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Allocution de Monsieur Mohamed Ennaceur, Président del’Assemblée des Représentants du peuple devant leparlement Européen à l’occasion de la semaine Tunisienne

-Bruxelles 02 Mai 2017-

Monsieur Antonio TAJANI, Président du ParlementEuropéen

Madame Federica MOGHERINI,

Monsieur le Président Enrique Baron CRESPO,

Monsieur Michael GAHLER

Mesdames et Messieurs les Députés

Chers Amis de la Tunisie

Je tiens tout d’abord à vous exprimer en mon nom personnel etau nom de la délégation qui m’accompagne tout l’honneur et leplaisir d’être parmi vous aujourd’hui sur invitation duparlement européen, et à l’occasion de l’organisation de lasemaine tunisienne.

Nous sommes heureux d’être ici également, avec l’espoir deconsolider les liens entre la Tunisie et l’Union Européenne etpour faire de cette relation l’expression parfaite d’un modèle àsuivre au niveau des relations internationales nouvellementétablies surtout celles entre les pays de la rive sud et les pays dela rive nord de la Méditerranée dans tous les domaines.

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Mesdames et Messieurs les députés,

Un chapitre important de l’histoire de la Tunisie s’est esquissésuite à l’interférence avec les peuples arrivés sur nos terres parvoies terrestre et maritime, avec lesquels nous avons bâti unevie commune faite de coexistence, et d’antagonisme et marquéspar la guerre et la paix, mais également par le brassage descultures, l’intégration et l’influence mutuelle, ce qui nous aamené par la force des choses à coexister et à évoluer ensembledans tous les domaines.

Notre pays s’est d’ailleurs obstiné durant toutes ces époques àdéfendre sa liberté et sa souveraineté en demeurant égalementfidèle et attaché à ses amis. Et nous estimons qu’il estimpossible de concevoir un grand chapitre de notre histoirenationale depuis les époques les plus lointaines jusqu’à nosjours, sans mettre en lumière l’interférence et l’interdépendanceavec l’Europe et souligner l’influence réciproque entre cetteEurope et nous à tous les niveaux.

Il est facile aujourd’hui de constater que les centres d’intérêts,d’influence et de prise de décisions en rapport avec les relationsinternationales se sont multipliés et se sont entremêlés, et queles défis auxquels nous sommes confrontés et l’éventualité deleur évolution aussi bien positive que négative se sontégalement accentués et complexifiés…

Tous ces facteurs font de notre espace commun autour de laméditerranée un théâtre d’affrontements aussi dangereux quedécisifs contre l’insécurité, le terrorisme, le crime organisé,

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l’immigration illégale ainsi que contre les crises économiques,le déséquilibre social et la dérive environnementale.

Notre espace géopolitique incarne par conséquent le théâtred’une multitude de défis capitaux et communs à relever. Et nulparmi nous n’est en mesure de relever ces défis en dehors d’unpartenariat efficace ou en se basant sur une vision à court termeou encore unilatérale. Nos intérêts communs nous poussent eneffet à travailler de concert dans le but de réussir ensemble etdurablement.

En effet, au cas où la Tunisie et l’Europe s’engagent d’uncommun accord à relever avec succès les défis se rapportant auterrorisme, à l’immigration, au crime organisé et à la dériveéconomique et sociale dans toute la région surtout dans sa partiesud, ils n’ont pas d’autre choix que d’unifier leur vision,diagnostiquer et identifier avec exactitude les intérêts communsurgents et futurs et mettre en place les structures et les moyensnécessaires à leur réalisation et ce dans leur intérêt communainsi que dans l’intérêt de la région tout entière.

Mesdames et Messieurs les députés,

Notre pays a connu au cours des six dernières années unetransformation historique profonde initiée par un élanrévolutionnaire durant lequel le choix démocratique a étéconsacré et duquel sont ressortis un état démocratique et libreet un régime politique pluraliste défendant les droits del’Homme. Ce changement historique a indéniablementcontribué au renforcement des acquis progressistes du peupletunisien et s’est employé à mettre en œuvre toutes les réformes

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susceptibles de faire de notre pays un modèle à suivre dans uncontexte difficile dominé par les incertitudes, les conflits et leséchecs à répétition.

En effet, notre pays a réussi avec brio la première phase de satransition démocratique à savoir la phase constitutive, àinstaurer les fondements d’un régime démocratique couronnépar l’adoption de la constitution de 2014 qui a consacré lesdroits et libertés individuelles et collectives et a garanti en 2014l’organisation d’élections législatives et présidentielles libres ettransparentes permettant ainsi au pays d’accéder à la deuxièmephase de sa transition démocratique dirigée actuellement parl’assemblée des Représentants du Peuple par le truchement deses législations à travers lesquelles toutes les institutions etinstances permanentes de l’Etat moderne et démocratique ontété constituées.

La Tunisie a ainsi réussi remarquablement l’aspect politique deson processus démocratique et a su faire face aux défis de cetaspect difficile, critique et de surcroît vulnérable dans un espacegéographique dominé par les guerres civiles et la recrudescencedu phénomène terroriste. Ce succès a d’ailleurs été uneexception dans le monde arabe et la région africaine limitrophe.

Cependant, la réussite de la dimension politique de la transitiondémocratique en Tunisie a généré de nouveaux défis importantsque le pays est appelé d’urgence à affronter ; à savoir laréalisation d’une forte croissance économique et des reformessur le plan social susceptibles de consolider l’édificedémocratique d’une part, et d’épargner au pays les tensions etl’instabilité. Ainsi les taux de croissances économiques faibles,

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un développement inégal entre les régions, l’iniquité entre lescouches sociales et le chômage galopant chez les jeunes(notamment les diplômés de l’enseignement supérieur), sontdes facteurs qui menacent sérieusement l’avenir de la sociététunisienne.

La Tunisie a certes réussi à mettre en place un régimedémocratique mais endure péniblement les conséquencesfâcheuses de la détérioration de la situation sécuritaire dansquelques pays limitrophes. Elle s’est d’ailleurs engagée danscette voie dans l’optique de défendre ses intérêts spécifiques etl’intérêt de la région toute entière. La Tunisie a résisté et résisteencore face à l’hydre terroriste, comptant d’abord sur sespropres moyens et faisant de l’unité nationale et du consensus àtravers le dialogue son crédo et sa ligne de conduite.

Toutefois, la réussite pérenne dans le domaine politique etde la construction démocratique requiert la réalisation d’undéveloppement économique et la mise en place des réformessociales appropriées qui puissent répondre aux aspirations sanscesse grandissantes, aux besoins urgents du peuple et à sesrevendications légitimes. Indéniablement une société soudée,une économie prospère et un développement global et équitableconstituent le fondement et le socle vital d’une démocratiepérenne.

Mesdames et Messieurs les députés,

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La Tunisie a intégralement et favorablement changé depuis2011. Ainsi l’approche mise en place depuis plusieurs annéespour résoudre ses problèmes de développement économique etpour faire avancer ses relations avec l’Union Européenne n’estplus d’usage puisqu’elle se fonde sur les anciennes dispositionsorganisationnelles figurant dans l’accord d’association signé en1995 entre les deux parties qui vivent actuellement une étapecruciale et nouvelle de leur histoire exigeant une avancée dechoix dans leur relation.

Nous apprécions à ce propos au plus haut degré la positionpositive de l’UE et surtout celle du Parlement Européen àl’égard de la révolution tunisienne ainsi qu’envers notreprocessus de transition démocratique depuis 2011.

Nous louons également l’appel du Parlement Européen àsoutenir la Tunisie en matière de développement économique etsocial sur la base d’un programme d’investissement spécifiqueet privilégié sous forme d’un plan Marshall comme le stipule larésolution du Parlement Européen du 14 Septembre 2016 surles relations de l’union avec la Tunisie dans le contexte régionalactuel ; une résolution que nous avons eu le plaisir etl’opportunité de débattre avec la délégation du ParlementEuropéen lors de sa visite en Tunisie en Septembre 2016. Noussommes d’ailleurs persuadés que le rôle qu’assume l’UE enmatière d’appui au processus de transition démocratique est unfacteur positif en soi, un rôle qui a été consacré au milieu desannées 70 du siècle dernier avec les expériences de changementdémocratique du Portugal, de la Grèce et de l’Espagne ainsiqu’avec les différentes expériences de transition démocratiques

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en Europe Centrale et en Europe de l’Est touchant plus tardd’autres pays limitrophes.

Nous estimons par conséquent que l’intensification de l’aideeuropéenne à la nouvelle Tunisie sera d’une importancecapitale et nous sera d’un grand apport jetant les bases d’unpartenariat stratégique réel et efficace à la hauteur des défis quela Tunisie est appelée à affronter. Tout cela exige un appui etun accompagnement technique de tous les instants ainsi que desinvestissements importants et bien étudiés capables de stimulerl’activité économique et de renforcer l’intégration sociale. C’estdu reste le domaine dans lequel les pays de l’UE peuvent jouerun rôle primordial et nous être d’un apport inestimable sansoublier le fait que l’UE est le 1er partenaire économique de notrepays sur tous les plans, et que la Tunisie est le portail qui ouvresur les frontières sud de l’Europe et la zone nord de laMéditerranée. C’est dans cette zone que commence lerayonnement de l’Europe, mais c’est là aussi où peuvents’amplifier ses défis.

Nous devons travailler ensemble. Il est donc nécessaire voireurgent de concevoir les solutions appropriées et de prendre desinitiatives exceptionnelles et des mesures nécessaires quiautorisent les produits tunisiens à accéder plus facilement aumarché européen et des procédures qui ouvrent des perspectivesprometteuses à la jeunesse tunisienne et leur offrantl’opportunité de rallier les universités européennes etd’effectuer des cessions de formation professionnelle enEurope.

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L’objectif que nous espérons réaliser également estl’accroissement substantiel du volume des investissementseuropéens en Tunisie dans tous les domaines de développementainsi que dans les filières techniques et scientifiques et laréduction de la dette tunisienne envers l’Europe en s’engageantà transformer cette dette en investissements. Mais cetteapproche ne peut être efficace sur le plan pratique que si elle sefocalise sur 2 axes :

- Le 1er axe ayant trait au budget relatif aux fondsstructurels qui devront être accordés et qui répondent auxbesoins en matière d’investissement offrant les conditionsrequises pour une mise à niveau globale dans nombres desecteurs fragiles ou dont la compétitivité est faible et ce, dansl’objectif de s’adapter aux lois en vigueur relatives à laconcurrence et de valoriser le produit tunisien et de sonexportation en Europe, et nous pensons par là aux secteurs del’agriculture et de la pêche, de l’industrie et des services…

- Le 2ème axe concerne l’élargissement de la sphère dusoutien européen à la Tunisie sur la base des acquis des payseuropéens en matière de technologie, des sciences et demodernisation des entreprises et sur la base des valeurshumaines fondamentales. Il s’agit de donner l’espoir aux forcesvives et aux jeunes tunisiens afin qu’ils puissent étudier, seformer et travailler dans le respect des lois en vigueur enEurope. C’est ainsi que l’Europe deviendra pour cette jeunesseune destination de choix qui donne de l’espoir pour un avenirmeilleur et non pas une aventure périlleuse pouvant conduire àla mort en pleine mer.

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Mesdames et Messieurs les députés,

Réussir à relever les défis économiques et sociaux pour laTunisie après son succès au niveau politique exige un effortsupplémentaire de la part de l’Europe. Un effort qui dépassel’ordinaire et qui équivaut au moins à ce qu’avait reçu bonnombre de pays ayant vécu avant nous des expériencesdémocratiques similaires, comme appui, soutien etaccompagnement.

Et je suis persuadé que l’établissement de cette nouvellerelation tuniso-européenne sur la base de cette approche nousaidera tous à améliorer notre rendement dans la lutte contre lacorruption, le terrorisme et l’immigration clandestine et àcirconscrire les conséquences désastreuses des crises en coursdans la région. Cette nouvelle phase de nos relations faciliteraégalement la mise en place d’un nouveau modèle de partenariatavantageux et fructueux susceptible de cultiver une imagedifférente et singulière des relations internationales.

Mesdames et Messieurs les députés,

Je forme l’espoir de voir notre programme de travail au coursde cette semaine nous rapprocher davantage les uns des autres,et je souhaite que nos travaux seront couronnés par la mise enplace d’une vision commune susceptible de renforcer lacoopération et consolider le partenariat entre la Tunisie etl’Union Européenne dans tous les domaines et ce afin que nouspuissions inciter nos gouvernements et les forces de la sociétécivile dans nos pays à conjuguer leurs efforts et à travailler de

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concert pour contribuer à faire de notre région un havre de paixet un espace de vie commune où règnent prospéritééconomique, justice sociale et modernisation culturelle.

Pour conclure, nous sommes persuadés que l’UnionEuropéenne sera pour la Tunisie un compagnon de route surlequel nous pouvons compter pour relever les défis que noussommes appelés à affronter et ce dans l’intérêt de notre pays etcelui des pays et des peuples de la région tout entière.

Merci pour votre attention.

Je souhaite à nos travaux plein de succès.