aussi en termes économique et social. n Agathe Kermagoret, animatrice de la Confédération paysanne de l’Ain Ain Une démarche globale d’autonomie Données technico-économiques : Entreprise unipersonnelle 1,10 UTA SAU : 36 ha (dont 6 en propriété) Assolement : 16 ha de prairies permanentes (dont 6 ha de parcours volaille), 5 ha de triti- cale-pois, 5 ha de soja, 5 ha de maïs, 5 ha de féveroles. Productions actuelles : 5 200 poulets, 650 pintades, 43 000 œufs par an Chiffre d’affaires (CA) : 75 000 Bâtiments : Un bâtiment d’exploitation (650 m²) pour le stockage du matériel et des ali- ments, l’abattage et la poussinière ; un poulailler (30 m²) pour l’atelier de poules pondeuses, six poulaillers (30 m²) pour les poulets et pintades, une maison d’habitation. Matériel : 2 tracteurs, 1 valet de ferme, 1 distributrice d’aliments, 1 benne, 1 véhicule de ferme, 1 véhicule de livraison frigorifique, 1 trieuse, 1 moulin à céréales Bastien Oustry contrôle l’état de ses cultures destinées à l’ali- mentation de ses volailles. Une race de poulet bien adaptée à son environnement, une alimentation de qualité, une faible densité d’élevage: l’état sanitaire des animaux est excellent et les frais vétérinaires réduits au minimum.

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Agriculture paysanne

18 \ Campagnes solidaires • N° 281 février 2013

Bastien Oustry produitdes poulets, pintades etœufs à Chavannes-sur-

Suran, dans l’Ain. Installédepuis 2004, il s’est

engagé dès le départ dansune démarche

d’autonomie alimentaireet technique dans sespratiques d’élevage et

cultures végétales.

Bastien Oustry s’est ins-tallé en 2004 sur laferme du Moulin, celle

des grands-parents de sonépouse Karine qui ne l’ex-ploitaient plus depuis plu-sieurs années. Il s’installeseul, même si Karine s’asso-cie au projet et aide Bastiensur la ferme, tout en gardantun emploi à temps completà l’extérieur. Dès le départ, le choix del’agriculture biologique s’impose au nou-veau paysan, car il correspond à ses valeurset à sa façon de concevoir son métier.

Bastien valorise 36 hectares de terres,dont six en propriété. Sur ces six hectaresde prairie, il élève des poulets et des pin-tades. Depuis quelques mois, il a com-mencé un atelier de 150 poules pondeuses.Pour l’alimentation des volailles, il cultive20 hectares en rotation.

Les animaux sont abattus sur la ferme, etla totalité de sa production est écoulée envente directe, sous différentes formes : aumarché de Bourg-en-Bresse, deux fois parsemaine, à deux amaps de la région, ainsiqu’à un autre système de vente de panierset à un magasin de producteurs.

Depuis 2004, la ferme a subi peu de chan-gements majeurs. Le principal investisse-ment a été l’achat du bâtiment d’exploita-tion, en octobre 2011, loué jusque-là. Celaa permis d’aménager l’atelier d’abattageafin de gagner en autonomie et en coût(prestation, transport…). La même année,Bastien a arrêté l’élevage de moutons, pourrecentrer son activité sur les volailles, démar-rant l’atelier de poules pondeuses.

Pour lui, le principal moteur dans laconduite de sa ferme est l’autonomie. Uneautonomie qui lui permet une liberté dedécisions, mais a aussi pour objectif dediminuer les coûts pour une meilleure effi-cacité économique à terme. Il produit sur

la ferme maïs, féverole et unmélange triticale-pois, quiapportent une ration équilibréeaux volailles. Une seule entorse,minime, à cette quasi-autarcie,la ration de soja : Bastien achètele tourteau ; mais pour « équi-librer » cet achat, il produit lamême quantité de soja en grainqu’il revend.

En termes sanitaires, l’éleveura aussi choisi de privilégier l’au-tonomie, par une gestion enamont et globale de lutte contreles maladies et parasites. La racede poulet choisie, bien que nonrustique (race label « cou nurouge »), est bien adaptée à sonenvironnement et résistante auxmaladies. En outre, la densitéd’animaux est minime :450 volailles sur un demi-hec-tare. L’équilibre de la ration ali-

mentaire est vérifié chaque année par unlaboratoire. De tout cela découlent très peude traitements sanitaires aux animaux.

Bastien souhaite aussi assurer une auto-nomie dans ses productions végétales.

Une rotation des cultures céréales-légu-mineuses permet de limiter les besoinsen azote ; les apports consistent unique-ment en lisier pour le triticale-pois, et enfumier (des volailles et bovin) pour lemaïs. Il recherche également une auto-nomie en termes de semences, et produitla moitié de celles en féverole, et les quatrecinquièmes pour le triticale-pois. Enfin,il n’apporte aucun traitement phytosani-taire à ses cultures.

L’éleveur favorise également la biodiversitésur sa ferme, par l’entretien des haies et bos-quets, le maintien des prairies permanentes,la variété de ses cultures végétales et uncheptel de poules pondeuses comptant demultiples races, label et rustiques.

Si la ferme n’a pas encore trouvé sonrythme de croisière en termes économiqueset financiers, elle a déjà en projet de déve-lopper l’atelier de poules pondeuses afin queKarine s’installe à son tour. Ce sera le signeque la ferme du Moulin est un modèled’agriculture paysanne en termes techniqueet environnemental, mais aussi en termeséconomique et social. n

Agathe Kermagoret,

animatrice de la Confédération paysanne de l’Ain

Ain Une démarche globale d’autonomie

Données technico-économiques :Entreprise unipersonnelle1,10 UTASAU : 36 ha (dont 6 en propriété)Assolement : 16 ha de prairies permanentes (dont 6 ha de parcours volaille), 5 ha de triti-cale-pois, 5 ha de soja, 5 ha de maïs, 5 ha de féveroles.Productions actuelles : 5 200 poulets, 650 pintades, 43 000 œufs par anChiffre d’affaires (CA) : 75 000 €Bâtiments : Un bâtiment d’exploitation (650 m²) pour le stockage du matériel et des ali-ments, l’abattage et la poussinière ; un poulailler (30 m²) pour l’atelier de poules pondeuses,six poulaillers (30 m²) pour les poulets et pintades, une maison d’habitation.Matériel : 2 tracteurs, 1 valet de ferme, 1 distributrice d’aliments, 1 benne, 1 véhicule deferme, 1 véhicule de livraison frigorifique, 1 trieuse, 1 moulin à céréales

Bastien Oustry contrôle l’étatde ses cultures destinées à l’ali-mentation de ses volailles.

Une race de poulet bien adaptée à son environnement, une alimentation de qualité, une faible densitéd’élevage : l’état sanitaire des animaux est excellent et les frais vétérinaires réduits au minimum.