Amérique du Sud (métropolisation et constructions nationales)

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Synthèse d'articles tirés de mon blog @Geographedumonde

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L'Amrique du Sud (mtropolisation et constructions nationales)

24 dcembre 2006. La Plata, entre Uruguay et Argentine. Ainsi, un contentieux opposant lArgentine lUruguay prend une tournure quasi dramatique. Daprs Christine Legrand, la Cour Internationale de Justice de La Haye saisie de plusieurs plaintes a rendu la semaine dernire (18 et 19 dcembre 2006) un premier arbitrage en faveur de lUruguay : elle a rejet la demande argentine dune suspension de "la construction sur la rive uruguayenne du fleuve Uruguay de deux usines de cellulose finances par des capitaux europens. " En attendant, des barrages routiers bloquent la circulation sur les trois ponts frontaliers, perturbent le commerce international et les migrations touristiques vers lUruguay (destination estivale quaffectionnent de nombreux Argentins). Greenpeace revendique cette action de dfense de lenvironnement, mais ne trouve gure que des appuis du ct argentin ; selon lassociation, "l'usine de fabrication de pte papier, construite par la firme finlandaise Botnia, va contaminer le fleuve Uruguay, affectant une population de 300 000 habitants."On peut craindre un pourrissement de cette affaire, puisque la CIJ ou encore le roi dEspagne sollicit pour amener les plaignants ngocier, nont pour lheure rien chang la situation sur place. Tout laisse penser que les deux prsidents en place (Kirchner et Vazquez) jouent la carte de la surenchre nationaliste. Lhistoire des deux pays leur apporte des munitions, avec une Grande Guerre australe (1839-1851) qui a laiss des traces dans les mmoires. Leur popularit en ressort malheureusement grandie. Au plan conomique, les deux usines de pte papier concentrent 1,8 milliards de dollars dinvestissement, sans quivalent dans lhistoire uruguayenne : les industriels papetiers en Argentine sinquitent sans doute davantage de cette soudaine concurrence si redoutable Davantage que des menaces sur lenvironnement !Car la carte donne quelques indications... Admettons que les papeteries polluent le fleuve Uruguay, qui avec le Paran forme lestuaire de la Plata. Pourquoi limiterait-on seulement 300 000 le nombre de personnes concernes ? Au minimum 25 millions dhabitants vivent sur les bords de la Plata, dont plus de la moiti pour laire urbaine de Buenos Aires. Il y a l une sous-valuation manifeste !A linverse, le rio de la Plata constitue lunique dbouch naturel dun immense bassin versant, grand comme six fois la France (2,8 millions de km), cheval sur le Brsil, le Paraguay, l'Uruguay et l'Argentine. La rivire Paraguay prend par exemple sa source dans les collines du Mato Grosso, 2.000 kilomtres au nord de lUruguay. Quant au Paran, il draine les eaux de surface des plus grandes rgions agricoles du Brsil, o lon trouve les exploitations exportatrices de cacao, de caf, de canne sucre, de coton ou encore de tabac ; avec leur corollaire de produits phytosanitaires. Les eaux uses relches dans la nature par des centaines de milliers de Brsiliens terminent galement dans le Rio de la Plata Deux usines de pte papier changeraient donc quelque chose ? La journaliste du Monde termine par un curieux face--face. " Insatisfait du peu de poids accord aux petits pays, M. Vazquez a dj menac de se retirer, tandis que l'Argentine reproche au gouvernement uruguayen d'envisager la ngociation d'un trait de libre-change avec les Etats-Unis, jug incompatible avec son appartenance au Mercosur. " Tous deux classs gauche, les deux prsidents ne parviennent pas sentendre (voir aussi ceci). Les populations paieront les pots casss ; elles vont commencer sentir les effets de cette querelle mdiocre et strile En toute impartialit, le commentateur ne peut que constater que le prsident argentin part avec un handicap dans cette affaire. Cest la deuxime fois en peu de temps quil use du nationalisme, en remettant sur le devant de la scne les vieux griefs de lArgentine sur les Falkland britanniques. Que cherche-t-il faire oublier ?*6 mars 2008. L'Equateur, la Colombie, les Farc et Ingrid Btancourt. L'Amrique andine marcherait ces temps-ci au rythme du tambour et au pas cadenc. La mort d'un responsable des Farc (Forces Armes Rvolutionnaires de Colombie) en territoire quatorien aurait mis le feu aux poudres. Une partie de l'arme vnzulienne attendrait, fusil au pied, le long de la frontire avec la Colombie. La presse voque 10.000 hommes, mais reste discrte sur leur cantonnement. Car la frontire qui spare les deux pays commence aux abords du Rio Negro, 1.200 kilomtres de la mer des Carabes. Elle suit sur environ 1.500 kilomtres le fleuve Ornoque ou ses affluents, coupe la cordillre de Mrida qui prolonge vers le nord-est les Andes [carte]. On imagine les units vnzuliennes disperses au beau milieu de la selva, postes dans la chaleur humide des rgions quatoriales, attendant une mission improbable. Car de l'autre ct de la frontire, on ne relve aucun mouvement de troupes. L'ide d'une incursion semble mme saugrenue. L'Amazonie colombienne ne se distingue en rien des autres rgions constituant le bassin versant du plus puissant fleuve du monde : vastes tendues difficiles d'accs et sous-peuples. De l'autre ct de la frontire, l'arme colombienne ne bouge apparemment pas. Elle ne menace pas le Venezuela. L'opration visant Raul Reyes se droulait au-del d'une autre frontire, celle qui spare la Colombie de l'Equateur, 1.000 kilomtres plus l'ouest. Plus que la zone andine l'affaire qui nous occupe renvoie donc la ralit amazonienne. Les cordillres colombienne et vnzulienne prolongeant la grande cordillre des Andes constituent videmment des reliefs qui structurent les territoires des deux pays [carte]. Les valles intra-montagnardes concentrent les hommes et les activits, parce qu'elles dterminent les dplacements et les cultures, parce qu'avec l'altitude, on chappe aux chaleurs amazoniennes (+ 6 C par tranche de 1.000 mtres en moyenne). Les habitants de Bogota 2.640 mtres d'altitude gagnent de ce fait une quinzaine de degrs ; Medellin se situe 1.538 mtres et Caracas entre 760 et 910 mtres. Les deux pays dbordent donc trs nettement de l'aire andine, avec chacun des traits spcifiques : massif guyanais pour le Venezuela (un tiers environ du territoire), littoral Pacifique pour la Colombie. Tous deux possdent en commun une faade donnant sur les Carabes, et se partagent le bassin de l'Ornoque [1] dans lequel se trouvent les plus importantes rserves d'hydrocarbures d'Amrique du Sud. La production ptrolire vnzulienne s'lve un peu plus de 3 millions de barils / jour (c'est--dire 150 millions de tonnes par an / source). Les deux pays ont extrait 180 millions de tonnes de ptrole en 2005 de leur sous-sol, exportes en partie vers les Etats-Unis (source) [2]. A 105 dollars le baril ce 5 mars 2008, les tensions diplomatiques voques au dpart amplifient les risques de rcession aux Etats-Unis. Elle rendent peu probable l'hypothse d'une guerre dans la rgion. Le clientlisme d'Hugo Chavez reposant en outre sur la redistribution des bnfices du ptrole, une interruption des paiements renverrait le Venezuela ses contradictions conomiques. Voir conoclaste. La rfrence des mdias aux Andes ne tombe cependant pas l par hasard. Elle renvoie l'indianit, c'est--dire un clivage traversant la plupart des socits latino-amricaines. Hugo Chavez tout comme Rafael Correa (le prsident quatorien) se rclament des Indiens andins, pour inscrire leur combat du moins le prsentent-ils comme tel dans celui plus vaste des faibles contre les forts, des petits contre les puissants, des descendants de coloniss contre les descendants des colons europens, des mtis contre les blancs. Le premier a fait pourtant carrire dans l'arme et le second l'tranger. On ne voit gure quels avantages ils pourraient tirer de cette crise diplomatique avec la Colombie, bien que l'argument d'un nationalisme trs opportuniste ne soit sans doute pas exclure. Il convient mon sens de revenir l'impossibilit matrielle de contrler un territoire aussi vaste que l'Europe occidentale, recouvert d'une fort quatoriale, et dpourvu d'infrastructures. Les frontires recoupent les cours d'eau qui constituent les seuls axes de communication: l'avion constitue la seule alternative la pirogue. A l'est de la Colombie amazonienne, les cours d'eau affluent vers la rive gauche de l'Ornoque (donc vers le Venezuela, les Antilles et l'Amrique du Nord). Dans le tiers mridional du pays, ils s'coulent vers la rive gauche de l'Amazone, vers l'Atlantique et l'Europe. A Bogota, la lutte contre les rvolutionnaires ou contre les narcotrafiquants se heurte cette ralit naturelle. Admettons donc que les Farc ne bnficient d'aucune aide financire extrieure la Colombie, subsistant grce au rapt et l'argent de la cocane, que les autorits vnzueliennes et quatoriennes se soucient par humanitarisme des otages prisonniers dans la jungle (parmi lesquels se trouve Ingrid Btancourt). Esprons ensuite un apaisement des tensions entre capitales et le renvoi des ambassadeurs ici ou l rappels par leurs mtropoles respectives. Les groupes arms prouvent de toutes faons l'impossibilit pour les forces rgulires tous pays confondus d'annihiler les fauteurs de trouble. L'Amazonie demeure hors de contrle des capitales montagnardes et / ou lointaines. Que le combat rvolutionnaire des Farc paraisse aujourd'hui dpass et qu'il subisse des revers importe peu. Ses deux principales sources de financement dpendent de gouvernements extrieurs la rgion. Comme pour la cocane, dont le prix augmente avec la rpression du trafic et de la consommation, la valeur d'un otage fluctue en fonction des surenchres. L'otage Ingrid Btancourt a probablement vu sa cte augmenter depuis le mois de mai 2007 et l'lection prsidentielle franaise. Tout porte croire que l'intrt manifest son encontre par Nicolas Sarkozy a renforc cette tendance. La mort de Raul Reyes tonne le Quai d'Orsay. " Evidemment, ce n'est pas une bonne nouvelle que le numro deux, Raul Reyes, l'homme avec qui nous parlions, l'homme avec qui nous avions des contacts, ait t tu " commente le ministre des Affaires trangres un micro de France Inter. Bernard Kouchner avoue cette occasion que l'administration franaise ngociait avec une organisation ennemie de la Colombie, lui offrant une lgitimit depuis toujours refuse par le gouvernement colombien, qui refuse de reconnatre sa difficult grer ses priphries quatoriennes. Au risque de se mettre en porte--faux avec Washington, qui qualifie les Farc de terroristes, le prsident de la Rpublique n'a pas rpugn sortir des canaux diplomatiques habituels. Pourtant, rien n'annonce dbut mars 2008 la libration d'Ingrid Btancourt. En ordonnant l'limination physique de Raul Reyes, les autorits colombiennes ont rvl certains dessous de l'affaire. Elles mettent dans l'embarras les chefs d'Etat voisins : qu'ils traitent le prsident Uribe de criminel de guerre ou de menteur n'y change rien (voir ). L'opration contre les Farc rduit surtout peu de choses les efforts de Nicolas Sarkozy. Comment se faire tailler une veste andin...*8 avril 2010. Brsil. Rio, ses favelas et son stade de football. A Rio, les favelas sont anciennes. Elles remontent au moins l'abolition de l'esclavage, qui suit la proclamation de la Rpublique, la fin du XIXme sicle. La modernisation de l'agriculture (motorisation, utilisation d'engrais) et le dveloppement d'une industrie nationale amorcent dans les campagnes un exode rural contemporain de celui que connaissent nombre de pays europens. Rio de Janeiro s'accrot, et les dmunis s'y pressent. L'hyginisme aidant, les autorits combattent le dveloppement des cortios, ces logements de fortune remplacs par des maisons en dur (Rforme urbaine de 1902 - 1906). Mais les pauvres ne peuvent s'y installer, parce que les loyers dpassent leurs maigres moyens. Ils doivent dmnager un peu plus loin. Depuis cette poque, l'habitat spontan suscite des rponses insatisfaisantes, qui repoussent les moins riches dans des priphries dans lesquelles ils ne trouvent pas d'emploi, et se dsocialisent. La mixit sociale recule, car la modernisation des espaces centraux s'accompagne d'une augmentation des prix elle-mme socialement dissuasive. Usines et maisons bourgeoises dpendent toutefois d'une main-duvre bon march. Politiquement, certains lus s'appuient sur le vote de ces quartiers populaires : les candidats communistes y obtiennent d'excellents rsultats aux lections de 1947.A partir des annes 1940, les bidonvilles (favelas) prolifrent sur les terrains oublis, sans propritaires connus, surtout ngligs pour leurs nuisances (dpotoirs) ou pour leur danger potentiel : rives de cours d'eaux, monticules instables (mornes). Comme on va le voir, les risques naturels s'avrent plus importants qu'ailleurs. Sur place les constructions ne rpondent aucune norme, et les habitants ne disposent d'aucun titre de proprit. Au dbut de la dcennie suivante, Rio compte 119 favelas, accueillant un habitant sur sept. En dpit de la concurrence industrielle de So Paulo, et du choix d'une nouvelle capitale fdrale (Braslia), Rio de Janeiro ne cesse de grossir. Aprs 1964, les militaires au pouvoir tentent d'utiliser la manire forte pour supprimer les favelas. Ils ne parviennent qu' reporter une nouvelle fois le problme. Un urbanisme plus rparateur que destructeur finit certes par s'imposer, mais dans les vingt dernires annes. Tandis que l'exode rural se tarit, de nouvelles favelas apparaissent, sur de plus petites parcelles ou sur les toits d'immeubles : c'est la consquence du marasme conomique et de l'hyper-inflation des annes 1980." A la fin des annes 80, on estime un demi-million le nombre de personnes vivant dans les priphries et un million celui des personnes rsidant dans les 545 favelas de la ville. Mais dans les annes 90, les nouvelles formes dhabitat populaire stigmatisent la difficult accrue dhabiter la mtropole. Il est vrai que la taille relle des populations habitant les favelas est largement controverse, mais en 2000, si certains auteurs lestiment plus dun million, dautres lvaluent deux millions sur les 5 851 914 habitants que compte alors la commune. " [Paola Berenstein Jacques & Lilian Fessler Vaz / Notes historiques sur les favelas de Rio]Dans le Complexo do Alemao, la violence rgne en matre, l'argent de la drogue faisant vivre une partie de la population. En juin 2007, la police fdrale a men une vaste opration de ratissage pour rtablir l'ordre : opration combine engageant plus de mille agents sur le terrain. Des changes de coups de feu ont provoqu des dizaines de blesss et de tus. L'opration a suscit des commentaires sur le bien-fond de l'intervention et son caractre sanglant [source]. Une mission de Mdecins sans Frontires a point l'ampleur de la dtresse psychologique ressentie par une partie des habitants soumis chaque jour la peur de mourir et au silence impos par les criminels [source]. Rio s'enrichit. L'argent de la drogue, de la prostitution et des multiples trafics clandestins fait vivre les gangs, mais il vient des quartiers aiss. Les oprations de nettoyage s'acclrent. Au mois de mars 2010, Santa Marta, la police fdrale brsilienne a expriment une nouvelle forme d'intervention, base sur la reconqute les armes la main de la favela, et complte par la prsence physique d'un bataillon entier, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Les personnels ont t soigneusement slectionns, et bnficient d'une prime spciale [Figaro]. Il est vrai qu'un vnement sportif de premier plan s'approche. Il s'agit de la prochaine coupe du monde de football, dans quatre ans. Passe celle de 2010 en Afrique du Sud, les adeptes du ballon rond ne parleront plus que de Rio. Les autorits brsiliennes tiennent prsenter la meilleure image de leur ville et de leur pays.Et puis en ce dbut d'avril, Rio occupe brusquement la une des journaux. Le stade de Maracana inond. On apprciera l'cart entre le titre et la tragdie humaine. Mais le football est un dieu exigeant, dont le temple a t souill. L'eau a inond la pelouse, quel drame ! " La pelouse du mythique stade carioca de Maracana tait sous l'eau hier et ses vestiaires compltement inonds la suite des pluies diluviennes qui se sont abattues sur la mtropole brsilienne lundi et qui ont caus la mort de 95 personnes dans l'Etat de Rio de Janeiro. Le Maracana, construit pour le Mondial de foot de 1950, et considr comme le plus grand stade du monde, s'est transform en une immense piscine pleine d'une eau marron et les dgts rendent improbable la tenue du match du Groupe 8 de la Coupe Libertadores prvu ce soir entre le club local de Flamengo et Universidad de Chile. " [Le Parisien]. Plus de cent personnes ont pri, pour beaucoup emportes par des torrents de boue. En quelques heures il a davantage plu sur Rio qu'au cours de tout le mois d'avril. En fin d'aprs-midi, les averses torrentielles ont empch les habitants de rentrer chez eux, en bouchant les tunnels et en fermant le pont Rio - Niteroi. Le fleuve Maracana a dbord sur les berges en partie recouvertes par des favelas [Le Monde / avec photos]. Les victimes m'importent davantage que les pelouses du stade, faut-il le prciser ? Je donne la parole pour finir au journaliste du Monde Jean-Pierre Langellier : " Le prsident Luiz Inacio Lula da Silva, arriv Rio mardi pour des engagements publics qu'il a d annuler, s'est content d'implorer la bienveillance divine pour qu'il cesse de pleuvoir. Il a dplor que les autorits locales aient, par le pass, trop laiss construire dans les zones risque et s'est engag mettre fin ce laxisme. Mais cela pourrait ne rester qu'un voeu pieux, tant l'urbanisation sauvage ne cesse de progresser. "Ainsi, aucune leon ne semble avoir t retenue. Les pauvres indisposent, mme (surtout ?) en mourant trop prs de la belle ville. Le laxisme ici voqu renvoie une poque clmente. L'approche du spectacle mdiatique de 2014 sonnera-t-elle le retour d'une politique urbaine brutale ? La destruction des favelas ne rsout aucun problme de fond, moins de donner plus d'importance au football - spectacle qu' une catastrophe l'heure de pointe.*30 juin 2010. Brsil et le risque climatique. Jean-Pierre Langellier n'en est pas son coup d'essai. Lors des inondations de Rio au printemps, il a couvert pour Le Monde cette catastrophe, presque au jour le jour. L'impression qui se dgageait l'poque tait que le gouvernement brsilien dcouvrait les caractristiques climatiques du continent. Pire, il laissait tomber les habitants d'une favela. Comme chacun ne le sait pas forcment, des habitations prcaires non (ou mal) desservies par les services publics et installes sur des terrains lointains, pollus et/ou dangereux constituent un bidonville. Chacun des adjectifs prcdents convient pour le qualifier. Ils peuvent converger, comme dans le cas de cette inondation spectaculaire autour du stade de Maracana. Qu'un quartier dlaiss le soit d'autant plus que les eaux de ruissellement envahissent tout n'tonne pas grand monde. Sauf Jean-Pierre Langellier, apparemment. Que font les responsables politiques ? S'interroge-t-il, reprenant les attendus du procs mont par la presse locale.Face au parti pris d'un correspondant install sur place, un journal garde la possibilit de rester neutre, en particulier au moment de la rdaction du titre d'un article. Ce jeudi 1er juillet, le lecteur du Monde mditera pourtant sur cette accroche qui je l'espre en tout cas ne doit rien au journaliste lui-mme. Elle s'explique en revanche par une quipe qui dans le confort du sige parisien cherche attirer l'attention. 'Au Brsil, la prvention des catastrophes naturelles reste largement dfaillante.' Entre le 20 et le 23 juin, des pluies diluviennes ont dclench le chaos dans le Nordeste [L'Express (photo)]. Une centaine de personnes sont mortes, pour moiti disparues. On dnombrerait 300.000 sinistrs, et des dgts matriels considrables : 30.000 habitations, 140 ponts, sans compter les routes coupes. On dplore donc une catastrophe habituelle dans cette partie du Brsil depuis toujours frappe par le malheur, dans ce bout du monde dcrit il y a prs de trente ans par Mario Vargas Llosa.Dans La guerre de la fin du monde (1982), il raconte l'absence de rforme agraire, la paysannerie pauvre et sans terres, le poids des oligarques de Recife et des grands propritaires. Il dcrit la vgtation xrophyle de la caatinga constitue d'arbres maigres et de buissons pineux, le soleil crasant une terre ne permettant pas ses enfants de vivre dcemment. Les hommes brlent, souffrent et meurent en silence. Un prophte promet cependant une rdemption, l'accs au paradis sur terre, tel un aptre exil de Terre sainte. Plus il sduit les foules de misreux, plus on cherche l'isoler. Il finit entour par une arme de soldats dsincarns et fanatiques. On ne sait pour finir qui de la nature ou des hommes atteint le plus haut niveau de violence.C'est donc dans ce Nordeste qu'ont eu lieu les inondations de la semaine dernire. En France, les temptes Klaus [Klaus a tempt] et Xinthia [Communes-sous-mer] ont tout ravag. A Gradignan, la Nartuby a dbord [Guigne Draguignan]. Mais un organe de presse a-t-il demand des comptes ? Le Monde a certes maladroitement tent de replacer la catastrophe varoise dans son contexte. Il n'a pas men bien loin son enqute auprs des administrs ayant choisi de construire en zone inondable.Evidemment (...), en Provence, les entorses aux droits de l'urbanisme restent rares (...). Il est aussi facile de trouver un exemple que pour un orpailleur de tomber sur une ppite (...). Autant que l'on sache, nul responsable politique franais, local ou national n'a t entendu dans le cadre des catastrophes prcdemment cites. Je serai personnellement le premier les dfendre si le cas se prsentait, parce que l'assimilation entre responsable et coupable m'horripile. J'attends seulement une prsentation des faits, qui renvoient les uns et les autres leurs choix, une inondation dans une zone inondable. Mais la presse demande peu, et fait pleurer dans les chaumires sur les victimes. Revenons au Nordeste brsilien et Jean-Pierre Langellier. " Le bilan matriel et humain aurait pu tre beaucoup moins lourd si les populations avaient t mieux prpares affronter pareilles intempries, d'une ampleur certes exceptionnelle, mais qui surviennent assez souvent dans cette rgion quatoriale. " Cette dernire prcision n'est autre qu'une grosse bourde, je vais y revenir. Auparavant, l'affirmation prcdente me fait sursauter. Ainsi triomphe le deux poids, deux mesures. En France, il faut accuser la fatalit, et au Brsil des responsables bien lgers. " De manire plus gnrale, des spcialistes plaident pour une rorganisation de la dfense civile, trop ractive et pas assez prventive. [...] L'imprvoyance accompagne et aggrave d'autres erreurs, administratives ou environnementales : trop d'habitations ont t construites au bord des cours d'eau ; les riverains arrachent la vgtation qui pourrait les protger des inondations ; la majorit des municipalits n'appliquent aucun plan d'occupation des sols. Mais, comme le souligne un ditorialiste de l'hebdomadaire Epoca, la prvention ne fait pas partie du discours politique, entirement centr sur l'action immdiate, car elle 'ne rapporte pas de voix'. " Tout devient clair une fois franchi l'Atlantique. Je regrette l'absence de cette mme impertinence dans les affaires franaises. Jean-Pierre Langellier en appelle bien sr au rchauffement climatique, aux stades de football qui cotent trop cher, mais aussi la politique locale (tous corrompus) et nationale : " Non seulement l'Etat fdral n'a, cette anne, dbloqu qu'une faible partie (14 %) du budget allou la prvention des catastrophes. Mais la manire dont il l'a distribu semble hautement contestable. Selon l'ONG Contas Abertas, l'Etat de Bahia, moins expos que ses deux voisins, a pourtant reu 37 % de l'argent fdral, contre seulement 9 % pour le Pernambouc et 0,3 % pour l'Alagoas. Ce budget tait gr par Geddel Vieira Lima, jusqu' rcemment ministre de l'intgration nationale, actuel candidat au poste de gouverneur Bahia, et apparemment expert en dmagogie prlectorale. Voil que l'on glisse dans la simplification et la qute d'un bouc missaire.C'est sur la gographie physique que je voudrais conclure. Car les Etats du Pernambouc et de l'Alagoas ne sont pas caractriss par un climat quatorial par dfinition stable, mais au contraire par un climat tropical saison alterne. L'hiver commence tout juste dans l'hmisphre sud. Et les alizs chargs d'humidit rentrent l'intrieur des terres. Les hauteurs dominant le bassin-versant du fleuve So Francisco, en particulier la Sierra do Araripe, de direction est-ouest, interceptent les masses d'air, entranant de fortes prcipitations sur ces reliefs et des coulements de surface. Si le mcanisme revient chaque anne, il peut prendre d'une fois sur l'autre des modalits diffrentes. Cette imprvisibilit tient des facteurs de pression atmosphrique ou de temprature ocanique. C'est prcisment ce dernier point qui semble avoir jou... Les prcdents records pluviomtriques dataient d'un demi-sicle. Ils sont tombs. Mais encore ? Ces intempries ont provoqu une catastrophe finalement assez banale. Elle met douloureusement en valeur la dforestation, les pratiques agricoles, la rpartition du foncier, ou encore le dveloppement inconsidr des infrastructures... Jean-Pierre Langellier parle de radars et de satellites inexistants, de surveillance insuffisante. J'allais oublier. Dans l'Etat d'Alagoas, mille huit cents kilomtres de Rio plus qu'entre Paris et Alger le journaliste sermonne. "Mais nombre de villes, notamment les plus vulnrables, n'y possdent pas de dfense civile, le rseau d'alerte et d'assistance aux populations en pril. Des dizaines de milliers d'habitants n'ont donc pu tre secourus temps. De manire plus gnrale, des spcialistes plaident pour une rorganisation de la dfense civile, trop ractive et pas assez prventive."Ce n'est pas en France qu'on verrait une chose pareille...*5 septembre 2013. A l'occasion d'un cours sur l'Amrique latine. Aprs avoir sond les Etats-Unis l'an pass, me voil prt entamer un tour virtuel de l'espace latino-amricain. Celui-ci s'tend au sud du Rio Grande et de la Californie amricaine, en Amrique du nord (de la frontire septentrionale du Mexique jusqu' la pninsule du Yucatan), en Amrique centrale (du Guatemala au Panama), aux Carabes et en Amrique du sud. Il convient videmment de relativiser cette frontire... La coupure entre les deux Amriques (latine et anglo-saxonne) s'avre poreuse, et pas seulement cause des courants migratoires orients vers le Nord.Les Etats-Unis ont incorpor l'phmre rpublique du Texas en 1846, combattu le Mexique la mme date (ouvrant deux ans plus tard la voie l'agrandissement du pays au sud-ouest), ont purement et simplement annex la Californie en 1850 ou Porto Rico en 1898. Ils ont enchan les interventions dans les pays voisins ou proches, jusqu'au dbut du XXme sicle. L'arme amricaine est parfois directement intervenue, comme au Nicaragua (1853, 1854, 1894), ou en Hati et en Rpublique dominicaine (1915-16) [source] Plus souvent, des aventuriers mi-idalistes mi-mercenaires se sont mtamorphoss en propagandistes de la cause de la Libert (et du dollar) ! Citons parmi bien d'autres, au Texas Mirabeau Bonaparte Lamar, Cuba Narciso Lpez ou encore William Walker au Nicaragua (il a svi au dpart en Basse-Californie).L'Amrique latine est unifie par un catholicisme qui a coexist depuis le dbut de la colonisation avec des cultes plus anciens, et qui est aujourd'hui concurrenc par de nouvelles religiosits plus ou moins lies au protestantisme vanglique. Outre les langues montagnardes prcolombiennes (comme le quechua) et l'espagnol largement dominant, l'espace latino-amricain abrite une grande varit de langues : le portugais (au Brsil), le franais (Antilles, Guyane), mais aussi l'italien, le nerlandais et l'allemand. Il va sans dire que la langue anglaise est parle en Amrique centrale (Belize) et dans la zone Carabes, y compris en Guyana.Le continent compartiment entre Cordillre montagneuse et vastes bassins-versants ouverts sur l'Atlantique, partag entre sphre (sub)tropicale et priphrie tempre, compte quatre fois plus d'habitants qu'il y a un sicle : environ 620 millions en 2013. Mais cette population achve sa transition dmographique, et voit son ge mdian progresser : il atteint d'ores et dj 30 ans au Brsil. Les Latino-amricains sont dsormais majoritairement citadins (87 % au Brsil, 78 % au Mexique). Le continent semble gonfler, mais seules quelques portions minoritaires de territoires en subissent un impact dmultipli, avec une explosion des densits sur certains littoraux (Rio-Sao Paulo) ou dans les districts mtropolitains (Mexico, Buenos Aires, etc.). Dans cette large aire gographique, petits (Chili, Costa Rica, Panama), moyens (Colombie) et grands pays mergent conomiquement. Et rattraperont terme le niveau de dveloppement et de prosprit du Nord.Les deux Amriques commercent, les changes s'intensifient malgr les politiques de contrle migratoire imposes par Washington. Les touristes amricains affectionnent la destination et partent facilement vers le sud (moins cher que l'Europe, plus exotique et sans dcalage horaire) d'un ct, tandis que les fils et filles de familles (trs) aises de Santiago, de Lima, de Bogota ou d'ailleurs en Amrique Latine poursuivent leurs tudes suprieures dans les grandes universits nord-amricaines. C'tait vrai l'poque des Chicago boys, cela demeure depuis en dpit de l'attrait pour l'Europe : les Etats-Unis accueillent en moyenne 50.000 tudiants par an en provenance d'Amrique Latine (source).Les Etats-Unis ne cessent d'importer des matires premires mais aussi des produits manufacturs. On leur reproche d'exporter un modle - comme en tmoignerait la progression de l'obsit - mais nul ne force les hommes d'affaires placer leurs gains aux Etats-Unis : le Mexicain Carlos Slim a en partie bti sa fortune sur les tlcommunications, celles-l mme qui relient le Mexique au reste de l'Amrique du nord. Plus l'Amrique Latine souffre de la violence, plus nombreux sont les candidats l'installation aux Etats-Unis. L'intgration continentale passe aussi il est vrai par l'conomie parallle.Vues partir de la carte [TvQc], les frontires tatiques semblent effaces par les flux de drogue Sud-Nord. Le Mexique s'est transform en plaque tournante depuis que les Etats-Unis ont tent de fermer leurs frontires. Les drogues naturelles (cannabis, hrone, cocane) ou synthtiques proviennent d'Amrique latine, surtout du Mexique. Les campagnes d'radication n'ont eu pour effet que d'amener une diffusion gographique des cultures : ex. du cannabis. Pour la cocane, la Colombie andine semble dsormais concurrence par l'Amrique centrale... Les drogues importes proviennent d'Asie, qu'il s'agisse de mtamphtamine ou d'hrone (via l'Europe). Dans le premier cas, la porte d'entre est Acapulco, station balnaire et grand port mexicain donnant sur le Pacifique. Le nombre des morts et des volumes transports augmente. On notera les statistiques les plus macabres : en 2012, une trentaine de policiers meurent chaque mois (150 en mars), tout comme une quarantaine de femmes en moyenne; une centaine de personnes subissent des actes de barbarie : torture ou dcapitation. L'existence d'une guerre larve n'chappe qu'aux aveugles et aux idiots. Celle-ci se joue des frontires tatiques.1/ Que reste t-il du monde rural latino-amricain ? Le doyen de l'humanit illustre un certain vieillissement des populations isoles des villes. Pauvret et analphabtisme restent la rgle. La flambe des prix du quinoa influe la fois ngativement et positivement sur les producteurs de l'Altiplano bolivien et pruvien. Quel est l'avenir pour les Amrindiens ? Au Mexique, l'envole des prix du mas en 2008 a appauvri les plus modestes, mais soulve les questions des structures agraires et des dbouchs (agro-carburants). Au Brsil, les paysans sans terre dfrichent la fort. La spoliation des terres par les grands propritaires n'explique pas tout. C'est le fruit du dveloppement brsilien... Un produit comme le caf permet de comprendre la diversit des situations agricoles : des petites coopratives andines aux grandes exploitations brsiliennes. L'agroalimentaire (au Brsil) ou les OGM (soja argentin) posent clairement la question d'un rapprochement entre Sud et Nord.2/ La maldiction des matires premires ? Celle-ci commence probablement ds l'poque coloniale. L'autorit privilgie (exemple des mines du Potosi) la rentabilit et le recours une main d'uvre extrieure, servile. Le systme colonial devient progressivement nocif la fois pour la mtropole - afflux de mtaux prcieux - et pour les pays assujettis. La question de la dgradation de l'environnement se pose galement ds avant l'indpendance.La dpendance vis--vis des socits prives (souvent capitalisation trangre) devient vite un enjeu politique : poids des taxes prleves sur les bnfices de l'extraction, importance de l'activit pour l'emploi. Exemple du cuivre de Chuquicamata au Chili L'importance du secteur ptrolier. Exemple du ptrole de la socit vnzuelienne PDVSA la base de l'Etat-providence (et militaire...) mis en place par Hugo Chavez. En Equateur, ex-pays membre de l'OPEP, le gouvernement a souhait reprendre la main sur l'extraction : pour quel rsultat ? La pollution et la menace sur les activits agricoles : l'exemple du charbon en Colombie. La consommation des pays du Nord (Etats-Unis, Allemagne) rentabilise l'exploitation en vue de l'exportation. Le dveloppement passe la transformation des matires premires : exemple au Brsil, ex-pays minier. Mais la matrise technique n'est pas tout. Le ptrole off-shore peut-tre une chance, mais aussi un risque. La maldiction de l'or (orpaillage en Guyane) et des mtaux prcieux. L'or de Yanacocha au Prou.Les mineurs, force politique dstabilisante ? Exemple de la Bolivie. Les compagnies d'Etat, Etat dans l'Etat : la Le tourisme, ou exploitation primaire du sable et du soleil. (Contre-?)exemple de la rpublique dominicaine... 3/ Une urbanisation acclre, et parfois chaotique. La ville coloniale a depuis longtemps t intgre des aires urbaines nes de l'utilisation de l'automobile et de la sgrgation spatiale. L'importance du l'exode rural (en vitesse et en effectifs) a longtemps prvalu comme explication principale pour illustrer les rats d'un dveloppement non matris : habitat prcaire, dsocialisation des enfants, violence endmique, conomie souterraine, etc. Avec la population citadine s'accroissent les classes moyennes sur une voie entame il y a plus d'un demi-sicle en Europe...Le dclassement / dclin des villes anciennes, coloniales, ou lies des activits abandonnes(portuaires, minires, etc.) a commenc ds l'poque coloniale : Machu Pichu. Salvador de Bahia s'est endormie avec l'abandon de la traite ngrire, tout comme Len prs de Managua, et d'autres encore. Les projets de restauration abondent, comme le vieux quartier de La Havane. La vitalit de nouvelles mtropoles tient leurs fonctions administratives (Lima en manque d'eau), l'investissement dans des activits industrielles porteuses (le port de Valparaiso deuxime agglo. du Chili) ou au dveloppement des infrastructures touristiques : la station balnaire d'Acapulco (sous les eaux). A Brasilia, on peroit les limites d'un urbanisme modernisateur et volontariste... Les risques naturels psent sur l'urbanisation, en particulier dans la zone andine. A Quito, deux millions d'Equatoriens vivent proximit (plus ou moins proche) de cinq volcans actifs. Les besoins en matire premire accompagnent l'extension urbaine. Le dveloppement non matris prend diffrentes formes. Il est d'abord une forme urbaine : favela de Rio caractrise par sa prcarit juridique, ou bidonville d'el Pino Lima. La drogue fait vivre Tepito. Les armes ponctuent la vie de Caracas. Face cette ville drgle et dangereuse, les politiques sont inoprantes ou dcales : au Brsil, usage des forces spciales, ou prparation de la Coupe du Monde... Les citadins aiss vivent l'amricaine : dans des quartiers homognes, comme dans la zona Esmeralda, au nord-ouest de Mexico. Leur mode de consommation sont les mmes, pour le meilleur ou pour le pire: moins que ce ne soit l'inverse ! Dans le secteur de l'enseignement universitaire, le continent souffre encore d'un certain retard. 4/ La fragilit de l'Etat. La question aujourd'hui du modle politique ne se pose plus dans les mmes termes qu'il y a un ou deux sicles en Amrique latine : fdralisme contre centralisme. Au plan religieux, on note un relatif apaisement des relations entre l'glise catholique et les Etats de la zone (exemple au Salvador). En outre, mme dans les pays les plus rtifs l'accueil des capitaux trangers, la ncessit de dvelopper l'conomie s'impose vite... La place de l'arme n'apparat pas non plus comme prioritaire, quelques exceptions prs : comme au Guatemala, rcemment. De la mme faon, la tentation de l'interventionnisme demeure, mais les partisans du modle sovitique ou maoste sont ultra-minoritaires : Cuba, Fidel Castro n'y croit probablement plus !La fragilit des budgets s'explique d'abord par la non-dclaration des revenus, le travail au noir et enfin l'vasion fiscale ; il y a une ralit commune l'ensemble des pays en voie de dveloppement. L'attrait des Etats-Unis joue pour bon nombre de pays de la zone. En Argentine, en revanche, on peut parler de tradition nationale !L'ampleur des dfis poss tient souvent aux dimensions d'Etats-continents : protection des co-systmes, surveillance des frontires, lutte contre les traficants, violence urbaine. Pour le Costa Rica aussi, la tche tait lourde. A l'inverse, les filires transnationales continuent de profiter du manque de moyens des Etats centramricains. La corruption des fonctionnaires empoisonne la vie quotidienne de nombreux Latino-amricains; c'est d'abord le poids du narco-trafic qui est en cause. Il s'agit souvent du racket de la population par des policiers mal pays. Dans le pire des cas, les juges et les gardiens de prison rentrent dans la chane : Cinq heures en enfer (vnzulien) Le secteur de l'ducation prsente un visage contrast, avec un succs global mais fragile dans la lutte contre l'illettrisme l'chelle du continent : du Surinam la Guyane franaise. Il semble que du point de vue des filires universitaires, la tentation de l'Amrique du Nord soit la plus forte pour ceux des parents qui en ont les moyens financiers. L'universit de So-Paulo reprsente une exception ! Et les Jsuites n'ont pas jet l'ponge... Le secteur de la sant donne lieu lui aussi des analyses globales et locales non concordantes ! Pour le sida, il y avait alerte au dbut des annes 2000. En Amrique latine, l'esprance de vie progresse tandis que la mortalit infantile rgresse : mme Hati ! On replace ainsi la colre des Hatiens dans l'affaire du cholra apport par les soldats npalais, aprs la catastrophe de Port-au-Prince... Les ressources imprvues de l'Amrique latine sont multiples, commencer par l'argent des expatris en Europe et aux Etats-Unis : exemple des Pruviens. 5/ La sphre andine (Bolivie, Prou, Equateur et Colombie) La dnomination gographique pose un problme : elle laisse de ct le cne Sud du continent. Les raisons en sont anciennes, qui ne tiennent pas qu' la gographie physique. Rappel : La Colombie compte 47 millions d'habitants pour 1.142.000 km. L'Equateur compte 15,5 millions d'habitants pour 284.000 km. Le Prou compte 30 millions d'habitants pour 1.285.000 km. La Bolivie compte 10,5 millions d'habitants pour 1.099.000 km.L'intgration politique est timide : points forts et points faibles des quatre pays, du plus pauvre au plus riche, Bolivie, Equateur, Prou et Colombie. La subduction andine (rappel) autorise le tourisme volcanique en Equateur. La coca s'tend sur de nouvelles zones de production. Le prix Nobel de littrature pruvien ne dsarme pas... La musique andine est devenue universelle. Visitez le muse de l'or Bogota !6/ Les confettis carabes. Par sa morphologie, la zone se spare entre tables calcaires perfores par l'rosion karstique (Grandes Antilles) et arc volcanique. Les risques naturels ne se limitent pas aux sismes & ruptions volcaniques (exemple sur l'le de Montserrat vacue en 1995) : il y a aussi les cyclones. Dans les paysages, on distingue les faades au vent des faades sous le vent. La disposition physique (pdologie / hydromtrie) dtermine la rpartition des terroirs agricoles. Leur exploitation a continu aprs l'abolition de la traite ngrire. Reste une culture ? Les populations caribennes doivent dates rgulires expulser leurs surplus dmographiques : y compris dans les les les plus vastes comme Cuba. Elles ont depuis longtemps donn naissance des diasporas plus ou moins lointaines : Hatiens nord-amricains ou Cubains de Floride. Les ressources naturelles ne sont pas la hauteur des ressources gnralement disponibles en Amrique latine : l'exception de la bauxite jamacaine ou du ptrole de Trinidad. Le tourisme peut s'avrer porteur s'il s'intgre dans un projet global avec gestion raisonne des ressources : exemple dans l'archipel des Bahamas. Sur des niches bien dlimites, certaines les ont russi dvelopper des potentialits : de l'athlte de haut niveau jusqu'aux paradis fiscaux. A trs court terme - n'est-ce-pas dj le cas (exemple Porto-Rico), la zone Carabe appartiendra une zone de march nord-amricaine. Les les franaises de Martinique, Guadeloupe et Saint-Martin... 7/ Les pays du Cne Sud. Cette partie de l'Amrique latine se distingue surtout par ses traits physiques (au-del du tropique du Capricorne) et dmographiques. Uruguay y compris ! Les Andes revtent les traits caractristiques de la chane montagneuse (dj tudis plus au nord), du point de vue morphologique, dynamique et paysager. Dans la zone, la rigueur du climat entrane une descente des glaciers au niveau de la mer, comme ici au Perito Moreno. Il en rsulte une forte rosion des reliefs et des dpts sur les pimonts (lien)...Dans des espaces peu anthropiss, essentiellement mis en valeur par les leveurs transhumants, la nature peut devenir un atout touristique, comme en Patagonie : exemple du parc national argentin de la . Des initiatives prives ont facilit la . Le passage du Cap-Horn correspond aujourd'hui une niche. Gographie lienne au Chili. Sur la cte Pacifique, l'activit traditionnelle perd sa main d'uvre attire par la ville (lien) et se trouve concurrence par de nouvelles activits : tourisme ou aquaculture. Le saumon d'levage menace directement le milieu naturel. L'ampleur de la ressource (lien) laisse esprer des solutions durables. A l'le de Pques, les autochtones vivotent ! L'agriculture la conqute du monde grce l'alliance de la gographie, des savoir-faire et du sort. Dans le cas de l'Argentine, le succs du soja implique une dpendance vis--vis des cours, sans parler de l'ala climatique : scheresse en 2011 et inondation en 2012. Au Chili, le secteur viticole se dveloppe rapidement, tout comme la fort d'eucalyptus. Le Chili de Pinochet, libralisme en laboratoire ? Du mythe la ralit... Le pays reste peu industrialis, mais tertiaris. Toujours soumis au risque naturel : la grande catastrophe de 1960 a ras Valdivia. Les vicissitudes de la politique argentine datent d'hier, avec une conomie caractrise par des cycles rcurrents. Dans les annes 1990, les solutions du prsident Menem (et du FMI) ont montr leurs limites. L'Argentine se retrouve en 2013 dans une mauvaise passe... A nouveau ! La mtropolisation par Buenos Aires. Histoire et actualit (documentation)... 8/ Le Mexique, entre hier et aujourd'hui. Malgr un potentiel remarquable, le Mexique reste souvent la trane des pays de la zone latino-amricaine : exemple dans les fruits tropicaux. Depuis la libralisation du systme de l'ejido, les carts de dveloppements se sont creuss : exemple dans le sud de l'Etat du Veracruz. Des groupes agroalimentaires en ont profit pour merger, mme s'il est plus facile d'en rendre responsables les politiques no-librales.Les risques naturels, l'aune du sisme de Mexico en 1985 inquitent probablement moins les habitants que le niveau de violence, lie aux trafics divers et la puissance (militaire ?) des cartels : retour sur les trs redouts . Dans un cas comme dans l'autre, l'Etat omniprsent dmontre son incapacit venir en aide la population. L'conomie transfrontalire prexistait la signature d'un accord de libre-change avec les Etats-Unis et le Canada (Alena). Les maquiladoras demeurent, malgr l'intgration continentale en cours; et font rver les dcideurs marocains ! A Juarez-el-Paso ou Tijuana-san-Diego (photo), deux mtropoles symbolisent la frontire paradoxale.La plus sduisante (et courue) destination d'Amrique latine : paysages, patrimoine ancien et cultures locales, villes et campagnes, montagnes et plages. Le Mexique dispose d'atouts incontestables. Mexico a pourtant hier fait le choix d'un tourisme balnaire banal dans le sillage des politiques d'amnagements du pourtour mditerranen : stations de Cancun ou d'Acapulco. La mode est aujourd'hui l'! A Mexico, l'talement urbain rsulte d'une adaptation (rate) l'automobile. Les jours de sortie pour les voitures illustrent l'incapacit des pouvoirs publics : La capitale bat de ce fait des records de pollution. Autour de Monterrey, la protection d'espaces naturels montagnards commence juste. Le Mexique se veut pur de toutes influences et mtiss; la fois ouvert sur le monde - au cinma ou en cuisine - et rserve improbable : les Mennonites arrivs il y a des dcennies, ou encore les communauts villageoises mayas (chries des anthropologues, mais aussi des curieux) si prsentes au Guatemala. 9/ Brsil, puissance mondiale Un gant dmographique (avec le Mexique) l'chelle du continent, et au-del dans l'espace lusophone . Le pays compte encore des espaces vides (l'Amazonie des sans-terres), ou qui le redeviennent du fait de l'exode rural. La population du Nordeste se littoralise malgr un potentiel inexploit. La fort a longtemps apparu comme un potentiel inpuisable - les fronts pionniers lancs dans les annes 1970, autant pour la matire premire que pour les parcelles agricoles. Se pose aujourd'hui le problme de la reconversion des friches abandonnes. Une puissance agricole base sur l'expansion de l'levage et sur l'extension des cultures mcanises (source). Des ingalits de dveloppement qui rsultent des politiques de sortie du sous-dveloppement (source). Le choix d'une nouvelle capitale n'a pas vraiment rquilibr l'organisation gopolitique brsilienne. Reste Brasilia le rve socialiste (dsenchant) d'une nouvelle socit galitaire. Il vaut bien les projections dmesures d'une mgalopole brsilienne (source).L'heure est pourtant la coupe du monde, donc au des favelas. L'industrie brsilienne joue d'ores et dj dans la cour des grands : dans le spatial, dans l'aronautique (Embraer), l'automobile, le secteur ptrolier off-shore.*28 janvier 2014. Le Prou et l'Afghanistan, deux pays en guerre. Le Prou s'endormirait presque sur ses lauriers. Finies les vingt annes de guerre civile, avec des organisations terroristes hier capables de tuer les rcalcitrants, les diplms, les fonctionnaires et les trangers : les spcialistes valuent le bilan total des victimes (forces de l'ordre comprises) 70.000 morts. Les Tupac Amaru ou les soldats du Sentier Lumineux ont depuis la fin des annes 1970 jusqu' l'aube des annes 2000, enrl les faibles, dfi la police et l'arme pruviennes, dtourn l'argent propre, tout en polluant le pays avec l'argent de la drogue.Pour clairer un Occidental perdu dans les ordres de grandeur, le Prou s'tend sur 1,28 million de km. C'est quasiment le double de la surface de l'Afghanistan (652.000 km). Les deux populations ont d'ailleurs cru de faon remarquable et comparable, avec un triplement en un demi-sicle : environ 10 millions d'habitants en 1960 pour environ 30 millions en 2010. Dans les deux pays, la montagne de haute altitude compartimente les territoires intrieurs, et l'hyper-aridit rend inculte une autre partie (comparaison) par l'action des courants marins froids ou de la continentalit. Il ne faut cependant pas minimiser les diffrences physiques entre une Afghanistan enclave et un Prou ouvert sur le Pacifique...Le Prou confront l'instabilit politique, emptr dans les maux du sous-dveloppement s'est donc trouv confront une menace redoutable et double; avec des forces de l'ordre mal quipes. Les deux mouvements rvolutionnaires s'inspiraient au dpart plus ou moins librement de la thorie marxiste-lniniste, pour l'un revisite Cuba (MRTA), pour l'autre en Chine maoste (Sentier Lumineux). Mais la thorie et les personnalits des dirigeants fondateurs ont moins pes que l'efficacit concrte de leurs troupes. Le parcours intellectuel de Victor Polay - via la France et l'Espagne - et d'Abimael Guzman dcidant d'apprendre le quechua en mme temps qu'il enseignait la philosophie, rserve encore aujourd'hui quelques surprises.Tous deux purgent dsormais des peines de prison lourdes. Le premier a pu rcemment dire au revoir sa mre, tandis que le second se mure dans un silence mprisant. A l'occasion du procs d'un attentat meurtrier en 1992, Miraflores, dans la banlieue de Lima, la justice pruvienne souhaiterait entendre la version de Guzman. Le leader du Sentier Lumineux tergiverse avec la justice bourgeoise. Son avocat plaide l'irresponsabilit du responsable rvolutionnaire : "[il] nexiste aucune preuve quAbimael Guzman et le comit central de lorganisation aient ordonn lattentat [...] Abimael Guzman avait considr cet attentat comme une erreur et avait clairement expliqu quil tait en marge de tout cela."Les deux organisations ont toutefois succomb. Les plus jeunes militants-soldats cherchent recrer un parti officiellement reconnu. Des chefs intermdiaires ont russi leur reconversion, certains dans le narco-trafic d'autres visage dcouvert. L'actuel prsident de la Rpublique Ollanta Humala a par exemple uvr dans l'organisation terroriste, obtenant un commandement dans le centre du pays et le grade de capitaine, avec toutes les implications personnelles imaginables, avant de choisir la voie de la lgalit.Certes, le Mouvement Rvolutionnaire Tupac Amaru (lien) et le Sentier Lumineux (lien) jouent les prolongations. Nul n'est dupe sur place, mme si en Europe ou en Amrique du Nord certains se pincent le nez : les circonstances de la rpression des groupes arms gnent les dfenseurs de l'Etat de droit. Au Prou, l'ex-prsident Fujimori catalyse toutes les dtestations, jusqu' l'aveuglement : privatiseur au profit de ses amis et proches, corrompu et violent, son souvenir reste pourtant vivace au Prou. Vargas Llosa qui l'a combattu lors des lections prsidentielles et a averti ses concitoyens contre le populisme de Fujimori, a plus tard reconnu son rival un succs indniable contre le terrorisme, et le retour la paix civile.Qui lira Lituma dans les Andes retrouvera en quelques pages le Prou des chemins sombres, avec un Sentier Lumineux faisant rgner la terreur sur l'Altiplano, base de perscutions villageoises, de lapidation de victimes innocentes, d'radication des lites intellectuelles et tatiques. On ressort puis par la tension nerveuse de ces policiers tentant courageusement de dfendre quelques administrs plors, de secourir des tenanciers bordliques et des ouvriers de chantiers taiseux, privs de toute joie dans l'existence. Le Sentier Lumineux paraissait en mesure de contrler l'ensemble du pays et Abimael Guzman s'imaginait Grand Timonier pruvien ! Malgr le recrutement d'tudiants dans les universits, le Sentier Lumineux bute sur la ville dans les annes 1990. On trouve sans peine des dfenseurs de l'ancien prsident pruvien condamn une peine de prison ferme. Il est cependant vain de minimiser les mthodes d'une arme de conscrits (jusqu'en 1998) qui a quadrill le terrain, pratiqu des interrogatoires arbitraires (quitte tuer n'importe quel suspect et faire disparatre les cadavres) et - pire - a couvert les auteurs plus ou moins gars d'exactions : violences sur les faibles, prlvements sur les biens. Depuis l'poque du lancement de la guerre contre-insurrectionnelle en Amrique latine (Opration Condor) jusqu' sa concrtisation pruvienne, le silence prvaut; la reconnaissance des crimes commis se heurte une amnsie commode.Existait-il une alternative pour rtablir la paix civile face un mouvement totalitaire dans son essence et ses objectifs ? L'image ci-dessus provient du blog Un an au Prou qui dcrit l'impact de la Commission Vrit et Rconciliation mise en place au dbut des annes 2000.Je terminerai par une interrogation qui touche l'intervention des forces occidentales en Afghanistan. A l'heure o le bilan approche, je ne me satisfais pas d'un lieu commun : l'impossibilit d'un corps expditionnaire obtenir les mmes rsultats qu'une arme demeure combattant sur son propre terrain. La distribution de bons points de moralit ne m'enchante pas davantage.Les armes de l'Otan ont globalement respect les lois de la guerre en Afghanistan : bien des militaires engags en dduisent aujourd'hui la duplicit du pouvoir politique qui a donn une mission - radiquer les Taliban - sans autoriser tous les moyens d'action ! Il n'empche que de nombreux civils ont pri dans des bombardements abusifs, que des drones frappent temps et contre-temps, et que l'opium s'est immisc dans toutes les activits conomiques. Le jour du dpart des Amricains interviendra sans doute avant la fin du mandat d'Obama. Ceux qui partiront seront moins nombreux que les vtrans; le rgime afghan rsistera t-il mieux que son prdcesseur sud-vietnamien ?Au Prou, le chemin tait sombre pour combattre le Sentier Lumineux. La victoire parat nanmoins plus claire que les rsultats obtenus par les Occidentaux contre les Taliban en Afghanistan : l'anantissement de la rsistance la plus radicale ( commencer par les principaux organisateurs des attentats du 11 septembre) ne doit pas voiler le pire, l'immense gaspillage d'hommes et de moyens. L'Etat afghan embryonnaire (forces de scurit, systme ducatif, ville-capitale) traversera bientt de fortes turbulences, mme si un conflit entre factions proches ou opposes au prsident Karzai n'clate pas. Esprons juste qu'il surmontera cette preuve.