Allemagne, modèle ?

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Synthèse d'articles tirés de mon blog @Geographedumond

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Allemagne modle ?

21 octobre 2006. Berlin On apprend, grce au Figaro dhier que Berlin traverse une crise financire profonde, si grave que ses diles cherchent obtenir des aides de lEtat. Ccile de Corbire rsume la situation : dun ct, des dettes impressionnantes - si on les rapporte la population (3 400 000 Berlinois) - values 60 milliards deuros, de lautre une municipalit qui cherche des aides extrieures afin d'viter la banqueroute. Pour lheure, le tribunal de Karlsruhe laisse peu despoirs aux Berlinois.La capitale allemande ne fait pas piti, sous-entend la journaliste, avec ses '153 muses et 3 opras', son patrimoine immobilier estim cinq milliards deuros. Le train de vie berlinois doit changer. Et lindulgence passe, lie la sparation des deux Allemagnes, au statut spcifique de Berlin, doit disparatre. Pendant quatre dcennies, la ville enclave a bnfici dune aide importante verse par lensemble des Allemands de lOuest. Jusquen 1994, lEtat 'prenait en charge la moiti du budget de Berlin-Ouest'. Elle rcoltait en outre les dividendes dune prsence trangre statutairement constitue par les militaires amricains, britanniques et franais en garnison Berlin. Autres temps, autres mursLa coalition au pouvoir dans le lnd, qui englobe des communistes, nobtiendra rien. Les subventions ne crent donc quune culture de lassistance, provoquent une accoutumance dont il est difficile de se dpartir. Les slogans dmagogiques dbouchent finalement sur des impasses financires. La politique conomique juge trop gnreuse en matire d'ducation et d'aides sociales est ainsi critique. ''Promettre la gratuit pour les jardins d'enfants et refuser d'introduire des taxes universitaires, c'est ne pas comprendre la gravit de la situation, avait dclar le ministre des finances du Bade-Wurtenberg, Gerhard Stratthaus (CDU).' Mais lAllemagne ne doit-elle pas lutter contre le vieillissement de sa population ? Ne passe-t-on pas dun conformisme un autre ? Berlin isole en RDA, rempart contre la menace rouge serait devenue Berlin larrogante, celle qui a vol son statut de capitale Bonn, qui symbolise le dplacement du centre de gravit de la Rpublique Fdrale des abords du Rhin en direction du Brandebourg, cinq cents kilomtres plus lEst. Jalousie vis--vis dune ville en chantier permanent, rancune vis--vis dune dmesure qui a rompu avec le provincialisme rhnan. Berlin paiera, affirme-t-on en Allemagne, en paraphrasant le slogan courte vue dhommes politiques franais ; le monde dhier face au monde daujourdhui*10 novembre 2006. Vieillissement. Un article publi ce matin alimente le dbat toujours ouvert au sujet du vieillissement de la population europenne. A tort, les journalistes hexagonaux prsentent cette question comme exclusivement du ressort dun pays voisin, sans liens - mme lointains - avec ce que lon observe en France. Cest le cas ici puisque Ccile de Corbire sattache au cas allemand.Mais au dpart, quest-ce que le vieillissement ? Pourquoi utilise t-on ce nom commun normalement connot de faon positive vieillir signifie par dfinition ne pas mourir dans un sens dvoy (C.C. ny chappe pas, en loccurrence) ? Le vieillissement cesse subrepticement de signifier un bonus pour l'individu, et se transforme en un problme collectif, un problme dont on ne pose pas les donnes, qui reste mystrieusement confus. Par une sorte de glissement, le problme du vieillissement devient celui du financement des retraites on verra quil y a l une sorte d'entourloupe lexclusion de questions laisses en suspens, elles bien relles : lexplosion des dpenses de sant, les dsquilibres de rpartition de la population. Peu importe au fond quil sagisse de lAllemagne ou de la France.La journaliste du Figaro voque sans la citer la dcroissance de la population allemande, qui perdrait dans les prochaines dcennies une dizaine de millions dhabitants (pour un total de 82,4 aujourdhui). Elle voque dans un second temps lvolution de lesprance de vie, mais commet une erreur : [e]n 2050, [lesprance de vie] devrait atteindre 83,5 ans pour les hommes et 88 ans pour les femmes, soit sept ans de plus qu'aujourd'hui. Or les chiffres de lesprance de vie rsultent dun calcul qui vaut seulement pour lanne donne : ainsi, nos contemporains Allemands ne sont pas ici bnficiaires mais leurs descendants, ceux qui natront en 2050. Ces derniers mourront en moyenne suivant ce calcul en 2133 ! On trouve juste aprs dans larticle des donnes classiques concernant lge mdian (50 ans en 2050 ?) et laugmentation programme des plus de 60 dans le total de la population allemande.Plus intressante est mon sens le rapprochement que fait Ccile de Corbire entre le vieillissement et une immigration insuffisante pour combler les vides. Sans voquer prcisment les dsquilibres internes de la population active allemande, elle prcise que lAllemagne nattire pas assez de travailleurs trangers : elle ne sduit pas et sa politique d'immigration est juge restrictive, notamment l'gard des candidats qualifis. Pas un mot en revanche sur la natalit - celle-ci finit par imiter en moyenne celle du pays d'accueil (donc se posera le problme du financement des retraites) - et la concentration gographique des trangers dans les grandes aires urbaines.Larticle se termine comme annonc sur le problme du financement des retraites. La journaliste ne ralise pas quelle sort en grande partie du sujet. Elle rentre dans une question qui relve du choix dmocratique : les retraites finances par capitalisation ou par rpartition ne sont pas fondamentalement diffrentes au plan des mcanismes conomiques. Avec une efficacit quivalente (voir Econoclaste). La discussion sur lge lgal de la retraite relve elle aussi du champ politique : il existe des pays sans lgislation en la matire, et dautres dans lesquels les retraits gardent la possibilit sils le dsirent de toucher un salaire la manire dun actif.Je ne nie pas toutefois que la gnration actuelle des jeunes retraits ayant la soixantaine bnficie dun privilge sans lendemain ; tant mieux pour eux. Je plains ceux, plus jeunes, qui sillusionnent sur un ventuel et impossible retournement de situation. Mais les raisonnements de bon sens peuvent conduire des contresens, mme ceux manant du ministre allemand de lIntrieur. Il est faux, en effet de dire : Vivre toujours plus longtemps sans travailler plus : le calcul ne tient pas Tout dpend du taux dpargne.La question du financement du systme de sant reste lui entier : or une population qui vieillit consomme plus de soins et plus de mdicaments. En Allemagne, la part de PIB consacre la sant dpasse 10 % (6% en 1970). Partout dans le monde occidental les dpenses progressent plus vite que la croissance des PIB. Pour plus de dtails, voir cette tude du ministre de la Sant : ici.Mon regret au regard de cet article touche la question minemment gographique de la rpartition de la population sur un territoire. Le vieillissement implique ne serait-ce que par laugmentation du nombre de clibataires - un besoin croissant de petits logements proches des commerces et services diversifis : accessibles sans recours la voiture. Labandon de la priurbanisation caractristique dun talement urbain pavillonnaire apparat en filigrane, alors que lensemble des autorits comptentes, en Occident, continuent pourtant den alimenter les ressorts.Les espaces ruraux considrs comme trop loigns de la ville commencent se vider. C.C. cite ce sujet une partie de lex-Allemagne de lEst. Alors que les densits moyennes dpassent 500 habitants au km dans les lnder rhnans (Ouest), celles du Mecklembourg et du Brandebourg natteignent mme pas la barre des 100A linverse, le vieillissement accompagne un mouvement de retour dores et dj ressenti gentryfication vers les parties centrales de villes aux consquences explosives. Le stock de maisons individuelles en priphrie risque en effet de gonfler alors que le nombre de familles susceptibles dy loger va mcaniquement diminuer. Les actifs qui ont en grand nombre choisi de se constituer un patrimoine en achetant lesdits biens subiront un appauvrissement net : ceux-l mme qui ne connatront pas la retraite 60 ans.*1er mars 2007. Natalit. Ainsi lAllemagne vieillit et comble de malheur, les prlats catholiques condamnent les bonnes solutions, les seules recettes qui vaillent Voil en un mot la substance dun article rcent du Monde sign de Ccila Calla En proposant, il y a trois semaines, de crer 500.000 places supplmentaires dans les crches et garderies pour les enfants gs de moins de 3 ans d'ici 2013, la ministre de la famille, Ursula von der Leyen (CDU), mre de sept enfants, a dclench une vritable tempte politique. Mais faut-il absolument avoir donn naissance sept enfants pour occuper convenablement ce poste ? Constatant un important dficit du nombre de crches et de garderies, particulirement en Allemagne de l'Ouest, o, en moyenne, seuls 8 % des enfants de moins de 3 ans peuvent bnficier d'une prise en charge hors du foyer familial, la ministre a dcid d'agir pour mieux aider les parents concilier famille et carrire professionnelle. Il y a un hic : les lnder de lest disposent en moyenne dune meilleure couverture en crche (nous dit la journaliste), mais leurs habitants ont moins denfants.En 2005, tous les anciens lnder de lex RDA se trouvent dans la liste des dix lnder ptissant de la plus faible natalit (ils sont souligns / chiffres x 1000) : Brme (5), Sarre (7), Mecklembourg (12), Hambourg (16), Saxe Anhalt (17), Thuringe (17), Brandebourg (18), Schleswig Holstein (23), Berlin (29) et Saxe (33) [Voir ici]. Au plan de la rpartition rgionale, lest et le nord protestants se distinguent de lAllemagne rhnane et bavaroise majorit catholique. Il faut certes relativiser ce classement, tant donn que les Allemands vivent en plus grand nombre dans les lnder de louest. Au total il y a eu moins de naissance en Allemagne (690 000) quen France (760 000) en 2005, lindice conjoncturel de fcondit stablissant 1,3 enfant par femme.Ccilia Calla rappelle que la coalition au pouvoir Berlin a instaur un salaire parental au mois de janvier 2007. Mais l'intervention de l'Etat dans ce domaine suscite encore des rticences, surtout dans les milieux conservateurs. Aussi, les premires ractions ngatives aux propositions de la ministre sont venues de l'Union chrtienne. [Le parti au pouvoir, reprsent par la ministre de la famille] Les conservateurs critiquent le projet nous dit la journaliste parce quils ne voient pas plus loin que les 3 K : Kinder, Kche, Kirche (enfants, cuisine, Eglise).Elle nen rappelle pas moins que lingrence de lEtat dans les foyers a des prcdents dans lhistoire allemande, et fait une brve allusion la RDA o les jeunes enfants taient parqus du matin au soir dans les crches. La rminiscence sarrte l, malheureusement. Or il conviendrait de remonter plus avant, la priode qui prcde 1945. Le rgime nazi orchestre alors une politique familiale laune de ses objectifs raciaux et gopolitiques : Hitler rclame des milliers denfants de sang aryen ; blonds, blancs et donc purs. Cette population allemande devenue dbordante, ltroite sur un territoire corset ( cause du trait de paix de Versailles honni) lui offrait tous les justificatifs pour mener sa politique de lespace vital en Europe centrale et orientale. Mme si l'eau a coul sous les ponts, un Allemand peut lgitimement concevoir quelques rticences entendre un ministre se mler de trop prs de la vie des mnages.Lorsque Walter Mixa, vque d'Augsbourg accuse la ministre de rduire les femmes des machines procrer , il renvoie justement ses auditeurs cette histoire. La journaliste affirme quil se trouve assez isol, en dsaccord avec lAllemagne entire. Cela ne constitue ni une rplique, ni un dmenti. Le cardinal Karl Lehmann cit un peu aprs dans larticle cherche lui l'apaisement. Mais il rappelle en mme temps une vidence : imaginer que c'est l'Etat qui prend le mieux soin des enfants est au mieux un prsuppos invrifiable.Il faut donc se poser la question de lutilit des deux mesures prises par la coalition dAngela Merkel ; vont-elles oui ou non relancer la natalit en Allemagne et repousser le spectre du vieillissement ? Rien nest moins sr, parce quelles se contredisent au moins en apparence (jignore les dtails de leur mise en application ; peut-tre a-t-on prvu une complmentarit ?). Le salaire parental vise les mres (et pres) au foyer, tandis que louverture de nouvelles crches permet de poursuivre une activit professionnelle sans renoncer avoir des enfants. Il sagit de ne pas faire de confusion. Une mesure nest pas efficace parce quelle est populaire. Aucun foyer ne se plaindra de recevoir de largent, mais voudra-t-il en contrepartie davantage denfants ? En France, tout le monde met en avant le succs des allocations en tous genres, mais regarde-t-on linverse limposition des clibataires sans enfant(s). Celle-ci savre particulirement lourde, et devrait pousser les personnes concernes assurer au plus vite leur postrit, ne laissant que quelques inconscients richissimes lcart de cette fcondit fiscalement assiste. OR IL NEN EST RIEN Quant au travail des femmes, il nagit videmment pas lencontre de la natalit les Etats-Unis, lIslande, ou la France en tmoignent mais rien ne prouve quune femme a plus denfants PARCE QU'elle travaille ! Dans ce tableau on note que 40 % des Albanaises travaillent, et 39 % des Allemandes. Dans le premier cas, les femmes ont 2,3 enfants en moyenne, et dans le second cas, 1,3... Faut-il prciser en outre que l'Etat albanais a d'autres soucis que l'encouragement de la natalit. Quelles conclusions faut-il en tirer ?Et si la natalit relevait des aspirations individuelles, d'un apaisement avec le pass ? C'est une hypothse envisager, ma foi !*2 juin 2008. Lignite. En Allemagne, le respect de l'environnement implique la fois la mise au ban du nuclaire et l'utilisation grande chelle du lignite dans des centrales thermiques classiques. Celles-ci envoient dans l'atmosphre des gaz de combustion et des particules. Elles brlent chaque anne plus de 150 millions de tonnes de ce charbon terreux faible pouvoir calorifique. Pour viter le moindre surcot, les centrales transforment le minerai en lectricit au plus proche des bassins d'extraction. Bien sr, les rserves minires allemandes garantissent un approvisionnement nergtique et une exploitation prenne pour les dcennies venir : en maintenant ce niveau de consommation, pendant trois sicles. Seule la technique de creusement ciel ouvert permet de dgager de telles quantits au prix du march. Les excavatrices ont transform des milliers d'hectares de pturages et labours en cuvettes striles, ponctues de bourrelets de dchets. Trois rgions d'extraction se distinguent : en Rhnanie, l'ouest de Dsseldorf et de Cologne (100 millions de tonnes), en basse Lusace au sud de Berlin (50 millions), et dans le bassin de l'Elbe autour de Leipzig (autour de 20 millions). Ces friches minires ont suscit ds l'aprs-guerre l'intervention des pouvoirs publics en RFA. La Rpublique Dmocratique d'Allemagne, en revanche, ne se souciait gure de la reconversion de ces vastes espaces abandonns du jour au lendemain. Dans ce pays, modle conomique pour le bloc de Varsovie, les autorits communistes ont favoris le dveloppement industriel (en particulier la chimie) et amnag les villes (lectrification et chauffages collectifs) en s'appuyant sur une utilisation illimite du lignite, unique ressource nergtique du pays. A elle seule, la RDA produisait en 1979 un peu plus de 250 millions de tonnes, ce qui plaait le pays au premier rang mondial, devant la Chine. Dans le but de produire toujours davantage d'lectricit, les autorits ont dplac des dizaines de milliers d'Allemands, 26.000 pour la basse Lusace, dans laquelle quatre-vingt villes et villages ont disparu.Au mme moment, en Rpublique Fdrale, l'extraction dcline cause de la main d'oeuvre trop chre, et des cots de reconversion des sites. Pour autant, nombre de mines ciel ouvert continuent fonctionner. Mieux mme, les chocs ptroliers des annes 1970, ou plus tard la flambe des annes 2000 rendent au lignite une part de son intrt conomique, malgr les consquences humaines et cologiques de l'extraction. Les organisations et partis hostiles au nuclaire favorisent cette politique nergtique assez paradoxale, qui chasse l'agriculteur par engloutissement des sols. On va le voir un peu plus loin, les rhabilitations russies ou en passe de l'tre jouent un rle indirectement pernicieux. La vgtalisation et la mise en eau gnralement choisies donnent la fausse impression d'un retour la nature primitive. Or on ne reconstitue pas les paysages : on panse les plaies. Et mme s'il s'agit de louer l'inventivit des amnageurs, les espaces obtenus sont beaux l'oeil, et peuvent donner lieu des activits de loisir. En revanche, ils ont perdu toute valeur foncire ou agricole, dans un pays o la densit moyenne est le double de la densit franaise : 230 habitants au km. Certains acharns pressent sans doute Berlin d'interdire l'extraction du lignite et les centrales thermiques brlant ce minerai. Or il faut remettre en perspective la question. Le rapport cots bnfices n'a manifestement pes sur la consommation de lignite que dans la dcennie qui s'achve. Jusqu' la fin des annes 1990, comme partout ailleurs dans le monde, le gouvernement allemand a favoris l'offre plutt que la demande lectrique, par la multiplication des centrales autant que par les subventions alloues au secteur charbonnier. Michel Deshaies le notait en 2005 au FIG de Saint-Di : c'est donc au prix de subventions gigantesques, de l'ordre de 4,5 milliards d'Euros par an que l'on continue extraire du charbon, le parlement ayant dcid de prolonger ces aides l'industrie charbonnire jusqu'en 2005. Encore aujourd'hui, la TVA reprsente moins de 20 % du montant d'une facture d'lectricit en Allemagne. Entre 1979 et 2003, la production lectrique cumule des deux Allemagnes (RFA, 366 et RDA, 97) a cru d'un sixime : de 463 540 milliards de kWh (+ 16,7 %) [source]. Dans le mme temps, la population a quasiment stagn : de 78 (61 + 17) 82 millions d'habitants ! Cette hausse efface en outre les changements profonds relevs en Allemagne rcemment. Le prix moyen du kWh a rgulirement augment en Allemagne depuis la libralisation du march de l'lectricit, surtout au dbut des annes 2000 [source]. Les Allemands paient le kWh aujourd'hui environ 50 % plus cher que les Franais [source]. Dans l'Allemagne runifie, les sites miniers de basse Lusace laisss l'abandon commencent tout juste changer de physionomie. Le land de Saxe vieillit. Ses densits rurales s'affaissent et les dplacs d'hier ne reviendront plus [1]. Michel Deshaies estime 20 % les terres rendues l'agriculture dans le secteur. Le chantier de reconversion des paysages Rekultivierung s'avre titanesque. Entam au dbut des annes 1990 pour terminer en 2020, il s'tend sur 800 km. Sur les 215 sites exploits ciel ouvert, 163 disparatront sous un rseau d'une trentaine de lacs relis par des canaux. Ces 14.000 hectares constitueront alors la deuxime superficie d'eau douce du pays, aprs le lac de Constance. Dpollution et amnagements des berges ont d'ores et dj cot huit milliards d'euros au contribuable allemand. Marcasite et pyrite remontes la surface la faveur de l'exploitation du lignite acidifieraient dans plusieurs secteurs les eaux de surface, sans une intervention pralable. Il faut en outre contrebalancer le remplissage des anciens bassins d'extraction par l'apport d'eaux de surface dtournes des rivires Neisse, Spree et Elster [2]. Aprs l'or du Rhin, l'argent des lacs. Pour une vue complmentaire sur l'Internationale Bauausstellung [Exposition Internationale de la Construction] consacre ce chantier paysager de la Saxe orientale, il faut lire cet article du Temps. [1] " Les premires destructions de villages ou de hameaux se produisent dans les annes 20 en Lusace (Neu Laubusch, 1924) et en Allemagne centrale, au sud de Leipzig (Rusendorf, 1928/1933), ainsi qu' Geiseltal (Rundstdt 1929/1931), en consquence de la constitution des grandes exploitations en dcouverte. Mais, jusqu'aux annes 50, ces dplacements de population restent encore trs limits. Tout change avec le dveloppement d'une exploitation intensive qui tend considrablement les surfaces des mines et multiplie les destructions de villages. Jusqu'au milieu des annes 60, 80 hameaux ou villages de RDA ont ainsi t dtruits, ncessitant le dplacement de 32700 personnes, dont la moiti dans le seul Bezirk de Halle, en particulier dans l'exploitation de Geiseltal qui est l'poque encore la principale du pays. En Basse Lusace, moins densment peuple et o l'exploitation est alors moins dveloppe, le phnomne est plus limit puisque moins de 7000 personnes ont alors t dplaces. Au cours des annes 70 et plus encore des annes 80, les destructions de villages, et mme de petites villes dpassant 3000 habitants se multiplient, en particulier dans le bassin de Leipzig o l'exploitation progresse sur la bordure sud de l'agglomration. Les villes de Magdeborn (3100 habitants) et de Bsdorf-Eythra (3200 habitants) sont ainsi dplaces entre 1977 et 1987. Les projets de dveloppement de l'exploitation du lignite en RDA prvoyaient mme le dplacement de villes plus importantes. Si la runification n'tait pas venue remettre en cause le rle du lignite dans l'conomie, c'est 70 000 90 000 personnes supplmentaires qui auraient d tre dplaces entre 1990 et 2030 pour permettre la poursuite de l'exploitation. / Deshaies. [2] Marie Verdier / l'Allemagne ses mines en lacs / La Croix / jeudi 29 mai 2008 / P.25*19 octobre 2010. Multiculturalisme. Dans un premier temps, ma raction a t de ne pas prter attention lexposition, Hitler et les Allemands. Le peuple et le crime . Les Allemands en font trop, me suis-je dabord dit. Et puis jai lu les comptes-rendus faute de pouvoir me dplacer Berlin, pour finalement changer davis. Cest un miracle de notre temps que vous mayez trouv parmi tous ces millions de gens ! Et que je vous ai trouvs, cest la chance de lAllemagne Adolf Hitler, Nuremberg (1936). Le national-socialisme sest appuy sur lopinion publique allemande, sur la rancune lencontre des vainqueurs de 1918, et sur la peur de la crise conomique mondiale. Par les objets familiers l prsents, on saisit que beaucoup dAllemands ont apprci ou pire vnr le dictateur : jeux de cartes, lettres dcoliers, lampes, bustes en bronze et autres lments de dcoration intrieure. Les nostalgiques ny trouveront pas leur compte. Aucun lment ne rappelle lintimit dHitler, afin de couper court aux critiques ventuelles. La popularit dHitler questionne toujours [Libration]. La Croix du 18 octobre 2010 relve un phnomne comparable en France, la mme poque. Lors du dmnagement de la direction des domaines qui quittait en 2005 un immeuble du quartier de lOpra Paris, on a en effet dcouvert dans une cave les archives personnelles du marchal Ptain. Elles sont dsormais ouvertes la consultation au Service Historique de la Dfense Vincennes. Le ptainisme sy rvle moins comme un mouvement politique raisonn que comme un assentiment collectif. Les 4.500 lettres du fond documentaire saluent les mrites du vainqueur de Verdun, de lhomme providentiel. Beaucoup reprennent les slogans du rgime cens dfendre les vrais Franais. Aucune ne mentionne les perscutions antismites ou lembarrassante collaboration avec lAllemagne nazie. Cest lopinion commune, qui se rallie comme un seul homme, au Fhrer ou au Marchal.Patrick Saint-Paul dcrit celle-ci sous sa forme la plus actuelle. Lopinion publique parat suivre il est vrai de nouveaux mots dordre. De nombreux Allemands succombent aux attraits dune cologie radicale ne du combat contre lnergie dorigine nuclaire. A Stuttgart, on soppose la construction dune gare trs coteuse. A une centaine de kilomtres au sud-est de Hambourg (Gorleben), on sapprte bloquer les trains qui transportent des dchets nuclaires. 16.500 fonctionnaires protgeront les convois et les lignes. Le quotidien conservateur Frankfurter Allgemeine Zeitung et le journal de la gauche berlinoise Tageszeitung partagent le mme constat : la rvolte citoyenne est le nouveau mode d'action privilgi des Allemands pour bloquer les projets auxquels ils s'opposent entre deux lections locales. Hambourg, un mouvement citoyen a fait capoter la rforme de l'ducation. Dans le Land de Mecklembourg-Pomranie, on proteste contre l'installation de champs d'oliennes gantes qui dfigurent le paysage. Berlin, les riverains du nouvel aroport international BWI protestent contre les plans de vol des compagnies ariennes. (Figaro) A priori loppos de lchiquier politique, Thilo Sarrazin appartient cependant au SPD. Dirigeant de la Bundesbank, il sest fait connatre dans le pass en tant qulu berlinois n'ayant pas sa langue dans sa poche. Lhomme a bti sa popularit en dnonant la drive des comptes publics dans la capitale [Berlin paiera], puis en proposant de diminuer les aides sociales destines aux plus modestes, censs - selon lui - vivre aux crochets de la socit. Aux uns il recommandait de manger pour moins de cinq euros, aux autres de shabiller plus chaudement plutt que dallumer leur chauffage. Cet t, il a toutefois pris une autre dimension en sattaquant un pril qui menacerait lAllemagne, limmigration. LAllemagne va sa perte, parce quelle nourrit en son sein ses propres ennemis, explique lauteur. Les immigrs se retrouvent dans les marges de la socit. Ils ne seraient pas rejets au sens o lentendent les tenants de la thorie de lexclusion, mais nadmettraient pas de se fondre dans le modle dominant. Selon Thilo Sarrazin, les Allemands risquent de se retrouver minoritaires et isols dans leur propre pays [source]. Lauteur ne peut videmment se targuer dune quelconque originalit en combinant peur, repli sur soi et condamnation de limmigration au nom des idaux et des intrts bien compts de la nation ().Thilo Sarrazin a runi contre lui un concert de protestations, venu de tous les horizons. Depuis, son essai se vend comme des petits pains. Courrier International estime 250.000 le nombre dexemplaires vendus, le Temps 700.000. Lopinion publique a-t-elle mtamorphos un faux trublion en victime de la censure des puissants ? Les rcentes dclarations dAngela Merkel donnent rflchir. Cet t, la chancelire a explicitement demand ljection de Thilo Sarrazin du directoire de la Bundesbank. La semaine dernire, cependant, lors dun discours devant le congrs des Jeunes CDU, elle a succomb lambiance. Angela Merkel condamne soudain le multiculturalisme et voque lchec des politiques migratoires menes par les gouvernements allemands. Lide selon laquelle nous vivons cte cte et nous nous en rjouissons [a] chou, totalement chou . Mais quest-ce que le multiculturalisme ? Quy a-t-il de commun entre les politiques menes en Amrique du Nord sur fond de tensions raciales (Etats-Unis) ou dopposition linguistique (Canada) et un multiculturalisme europen, plus rcent et plus htrogne ? Les faiblesses du multiculturalisme apparaissent videmment aujourdhui de lautre ct de lAtlantique. Jen vois deux principales qui interrogent les populations immigres. Dans quoi se fond-on (rflexion sur le contrat social) ? Est-ce que l'on admet - ou non - que la scularisation et le relativisme sont des donnes intangibles ? Taguieff avance cette ide que la communaut musulmane, dans les pays anglo-saxons, ne vit pas seulement en marge. Elle est traverse par un puissant courant antimoderne; bien plus quune philosophie passiste ou conservatrice [source]... Gnreuse en incohrences, la chancelire annonce en mme temps que lAllemagne a besoin de main duvre trangre, pour peu que les immigrs rentrent dans le moule et parlent la langue. Elle se rclame des valeurs chrtiennes sans prciser lesquelles et sous quelle forme. Les catholiques gardent en mmoire ses remontrances au pape Benot XVI [source]. En mme temps, elle affirme que lIslam fait partie de lAllemagne. Par ses dclarations sur la mort du multiculturalisme, la chancelire croit flatter llectorat conservateur de la CDU - CSU qui lit aussi Thilo Sarrazin [Figaro], tout en tenant le discours de la raison conomique, dans un pays vieillissant. Dans cinq mois se tiennent des lections dans le land du Bade - Wurtenberg. Les hommes politiques qui dans le pass ont mis en uvre le multiculturalisme se taisent. Tous espraient sans doute que la tolrance natrait du relativisme, selon lequel tout se vaut et rien na dimportance. Entre temps, lopinion a chang. Plus dun tiers des sonds souhaitent une Allemagne sans Islam. La xnophobie, sans progresser formellement sexprime sans complexe [source]. Les plus virulents se plaignent de lchec de lintgration. Mais en Allemagne, un immigr obtient la nationalit si et seulement si il peut justifier dun lien de sang avec lAllemagne. Dans lenseignement public, il est possible des parents de retirer leurs enfants des cours dducation sexuelle, dempcher leurs filles de participer aux cours de natation [source]. Dans la rue, les femmes musulmanes peuvent porter un voile intgral. Les imams allemands suivent une formation en Allemagne mme, et les cours de religion existent dans de nombreux lnder [source]. Toutes choses impensables en France. Le monde politique franais, sur le sujet dune possible certification halal connat cependant les mmes questionnements [Le bain acide de la banale modernit]. Les musulmans europens feront-ils les frais dun retournement de lopinion ? En France et en Allemagne, le repli sur soi menace [source] alors que des faits divers dfraient la chronique. En Rhnanie du Nord (Wuppertal), un juge condamne en 2007 quatre ans de prison un pre de famille qui a dfnestr sa fille [Rue 89]. Selon Cyberpresse, il y aurait environ un millier de mariages forcs par an en Allemagne. La loi punit pourtant explicitement cette pratique. Les parents viss s'en affranchissent en se passant du consentement des jeunes filles, quitte les envoyer dans leur pays d'origine. A Cologne, la mairie autorise la construction dune grande mosque, quitte fermer les yeux sur son financement, sur la formation des imams, ou sur la prire non mixte [source]. En France, le sujet savre aussi sensible [Mosques, passion franaise]. Il ny a nanmoins pas de communaut au sens gographique : en Allemagne se ctoient Turcs, Bosniaques ou Afghans. Beaucoup dimmigrs de confession musulmane proviennent des campagnes et se sont installs dans les mtropoles, sans matrise de la langue et sans diplmes. La situation des Kurdes dAllemagne illustre tout fait ce dcalage [source]. Les affinits et les obdiences varient (chiites ou sunnites). Et toutes les tensions propres leurs pays dorigine se rpercutent sur place [La voie turque contre limpasse ottomane]. En tmoignent les tensions entre organisations cherchant ladhsion de tel ou tel groupe, dans une logique concurrentielle qui met de ct les plus ouverts sur lextrieur [source]. Serge Truffaut, dans le Devoir regrette que lon consulte davantage les politologues que les sociologues. Ceux-ci ont tabli un lien direct entre clatement identitaire et individualisation des comportements. Autrement dit, l'adhsion un socle commun de valeurs et de cultures est plus hasardeuse ou difficile qu'elle ne l'tait dans les annes 60 ou 70. Qui plus est, quels taient en France, terre d'immigration par excellence en Europe, les rseaux facilitant l'intgration des trangers? L'cole, le service militaire et les syndicats. Bref, tous les membres de l'Union europenne (UE) devraient tripler les budgets de l'ducation, rinstaurer (sic) le service militaire et syndiquer tous les salaris. Bonjour l'ambiance ! J'incorporerais pour ma part une autre volution, l'talement urbain et l'homognisation spatiale. Qui a influenc les dcisions gouvernementales ici dcries ? Lopinion publique, au secours*23 fvrier 2011. Hambourg. Dans le 'Monde' dat du 23 fvrier, Frdric Lematre se penche sur la question de l'accroissement de la dette publique outre-Rhin : 'Le sauvetage des banques plombe la dette allemande'. Il constate, sans chercher la polmique. Son article regorge pourtant de sujet de frictions. Le premier ne m'intresse pas directement, mme s'il n'est pas anodin. On le lit ds la premire phrase. La vertueuse Allemagne l'est-elle vraiment ? Le journaliste renvoie ses lecteurs leurs a priori. L'Allemagne parangon conomique symbolise la puissance pour les Franais, depuis des lustres. Les Allemands ne rechignent pas la tche ('eux ?'), ils ne passent pas leur temps rler ou faire grve ('ils ont la culture du consensus'). Leur industrie rivalise avec ses concurrentes nord-amricaines ou asiatiques ('il n'y a plus d'industrie en France'). Et puis l'quipe nationale de football gagne (presque) toutes les comptitions. Frdric Lematre sonne le glas : j'interromps donc la litanie des supriorits relles et/ou illusoires de l'Allemagne.Le second sujet de frictions soigneusement dulcor touche la place des grands pays par rapport aux plus petits au sein de l'Union europenne. Les premiers se situent au centre et les autres en priphrie ? L'article pointe une ingalit de traitement moins superficielle. Dans son rapport sur l'conomie europenne publi mardi, l'institut de conjoncture conomique IFO de Munich, un des plus rputs en Allemagne, semble lui donner raison. Il rappelle que le ratio dette/PIB est plus lev en Allemagne - 76 % (et 83 % en France) - qu'en Espagne (64 %). Depuis la cration de l'euro en 1999, Berlin, comme Paris, a viol six reprises les rgles du pacte de stabilit et de croissance qui limite l'endettement 60 % et les dficits publics 3 % du PIB. Seules l'Italie, la Hongrie et la Grce ont fait pire. Ainsi donc, Bruxelles contraint les Grecs ['Quand les coqs auront des dents'], les Irlandais ['Les migrs, dehors !'] ou les Espagnols. J'en oublie. Les autres n'en tiennent pas (ou peu) comptent. En Allemagne et en France, les gouvernements concerns interprtent leur aise les traits et engagements internationaux.Une conclusion manque nanmoins dans l'article de Frdric Lematre. La croissance conomique allemande (3,6 % en 2010) n'est pas sans rapport avec un alourdissement de la dette publique. Je manque des statistiques pour aller plus loin. Quel que soit le niveau d'interfrence entre les deux, les chiffres de la croissance semblent de toutes faons fragiles. Sur une seule anne, la dette publique allemande a cru fortement : + 304,4 milliards d'euros (+ 18 %), pour atteindre une somme totale de 2.000 milliards. Avec une dette de 1 284,1 milliards (+ 21,9 %), l'Etat fdral est le principal porteur du fardeau, devant les Etats-rgions (595,3 milliards, +13 %) et les villes (119,4 milliards, +4,9 %). Le reste concerne d'autres organismes publics. Parmi les Land, la Rhnanie-du-Nord - Westphalie qui, elle seule, reprsente plus de 20 % du produit intrieur brut (PIB) allemand, a vu sa dette passer spectaculairement de 123,3 milliards 173 milliards d'euros, soit un bond de 40,3 %. Avant tout, les comptes publics se sont dgrads cause du renflouement de deux banques la drive : Hypo Real Estate (crdit immobilier) et Westphalie WestLB (banque publique de Rhnanie-du-Nord).Le week-end dernier, les lecteurs d'Hambourg ont vot contre la majorit sortante (source). Ole von Beust, l'ancien maire conservateur ne participait pas au scrutin : il a quitt ses fonctions l't 2010. La presse a alors mis en avant un refroidissement de ses relations avec la chancelire Angela Merkel, la dception de ne pas avoir t appel un poste ministriel et enfin la lassitude d'un homme de 55 ans dsirant retrouver une vie de famille anonyme [source] ; cet ge-l, en France... La CDU a donc perdu Hambourg, et la presse allemande disserte depuis sur les chances lectorales prochaines, les chances du SPD de gagner un autre land. En attendant, les conservateurs ne grent plus aucune ville millionnaire. Cela ressemble s'y mprendre une sanction, comme une sorte de rejet de la part des lecteurs.Hambourg s'tend sur 755 km, essentiellement autour de l'estuaire de l'Elbe et compte 1,7 millions d'habitants. Depuis 1991, une rgion mtropolitaine runissant 800 communes est ne grce un accord avec deux lnder voisins et deux arrondissements du Mecklembourg. Cette entit regroupe 4,3 millions d'habitants. Les autorits municipales, obsdes par l'ide d'accrotre le niveau de comptitivit du port (deuxime en Europe derrire Rotterdam) et de la zone urbaine ont investi dans les infrastructures et les quipements. Il en rsulte en 2006 un PIB un peu suprieur (86 milliards d'euros) celui de la capitale (80 milliards). Des dizaines de multinationales ont install leurs siges et dvelopp leurs activits Hambourg : Airbus, Beiersdorf, Hapag-Lloyd, Olympus, Otto Versand, Panasonic, etc. Le temps de la transformation des matires premires dbarques sur les quais est rvolu. Le port reoit par bateaux entiers les produits manufacturs fabriqus en Chine ou ailleurs. Les marchandises irriguent ensuite l'hinterland. Les trois quarts des actifs travaillent dans les services (transport, banque, assurance, etc.). Ce dynamisme rsulte des investissements raliss par les autorits rgionales. Cette stratgie moyen et long terme, baptise 'Metropole Hamburg - Wachsende Stadt' : Hambourg, une mtropole en essor, vise conforter la position de la rgion parmi les grandes mtropoles internationales. Elle a dfini quatre objectifs principaux, quantitatifs mais aussi qualitatifs : une croissance durablement suprieure celle des villes comparables, l'augmentation du nombre d'habitants, une plus forte attractivit et le renforcement du rle de mtropole, la prservation de la qualit de vie dans le cadre d'un dveloppement durable. Du point de vue conomique, cela se traduit par un certain nombre de priorits : un soutien actif aux 120.000 PME de la Rgion mtropole ; une politique de 'cluster' dans les secteurs innovants et/ou forte croissance ; une amlioration de la coopration entre les diffrentes instances de la Rgion mtropole en vue de soutenir la croissance ; enfin, la ralisation du grand projet d'urbanisme 'Hafencity' (cit portuaire). [Michle Weinachter / 'Hambourg, mtropole portuaire internationale' / Regards sur l'conomie allemande - Bulletin conomique du Cirac / N81 (2007)]Il faudrait ajouter la ncessit pour le port de faire face aux menaces naturelles. La ville ravage par une tempte hivernale double d'une crue de l'Elbe en fvrier 1962, a lev les digues de protection et investi dans la mise niveau de ses installations (source). Mais ne nous berons pas de mots. A l'intrieur d'un march unique et sans frontires, les investissements de la rgion de Hambourg ont d'abord un impact sur d'autres ports quivalents, en France ou ailleurs ['France-France : 0-2']. Les eurosceptiques trouveront l une occasion de dverser leur bile. Il faudrait plutt calculer le cot rel de la 'course aux armements' que l'on devine cette occasion ; des fonds publics hollandais, belges ou anglais ont mcaniquement t dbloqus pour hisser Rotterdam, Anvers ou Londres au niveau de ceux d'Hambourg (ou inversement, d'ailleurs...). La concurrence vaut sur le territoire allemand lui mme. Quand Michle Weinachter dcrit une politique visant attirer de nouveaux habitants, elle omet de replacer celle-ci dans le contexte dmographique allemand ['Ne pas confondre Allemande et Albanaise']. L'Allemagne vieillit et les lnder de l'intrieur se vident, en particulier dans l'ancienne RDA ['Aprs lOr du Rhin, largent des lacs de Saxe']. Hambourg accueille de nouveaux arrivants ? En forant le trait, on pourrait parler de runification l'envers. Avec la double facture. La 'Hafencity', emblme de l'expansion de la ville. Ce projet futuriste, actuellement le plus grand chantier urbain en Europe, doit changer le visage du centre-ville, qui va connatre une extension de surface de 40 %. L'achvement des travaux (5 milliards d'euros d'investissements) est prvu pour 2020. La 'Hafencity' mlera sur 155 hectares logements, bureaux, centre de foires et de congrs, activits conomiques dans tous les secteurs (40.000 emplois). Hambourg entend ainsi attirer de nombreuses entreprises : SAP, Junheinrich ou Unilever ont dj annonc leur installation. La 'Hafencity' se veut l'incarnation du dynamisme de Hambourg et de son conomie. Son rayonnement passera galement par une offre culturelle et de loisirs remarquable : outre plusieurs muses et un aquarium, la 'Hafencity' accueillera l''Elbphilarmonie', cense devenir l'une des dix meilleures salles de concert du monde. Son cot, objet de polmiques, est finalement estim 240 millions d'euros, soit 50 millions de plus que prvu. Le btiment sera en partie financ par des dons des citoyens, d'entreprises et de fondations (65 millions d'euros ont dj t rcolts). Les travaux de construction ont commenc dbut avril 2007. Son achvement est prvu pour mai 2010. L''Elbphilarmonie, l'architecture rsolument contemporaine, doit devenir le nouveau symbole de la ville-Etat. [Michle Weinachter / Id.]L'lecteur d'Hambourg (Hambourgeois ou Hamburger) incarnerait le 'cool nordique' ? Je le juge personnellement paradoxal. Il a renvoy le remplaant d'Ole von Beust dans l'opposition. Selon Patrick Saint-Paul dans le Figaro, Christoph Alhauss paierait l'annonce d'une rduction des budgets culturels (vots par son prdcesseur). Le journaliste reprend l'argument de l'un de ses confrres ; Alhaus est un homme du Sud, un buveur de bire volubile et provincial. Tout le contraire de ce que sont les Hambourgeois . Comme quoi, la gographie sert bien comprendre les enjeux (...). En tout cas, le candidat SPD a apparemment remport les lections en mnageant la chvre et le chou. Au lieu de dnoncer en bloc le projet de la Philharmonie [1] (380 millions d'euros), il se flicite seulement de sa prochaine inauguration. Cela aurait d tre mieux planifi ds le dpart. L'explosion du budget a entam le crdit moral de la coalition au pouvoir en ville. Mais une fois que la Philharmonie sera inaugure, ce sera formidable pour la ville. La future majorit emmene par le SPD devrait nommer ministre des Finances de la ville-Etat, l'ex-directeur de la chambre de commerce. L'information mane de Patrick Saint-Paul qui s'extasie devant le ralisme conomique des sociaux-dmocrates. Le futur ministre, loin de s'interroger sur le pass et le creusement des dficits publics, parle son aise des futures dpenses pour 'dvelopper' Hambourg. L'attractivit dans ces domaines est indispensable pour attirer les personnes de qualit travaillant dans l'industrie des services, le point fort de notre ville, estime-t-il. L'autre priorit sera le dveloppement de l'infrastructure routire et ferroviaire, pour dsengorger le bassin industriel du port, o le temps de sortie des conteneurs est trop long. Le gouvernement devra travailler main dans la main avec le tissu conomique Le hamburger est un sandwich bourratif [incrustation] qui ne calme pas la faim. Il donne mon sens un excellent nom pour un paradoxe politique (et lectoral). Celui-ci a encore fonctionn ce week-end Hambourg : voter pour les investissements mais contre les impts.[1] Dessin par le prestigieux cabinet d'architectes Herzog & de Meuron, le btiment rhabilite un ancien entrept de cacao et de caf en briques, surplomb par une structure de bton et de verre asymtrique. Le complexe de la Philharmonie comprendra 250 chambres d'htel et 47 appartements de luxe. La salle de concert polygonale est pose au cur du btiment tel un coquillage autour duquel s'enroule un escalier majestueux. Grce la vue imprenable sur les 75 km du port de Hambourg, le plus grand d'Allemagne, et sa fort de grues, les spectateurs seront plongs dans une atmosphre postmoderne. 'Il faut imaginer le spectacle lorsque les paquebots gants comme le Queen Mary croiseront au pied de l'immeuble. La Philharmonie sera leur premire impression de la ville en actionnant leur klaxon, se rjouit l'un des chefs de chantier. l'intrieur de la salle de concert, on ressentira une lgre vibration. Mais on n'entendra pas la moindre nuisance sonore grce la qualit de l'insonorisation.' Le commerce, l'art et les sciences sont les trois piliers indissociables de la cit hansatique. 'La Philharmonie incarne ces trois valeurs, affirme Guido Neumann, directeur du marketing de Hambourg. C'est ce qu'il manquait cette ville pleine d'atouts : un btiment auquel on l'identifie immdiatement. On espre le mme effet qu'avec le Guggenheim de Bilbao.' / Figaro.*21 novembre 2011. Dans son dition de dimanche (20 novembre 2011), le plus gros tirage de la presse franaise a consacr une page entire Jean-Louis Thiriot un l'un des co-auteurs du livre "France-Allemagne, l'heure de vrit" sorti chez Tallandier. Son comparse Bernard de Montferrand, ambassadeur la retraite coule des jours heureux loin des journalistes d'Ouest-France. Seul Jean-Louis Thriot apparat en effet dans l'entretien.Aprs avoir termin sa carrire de diplomate Berlin, Bernard de Montferrand gre depuis l'automne 2010 un organisme public l'objectif ambitieux. Platform runit les Fonds Rgionaux d'Art Contemporain. Le site Internet prcise que l'ex-ambassadeur prside le Frac Aquitaine. Le haut fonctionnaire dispose donc comme on peut le voir de toutes les qualits pour jauger de la comptitivit de la France et de l'Allemagne.Pourquoi la France a dcroch de l'Allemagne est le titre choisi par Ouest-France. Il y a l un clin d'oeil la presse nationale qui a multipli ces derniers temps les dossiers sur le mme thme. En janvier 2011, le Point pose la question avec un point d'interrogation final : Pourquoi la France a dcroch de l'Allemagne ? Le prtexte en est une tude commande par le gouvernement un 'cabinet d'analyse conomique' (source). Le march du travail sclros et les trente-cinq heures ont manifestement servi d'ides matresses. Celles-ci ont conditionn la dmonstration. Le ministre de l'Industre, Eric Besson, a pu ensuite communiquer ses recommandations en s'appuyant sur la parole d'experts. Tout cela pour en arriver un lieu commun : la comptitivit, c'est bien. Mais l'Allemagne, c'est mieuxL'interview de Ouest-France - 'avocat et historien' si j'en crois sa notice bibliographique - ne s'intresse pas vraiment la question pose. Les rponses comptent plus que les dmonstrations. 'La France a t-elle vraiment dcroch par rapport l'Allemagne ?' demande Marc Mahuzier (OF). Jean-Louis Thiriot ressort de ses fiches trois arguments successifs : la part des deux pays dans le commerce mondial, leurs balances commerciales et leurs taux de chmage respectifs. Je ne conteste pas les donnes, mais rejette la comparaison des carottes avec des poireaux ou des pommes de terre. On pourra lire dans le texte l'auteur (voir au-desssus) pour avoir une ide des lieux communs du moment : "La France si loin de l'Allemagne", comme disait Porfirio Diaz du Mexique frontalier des Etats-Unis. Rigueur, got de l'effort, force industrielle et intelligence des lus : tout ce dont l'Allemagne jouit, nous en manquons. La fiert nationaliste et cocardire a laiss place une pathologie, une sorte d'auto-dnigrement. Ceux qui n'y succombent pas mritent d'autant plus les remerciements (La Tribune).Dans La Croix du 14 novembre, Michel Verrier ose se dmarquer du concert habituel. Sous sa plume, l'Allemagne prsente un visage douloureux. "Les incapacits de travail qui en rsultent ont augment de 80 % depuis 1999, selon l'AOK, principale caisse d'assurance-maladie, entranant des arrts de travail deux fois plus longs (vingt-trois jours) que la moyenne"Outre-Rhin, les salaris se plaignent d'une augmentation de leur stress. L'universit de Duisbourg confirme quant elle par une tude de cas la dtrioration du moral des Allemands. Les moins de trente ans se montrent quand mme plus sereins que leurs ans. Tandis que la dure du travail a continu de diminuer (trente heures par semaine, trente et un jours de de vacances en moyenne), la productivit a augment. En somme, plus on est productif, moins on est heureux ? En Allemagne, "les salaires rels ont rgress ces dix dernires annes, sauf pour les emplois du sommet de l'chelle. Plus de 20 % des actifs travaillent pour moins des deux tiers du revenu moyen". Et si les femmes travaillent, elles ne peuvent se reposer sur aucune structure pour la prise en charge de leurs enfants ventuels.Il ne s'agit pas de nier les spcificits de l'Allemagne. On peut mme en rappeler quelques unes. L'Etat ne subventionne pas la politique familiale : il nat moins d'enfants (1,4) qu'en France (2,0). Un vieillissement prcoce menace donc l'Allemagne ; mais dans l'immdiat la charge financire pesant sur l'Etat qui doit assurer l'intendance est moindre ['Ne pas confondre Allemande et Albanaise']. L'Allemagne n'a pas d'Outre-mer. L'Etat n'entretient aucune force de dissuasion, ne porte pas bout de bras une industrie de dfense et sa diplomatie colle aux ambitions d'une Allemagne sans place permanente au Conseil de Scurit de l'Onu. Faut-il pour autant surestimer ces diffrences ? Au plan go-conomique, deux arguments me semblent peser beaucoup plus dans la balance : la modration salariale voque par le journaliste de La Croix et l'largissement de l'Union Europenne. Dans les annes 2000, l'Allemagne a doublement profit de l'intgration des pays d'Europe centrale et orientale. Ces nouveaux venus ont accueilli des usines sous-traitantes (dlocalisation assume) et achet des produits allemands... Que les Allemands n'achetaient pas suffisamment (source). L'Allemagne a donc bnfici de l'abaissement des barrires douanires sa frontire orientale (sur ce point, voir cette tude de l'IFRI). Mais cette aubaine ne durera pas.On peut mon sens s'inquiter de la situation de l'conomie franaise sans tomber dans le pige du catastrophisme. Il y a des points forts, dans l'agroalimentaire, l'eau ou les services. Les grands groupes industriels prsents l'tranger dpendent moins que les PME allemandes du march europen. D'autres bnficient des commandes de l'Etat ou de sa protection, en particulier dans l'automobile ['Une auto, des totaux']. L'innovation franaise se dfend dans plusieurs domaines : l'ingnierie financire, les sciences et techniques, les sciences humaines, etc (source). Envier l'Allemagne fait surtout oublier les prochaines chances...L'analyse de conjoncture de l'Insee d'octobre donne quelques pistes de rflexion. Que devons-nous craindre ? Les rdacteurs rpondent en trois points, la faiblesse de la croissance, l'endettement des mnages et l'envole du prix des matires premires qui rogne les marges du secteur industriel. Qu'y a t-il de typiquement hexagonal ? J'ajouterai un quatrime point, le moins ngligeable. L'austrit prsente et future provoquera en retour des effets qu'il convient d'examiner attentivement. L'Espagne illustre d'ores et dj la situation d'un pays dont les collectivits locales peinent se financer : voir ce reportage sur la ville andalouse de Valverde del Camino. La France passera par les mmes difficults ['Cendres et pripties'] mais cela vaut galement pour l'Allemagne : 'Le paradoxe du Hamburger'. La rduction des dpenses publiques produira les mmes effets. Mieux vaut s'y prparer, sans faire croire que les gouvernements actuel et prochain auraient les mains libres (source) ; sans s'illusionner sur une Allemagne de cocagne...