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Actualités pharmaceutiques n° 508 Septembre 2011
Aujourd’hui, plus de 40 % des nouvelles entités chimiques découvertes sont des molécules lipo-philes. En raison de leur faible solubilité aqueuse
entraînant une mauvaise biodisponibilité par voie orale, elles posent des problèmes de mise en forme.Systèmes auto-émulsionnables, procédés de fabrica-tion spécifiques pour les molécules lipophiles et adap-tation de la forme galénique à l’objectif thérapeutique sont autant de stratégies pour améliorer l’efficacité de la prise médicamenteuse par voie orale.
Les systèmes auto -émulsionnablesUne solution pour améliorer la biodisponibilité des molécules lipophiles consiste à développer des formulations lipidiques comme les systèmes auto-
émulsionnables. Ces derniers ont la particularité de former spontanément in situ, au contact des fluides digestifs et grâce à la motilité digestive, une émulsion fine permettant la solubilisation de la substance active au sein des gouttelettes lipidiques. Ils améliorent la biodisponibilité de ces molécules lipophiles, ce qui accroît leur efficacité thérapeutique.L’exemple majeur illustrant l’intérêt de ces systèmes auto-émulsionnables est celui de la cyclosporine A, qui a été tout d’abord commercialisée sous forme d’émul-sion (Sandimun®), puis de système auto-émulsionnable (Néoral®). Sous cette dernière forme, la biodisponibilité de la molécule est augmentée. De plus, elle présente une meilleure sécurité d’emploi, avec une réduction des variations inter- et intra-individuelles, et une meilleure linéarité dose/exposition.Ces systèmes sont également développés pour des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) comme l’ibuprofène. Ceci améliore la rapidité d’action mais aussi la tolérance gastrique des médicaments puisque la molécule n’est plus en contact direct (sous forme de poudre) avec la muqueuse, mais se trouve à l’intérieur de gouttelettes lipidiques disper-sées dans l’ensemble du tractus digestif.Plusieurs molécules sont actuellement en dévelop-pement : des dérivés hormonaux (ß-estradiol et proges-té ro ne), des fibrates (fénofibrate), l’ubiquinone…
Des procédés de fabrication spécifiquesUne solution consiste à utiliser des procédés de fabri-cation qui permettent de modifier la structure physique de la substance active, changeant ainsi son comporte-ment. C’est le cas des comprimés obtenus par “extrusion hot-melt” (fusion à chaud suivie d’une extrusion).Les médicaments antirétroviraux étaient initialement commercialisés sous forme de capsules molles dont la conservation à la chaleur n’était pas bonne, ce qui modifiait leur biodisponibilité dans le temps. La techno logie “extrusion hot-melt” leur a été appli-quée. Elle permet de convertir des matières premières thermoplastiques en un produit de forme et de densité homogènes en l’intégrant dans une matrice de poly-mère classique.
Améliorer la biodisponibilité pour la voie orale
Différentes techniques existent pour améliorer la prise per os des molécules.
Si elles améliorent la biodisponibilité, la complexité de ces nouvelles formes impliquent
souvent un strict respect des précautions d’emploi, voire des contre-indications,
qu’il appartient au pharmacien de connaître et de souligner lors de la délivrance.
Le broyage des comprimés n’est pas sans risque !La préparation de piluliers par les équipes officinales pour
les maisons de retraite est une pratique extrêmement courante.
En milieu gériatrique, de nombreux patients présentent
des troubles de la déglutition ou refusent de prendre leur
traitement. Ainsi, dans la pratique, les infirmières, lors de
l’administration, broient les formes orales afin que la prise
du médicament soit possible. Or, ouvrir les gélules et broyer
les comprimés ne sont pas des pratiques sans risque. Il est
important que le pharmacien d’officine puisse donner les
renseignements élémentaires sur les dangers encourus.
Perte d’efficacité :– gastrosensibles (inhibiteurs des pompes à protons) ;
– photosensibles (furosémide, inhibiteurs calciques).
Effets indésirables graves :– action immédiate avec un risque de toxicité
due à la destruction de la forme à libération
prolongée (LP) (antihypertenseurs, antalgiques morphiniques) ;
– libération anticipée de substances actives potentiellement
dangereuses (biphosphonates, potassium).
Dénaturation du goût de l’aliment : le pelliculage
des comprimés servant souvent à masquer l’amertume
de la substance active, broyer le médicament altère le goût
de l’aliment dans lequel la poudre est mélangée.
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Actualités pharmaceutiques n° 508 Septembre 2011
Formes galéniques nouvelles ou comment améliorer l’efficacité des nouveaux traitements ?
Kaletra®, qui contient une association de lopinavir et de ritonavir, est né de cette technologie qui permet une répartition uniforme des substances actives dans le comprimé et améliore sa dissolution dans le tractus digestif, donc sa biodisponibilité par voie orale, tout en diminuant le nombre de prises (soit 2 comprimés, 2 fois par jour), une prise qui est également indépen-dante de la composition des repas.
Adapter les formes galéniques aux objectifs thérapeutiquesIl ne faut pas oublier que plusieurs substances actives existent sous différentes formes galéniques ce qui permet d’adapter leur biodisponibilité aux objectifs thérapeutiques.L’exemple le plus connu est celui concernant les anal-gésiques de type morphinique. En effet, la prescription peut associer une forme classique d’action immédiate (par exemple, Actiskenan®) avec une forme à libéra-tion prolongée ou LP (par exemple, Skenan LP®), permet tant d’obtenir un traitement basal de la douleur (forme LP biquotidienne) et un traitement d’appoint en cas de besoin dans la journée.La forme LP est obtenue grâce à des microgranules d’éthylcellulose qui forment une matrice inerte contrô-lant la diffusion du sulfate de morphine de façon lente et prolongée. Dans le cas où les gélules ne peuvent être avalées, elles sont ouvertes, les microgranules pouvant être mélangées à une alimentation semi-solide (purée, confiture, yaourt) ou éventuellement introduites à l’aide d’une sonde gastrique.La posologie doit être adaptée en fonction des besoins du patient. Des doses basales sont données matin et soir (formes LP à 10, 30, 60, 100 ou 200 mg) avec des interdoses correspondant à 10 % de la dose journalière de morphine LP grâce à la forme à libé-ration immédiate (Actiskenan® 5, 10, 20 et 30 mg). Au-delà de quatre interdoses, la posologie de la forme LP doit être réévaluée.
Des comprimés multicouchesDans les formes LP pour la voie orale, il existe éga-lement des comprimés multicouches. Ainsi, Biprofénid LP 100 mg® comprimé sécable est un médicament anti-inflammatoire formé de deux couches superposées : blanche (à libération immédiate) et jaune (à libération retardée) conte-nant chacune 50 mg de kétoprofène. Un autre exemple est celui du Xatral LP® à base d’alfu zosine, indiqué dans le traitement de l’hyper-trophie bénigne de la prostate et dont il est recom-mandé une seule prise par jour immédiatement après le repas du soir. Il faut veiller à toujours préciser au
patient que ces comprimés doivent être avalés en entier avec un verre d’eau.Les comprimés multicouches peuvent aussi amélio-rer la stabilité des formes, notamment lorsqu’elles contiennent plusieurs substances actives. Cette tech-nique est utilisée dans les compléments alimentaires comme Bion 3® constitué d’une première couche contenant les vitamines, d’une deuxième contenant les minéraux et enfin d’une dernière contenant les probiotiques. �
Comprimés effervescents et conseil pharmaceutiqueMonsieur G. est un homme de 74 ans, traité pour une insuffisance cardiaque à la suite
d’une cardiomyopathie ischémique. Il vient vous voir à l’officine car il se sent grippé,
mouche et se dit fiévreux. Il vous demande du paracétamol à mettre dans l’eau.
Son traitement habituel est le suivant :
Les comprimés à mettre dans l’eau sont effervescents. Ils contiennent du sodium en
une décompensation cardiaque. De plus, les comprimés effervescents représentent
un danger pour les personnes insuffisantes cardiaques.
En effet, M. G., s’il prenait des comprimés effervescents de paracétamol, devrait prendre
par jour en dehors de toute alimentation. En mangeant, il dépasserait ainsi largement les
6 g de sodium préconisés par la Haute Autorité de santé. Les comprimés effervescents
sont donc un facteur de risque de décompensation
de l’insuffisance cardiaque, sans compter que
la fièvre augmente le travail cardiaque et le risque
de décompensation.
Vous devez délivrer des formes sèches à ce
patient (orodispersibles ou gélules ou comprimés
classiques).
SourceHaute Autorité de santé. Insuffisance cardiaque systolique symptomatique chronique. Guide affection longue durée. Mars 2007 (www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/guide_terr_ald_5_icsystolique.pdf).
Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.
Amélie Bochot
Maître de conférences,
Faculté de pharmacie, Châtenay-Malabry (92)
Odile Chambin
Professeur, Faculté de pharmacie, Dijon (21)
François Pillon
Pharmacien, Dijon (21)
Cas pratique
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