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L E S C O L L E C T I O N S D E L I N R E T S LES FORMES DE LA MÉTROPOLISATION Dominique Mignot Diana Rebeca Villarreal González Coordinateurs R A P P O R T N ° 2 7 7 Costa Rica, France et Mexique

Les formes de La métropoLisation - IFSTTAR...Les formes de la métropolisation Les coordinateurs Dominique Mignot, directeur scientifique adjoint de l’Institut national de recherche

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L E S C O L L E C T I O N S D E L ’ I N R E T S

Les formes de La métropoLisation

dominique mignot diana rebeca Villarreal GonzálezCoordinateurs

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T N ° 2 7 7

partant d’une interrogation sur la perma-nence des formes de la métropolisation,

les travaux présentés dans cet ouvrage indi-quent sans ambiguïté que la métropolisation est un processus dont les trois caractéristi-ques de concentration, d’étalement urbain et de ségrégation intra-urbaine sont indissocia-bles et sont à l’œuvre simultanément.La première partie, « les formes de la métro-polisation », vise à expliciter les permanences de ces formes. La deuxième partie, « les dyna-miques économiques », analyse en quoi les évolutions du tissu économique jouent sur les formes de la métropolisation et, notamment, sur les polarisations intra-urbaines. enfin, la troisième partie, « métropolisation et ségré-gation spatiale », confirme la pertinence des travaux sur la ségrégation spatiale pour analy-ser le processus de métropolisation à l’œuvre à différentes échelles spatiales.

Rapport n° 277Juin 2009

15,24 €

Dominique Mignot, docteur habilité à diriger des recherches en sciences économiques de l’université de Lyon et ingénieur des Ponts et Chaussées, directeur scientifique adjoint de l’INRETS, chercheur associé au Laboratoire d'économie des transports (LET) à l'université Lumière Lyon 2.

Diana Rebeca Villarreal González, docteur en sociologie de l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS, Paris), professeur du doctorat en sciences sociales et au départe-ment de production économique de l'université autonome métropolitaine, unité Xochimilco, Mexico.

ISSN 0768-9756ISBN 978-2-85782-673-6

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Costa Rica, France et Mexique

Légende de la photo de couverture : « Une rue fermée illégalement par les habitants de Mexico », Dominique Mignot, 2008.

Conformément à la note du 04/07/2014 de la direction générale de l'Ifsttar précisant la politique dediffusion des ouvrages parus dans les collections éditées par l'Institut, la reproduction de cet ouvrage estautorisée selon les termes de la licence CC BY-NC-ND. Cette licence autorise la redistribution noncommerciale de copies identiques à l’original. Dans ce cadre, cet ouvrage peut être copié, distribué etcommuniqué par tous moyens et sous tous formats.

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Institut Français des Sciences et Techniques des Réseaux,de l'Aménagement et des Transports14-20 Boulevard Newton, Cité Descartes, Champs sur MarneF-77447 Marne la Vallée Cedex 2

Contact : [email protected]

Dominique Mignot Diana Rebeca Villarreal González

Coordinateurs

Les formes de la métropolisation

Costa Rica, France et Mexique

Rapport INRETS No 277 Juin 2009

Les formes de la métropolisation

Les coordinateursDominique Mignot, directeur scientifique adjoint de l’Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS). 25 avenue François-Mitterrand, case 24, F-69675 Bron cedex, France Tél. : +33 4 72 14 24 20 / 24 70 [email protected]

Diana Rebeca Villarreal González, professeur à l’université autonome métropolitaine (UAM)–unité Xochimilco, Mexico [email protected]

Les auteursAnne Aguiléra, docteur en sciences économiques de l’université de Lyon, chercheur au Laboratoire ville, mobilité, transports (LVMT) et à l’INRETS.

Danièle Bloy, économiste de l’université de Lyon, ingénieur d’études au Laboratoire d’économie des transports (LET) à l’université Lumière Lyon 2.

Louafi BBouzouina, docteur en sciences économiques de l’université de Lyon, enseignant à l’université de Lyon et chercheur au LET à l’École nationale des travaux publics de l’État (ENTPE).

Roberto Constantino Toto, économiste à l’UAM–unité Xochimilco, professeur au dépar-tement de production économique, Mexico.

Enrique Contreras Montiel, économiste de l’université nationale autonome de Mexico (UNAM), professeur à l’UAM–unité Xochimilco, département de production économique, Mexico.

María Antonia Correa Serrano, docteur en relations internationales de l’UAM, professeur à l’UAM–unité Xochimilco, département de production économique, Mexico.

Hilda Rosario Dávila Ibáñez, économiste à l’UAM–unité Xochimilco, professeur au département de production économique, Mexico.

Selva Daville Landero, économiste à l’UAM, chercheur à l’Institut de recherches interdis-ciplinaires, UNAM, Mexico.

Dominique Mignot, docteur habilité à diriger des recherches en sciences économiques de l’université de Lyon et ingénieur des Ponts et Chaussées, directeur scientifique adjoint de l’INRETS, chercheur associé au LET, ancien président de l’Association de science régionale de langue française (ASRDLF).

François Million, économiste de l’université de Lyon, chargé d’études et doctorant au LET à l’ENTPE.

Cuauhtémoc Pérez Llanas, docteur en économie de l’IHAL (France), recteur de l’UAM–unité Xochimilco, professeur à l’UAM, département de production économique, Mexico.

Silvia Rosales Montano, docteur en sciences économiques de l’université de Lyon et urbaniste, chargée d’études à l’Agence d’urbanisme de la Communauté urbaine de Lyon, présidente de l’ONG Apoyo Urbano.

Diana Rebeca Villarreal González, docteur en sociologie de l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS, Paris), professeur du doctorat en sciences sociales et au département de production économique de l’UAM–unité Xochimilco, Mexico.

Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité – INRETSDirection scientifique / politique éditoriale – Aude Lauby

25 avenue François-Mitterrand, Case 24, F-69675 BRON CEDEX, France Tél. : +33 4 72 14 23 00 – Fax : +33 4 72 37 68 37 – www.inrets.fr

© Les collections de l’INRETS No ISBN 978-2-85782-663-7 – No ISSN 0768-9756

En application du code de la propriété intellectuelle, l’INRETS interdit toute reproduction intégrale ou partielle du présent ouvrage par quelque procédé que ce soit, sous réserve des exceptions légales

Rapport INRETS n° 277 3

Fiche bibliographiqueUR (1er auteur)

INRETS et LET

Projet N° Rapport INRETS N° 277

Titre

Les formes de la métropolisation. Costa Rica, France et Mexique.

Sous-titre Langue

Français

Auteur(s)

Dominique Mignot et Diana Rebeca Villarreal González

Rattachement ext.

Nom adresse financeur, co-éditeur N° contrat, conv.

Date de publication

Juin 2009

Remarques

Résumé

Cet ouvrage est avant tout le résultat d’un programme de recherche conjoint entre le Laboratoire d’économie des transports (LET) à l’École nationale des travaux publics de l’État (ENTPE), le Département de production économique de l’université autonome métropolitaine à Mexico, Unité Xochimilco (UAM–Xochimilco), l’Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS) et l’Agence d’urbanisme pour le développement de l’agglomération lyonnaise. Partant d’une interrogation sur la permanence des formes de la métropolisation, les travaux présentés dans cet ouvrage montrent sans ambiguïté que la métropolisation est un processus dont les trois caractéristiques de concentration, d’étalement urbain et de ségrégation intra-urbaine sont indissociables et sont à l’œuvre simultanément. La première partie, « les formes de la métropolisation », vise à expliciter les permanences de ces formes. La deuxième partie, « les dynamiques économiques », analyse en quoi les évolutions du tissu économique jouent sur les formes de la métropolisation et, notamment, sur les polarisations intra-urbaines. Enfin, la troisième partie, « métropolisation et ségrégation spatiale », confirme la pertinence des travaux sur la ségrégation spatiale pour analyser le processus de métropolisation à l’œuvre à différentes échelles spatiales.

Mots clés

Métropolisation, étalement urbain, ségrégation spatiale, mobilité

Nb de pages

214

Prix

15,24 €

Bibliographie

Oui

4 Rapport INRETS n° 277

Publication data formUR (1st author)

INRETS and LET

Projet N° INRETS report N° 277

Title

Forms of metropolization. Costa Rica, France and Mexico.

Subtitle Language

French

Author(s)

Dominique Mignot and Diana R Villarreal González

Affiliation

Sponsor, co-editor, name and address Contract, conv. N°

Publication date

June 2009

Notes

Summary

This book is first of all the result of a joint research program between the Transport Economics Laboratory at National School of Public Works (LET–ENTPE), the Department of Economic Production at Metropolitan Autonomous University in Mexico, Unit Xochimilco (UAM–Xochimilco), the French National Institute for Transport and Safety Research (INRETS) and the Urbanism Agency for the development of Lyons’s area. Based on the question of the permanency of forms of metropolization, the works presented in this book clearly show that metropolization is a process in which the three characteristics, namely concentration, urban sprawl and spatial segregation, are indissociable. The first part, “Forms of metropolization”, aims at highlighting the permanency of these forms. The second part, “Economic dynamics”, analyses the influence of the evolutions of the economic fabric on the forms of metropolization, and particularly on intra-urban polarization. The third part, “Metropolization and spatial sergregation”, confirms that works on spatial segregation are relevant for analysing the metropolization process at different spatial scales.

Key words

metropolization, urban sprawl, spatial segregation, mobility

Nb of pages

214

Price

15,24 €

Bibliography

Yes

Rapport INRETS n° 277 5

Table des matières

Avant-propos ................................................................................................... 7Dominique Mignot

PARTIE 1 : LES FoRMES DE LA MéTRoPoLISATIoN

Chapitre 1. Métropolisation, concentration et ségrégation dans les villes européennes et américaines : une comparaison Costa Rica, France et Mexique ..................................................................... 11Dominique Mignot et Diana Rebeca Villarreal González

Chapitre 2. Permanence des formes des métropoles : le cas de la zone métropolitaine de la Ville de Mexico .......................................... 27Diana Rebeca Villarreal González

Chapitre 3. Les formes de la métropolisation au Costa Rica .................... 45Sylvia Rosales Montano

Chapitre 4. Permanence des formes de la métropolisation dans les aires urbaines françaises .............................................................................. 61Dominique Mignot, Anne Aguiléra et Danièle Bloy

PARTIE 2 : LES DyNAMIqUES éCoNoMIqUES

Chapitre 5. querétaro : Un pôle émergent de développement industriel 77Selva Daville Landero

Chapitre 6. L’impact des zones d’activité sur la localisation des entreprises ...................................................................................................... 91François Million

Chapitre 7. Les services aux entreprises dans les espaces périurbains : un développement encore mesuré ...................................... 113Anne Aguiléra

Chapitre 8. Les investissements étrangers directs dans le secteur des services à Mexico ................................................................................. 133María Antonia Correa Serrano

6 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

PARTIE 3 : MéTRoPoLISATIoN ET SéGRéGATIoN SPATIALE

Chapitre 9. Dynamique locale et processus d’expansion de la région métropolitaine de Mexico ............................................................................ 147Enrique Contreras Montiel

Chapitre 10. La ségrégation spatiale dans les villes françaises : le cas de trois agglomérations de la Région Rhône-Alpes ..................... 159Danièle Bloy

Chapitre 11. Métropolisation et ségrégation dans la ville de Mexico ..... 173Hilda Rosario Dávila, Roberto Constantino Toto, Cuauhtémoc Pérez Llanas

Chapitre 12. Les disparités de revenus à différentes échelles spatiales en France ...................................................................................... 191Louafi Bouzouina et Dominique Mignot

Rapport INRETS n° 277 7

Avant-propos

Ce livre est avant tout le résultat d’un programme de recherche conjoint entre le Laboratoire d’économie des transports (LET) à l’École nationale des travaux publics de l’État (ENTPE), le Département de production économique de l’Uni-versité autonome métropolitaine à Mexico, Unité Xochimilco (UAM–Xochimilco), l’Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS) et l’Agence d’urbanisme pour le développement de l’agglomération lyonnaise.

Un premier programme de recherche entre le LET et l’UAM, initié avec Diana Rebeca Villarreal González, professeur à l’UAM, suite au colloque de l’Associa-tion de science régionale de langue française (ASRDLF) à Puebla (Mexique) en 1998, avait permis d’analyser en parallèle les dynamiques à l’œuvre au sein des espaces métropolitains en France et au Mexique. Ce programme de recherche s’était traduit par un ouvrage « Dinamicas metropolitanas y estructuracion territo-rial » publié en 2003. Les recherches présentées dans cet ouvrage tentaient de démontrer en quoi les dynamiques tant économiques que spatiales permettaient d’expliquer les logiques de concentration et de polarisation à l’œuvre à différentes échelles spatiales, y compris au sein des aires métropolitaines.

Ces travaux ont montré, que toutes proportions gardées et malgré des contex-tes nationaux très différents, des « permanences » pouvaient être mises en évi-dence. Ainsi, les tendances à la concentration et à l’étalement étaient partout en France et au Mexique ou, au moins, dans les villes que nous avions étudiées, concomitantes et non concurrentes. Autre « permanence », la question de la ségrégation sociospatiale ou plutôt de l’accroissement des inégalités sociospa-tiales, qui était, jusque-là, peu abordée dans les travaux portant sur la ville et sur les dynamiques spatiales, commençait à apparaître comme une caractéristique à part entière du processus de métropolisation.

C’est ainsi, qu’un deuxième programme de recherche conjoint entre le LET et l’UAM a été lancé sur la question de la permanence des formes de la métropolisa-tion, avec comme ambition d’élargir l’éventail des villes étudiées et d’approfondir la connaissance sur les caractéristiques de la métropolisation. Ces travaux, présen-tés dans cet ouvrage, montrent sans ambiguïté que la métropolisation est un pro-cessus dont les trois caractéristiques de concentration, d’étalement urbain et de ségrégation intra-urbaine sont indissociables et sont à l’œuvre simultanément.

Ces recherches ont bénéficié d’aides à la recherche de la Région Rhône-Alpes, pour la comparaison internationale et de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) et du Groupement régional Nord-Pas-de-Calais pour la recherche dans les transports (GRRT) pour l’analyse plus fine des liens entre formes urbaines et mobilités.

8 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Cette recherche conjointe a donné lieu à deux séminaires, le premier à l’ENTPE en 2003 et le second à l’UAM en 2005, ainsi qu’à des échanges et présentations, notamment lors des colloques de l’ASRDLF.

Les contributions présentées dans cet ouvrage sont organisées en trois par-ties. La première partie, « les formes de la métropolisation », vise à expliciter les permanences de ces formes. La deuxième partie, « les dynamiques économi-ques », analyse en quoi les évolutions du tissu économique jouent sur les formes de la métropolisation et notamment sur les polarisations intra-urbaines. Enfin, la troisième partie, « métropolisation et ségrégation spatiale », confirme la per-tinence des travaux sur la ségrégation spatiale pour analyser le processus de métropolisation à l’œuvre à différentes échelles spatiales.

Dominique Mignot

Rapport INRETS n° 277 9

Partie 1

Les formes de la métropolisation

Rapport INRETS n° 277 11

Métropolisation, concentration et ségrégation dans les villes européennes et américaines : une comparaison Costa Rica,

France et Mexique

Dominique Mignot et Diana Rebeca Villarreal González

Le questionnement sur la permanence des formes de la métropolisation tel que nous l’avions défini au démarrage de notre recherche conjointe reposait essen-tiellement sur trois grandes caractéristiques de la métropolisation : la concen-tration, l’étalement urbain et l’émergence de polarités au sein de ces espaces péri-urbains en croissance.

« La tendance à la métropolisation, une métropolisation sélective et déséquili-brée, marquée par un accroissement des disparités inter- et intra-urbaines, a déjà été démontrée par de nombreux travaux (Bassand, 1997 ; Buisson et Rousier, 1998 ; Lacour et Puissant, 1999 ; Buisson et Mignot, 2005) ». Cette tendance n’est pas infirmée aujourd’hui, voire confortée, comme nous avons pu le mettre en évidence, par l’étude comparative de sept agglomérations françaises (Mignot et al., 2004a) et comme le montrent nombre d’autres travaux récents (Buisson et al., 2001 ; Aguiléra et Mignot 2003, Villarreal et al., 2003). Le processus de métropolisation affecte tous les espaces, même les espaces ruraux, objets d’une métropolisation rurale (Lacour, 2005).

Les hypothèses que nous avions formulées étaient que ces tendances à la concentration sélective, à l’étalement généralisé, à l’émergence de polarités… étaient à l’œuvre partout, à différentes échelles spatiales, dans des contextes nationaux différents, par exemple au Costa Rica, en France et au Mexique. Nous distinguions ainsi trois questions principales.

La première concerne la comparaison des structurations urbaines dans de grandes métropoles. L’enjeu est tout à la fois d’identifier les formes urbaines et de les relier aux dynamiques des activités. Y a-t-il émergence de polarités périphéri-ques et dans quelles conditions ?

La deuxième question a trait à la nature des pôles secondaires. Sont-ils carac-térisés par des dynamiques d’autonomisation, au sens d’un développement local de services à la population et aux entreprises ? Quelles entreprises participent à

12 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

ces dynamiques ? Des secteurs d’activités particuliers participent-ils à l’autonomi-sation ou à la structuration du territoire ? Peut-on affiner les relations de concur-rence–complémentarité avec le centre ?

La troisième interrogation concerne les territoires et les populations délaissés. À côté des espaces qui se développent, les « Régions qui gagnent » de Benko et Lipietz (1992), une analyse plus fine des territoires souvent définis « en creux » est également à faire. N’y a t-il pas décrochage de ces territoires ?

L’hypothèse centrale qui sous-tend notre recherche est donc celle d’une per-manence des tendances lourdes à la métropolisation, notamment par l’émer-gence de polarités périphériques situées sur les axes principaux de transport. Concernant plus précisément les stratégies de localisation des établissements, l’hypothèse est également celle d’une permanence des comportements des entreprises, qui dépassent les contextes nationaux et les échelles spatiales.

La comparaison est effectuée à la fois dans un cadre national, par la compa-raison de villes de différentes tailles, et dans un cadre international par la compa-raison des situations costaricaines, mexicaines et françaises.

En France, le choix a été fait de travailler sur des agglomérations a priori plutôt centrées (par exemple Bordeaux ou Dijon) ou, au contraire, marquées au départ par des formes urbaines très contraintes (par exemple Marseille). Dans le cas du Mexique, l’analyse est ciblée, ici, essentiellement sur la zone métropolitaine de la Ville de Mexico (ZMVM), d’autres villes telles que Monterrey ayant également été étudiées par ailleurs. Au Costa Rica, seule la ville de San José a été étudiée. Deux échelles ou niveaux peuvent ainsi être identifiés :

le niveau des villes mondiales avec Mexico et Paris, et leurs systèmes régio- •naux mégalopolitains (région parisienne et région Centrale du Mexique) ;

les villes, centres de province en France (Bordeaux, Dijon, Lyon et Marseille) •et au Mexique (Monterrey), auxquelles on ajoutera la ville de San José, qui, de par sa taille et malgré son statut de capitale, est de fait plus proche de Lyon ou Monterrey que de Paris ou Mexico.

Que se passe-t-il dans ces différents contextes nationaux, et notamment au Mexique et au Costa Rica, pour lesquels les travaux et la littérature sur le sujet sont moins fournis ? Que se passe-t-il au sein même de ces espaces caracté-risés par de profondes mutations ? Les espaces intra-urbains sont-ils aussi le lieu de phénomènes comparables ? Que se passe-t-il à côté des territoires qui gagnent ? Certaines villes ou métropoles ne sont-elles pas le lieu d’un retour au centre ? Ou, au contraire, une évolution à l’américaine n’est-elle pas en train de se généraliser ?

Autant de questions auxquelles nous avons tenté de répondre. Les différents travaux effectués sur le Costa Rica, la France et le Mexique nous ont conduits, de fait, à insister beaucoup plus sur la dimension de la ségrégation dans les évolutions à l’œuvre. Alors que pour les villes françaises par exemple le double phénomène de concentration et d’étalement urbain semblait globalement pouvoir décrire les évolutions à l’œuvre, il nous semble dorénavant nécessaire de parler

Rapport INRETS n° 277 13

Métropolisation, concentration et ségrégation dans les villes...

d’un triple phénomène de concentration, d’étalement urbain et de ségrégation. En effet, ces travaux convergent pour confirmer ces trois grandes caractéristiques de la métropolisation :

les centres historiques gardent un rôle important même si des polarités péri- •phériques apparaissent et se développent, notamment le long des axes de transport ;

l’étalement urbain continu ; •

la ségrégation se développe au sein des métropoles. •

Ce triple phénomène permet de décrire et d’expliquer un renforcement de la hiérarchie urbaine au niveau mondial autour d’espaces métropolisés de plus en plus étendus mais aussi de plus en plus ségrégués. Ce qui avait pu être mis en évidence dans les villes globales de Saskia Sassen (1996) s’applique de fait à nombre de métropoles.

L’objectif de cet article est donc de tenter un premier bilan des travaux récents permettant de décliner le triple phénomène dans trois contextes nationaux bien différents.

1. La concentration toujours et encore

La concentration des activités et de la population dans des métropoles tou-jours plus vastes semble toujours une caractéristique essentielle du processus de métropolisation, comme l’ont montré ou suggéré nombre de travaux portant sur différentes échelles spatiales (Fujita, 1994 ; Krugman, 1995 ; Arthur, 1995 ; Lacour et Puissant, 1999).

De nombreuses études ont également montré le rôle fondamental des ser-vices dans la croissance économique (Jouvaud, 1998) et le renforcement de la hiérarchie urbaine (Damette, 1995). Les services, et plus particulièrement les services aux entreprises, participent donc activement au phénomène de métro-polisation (Bassand, 1997 ; Jouvaud, 1998 ; Léo et Philippe, 1998 ; Aguiléra, 2002), à la fois par leur concentration et par leur diversification. Ces tendances, jusque-là peu abordées dans les villes latino-américaines, s’y trouvent largement confirmées.

Les travaux effectués sur les trois pays montrent tout d’abord que la concen-tration privilégie toujours le niveau le plus élevé de la hiérarchie urbaine qui continue ainsi à se développer. Ils montrent également qu’au sein de ces agglomérations :

le centre historique garde un rôle important (notamment en ce qui concerne •les activités de service, les investissements étrangers à Mexico…) et que le modèle nord-américain ne se généralise pas ;

la concentration se fait également en des espaces privilégiés (au centre •et ailleurs) dont des pôles périphériques bien situés le long des axes de transport.

14 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Une première comparaison des villes étudiées suggère de nombreuses simili-tudes (Tableau 1). Les agglomérations capitales représentent de l’ordre de 20 % de la population totale de la France et du Mexique et 30 % du Costa Rica. Les villes du niveau inférieur de la hiérarchie urbaine sont loin derrière ces capitales (Lyon regroupe 2,8 % de la population française et Monterrey 3,4 % de la popu-lation mexicaine).

Tableau 1 : le poids du centre dans les agglomérationsMexico

2000Paris1999

San José2000

Lyon1999

Monterrey2000

Métropole ZMVM AU AMSJ AU ZMM

Population (en millions d’habitants)

17,8 11,2 1,2 1,6 3,3

Part de la métropole dans la population totale du pays

18,3 % 19,1 % 31 % 2,8 % 3,4 %

Part du centre dans la population de la métropole

9,4 %47,4 %

*

19 % 27 % 27 % 34 %

* Pour Mexico, la « Ciudad central », comprenant les quatre délégations les plus centrales du District Fédéral, comprend 9,4 % de la population de la zone métropolitaine, et le District Fédéral en concentre, quant à lui, 47,4 %.Source : tableau constitué à partir de Ben Amar et Vega, 2003 ; Mignot et al. 2004a ; Villarreal et Aguirre Costa, 2003.

On peut également remarquer sur ce tableau que la part du centre dans la population des métropoles étudiées reste importante. La part la plus faible est obtenue à Mexico, avec 9,4 %, le centre « Ciudad central » étant défini par les quatre délégations centrales du District Fédéral (Cuauhtemoc, Benito Juarez, Miguel Hidalgo et V. Carranza). Le District Fédéral représente, quant à lui, 47,4 % de la population de la zone métropolitaine.

1.1. Rôle du centre historique

Les évolutions mises en évidence sur les villes françaises confirment la per-manence du double phénomène de concentration sur les aires urbaines et d’éta-lement de celles-ci. Populations, emplois et établissements s’étalent de plus en plus, sans que le centre, dont la part diminue, ne perde toutefois son rôle domi-nant. Contrairement au cas des grandes villes des États-Unis, qui ont donné lieu aux travaux sur les edge cities (Garreau, 1991), le centre ne se vide pas ou peu et voit, dans la plupart des cas, son aire d’attraction (définie comme l’origine des migrations alternantes entrantes sur le centre) s’accroître (Mignot et al., 2004a, 2004b).

La part du centre est très variable selon les villes (cf. chapitre 4), et le centre représente encore plus de la moitié des agglomérations concernées. L’emploi est dans tous les cas plus concentré que la population et, là, on constate que Paris concentre encore plus de 30 % de tout l’emploi de son aire urbaine. C’est d’ailleurs dans ce « spatial mismatch » (Gaschet et Gaussier, 2005) que certains auteurs trouvent la raison essentielle de la persistance du chômage ou des dif-

Rapport INRETS n° 277 15

Métropolisation, concentration et ségrégation dans les villes...

ficultés d’accès à l’emploi pour toute une partie de la population et donc de la ségrégation spatiale.

C’est, par ailleurs, par un contrôle des emplois liés à la décision que les cen-tres gardent un rôle prépondérant. En effet, le centre historique est toujours, que ce soit au Costa Rica, en France ou au Mexique, la localisation préférée des acti-vités de services aux entreprises (Aguiléra, 2002 ; Villarreal González et Aguirre Costa, 2003). On peut relever que pour certains services le centre renforce sa place. Ainsi, pour le Mexique, la ville de Mexico représente 59,5 % du PIB des services bancaires en 2000, contre 49 % en 1993 (Villarreal González et Aguirre Costa, 2003).

Un indicateur plus spécifique ou sensible pour le Mexique peut également être utilisé, celui du niveau des investissements à capitaux étrangers. Là encore, même si la part de la ville de Mexico dans les investissements à capitaux étran-gers passe de 65 % en 1993 à 54,6 % en 2002 (cf. chapitre 8), le rôle du centre reste primordial.

On peut enfin noter la tendance à la concentration des activités commerciales dans les villes étudiées avec, par exemple, le développement de mégacentres commerciaux au plus proche du centre sur les grandes pénétrantes à Mexico (Lopez Levi, 2004). L’aire métropolitaine de San José (AMSJ) concentre 80 % des activités commerciales, 100 % des établissements de soins spécialisés, 70 % du transport… (Ben Amar et Vega, 2003).

Le rôle du centre historique des villes reste très important dans les trois contex-tes nationaux étudiés, même s’il est vraisemblablement moins fort dans les villes mexicaines pour lesquelles une étude récente de la localisation des centres de recherche en innovation (Tecualhey Sandoval et Rozga Lutner, 2004) suggère une localisation privilégiée de ces activités en dehors de Mexico.

1.2. Concentration en certains pôles périphériques

Au cœur du questionnement de l’économie spatiale sur les formes de la métro-polisation, les analyses en cours mettent en évidence l’existence de polarités périphériques. Ces pôles attirent des activités (industries de pointes ou servi-ces en France, services et investissements à capitaux étrangers au Mexique). La concentration d’activités nobles (services mais aussi industries de haute techno-logie ou technologie de l’information et de la communication) en des pôles péri-phériques est une caractéristique de ces pôles (Beckouche et Vire, 1998).

Ainsi, des polarités périphériques peuvent être mises en évidence dans les villes costaricaines (Ben Amar et Vega, 2003), françaises (Gaschet, 2001 ; Mignot et al., 2004b) et mexicaines (Villarreal González et Aguirre Costa, 2003 ; Villarreal González, 2004).

Dans le cas des villes françaises, ces pôles ont été constitués par regroupe-ment des communes attirant 85 % des migrations alternantes à destination de la périphérie. On constate ainsi que dans les sept aires urbaines étudiées moins de 25 % des communes périphériques attirent 85 % des migrations vers la péri-

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Les formes de la métropolisation

phérie. Ces communes peuvent ainsi être regroupées en pôles dont le nombre est très variable selon l’agglomération et varie de deux à Saint-Étienne ou trois à Bordeaux, Dijon et Marseille (où le pôle d’Aix-en-Provence joue un rôle de véri-table pôle secondaire), à 11 à Lyon et à 25 à Paris. Dans la plupart des cas, ces pôles sont situés en proche banlieue et pour Lyon et Paris peuvent être situés plus loin en périphérie, sur des axes notamment desservis par des axes autoroutiers.

La localisation des activités motrices périphériques, définies par un critère de fort emploi et de nombre important de créations récentes d’entreprises (Buisson et al., 2001) est, dans tous les cas, majoritairement concentrée dans les pôles définis précédemment (Tableau 2).

Ainsi, ces pôles regroupent plus de 70 % des activités motrices localisées hors du centre de l’aire urbaine et plus de 75 %, et même 80 % pour les plus grandes villes, des activités motrices de service aux entreprises. Ceci confirme à la fois l’effet attracteur de quelques pôles périphériques et le rôle des activités de service dans le développement de ces pôles.

Tableau 2 : la localisation des activités motrices périphériques dans les pôles périphériques des aires urbaines

Ensemble des établissements

moteurs *

Établissements moteurs industriels

Établissements moteurs de services

aux entreprises

Nbr. d’étab. moteurs en périphérie

Total périph.

Nbr. Dans les

pôles

%Total

périph.

Nbr. Dans les

pôles

%Total

périph.

Nbr. Dans les

pôles

%

Lyon 11 804 8 911 75,5 1 719 1 209 70,3 3 800 3 025 79,6

Marseille 6 152 4 564 74,2 859 581 67,7 507 398 78,5

Bordeaux 6 412 4 978 77,6 207 176 85,0 1022 837 81,9

Dijon 2 019 1 397 69,2 207 142 68,6 393 297 75,6

Grenoble 4 136 3 070 74,2 535 390 72,9 285 237 83,2

Saint-Étienne

1 725 1 240 71,9 481 368 76,5 351 266 75,8

* Établissements d’un salarié et plus présents sur le territoire de l’aire urbaine.Source : Mignot et al., 2004b, p. 9.

À Mexico et à San José, des polarités peuvent également être mises en évi-dence. Une analyse des pôles attractifs d’emploi à Mexico en 1994 et 2000 mon-tre à la fois l’existence de polarités périphériques attirant emplois et migrations et une certaine stabilité dans le temps de ces polarités. Ainsi, il n’y a pas eu de gros bouleversements dans les migrations et les emplois formels offerts en 1994 et en 2000. Mais, en même temps, nous constatons que les vieux pôles de déve-loppement industriel localisés dans les délégations Azcapotzalco et V. Carranza montrent des taux de croissance de l’emploi très bas, tandis que les nouveaux sous-centres d’emploi se localisent dans les délégations Iztapalapa, A.Obregón, Iztacalco et Coyoacán (Villarreal González et Aguirre Acosta, 2003). Concernant ce dernier point, on peut également relever que les polarités mises en évidence dans les villes françaises sont également très stables dans le temps.

Rapport INRETS n° 277 17

Métropolisation, concentration et ségrégation dans les villes...

À San José, le « district Uruca », secteur industriel et commercial de la ville de San José, concentre les plus grandes entreprises manufacturières et agroalimen-taires. C’est un secteur attractif pour les activités commerciales et de services aux personnes. Ce secteur dispose, par ailleurs, d’une infrastructure autoroutière permettant une liaison rapide entre les différents réseaux routiers du territoire national et métropolitain (Ben Amar et Vega, 2003).

Ces différents travaux confirment l’émergence et l’existence de polarités péri-phériques concentrant notamment les activités à haute valeur ajoutée. Ces pôles constituent-ils pour autant des pôles de développement pour leur territoire ? Si la question est posée telle quelle dans quelques travaux (Villegas Silva, 2004), peu d’éléments permettent d’y répondre.

1.3. Concentration des activités le long des axes principaux

L’influence des axes dans la localisation n’est pas nouvelle, et c’est d’ailleurs une des premières intrusions de l’espace ou de la non-isotropie de celui-ci dans les modèles précurseurs, que ce soit celui de la localisation agricole de Von Thünen (Huriot, 1994) ou celui de la localisation industrielle de Weber (Aydalot, 1985). Il est toutefois intéressant de relever le rôle toujours primordial de ceux-ci à une époque où les technologies de l’information et de la communication ten-draient à faire disparaître l’espace.

On a vu précédemment que les activités se concentraient en certains pôles périphériques situés sur les axes principaux de transport. Elles se concentrent également au sein de zones d’activités localisées sur ces axes. Les travaux réali-sés sur Mexico montrent ainsi très nettement le rôle des axes dans la localisation des activités. Des corridors industriels peuvent être mis en évidence (Villegas Silva, 2004 ; Julian Agüero, 2004 ; Villarreal González et Aguirre Acosta, 2003), comme par exemple :

l’axe « 6 » (Naucalpan, Tlanepantla… Cuautatlan, Izcalli, Tultitlan… •Ecatepec…) bien relié à l’autoroute TLC (Nafta) et qui concentre toutes sor-tes d’activités industrielles (cf. chapitre 2) ;

l’autoroute Mexico–Querétaro, lieu de localisations industrielles importan- •tes, notamment de l’industrie automobile (cf. chapitre 5).

D’autres activités permettent d’identifier d’autres corridors. Le développe-ment des activités de services et des investissements à capitaux étrangers le long du nouveau corridor Alameda–Reforma–Santa Fe en est un bon exemple (cf. chapitre 8).

Ainsi, nombre de travaux, en France (cf. chapitre 6) comme au Mexique, poin-tent la localisation des activités dans des zones ou parcs situés le long des roca-des et pénétrantes d’agglomérations. Au-delà de ces pôles ou zones, on peut également montrer une localisation privilégiée et généralisée des activités le long des axes principaux de transport (Mignot et al., 2004a).

18 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

2. L’étalement urbain

Bien que certains aient prédit en France à l’aube du xxie siècle la fin de l’éta-lement urbain, celui-ci reste une caractéristique forte des aires urbaines françai-ses et latino-américaines. L’étalement urbain est une réalité à Mexico (Villarreal González et Aguirre Costa, 2003), à San José (Ben Amar et Vega, 2003 ; Rosales Montano, 2004) et dans les villes françaises (cf. chapitre 4).

2.1. L’étalement urbain continu

Les évolutions constatées en France entre les recensements, depuis 1975, montrent bien le double phénomène de concentration et d’étalement présenté précédemment. Ces évolutions peuvent être mesurées plus précisément en s’ap-puyant sur le modèle de Bussière, permettant de représenter la répartition cumu-lée de la population autour d’une ville centre.

Tableau 3 : les paramètres du modèle de Bussière calculés pour la répartition cumulée de la population et de l’emploi dans sept aires

urbaines en 1975 et 1999

Gradients de densité

de population et d’emploi

Population Emploi

A (densité extrapolée au

centre)

b (gradient de la

densité)

A (densité extrapolée au

centre)

b (gradient de la

densité)

1975 1999 1975 1999 1975 1999 1975 1999

Paris 30 000 26 000 0,14 0,12 27 000 19 000 0,19 0,16

Lyon 14 999 12 999 0,26 0,23 10 841 8 100 0,34 0,27

Marseille 10 500 8 500 0,23 0,19 4 300 2 800 0,24 0,19

Bordeaux 10 100 9 500 0,30 0,26 7 500 5 800 0,40 0,31

Grenoble 11 700 9 200 0,41 0,34 5 950 5 200 0,46 0,39

Dijon 9 999 9 000 0,49 0,43 7 016 8 000 0,62 0,61

Saint-Étienne 14 000 10 500 0,50 0,46 6 179 5 154 0,53 0,51

Source : Mignot et al., 2004a, p. 35.

Les résultats obtenus (Tableau 3) après le calcul des densités théoriques de la population et des emplois cumulés confirment tout d’abord une baisse du poids du centre. La baisse de la densité extrapolée au centre, A, entre 1975 et 1999, est systématique pour la population et quasi systématique (sauf à Saint-Étienne) pour l’emploi. De la même manière, la baisse systématique de 1975 à 1999, pour la population comme pour l’emploi, des valeurs de b (gradient de la densité en fonction de la distance au centre), confirme un étalement urbain généralisé sur cette période. On peut également remarquer que les valeurs de b les plus faibles sont celles obtenues sur l’aire urbaine de Paris, puis sur Lyon et Bordeaux. À l’in-verse, ces valeurs confirment à Dijon une ville monocentrique encore peu étalée. Les valeurs obtenues pour Marseille sont à prendre avec précaution. En effet, tant la grande taille des communes de l’aire urbaine que l’existence avérée d’un pôle secondaire important rendent moins pertinent à Marseille le calage avec le modèle de Bussière.

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Métropolisation, concentration et ségrégation dans les villes...

Pour l’aire urbaine de Lyon, le Tableau 4 permet de bien mettre en évidence à la fois l’étalement, visualisé par la croissance du nombre de communes concer-nées par les migrations vers le centre, et le faible volume des flux en provenance de communes plus nombreuses et plus éloignées.

Tableau 4 : nombre de communes générant les flux d’actifs entrant dans le centre et nombre de communes accueillant

les flux d’actifs sortants de la ville centre

Paris Lyon GrenobleSaint-

ÉtienneBordeaux Dijon Marseille

75 99 75 99 75 99 75 99 75 99 75 99 75 99

Entrants*

100 % 13 621 15 216 3 011 4 011 1 354 1 594 867 1 210 2 211 2 500 1 408 1 970 1 690 2 225

90 % 456 503 97 323 56 139 85 119 133 158 182 265 358 495

85 % 397 328 * 54 197 32 88 45 78 70 97 92 168 147 126

75 % 188 195 23 100 16 46 21 43 25 48 38 81 65 58

50 % 78 80 7 25 5 15 9 15 8 14 7 21 17 20

Sortants

100 % 2 473 957 669 1 589 580 785 561 799 680 1024 549 949 1084 969

90 % 124 126 51 100 44 53 72 82 53 89 45 103 142 75

85 % 86 94 30 61 24 32 40 48 25 50 21 55 78 41

75 % 52 58 15 33 11 18 20 24 14 21 8 24 28 21

50 % 21 20 4 11 4 6 8 8 5 8 3 7 7 6

* 54 communes génèrent 85 % des flux d’actifs entrants dans la commune de Lyon en 1975. Source : Mignot et al., 2004a, p. 36.

L’étalement urbain est très fort à Mexico et n’est plus à démontrer. La popula-tion de la ZMVM est passée de 13 millions en 1980 à 17,8 millions en 2000. La population globale de l’AMSJ a crû de près de 50 % de 1984 à 2000. Et, depuis 1973, l’extension urbaine se développe dans toutes les directions (Ben Amar et Vega, 2003 ; Rosales Montano, 2004).

2.2. Les conséquences de l’étalement urbain

Il se traduit par une croissance généralisée des migrations et des distances de migrations, comme le montrent l’Illustration 1 pour Mexico, et le Tableau 5 pour les villes françaises. Les pôles et sous-pôles de la Ville de Mexico concentrent le personnel occupé (1999) et les déplacements domicile–travail (2000). À Mexico comme ailleurs, les déplacements domicile–travail s’effectuent de plus en plus de pôle périphérique à pôle périphérique, et ces pôles périphériques tendent à attirer une population de plus en plus éloignée.

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Les formes de la métropolisation

Tableau 5 : accroissement des distances de migrations alternantes entre 1990 et 1999

Paris LyonMarseille-

AixBordeaux Grenoble Dijon

Saint-Étienne

Distance moyenne 1999 (km)

13,5 9,4 13,3 9,6 7,8 7,6 6,7

Évolution 1990/1999

16,0 % 13,8 % 6,2 % 10,7 % 16,5 % 11,4 % 4,7 %

Évolution 1990/1999 pour les migrants

7,0 % 9,2 % 3,2 % 5,8 % 11,4 % 11,0 % 5,5 %

Source : Mignot et Aguiléra, 2004, p. 109.

Un des enjeux importants pour les prochaines années est donc la capacité des autorités publiques locales à maîtriser cet étalement urbain et, notamment, à contrôler l’usage du sol (Canabal Cristiani, 2004 ; Cazal et Lopez Levi, 2004).

Illustration 1 : les pôles d’emploi de Mexico et les migrations alternantes en 2000

Source : élaboration propre sur la base des données de l’INEGI (1999), Censos Económicos por Entidad Federativa, Distrito Federal y Estado de México. Doceavo Censo de Población y Vivienda (Cuestionario Ampliado, 2000).

Rapport INRETS n° 277 21

Métropolisation, concentration et ségrégation dans les villes...

3. La ségrégation spatiale

Le questionnement sur les disparités spatiales a tout d’abord été porté à l’échelle des régions et, notamment, sur les relations entre urbain et rural. Au Mexique, les premières études sur les inégalités territoriales concernent égale-ment la disparité ville–campagne et ont été nombreuses au cours des années 1960 et 1970 (Dávila, Constantino et Pérez Llanas, 2003).

Les premiers travaux à l’échelle intra-urbaine apparaissent aux États-Unis au cours des années 1960–1970 et portent notamment sur la ségrégation spatiale et raciale, notamment en matière de chômage (Kain, 1968 ; Gaschet et Gaussier, 2005). Des travaux sont développés en France, tout d’abord, par des sociolo-gues (Castells, 1972), puis par des économistes. Au Mexique, dans les dernières décennies du xxe siècle, l’accent a été mis sur les disparités au sein des grandes métropoles comme les cités de Mexico, Guadalajara et Monterrey et le reste du territoire urbain (cf. chapitre 11).

Si le développement des villes françaises ne révèle pas de situations catastro-phiques à l’américaine avec des quartiers à l’abandon, force est de constater que la ségrégation spatiale ou sociospatiale augmente au sein des espaces urbains. Des lieux privilégiés du développement apparaissent en périphérie des villes, alors que parallèlement, sur d’autres espaces, voire les mêmes, le chômage se développe et la population se paupérise.

Avec la crise, et surtout la persistance de celle-ci, disparaît l’espoir de voir se résoudre les questions de chômage et de pauvreté par une croissance « natu-relle » de ces territoires, croissance désormais même plus hypothétique. Chômage et précarité se développent et s’inscrivent dans le paysage.

Parallèlement, la dissociation habitat/emploi s’est accentuée au cours des années 1980 et 1990. Les raisons de cette dissociation peuvent être trouvées, en partie, dans les évolutions décrites précédemment. Ainsi, l’étalement urbain et le développement de la bi-activité au sein des ménages contribuent à détendre le lien entre localisation résidentielle et lieu de travail. Des raisons sont également à rechercher du côté du développement du chômage et de la précarité du travail, amenant les personnes à se déplacer plus et plus loin pour chercher du travail, sans que cela ne se traduise ensuite par un choix de relocalisation résidentielle.

S’il serait bien évidemment réducteur et assurément faux d’affirmer que les pauvres sont tous concentrés au même endroit, la persistance en quelques espa-ces « non privilégiés » d’une population à très faible revenu à côté d’espaces qui semblent se développer conduit à se poser la question de l’existence et du déve-loppement de la ségrégation spatiale. Au-delà des phénomènes visibles (« gate communities » aux États-Unis et ailleurs, rues privatisées à Mexico…) qu’en est-il réellement ?

Concernant la France, une analyse de l’évolution de la répartition des revenus fiscaux moyens par commune montre un accroissement régulier de cette disper-sion au sein des aires urbaines françaises au cours de la période 1985–1999. Les variations du coefficient de Gini, calculé sur le revenu fiscal moyen des ménages

22 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

par commune, pour la période 1985–1999 et pour les 20 plus grosses aires urbai-nes françaises (le résultat est convergent pour les 78 aires de plus de 100 000 habitants), montrent une tendance nette à la croissance (cf. Chapitre 12).

La dispersion des revenus fiscaux moyens par commune croît donc sur la période 1985–1999 au sein des aires urbaines françaises. Une analyse plus fine (effectuée notamment sur l’agglomération lyonnaise) montre que ce sont les espa-ces (communes) les moins riches qui voient, par ailleurs, une progression la plus faible de leur revenu fiscal moyen, alors que les communes aux revenus les plus élevées sont également caractérisées par les progressions les plus fortes. Les communes pauvres qui « perdent » sont par ailleurs « quittées » par la population entre 1990 et 1999 et sont situées en première couronne est. Les communes riches qui gagnent sont aussi celles qui sont des lieux privilégiés de localisation des cadres ainsi que des activités de services et ou de haute technologie, et sont situées dans l’Ouest lyonnais.

La croissance des disparités spatiales peut donc s’analyser comme une aug-mentation de la ségrégation, cette dernière étant surtout tirée par les territoires les plus favorisés. Ce qui est d’ailleurs confirmé par d’autres travaux effectués sur les trois aires urbaines de Lyon, Saint-Étienne et Grenoble (cf. chapitre 10). Bresson, Madre et Pirotte (2004) montrent également par une étude économé-trique, portant sur le lien entre étalement urbain et évolution des revenus fiscaux moyens des ménages par commune, que la ségrégation a augmenté entre 1986 et 1999. Ils parlent même d’un accroissement d’un processus de ghettoïsation affectant d’un côté les communes les plus riches et de l’autre les communes les plus pauvres.

Concernant Mexico, pour analyser le processus de ségrégation ont été com-parés les résultats obtenus des distributions des coefficients de marginalité au sein des AGEB1 de la ZMVM durant la période 1990–2000. Au cours des années 1990, les zones ayant un niveau de marginalité le plus élevé s’étendent sur l’es-pace, surtout dans les municipalités voisines de l’État de Mexique. On assiste, en fait, à un double phénomène d’homogénéisation des territoires les moins défavo-risés et au développement d’une proportion importante de territoires à très haute marginalité. La moyenne du coefficient de marginalité a augmenté de 1990 à 2000 (cf. Chapitre 11). Ce qui signifie que la distance augmente entre les extrêmes du coefficient de marginalité, et donc que la ségrégation spatiale augmente.

Au Costa Rica, la forte pression urbaine qu’exerce la croissance démogra-phique sur San José et la dispersion des habitants et des activités ainsi que la spéculation foncière ont produit des ségrégations spatiales importantes. En ce qui concerne l’habitat spontané ou précaire, en 1990, on comptait dans la capi-tale 23 territoires de quartiers informels (precarios), réunissant plus de 18 000 personnes. Huit de ces quartiers (1 000 familles) étaient localisés dans des zones présentant des risques (glissements de terrains, pollution…). La classe moyenne-haute et la classe haute, habitant encore à San José, cherchent à migrer vers des

1 Les AGEB sont les plus petites unités de recensement à Mexico.

Rapport INRETS n° 277 23

Métropolisation, concentration et ségrégation dans les villes...

communes possédant un meilleur « environnement ». Ainsi, communes riches et communes pauvres sont visibles (Ben Amar et Vega, 2003 ; Rosales Montano, 2004).

Ces différents travaux montrent que la ségrégation spatiale est une réalité, et qu’elle se développe au sein des métropoles mais également à différentes échel-les spatiales.

On relèvera également que la croissance de la ségrégation spatiale est surtout tirée par les territoires les plus riches au sein des métropoles (Buisson et Mignot, 2005), au sein d’espaces infrarégionaux comme les cantons suisses (Maillat et Quiquerez, 2005) ou entre régions françaises (Carrincazeaux et Lung, 2005) ou mexicaines (cf. chapitre 9).

Conclusion

La permanence des formes de la métropolisation, ainsi vérifiée et caractérisée, conduit à un constat « pessimiste » d’une continuation des tendances lourdes à la concentration, à l’étalement urbain et à la ségrégation intra-urbaine. Ces grandes tendances ne semblent ainsi laisser que peu de marges de manœuvre pour l’ac-tion publique afin d’en réduire les conséquences environnementales et sociales.

Une des réponses possibles à ces phénomènes à l’œuvre pourrait être, nous l’avions en tout cas supposé, un polycentrisme organisé des villes. C’est, en effet, l’hypothèse d’une possible économie de déplacements par une organisation urbaine autour de polarités secondaires qui nous a conduit à réaliser une recher-che sur la permanence des formes de la métropolisation et de l’étalement urbain (Mignot et al., 2004a).

Les analyses effectuées montrent ainsi qu’il n’y a pas de formes urbaines intrinsèquement plus économes que d’autres en matière de migrations domicile–travail. Elles mettent en évidence dans tous les cas une tendance à une certaine déstructuration des flux au niveau des pôles, qui, ne s’autonomisant pas, contri-buent à l’accroissement des distances domicile–travail. Des prolongements sur ces thèmes sont en cours sur d’autres ensembles urbains, avec l’étude de la situation particulière de la métropole lilloise, d’une part, et l’analyse des déplace-ments internes à la métropole de Mexico (en collaboration avec l’UAM), d’autre part.

Le lien entre polycentrisme et ségrégation intra-urbaine n’a encore été que très peu abordé. L’hypothèse serait que recréer de la centralité en périphérie permettrait de réduire la ségrégation spatiale. Il s’agit d’un nouveau champ de recherches que nous esquissons par une comparaison de plusieurs aggloméra-tions françaises (Lacour et al., 2004) et par un nouveau programme de recher-ches comparatives entre la France et le Mexique.

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Rapport INRETS n° 277 27

Permanence des formes des métropoles :

le cas de la zone métropolitaine de la Ville de Mexico

Diana Rebeca Villarreal González

L’objectif de ce chapitre est de présenter une partie des résultats de la recher-che comparative France–Mexique, pour laquelle, nous avons posé comme hypo-thèse centrale la permanence des tendances lourdes à la métropolisation et à la ségrégation des populations et des activités. L’analyse est ici ciblée sur la zone métropolitaine de la Ville de Mexico (ZMVM), troisième zone la plus peuplée au niveau mondial et centre national des activités économiques, politiques, culturel-les et administratives du pays.

Buisson et al. (2001) partent des analyses économiques faites pour les pays développés et les effets sur les métropoles du processus d’internationalisation de l’économie. Ils signalent qu’il « s’accompagne d’une modification de la struc-ture des activités économiques et se traduit par une nouvelle répartition spatiale des activités et de la population. Les grandes métropoles, caractérisées par une concentration sélective des populations et d’activités, en particulier les services aux entreprises et les activités technologiques, attirent une population croissante et s’étalent sur leur périphérie. Les deux phénomènes de concentration sélective des activités forment les composantes essentielles de l’évolution des grandes villes » (Buisson et al., 2001 : 272).

Pour la ZMVM, nous pouvons observer le même processus, mais la ques-tion est de mettre en évidence les caractéristiques spécifiques des métropoles des pays en voie de développement. Nous montrerons les effets du changement de modèle économique sur la localisation des activités économiques et la ten-dance à la spécialisation dans les services du tertiaire supérieur pour tenter de remplir certaines fonctions des villes mondiales secondaires semi-périphériques (Friedman, 1986). Nous mettrons également en évidence les changements de localisation des activités économiques de la ZMVM après l’ouverture au marché extérieur, l’entrée du Mexique au GATT, en 1986, et la signature du Traité du libre commerce (NAFTA) avec les États-Unis et le Canada en 1994. Nous montrerons que la ZMVM est devenue polycentrique (Lacour, 1999) avec la formation de

28 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

sous-centres qui sont en train d’intégrer un territoire plus vaste avec les autres zones métropolitaines de la région centrale.

Les processus de concentration et d’étalement urbain sont semblables aux autres métropoles, caractérisés par une expansion de la population du centre vers la périphérie et la concentration des activités du tertiaire au centre-ville, ainsi que la délocalisation des activités industrielles vers les municipalités de la périphérie de la Ville de Mexico. Mais, après la crise économique des années 1982–1987 et le changement de modèle économique, la croissance de la population de la Ville de Mexico s’est arrêtée et les flux des migrations se sont dirigés vers les munici-palités conurbées de l’État de Mexico, ainsi que vers les zones métropolitaines de la région centrale, surtout les villes de la frontière nord.

Avec la crise économique, la Ville de Mexico a subi un processus de désin-dustrialisation, car le nouveau modèle, basé sur les exportations, a affecté les industries nationales non compétitives et non habituées à la concurrence des entreprises étrangères, surtout les industries lourdes et de biens intermédiaires. Une grande partie d’entre elles ont dû fermer et les grandes et moyennes indus-tries dédiées aux exportations se sont délocalisées vers les villes du centre et de la frontière Nord. Au niveau local, les nouveaux pôles de développement indus-triel se concentrent autour de l’autoroute appelée « NAFTA » (du nom du Traité du Libre Commerce avec les États-Unis et le Canada ; TLC en français), où se sont installées les nouvelles entreprises qui produisent surtout pour le marché extérieur.

D’une part, la Ville de Mexico a perdu de l’importance au niveau national dans le secteur industriel et est marquée par une tendance à la spécialisation dans certaines branches industrielles et une prédominance des activités du secteur tertiaire. D’autre part, les municipalités conurbées de l’État de Mexico, conti-nuent à être très industrialisées. De nouveaux pôles du développement industriel apparaissent, ainsi que des commerces et des services localisés sur l’autoroute NAFTA. Ces municipalités sont localisées au nord de la Ville de Mexico, tandis que les couches de populations aux revenus les plus faibles habitent vers l’est.

Pour analyser l’expansion horizontale de la ZMVM, nous utilisons les données des recensements de la population et des logements faites pour l’INEGI2 pour la période 1980–2000. Pour analyser les effets du changement du modèle économi-que, la période retenue est 1988–1999, car ce sont les années des recensements économiques faits par l’INEGI.

1. La ZMVM et la région Centrale

La région centrale est composée par la Ville de Mexico et les États de Mexico, Morelos, Puebla, Tlaxcala, Hidalgo et Querétaro. Des auteurs comme Garza Villarreal (2000) affirment que, depuis 1980, la mégapole de la région Centrale intègre même la ZM de Toluca, ville Capitale de l’État de Mexico, et intégrera à

2 INEGI : Institut National des Statistiques, Géographie et Informatique.

Rapport INRETS n° 277 29

Permanence des formes des métropoles : le cas de la ZMV de Mexico

l’horizon 2050 les zones métropolitaines de Cuernavaca et Cuautla, de l’État de Morelos (à 60 et 102 km), la ZM de Puebla-Tlaxcala (130 km), la Ville de Pachuca (Ville capital de l’État de Hidalgo, à 92 km) et la ZM de Querétaro-San Juan del Río (à 175 km) (Illustration 1).

Actuellement, nous pouvons constater l’existence de corridors sur les princi-pales autoroutes, surtout l’autoroute NAFTA qui part de la ZM de Toluca et tra-verse la ZM de la Ville de Mexico, en direction de la ZM de Querétaro. Le corridor intègre les municipalités localisées dans la sous-région (axe 6) où se trouvent les nouveaux sous-pôles comme nous le verrons plus loin. Il y a donc, actuellement, un corridor entre les villes de San Juan del Rio et Querétaro. Les autres corri-dors sont localisés sur l’autoroute Puebla-Tlaxcala et sur l’autoroute de la Ville de Mexico vers les Villes de Pachuca et Tula, Hidalgo.

Tableau 1 : population des zones métropolitaines de la région Centrale du Mexique 1980–2000

Population PourcentagesTaux de croissance

moyenne annuel (TCMA)

1980 1990 1995 2000 1980 1990 1995 20001980-1990

1990-1995

1990-2000

1995-2000

Total national 66 846 833 81 249 645 91 120 433 97 483 412 100 100 100 100 2 1,2 1,8 0,7

ZM Ville de Mexico 12 994 450 15 274 256 16 674 160 17 786 983 19,4 18,8 18,3 18,2 1,6 0,9 1,5 0,6

ZM Puebla Tlaxcala 1 423 781 1831 418 1 561 558 2343 073 2,1 2,3 1,7 2,4 2,5 -1,6 2,5 4,1

ZM Toluca 597 350 827 163 1 080 081 1 251 462 0,9 1 1,2 1,3 3,3 2,7 4,2 1,5

ZM Queretaro 363 435 555 491 679 757 785 648 0,5 0,7 0,7 0,8 4,3 2 3,5 1,5

ZM Cuernavaca Cuautla

462 267 604 266 879 574 963 128 0,7 0,7 1 1 2,7 3,8 4,8 0,9

ZM Pachuca 142 390 201 450 249 036 286 907 0,2 0,2 0,3 0,3 3,5 2,1 3,6 1,4

Total région centrale

15 983 673 19 294 044 21 124 166 23 417 201 23,9 23,7 23,2 24 1,9 0,9 2 1

Source : INEGI. Recensement de la population en 1980,1990 et 2000. Compte de la population 1995.

Le Tableau 1 montre que la région centrale garde son importance relative par rapport au total national, mais différentes tendances apparaissent entre les zones métropolitaines qui la composent.

Pour la période 1980 à 2000, la population de la ZMVM a diminué en impor-tance relative de 19,4 à 18,2 % de la population totale nationale en même temps qu’augmentait l’importance relative des autres zones métropolitaines de la région Centrale. Nous constatons ainsi que la population de la ZMVM semble mon-trer une tendance à la décroissance, alors que les autres zones métropolitaines augmentent avec des taux supérieurs à la croissance nationale, spécialement Puebla-Tlaxcala, Toluca, Cuernavaca-Cuautla et Querétaro. On peut penser qu’il y a eu un renversement des tendances lourdes des flux de populations, lesquelles cherchent les nouveaux pôles d’emplois.

30 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Illustration 1 : développement métropolitain de la région Centrale du Mexique

Expansionmétropolitaine

ZMVM – 2000

Source : Garza Villarreal, 2000.

Pour l’année 2001, la région Centrale contribue pour 41,9 % au PIB national et concentre 32,9 % de la population du Mexique. Ceux qui apportaient le plus au PIB étaient la Ville de Mexico (22,7 %), l’État de Mexico (10,7 %), Puebla (3,4 %), Querétaro (1,7 %), Hidalgo et Morelos avec 1,4 %.

2. L’expansion métropolitaine 1980–2000

Notre analyse est centrée sur chacune des deux parties de la ZMVM, c’est-à-dire la Ville de Mexico (avec ces 16 délégations) et les 43 municipalités conur-bées de l’État de Mexico. Nous prenons la définition de la zone métropolitaine d’Unikel (2000), selon laquelle sont inclus les territoires des délégations et les municipalités définies comme entités politiques.3 Pour l’année 2000, nous pre-nons les municipalités de l’État de Mexico analysées par l’INEGI.

3 L’aire métropolitaine de la Ville de Mexico définie par Garza Villarreal et Ruiz Chiapetto (2000) sur la base physique de la ville est le tissu occupé par tout type de constructions, infrastructure et équipement qui s’étalent de son centre vers les autres directions, de forme plus ou moins continue. Elle s’étend en 1995, sur une superficie de 592 442 ha. dont le District Fédéral (Ville de Mexico) en occupe 25 %, les 24 municipalités de l’État de Mexico conurbées et les autres 25 municipalités périphériques en occupant 75 %..

Rapport INRETS n° 277 31

Permanence des formes des métropoles : le cas de la ZMV de Mexico

Pour analyser la croissance démographique de la Ville de Mexico, nous pre-nons le centre, composé de quatre délégations, la première couronne avec sept délégations, la deuxième couronne, avec quatre délégations, et la troisième, avec la dernière délégation. Pour les municipalités conurbées de l’État de Mexico, nous prenons les sous-régions (axes) utilisées par le Gouvernement de l’État de Mexico pour son Programme de réorganisation urbaine (Programa de Reordenamiento de los Asentamientos Humanos).

La première caractéristique que présente la ZMVM est la grande concentration de la population et une occupation de plus en plus grande de l’espace, du fait de l’étalement de la population. En 1980, la population comptait 12 994 450 millions d’habitants, et elle en compte 17 786 983 millions en 2000.

Tableau 2 : expansion de la zone métropolitaine de la Ville de Mexico, 1990–2005

État / Région Population (en milliers)%

1990%

2000%

2005TCMA*

1990 2000 2005 1990-2000 2000-2005

ZMVM 15 500 17 958 19 083 100 100 100 1.59 1.25

Ville de Mexico 8 172 8 508 8 489 52,7 47,4 44,5 0,41 –0,05

État de Mexico 7 328 9 449 10 594 47,3 52,6 55,5 2,89 2,42

Centre-Ville 1 930 1 692 1 760 12,4 9,4 9,2 –1,23 0,81

1° Contour 5 084 5 339 5 295 32,8 29,7 27,7 0,50 –0,17

2° Contour 1 158 1 476 1 353 7,5 8,2 7,1 2,75 –1,68

3° Contour 64 96 81 0,4 0,5 0,4 5,20 –3,24

Axe 1 1 513 2 077 2 337 9,8 11,6 12,2 3,73 2,50

Axe 2 146 205 234 0,9 1,1 1,2 4,04 2,79

Axe 3 263 376 431 1,7 2,1 2,3 4,32 2,93

Axe 4 1 771 2 550 2 912 11,4 14,2 15,3 4,40 2,83

Axe 5 440 424 478 2,8 2,4 2,5 –0,35 2,54

Axe 6 2 462 3 075 3 411 15,9 17,1 17,9 2,49 2,18

Axe 7 540 798 915 3,5 4,5 4,89 4,77 2,90

Axe 8 143 209 245 0,9 1,2 1,3 4,52 3,42

* Taux de croissance moyenne annuelSource : élaboration propre sur la base des données de l’INEGI, Cuaderno Estadístico de la Zona Metropolitana de la Ciudad de México Cuadro 3.3 y gráficas 3.a y 3.b. Et INEGI (2005) Conteo de Población y Vivienda para el Distrito Federal y los municipios conurbados del Estado de México.

Pendant l’étape du modèle économique des « substitutions des importations » (1945–1980), la Ville de Mexico a eu des taux de croissance de la population très élevés. Mais, à partir des années 1980, il y a eu un renversement de tendance, puisque la population a augmenté avec des taux très bas de 0,2 et 0,4 % pour les périodes 1980–1990 et 1990–2000. La Ville de Mexico a, en 2000, 8 508 466 habitants, c’est-à-dire 47,4 % de la métropole, tandis que les municipalités conur-bées ont 9 449 563 habitants, c’est-à-dire 52,6 % de la population de la ZMVM.

32 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Le taux de croissance de la population pour la période 1990–2000 est de 2,9 % en moyenne, et dans l’État de Mexico, les sous-régions (axes 5 et 6) ont des taux plus bas. La sous-région 6 est la plus industrialisée (Tableau 2, Illustration 2).

Illustration 2 : expansion de la zone métropolitaine de la Ville de Mexico 1990–2000

Sous-régions ou axes de l’État de Mexico – Municipalités conurbées

AxeAxe Axe

Axe

Axe

Axe

Axe

Axe

Note : les pourcentages, qui correspondent à la ZMVM, sont les délégations et les municipalités conurbées de la classification de l’INEGI, Cuaderno Estadístico de la Zona Metropolitana de la Ciudad de México, Cuadro 3.3 pp. 46–47 y Gráficas 3.a y 3.b p. 44Source : élaboration propre, Garza Villarreal, 2000.

Jusqu’en 1940, il y a eu un processus de concentration et de centralisation des activités et de la population dans le centre-ville. Durant la période 1940–1950, a commencé la déconcentration de la population dans la Ville de Mexico du centre vers les délégations de l’est et du nord, et pour le Sud vers le sud-est. En même temps, le processus d’industrialisation vers le nord de la Ville de Mexico s’est amorcé, tandis que les activités financières et de commerce aussi bien que les bâtiments des secrétariats du Gouvernement Fédéral et du District Fédéral se sont concentrés dans les délégations du centre-ville.

Durant la période 1950–1960, l’expansion des activités industrielles a conti-nué vers les municipalités au nord de l’État de Mexico, Naucalpan, Ecatepec et Tlanepantla, ainsi que vers Chimalhuacán (à l’est). Dans ces municipalités, la popu-

Rapport INRETS n° 277 33

Permanence des formes des métropoles : le cas de la ZMV de Mexico

lation a augmenté avec un taux de 13,4 % par an. En 1970, s’y ajoutent les munici-palités de Cuautitlán, La Paz, Huixquilucan, Tultitlán, Coacalco et Nezahualcóyotl, qui ont eu un taux de croissance de la population de 18,6 % par an.

Pour la période 1970–1980, les délégations du centre ont commencé à perdre certains groupes de la population, car les quatre délégations ont eu des taux de croissance négatifs de –1 % par an. Les délégations du sud et de l’est, localisées dans la première couronne, ont enregistré des taux de croissance entre 7 et 9 % par an, surtout Iztapalapa, Cuajimalpa, Tláhuac, Tlalpan, Magdalena Contreras et Xochimilco. Les municipalités de l’État de Mexico qui se sont conurbées dans cette période sont : Chalco, Chiautla, Chicoloapan, Chinconcuac, Ixtapaluca, Nicolas Romero, Tecamac et Texcoco (cf. Annexe 1).

Le District Fédéral a commencé à perdre sa population à partir des années 1980, surtout les délégations centrales, ainsi que quelques-unes de la deuxième couronne. Le centre-ville a eu des taux de croissance négatifs (–1,9 et –1,3 %) pour les deux périodes, ainsi que la deuxième couronne avec les délégations A. Obregón, Coyoacán G. A. Madero, Azcapoztalco et Iztacalco. Par contre, la popu-lation a augmenté avec des taux positifs dans les délégations du sud qui ont des terrains de réserve écologique, lesquels servent de réservoirs pour l’eau de pluie et contribuent à la conservation du milieu naturel : il s’agit de Tláhuac, Xochimilco, Tlalpan et Cuajimalpa, et aussi Milpa Alta pour la troisième couronne.

Une des différences spécifiques par rapport aux pays développés comme la France, est la tolérance des autorités des gouvernements de la Ville de Mexico et de l’État de Mexico aux occupations illégales des terrains par des groupes de populations. Même si l’actuel gouverneur, López Obrador, a suivi une politique visant à chasser quelques groupes, on peut signaler qu’il y a des zones de réser-ves naturelles qui sont totalement occupées comme c’est le cas des collines Del Chiquihuite et aussi de Santa Catarina dans la Délégation Iztapalapa.

On peut expliquer le déplacement de la population vers les délégations du sud comme le résultat des anciennes politiques urbaines, telles que l’interdiction de nouveaux lotissements et la construction d’avenues dans les années 1960 et des axes forts dans les années 1970. Ces politiques ont conduit à un déplacement d’importants groupes d’habitants du centre-ville sans leur donner d’alternatives pour se reloger.

Le mouvement de la population vers les municipalités de l’État de Mexico qui entourent la Ville de Mexico a commencé dans les années 1950, avec la construction du périphérique qui relie les municipalités du nord avec les déléga-tions de l’ouest et du sud. À la même époque, le Département du District Fédéral a construit le Viaduc Piedad qui relie les délégations de l’est avec le périphérique et aussi le Viaduc Tlalpan qui relie les délégations du sud avec le centre-ville. C’est à partir de ces années que la taille des municipalités localisées au nord-ouest a augmenté, du fait des programmes de construction des maisons ou de la vente des lotissements (fraccionamientos)4 pour les couches de population à revenu

4 Fraccionamientos : lotissements des terrains fractionnés et urbanisés.

34 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

moyen et élevé. Plus au Nord, il y a eu des programmes de constructions d’habi-tations à loyer modéré (HLM) pour les travailleurs salariés inscrits au programme officiel tels que l’Infonavit. En même temps, la population à revenus plus bas s’est déplacée vers la Délégation Iztapalapa et à l’est, sur les terrains desséchés du Lac de Texcoco. Certaines municipalités de l’État de Mexico, conurbées à la Ville de Mexico, ont des taux de croissance explosifs et une taille de population qui dépasse le million d’habitants ; c’est le cas d’Ecatepec, qui compte une population de 1 662 697 habitants et Nezahualcóyotl, qui en compte 1 225 972.

Nous pouvons ainsi confirmer la tendance à la déconcentration de la popula-tion vers la périphérie et aussi l’expansion vers les autres zones métropolitaines de la région Centrale.

3. Les tendances de l’activité économique

Pendant l’étape du modèle de « substitution des importations » le taux de croissance du PIB du Mexique était de 6 % en moyenne et de 6,7 % pour l’aire métropolitaine (AM) de la Ville de Mexico5. La concentration des activités éco-nomiques dans l’AM de la Ville de Mexico6 peut être identifiée si nous prenons la contribution au PIB national. La part de l’AM de la Ville de Mexico dans le PIB national passe de 37,7 % en 1980 à 31,8 % en 1988. En 1980, l’AM de la Ville de Mexico contribuait à hauteur de 40 % du PIB du secteur secondaire et de 40 % du PIB du secteur tertiaire. Pour l’année 1988, cette part était descendue respec-tivement à 31 et 35 %.

Cette tendance à la baisse relative du poids de l’AM se poursuit durant la période 1993–2000. La Ville de Mexico apportait en 1993, 24 % du PIB national et n’apporte plus, en 2000, que 22,8 %. Elle constitue, cependant, l’entité qui contribue le plus parmi les 32 entités fédératives.

La spécialisation de la Ville de Mexico dans les activités tertiaires peut être observée par la participation au PIB national. En 1993, la Ville de Mexico contri-buait pour 49 % au PIB des services bancaires (imputés), pour 33 % au PIB des services communs, sociaux et personnels, pour 26,5 % à celui des transports et des communications, pour 25,5 % au PIB des services financiers, agences d’as-surances, immobiliers et de loyers, pour 26,7 % au PIB du secteur de la construc-tion et pour 24 % à celui du secteur du commerce, restaurants et hôtels. Pour l’industrie, le poids est plus faible, la Ville de Mexico ne contribuant à l’époque qu’à hauteur de 21,7 % au PIB de l’industrie manufacturière.

En 2000, il y a eu une plus grande concentration dans les services bancaires, car la Ville de Mexico a contribué à 59,5 % du PIB national et à 35 % du PIB natio-nal des services communs, sociaux et personnels. Mais, la part des autres grands secteurs a faibli et le processus de désindustrialisation a continué dans la Ville de Mexico qui ne contribue plus qu’à 18,5 % du PIB manufacturier.

5 L’aire métropolitaine comprend seulement l’espace construit.6 Sobrino (2000) utilise la définition de Unikel (2000) de l’aire métropolitaine qui prend en compte seulement l’espace urbain.

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Permanence des formes des métropoles : le cas de la ZMV de Mexico

L’indice de spécialisation des grands secteurs montre la perte d’importance du secteur manufacturier dans la Ville de Mexico, avec un indice qui est passé de 1,18 en 1985 à 0,88 en 1993 (un indice supérieur à 1 sur un territoire reflète la sur-représentation du secteur d’activité sur ce territoire, par rapport au niveau national). La spécialisation des activités tertiaires concerne surtout les services communs, avec un indice de 1,47 en 2000, tandis que l’indice des services finan-ciers était de 1,25, celui des transports et communications de 1,11 et celui des commerces, restaurants et hôtels de 1,01. L’État de Mexico se spécialise seule-ment dans le secteur manufacturier avec un indice de 1,61.

En 1985, la Ville de Mexico s’est spécialisée dans quatre branches manufactu-rières : la branche 32 (industrie textile et confection de vêtements), la branche 34 (papier, produits du papier, imprimerie), la branche 35 (substances chimiques et dérivées du pétrole) et la branche 38 (fabrication des produits métalliques, machi-nerie et équipement). Après la crise des années 1980, le processus d’ouverture commerciale et la signature du TLC, la Ville de Mexico n’est plus spécialisée en 2000 dans les branches de l’industrie textile et de l’habillement et très peu dans la branche des produits métalliques avec un indice de 1,03. Les spécialisations les plus importantes sont la branche 34 (avec un indice de 1,91), la branche 35 (indice de 1,48) et les autres industries (indice de 1,35).

Pendant la même période, l’État de Mexico s’est spécialisé dans les mêmes branches que la Ville de Mexico plus la branche 36 (produits minéraux non métal-liques). En 2000, seules les branches 32 et 36, ont disparu (Tableau 3).

Tableau 3 : indice de spécialisation des branches de l’industrie manufacturière de l’État de Mexico

Années

Alimen-tation,

boissons et tabac

Textile, habille-ment

et cuir

Indus-trie du

bois

Industrie du papier, imprimerie et édition

Produits chimiques, caoutchouc et plastique

Produits minéraux

non métalliques

Industries métal-liques

basiques

Produits métalliques,

machines et équipe-

ments

Autres industries manufac-tu-rières

1970 0,54 0,9 0,59 1,53 1,08 1,18 0,97 1,6 0,94

1975 0,47 0,95 0,57 1,43 1,14 1,35 1,05 1,56 1,2

1980 0,42 1 0,55 1,25 1,12 1,21 0,96 1,53 1,1

1985 0,7 0,93 0,73 1,05 1,14 1,05 0,91 1,32 1,22

1993 0,82 1,11 0,58 1,04 1,16 0,94 0,79 1,19 0,68

1994 0,84 1,13 0,59 1,04 1,15 0,96 0,81 1,17 0,68

1995 0,87 0,97 0,58 1,08 1,11 0,95 0,94 1,2 0,59

1996 0,9 0,98 0,58 1,07 1,09 0,95 0,96 1,15 0,65

1997 0,9 0,97 0,6 1,05 1,13 0,94 0,85 1,14 0,64

1998 0,9 0,95 0,64 1,09 1,14 0,92 0,92 1,11 0,64

1999 0,91 0,94 0,65 1,1 1,18 0,9 0,9 1,08 0,64

2000 0,89 0,91 0,64 1,1 1,12 0,83 0,83 1,15 0,61

2001 0,89 0,83 0,63 1,02 1,12 0,84 0,84 1,18 0,64

Note : entre 1970 et 1985, les données sont quinquennales.Source : élaboration propre sur la base des donnés de l’INEGI. Sistema de Cuentas Nationales de Mexico.

36 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Pour mettre en évidence les activités dynamiques et aussi pour souligner la spécialisation des activités tertiaires de la Ville de Mexico, en 2000, nous avons pris en compte les 15 sous-branches qui apportent le plus de valeur ajoutée. On peut constater que la Ville de Mexico se spécialise dans les activités tertiaires comme les services professionnels, les communications et transports, et dans les activités de commerce et de loisirs.

Les services professionnels, techniques et spécialisés apportent 20,9 % de la valeur ajoutée et ces secteurs emploient 14,7 % de la population active ; de plus, les services éducatifs privés apportent 1,6 % de la valeur ajoutée. Dans le secteur du commerce, les sous-branches sont le commerce des produits non alimentaires (qui apporte 11,4 % de la valeur ajoutée), le commerce des produits alimentaires, boissons et tabac en gros (2,9 %), le commerce de produits non alimentaires au détail dans des établissements spécialisés (1,5 %) et les restaurants, bars et centres nocturnes (1,5 %).

Dans les 15 sous-branches les plus importantes, les services des transports de personnes contribuent à hauteur de 3 % de la valeur ajoutée et les trans-ports aériens y participent pour 1,6 %. Il y a seulement quatre sous-branches industrielles dynamiques : l’industrie pharmaceutique (3,4 % de la valeur ajoutée), l’imprimerie et édition (12,7 %), la fabrication des autres substances et produits chimiques (2,8 %) et les boulangeries (1,4 %) (Tableau 4).

L’État de Mexico est caractérisé par huit sous-branches industrielles impor-tantes. Il faut noter que la branche 38 a trois sous-branches, dont la plus impor-tante est l’industrie automobile (6,7 % de la valeur ajoutée), puis l’élaboration des autres produits métalliques (4,9 %) et la fabrication d’équipements et accessoires électriques (2,7 %). La branche 35 (élaboration des produits chimiques) a éga-lement trois sous-branches : la fabrication des produits en plastique (3 % de la valeur ajoutée), la fabrication des substances chimiques (à l’exclusion de la pétro-chimique, 2,5 %) et la fabrication des autres substances et produits chimiques (3,8 %). Les deux dernières sous-branches industrielles sont la fabrication des autres produits alimentaires pour la consommation humaine (2,3 %) et l’industrie des boissons (2,3 %). De plus, il faut souligner que la production d’énergie élec-trique apparaît comme le secteur qui apporte le plus à la valeur ajoutée de l’État de Mexico. Pour l’État de Mexico, les autres sous-branches importantes sont le tertiaire, le commerce de produits non alimentaires, les services professionnels techniques et spécialisés et les services de transports des personnes.

Nous avons pris en compte, pour la localisation des activités dynamiques, seu-lement les branches du secteur tertiaire, et pour le secteur manufacturier, nous avons supprimé les boulangeries.

4. Localisation des activités dynamiques et confirmation des nouveaux sous-pôles

La localisation par zones des branches dynamiques dans la Ville de Mexico nous montre, tout d’abord, la concentration dans le centre-ville d’une seule sous-

Rapport INRETS n° 277 37

Permanence des formes des métropoles : le cas de la ZMV de Mexico

branche manufacturière, celle de l’imprimerie et édition, qui comprend 61,8 % des entreprises, 59 % du personnel occupé et 57,5 % de la valeur ajoutée. Le secteur tertiaire est plus concentré, car les services professionnels, techniques et spécialisés comprennent 69,9 % des entreprises et du personnel occupé et contribuent à 79,4 % de la valeur ajoutée de la sous-branche. Il y a aussi une très forte concentration des services de transport aérien, restaurants, bars et hôtels, communications et commerce des produits non alimentaires.

On peut ensuite mettre en évidence une décentralisation des activités indus-trielles vers la première couronne où se localisent les sous-branches de l’industrie pharmaceutique (52,3 % de la valeur ajoutée), la fabrication des autres substan-ces chimiques (58,5 %), les boulangeries (71,2 %), les activités de commerce, les services de transport de passagers et les services éducatifs du secteur privé. Dans la deuxième couronne, la sous-branche manufacturière des matériaux pour la construction est très présente (83,8 % de la valeur ajoutée de la sous-branche).

Les activités dynamiques se localisent dans les municipalités conurbées de l’État de Mexico situées autour des axes ou dans les sous-régions 1 et 6 (cf. Annexe). L’axe ou sous-région 6, comprend 15 municipalités, dont seule-ment 13 entrent dans la ZMVM. Les municipalités les plus industrialisées sont, Naucalpan et Tlanepantla, et également les premières qui ont été intégrées au District Fédéral. Les nouveaux pôles sont : Cuautitlán Izcalli et Tultitlán. Dans les municipalités de l’axe 6 se concentrent 77 % de la valeur ajoutée de la fabrica-tion des autres produits métalliques (hors machinerie), 64,6 % de la fabrication des produits en plastique, 51 % de la fabrication ou assemblage des machines, équipements et produits électriques, 50 % de la fabrication des autres produits ali-mentaires pour la consommation humaine, 44,9 % de la fabrication des boissons, 36,7 % de la fabrication des substances chimiques (à l’exclusion de la pétrochimi-que) et 32,5 % de l’industrie automobile. Les branches les plus dynamiques sont les services professionnels (64 % de la valeur ajoutée de l’État de Mexico) et le commerce des produits non alimentaires (80 % de la valeur ajoutée).

L’axe 1 comprend quatre municipalités, lesquelles montrent aussi une concen-tration des activités dynamiques, surtout Ecatepec qui est un des anciens pôles de développement industriel. C’est le cas des sous-branches de la fabrication des autres substances et produits chimiques (28 % de la valeur ajoutée de l’État de Mexico), la fabrication de substances chimiques, à l’exception de la pétrochimi-que basique, (26,7 %) et la fabrication des autres produites alimentaires pour la consommation humaine (18 %).

Les axes 2 et 3 apparaissent comme peu dynamiques. Ils ne sont caractérisés que par une seule sous-branche, la fabrication des autres substances et produits chimiques, 7,8 % de la valeur ajoutée de l’État de Mexico pour l’axe 2 et 2,5 % pour l’axe 3. Cette spécialisation liée à l’autoroute en direction de la Raffinerie de Hidalgo ne semble pas entraîner d’autres activités.

L’axe 4 est caractérisé par trois sous-branches manufacturières : l’industrie des boissons (12,5 % de la valeur ajoutée), la fabrication des substances chimiques (sans inclure la pétrochimique basique) et la fabrication des produits en plastique.

38 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

L’axe 7 concentre les sous-branches de la fabrication des autres substances et produits chimiques (3,4 % de la valeur ajoutée) et la fabrication des produits en plastique (3,23 %).

Pour les municipalités conurbées, nous pouvons constater que le développe-ment économique se concentre sur les axes qui se localisent autour des gran-des autoroutes comme c’est le cas de l’axe 6, bien relié par l’autoroute NAFTA, et aussi Ecatepec, situé sur l’autoroute qui se dirige vers Pachuca et vers Tula Hidalgo où se localise la Raffinerie de Pemex. Tandis que la population est locali-sée dans les municipalités de l’Est, qui possèdent également des activités manu-facturières non enregistrées ou informelles.

Illustration 3 : principales activités économiques des délégations du District Fédéral

Rapport INRETS n° 277 39

Permanence des formes des métropoles : le cas de la ZMV de Mexico

Tableau 4 : les 15 secteurs les plus dynamiques de la Ville de Mexico et des municipalités conurbées

District fédéral Municipalités de l’État de Mexico à la ZMVM

Secteurs (classification)Nombre d’entre-prises

Personnel occupé

Valeur Ajoutée Brut*

Secteurs (classification)Nombre d’entre-prises

Personnel occupé

Valeur Ajoutée Brut*

Données brutes 344 077 2 440 205 351 319 758 Données brutes 326 173 1 337 360 168 445 234

Pourcentages Pourcentages :

Services professionnels techniques et spécialisés (9510)

4,6 14,7 20,9 Services professionnels techniques et spécialisés (9510)

1,8 5,2 2,7

Commerce des produits non alimentaires (6120)

3,2 5,2 11,4 Commerce des produits non alimentaires (6120)

2,5 3,9 8,3

Communications (7200) 0,1 3,2 15,7 Fabrication de machines, équipements et accessoires électriques (3831)

0,1 1,3 2,7

Commerce de gros des produits alimentaires, boisons et tabac (6140)

1,4 2 2,9 Fabrication des autres produits métalliques sauf machines et équipements (3814)

0,3 2 4,9

Commerce de détail des produits non alimentaires (6230)

22,6 7,7 4,8 Production d’énergie électrique (4100)

SD 0,9 3,9

Industrie pharmaceutique (3521)

0,1 1,1 3,4 Industrie automobile (3841)

0,1 2,9 6,7

Autres transports de voyageurs (7113)

0,2 3,5 3 Production des autres produits alimentaires pour la consommation humaine (3121)

0,2 0,6 3,8

Imprimerie, édition et autres (3420)

1,3 2,3 2,7 Industrie des boissons (3130)

0,1 0,8 2,3

Production des autres matières et produits chimiques (3522)

0,2 1,3 2,8 Commerce de détail des produits non alimentaires (6230)

20,8 9,2 3,8

Services éducatifs privés (9211)

1,5 3,3 1,6 Autres transports de voyageurs (7113)

0,5 3,9 2,7

Transport aérien (7130) SD 0,9 1,6 Production des produits en plastique (3560)

0,2 2,6 3

Commerce des produits alimentaires, boisons et tabac dans des établissements spécialisés (6210)

22,4 4,9 1,5 Industries des substances chimiques, sauf la pétrochimie basique (3512)

0,1 0,8 2,5

Restaurants, bars et centres nocturnes (9310)

8,9 6 1,5 Production des autres matières et produits chimiques (3522)

0,1 1,4 3,8

Production des produits de boulangerie (3115)

0,7 1,3 1,4

Production, assainissement des services d’eau (4200)

SD 0,5 1,3

Sous total des 15 secteurs

67,2 57,9 76,5 Sous total des 15 secteurs

57,2 49,1 57,1

Sous total des autres secteurs

32,8 42,1 23,6 Sous total des autres secteurs

42,8 50,9 42,9

* Pesos courantsSource : Institut national de Statistiques / Géographie et Informatique - http://www.inegi.gob.mx

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Les formes de la métropolisation

Conclusion

La ZMVM a traversé une phase de restructuration économique très impor-tante. Les activités qui se sont développées récemment, les plus dynamiques, peuvent être analysées comme celles qui aident au développement endogène de la mégalopole et qui ont des effets de synergie sur les municipalités, les zones métropolitaines et les villes voisines. La spécialisation des activités économiques de la Ville de Mexico peut être appelée de « tertiaire supérieur » ce qui, pour certains auteurs, signifie la transition vers une ville mondiale, pour remplir des fonctions de liaison entre les centres financiers internationaux et les métropoles de l’Amérique Latine.

La croissance éclatée de la ZMVM continue sans rapport direct entre les activi-tés dynamiques et les lieux où habite la population, ce qui augmente l’urgence de la résolution des graves problèmes de mobilité quotidienne de la population.

Récemment, les trois gouvernements (Fédéral, de l’État de Mexico et du District Fédéral) se sont mis d’accord pour la réalisation de la liaison ferroviaire suburbaine qui reliera les municipalités les plus peuplées de l’État de Mexico et des délégations de la deuxième couronne. Par ailleurs, il faut signaler que le gouvernement de la Ville de Mexico a programmé des politiques urbaines qui vont affecter la forme urbaine métropolitaine, car il a de grands projets pour le centre-ville. Par exemple, il a dessiné le grand Project du Corridor Alameda–Reforma–Santa Fe, où se localisent les grands bâtiments « intelligents » pour le secteur financier et où les grandes entreprises transnationales ont leurs bureaux d’affaires. Il y a aussi le projet de construire plus de 60 000 logements pour les couches moyennes dans les délégations centrales, projet qui s’accompagne de l’interdiction de vendre des terrains à la périphérie et de construire de nouvel-les maisons. Par contre, la tendance à privilégier l’usage de l’automobile et non celui des transports en commun prédomine, tandis que le métro est utilisé par au moins cinq millions de personnes par jour. La tendance à l’éclatement urbain sans aucune planification réelle contribue à créer une situation chaotique pour la plus grande partie de la population et des effets négatifs sur l’agglomération, telles que la congestion du trafic avec ses effets sur la perte de temps et la productivité pour la plupart des citadins.

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Permanence des formes des métropoles : le cas de la ZMV de Mexico

Bibliographie

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Les formes de la métropolisation

Annexes

Annexe 1. Expansion de la zone métropolitaine de la Ville de Mexico, 1990–2005

DélégationsPopulation (en milliers)

% 2000

% 2005

TCMA

1990 2000 20051980-1990

1990-2000

2000-2005

ZMVM 15 501 17 958 19 083 100 100 2,35 1,48 1,25

District Federal 8 172 8 508 8 489 47,4 44,5 0,24 0,40 –0,05

Estado de México 1/ 7 328 9 450 10 594 52,6 55,5 5,47 2,57 2,42

Venustiano Carranza 520 463 486 2,6 2,5 –1,97 –1,15 0,99

Benito Juárez 408 360 370 2,0 1,9 –1,63 –1,23 0,53

Miguel Hidalgo 407 353 364 2,0 1,9 –2,07 –1,42 0,67

Cuauhtémoc 596 516 540 2,9 2,8 –2,07 –1,43 0,93

Cuajimalpa de Morelos 120 151 137 0,8 0,7 3,52 2,37 –1,90

Iztapalapa 1 490 1 773 1 697 9,9 8,9 2,63 1,75 –0,87

Álvaro Obregón 643 687 677 3,8 3,5 1,20 0,67 –0,29

Coyoacán 640 640 653 3,6 3,4 1,69 0,01 0,41

Gustavo A. Madero 1 268 1 236 1 257 6,9 6,6 –0,87 –0,26 0,35

Azcapotzalco 475 441 455 2,5 2,4 –1,59 –0,73 0,64

Iztacalco 448 411 419 2,3 2,2 –1,55 –0,86 0,37

Tláhuac 207 303 256 1,7 1,3 4,46 3,89 –3,10

Xochimilco 271 370 332 2,1 1,7 3,20 3,15 –2,03

Tlalpan 484 582 553 3,2 2,9 3,96 1,84 –1,01

Magdalena Contreras 195 222 212 1,2 1,1 2,03 1,31 –0,91

Milpa Alta 63 97 81 0,5 0,4 2,99 4,28 –3,24

* Taux de croissance moyenne annuelSource : INEGI (2000) Cuaderno Estadístico de la Zona Metropolitana de la Ciudad de México. Tableau 3.3, p. 46-47 y graphiques 3.a y 3.b p. 44. et INEGI (2005) Conteo de Población y Vivienda del Distrito Federal.

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Permanence des formes des métropoles : le cas de la ZMV de Mexico

Annexe 2. Population des municipalités de l’État de Mexico et de la ZMVM

Axe Municipalité 1990 2000 20051990 (%)

2000 (%)

2005 (%)

TCMA1990-2000

TCMA2000-2005

* État de Mexico 9 815 795 11 096 686 12 134 963 63,33 61,9 63,59 2,90 1,87ZMVM 15 500 504 17 958 029 19 082 765 100 100 100 1,50 1,25

1 Coacalco de Berriozábal 152 082 252 555 305 232 0,98 1,41 1,60 5,20 4,171 Ecatepec de Morelos 1 218 135 1 622 697 1 795 609 7,86 9,04 9,41 2,90 2,131 Tecámac 123 218 172 813 201 134 0,79 0,96 1,05 3,40 3,281 Temascalapa 19 099 29 307 34 852 0,12 0,16 0,18 4,40 3,782 Acolman 43 276 61 250 69 990 0,28 0,34 0,37 3,50 2,852 Axapusco 15 803 20 516 22 867 0,10 0,11 0,12 2,60 2,292 Nopaltepec 5 234 7 512 8 622 0,03 0,04 0,05 3,70 2,962 San Martín de las Pirámides 13 563 19 694 22 616 0,09 0,11 0,12 3,80 2,972 Teotihuacán 30 486 44 653 51 001 0,20 0,25 0,27 3,90 2,842 Tepetlaoxtoc 16 120 22 729 26 213 0,10 0,13 0,14 3,50 3,072 Otumba 21 834 29 097 32 835 0,14 0,16 0,17 2,90 2,573 Atenco 21 219 34 435 43 305 0,14 0,19 0,23 5,00 5,153 Chiautla 14 764 19 620 22 864 0,10 0,11 0,12 2,90 3,313 Chicoloapan 57 306 77 579 88 358 0,37 0,43 0,46 3,10 2,783 Chinconcuac 14 179 17 972 19 666 0,09 0,10 0,10 2,40 1,893 Papalotla 2 387 3 469 3 875 0,02 0,02 0,02 3,80 2,343 Texcoco 140 368 204 102 230 379 0,91 1,14 1,21 3,80 2,573 Tezoyuca 12 416 18 852 22 763 0,08 0,10 0,12 4,30 4,154 Chimalhuacán 242 317 490 772 605 305 1,56 2,73 3,17 7,30 4,674 Ixtapaluca 137 357 297 570 415 778 0,89 1,66 2,18 8,00 7,944 Nezahualcóyotl 1 256 115 1 225 972 1 234 870 8,10 6,83 6,47 -0,20 0,154 La Paz 134 782 212 694 256 890 0,87 1,18 1,35 4,70 4,164 Valle de Chalco Solidaridad 0 323 461 398 779 0,00 1,80 2,09 * 4,665 Cocotitlán 8 068 10 205 11 611 0,05 0,06 0,06 2,40 2,765 Chalco 282 940 217 972 248 306 1,83 1,21 1,30 -2,60 2,785 Ozumba 18 052 23 592 25 845 0,12 0,13 0,14 2,70 1,915 Temamatla 5 366 8 840 11 081 0,03 0,05 0,06 5,10 5,075 Amecameca 36 321 45 255 49 119 0,23 0,25 0,26 2,20 1,715 Atlautla 18 993 25 950 28 528 0,12 0,14 0,15 3,20 1,995 Ayapango 4 239 5 947 6 932 0,03 0,03 0,04 3,40 3,315 Juchitepec 14 270 18 968 21 026 0,09 0,11 0,11 2,90 2,175 Tenango del Aire 6 207 8 486 9 915 0,04 0,05 0,05 3,20 3,375 Tepetlixpa 12 687 16 863 18 768 0,08 0,09 0,10 2,90 2,265 Tlalmanalco 32 984 42 507 47 271 0,21 0,24 0,25 2,60 2,246 Cuautitlán 48 858 75 836 85 191 0,32 0,42 0,45 4,50 2,476 Cuautitlán Izcalli 326 750 453 298 514 143 2,11 2,52 2,69 3,30 2,686 Huehuetoca 25 529 38 458 46 116 0,16 0,21 0,24 4,20 3,986 Jaltenco 22 803 31 629 40 282 0,15 0,18 0,21 3,30 5,476 Melchor Ocampo 26 154 37 716 44 078 0,17 0,21 0,23 3,70 3,376 Naucalpan de Juárez 786 551 858 711 895 524 5,07 4,78 4,69 0,90 0,866 Nextlalpan 10 840 19 532 24 710 0,07 0,11 0,13 6,10 5,306 Teoloyucán 41 964 66 556 81 292 0,27 0,37 0,43 4,70 4,436 Tepotzotlán 39 647 62 280 70 855 0,26 0,35 0,37 4,60 2,756 Tlalnepantla de Baz 702 807 721 415 756 008 4,53 4,02 3,96 0,30 0,966 Tultepec 47 323 93 277 116 097 0,31 0,52 0,61 7,00 4,896 Tultitlán 246 464 432 141 529 710 1,59 2,41 2,78 5,80 4,526 Zumpango 71 413 99 774 111 436 0,46 0,56 0,58 3,40 2,346 Apaxco 18 500 23 734 26 040 0,12 0,13 0,14 2,50 1,946 Hueypoxtla 26 189 33 343 37 220 0,17 0,19 0,20 2,40 2,336 Tequixquiac 20 784 28 067 32 025 0,13 0,16 0,17 3,00 2,827 Atizapán de Zaragoza 315 192 467 886 534 648 2,03 2,61 2,80 4,00 2,857 Nicolás Romero 184 134 269 546 309 713 1,19 1,50 1,62 3,90 2,987 Isidro Fabela 5 190 8 168 9 529 0,03 0,05 0,05 4,60 3,337 Jilotzingo 9 011 15 086 18 025 0,06 0,08 0,09 5,30 3,907 Villa del Carbón 27 283 37 993 42 647 0,18 0,21 0,22 3,40 2,458 Huixquilucan 131 926 193 468 226 899 0,85 1,08 1,19 3,90 3,468 Almoloya 12 021 15 584 17 945 0,08 0,09 0,09 2,60 3,03* Coyotepec 24 451 35 358 41 394 0,16 0,20 0,22 3,80 3,41

Source : INEGI (2000) Cuaderno Estadístico de la Zona Metropolitana de la Ciudad de México, Tableau 3.3, p. 46-47 y graphiques 3.a y 3.b p. 44. INEGI (2005) Conteo de Población y Vivienda del Estado de México.

Rapport INRETS n° 277 45

Les formes de la métropolisation au Costa Rica

Sylvia Rosales Montano

Le caractère explosif de la croissance des villes en Amérique latine et la concentration de la population urbaine et des activités dans les grandes métropo-les ont marqué le xxe siècle7. Mais ce siècle a fait émerger un processus parallèle de dispersion/concentration sélective des populations, infrastructures et activi-tés. À ce processus vient s’ajouter une spécialisation plus nette de territoires, qui intègre aussi les phénomènes de ségrégation, voire de « sécession/relégation » spatiale. Ce processus global est en cours de consolidation.

Illustration 1 : la vallée centrale de San José et les périmètres de la Grande aire métropolitaine et de l’agglomération de San José

ALAJUELA HEREDIA

SAN JOSE

CARTAGO

Source : Vega, 2004.

7 Presque à la fin du siècle dernier, près de 74 % de la population (plus de 350 millions d’habitants) vivaient dans les territoires urbains, et ceci malgré un tassement du taux de croissance annuel de la population urbaine qui se situe autour de 2,5 % à la fin du siècle contre 3,6 % dans les années 1970. En ce qui concerne l’Amérique Centrale, elle présente un taux d’urbanisation de 68 %.

46 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Les pays centraméricains en général — et le Costa Rica en particulier — n’échappent pas à ces constats. Et ceci, bien que ces dynamiques et ces proces-sus s’intègrent dans des situations fort différentes de croissance urbaine (encore très marquée par la macrocéphalie), de développement, de planification et d’amé-nagement du territoire.

1. Concentration et dispersion sélective des populations aux niveaux national et métropolitain

1.1. Le Costa Rica, un pays à forte croissance démographique qui se concentre et se disperse de manière sélective…

Entre 1984 et 2000, la population totale du pays a été multipliée par 1,6 et la population urbaine a augmenté de 10 %. Résultat d’une très forte natalité et d’une mortalité très faible, puis d’une faible émigration et d’une très forte immigration nicaraguayenne, le taux de 2,8 % de croissance annuelle de la population se dis-tribue de manière inégale dans le pays, comme le démontre Pujol (2001).

En effet, sur une superficie de 51 100 km2 et une population d’environ qua-tre millions d’habitants (dont 30 % est composée de migrants nicaraguayens et d’autres pays centraméricains), le pays a une densité moyenne de 74 habitants au km2 et une population urbaine de 43 %.

Ces densités se concentrent, aujourd’hui, dans les principales communes cen-trales : la ville capitale et son aire d’influence. La seule ville capitale de San José concentre, en 2000, presque 10 % de la population nationale, mais son aire d’in-fluence directe (dix communes de sa périphérie, soit 0,6 % du territoire national) en concentre 24 %. Mais cette concentration est encore plus forte au niveau de la Grande aire métropolitaine (GAM) : 53 % de la population nationale sur 1,5 % du territoire du pays.

Néanmoins, bien que la capitale et son agglomération (ASJ) ou aire d’influence (nommé aussi « aire métropolitaine » et composé de 12 communes en 2003) aient perdu de la population (27 % de la population nationale s’y concentrait en 1984 contre 24 % en 2000), elle concentre presque la moitié de la population du GAM.

La perte de population de l’ASJ s’est faite au bénéfice des villes et villages périphériques (périurbains) : hors l’ASJ, la GAM concentre, en 2000, 29 % de la population nationale contre 25 % en 1984.

Il faut noter aussi la perte de population dans les centres-villes, au bénéfice d’autres espaces « centraux » de meilleure qualité urbaine. Effectivement, les « districts » centraux des principales villes (San José, Heredia, Cartago, etc.) ne sont pas les plus importants, laissant la place aux « districts » frontières.

Mais, ce nouveau phénomène de dispersion de la population vers des villes et villages de plus petite taille ne s’accompagne pas nécessairement des services, emplois, infrastructures nécessaires à la population. La plupart des villes dites secondaires du pays disposent d’un niveau de services publics assez similaire

Rapport INRETS n° 277 47

Les formes de la métropolisation au Costa Rica

(éducation, électricité, eau, téléphone, équipement sanitaire de base), mais man-quent d’autres équipements. Des migrations alternantes sont de ce fait en crois-sance constante, vers les villes plus consolidées, donc vers les principales villes.

San José capitale, dispose en effet, y compris dans son centre, des meilleurs réseaux de communication et de transports, avec une rupture très nette avec le reste du pays. La commune garde encore tous les équipements administratifs, économiques et financiers comme commerciaux, même si certains de ceux-ci se dispersent dans le reste de l’AMSS.

Illustration 2 : concentration de la population et des infrastructures de transports dans l’ASJ et la GAM

Océano Pacifice

Mar Caribe

Source : Pujol, 2001.

En somme, San José concentre les activités de haute valeur ajoutée : les ser-vices aux grandes entreprises nationales et internationales et les grands services publics.

48 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

1.2. …en s’affranchissant de toutes contraintes

La maîtrise de l’expansion territoriale de San José et de son aire métropoli-taine a constitué une des orientations principales de la planification portée par l’État à travers l’action, au niveau régional, de l’Institut du logement et d’urba-nisme (ILU).

La législation de 1983 a non seulement institué le zoning à l’intérieur du terri-toire en fixant la destination générale des sols et les densités, mais a aussi pres-crit une limitation géographique à l’extension urbaine (« linea de contencion »).

Or, à partir des années 1950, on constate déjà une croissance urbaine de moins en moins contrôlée… Entre 1950 et 1963, San José ville absorbe peu à peu ses espaces périphériques internes, et, entre 1963 et 1973, « l’agglomération métropolitaine » se consolide dans le même temps que se constituent des ban-lieues dortoirs à Heredia, Tibas, Santo Domingo, etc.

Illustration 3 : la tâche urbaine et l’anneau de contention de l’urbanisation

Source : Vega, 2004.

Entre 1973 et aujourd’hui, l’extension urbaine de l’aire métropolitaine se déve-loppe dans toutes les directions, à peine contrainte par les barrières naturelles les plus fortes. Les limites à l’urbanisation renforcées par le boulevard périphérique, comme par l’anneau de contention prévu pour le plan GAM, se trouvent alors rapidement dépassées par la dynamique de la croissance urbaine dispersée et partout.

Ainsi, la définition de l’usage des sols, la fixation des densités urbaines et la limite assignée à l’urbanisation ont été très tôt dépassées par la réalité.

Rapport INRETS n° 277 49

Les formes de la métropolisation au Costa Rica

Les principales raisons ? La rigidité du dispositif de planification et l’absence de concertation avec le niveau local et la société civile, l’absence d’une véritable hiérarchie urbaine, l’absence de traduction des orientations générales en politi-ques publiques efficaces et le caractère essentiellement normatif du plan, mais aussi ses imprécisions dans les limites de l’inconstructibilité autour des réserves et des projets structurants.

La non-réalisation des plans métropolitains prévus a aussi rendu possible et amplifié l’urbanisation de la vallée centrale en permettant notamment la construc-tion sur les tracés des axes de contournement périphériques projetés à l’intérieur de la zone de protection.

À ces carences de la planification, il faut ajouter les politiques de logement en place depuis le milieu des années 1980, qui ont conduit à créer des uni-tés résidentielles importantes destinées aux plus pauvres dans des zones non équipées. Mais aussi, l’absence complète de concertation avec les collectivités locales et des modes de vie marqués par l’habitat individuel sans contrainte spatiale. L’expansion territoriale s’opère aujourd’hui non seulement dans les terrains plats de la vallée centrale, mais également dans les gorges creusées par les nombreuses rivières et les terrains de fortes pentes (jusqu’à 25 %). C’est cette occupation des reliefs qui constitue une des caractéristiques principales de l’urbanisation.

Ainsi, se développe une croissance aussi forte des autres villes importantes de la région (Cartago, Alajuela et Heredia), au point que les espaces non urbanisés qui les séparent se comblent peu à peu et que les limitations de l’urbanisation attendues des ouvrages de voirie périphériques sont de plus en plus théoriques.

Aujourd’hui, c’est vers l’ouest que s’oriente majoritairement cette expansion urbaine de faible densité (essentiellement constituée de logements individuels). Elle est à peine contrainte par les reliefs du sud et du sud-est.

1.3. Les dynamiques ségrégatives du processus d’urbanisation

La forte pression urbaine qu’exerce la croissance démographique sur San José et la dispersion des habitants et des activités ainsi que la spéculation fon-cière ont produit des ségrégations spatiales importantes.

Cette pression s’exerce sur des terrains viabilisés ou non viabilisés, parfois situés sur des sites en principe non constructibles (bords des rivières, pentes des collines…).

En ce qui concerne l’habitat spontané ou précaire, en 1990, on comptait dans la capitale 23 quartiers informels (precarios), réunissant plus de 18 000 person-nes (soit environ 2 % de la population de l’AMSJ). Huit de ces quartiers (environ 1 000 familles) étaient localisés dans des zones présentant des risques (glisse-ments de terrains, pollution…)

Certaines communes, comme Desamparados, n’ont pas jusqu’à aujourd’hui absorbé, de manière qualitative, les 20 000 habitants précaires arrivés sur leur territoire dans les années 1980 par la volonté de l’État.

50 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Si au niveau microspatial la ségrégation sociale peut être visible, les dispari-tés sociales ou la « spécialisation » sociale des territoires sont aussi une réalité au niveau de la grande maille territoriale. La classe moyenne-haute et la classe haute, habitant encore à San José, cherchent à migrer vers des communes pos-sédant un meilleur environnement et un plus fort contrôle sur la « mixité » sociale. Communes « riches »/communes « pauvres » sont ainsi visibles.

Cette pression constante sur le sol métropolitain ne permet pas de desservir convenablement les habitants. D’une manière générale, nous observons que l’ur-banisation nouvelle se développe dans un contexte de dégradation des services urbains.

Illustration 4 : localisation des quartiers spontanés sur des sites à risques et pentes

Area Metrololitana de San JoséAmenazas naurales potenciales

Area Metropolitana de San JoséPendientes des AMSJ

Source : Vega, 2004.

Rapport INRETS n° 277 51

Les formes de la métropolisation au Costa Rica

En fait, depuis les années 1980, un grand nombre d’opérations d’urbanisme résidentiel ont été conduites sans les équipements nécessaires dans les domai-nes de la viabilité, de l’approvisionnement et de l’évacuation…

À titre d’exemple, les nouveaux résidents de la commune de Alajuelita — fron-tière sud de San José — ne sont équipés que de fosses septiques, en l’absence de réseaux d’égouts… La commune de Curridabat a vu son réseau de collecte des eaux usées complètement saturé, en raison de projets immobiliers nou-veaux, et les rejets fluviaux provoquent des inondations sur le territoire d’autres communes…

Aujourd’hui, seuls 46 % de la population métropolitaine sont desservis par un système d’égouts qui comprend la collecte des eaux usées et leur acheminement avec traitement préalable. Les 54 % restant évacuent leurs eaux usées dans des fosses septiques.

Mais l’ASJ concentre aussi près de 43 % du parc automobile national (plus de 120 000 véhicules en circulation au milieu des années 1990) pour, selon une estimation approximative, 300 000 véhicules/jour en 2000.

2. La territorialisation du paysage économique en cours de mutation : entre concentration et dispersion

2.1. Une forte croissance de l’économie des services, mais…

Le paysage économique costaricien connaît depuis peu une forte croissance de l’industrie des services, notamment dans les domaines du tourisme et de l’écologie.

Toutefois, le monde économique reste dominé par un secteur industriel manu-facturier et de transformation des produits primaires avec quelques exceptions. À ce titre, on peut citer la présence d’industries fabricant des équipements électri-ques (PANASONIC) et des composants électroniques (INTEL) dans la périphérie de l’aire métropolitaine de San José (AMSJ).

De manière générale, le paysage industriel costaricien, et particulièrement métropolitain8, est présenté de la façon suivante :

industrie agricole et alimentaire : 22 % ; •

industrie du textile et du cuir : 7 % ; •

industrie chimique, du caoutchouc et des plastiques : 24 % ; •

industrie du bois et du papier : 16 % ; •

métallurgie et travail des métaux : 12 % ; •

autres industries manufacturières : 19 %. •

On peut noter l’absence d’industries de fabrication, tant dans le domaine du transport que des nouvelles technologies, ce qui fait que la caractéristique prin-

8 Données 2002 du ministère de l’Économie, non publiée.

52 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

cipale du secteur économique métropolitain est qu’il s’agit principalement d’une industrie de transformation et de productions de biens manufacturés.

Néanmoins, l’économie du commerce et des services est en plein essor, sur- l’économie du commerce et des services est en plein essor, sur-tout dans les aires urbaines.

Parmi les activités commerciales, on retrouve principalement les activités rele-vant du commerce de vente de détail ou encore du commerce de gros de produits agroalimentaires, domestiques et autres articles industriels manufacturés.

Quant au domaine des services, il s’adresse autant aux personnes qu’aux entreprises. De manière générale, on rencontre les secteurs traditionnels d’action sociale, de service public, financier ou commercial prêtés majoritairement aux personnes. Il n’en demeure pas moins que le secteur des services aux entrepri-ses constitue également un secteur d’activités très important.

Enfin, les activités liées aux domaines de la santé, de l’éducation, du transport ou encore du tourisme représentent une part importante du paysage économique costaricien.

2.2. Les activités de production et de services se concentrent dans la GAM et l’AMSJ, mais elles sont particulièrement présentes dans la ville de San José

L’AMSJ rassemble l’essentiel des fonctions économiques industrielles et ter-tiaires du pays. Elle concentre 80 % des activités commerciales du pays, la tota-lité des établissements de soins spécialisés, 70 % du transport national, 50 % des professionnels de santé, les principaux centres d’enseignement supérieur, la quasi-totalité des activités culturelles… À San José capitale, jusqu’aux années 1990, le tissu industriel était formé à 84 % de petites entreprises ou d’entreprises individuelles qui occupaient 18 % de la main-d’œuvre totale de l’industrie.

Tableau 1 : entreprises industrielles localisées au sein de l’aire métropolitaine de San José* et nombre de salariés**

Cantón Total industrie Nombre de salariés

nb. % 1–5 6–10 11–30 31–100 +100

San José 1102 50,2 525 187 210 113 67Coronado 63 2,0 44 5 8 4 2Escazú 77 3,5 49 10 14 3 1Aserrí 29 1,3 19 4 5 – 1Curridabat 91 4,2 36 17 18 12 8Goicoechea 211 9,6 125 41 23 12 10Alajuelita 21 1,0 13 4 4 – –Moravia 84 3,8 50 17 11 4 2La Unión 55 2,5 30 11 11 1 2Montes de Oca 119 5,4 61 18 19 17 4Tibas 140 6,4 67 27 22 18 6Desamparados 202 9,2 130 26 33 7 6Total 2194 100 % 1149 367 378 191 109

* Données du ministère du Commerce et de l’Industrie, non publiées, 2002.** Données de la Caisse costaricienne de Sécurité Sociale (CCSS).Source : Ben Amar et Vega, 2003.

Rapport INRETS n° 277 53

Les formes de la métropolisation au Costa Rica

Les grandes entreprises des deux secteurs analysés se concentrent dans la GAM (Tableau 1) et dans l’AMSJ et les autres zones franches localisées dans les autres communes périphériques. Mais c’est encore San José qui concentre le maximum d’activités malgré une certaine délocalisation observable.

Ceci est illustré par les entreprises industrielles : 50 % des industries locali-sées dans l’AMSJ se situent à San José.

Mais cette concentration est aussi celle des entreprises moyennes et des gran-des entreprises industrielles : 94 % des entreprises ayant entre 31 et 100 salariés et 61 % de celles de plus de 100 salariés. Pour les autres, la concentration est moins importante : 45 % des petites industries (moins de cinq salariés), 51 % des industries de 6–10 salariés et 56 % d’industries de 11 à 30 employés.

2.3. San José, une économie qui se transforme principalement autour des commerces et services

Sur environ 13 000 activités économiques recensées avec la NAF 31, les acti-vités liées au commerce demeurent de loin les plus importantes, tous secteurs confondus. Le commerce de gros ou de détail ainsi que de réparation d’articles manufacturés employant un faible nombre d’employés représente 58 % des acti-vités commerciales.

Une autre caractéristique importante est l’influence des activités de services tant aux personnes (8 %) qu’aux entreprises (14 %).

Cette tendance croissante de développement des services résulte du dévelop-pement du secteur touristique devenu le premier secteur générateur de devises du pays. En ce sens, l’écotourisme représente plus de 25 % des exportations costariciennes (Araya Solano, 2002).

Il convient également de souligner l’importance du secteur des professions libérales dans le domaine de la santé et du consulting aux entreprises et aux personnes.

Elle correspond à la présence de cabinets médicaux, officines juridiques et comptables. En effet, le monde des entreprises de services emploie ou concentre un nombre important de personnes indépendantes ou de professions libérales employant un nombre restreint de salariés. Il existe toutefois un certain nombre de sociétés regroupant ces professions libérales, notamment dans le domaine de la santé (cliniques privées). En revanche, dans le domaine légal ou comptable, le phénomène de fusion demeure exceptionnel.

Parmi les autres secteurs d’activités de service, on trouve un grand nombre d’entités privées, spécialisées principalement dans l’éducation scolaire9 et acces-soirement professionnelle.

Dans le même sens, les activités relevant de l’administration publique, du monde financier et du domaine des transports sont bien représentées.

9 114 Universités ont été répertoriées dans la ville de San José, Recensement 2000, INCOPEC.

54 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Illustration 5 : usages économiques des sols dans la commune de San José

Source : Ben Amar et Vega, 2003.

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Les formes de la métropolisation au Costa Rica

Concernant le secteur des transports, il convient de souligner la forte concen-tration des entreprises liées à la distribution des marchandises sur tout le territoire national et le continent méso-américain sans oublier le secteur des transports de personnes. En effet, le transport public est un secteur majeur de l’économie urbaine costaricienne en raison du statut privé du transport urbain et interurbain.

Par ailleurs, le paysage industriel reste dominé par les activités de produits manufacturés (24 %) autres que celles liées aux domaines traditionnels du textile (12 %), de l’agroalimentaire (7 %) et du bois (6 %).

Le domaine de l’industrie du papier et du carton (21 %) est certes important. Mais, il doit toutefois être minimisé en raison de la prédominance des activités liées à la reprographie.

Les autres industries à mentionner sont celles relatives à la métallurgie (6 %), aux produits plastiques (3 %) et chimiques (2 %).

Concernant les autres domaines de l’industrie, on peut noter l’importance des secteurs liés à la production et la distribution de l’électricité, du gaz et de l’eau (6 %), celui relatif à la fabrication d’articles de cuir (2 %) ou de composants élec-troniques (1 %) qui emploient un nombre important de salariés malgré leur faible représentation.

La dernière caractéristique importante à souligner est la faible importance, voire l’inexistence d’industries de fabrication de machines et équipements ou de matériel de transport.

Si cette concentration est importante, on observe aussi une délocalisation périphérique de nombreuses activités, surtout celles des bureaux ou autres activi-tés grandes consommatrices de sols et nécessitant une qualité d’environnement importante (bureaux, hôtels, centres commerciaux, etc.).

2.4. Spécialisation économique par zone

Mais ces concentrations et dispersions se territorialisent de manière différente. Ceci est observable dans la ville de San José, par districts. À titre d’exemple, on analysera trois districts : Catedral, Mata Redonda et Uruca.

Illustration 6 : les districts de San José

Source : Vega, 2004.

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Les formes de la métropolisation

2.4.1. Le « District Catedral » : commerces et services aux entreprises et aux personnes

Le district « catedral » concentre majoritairement des activités liées au com-merce et aux services.

Parmi les activités commerciales, on retrouve celles du commerce de détail mais également de la restauration. À ce titre, il convient de mentionner la particu-larité du secteur de la restauration surreprésenté par les « Soda », sorte de petit restaurant particulier employant un ou deux salariés au maximum et géré par le restaurateur lui-même.

Concernant les services, on remarque également une forte concentration d’ac-tivités de services aux entreprises et particulièrement comptables et notariales. Ceci se justifie par la concentration des organes de justice costariciens dans ce district.

Les services liés aux personnes sont également très représentés dans ce sec-teur de la ville et doivent être rattachés à la présence des activités liées à l’admi-nistration publique, à l’éducation ou encore à la santé et à l’action sociale.

De plus, un grand nombre d’organisations non gouvernementales (ONG) dis-posent de leur siége social dans ce secteur urbain en raison de la grande concen-tration des différents services de l’État.

Quant aux activités liées au domaine de l’industrie, celles-ci sont essentielle-ment de type manufacturier, à l’exception du cas important de l’industrie du papier liée aux activités de reprographie.

2.4.2. Le district « Mata Redonda » : activités consulaires et services

Il s’agit d’un secteur relativement bien situé, mais un nombre relativement plus faible d’activités économiques sont localisées dans ce secteur urbain de Mata Redonda. Il convient toutefois de souligner que cette aire concentre principa-lement, toutes activités confondues, celles des services aux entreprises et aux personnes.

Parmi ces dernières, on peut noter l’importance des services de santé, de l’éducation mais également extraterritoriales en raison de la présence de nom-breuses ambassades. Quant aux services aux entreprises, le secteur « Mata Redonda » concentre un grand nombre d’entreprises de consulting dans le domaine de l’import-export. Ceci explique la concentration d’activités financières mais également celles liées au domaine du transport.

Les activités liées à l’industrie, bien qu’elles soient présentes, demeurent très faibles.

2.4.3. Le « District Uruca » : secteur industriel et services aux entreprises

Secteur industriel et commercial de la ville de San José, ce district concentre les plus grandes entreprises manufacturières, agroalimentaires liées à la fabrica-

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Les formes de la métropolisation au Costa Rica

tion de matières plastiques, de cuir et surtout, de composants électriques et élec-troniques. Concernant ce dernier secteur économique, le nombre d’entreprises peut paraître peu important, mais il emploie un grand nombre de salariés.

Il faut, tout de même, souligner que ce secteur urbain représente le premier bassin d’emploi de toute l’aire métropolitaine de San José. En effet, il existe un certain nombre d’entreprises nationales et étrangères employant 200 salariés et plus (Tableau 1). Ceci explique la forte concentration du domaine des services aux entreprises et de ceux attachés aux domaines du transport et de la finance.

De plus, ce secteur demeure attractif pour des activités commerciales et de services aux personnes. En effet, le secteur de la Uruca dispose d’une infras-tructure autoroutière permettant une liaison rapide entre les différents réseaux routiers du territoire national et métropolitain.

Quant aux activités liées au domaine industriel, on a pu noter une importante concentration d’entreprises dans les secteurs de la Uruca et Hospital. Il est vrai que d’autres secteurs comme Pavas comptent un grand nombre d’entreprises indus-trielles. Il n’en demeure pas moins que les plus importantes sont situées dans le secteur de la Uruca, qui concentre 40 % de la population active métropolitaine.

On peut donc conclure que l’ensemble des activités économiques industriel-les, commerciales et de services sont relativement bien réparties sur l’ensemble du territoire métropolitain.

Cette spécialisation n’est pas seulement due à la force des acteurs privés mais aussi à la planification. En effet, le plan GAM, comme les plans régulateurs, définit les usages des sols par les notions de « centres », de « réseaux » et de « corridors » de planification.

Ces concepts se déclinent localement, comme par exemple le Plan régulateur de San José. Mais en général, entre deux révisions du plan régulateur, on ne fait qu’adapter les usages réels aux usages « prospectifs ». Ceci a pour résultat la « linéarité commerciale et économique » que permettent les axes routiers.

Soumis à révision en 2002, le plan directeur urbain de San José (PDUSJ) se caractérise par une structure de zonage identique à celle définie au sein du docu-ment « GAM ». La différence résulte toutefois d’une plus grande spécialisation de la nomenclature des usages des sols. Deux chapitres du Plan définissent le système de planification destiné à l’identification et à la localisation des activités.

La planification est fondée sur « des centres et des réseaux de commerce et de services ». Chaque zonage fait ainsi — en principe — l’objet d’une présen-tation générale des différents secteurs urbains. Il existerait ainsi des « centres et des réseaux » favorisant l’implantation des activités d’importance nationale, locale et de district. Néanmoins, cette classification repose essentiellement sur la localisation de l’infrastructure autoroutière du territoire urbain.

À titre d’illustration, l’usage du sol « commerce et service national : CSB » est localisé non pas en périphérie de San José mais en plein centre urbain. Il va de soi qu’une grande et moyenne entreprise ne peut être développée dans ce

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Les formes de la métropolisation

contexte, comme le spécifie à juste titre le « PDUSJ ». Il n’en demeure pas moins que cette zone reste qualifiée de zone de développement d’activités de services ou de commerce à vocation nationale.

À noter aussi que les « zones mixte industrie–commerce », résultat de la transformation des anciennes zones industrielles du GAM, ne résultent pas d’une volonté de mixité mais plutôt du mitage commercial (voire résidentiel) de fait de ces zones.

Conclusion

Lors des 40 dernières années, l’usage des sols dans la vallée centrale a subi des changements dramatiques. Avant 1945, San José était le principal centre urbain, entouré de quatre districts séparés les uns des autres par d’importantes zones caféières… et au cours des années 1960–1970, l’agriculture cédant rapi-dement devant l’avance de l’urbanisation a permis l’essor d’une métropolisation porteuse de tendances de spécialisation fonctionnelles.

L’agriculture et la forêt cèdent le terrain à l’urbain, et ces activités sont deve-nues le deuxième mode d’occupation des sols derrière les activités urbaines. Mais, plus précisément, ces changements dans les usages des sols ont faci-lité l’occupation des sols de grande qualité environnementale, mais globalement « bon marché », dans la périphérie des communes centrales métropolitaines, permettant ainsi une migration résidentielle et économique forte du centre vers ces périphéries.

Cette concentration d’activités dans la partie centrale de l’AMJS se caractérise ainsi par de forts mouvements internes qui obéissent aux logiques propres aux différents secteurs. C’est en particulier le cas du secteur de la grande distribution commerciale, qui privilégie depuis les années 1980 les implantations périphé-riques bien desservies par le système routier et s’installe sur de très grandes propriétés foncières.

Cette tendance à la localisation périphérique des activités historiquement cen-trales correspond aussi à la proximité des bassins de consommateurs de plus en plus éloignés en raison des logiques résidentielles.

D’une manière générale, on assiste à un déplacement des fonctions commer-ciales centrales de San José vers les concentrations résidentielles mieux des-servies par la route et le stationnement et offrant des possibilités importantes d’extension sur place (le cas de Curridabat par exemple).

La dégradation des conditions de vie et d’exercice des activités commerciales dans le cœur historique renforce ce desserrement des activités traditionnelles.

La ville centrale perd ainsi peu à peu sa mixité sociale et économique, et ce phénomène caractérise davantage le noyau central de la ville (ainsi que celui des autres villes périphériques). Des politiques de repeuplement et de rayonnement

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Les formes de la métropolisation au Costa Rica

local sont engagées dans la ville centrale, mais aussi dans les autres centres des communes périphériques.

Des petites villes se développent, mais en relative « indépendance » de San José en ce qui concerne les activités de services (administration, santé, services aux entreprises, etc.), mais de moins en moins en termes de consommation.

Un exemple de ce changement : aujourd’hui, environ la moitié des véhicules particuliers qui circulent dans le centre n’ont pas pour destination finale celui-ci, mais sont en transit vers les autres communes. Cette situation aggrave la perte de qualité urbaine de la ville centrale par la saturation permanente des voies prin-cipales et la très forte pollution véhiculaire10.

Le système de transports, et globalement celui des déplacements subissent de très fortes tensions pour répondre au double processus de concentration et de dispersion déséquilibrée du fonctionnement urbain. Mais la logique de consolida-tion des activités économiques sur les principales voies radiales se répercute en un chaos permanent de circulation.

Axes de transports et activité économique sont si fortement liés, que les linéa-rités commerciales y compris métropolitaines font l’objet de propositions multiples dans le cas d’un plan régulateur métropolitain. Cette logique de formalisation des tendances peut mettre en cause un équilibre plus vaste entre les logiques des acteurs économiques et la planification et l’aménagement du territoire à plus long terme.

Bibliographie

R. Araya Solano. Situación Actual, Necesidades, Estrategias Propuestas, document de travail, 2002.

K. Ben Amar, M. Vega. Identification et localisation des usages des sols à vocation économique de la ville de San José, Rapport pour le LET, 62 p, 2003.

R. Pujol. Desarrollo urbano y sistema de transportes en Costa Rica, Informe final para la primera fase del plan nacional de desarrollo urbano, Produs, sept. 2001, 2001.

M. Vega. Cartographie SIG de l’AM de San José, document de travail, 2004.

10 Avec une structure de desserte très ancienne, le système de transport public et privé de San José se compose essentiellement de lignes radiales. Bien que 70 % des usagers de la capitale utilisent les transports publics (1 200 autobus, 125 lignes, 50 entreprises privées) et 30 % la voiture individuelle (environ 300 000 véhicules/jour au niveau métropolitain), le système existant ne correspond pas aux demandes dispersées de déplacement. Cela favorise, d’une certaine manière, le recours à l’automobile dans les secteurs de revenus moyens (facilité aussi fortement par les politiques nationales fiscales et d’importation de véhicules usagés).

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Permanence des formes de la métropolisation dans

les aires urbaines françaises11

Anne Aguiléra, Danièle Bloy et Dominique Mignot

La compréhension des déterminants de la mobilité constitue une préoccupa-tion ancienne mais plus que jamais d’actualité. La croissance du trafic automobile pose en effet des problèmes aigus tant sociaux — inégalités en termes d’acces-sibilité —, qu’économiques — coûts des infrastructures, de la congestion — et bien sûr environnementaux, peu compatibles avec la volonté d’un développement durable (Banister et al., 1997).

La question d’une meilleure organisation des déplacements quotidiens qui soit (notamment) plus favorable aux modes « doux » se pose de façon particuliè-rement sensible en milieu urbain, où les trajets ne cessent de s’allonger, de se déradialiser, favorisant une progression jamais démentie de la part de marché de la voiture. Cette dernière, en vertu de critères bien connus (confort, vitesse, etc.) s’est imposée comme le mode de transport par excellence, voire quasiment obligé sur certains trajets où les transports en commun sont très peu performants, entre espaces périphériques notamment, trajets qui sont justement en pleine progression.

À côté des déterminants sociodémographiques et économiques « classiques » que sont le sexe, l’âge ou encore le revenu, et qui sont désormais relativement bien connus, un nombre croissant de travaux a montré que la mobilité était liée à la répartition spatiale réciproque des lieux émetteurs et attracteurs de flux, à savoir : les lieux de résidence, d’emploi, de commerce, de loisirs, etc., mettant ainsi l’accent sur la forme même des villes et l’intérêt de penser conjointement les politiques de transport et les politiques d’urbanisme.

1. Étalement urbain, polycentrisme et mobilité

De façon grossière et toutes choses égales par ailleurs, il a été montré que plus les lieux de résidence sont éloignés du centre et de la proche banlieue, plus

11 La recherche présentée dans ce chapitre (Mignot et al., 2004), financée par l’ADEME, a été réalisée au LET et à l’INRETS par Dominique Mignot (LET), Anne Aguiléra (INRETS–DEST) et Danièle Bloy (LET), avec la participation de Louafi Bouzouina (LET), Jean-Michel Cusset (LET), Jean-Loup Madre (INRETS–DEST), François Million (LET), Nicolas Ovtracht (LET) et Jacques perrat (ADEES).

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Les formes de la métropolisation

le taux de motorisation, le recours à une voiture et la distance quotidienne des individus sont élevés. Ce constat, qui stigmatise la ville étalée et spécifiquement le périurbain à usage encore quasi exclusivement résidentiel, explique (pour par-tie) le regain d’intérêt pour de « nouvelles » formes d’urbanisme et plus générale-ment pour des modèles « alternatifs » de développement urbain (Masson, 2000 ; Camagni et al., 2002).

On oppose généralement de façon spontanée à la ville étalée la ville dite « dense » ou « compacte », notamment depuis que les travaux de Newman et Kenworthy (1998) ont montré que la dépense énergétique liée aux déplacements quotidiens était une fonction décroissante de la densité urbaine, les villes euro-péennes étant à cet égard plus économes que leurs homologues nord-américai-nes. Les mesures du « niveau de compacité » d’une forme urbaine sont toutefois diverses (Gordon et Richardson, 1997 ; Pouyanne, 2004). Dans cette recherche, nous avons voulu tester si le degré de centralité, c’est-à-dire le poids relatif des localisations (population et emplois) dans la ville centre, exerçait un impact sur la mobilité. Cette interrogation fait écho aux analyses qui ont montré les particula-rités de la mobilité des personnes résidant au centre des espaces urbains. Ces dernières, du fait qu’elles ont à disposition à proximité une offre potentielle énorme d’emplois, de commerces, de services etc., mais aussi un réseau de transports publics performants (et de vraies difficultés à stationner) ont en moyenne des tra-jets plus courts et utilisent moins la voiture (leur taux de motorisation est d’ailleurs bien moindre qu’en périphérie). En particulier, les actifs qui habitent au centre y ont très fréquemment leur emploi, tandis qu’en périphérie (y compris en proche banlieue), la commune de résidence est nettement plus rarement celle du lieu de travail, le phénomène tendant en outre à s’amplifier. Le premier objectif de cette recherche a donc été de déterminer si les villes plus centralisées sont plus « éco-nomes » en termes de mobilité.

Au-delà de cette approche dans laquelle la périphérie est appréhendée comme un tout « homogène », le second objectif de la présente recherche a consisté à analyser l’impact sur la mobilité de la forme même de l’organisation des localisations au sein de la périphérie. Nous faisons, ici, explicitement référence à un second modèle urbain, celui de la ville polycentrique (Anas et al., 1998 ; Lacour, 1999), à laquelle est souvent associée une organisation plus favorable de la mobilité que dans la ville étalée ou que dans une ville monocentrique conservant l’essentiel des emplois au centre mais connaissant une périurbanisation de sa population. Par un desserrement « cohérent » des localisations — selon les cas spontanés ou « organisé » par la puissance publique — en faveur de pôles, l’effet espéré de la ville polycentrique est un rapprochement des lieux d’origine et des lieux de destination, l’hypothèse sous-jacente étant que les personnes se localisent dans ou à proximité de leur lieu d’emploi, mais aussi privilégient la fréquentation de ce pôle pour leurs trajets courants autres que domicile–travail. Cela suppose toutefois que les pôles ne soient pas seulement dédiés à l’emploi, mais puissent satisfaire les besoins (courants) en termes de commerce, de services, voire de loisirs pour leur population locale, dans une organisation proche de celle des « places centrales »

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Permanence des formes de la métropolisation dans les aires urbaines françaises

du modèle de Christaller. Une structuration par des pôles attirant des flux de courte distance pourrait également permettre d’envisager une réorganisation plus efficace de la desserte par les transports en commun et donc diminuer le recours à la voiture (Pivo, 1993) et éviter de contribuer, au contraire, à l’accroissement des déplacements en automobile (Cervero et Wu, 1997).

La réflexion sur les opportunités offertes par une ville polycentrique pour orga-niser la mobilité quotidienne dans une direction plus « durable » est d’autant plus séduisante que de fait depuis une quinzaine d’années la polycentralité urbaine semble devenir une « norme » avec toutefois des différences significatives entre les villes européennes et les villes nord-américaines. En France, il semble plutôt qu’on assiste à la constitution de pôles plutôt spécialisés (sur une fonction ou un secteur économique) et non de véritables centres secondaires, contrairement aux edge cities nord-américaines. Ces pôles (zones d’activité, zones commerciales, etc.) sont en outre très mal, voire pas, desservis par les transports en commun. Un véritable bilan, centré sur les stratégies de localisation résidentielle et les com-portements de mobilité de ceux qui « fréquentent » ces pôles, n’a toutefois pour l’heure pas été réalisé, du moins en France. Les travaux étrangers — principa-lement nord-américains et néerlandais — indiquent, malgré des résultats parfois contradictoires (Schwanen et al., 2001, 2002 ; Pivo, 1993 ; Cervero et Wu, 1997), que la présence de pôles globalement ne réduit pas les distances de déplacement (notamment domicile–travail), mais par contre induit des temps de déplacement plus courts (Sultana, 2000) grâce à une utilisation accrue de la voiture dans des espaces qui sont finalement à la fois mal desservis par les transports publics et peu congestionnés, c’est-à-dire doublement favorables à l’automobile.

2. Données et méthode

Notre choix s’est porté pour plusieurs raisons sur les seuls déplacements domicile–travail. Outre qu’ils sont la seule catégorie de déplacements disponi-bles à partir des recensements de la population, ce choix repose sur au moins quatre arguments. Il nous semble d’une part essentiel de se poser la question de l’influence des configurations urbaines sur chaque type de déplacements avant de tenter une réflexion globale, et il n’est d’ailleurs pas du tout évident que telle « organisation » des localisations, favorable à une réduction (en termes de dis-tance ou de temps) des trajets quotidiens domicile—travail, produise également des résultats satisfaisants concernant la mobilité liée aux achats ou aux loisirs. D’autre part, les migrations alternantes constituent sûrement la forme de dépla-cements la plus contrainte par la répartition effective des localisations, tandis que pour les courses ou les loisirs l’aire de choix est généralement large. En outre, malgré une baisse régulière de son poids dans l’ensemble des déplace-ments depuis le début des années 1980, le lieu de travail continue de structurer la mobilité pratiquée pendant le temps hors travail. Enfin, les migrations alternantes contribuent directement à la structuration des territoires urbains dans la mesure où le volume de ces déplacements aux heures de pointe sert de base pour définir les besoins en infrastructures urbaines.

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Les formes de la métropolisation

Même si des formes de travail pour lesquelles le lieu d’emploi n’est plus fixe se développent, une large majorité d’actifs doivent se rendre plusieurs fois par semaine de leur domicile à leur lieu d’emploi. On peut, par conséquent, avoir une idée assez précise de la mobilité domicile–travail par le biais des recensements de la population qui fournissent pour chaque actif le lieu de domicile et le lieu d’emploi. Nous avons utilisé des données à un niveau communal, et le mode de transport n’est connu qu’en 1999. La distance domicile–travail a été évaluée en distinguant deux cas de figure. En présence d’une migration intercommunale, nous avons retenu, comme c’est souvent le cas dans ce type d’étude, la distance entre centroïdes (calculée à vol d’oiseau), pondérée par un facteur 1,3. Concernant les distances intracommunales, il nous a paru nécessaire de prendre en compte la taille de la commune, en raison notamment de la forte hétérogénéité en la matière. Nous avons alors assimilé chaque commune à un cercle et pris pour distance de migration intracommunale le rayon (calculé à partir de la surface) pondéré là aussi dans un souci de cohérence par un facteur 1,3.

Nous avons, par ailleurs, privilégié une comparaison d’aires urbaines (sept au total) de taille et d’organisation des localisations très différentes. Les territoires des aires urbaines de Bordeaux, Lyon et Marseille–Aix présentent des surfaces du même ordre de grandeur. On notera que l’aire de Marseille est caractérisée par un plus petit nombre de communes, mais proportionnellement plus grandes en surface, ce qui peut avoir une influence non négligeable dans l’interpréta-tion de la répartition des activités au sein de l’aire urbaine. Le rattachement de l’ancienne aire urbaine d’Aix-en-Provence à celle de Marseille, du fait de la continuité du bâti, fait également de cette dernière un exemple type d’aire com-prenant un véritable pôle secondaire. Si l’aire urbaine de Dijon est caractérisée par une population beaucoup plus faible que les trois autres, sa surface et sa composition en nombre de communes la rendent tout à fait comparable et pré-figurent un territoire où population et activités devraient être plus concentrées (sur la commune centre) que dans le cas des autres aires urbaines. Les deux autres aires urbaines de Rhône-Alpes étudiées, Grenoble et Saint-Étienne, sont plus petites, en nombre de communes et en superficie. Cela est dû en partie à des contraintes de relief et à l’existence d’autres aires urbaines à des distances assez faibles des villes centres concernées. C’est le cas de Saint-Chamond à côté de Saint-Étienne et de Voiron à proximité de Grenoble. Saint-Étienne constitue ainsi la plus petite des aires urbaines étudiées, mais également la plus densément peuplée en dehors de Paris. Enfin, l’aire urbaine de Paris, de par sa taille, est bien évidemment un cas particulier sans équivalent en France. En termes de structure des localisations, les aires urbaines de Marseille, Dijon et Saint-Étienne sont encore fortement centrées en 1999 (population et emplois), contrairement aux quatre autres (Tableau 1).

Rapport INRETS n° 277 65

Permanence des formes de la métropolisation dans les aires urbaines françaises

Tableau 1 : localisation des actifs (*) et des emplois (**) en 1999

Type 1 : aires urbaines centrée Type 2 : aires urbaines déconcentrées

Marseille–Aix

Saint-Étienne

Dijon Lyon Bordeaux Grenoble Paris

Actifs

Centre 54,7 % 56,8 % 46,3 % 35,8 % 22,9 % 28,2 % 20,0 %

Périphérie 45,3 % 43,2 % 53,7 % 64,2 % 77,1 % 71,8 % 80,0 %

Emplois

Centre 61,0 % 67,2 % 60,9 % 44,3 % 40,1 % 38,8 % 32,5 %

Périphérie 39,0 % 32,8 % 39,1 % 55,7 % 59,9 % 61,2 % 67,5 %* Il s’agit uniquement des actifs exerçant un emploi dans leur aire urbaine de résidence.** Il s’agit uniquement des emplois occupés par des actifs résidant dans l’aire urbaine considérée.Source : exploitation DEST du RGP99.

3. Intensité de la suburbanisation et migrations alternantes

L’analyse des sept aires urbaines sur une période de 25 ans (1975–1999) confirme un double phénomène de concentration et d’étalement urbain. Les aires urbaines continuent à attirer population et emploi, qui s’étalent de plus en plus au sein de l’aire urbaine, et souvent s’étendent également soit par adjonction de communes anciennement rurales, soit par adjonction d’anciennes aires urbaines autonomes du fait de la continuité du bâti (Melun étant un des exemples les plus récents).

Sur le plan de la mobilité et spécifiquement des liens entre niveau de centra-lité et migrations alternantes, un résultat important de ce travail est que les aires urbaines centrées, y compris une fois neutralisée l’influence de leur taille (surface), n’apparaissent pas plus économes (en termes de distances, donc de kilomètres moyens par actifs) que les aires urbaines plus déconcentrées (Tableau 2).

Tableau 2 : les distances domicile–travail en 1999

MarseilleSaint-

ÉtienneDijon Lyon Bordeaux Grenoble Paris

Km totaux tous actifs

6 077 319 640 036 908 204 5 786 631 3 183 040 1 481 931 65 662 852

Km totaux migrants

2 969 037 308 506 680 445 5 134 879 2 683 896 1 296 308 58 594 552

% km totaux migrants

48,8 % 48,2 % 74,9 % 88,7 % 84,3 % 87,4 % 89,2 %

Rayon AU 26,0 12,0 23,0 29,0 31,0 19,5 68,0

Distance moyenne (km)

13,3 6,7 7,6 9,4 9,6 7,8 13,5

Dist. moy. migrants (km)

20,3 8,4 10,7 13,2 12,3 10,4 17,4

Dist / rayon AU 0,5 0,6 0,3 0,3 0,3 0,4 0,2

Dist migrants/rayon AU

0,8 0,7 0,5 0,5 0,4 0,5 0,3

AU = aire urbaineSource : exploitation DEST des RGP90 et RGP99.

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Les formes de la métropolisation

Les aires urbaines encore fortement centrées se caractérisent pourtant par une plus forte proportion d’actifs stables12, c’est-à-dire d’actifs qui ont des dis-tances de migration réduites. La raison tient exclusivement au fait que les actifs résidant au centre travaillent majoritairement au centre (y compris d’ailleurs dans les aires urbaines déconcentrées, même si c’est dans de moindres proportions). Toutefois, cette proportion tend à diminuer sous l’effet de la périurbanisation, alors même que l’étalement urbain n’altère pas ou peu sur un plan strictement quanti-tatif le fort excédent du nombre d’emplois sur le nombre de résidents au centre. Parallèlement, la part des actifs résidant en périphérie et travaillant au centre se maintient, voire connaît une légère progression. Or, ces actifs parcourent en moyenne de grandes distances comparativement aux autres (Tableau 3).

Tableau 3 : distances moyennes (en km) par type de flux en 1999

MarseilleSaint-

ÉtienneDijon Lyon Bordeaux Grenoble Paris

Centre vers périphérie

25,7 7,7 7,7 12,5 9,5 8,0 15,3

Périphérie vers centre

24,3 9,3 11,3 14,5 12,2 10,4 21,5

Périphérie vers périphérie

8,7 5,1 8,2 9,3 9,4 8,5 12,5

Périphérie vers périphérie (migrants uniquement)

15,5 7,5 11,8 12,6 12,9 11,3 16,1

Source : exploitation DEST des RGP90 et RGP99.

Finalement, on a une sorte de phénomène « compensatoire » qui fait que lorsque le centre retient encore la majeure partie des résidents et des emplois les trajets périphérie vers centre sont importants, voire se développent, occasionnant de longs trajets et amoindrissant en quelque sorte l’effet positif d’un fort taux d’ac-tifs centraux stables.

Une analyse des seuls actifs périphériques confirme en outre que si parmi ces derniers une proportion croissante travaille en périphérie, la commune de résidence est de plus en plus souvent distincte de celle du lieu d’emploi, mais également de plus en plus éloignée. Les actifs périphériques sont même ceux pour lesquels le taux d’accroissement de la distance moyenne de migration a été le plus élevé au cours de la décennie pour toutes les aires urbaines.

Une autre manière de mesurer l’étalement urbain et son évolution dans le temps est de dénombrer les communes à l’origine (ou destination) des migrations alternantes à destination (ou origine) du centre. Ainsi, pour l’aire urbaine de Lyon, les illustrations 1 à 3 permettent de bien mettre en évidence à la fois l’étalement visualisé par la croissance du nombre de communes concernées par les migra-tions vers le centre et le faible volume des flux en provenance de communes plus nombreuses et plus éloignées.

12 C’est-à-dire travaillant dans leur commune de résidence (par opposition aux migrants).

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Permanence des formes de la métropolisation dans les aires urbaines françaises

Illustration 1 : les communes contribuant à 50 % du nombre total des actifs entrants au centre de Lyon

a) en 1975

b) en 1999

68 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Illustration 2 : les communes contribuant à la part 50–75 % du nombre total des actifs entrants au centre de Lyon

a) en 1975

b) en 1999

Rapport INRETS n° 277 69

Permanence des formes de la métropolisation dans les aires urbaines françaises

Illustration 3 : les communes contribuant à la part 75–85 % du nombre total des actifs entrants au centre de Lyon

a) en 1975

b) en 1999

70 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Les migrants qui viennent travailler à Lyon viennent donc de communes de plus en plus nombreuses et de plus en plus éloignées. On peut relever que nom-bre de communes lointaines recensées se situent sur des axes à grande vitesse, autoroutière ou ferroviaire, et où des progrès notables ont été apportés au cours de la période 1975–1999. On peut relever certes la croissance du réseau auto-routier et des liaisons TGV, mais également l’amélioration des liaisons ferroviaires « classiques », avec notamment la mise en place de liaisons cadencées entre les principales villes de Rhône-Alpes et Lyon, dès 1994.

4. Polycentrisme et migrations alternantes

L’analyse de l’influence de pôles d’emplois périphériques permet d’éclairer plus avant les modalités de l’accroissement des distances domicile–travail en montrant comment l’organisation des localisations au sein même de la périphérie est, au moins, aussi importante que la seule répartition entre le centre et la péri-phérie pour expliquer les schémas de mobilité et leurs évolutions.

4.1. Des pôles constitués sur leur aptitude à attirer les migrants périphériques

Pour définir des pôles (d’emploi étant donné que nous avons restreint l’analyse aux seules migrations alternantes), nous nous sommes basés sur leur capacité d’attraction des flux dirigés vers la périphérie. Nous avons précisément sélec-tionné les communes attirant 85 % des migrants périphériques. Cela revient à isoler, dans chacune des sept aires urbaines, moins du quart des communes. Les pôles ont été formés par regroupement de communes contiguës ou proches sur la base d’une maximisation des flux intrapôles. On peut alors distinguer entre des pôles de banlieue, proches du centre et de grande taille, et des pôles péri-phériques, plus éloignés et plus petits mais situés le long des axes de transport (Tableau 4). Les pôles périphériques sont nombreux et de taille importante seu-lement à Paris et à Lyon, et peu nombreux mais de taille importante à Marseille du fait principalement du pôle d’Aix qui concentre à lui seul 70 % des emplois périphériques. Dans les quatre autres aires urbaines, les pôles périphériques sont rares, voire inexistants (à Bordeaux et Saint-Étienne).

Tableau 4 : le nombre de pôles en 1999

Marseille–Aix

Saint-Étienne

Dijon Lyon Bordeaux Grenoble Paris

Nbr de pôles 3 2 3 11 3 5 25

Nbr de pôles de banlieue

1 2 2 5 3 4 6

Nbr de pôles périphériques

2 0 1 6 0 1 19

Source : exploitation DEST du RGP99.

Entre 1990 et 1999, le nombre de pôles a peu varié, contrairement au nombre de communes constituant ces pôles, qui lui a augmenté de façon significative.

Rapport INRETS n° 277 71

Permanence des formes de la métropolisation dans les aires urbaines françaises

Cette augmentation s’est faite par ajout de communes contiguës aux précédentes et situées le long des principaux axes de transport.

4.2. Impact sur les migrations alternantes

Les distances domicile–travail sont en moyenne plus faibles pour les actifs des pôles et, plus encore, des pôles de banlieue que des pôles périphériques, par rap-port aux actifs habitant dans le reste des communes périphériques (Tableau 5). En effet, outre le fait qu’en moyenne près de la moitié des actifs des pôles tra-vaille dans une autre commune du pôle, la proximité aux emplois du centre et des autres pôles, spécifiquement dans le cas des pôles de banlieue, favorise des distances domicile–travail réduites.

Tableau 5 : distance moyenne (en km) des actifs à leur lieu de travail selon leur lieu de résidence en 1999

Marseille–Aix

Saint-Étienne

Dijon Lyon Bordeaux Grenoble Paris

Centreintracentreextracentre

12,711,425,5

6,76,67,5

5,44,77,5

7,04,8

12,5

6,55,29,5

5,03,18,0

9,94,7

21,9

Pôles de banlieueintrapôleextrapôle

12,05,6

18,0

5,83,27,8

5,93,77,2

8,34,511,5

8,35,4

10,8

6,83,59,1

9,93,7

14,7

Pôles périph.intrapôleextrapôle

12,78,0

23,6

12,22,5

18,8

12,53,49,5

14,92,8

19,0

15,24,8

20,4

Reste aire urbaine 16,5 8,7 13,9 14,1 15,6 12,3 20,2

Total aire urbaine 13,3 6,7 7,6 9,4 9,6 7,8 13,5Source : exploitation DEST du RGP99.

Toutefois, les pôles n’échappent pas, et ce dans aucune des sept aires urbai-nes, au phénomène d’éloignement croissant entre les lieux d’habitat et les lieux d’emplois, comme en témoigne la progression des distances moyennes de leurs actifs entre 1990 et 1999 (Tableau 6).

Tableau 6 : évolution des distances de migration des actifs des pôles entre 1990 et 1999

Marseille–Aix

Saint-Étienne

Dijon Lyon Bordeaux Grenoble Paris

Pôles de banlieue 3,3 % 5,8 % 7,5 % 9,3 % 8,3 % 11,8 % 12,8 %

Pôles périphériques 6,2 % 11,8 % 12,1 % 1,6 % 9,6 %

Source : exploitation DEST des RGP90 et RGP99.

En effet, de moins en moins d’actifs habitent dans leur pôle d’emploi (y compris dans de « grands » pôles comme celui d’Aix-en-Provence) au profit d’emplois loca-lisés non pas au centre, dont l’attractivité recule nettement, mais dans les autres pôles, ainsi que dans le reste des communes périphériques (emplois qui effective-ment ont crû depuis 1990, mais tout de même moins que dans les pôles).

72 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

On voit se renforcer un schéma selon lequel les actifs des pôles de banlieue travaillent, outre dans leur propre pôle, au centre et de façon croissante dans un autre pôle de banlieue, les actifs des pôles périphériques, outre dans leur pôle, au centre13 et dans le ou les pôles de banlieue les plus proches ou situés le long du même axe de transport.

Simultanément, l’aire d’attraction des emplois localisés dans les pôles s’étend progressivement, ce qui est assez surprenant pour les pôles périphériques dont on aurait pu penser qu’ils fonctionneraient comme de (petits) centres secondai-res à l’aire d’attraction locale (Tableau 7). Au contraire, leur présence dans des parties peu congestionnées et bien desservies par les axes de transport, permet vraisemblablement à un nombre croissant d’actifs d’habiter de plus en plus loin des zones les plus urbanisées.

Tableau 7 : évolution des rayons d’attraction des emplois des pôles entre 1990 et 1999

Marseille–Aix

Saint-Étienne

Dijon Lyon Bordeaux Grenoble Paris

Pôles de banlieue 18,8 % 13,0 % 12,6 % 9,9 % 9,6 % 14,7 % 12,8 %

Pôles périphériques 12,0 % 34,1 % 10,4 % 57,7 % 9,6 %

Source : exploitation DEST des RGP90 et RGP99.

Finalement, on n’observe donc pas, comme on aurait pu s’y attendre, une « autonomisation » croissante de chacun des pôles en termes d’emploi, y compris dans le cas du centre secondaire formé autour de la commune d’Aix-en-Provence. Il faut dire que de moins en moins d’actifs habitent dans un pôle, préférant le reste des communes de la périphérie, tandis que les emplois continuent à s’y implanter massivement, creusant ainsi le décalage spatial entre les zones résidentielles et les zones d’emploi. Les actifs localisés dans le reste des communes périphé-riques, où le déséquilibre emplois/actifs est sévère, parcourent en moyenne de plus grandes distances que tous les autres, et ces distances tendent également à s’accroître entre 1990 et 1999, notamment parce que ces personnes, bien que de plus en plus éloignées de la zone majeure de concentration des emplois — à savoir le centre et les pôles de banlieue — continuent d’y travailler majoritaire-ment. En outre, les actifs de plus en plus nombreux, qui s’installent dans ces communes, y travaillent de plus en plus rarement.

Le nombre, la localisation des pôles mais aussi leur positionnement par rap-port au centre se révèlent importants. Ainsi, les pôles de banlieue, proches du centre, constituent avec ce dernier une sorte de centre élargi au sein duquel la majeure partie des actifs qui y résident y travaillent, donc parcourent d’assez fai-bles distances. Simultanément, le poids de ce centre élargi et, réciproquement,

13 Ce qui occasionne dans le cas de Marseille–Aix de fortes distances de migration du fait de l’éloignement entre le pôle d’Aix et la commune de Marseille.

Rapport INRETS n° 277 73

Permanence des formes de la métropolisation dans les aires urbaines françaises

le trop faible poids des pôles périphériques induisent une dépendance, pour une grande partie, des actifs des pôles périphériques mais également du reste des communes périurbaines, à ce centre élargi, et occasionnent de grandes distan-ces. L’existence en périphérie lointaine d’un véritable centre secondaire comme celui d’Aix-en-Provence, s’il limite dans une certaine mesure le recours au centre, induit des déplacements très longs du fait de l’éloignement entre Aix et Marseille et finalement se solde par des distances moyennes de migrations très élevées dans l’aire urbaine, donc un grand nombre de kilomètres. En revanche, l’exem-ple de Paris, où existent un grand nombre et une relativement bonne distribution spatiale des pôles périphériques, induit un fonctionnement en sous-marchés de l’emploi et donc des distances moyennes de migration somme toute réduites, eu égard à la taille du territoire.

Conclusion

Cette recherche s’est attachée à préciser comment le double processus de suburbanisation des actifs et des emplois, couplé au développement de pôles en périphérie, s’accompagne de mutations significatives dans les schémas de la mobilité domicile–travail.

Le premier résultat est tout d’abord la confirmation sur les sept aires urbaines du double phénomène de concentration et d’étalement urbain. Les aires urbaines continuent à attirer population et emploi, qui s’étalent de plus en plus, de manière diffuse pour la population et plus concentrée dans des pôles ou le long des axes principaux de transport pour l’emploi.

Concernant le volume des migrations alternantes, le principal résultat est que les aires urbaines centrées, y compris une fois neutralisée l’influence de leur taille (surface), n’apparaissent pas plus économes (en termes de distances, donc de kilomètres moyens par actifs) que les aires urbaines plus déconcentrées.

Les évolutions observées entre 1990 et 1999 suggèrent, par ailleurs, que les polarités mises en évidence ne sont pas en mesure de résister à la dissociation croissante entre habitat et emploi et à un étalement urbain généralisé et diffus des résidences hors des pôles. L’exemple du pôle d’Aix-en-Provence en est le plus caractéristique, puisque dans ce pôle secondaire par excellence, la part des actifs stables a régressé.

Les analyses effectuées ne nous permettent donc pas de trancher, à ce stade, sur l’avantage de telle forme urbaine (centrée ou déconcentrée) sur une autre. Elles montrent dans tous les cas une tendance à une certaine « déstructuration » des flux au niveau des pôles qui, ne s’autonomisant pas, contribuent à l’accrois-sement des distances domicile–travail.

74 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

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Rapport INRETS n° 277 75

Partie 2

Les dynamiques économiques

Rapport INRETS n° 277 77

Querétaro : un pôle émergent de développement industriel

Selva Daville Landero

Au cours des trente dernières années, le monde industriel a connu des transfor-mations profondes qui ont pu être comparées à celles de la révolution industrielle. Le modèle fordiste, qui a prédominé et créé de la stabilité durant des décennies, est entré en crise, et avec lui, le système de production de masse qui fut l’un de ses principaux fondements. Les grandes entreprises, caractérisées par l’intégra-tion verticale, la séparation des tâches de conception et de fabrication, et leur rigidité ont semblé obsolètes, et avec elles toute une époque. Bien qu’en gesta-tion depuis des années a surgi comme paradigme à suivre le modèle développé, au Japon, de production flexible ou ajustée (lire production), et avec lui tous les changements consubstantiels à l’organisation de la production, que sont les dis-tributions et livraisons juste à temps (LJT), le système de qualité totale, l’usage de nouvelles technologies liées à l’informatique et l’établissement d’un nouveau type de relations interindustrielles. Devant le succès du nouveau paradigme, il a sem-blé que l’organisation japonaise allait se convertir en l’unique alternative à l’ancien modèle. Parmi les défenseurs de cette option, on peut mentionner Piore et Sabel (1984), lesquels, à partir du succès des districts industriels dans la soi-disant « Troisième Italie », ont projeté qu’à la production en masse fordiste, rigidement structurée, allait succéder un nouveau régime basé sur la spécialisation flexible, dont la forme spatiale serait le district.

Cependant, comme l’ont affirmé Boyer et Durand (1993), ceci constitue un futur peu sûr, puisqu’il ne considère pas la complexité des procédures de coor-dination nécessaires à la mise en œuvre d’un système productif. Ce dernier doit en effet s’adapter aux spécifications nationales, au système éducatif, au rôle de l’état, sans oublier bien évidemment les rôles de l’insertion internationale et du mode de régulation.

De ce fait, on assiste à une transition difficile et complexe dont la caractéris-tique est plutôt l’hétérogénéité, au niveau des spécifications nationales et aussi parce que les paradigmes hérités de la production industrielle de masse sont encore présents. Ainsi, Leborgne et Lipietz (1994) signalent que la tendance vers la désintégration verticale des procédés de production n’est pas générale, puisqu’existent diverses formes de coopération et de hiérarchie entre les entrepri-ses. Tous les territoires ne s’orientent pas vers une flexibilité du contrat salarial, et les différentes trajectoires suivies par les territoires, qui peuvent les conduire

78 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

au succès ou à l’échec, sont en relation avec les politiques suivies par ses élites, lesquelles peuvent être de « flexibilité défensive » ou de « flexibilité offensive ».

Ce travail s’inscrit dans l’hypothèse selon laquelle la restructuration du for-disme n’emprunte pas une seule voie, encore moins s’agissant d’une économie périphérique où les essais de reproduction du modèle de la production flexible sont encore plus infructueux que ceux des pays centraux développés. Le modèle qui a été suivi, dans notre cas, semble correspondre à ce que Boyer et Durand (1993 : 77–78) appellent la stratégie d’hybridation, laquelle consiste à combiner certaines routines ou procédures provenant de modèles étrangers avec des for-mes d’organisation qui existent déjà à l’intérieur d’un espace socioéconomique donné. Il s’agirait ainsi de l’adaptation de principes généraux à un contexte local où la configuration finale serait originale, mais hybride entre le modèle étranger et la configuration préexistante.

Cette recherche a pour objectif de caractériser le développement industriel spécifique de Querétaro (pôle industriel du Mexique) dans ses diverses éta-pes, depuis les années 1960 à nos jours, en considérant l’espace comme une construction historique, sociale, économique et politique et non comme un sim-ple continent plat et homogène sur lequel se trouvent simplement les activités (Benko et Lipietz, 2000). De la même façon, c’est également une contribution aux réflexions sur les nouvelles formes d’organisation industrielle qui sont en train de se substituer au fordisme, dans le cas d’une économie périphérique, et qui ont provoqué des mouvements importants de restructuration industrielle et territoriale au niveau mondial.

Dans le premier chapitre, nous analysons les principaux facteurs qui ont contribué à la construction du territoire industriel de Querétaro, depuis les années 1960, en pleine étape de substitution des importations, quand ont été établies les bases d’une industrialisation fondée sur le secteur de la fabrication de machines et d’équipements.

Dans la deuxième partie sont présentées les statistiques économiques, qui permettent de corroborer la consolidation du projet d’industrialisation basé sur le secteur mécanique, ainsi qu’une brève description de la concentration territoriale de l’industrie et de la population.

Finalement sont analysés les résultats d’un travail de terrain réalisé sur les entreprises de la branche « fabrication d’équipements automobiles » de Querétaro, lesquelles permettent d’observer la diversité du nouveau modèle de production.

1. Les origines de l’industrie métallurgique et de travail des métaux

L’état de Querétaro fait partie de la région Centrale, la plus importante du pays, et se situe à 211 km de la ville de Mexico. Il représente 0,6 % du territoire national, 1,4 % de la population et 2,7 % du produit intérieur brut (PIB) manufac-turier. Historiquement, Querétaro a bénéficié d’une position stratégique, comme passage presque obligé entre le centre et le nord du pays, comme le montre le

Rapport INRETS n° 277 79

Querétaro : un pôle émergent de développement industriel

prolongement vers le nord de l’autoroute Mexico–Querétaro, laquelle est mainte-nant connue comme l’autoroute du Traité de libre échange (TLE).

La décennie des années 1960 marque le début d’une étape importante dans l’industrialisation de Querétaro. C’est à cette période que se produisent les trans-formations et le remplacement progressif des industries alimentaires, liées au secteur primaire local et régional et développées dans les années 1940, par une industrie métallurgique et de travail des métaux. Ceci a été réalisé au cours de la période de substitution des importations, dans la phase qui correspondait non seulement à la substitution de biens de consommation durables, mais à la fabri-cation de machines et d’équipements. Quels sont les facteurs qui ont provoqué le succès de ce projet ?

En premier lieu, on peut mentionner les accords établis entre les Gouvernements, tant Fédéral que de l’État, avec des groupes du secteur privé nationaux et étran-gers (principalement nord-américains) qui ont permis d’attirer des investissements de montants significatifs vers l’État de Querétaro. L’action gouvernementale s’est orientée principalement vers deux axes : le fiscal, avec des exonérations d’im-pôts, et celui de la création de conditions générales pour la production, grâce à la modernisation des voies de communication, à des opérations d’urbanisation et dans une moindre mesure au développement de zones et parcs industriels.

De cette façon se sont établies principalement des entreprises de deux bran-ches, celle de la fabrication de machines et d’équipements lourds pour l’industrie de construction ainsi que celle des équipements automobiles, qui devait ensuite devenir la plus importante de l’état de Querétaro, par sa valeur ajoutée. Parmi ces entreprises on peut relever la présence de « Tremec », firme productrice de trans-missions et de boîtes de vitesses, tant pour le marché national qu’international, et de « Amerance », spécialisée en produits du caoutchouc pour l’industrie auto-mobile (Estrada, 1996). En même temps, d’autres entreprises des sous-secteurs traditionnels, comme les industries alimentaires et textiles, sont venues s’établir dans la zone.

Parmi les investisseurs privés nationaux, il faut mentionner tout spécialement le groupe « Ingenieros Civiles Asociados (ICA) », consortium dédié à la construc-tion de grandes infrastructures publiques, qui a joué un rôle remarquable dans le décollage industriel de Querétaro. Il a non seulement participé à la construc-tion de l’autoroute Mexico–Querétaro, mais il a également réalisé sur place des investissements productifs (industries métallurgiques et de travail des métaux) qui complétaient son activité dans la branche de la construction. De la même façon, il a développé un parc industriel et des projets de logements.

Dans les années 1960, la dynamique industrielle a eu un apogée qui coïncide avec l’extension à quatre voies de l’autoroute Mexico–Querétaro et avec la mise en œuvre de la politique fédérale de déconcentration d’activités qui cherchait à remédier au problème de la surconcentration sur la ville de Mexico. Des incita-tions ont ainsi, en quelque sorte, été données aux entreprises afin qu’elles puis-sent se localiser ou se relocaliser hors de la capitale de la République (Garza, 1985 : 223).

80 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

À ce sujet, il faut cependant préciser que ce projet décentralisateur s’est pro-duit à l’intérieur même de la même région centre, au sein de laquelle Querétaro apparaissait comme une des entités les plus aptes, de par sa position la plus éloignée de la ville de Mexico.

Cette période correspond à la consolidation du projet d’industrialisation à Querétaro, notamment avec le développement du secteur de la fabrication de machines et d’équipements, à l’intérieur duquel il faut souligner l’arrivée du groupe « Spicer » (fabrication d’équipements automobiles) avec six entreprises.

Malgré la crise de 1982, l’une des plus sévères de l’économie mexicaine et qui a marqué la fin du modèle de substitution des importations, et la nécessité de faire face à une ouverture croissante vers l’extérieur, le poids du sous-secteur de l’industrie métallurgique et de travail des métaux a pu se maintenir des années 1980 à nos jours, sans que par ailleurs ne disparaissent les activités traditionnel-les comme les industries alimentaire et du textile (bien que cette dernière soit une des plus frappées par l’entrée de produits à très bon marché provenant principa-lement de Chine). On peut également noter une diversification par l’implantation d’entreprises de l’industrie chimique et du papier.

Durant cette phase, la création de parcs industriels a été prise en charge par le secteur privé, et l’action gouvernementale locale s’est centrée sur l’entretien et la modernisation de l’infrastructure déjà existante et sur la promotion des politiques industrielles fédérales, principalement celles qui visent à encourager l’exportation. Les politiques fiscales locales ont eu moins de poids, et se limitent aujourd’hui à des mesures d’exemption de l’impôt sur le revenu.

Cependant, ce projet d’industrialisation, qui, d’un côté a été un succès, a tou-tefois aussi contribué à approfondir les inégalités au sein de l’état de Querétaro. Il a, en effet, reproduit à l’échelle locale le modèle encore dominant au niveau national, selon lequel autour de la ville la plus importante, dans ce cas Querétaro, la capitale de l’état, s’est concentrée l’activité économique la plus dynamique. La municipalité de Querétaro concentre 48 % des établissements manufacturiers, 47 % du personnel occupé et 58 % de la valeur ajoutée.

Dans cette configuration territoriale, l’autoroute Mexico–Querétaro a joué un rôle fondamental, et son prolongement vers le nord du pays et les États-Unis constitue l’un des principaux avantages pour l’attraction des investissements. Cette autoroute a déterminé territorialement l’orientation des investissements en infrastructure et équipement, tant gouvernementaux que privés, lesquels ont été localisés principalement dans la municipalité de Querétaro et de San Juan del Río, configurant un couloir industriel. Sur un total de 21 territoires industriels (entre zones, parcs et villes industrielles), huit sont à Querétaro. De la même façon, l’investissement étranger atteint une concentration de 74 %. Pour sa part, San Juan del Río, l’autre pôle industriel de l’état, concentre 17 % des entreprises, 30 % des travailleurs et 26 % de la valeur ajoutée (Illustration 1).

Rapport INRETS n° 277 81

Querétaro : un pôle émergent de développement industriel

Illustration 1 : la localisation des parcs industriels

Source : SEDESU, Querétaro annuaire économique, 2002.

Ces décisions ont produit une structure industrielle hautement concentrée. La structure urbaine reflète ce même modèle. En 2000, sur un total de 1 404 306 habitants dans l’État, 45,7 % vivaient dans la municipalité de Querétaro, bien que son taux de croissance ait baissé de 6,1 % durant la période 1970–1980 à 3,5 % en 1990–2000. Cette situation a conforté le poids de la zone métropo-litaine de la ville de Querétaro, intégrée par les municipalités de Querétaro, El Marqués, Corregidora et Huimilpan qui, ensemble, concentrent 58 % de la population, 57 % des établissements industriels et 59 % de l’emploi industriel (Illustration 2).

Au cours des 30 dernières années l’État de Querétaro a donc été le lieu de transformations profondes. Alors que l’économie locale était au départ principale-ment liée au secteur primaire, Querétaro s’est peu à peu transformé en un terri-toire industriel. Bien que son développement ait commencé relativement tard, en se basant sur des industries traditionnelles (industries alimentaires ou textiles), la dynamique économique a permis de développer la fabrication de machines et d’équipements. Ces changements dans la structure économique sont présentés dans la section suivante.

82 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Illustration 2 : concentration de la population et de l’industrie à Querétaro en 2000

San LuisPotosi

QUERETARO

CORREGDORA

HUIMILPAN

SAN JUANDEL RIO

Distribucion de la poblacionpor municipio. IENGI, 2000.

Mayor concentracionMediana concentracionMediana concentracion

Participacionmunicipal seguinnumero de establecimientoi ndustrialess,INEGI 1998.

Guanajuato

Hidalg

o

Estado de

México

Michoacan

2. Les transformations de la structure économique

La consolidation du pôle industriel de Querétaro peut être mise en évidence par comparaison au contexte national. Entre 1993 et 1999, la participation de Querétaro au PIB national, a augmenté de 1,4 à 1,7 %, cette croissance étant poussée par le développement industriel et tertiaire (INEGI, 2000 : 26).

L’industrie de l’État a vu son poids croître dans le PIB manufacturier national, de 2,1 % en 1993 à 2,7 % en 1999 (idem : 38). Au sein de l’industrie manufactu-rière, il faut souligner le rôle de l’industrie du papier dont le poids a crû de 3,6 % en 1993 à 4,5 % en 1999. L’industrie chimique qui la suit en importance a vu son poids s’élever de 2,4 à 3,1 %. Enfin, la fabrication de machines et d’équipements est passée de 2,5 à 3,2 %. Ces secteurs ont constitué les secteurs à enjeu de l’industrie manufacturière (idem : 54, 58 et 70).

En 1970, le Produit intérieur brut étatique (PIBE) avait la structure suivante : le secteur primaire représentait 17,9 %, le secondaire 36,9 % et le tertiaire 45,2 %. Presque trois décennies après, en 1999, la structure avait changé de manière significative, au détriment des activités primaires qui, passées par une crise pres-que permanente et faisant face à une sévère décapitalisation, ne représentent

Rapport INRETS n° 277 83

Querétaro : un pôle émergent de développement industriel

plus que 2, 6 %. Le secteur secondaire a augmenté à 41,5 %, et le tertiaire a progressé à 55,9 %. Au cours de cette période, le rôle de l’industrie manufac-turière a été déterminant. Elle est passée de 27,3 % du PIBE en 1970 à 35,2 % en 1999. Parmi les autres activités industrielles, les activités minières, qui furent importantes dans le passé, ont seulement contribué en 1999 à hauteur de 0,2 %. On relèvera enfin que la construction représente 4,7 % du PIBE en 1999 et l’élec-tricité 1,4 %.

L’importance croissante du secteur tertiaire dans l’économie de Querétaro a été dynamisée par les services qui représentent en 1999 25 % du PIBE et la croissance du transport qui est passé de 4 % en 1970 à 12 % en 1999. Au sein des services on peut mettre en évidence l’importance des services communaux, sociaux et à la personne, associés à la croissance industrielle.

Vu l’importance de l’industrie manufacturière, il est nécessaire d’analyser sa composition par sous-secteurs, laquelle permet dans une approximation statis-tique d’identifier les tendances de restructuration, c’est-à-dire les sous-secteurs qui ont augmenté leur participation dans l’industrie manufacturière, ceux qui sont entrés en crise et ceux qui ont émergé.

En 1993, l’univers de l’industrie manufacturière à Querétaro était constitué de 3 054 établissements pour un total de 60 518 travailleurs. Parmi les différents sous-secteurs il faut souligner en premier lieu les activités métallurgiques et de travail des métaux, où se concentraient 854 établissements (27,9 %) employant 39,1 % du personnel occupé dans la manufacture et générant 38,3 % de la valeur ajoutée brute. Il faut souligner plus particulièrement les activités de fabrication des pièces pour le système de transmissions automobiles, la fabrication d’appareils à usage domestique et celle des machines et d’équipements électriques.

Les industries traditionnelles (alimentaires et textiles), à l’installation plus ancienne à Querétaro, se retrouvent respectivement en deuxième et troisième position, avec 27,5 % des établissements, 17,2 % des travailleurs de l’industrie manufacturière et 23,8 % de la valeur ajoutée pour les industries alimentaires et 13,1 % des établissements, 16,5 % du personnel, mais seulement 6,8 % de la valeur ajoutée pour l’industrie textile.

Bien qu’ils ne soient pas très importants par le nombre d’établissements ou par l’emploi généré, les secteurs du papier et de la chimie ont une importance en termes de valeur ajoutée, contribuant respectivement à hauteur de 13,2 et 13,0 %.

En 1998, sur un total de 4 000 établissements, 28 % correspondaient à l’industrie textile, 26 % aux produits métalliques et 13 % à l’industrie du bois. Si l’on considère le personnel occupé (91 512 travailleurs), l’industrie qui occupe la première place est celle de la fabrication de machines et d’équipements avec 37 %, suivie du textile avec 24 %. En troisième place se situent les industries alimentaires et la chimie, les deux avec 13 %. Si on observe la valeur ajoutée, la plus grande part est produite par l’industrie de produits métalliques avec 36 % du total, suivie des industries alimentaires avec 23 % et de la chimie avec 19 % (Tableau 1).

84 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Tableau 1 : l’industrie manufacturière à Querétaro, par secteurs d’activités, 1993–1998

Sous-secteurNombre

d’établis.Salariés

V.A. milliers

Nombre d’établis.

SalariésV.A.

milliers

1993 1993 de $ 93 1998 1998 de $ 98

Ensemble Querétaro 3 054 60 617 3 852 933 4 000 91 512 6 967 328

% 100 100 100 100 100 100

S.31 Ind. alimentaire 839 10 440 915 951 1 139 12 298 1 627 743

% 27 17 24 28 13 23

S.32 Ind. textile 400 10 015 262 768 497 21 646 487 717

% 13 17 7 12 24 7

S.33 Ind. du bois 381 1 449 18 616 538 2 150 25 185

% 12 2 0 13 2 0

S.34 Ind. papier 194 4 314 506 961 289 5 685 583 455

% 6 7 13 7 6 8

S.35 Ind. Chimique 100 7 197 501 083 171 11 630 1 301 235

% 3 12 13 4 13 19

S.36 Ind. de production minière non métallique

258 3 098 163 328 300 3 498 409 397

% 8 5 4 8 4 6

S.37 Ind. métallurgique 0 122 4 477 0 139 6 862

% 0 0 0 0 0 0

S.38 Ind. de machines et équipements

852 23 668 1 474 633 1 026 33 976 2 518 877

% 28 39 38 26 37 36

S.39 Autres industries 0 215 5 018 * 490 6 857

% 0 0 0 0 1 0

Source : INEGI, XIV et XV, recensements industriels, Mexique, 1994 et 2001.

Pour 1998, des informations plus désagrégées peuvent être mises en relief : en premier lieu, la branche automobile, avec 11,6 % de la valeur ajoutée, suivie de l’élaboration d’autres produits alimentaires pour la consommation humaine, et le commerce de produits non alimentaires en gros, incluant des aliments pour animaux, avec 5,3 % (INEGI, 1998).

À partir des données présentées, on peut observer que le projet industriel de Querétaro a mûri, en permettant le maintien du sous-secteur de la fabrication de machines et d’équipements, sans perdre la diversification dans les autres sec-teurs. Cependant, quels ont été les facteurs et les stratégies de restructuration qui ont permis ce succès relatif, aux termes duquel on n’a perdu ni l’emploi ni l’importance dans le contexte national ?

Dans le but d’approfondir la connaissance des caractéristiques des transfor-mations industrielles de Querétaro et leur déploiement sur le territoire, la section suivante présente les résultats qualitatifs d’un travail empirique effectué auprès des entreprises de la branche automobile, dans un contexte mondial et natio-nal de restructuration. Précisons qu’il n’existe pas au sein de l’espace analysé

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Querétaro : un pôle émergent de développement industriel

d’usine d’assemblage. La branche est représentée seulement par la production d’équipements automobiles.

3. La restructuration dans l’industrie des équipements automobiles

L’industrie des équipements automobiles à Querétaro, comme on l’a déjà men-tionné, a commencé son développement dans les années 1960, dans le cadre de la stratégie de substitution des importations des machines et équipements, mais avec des capitaux dont l’origine est nationale (mais hors de l’État de Querétaro) ou étrangère. Il s’agit d’un tournant important en matière de stratégie locale, sachant qu’il ne s’agissait pas par ailleurs de renforcer les activités de production de fonte ou d’acier dans cet État, puisqu’elles n’y existaient pas au préalable, et qu’il n’y avait pas non plus de gisements particuliers de minerais.

L’industrie des équipements automobiles de Querétaro a accru son impor-tance au niveau national en passant de la dixième place en 1993, avec 2,9 % de la valeur ajoutée totale de l’industrie, à la huitième place en 1998, avec 4,9 % (INEGI, 2002 : 36). Ce repositionnement de Querétaro est encore plus significa-tif si l’on considère que les états occupant les premières places ont des usines d’assemblage ou de moteurs. De fait, la production des équipements automobi-les de Querétaro s’est spécialisée, d’une part, dans des produits de plus grande technologie, tels que les moteurs et ses pièces ou les pièces pour transmissions et, d’autre part, dans des pièces moins sophistiquées, comme les rétroviseurs, antennes, toits ouvrants, entre autres. Le dynamisme de cette branche peut s’ex-pliquer par le montant important des investissements étrangers, lesquels repré-sentent 19,2 % du total effectué dans l’État et proviennent principalement des États-Unis.

Les 13 entreprises étudiées, parmi 127, sont constituées de quatre grandes, trois moyennes, trois petites et trois microentreprises. Elles appartiennent cepen-dant à deux univers très différents, selon leur taille et la nature de leurs capitaux. Afin de donner une idée de l’amplitude de l’écart entre ces deux types d’entre-prises, on peut mentionner que, en 1993, cinq grandes entreprises concentraient 74,1 % de la production et 80,5 % de la valeur ajoutée.

Les grandes et moyennes entreprises se caractérisent par la prédominance de l’investissement étranger à 100 % dont les origines principales sont les États-Unis, suivis du Japon, de l’Angleterre et du Canada. Ces investissements ont été réalisés dans leur totalité par de grands consortiums de fabrication d’équipements automobiles internationaux et répondent à la logique de restructuration globale de l’industrie, laquelle tend à se localiser hors de ses lieux d’origine mais près des marchés importants (Van der Knaap et Le Heron, 1995).

Ces entreprises sont celles qui présentent les plus grands avantages quant à la qualité et la productivité, ce qui leur permet d’orienter principalement leur production vers l’étranger, directement ou indirectement. Les ventes qu’elles réalisent dans le marché national se dirigent principalement vers les usines

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Les formes de la métropolisation

d’assemblage. Elles se constituent ainsi en fournisseurs directs ou de premier niveau, ou bien de second niveau, avec des certificats de qualité internationaux.

Cependant, les relations qui s’établissent avec les assembleurs ne correspon-dent pas à celles que supposeraient le modèle japonais de production flexible ou les modèles intermédiaires développés en Europe ou aux États-Unis. Dans ces pays, on peut mettre en évidence la nécessité d’une étroite relation pour la conception et le dessin détaillé des équipements automobiles et pas seulement pour leur production (Womack et al., 1992). Les entreprises de Querétaro se limi-tent à la fabrication des équipements ou plutôt à l’assemblage de composants, caractéristique qui correspond à une logique de diminution du nombre de fournis-seurs directs, grâce à la livraison d’un produit complet. Par exemple, l’entreprise japonaise Nissan a seulement un fournisseur de sièges, au lieu de 25.

Par ailleurs, le juste à temps (LJT) n’a été implanté que seulement dans la moitié des cas dans ce groupe d’entreprises. L’autre moitié fonctionne encore avec le système antérieur qui implique des stocks importants de produits. Ceux qui prédominent dans tous les cas sont les contrats à long terme et permanents avec les principaux clients. Concernant l’implantation du JIT dans le processus de production de fournitures, nous n’avons rencontré que deux entreprises ayant expérimenté ce système, qui affecte environ 30 % du total des entreprises.

L’une des questions les plus préoccupantes rencontrées est que, concernant les fournisseurs, les grandes et moyennes entreprises n’ont pas produit de liens locaux importants avec des établissements de plus petite taille, puisque dans la majorité des cas, la presque totalité des produits sont importés, principalement du pays ou de la région d’origine de l’entreprise. La raison invoquée par les entrepri-ses est qu’elles ne trouvent pas les produits en question à un coût et une qualité requis, ni dans l’État ni dans le pays. Cette situation peut être vérifiée par ailleurs, puisque toutes sont inscrites dans un programme fédéral d’importation temporaire de produits (programme qui vise à encourager les exportations, par l’autorisation temporaire d’importation des inputs pour la fabrication d’un produit destiné à l’ex-portation). De la même façon, pratiquement tous les équipements et machines utilisés proviennent de l’extérieur. La prédominance des activités d’assemblage, avec des produits importés, n’est pas caractéristique que de Querétaro, mais a aussi été observée ailleurs, notamment en Argentine (Motta et al., 2000 ; Novick et Yoguel, 2001).

D’un autre côté existe un groupe d’entreprises formé par les petites et microen-treprises qui présentent des caractéristiques très différentes. En premier lieu, l’in-vestissement est de façon prédominante d’origine nationale à 100 %, sauf dans deux cas où l’investissement est à 100 % étranger et provient des États-Unis et du Japon.

La production est orientée fondamentalement vers le marché national, à l’ex-ception des cas où l’investissement est étranger. Cette situation, dans laquelle prévaut la non-appartenance à de grands consortiums internationaux d’équipe-ments automobiles, se traduit par l’absence de contrats établis depuis les pays d’origine avec les usines d’assemblage ou avec les fournisseurs directs. Pour

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Querétaro : un pôle émergent de développement industriel

ces raisons, il s’agit d’entreprises qui, dans le meilleur des cas, se situent dans le deuxième ou le troisième niveau de fournisseurs (fournisseurs de rang 2 ou 3) et se dédient à la production de pièces de moindre technologie telles que supports, ressorts ou pièces moulées. Elles n’ont pas de JIT pour les livraisons, sauf les deux entreprises exportatrices. On peut également mentionner que ces entrepri-ses, prenant conscience de leur fragilité, ont diversifié leurs clients et réalisent des travaux pour d’autres branches comme celles des industries alimentaires ou du textile.

Le processus de restructuration dans la branche des équipements automobi-les est donc dirigé par les entreprises filiales de grands consortiums mondiaux. Elles font partie de chaînes d’entreprises globales qui suivent des stratégies éga-lement mondiales.

Cela ne signifie pas que l’on refuse à ces entreprises quelque rôle dans le dynamisme généré localement, mais elles agissent dans un contexte de prédo-minance de rapports de subordination qui répondent à la logique et au fonction-nement de ces groupes et au comportement du marché extérieur, lequel a, dans la branche automobile, une plus grande importance que le marché interne. En 1980, le marché d’exportation des automobiles représentait seulement 3,6 % de la production totale, tandis qu’en 1997, il avait atteint 73 %. Les destinations prin-cipales étaient les États-Unis et le Canada, avec 89 % du total des exportations, correspondant majoritairement aux « Trois Grands » : Chrysler, Ford et General Motors (SECOFI, 1998 : 14).

Cette réorientation s’est vue grandement favorisée par les changements sur-venus en matière de régulation de l’industrie. Les différents décrets concernant le secteur automobile avaient comme objectif d’encourager les activités de substi-tution des importations de véhicules et de ses pièces. Ces activités se sont flexi-bilisées à partir de 1986 avec l’adhésion du Mexique au GATT et encore plus avec les accords commerciaux du TLCAN, spécialement pour ce qui a trait au contenu national des véhicules, lequel a maintenant une composante régionale, ainsi qu’au montant autorisé des investissements étrangers.

Parmi les facteurs de localisation que toutes les entreprises ont considéré comme les plus importants, on peut mettre en évidence la position stratégique de Querétaro qui facilite la vente de la production tant sur le marché national qu’étran-ger. Au Mexique, la production d’automobiles se concentre en huit entreprises transnationales, parmi lesquelles cinq (Chrysler, General Motors, Volkswagen, Ford et Nissan) produisent 98 % du total des véhicules fabriqués. La plus grande partie des usines d’assemblage de véhicules et de moteurs se situent dans les régions Centre, El Bajío, Nord-Ouest et Nord-Est du pays.

Pour l’industrie des équipements automobiles persiste le modèle de localisa-tion correspondant à l’ancienne localisation des usines d’assemblage, puisque 50 % du total se trouvent dans l’État de Mexico et le District Fédéral. Et, si on considère en plus les participations des autres États de la région Centre, parmi lesquels Querétaro (6 %) et Tlaxcala (1 %), on voit que cette région concentre 62 % du total de l’industrie des équipements automobiles.

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Les formes de la métropolisation

Conclusion

L’étude de ces transformations sur Querétaro démontre que la greffe du para-digme de la production flexible n’est ni facile ni rapide. Encore moins s’il s’agit d’une économie qui, si elle a expérimenté le fordisme, l’a fait d’une façon qui s’éloignait en certains aspects de sa forme classique. D’autre part, il faut prendre en considération les relations profondes qui ont prévalu historiquement avec les États-Unis où l’adaptation à ce « modèle » est encore très loin d’être effectuée de manière pleine et entière. Par ailleurs, dans un contexte de crises économiques qui semblent sans fin, on peut comprendre que le succès (certes relatif et limité) de certaines formes d’organisation de la production et de leur inscription spatiale, tende à les ériger en modèles pour d’autres territoires. La tentation est ainsi forte d’identifier des districts industriels, qui, dans notre cas, ne ressemblent pas à ceux de la « Troisième Italie », où la structure industrielle est formée par une majorité de petites et microentreprises.

Cependant, on perd de vue que la seule concentration dans l’espace, et par conséquent la proximité géographique, ne crée pas de manière automatique ou mécanique des relations étroites de coopération et d’échange de savoirs acquis entre les entreprises. Par contre, dans le cas de Querétaro, il est clair que prédo-mine une désarticulation locale entre les entreprises de la branche automobile. En premier lieu, leur développement n’a pas été basé sur une tradition industrielle qui existait antérieurement, mais il a été le résultat de logiques et de décisions externes au territoire local. En deuxième lieu, il n’existe pas dans l’État une usine d’assemblage autour de laquelle on pourrait construire un cluster automobile. En troisième lieu, la prédominance des entreprises à capital étranger fait que la logi-que et les décisions des consortiums nationaux, qui opèrent avec des stratégies de production globale, ont plus de poids que la dynamique générée localement. Ce dernier point rejoint les travaux de Martinelli et Schoenberger (1994) quant au rôle que jouent les oligopoles dans le processus de restructuration, et quant au risque que courent les entreprises qui se sont renforcées par de grandes fusions, comme dans le cas de l’industrie automobile.

À partir de ces différents éléments, il est possible d’affirmer que la voie sui-vie, au moins dans la branche industrielle la plus importante de Querétaro, pré-sente les caractéristiques d’un processus hybride dans lequel se combinent des procédés qui proviennent de modèles étrangers avec les formes d’organisations existantes au sein d’un territoire. Dans ce secteur persistent et cohabitent mani-festement des spécifications très différentes du modèle de production flexible.

Concernant la configuration territoriale, on peut dire qu’il est difficile d’aller à l’encontre de la haute concentration autour de la ville et notamment le long de l’autoroute la plus importante, puisque la localisation des entreprises est globa-lement effectuée dans les parcs et les espaces industriels dédiés existant dans ces zones. Cette concentration spatiale n’est toutefois pas nouvelle. Elle existait depuis le commencement du développement industriel de Querétaro et ne peut pas être attribuée seulement à la restructuration.

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Querétaro : un pôle émergent de développement industriel

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L’impact des zones d’activités sur la localisation des entreprises :

le cas de la périphérie lyonnaise

François Million

1. La localisation des entreprises en milieu urbain et rural

L’actualité économique nationale a été singulièrement marquée par les crain-tes suscitées par le phénomène des délocalisations et les rapports successifs sur le décrochage économique de la France. La politique gouvernementale des « pôles de compétitivité » constitue l’une des propositions phare pour répon-dre à ces inquiétudes. Par ailleurs, le système économique contemporain, dans son ensemble, se caractérise par des mutations d’ordre économique et techni-que croissantes modifiant l’environnement et l’organisation de l’entreprise. Par conséquent, de nouveaux besoins et de nouvelles contraintes de localisation apparaissent (ADEF, 1989). Afin de s’adapter à ce contexte de compétition et d’incertitudes accrues et d’assurer le bon développement de leur activité, la loca-lisation est devenue pour les entreprises un choix de plus en plus stratégique auquel les pouvoirs publics tentent de répondre (Merenne-Schoumaker, 2002 ; Scharling, 1973).

À l’échelle de l’espace urbain, la traduction spatiale de ces dynamiques ren-force une répartition des activités économiques très inégale et contribue à la pour-suite d’un double phénomène, a priori paradoxal, de concentration et d’étalement urbain des activités au profit d’un nombre réduit de sites périphériques ou cen-traux (Mignot et al., 2004). Parallèlement, les mouvements d’entreprises s’inten-sifient, en particulier suite aux transferts d’établissements et à la forte mobilité des activités les plus dynamiques. Ces dynamiques, se conjuguant avec les nouvel-les logiques de localisation, accentuent d’autant plus les déséquilibres spatiaux observés (Laine, 2000).

Du point de vue des pouvoirs publics, l’implantation d’une entreprise représente un enjeu économique de première importance : au développement de l’économie locale et de l’emploi, s’ajoute celui de la ressource fiscale. En outre, la localisa-tion des activités soulève des enjeux urbains majeurs. En effet, les collectivités locales ayant la charge de l’aménagement urbain supportent les coûts induits par ces stratégies de localisation. Prenons l’exemple des déplacements urbains ; la dissociation croissante entre les lieux de résidence et les lieux de travail n’est pas

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Les formes de la métropolisation

sans effet sur la croissance et l’allongement des migrations alternantes obser-vées, et par conséquent sur l’usage croissant de l’automobile (Tabourin, 2001 ; Talbot, 2001 ; Lemonier, 2002). Un autre problème réside dans les décisions de localisation et les transferts d’entreprises sur quelques lieux privilégiés, lesquels aggravent des disparités territoriales déjà préoccupantes en termes de ségréga-tions sociales et spatiales et notamment d’accessibilité à l’emploi.

En raison de ces enjeux, les collectivités se retrouvent en compétition pour accueillir et retenir les entreprises sur leur territoire et souhaitent, dès lors, dispo-ser de moyens susceptibles de maîtriser et d’influencer l’organisation spatiale des activités (Benard et al., 1999). Parmi les diverses interventions à leur disposition, la réalisation de zones d’activités est devenue l’une des actions les plus répandues et les plus importantes par les investissements qu’elle représente14. En outre, son impact financier n’est pas à négliger : dans la communauté d’agglomérations de Rennes, 75 % des ressources de la taxe professionnelle proviennent des zones d’activités, alors que celles-ci ne regroupent que 37 % des établissements contri-buables (Leblanche et Guenancia-Breger, 2000). Elles constituent également un enjeu pour les entreprises par les espaces, les équipements, les services qu’elles offrent pour leur implantation et leur développement.

Usuellement, une zone d’activités se définit comme un ensemble de terrains acquis et regroupés par un maître d’ouvrage, généralement public, parfois privé, et préalablement équipés pour faciliter l’installation, le fonctionnement et le déve-loppement d’établissements à caractère économique (MOATTI, 1968). Nous la définirons ici comme un site spécifiquement aménagé pour l’accueil des activités économiques et se référant à des documents d’urbanisme. Dans son principe, la réalisation de zones d’activités répond ainsi à un double objectif de développe-ment et d’aménagement (CNER, 2002). C’est à la fin des années 1960, avec la loi d’orientation foncière de 1967 et l’application des premiers schémas directeurs, que se mettent en place les premières zones d’activités se référant à des docu-ments d’urbanisme (Gueniot, 1974). La notion de zone d’activités, telle que nous l’utilisons de nos jours, est donc récente. Les zones d’activités sont d’une grande diversité. Différentes générations de zones se sont développées, présentant des caractéristiques très variées au niveau de leur localisation, de leur vocation, de leur surface, de leur niveau d’équipements, etc. Ainsi, nous observons des zones à dominante industrielle, commerciale ou bien tertiaire, des zones mixtes accueillant indistinctement toutes les entreprises quelle que soit leur dimension ou la nature de leur activité ou, au contraire, spécialisées (plateformes logistiques, parcs scien-tifiques ou technologiques, etc.). En France, ces sites aménagés se sont déve-loppés sans grande cohérence en périphérie des agglomérations et le long des principaux axes de transport. Par ailleurs, la situation nationale se caractérise par une offre pléthorique en état de surcapacité durable (Jallas, 2001). Dans l’interven-

14 Les zones d’activités représentent le premier poste d’investissement des aides indirectes au développement économique. Pour donner un ordre de grandeur, les collectivités ont programmé 234 millions d’euros de dépenses pour l’aménagement des zones d’activités en 2000 (Source : Ministère de l’Économie des Finances et de l’Industrie, 2002).

Rapport INRETS n° 277 93

L’impact des zones d’activités sur la localisation des entreprises

tion pratique, les zones d’activités sont souvent caractérisées par leurs définitions urbanistiques et spatiales, les liant de façon étroite aux collectivités locales et à l’administration (Hussenot, 2002). Il s’agit des zones définies dans les documents d’urbanisme (Plan local d’urbanisme [PLU, ex-POS], Schéma d’aménagement [SDAU]…) comme étant affectées à un usage industriel, commercial ou de servi-ces pour accueillir des entreprises et leur permettre d’exercer leurs activités (zones UI ou NA du PLU). Elles peuvent prendre plusieurs formes (lotissements, ZAC…) et sont donc soumises aux règles d’urbanisme des communes sur lesquelles elles sont implantées. En outre, de la multiplication des réalisations par les collectivités locales est née une concurrence forte qui crée une pression sur les prix ou sur les aides financières locales, avec comme conséquence une remise en cause de la pertinence financière de ce type d’intervention, notamment soulignée dans un rapport de la Cour des Comptes (Cour des Comptes, 1996). Enfin, la compétition entre collectivités locales a entraîné des investissements excédentaires dans les zones d’activités ainsi qu’une banalisation de l’offre (Madies, 1999).

À la suite de ces constats, nous nous sommes interrogés sur l’efficacité et les effets d’un tel dispositif. L’objet de notre étude est de réaliser une évaluation de cette politique publique, tel que l’énonçait le décret du 18 novembre 1998 portant sur la création du Conseil national de l’évaluation (CNE) : « Évaluer une politique, c’est apprécier son efficacité en comparant ses résultats aux objectifs assignés et aux moyens mis en œuvre ». De ce fait, l’offre de zone d’activités répond-t-elle aux besoins de localisation des entreprises ? Les investissements conséquents sollicités pour la réalisation et la gestion d’une zone d’activités sont-ils toujours justifiés ? Étant donné que notre recherche s’intéresse plus particulièrement à l’im-pact des zones d’activités sur la localisation des entreprises en milieu urbain, nos questionnements ont été les suivants : les zones d’activités constituent-elles un instrument de politique publique susceptible d’influencer les décisions de localisa-tion des entreprises ? Avec quels effets sur l’organisation spatiale des activités ? Il n’existe pas à notre connaissance, ou peu, de véritable bilan sur cette question.

Pour réaliser notre évaluation, nous étudierons l’attractivité des zones d’acti-vités. L’attractivité des zones d’activités se définit comme la capacité de celles-ci à accueillir des entreprises relativement aux autres sites d’implantation. Le prin-cipe consiste à différencier les établissements suivant un choix de localisation dichotomique entre une implantation en zone d’activités ou dans le diffus (i.e. hors zone d’activités). Cette attractivité sera estimée par un indicateur simple correspondant à la proportion d’établissements implantés en zone d’activités en fonction de l’espace étudié et des caractéristiques de l’entreprise considérées. Tout en ayant conscience que les zones d’activités ne représentent que l’un des nombreux éléments du choix de localisation d’une entreprise, il nous semble utile d’approfondir la connaissance sur leur attrait. En effet, de nombreuses interroga-tions se trouvent être à l’heure actuelle sans réponses satisfaisantes. Quel est l’attrait effectif des zones d’activités en milieu urbain ? (Combien ?) Auprès de quelles entreprises ? (Qui ?) Quels sont les lieux et les sites d’implantation privilé-giés ? (Où ?) Enfin, quelles sont les raisons de cet attrait ? (Pourquoi ?) L’analyse de l’attractivité concourt à expliquer les préférences de localisation des entre-

94 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

prises et, in fine, l’impact des zones d’activités. Elle permettra ainsi d’apprécier l’efficacité de l’action mise en œuvre par les collectivités locales pour maîtriser ces localisations. Ce chapitre n’a pas pour but de répondre à l’ensemble de ces interrogations mais d’apporter des éléments d’information et de réflexion à travers l’étude des zones d’activités de la périphérie lyonnaise.

2. L’attrait des zones d’activités : auprès de quelles entreprises et sur quel territoire ?

Les différentes études empiriques traitant de la répartition des établissements en zones d’activités et hors zones d’activités observent un attrait globalement modeste des zones d’activités en nombre d’établissements, mais plus significatif en termes d’emplois. Par exemple, dans le Bas-Rhin, les 296 zones répertoriées accueillent 41 % des effectifs salariés mais seulement 10 % des établissements du département (ADEUS, 1998). Dans une précédente étude réalisée sur l’aire urbaine de Bordeaux, nous avons estimé, sur un échantillon de 27 158 établis-sements15 en 1999, seulement 4 967 établissements implantés dans une zone d’activités, soit 18 % du total (Million, 2003). Dans le cas de l’agglomération lyon-naise, des disparités significatives au niveau du nombre d’emplois sont atten-dues, comme le laisse présager une synthèse sur les neuf zones d’activités en requalification du Grand-Lyon (communauté urbaine de Lyon)16. Ces dernières, accueillant 2 936 établissements (3,6 % des établissements du Grand-Lyon), représentent 66 106 emplois17 (11,7 % des emplois du Grand-Lyon). Ensuite, ces travaux notent une attractivité différenciée suivant le secteur d’activité et le ter-ritoire considéré. Dans les Bouches-du-Rhône, les zones d’activités concentrent 24 % de l’emploi salarié privé et 43 % de l’emploi industriel. En outre, hors de la commune de Marseille, les zones d’activités attirent 37 % de l’emploi salarié privé contre 10 % à Marseille (Schwendimann, 1999).

Une étude effectuée sur Lyon entre 1968 et 1980 a montré que les choix d’im-plantation en zone industrielle, suite à des délocalisations, ont toujours été infé-rieurs aux installations en zone diffuse (Masson, 1984). De nos jours, la situation semblerait s’inverser. Le développement des zones d’activités est un phénomène récent dont l’ampleur n’a cessé de s’accroître à partir des années 1980. Dans la région Île-de-France, au cours de la période 1982–1994, près des deux tiers des nouvelles emprises industrielles ont été le fait des zones d’activités (IAURIF,

15 Les données sur les établissements sont issues du fichier SIRENE de l’Insee pour l’année 1999. Seuls les établissements d’un salarié et plus ont été pris en compte, lesquels représentent un peu moins de la moitié de l’ensemble des établissements de l’aire urbaine (27 369 établissements sur un total de 58 264 établissements, soit près de 47 %). 16 Les neuf sites en requalification du Grand-Lyon sont les suivants : Chassieu, Mi-Plaine, Craponne, La Mouche, La Soie-La Rize, Lyon-Nord–Val-de-Saône, Lyon-Sud-Est, Meyzieu-Jonage, PERICA et la Vallée de la Chimie. Source : Fiche de synthèse des sites en requalification du Grand-Lyon, document de travail, Agence d’urbanisme pour le développement de l’agglomération lyonnaise (AUDAL), 2003.17 Source : Fichier SIRENE janvier 2003 (Insee) — estimation d’effectif réalisée par l’Agence d’Urbanisme pour le développement de l’agglomération lyonnaise.

Rapport INRETS n° 277 95

L’impact des zones d’activités sur la localisation des entreprises

2002). Néanmoins, cette évolution ne se limite plus au secteur de l’industrie, puis-que désormais, l’essentiel des entreprises récemment implantées dans les zones d’activités relèvent du secteur tertiaire aussi bien en nombre d’établissements qu’en nombre d’emplois (IAURIF, 2002). À l’avenir, la part affectée aux zones d’ac-tivités devrait être plus importante en raison notamment d’une diminution progres-sive des possibilités d’implantation offertes hors zones d’activités. Cette tendance deviendra d’autant plus forte dans la mesure où les infrastructures proposées par les collectivités répondraient mieux aux impératifs et exigences variables des entreprises (Côtes d’Armor Développement, 2002). Pour conclure, signalons que l’attractivité entre les différentes zones d’activités demeure très contrastée. D’un côté, des zones d’activités connaissent un très fort développement, tandis que de l’autre, de nombreuses zones sont caractérisées par une absence durable de commercialisation, voire un taux d’occupation quasi nul.

3. L’étude de la périphérie lyonnaise : présentation de la méthodologie et des données utilisées

Le principe de notre étude consiste à différencier les établissements suivant un choix de localisation dichotomique entre une implantation en zone d’activités et une implantation dans le diffus (i.e. hors zones). Dans le cadre de ce chapitre, une approche territoriale et sectorielle volontairement générale a été retenue afin d’évaluer au mieux la nature des établissements implantés dans les zones d’ac-tivités, mais également afin d’identifier les secteurs géographiques vers lesquels s’est porté le choix de localisation des entreprises. L’intensité de l’attractivité sera mesurée par le niveau de la part affectée aux zones d’activités suivant le secteur d’activité de l’établissement et la structure spatiale considérée. L’objectif étant alors d’obtenir une typologie permettant d’examiner la manière dont les entrepri-ses se sont localisées en fonction des territoires et compte tenu de leurs activités, et de déterminer, in fine, l’impact des zones d’activités à travers les différents niveaux d’attractivité territoriale et sectorielle.

Pour cerner l’ensemble des phénomènes urbains, le choix d’une commune ou d’une structure intercommunale est insuffisant puisque les effets étudiés débor-dent souvent de ce découpage institutionnel. Toutefois, en raison des données disponibles, cette étude se limitera au périmètre de la communauté urbaine de Lyon (le Grand-Lyon) regroupant 55 communes. Pour caractériser ces commu-nes, nous utiliserons principalement le Recensement général de la population de l’Insee de 1999 (RGP, 1999). Ensuite, notre démarche a consisté à rechercher une structure spatiale qualifiée de « territoire », à partir du regroupement des unités spatiales de base constituées par les communes, permettant des compa-raisons territoriales et de mieux rendre compte des comportements spatiaux des entreprises. Dans l’idéal, nous utilisons le terme de territoire pour faire référence à un espace sur lequel l’entreprise fonctionne et se développe (Texier, 1999). Par ailleurs, il est peu probable qu’il coïncide parfaitement avec celui sur lequel la collectivité a compétence à intervenir (i.e. les découpages administratifs) particu-lièrement en matière de réalisation de zones d’activités.

96 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Pour cette étude, nous avons retenu un regroupement des communes en fonction de leur positionnement géographique d’après un découpage réalisé par l’Observatoire partenarial lyonnais en économie (OPALE). Au total, neuf territoi-res ont été identifiés : le Centre, l’Est-Sud, l’Est-Nord, le Sud-Ouest, le Sud-Est, le Nord-Ouest, le Plateau Nord, l’Ouest, le Val-de-Saône (Figure 1 et Annexe 1). Le « centre » correspond aux communes de Lyon et de Villeurbanne. Nous nom-merons « périphérie » l’espace constitué par les 53 autres communes du Grand-Lyon. Ce découpage permet de prendre partiellement en compte le phénomène d’autocorrélation spatiale et complète utilement la lecture centre–périphérie des localisations avec la comparaison des différents territoires au sein de la périphé-rie. En outre, il a l’avantage de présenter de manière plus pertinente la localisation des entreprises et l’offre existante en zones d’activités. Par ailleurs, étant donné que les enjeux qui nous intéressent se déroulent principalement hors du centre, cette étude se centrera sur la périphérie.

Illustration 1 : regroupement des 55 communes de la communauté urbaine de Lyon en neuf territoires

Source : OPALE, 2004.

Pour cette analyse, les établissements ont été caractérisés par secteurs d’ac-tivité. Les données utilisées pour caractériser les établissements sont issues du fichier SIRENE de l’Insee de 1999. Le secteur d’activité de l’établissement est codifié à partir de la nomenclature d’activité française (NAF) en 700 postes. Il ne s’agit donc pas de l’identification des fonctions réellement exercées sur le site par les établissements, ce type d’informations ne pouvant être renseigné dans le répertoire SIRENE, celui-ci ne prenant en considération que l’activité principale exercée par l’établissement (APE). Par ailleurs, afin de disposer de regroupe-ments standardisés et adaptés à l’analyse économique, une redéfinition des sec-

Rapport INRETS n° 277 97

L’impact des zones d’activités sur la localisation des entreprises

teurs, selon un passage de la NAF en 700 postes à la nomenclature économique de synthèse (NES) en 16 postes, a été effectuée. Ensuite, afin de faciliter l’étude de l’organisation spatiale des établissements, seuls neuf secteurs d’activités à un niveau agrégé ont été retenus après avoir procédé à un regroupement des établissements à partir des subdivisions de la NES (Annexe 2). Au total, notre échantillon est composé de 23 509 établissements répartis dans les huit territoi-res périphériques du Grand-Lyon.

Enfin, pour identifier et caractériser les zones d’activités implantées en péri-phérie, nous avons utilisé principalement les Plans d’occupation des sols (POS) du Grand-Lyon de 1994 et de 2001 et les fichiers de l’OPALE. Diverses sources, essentiellement communales, ont complété nos informations. Deux critères nous ont permis de sélectionner les zones d’activités : une reconnaissance réglemen-taire en termes d’urbanisme et un site préalablement aménagé pour l’accueil des entreprises, ce qui exclut les espaces à vocation économique futurs non viabilisés (NA). Ainsi, en termes d’urbanisme, les sites retenus pour notre étude sont les suivants : les zones d’activités existantes (UI), les zones commerciales (UX), les zones d’aménagement concerté à vocation économique (ZAC) et les anciennes zones d’activités tertiaires (UE). La méthode d’identification des établissements implantés en zone d’activités repose sur un référentiel adresse de l’établissement à partir du répertoire SIRENE. Les données obtenues sont alors des estimations issues du croisement de nos différentes sources. En définitive, notre échantillon est composé de 74 zones d’activités représentant au total une superficie de 4 500 ha et regroupant 6 667 établissements.

4. Les caractéristiques sectorielles et territoriales de l’échantillon

En moyenne, les huit territoires étudiés disposent de 560 ha en zones d’acti-vités regroupant plus de 800 établissements sur un ensemble de près de 3 000 établissements. Toutefois, la distribution des établissements au sein de la péri-phérie se caractérise par de fortes disparités territoriales. Effectivement, le ter-ritoire « Ouest » regroupe seulement 231 établissements en zones d’activités pour une superficie de 140 hectares alors que le territoire « Est-Sud » concentre plus de 1 700 établissements implantés en zones d’activités pour une surface de 1 000 ha. En comparant la dispersion relative des établissements et de la sur-face disponible en zones d’activités, à l’aide des coefficients de variation, nous obtenons deux résultats intéressants. D’une part, les établissements implantés en zones d’activités se répartissent de manière plus inégale entre les différents territoires que l’ensemble des établissements de la périphérie, d’autre part, la dis-tribution territoriale des surfaces à vocation économique est plus concentrée que celle des établissements.

Ensuite, nous nous sommes interrogés sur l’intensité de la relation entre la surface disponible exprimée en hectares des zones d’activités d’un territoire et le nombre d’établissements implantés dans celles-ci, d’une part, et l’ensemble des établissements du territoire, d’autre part (Figure 2). Nous utiliserons le modèle de régression linéaire pour étudier cette relation. Nous supposons ici que la surface

98 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

en zones d’activités d’un territoire permet d’expliquer le nombre d’établissements localisés dans celui-ci ainsi que le nombre d’établissements implantés dans ses zones d’activités. Les coefficients de détermination obtenus nous signalent, tou-tes choses égales par ailleurs, l’existence d’une relation significative entre la sur-face des zones d’activités et le nombre d’établissements implantés dans celles-ci (coefficient de détermination r2 = 0,70), mais plutôt faible avec l’ensemble des établissements (coefficient de détermination r2 = 0,57). Dans les deux cas, l’in-formation prise en compte par la régression n’est pas suffisante pour conclure à l’existence d’un lien entre la surface des zones d’activités et le nombre d’éta-blissements. À l’évidence, d’autres facteurs explicatifs interviennent. Néanmoins, pour les établissements implantés en zones d’activités, l’analyse des résidus18 de la régression nous permet de distinguer différents types de territoires. Des terri-toires regroupant moins d’établissements que ce que voudrait la surface de leurs zones d’activités (résidus fortement négatifs — particulièrement le cas du terri-toire Sud Est [–482] et des territoires concentrant plus d’établissements que ce que voudrait la superficie de leurs zones d’activités (résidus fortement positifs — notamment les territoires Nord Ouest [+372] et Est-Sud [+369] et, plus faiblement, le territoire Est-Nord [+197]).

Illustration 2 : comparaison de la répartition territoriale de la surface disponible en zones d’activités avec la répartition territoriale des

établissements implantés en zones d’activités et de l’ensemble des établissements de la périphérie du Grand-Lyon en 1999

30%

25%

20%

20%

10%

5%

0%

Surface des zones d'activités (en ha)de 140 à 1234 ha

Etablissements implantés en zones d'activités (nombre)de 231 à 1709 établissents

Ensemble des établissements (nombre)de 1736 à 4208établissents

Ouest Nord Est VAl de Saöne Nord-Ouestsud Ouest Est Nord Est Sud Sud Est

Note : Territoires classés par ordre croissant en fonction de la surface disponible en zones d’activités (en hectares).Sources : SIRENE 1999 (Insee), POS 2001 du Grand-Lyon, OPALE 2004.

18 Résidus de la régression de Y (nombre d’établissements implantés en zones d’activités) en X (surface disponible en zones d’activités). Les résidus sont exprimés dans l’unité de mesure de Y, donc en nombre d’établissements.

Rapport INRETS n° 277 99

L’impact des zones d’activités sur la localisation des entreprises

S’agissant du profil sectoriel des zones d’activités, nous discernons les carac-téristiques suivantes (Annexe 3). En premier lieu, elles accueillent principalement des établissements du secteur du commerce de gros (27 % des établissements implantés en zone d’activités), de l’industrie (22 %) et des services supérieurs aux entreprises (14 %). Ensembles, ces trois secteurs réunissent 63 % des éta-blissements localisés en zone d’activités. À l’inverse, la structure d’activité de la périphérie lyonnaise est nettement plus équilibrée. En effet, six secteurs d’activi-tés sur neuf représentent une part comprise entre 15 et 13 % de l’ensemble des établissements. Tandis que les trois secteurs restants représentent chacun 6 % des établissements de la périphérie.

Dans un second temps, afin d’identifier les spécificités sectorielles des zones d’activités, nous avons calculé des indices de spécialisation19 (Is) en prenant pour référence la structure d’activité de la périphérie lyonnaise. La valeur de l’indice exprime le degré de spécialisation sectorielle des zones d’activités par rapport à notre territoire de référence. Une valeur supérieure à 1 signifie une spécialisa-tion plus que proportionnelle dans le secteur considéré. Cette information permet d’examiner les spécificités sectorielles des zones d’activités et les sites d’implanta-tion privilégiés des secteurs d’activité en tenant compte des effets de taille.

Les résultats signalent une surreprésentation dans les zones d’activités des secteurs du commerce de gros (Is = 1,73) et des industries (Is = 1,69). À l’in-verse, ils montrent une sous-représentation dans les services aux particuliers (Is = 0,40), les activités financières et immobilières (Is = 0,59), le commerce de détail (Is = 0,61) et le secteur de la construction (Is = 0,66). L’examen des écarts relatifs à l’indépendance permet de préciser nos précédents commentaires (Illustration 3). Ces écarts font apparaître les excédents et les déficits d’implan-tation sectoriels de nos deux types d’espaces (zones d’activités ou diffus). Si l’on considère le secteur d’activité de l’établissement, il y a clairement une surrepré-sentation des établissements appartenant aux secteurs du commerce de gros et des industries dans les zones d’activités d’une part, une sous-représentation des secteurs des services aux particuliers, du commerce de détail, de la construction et des activités financières et immobilières d’autre part. À l’opposé, le diffus se caractérise par une surreprésentation de ces derniers secteurs et une sous-repré-sentation des secteurs du commerce de gros et des industries. Par contre, ni les zones d’activités, ni le diffus ne se différencient par un excédent ou un déficit d’implantation auprès des secteurs des services supérieurs aux entreprises, des services opérationnels et des transports. En définitive, notre étude distingue trois groupes de secteurs d’activités en fonction du site d’implantation choisi.

19 Calcul de l’indice de spécialisation sectorielle ou de concentration :ISij =

[ / ][ / ]Eij EjEi En

Où ISij est l’indice de spécialisation ou de concentration du secteur i dans le territoire j :• Eij = Nombre d’établissements du secteur i dans le territoire j ;• Ej = Nombre d’établissements total dans le territoire j ;• Ei = Nombre d’établissements du secteur i dans l’ensemble de la périphérie du Grand Lyon ;• En = Nombre d’établissements total de la périphérie du Grand Lyon.

100 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Illustration 3 : visualisation des écarts relatifs à l’indépendance (écarts au profil moyen de la périphérie)

-400 -300 -200 -100 0 100 200 300 400 500 600

Services aux particuliers

Commerce de détail

Construction

Activités financières etimmobilières

Services opérationnels

Services supérieurs auxentreprises

Transports, Postes etTélécommunications

Industries

Commerce de gros

Diffus

Zones d'activités

Données issues du fichier SIRENE de 1999 (Insee).

Après l’observation des spécificités sectorielles des zones d’activités, il est intéressant d’étudier les spécificités territoriales de ces dernières. Nous notons que les trois territoires de l’Est lyonnais concentrent 63 % des établissements implantés en zones d’activités, alors qu’ils n’accueillent que 48 % des établisse-ments de la périphérie. Globalement, la répartition des établissements implantés en zones d’activités (coefficient de variation de 0,65) est nettement plus hété-rogène que celle de l’ensemble des établissements (coefficient de variation de 0,30). Nous avons calculé des indices de concentration territoriale (Ic) en utilisant la même méthode que les indices de spécialisation sectorielle. Ils nous permet-tront de déterminer les territoires dans lesquels nous observons une surreprésen-tation d’établissements implantés en zones d’activités par rapport à la répartition territoriale moyenne de l’ensemble des établissements dans la périphérie lyon-naise. À la lecture des indices de concentration, nous identifions deux groupes de territoires. D’une part, des territoires où les établissements implantés en zones d’activités sont surreprésentés par rapport à la répartition moyenne, particuliè-rement dans le territoire Est-Sud (Ic = 1,43). D’autre part, des territoires où les établissements implantés en zones d’activités sont sous-représentés, notam-ment dans les territoires Ouest et Nord-Est (respectivement 0,40 et 0,45). Ce que confirme la visualisation des écarts relatifs à l’indépendance (Illustration 4). Nous pressentons ici l’existence d’une relation entre le territoire et le site d’implantation. Au final, nous notons la présence de deux catégories de territoires en fonction des préférences de sites d’implantation des établissements.

Rapport INRETS n° 277 101

L’impact des zones d’activités sur la localisation des entreprises

Illustration 4 : visualisation des écarts relatifs à l’indépendance (écarts au profil moyen de la périphérie)

-250 -200 -150 -100 -50 0 50 100 150 200 250

Ouest

Nord Est

Val de Saône

Sud Ouest

Est Nord

Nord-Ouest

Sud Est

Est Sud

Diffus

Zones d'activités

Données issues du fichier SIRENE de 1999 (Insee).

5. L’attractivité des zones d’activité : un premier bilan

Après la présentation des principales caractéristiques territoriales et sectoriel-les de notre échantillon, nous allons maintenant mesurer l’intensité de l’attractivité des zones d’activités, telle que nous l’avons définie, au niveau de la périphérie lyonnaise. Sur l’ensemble des 23 509 établissements, 6 667 établissements sont implantés dans une zone d’activités, soit 28 % du total. Globalement, l’impact des zones d’activités sur la localisation des établissements est donc loin d’être négli-geable. En outre, ce résultat reste proche des niveaux obtenus dans les diverses études traitant de cette question.

Une analyse plus fine nous signale des taux d’attractivité fortement disparates entre les territoires (Illustration 5). Alors que dans le territoire Est-Sud, les zones d’activités concentrent plus de 40 % des établissements du territoire, dans le territoire Ouest, elles n’attirent plus que 10 % des établissements. Afin de distin-guer les particularités territoriales puis sectorielles des niveaux d’attractivité tout en prenant en compte les effets de structure, nous avons utilisé la méthode de standardisation indirecte20 pour déterminer des indices comparatifs d’attractivité.

20 La méthode de standardisation indirecte consiste à comparer le nombre de cas observés dans une population au nombre de cas attendus dans cette même population. Les cas attendus sont ceux que l’on observerait si chacun des groupes qui composent cette population subissait le taux du groupe correspondant d’une population de référence (ici le taux de la périphérie). Le rapport des cas observés aux cas attendus détermine un indice comparatif. L’indice relatif à la population dont les taux sont retenus comme taux-types est par définition égal à 1. Les indices comparatifs des populations que l’on veut comparer s’apprécient par rapport à cette valeur :• inférieurs à 1, ils traduisent une sous-représentation du phénomène dans le lieu étudié ;• supérieurs à 1, ils témoignent d’une surreprésentation ;• sensiblement égaux à 1, ils révèlent une représentation normale du phénomène.Cet indice est parfois exprimé en pourcentage et se trouve aussi défini comme ratio standardisé par analogie avec le standardized ratio dans la littérature anglo-saxonne.

102 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Un indice ayant une valeur supérieure à 1 signifie une surreprésentation de l’at-tractivité dans le territoire considéré. Inférieur à 1, il témoigne d’une sous-repré-sentation. Après correction de l’effet sectoriel, les indices comparatifs d’attractivité territoriale obtenus révèlent les deux groupes de territoires identifiés auparavant. Les trois territoires de l’Est lyonnais (Est-Sud [1,37], Sud-Est [1,21], Est-Nord [1,11], ainsi que le territoire Nord-Ouest [1,20]) se caractérisent par une surrepré-sentation de la part d’établissements implantés en zones d’activités.

Illustration 5 : attractivité territoriale des zones d’activités (en %)

11%

13%

18%

22%

33%

35%

35%

41%

0,2 0,4 0,6 0,8 1 1,2 1,4 1,6

Ouest

Nord Est

Val de Saône

Sud Ouest

Est Nord

Nord-Ouest

Sud Est

Est Sud

Note : visualisation des écarts au taux moyen d’attractivité de la périphérie avec les indices comparatifs (l’indice de la périphérie = 1 soit un taux de 28 %).Sources : SIRENE 1999 (Insee), POS 2001 du Grand-Lyon.

Lorsque nous observons l’attractivité sectorielle des zones d’activités, nous retrouvons là aussi des écarts de taux importants entre les secteurs d’activité (Illustration 6). Près de la moitié des établissements appartenant aux secteurs du commerce de gros et des industries sont implantés en zones d’activités (res-pectivement 49 et 48 %) contre seulement 11 % des établissements du secteur des services aux particuliers. Les indices comparatifs d’attractivité confirment la classification obtenue suite à l’étude des spécificités sectorielles des zones d’ac-tivités. Ainsi, trois groupes de secteurs se différencient nettement. Une première catégorie de secteurs d’activité obtenant des taux d’attractivité bien supérieurs au taux moyen de référence (i.e. celui de la périphérie), c’est le cas du commerce de gros (1,64) et des industries (1,62). À l’inverse, un deuxième groupe obtenant des indices inférieurs à 1, lesquels traduisent une sous-représentation de l’attrac-tivité des zones d’activités dans ces secteurs d’activité, particulièrement dans les services aux particuliers (0,42) et dans une moindre mesure dans le commerce

Rapport INRETS n° 277 103

L’impact des zones d’activités sur la localisation des entreprises

de détail (0,62), les activités financières et immobilières (0,62) et le secteur de la construction (0,66). Enfin, un dernier groupe dans lequel les secteurs ne compor-tent pas des indices sensiblement éloignés de 1, ce qui témoigne d’une attrac-tivité proche du taux moyen observé parmi les établissements de la périphérie. Nous retrouvons ici les services supérieurs aux entreprises (1,10), les transports (1,02) ainsi que les services opérationnels aux entreprises (0,86).

Illustration 6 : attractivité sectorielle des zones d’activités (en %)

25%

19%

17%

17%

11%

30%

31%

48%

49%

0,2 0,4 0,6 0,8 1 1,2 1,4 1,6 1,8

Services aux particuliers

Commerce de détail

Activités financières etimm obilières

Construction

Services opérationnels

Transports, Postes etTélécommunications

Services supérieurs auxentreprises

Industries

Commerce de gros

Note : visualisation des écarts au taux moyen d’attractivité de la périphérie avec les indices comparatifs (l’indice de la périphérie = 1, soit un taux de 28 %).Sources : SIRENE 1999 (Insee), POS 2001 du Grand-Lyon.

En approfondissant encore l’analyse, l’observation de la répartition des diffé-rents niveaux d’attractivité en fonction du territoire et du secteur d’activité nous révèle des écarts entre les taux encore plus forts (Tableau 1). Comment expli-quer l’ampleur de telles disparités ? Pour tenter de répondre à cette interroga-tion, nous avons retenu une analyse structurelle géographique. Bien souvent, les différences entre observations spatialisées ne se résument pas à des écarts de taille. Deux territoires diffèrent aussi l’un de l’autre par leur structure d’activité. Précédemment, nous avons noté que les niveaux d’attractivité étaient fort dif-férents d’un secteur d’activité à l’autre. Dès lors, nous pouvons nous demander dans quelle mesure les écarts observés entre les taux d’attractivité des territoires sont attribuables à des différences de structure d’activité ? C’est pour répondre à cette question que l’analyse structurelle géographique est utilisée (Jayet, 1993 ; Delisle et Laine, 1999). Il s’agira alors de comprendre les différences de taux d’at-tractivité entre les territoires.

104 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Tableau 1 : taux d’établissements implantés en zones d’activités selon le territoire et le secteur d’activité (en %)

Secteurs d’activité

Territoires Indus Const Cgros Cdétail Trans Finim Sersup Seropé SerpartEst-Nord 59 % 20 % 55 % 15 % 23 % 22 % 38 % 24 % 11 %Est-Sud 62 % 24 % 66 % 26 % 43 % 26 % 48 % 31 % 16 %Nord-Ouest 40 % 20 % 51 % 38 % 27 % 21 % 36 % 37 % 18 %Ouest 17 % 15 % 15 % 6 % 15 % 7 % 13 % 17 % 5 %Nord-Est 28 % 9 % 21 % 14 % 10 % 7 % 10 % 7 % 5 %Sud-Est 54 % 22 % 62 % 9 % 45 % 29 % 48 % 34 % 13 %Sud-Ouest 36 % 19 % 39 % 17 % 29 % 11 % 20 % 20 % 11 %Val-de-Saône 36 % 13 % 36 % 8 % 13 % 7 % 18 % 9 % 9 %Périphérie 48 % 19 % 49 % 17 % 31 % 17 % 30 % 25 % 11 %

Sources : SIRENE 1999 (Insee), POS 2001 du Grand-Lyon.

Le principe de l’analyse structurelle géographique repose sur l’estimation des effets sectoriels et des effets géographiques pour expliquer les différences entre les taux moyens d’attractivité des territoires. Le plus souvent, effet sectoriel et effet géographique apparaissent simultanément. L’analyse structurelle géographique permet de distinguer, dans les différences entre taux moyens territoriaux, la part qui revient à l’un ou l’autre de ces deux effets. Toutefois, ce type d’analyse est très sensible à la classification des secteurs d’activité retenue et au découpage spatial utilisé. Au final, nous nous servirons de la comparaison des deux effets pour évaluer l’impact des zones d’activités. Notre hypothèse est la suivante : si l’effet sectoriel l’emporte, alors l’impact des zones d’activités sera considéré comme relativement faible face aux spécificités sectorielles des territoires. Au contraire, si l’effet territorial prime, alors, le différentiel d’attractivité des territoires pourrait s’expliquer, toutes choses égales par ailleurs, par l’offre en zones d’activités du territoire. Les résultats obtenus expriment une nette prédominance de l’effet territorial sur l’effet sectoriel dans l’explication du différentiel d’attractivité des territoires avec la moyenne de la périphérie lyonnaise (Tableau 2). Les zones d’activités peuvent alors être considé-rées comme l’une des composantes plausible de cet effet territorial.

Tableau 2 : les composantes sectorielle et territoriale de l’attractivité des zones d’activités, selon le territoire considéré

Territoires Taux d’attractivitéDisparité

territoriale*Effet sectoriel Effet territorial

Est-Sud 41 % 0,12 0,01 0,11Sud-Est 35 % 0,07 0,01 0,06Nord-Ouest 35 % 0,06 0,00 0,06Est-Nord 33 % 0,05 0,02 0,03Sud-Ouest 22 % –0,06 –0,02 –0,05Val-de-Saône 18 % –0,11 –0,01 –0,09Nord-Est 13 % –0,16 –0,02 –0,14Ouest 11 % –0,17 –0,02 –0,15

* Différentiel d’attractivité avec la moyenne de la périphérie du Grand-Lyon (28 %)Source : SIRENE 1999 (Insee).

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L’impact des zones d’activités sur la localisation des entreprises

Après l’observation des particularités territoriales et sectorielles, et l’étude de l’attractivité des zones d’activités, il s’agit maintenant de mieux évaluer leur impact sur l’organisation spatiale des établissements en nous intéressant aux spécificités sectorielles des différents territoires étudiés. Autrement dit, dans quelle mesure les particularités et l’attractivité des zones d’activités permettent-elles de com-prendre et d’expliquer la répartition spatiale des établissements au sein de la périphérie lyonnaise ?

À l’échelle de la périphérie lyonnaise, nous identifierons les secteurs d’activités qui engendrent les spécialisations sectorielles les plus importantes. On a effectué le classement croisé de l’ensemble des établissements dans les divers territoires de la périphérie lyonnaise, en fonction du secteur d’activité de l’établissement. On présente généralement cette information dans un tableau à double entrée particulier, le tableau de contingence, comportant en ligne les unités géographiques et en colonnes l’ensemble des modalités d’un caractère qualitatif. Dans notre cas, les territoires sont portés dans les lignes et les secteurs d’activités dans les colonnes. Le tableau de contingence obtenu donne la répartition, en 1999, des 23 509 établissements dans les huit territoires et les neuf secteurs d’activité considérés (Annexe 3). Pour repérer ces secteurs d’activités qui, isolément ou en association, introduisent les plus grandes disparités dans l’ensemble géographique, l’analyse factorielle des correspondances est un outil bien adapté21. Elle permet d’individualiser, en les hiérarchisant, les dimensions principales, ou facteurs, indépendants les uns des autres, qui sont à l’origine des différenciations géographiques les plus grandes et donc, des spécialisations les plus importantes. Cette analyse nous permettra de mettre en évidence une typologie territoriale.

L’illustration 7 représente le plan factoriel formé par les deux premiers axes de l’analyse. Le point central situé à l’intersection des deux axes représente le profil moyen en ligne et en colonne. Les territoires et les secteurs d’activités sont proje-tés sur ce plan, ils sont d’autant plus éloignés de ce point d’origine que leur profil s’écarte du profil moyen. Les axes factoriels sont hiérarchisés par l’importance des écarts au profil moyen qu’ils représentent (le premier facteur représente ici 78 % de l’inertie totale et le second 14 %). Les particularités de profil soulignées par chaque facteur sont regroupées en fonction de leurs ressemblances en ter-mes de spécialisations territoriales ou sectorielles. Elles sont indépendantes de celles représentées par chacun des autres facteurs. Sur le graphique, la proximité entre un territoire et l’un des secteurs d’activités s’interprète comme une valeur positive importante dans le tableau des écarts à l’indépendance.

21 L’analyse des correspondances appliquée à un tableau de contingence permet de visualiser directement les écarts à l’indépendance aux profils moyens en ligne et en colonne. Les distances au profil moyen sont calculées ainsi comme des inerties, c’est-à-dire des variances où les carrés des écarts à la moyenne sont pondérés par l’inverse du poids de chaque variable.

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Les formes de la métropolisation

Illustration 7 : la répartition spatiale des établissements dans la périphérie lyonnaise : analyse factorielle du croisement

secteurs d’activité/territoires d’implantation

Sources : SIRENE 1999 (Insee), POS 2001 du Grand-Lyon.

On observe sur le plan factoriel, l’opposition exprimée par le premier facteur entre les territoires de l’Ouest lyonnais (les territoires Nord-Ouest et Ouest) spécia-lisés dans le tertiaire supérieur (les services supérieurs aux entreprises et les acti-vités financières et immobilières), et les territoires de l’Est lyonnais (les territoires Sud-Est, Est-Nord et Est-Sud) spécialisés dans les industries et les transports.

La composante 2, qui représente seulement 14 % de l’information, pourrait, elle, marquer un contraste entre les trois territoires de l’Est lyonnais, où les activités s’implantant davantage en zones d’activités sont surreprésentées (le commerce de gros, les industries et à un moindre degré, les transports) et les territoires où les activités localisées préférentiellement dans le diffus sont surreprésentées (les services aux particuliers, la construction et le commerce de détail). Par ailleurs, on note que le territoire Nord-Ouest se situe du même côté de l’axe que les trois territoires de l’Est. Signalons que le Nord-Ouest se distingue de l’Ouest en rai-son d’une spécialisation dans les services supérieurs aux entreprises. Or, les établissements implantés en zones d’activités reproduisent et accentuent cette spécificité (Annexe 4). Ce que confirme la visualisation des écarts à l’indépen-dance (Illustration 8). Dans l’ensemble, deux secteurs d’activité se distinguent plus particulièrement : il s’agit des industries et des services supérieurs aux entre-prises. Nous notons un net excédent d’implantation des services supérieurs aux

Rapport INRETS n° 277 107

L’impact des zones d’activités sur la localisation des entreprises

entreprises dans le Nord-Ouest ainsi qu’un excédent d’implantation des indus-tries dans l’Est-Nord. Par ailleurs, le Nord-Ouest se caractérise également par un déficit d’implantation des industries traduisant la spécialisation du territoire et la sélectivité spatiale des services supérieurs aux entreprises. Cette seconde com-posante serait alors susceptible de représenter l’impact des zones d’activités en tant qu’élément de différenciation spatiale.

Illustration 8 : répartition territoriale et sectorielle des établissements implantés en zones d’activités dans la périphérie lyonnaise en 1999 :

visualisation des écarts relatifs à l’indépendance (écarts au profil moyen de la périphérie)

Industries

Industries

Services supérieurs aux entreprises

-100 -50 0 50 100 150 200

Est Nord

Est Sud

Nord-Ouest

Ouest

Nord Est

Sud Est

Sud Ouest

Val de Saône

Services aux particuliers

Services opérationnels

Services supérieurs aux entreprises

Activités financières et immobilières

Transports, Postes et Télécommunications

Commerce de détail

Commerce de gros

Construction

Industries

Sources : SIRENE 1999 (Insee), POS 2001 du Grand-Lyon.

En définitive, l’analyse factorielle des correspondances nous permet de distin-guer au total quatre groupes de territoires en fonction de leurs spécificités secto-rielles et des préférences de localisation des établissements.

Un premier groupe constitué par les trois territoires de l’Est lyonnais accueille des activités fortement consommatrices d’espaces (commerce de gros, industries, transports), lesquelles s’implantent davantage en zones d’activités. En outre, l’im-portance des surfaces disponibles en zones d’activités dans ces territoires (70 % de la superficie totale en zones d’activités de la périphérie) permet de répondre à la demande d’espace de ces établissements.

En second lieu, le Nord-Ouest, spécialisé dans les services supérieurs aux entreprises, voit sa particularité sectorielle renforcée par les caractéristiques de ses établissements implantés en zones d’activités. Cette situation s’explique

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Les formes de la métropolisation

vraisemblablement par la présence d’un vaste ensemble de parcs d’activités regroupés sous une entité commune dénommée le Pôle économique ouest du Grand-Lyon (TECHLID).

Ensuite, parmi les territoires spécialisés dans les activités localisés dans le diffus, nous retrouvons un premier groupe relatif aux territoires résidentiels habi-tuels (Val-de-Saône, Sud-Ouest et Nord-Est), rassemblant des activités locali-sées en fonction de la population (services aux particuliers, commerce de détail, construction).

Enfin, un second type de territoire résidentiel, plus spécifique, où des activi-tés traditionnellement centrales sont surreprésentées (les activités financières et immobilières). Nous pouvons l’expliquer par le fait que les territoires de l’Ouest lyonnais concentrent une proportion de ménages aisés plus forte que dans le reste de la périphérie. Ainsi, la présence d’activités financières et immobilières serait une réponse aux demandes particulières de cette catégorie de population.

Conclusion

L’étude des particularités sectorielles et territoriales des établissements, ainsi que celle relative à l’attractivité sectorielle et territoriale des zones d’activités, nous apportent une lecture cohérente de l’organisation spatiale des entreprises observée au sein de la périphérie lyonnaise. Manifestement, les zones d’activités s’avèrent jouer un rôle significatif auprès des décisions de localisation des éta-blissements. La question reste de mieux connaître la nature et l’ampleur de cet impact. D’après nos premiers éléments de réponse, les zones d’activités accen-tueraient les spécificités sectorielles et territoriales de la périphérie lyonnaise. Les interventions des collectivités locales ont ainsi renforcé les disparités spatiales.

Bien entendu, l’effet territorial constaté ne se réduit pas aux zones d’activités ; de nombreux éléments sont à considérer comme les infrastructures de transports, la distance au centre ou bien encore les économies d’agglomération (Aydalot, 1979 ; Polese, 1994). N’oublions pas que les zones d’activités se sont réalisées le long des principaux axes routiers, et que l’accessibilité est notoirement reconnue comme l’un des principaux facteurs de localisation des entreprises.

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Rapport INRETS n° 277 109

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Rapport INRETS n° 277 111

L’impact des zones d’activités sur la localisation des entreprises

Annexes

Annexe 1 : découpage de la périphérie lyonnaise en huit territoires, répartition de la population, de l’emploi et des établissements en 1999

TerritoiresCommunes(Nombre)

Population 1999(en %)

Emploi 1999(en %)

Établissements 1999

(en %)

Est-Sud 4 16,3 20,9 17,9

Est-Nord 4 16,2 14,8 17,3

Sud-Ouest 8 16,5 13,8 13,5

Sud-Est 5 15,3 18,9 13,0

Nord-Ouest 7 8,1 10,8 12,2

Nord-Est 3 12,4 8,2 10,0

Ouest 6 7,9 7,3 8,7

Val-de-Saône 16 7,3 5,2 7,4

Périphérie 53 597 865 253 918 23 509

Moyenne 6,62 74 733,12 31 739,75 2 938,62

Minimum 3 43 572 13 243 1 736

Maximum 16 98 497 53 048 4 208

Coefficients de variation 0,33077 0,44811 0,30365

Sources : RGP 1999 et SIRENE 1999 (Insee).

Annexe 2 : les neuf secteurs d’activité retenus à un niveau agrégé de la nomenclature économique de synthèse en 16 postes (NES 16)

Secteurs d’activité NES 16 (Niveau 1 à 2)

Industries

EB : industries agricoles et alimentairesEC : industries des biens de consommationED : industrie automobileEE : industries des biens d’équipementEF : industries des biens intermédiaires

Construction EH : construction

Commerce de grosEJ1 : commerce et réparation automobileEJ2 : commerce de gros, intermédiaires

Commerce de détail EJ3 : commerce de détail, réparations

Transports, postes et télécommunicationsEK : transportsEN1 : postes et Télécommunications

Activités financières et immobilièresEL : activités financièresEM : activités immobilières

Services supérieurs aux entreprises EN2 : conseils et assistanceEN4 : recherche et développement

Services opérationnels EN3 : services opérationnels

Services aux particuliers EP : services aux particuliers

Note : le champ étudié couvre les établissements de l’industrie (hors énergie), de la construction, du commerce, des transports, des activités financières, des activités immobilières, des services aux entreprises et des services aux particuliers. Les activités agricoles, les administrations, l’éducation et les activités relatives à la santé sont exclues de l’étude (Correspondances NES 16 : EA, EQ et ER).

112 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Annexe 3 : répartition territoriale des établissements de la périphérie lyonnaise en 1999 selon le secteur d’activité

Secteurs d’activité

Territoires Indus Const Cgros Cdétail Trans Finim Sersup Seropé Serpart Périphérie

Est-Nord 747 622 662 654 287 182 299 213 402 4 068

Est-Sud 584 528 760 607 339 227 402 283 478 4 208

Nord-Ouest

235 201 499 337 77 243 760 179 335 2 866

Ouest 180 226 252 294 72 184 403 131 294 2 036

Nord-Est 257 311 301 385 110 152 335 148 352 2 351

Sud-Est 430 391 524 467 264 110 259 198 416 3 059

Sud-Ouest 354 404 417 545 166 189 385 199 526 3 185

Val-de-Saône

215 275 234 236 82 109 205 88 292 1 736

Périphérie 3 002 2 958 3 649 3 525 1 397 1 396 3 048 1 439 3 095 23 509Sources : SIRENE 1999 (Insee), POS 2001 du Grand-Lyon.

Annexe 4 : répartition territoriale des établissements implantés en zones d’activités de la périphérie lyonnaise en 1999 selon le secteur d’activité

Secteurs d’activité

Territoires Indus Const Cgros Cdétail Trans Finim Sersup Seropé Serpart Périphérie

Est-Nord 444 126 366 97 67 40 115 52 44 1 351

Est-Sud 363 128 499 158 147 58 193 88 75 1 709

Nord-Ouest

93 41 254 129 21 52 276 66 61 993

Ouest 30 33 39 17 11 13 51 22 15 231

Nord-Est 71 27 62 53 11 10 35 11 18 298

Sud-Est 233 86 324 41 118 32 124 68 55 1081

Sud-Ouest 126 75 162 95 48 20 76 39 56 697

Val-de-Saône

78 35 84 20 11 8 36 8 27 307

Périphérie 1 438 551 1 790 610 434 233 906 354 351 6 667

Sources : SIRENE 1999 (Insee), POS 2001 du Grand-Lyon.

Rapport INRETS n° 277 113

Les services aux entreprises dans les espaces périurbains :

un développement encore mesuré22

Anne Aguiléra

Différentes vagues de suburbanisation ont marqué les activités économiques (Boiteux-Orain et Huriot, 2002) : d’abord le commerce, puis les industries, et à présent des activités jusque-là typiquement centrales comme les services aux entreprises (Aguiléra, 2003a).

Dans un contexte de transformations profondes des structures intra-urbaines marquées par le polycentrisme et la réorganisation de la centralité (Gaschet et Lacour, 2002), la déconcentration de ces services s’inscrit comme une étape importante. Celle-ci interroge les stratégies de localisation de ce secteur et leurs liens avec les dynamiques urbaines. Si leur suburbanisation croissante a été soulignée dans un grand nombre d’agglomérations d’Europe et d’Amérique du Nord (Baro et Soy, 1993 ; Boiteux-Orain et Guillain, 2005 ; Coffey et al., 1996a et 1996b), la question spécifique de leur implantation dans les parties les plus excentrées des agglomérations a rarement été abordée, du fait que l’essentiel du développement de ces activités favorise des zones proches du centre.

Ce papier s’intéresse à la nature, aux modalités et à l’impact du développe-ment de services aux entreprises dans l’espace périurbain, à travers l’exemple de la métropole lyonnaise (France). Notre questionnement se réfère tant à la nature des services qui s’y implantent (on connaît, en effet, la forte hétérogénéité du sec-teur (Bonamy et Valeyre, 1994)), qu’aux raisons de leur localisation ou encore à l’impact d’un tel développement sur la structuration de l’espace périurbain et plus largement intramétropolitain. Notre travail s’appuie sur les fichiers SIRENE23 de l’Insee24 qui recensent les établissements à une année donnée, ainsi que sur les résultats d’une enquête25 menée au printemps 1999.

22 Ce papier reprend pour l’essentiel le texte d’une communication présentée, en 2002, au colloque de l’ASRDLF à Trois-Rivières (Canada).23 SIRENE : Système Informatique pour le répertoire des entreprises et des établissements.24 Insee : Institut national de la statistique et des études économiques.25 Financée par le Laboratoire d’économie des transports (LET).

114 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

1. La place du périurbain dans les dynamiques intra-urbaines

1.1. Qu’est-ce que le périurbain ? La définition de l’Insee

La définition du périmètre des villes, et en particulier de leurs limites, est une question récurrente en sciences sociales (Pumain et Robic, 1996 ; Rémy et Voyé, 1992) qui reste source de débats (Huriot, 1998). De fait, « le terme même « ville » est employé pour désigner des organisations extrêmement différentes par leur forme, leur contenu et leur dimension, et dont l’aspect, les fonctions et les signi-fications se modifient et se renouvellent continuellement au cours du temps » (Pumain et al., 1996, 2–3).

En France, la question de l’identification concrète des villes se pose depuis longtemps (Jayet, 1988), en particulier à l’Insee. Avant les années 1960 préva-laient des critères de taille minimale et de continuité du bâti qui ont servi de base à la définition des unités urbaines. Ils ont été par la suite complétés par la notion de Zones de peuplement industriels et urbains (ZPIU), qui intégraient autour d’une unité urbaine les communes rurales industrielles ainsi que les communes rurales dortoirs directement dépendantes en termes d’emplois. Cette classification s’est toutefois révélée trop peu discriminante au recensement de 1990 à l’issue duquel on s’est aperçu que les ZPIU couvraient 75 % du territoire et regroupaient 96 % de la population française.

L’Insee a alors défini, en 1997, le zonage en aires urbaines (Le Jeannic, 1997) qui prend en compte à la fois des critères de densité mais aussi d’attraction sur la base des migrations alternantes (domicile–travail). En effet, de plus en plus de personnes habitent loin de leur emploi, ce qui signifie que malgré leur éloignement à la zone dense, elles dépendent encore très largement de cette dernière au quo-tidien, et pas seulement pour leur emploi : Boulahbal (2002) a montré comment le lieu de travail structurait une part importante de la vie quotidienne des actifs.

Concrètement, une aire urbaine agrège à un pôle urbain, c’est-à-dire une unité urbaine offrant 5 000 emplois ou plus et découpée en un centre (la commune prin-cipale) et une banlieue, l’ensemble des communes qui y envoient au moins 40 % de leur population active. Ces communes forment la couronne périurbaine. C’est précisément cet espace que nous définirons comme le périurbain — ou la grande périphérie — dans la suite de cet article.

1.2. Les formes du développement périurbain

Accroissement de la population

Jusqu’au milieu des années 1970, le développement des villes s’est principa-lement nourri de l’exode rural et s’est traduit par une densification des centres et de leurs banlieues proches. Pour preuve, en 1975, l’ensemble des pôles urbains ne couvrait en superficie que 7,5 % du territoire national, alors qu’il accueillait déjà plus de 60 % de la population (Duée, 2000).

La dynamique qui s’est amorcée à cette période et s’est confirmée au cours des deux décennies qui ont suivi a, au contraire, fortement distendu l’espace urba-

Rapport INRETS n° 277 115

Les services aux entreprises dans les espaces périurbains

nisé. Si les pôles urbains ont continué à croître en volume, leur poids n’a cessé de diminuer au profit de la couronne périurbaine qui accueille désormais 13 % des urbains, ce qui représente quatre points de plus qu’à la fin des années 1970.

L’étalement urbain de la population peut être évalué de deux manières complémentaires.

La première se réfère au fait que le taux de croissance de la population est plus important en périphérie qu’au centre, et précisément plus élevé en couronne périur-baine qu’en banlieue en raison d’un solde naturel et d’un solde migratoire largement positifs (Tableau 1). Ce phénomène ne semble globalement pas remis en cause en France sur la dernière décennie, même si on constate un ralentissement des taux de croissance annuels moyens dans les banlieues et les couronnes périurbaines et à l’inverse une certaine augmentation au centre, ce qui constitue une inversion de tendance par rapport à la période précédente (Bessy-Piétri, 2000).

Tableau 1 : taux d’évolution annuel moyens de la population dans les aires urbaines françaises

Taux d’évolution annuel moyen 1990–1999

Taux d’évolution annuel moyen 1982–1990

Total Solde nat Solde mig Total Solde nat Solde mig

Ville–centre0,12

(0,16)0,46

(0,45)–0,34

(–0,29)–0,09

(–0,08)0,53

(0,52)–0,62

(–0,60)

Banlieue0,42

(0,51)0,65

(0,46)–0,23 (0,05)

0,86 (0,94)

0,72 (0,59)

0,14 (0,35)

Couronne périurbaine

1,03 (1,01)

0,40 (0,37)

0,63 (0,64)

1,89 (1,80)

0,42 (0,40)

1,47 (1,40)

Total0,40

(0,44)0,52

(0,43)–0,12 (0,01)

0,61 (–0,59)

0,58 (0,53)

0,03 (0,06)

Note : entre parenthèses, les chiffres sans l’aire urbaine de ParisSource : Bessy-Pétri, 2000.

Le second processus résulte de l’absorption progressive d’espaces environ-nants, auparavant ruraux ou faiblement urbanisés. Ainsi, si les aires urbaines ont gagné près de quatre millions d’habitants sur la décennie 90, 60 % proviennent en réalité des seules extensions territoriales (Bessy-Piétri et Sicamois, 2001). Par exemple, l’accroissement des périmètres des aires urbaines de Paris et de Marseille-Aix-en-Provence a compté pour près de 70 % dans la croissance totale de leur population entre 1990 et 1999. Dans le cas de Paris, un sixième de ces nouveaux périurbains provient de l’aire urbaine dans sa délimitation de 1990.

Développement sélectif des activités économiques

La part des emplois localisés au centre, désormais à peine supérieure en moyenne sur la France entière à 50 %, a perdu près de deux points depuis 1990, au profit de la banlieue, qui accueille près de 38 % des emplois en 1999, mais également de la couronne périurbaine où sont implantés 11,2 % des emplois (Tableau 2). C’est deux points de moins que pour la population, les entreprises

116 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

demeurant plus concentrées, car plus sensibles aux aménités dispensées par la zone dense urbaine et en particulier par son centre. D’ailleurs, l’émergence de pôles périphériques, c’est-à-dire de zones de fortes concentrations des activi-tés économiques, concerne pour l’essentiel la banlieue, et très peu le périurbain (Gaschet, 2001).

Tableau 2 : répartition des emplois au sein des aires urbaines : comparaison entre 1999 et 1990

Lieu de résidence (délimitation

1999 des aires urbaines)

Part des emplois

1990 1999

Centre 52,9 % 51 %

Banlieue 36,3 % 37,8 %

Couronne périurbaine 10,8 % 11,2 %

Total 100 % 100 %Source : calculs d’après Talbot, 2001.

En outre, comparativement au centre et même à la banlieue, le périurbain demeure, malgré son rapide développement, marqué par un déficit d’entreprises dans certains secteurs de l’économie. Si l’industrie, la construction, le transport ainsi que le commerce de gros, de détail et les services courants aux personnes (Mignot, 2000) sont bien représentés, les services supérieurs, et en particulier les services aux entreprises, y sont encore peu implantés et restent principalement l’apanage du centre (Julien, 2002 ; Léo et Philippe, 1998).

2. Les enjeux et les modalités de la suburbanisation des services aux entreprises

2.1. Les questions relatives au centre, à la centralité et à la multipolarisation

Le développement du périurbain soulève la question de la permanence du rôle dominant du centre métropolitain et donc celle des nouvelles relations entre le centre et la périphérie. Pour l’heure, les travaux sur le sujet concluent plutôt, dans les cas français et canadiens, à un maintien de la position du centre (Coffey et al., 1996b ; Gaschet, 2001), notamment grâce à un renforcement de sa spécialisation dans certaines fonctions supérieures. Toutefois, leur progressif développement dans des pôles périphériques conduit à faire émerger une nouvelle forme de cen-tralité qui ne se réduit plus au seul centre (Gaschet et Lacour, 2002), même si elle exclut encore largement le périurbain.

Le processus de suburbanisation des services aux entreprises apparaît comme un indicateur majeur des transformations à l’œuvre et en particulier des transfor-mations qui touchent à la réorganisation de la centralité. Aux États-Unis, le déve-loppement massif de ces activités dans les « edge cities » a constitué une étape déterminante de leur développement (Garreau, 1991), et désormais les emplois dans ce secteur sont plus nombreux en zone périurbaine que dans le centre des métropoles (Stanback, 1991). En France, malgré une centralité encore forte, on

Rapport INRETS n° 277 117

Les services aux entreprises dans les espaces périurbains

observe depuis maintenant plus d’une décennie un mouvement important de décon-centration. Plusieurs études confirment des tendances similaires dans d’autres pays d’Europe, comme l’Espagne (Baro et Soy, 1993) mais aussi au Canada (Coffey et al., 1996a). Pour autant, dans ces pays et, à l’inverse, des États-Unis, le déve-loppement de services aux entreprises en périphérie ne s’accompagne pas d’une baisse de l’attractivité de la localisation centrale. Bien au contraire, croissance cen-trale et croissance périphérique sont liées, et la suburbanisation des services aux entreprises est avant tout une conséquence de leur très fort dynamisme (Aguiléra, 2002). Par ailleurs, toutes les catégories de services aux entreprises ne sont pas concernées au même titre par la suburbanisation, et les services de haut niveau, comme le conseil et l’informatique, demeurent largement plus concentrés que ceux qui sont plus banals, même si là aussi des évolutions importantes sont à l’œuvre : certains services supérieurs se concentrent en effet dans des zones spécifiques de banlieue, en particulier des technopoles (Zuliani, 1998).

2.2. Les causes du développement de services aux entreprises dans le périurbain

En grande périphérie, l’absence de services aux entreprises s’expliquait jusqu’à récemment par la faiblesse des clients potentiels, mais aussi par la rareté de l’offre de bureaux. L’arrivée récente d’entreprises (principalement industrielles) est désormais potentiellement à même d’engendrer une demande de services suffisante et corrélativement un développement de l’offre immobilière, dans une zone où les disponibilités d’espace ne posent pas de problème, contrairement au centre et à la banlieue, et aussi où les coûts fonciers sont moindres. Le périurbain, ou du moins certaines de ses communes bien reliées aux grands axes de trans-port, peut en outre séduire par la qualité de sa desserte, atout non négligeable quand on sait qu’on a affaire à des activités dont une partie sont sensibles aux conditions de déplacement du fait de besoins importants de rencontres avec les clients (Aguiléra, 2003b). On peut également penser que ces services vont s’im-planter en limite de l’aire urbaine pour desservir un périmètre situé au-delà des frontières de l’aire urbaine. A contrario, une autre hypothèse suggère que seules les activités qui ont un faible recours aux externalités informationnelles, et donc en particulier des besoins limités en termes de déplacements professionnels, vont pouvoir s’éloigner de la zone urbaine dense.

Ce papier se propose de vérifier ces hypothèses et plus largement de mesu-rer l’ampleur et l’impact du développement de services aux entreprises dans le périurbain, à partir de l’exemple de la métropole lyonnaise.

3. Le développement du périurbain à Lyon

3.1. Présentation de la métropole lyonnaise

Située dans le Sud-Est de la France, l’aire urbaine de Lyon est la deuxième aire urbaine française (1,6 million d’habitants) juste devant celle de Marseille (1,4 million d’habitants), mais toujours loin derrière celle de Paris qui compte plus

118 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

de dix millions de personnes en 1999 (Julien, 2000). Elle couvre une zone quasi circulaire d’un rayon d’une quarantaine de kilomètres autour de son centre que nous avons défini par la réunion des deux communes les plus importantes en termes de population et d’emploi : Lyon (près de 454 000 habitants en 1999) et Villeurbanne (près de 127 000 habitants en 1999) (Illustration 1). Cet espace se compose, selon la définition de l’Insee :

d’un pôle urbain, qui regroupe 84 communes, dont les 55 que comptent le –Grand-Lyon (communauté urbaine de Lyon). Il s'agit de la zone la plus dense et la plus urbanisée de la métropole ;

d’une couronne périurbaine constituée de 155 communes pour la plupart de –très petite taille (moins de 2 000 habitants).

Ce territoire comprend par ailleurs, à ses limites, des communes de taille relativement importante qui jouxtent des centres secondaires anciens qui eux en sont exclus, car ils forment leurs propres aires urbaines. Il s’agit au nord de Anse (4 700 habitants en 1999) située à proximité de Villefranche-sur-Saône, au sud de Givors (18 500 habitants) et de Chasse-sur-Rhône (4 800 habitants), près de Vienne, et à l’ouest de la ville nouvelle de L’Isle d’Abeau26 (12 000 habitants) qui touche Bourgoin-Jallieu.

Illustration 1 : l’aire urbaine de Lyon et son proche environnement

LyonVilleurbanne

Villefranche sur Saône

Bourgoin-Jallieu

Vienne

couronne périurbaine

pôle urbain

centre

hors aire urbaine

GivorsChasse sur Rhône

Anse

L'Isle d'Abeau

10 km

Source : données Insee.

26 Elle a été créée en 1972.

Rapport INRETS n° 277 119

Les services aux entreprises dans les espaces périurbains

3.2. Le développement rapide du périurbain lyonnais

La suburbanisation de la population et des activités économiques

Le pôle urbain regroupe à lui seul près de 82 % des résidents. Mais le centre (Lyon et Villeurbanne) n’en accueille plus que le tiers.

Si la population de l’aire urbaine a progressé de 11,5 % entre 1982 et 1999 (Tableau 3), le taux de croissance en périphérie (+14,8 %) a été plus du double de celui du centre historique (+6,1 %). Le poids de ce dernier a donc diminué, passant de 37,5 à 35,7 %.

En couronne périurbaine, l’augmentation de population a été particulièrement spectaculaire (+47,3 %), notamment dans les communes situées le long des axes de transport. Le poids du périurbain est ainsi passé de 13,7 % en 1982 à 18 % en 1999. Les communes voisines de L’Isle d’Abeau ont enregistré la plus forte progression.

Tableau 3 : population de l’aire urbaine de Lyon en 1982 et 1999

Total Centre BanlieueCouronne

périurbaine

Nbr. en 1982 1 431 672 536 806 699 290 195 576

Nbr. en 1999 1 596 589 569 667 738 796 288 126

Évolution 1982/1999 11,5 % 6,1 % 5,6 % 47,3 %

Poids en 1982 100 % 37,5 % 48,8 % 13,7 %

Poids en 1999 100 % 35,7 % 46,3 % 18 %Source : Insee, RGP.

La déconcentration des activités économiques a été réelle, même si elle est demeurée plus mesurée que celle de la population. En 1996, 84,2 % des établis-sements étaient en effet situés à l’intérieur du pôle urbain, et un peu plus de 46 % au centre, soit tout de même dix points de plus que les habitants.

En 20 ans, le nombre d’établissements a progressé dans l’aire urbaine de 9 %, mais les évolutions ont été contrastées entre le Centre, qui a perdu 7,6 % de ses établissements sur la période, et la périphérie, où la croissance a atteint 29 %.

Comme pour la population, la progression a été particulièrement rapide en couronne périurbaine (Tableau 4). Cette dernière a gagné près de 5 000 établis-sements en 14 ans, soit plus de 50 %. Mais le pôle urbain (hors centre) a connu lui aussi une croissance conséquente (+21,4 %), de sorte que son poids s’est renforcé sur la période, passant de 34,4 à 38,2 %.

Tableau 4 : les établissements dans l’aire urbaine de Lyon en 1982 et en 1996

Total Centre BanlieueCouronne

périurbaine

Nbr. en 1982 83 553 45 315 28 734 9 504

Nbr. en 1996 91 400 42 108 34 884 14 408

Évolution 1982–1996 9,4 % –7,6 % 21,4 % 51,6 %

Poids en 1982 100 % 54,2 % 34,4 % 11,4 %

Poids en 1996 100 % 46,1 % 38,2 % 15,7 %Source : Insee, SIRENE.

120 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Les communes les plus dynamiques en termes de progression du nombre d’établissements entre 1982 et 1996 (tous secteurs confondus) sont pour l’es-sentiel situées en banlieue — mis à part l’Isle d’Abeau et ses alentours — et bien desservies par la rocade et les autoroutes (Illustration 2). La carte de ces communes dynamiques met en évidence le développement de quatre polarités périphériques, confirmant la multipolarisation de la métropole lyonnaise, évolution conforme à ce qui est observé dans toutes les grandes aires urbaines françaises (Gaschet, 2001).

Illustration 2 : les communes privilégiées de développement des établissements de l’aire urbaine de Lyon, 1982–1996

Meyzieu

Givors

St-GenisLaval

Ste-Foy-lès-Lyon

St-Priest

Pont-de-Chéry

La Verpillère

l'Arbresle

Anse

TrévouxReyrieux

St-André-de-Corcy

CrémieuxLYON

Villeurbanne

L'Isle d'Abeau

Genay

Chasse-sur-Rhône

Villefontaine

Irigny Feyzin

GenasChassieu

Dardilly

EcullyMarcy l'Etoile

Colombier-Saugnieu

Champagne-au-Mt-d'or

Limonest

Lissieu

Lentilly

Brignais

St-Quentin-Fallavier

St-Pierre-de-Chandieu

TignieuJameyzieu

CharvieuChavagneux

Pusignan

A6

A42

A43

A47

A7

vers Grenoble,Chambéry

vers St-Etienne

vers Genève

vers Dijon,Paris

A46

A46

centre

limite communale

agglomération

aéroport international Lyon Saint-Exupéry

autoroute

commune de développement du pôle urbain

commune de plus de 150 établissementsnon-définie comme une zone de développement

Givors

L'Isle d'Abeau

A46

route principale

Réalisation : Laboratoire d'Economie des Transports0 15 km

N

Rapport INRETS n° 277 121

Les services aux entreprises dans les espaces périurbains

4. La croissance des services aux entreprises27 dans le périurbain lyonnais

4.1. Une implantation croissante dans le périurbain

Si le tissu économique de la métropole lyonnaise a longtemps été marqué par l’industrie, tout particulièrement le textile, la chimie, la métallurgie, la mécanique et l’automobile, un processus de tertiarisation s’est engagé depuis une quarantaine d’années (Bonneville, 1993), dû en partie à la rapide croissance des services aux entreprises. Ce secteur représente désormais plus de 20 % de l’emploi salarié et plus de 13 % des établissements.

Sur le plan spatial, ces services se distinguent par une très forte concentration. Le pôle urbain accueille neuf établissements sur dix, dont plus de la moitié est localisée au centre (Tableau 5).

Tableau 5 : les établissements de services aux entreprises dans l’aire urbaine de Lyon en 1996

Total Centre BanlieueCouronne

périurbaine

Nombre en 1996 12 500 7 325 4 123 1 052

Poids en 1996 100 % 58,6 % 32,9 % 8,5 %

Ensemble des secteurs 100 % 46,1 % 38,2 % 15,7 %Source : Insee, SIRENE.

La présence des services aux entreprises en couronne périurbaine est faible mais pas négligeable, puisqu’elle représente quand même le cinquième des éta-blissements du secteur qui sont implantés hors du centre. Elle favorise principale-ment les communes les plus importantes, notamment le pôle de l’Isle d’Abeau.

Entre 1982 et 199028, le nombre d’établissements de services aux entreprises implantés en couronne périurbaine a plus que doublé, ce qui représente plus de 300 établissements supplémentaires (Tableau 6).

Tableau 6 : les établissements de services aux entreprises en périphérie de l’aire urbaine de Lyon en 1982 et 1990

Total périphérie BanlieueCouronne

périurbaine

Nbr. en 1982 1 756 1 456 300

Nbr. en 1990 3 251 2 637 614

Évolution 1982–1990 85,1 % 81,1 % 104,7 %Source : INSEE, SIRENE.

27 Les services aux entreprises pris en compte dans ce travail sont présentés en Annexe 2.28 La comparaison avec 1996 n’est pas possible en raison du changement de nomenclature Insee survenu en 1993. Ce rythme de croissance s’est, selon toute vraisemblance, poursuivi au cours de la décennie 90.

122 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

4.2. Une proportion de services aux entreprises qui reste faibleMalgré cette progression, la proportion d’établissements de services aux

entreprises par commune, en 1996, demeure faible en couronne périurbaine, comparativement au centre bien sûr mais également à la plupart des communes de banlieue. Le secteur représente en effet 18,1 % des établissements à Lyon et 16 % à Villeurbanne contre 11,8 % en banlieue et seulement 7,3 % en couronne périurbaine. Les communes les mieux dotées sont celles de taille relativement importante, notamment l’Isle d’Abeau et ses alentours. Pour importante qu’elle ait été, la croissance des services aux entreprises en grande périphérie lyonnaise a donc peu fait évoluer la structure économique de cette partie de la métropole qui demeure marquée par l’industrie et la construction (un tiers des établissements en 1996), le commerce de détail, la logistique, les services courants mais aussi l’activité agricole pour ce qui concerne les plus petites communes.

4.3. Des services plutôt techniques et « bas de gamme »L’illustration 3 classe les services aux entreprises29 en fonction de la propor-

tion d’établissements localisés en couronne périurbaine en 1996. Les activités les mieux implantées en périurbain sont l’administration d’entreprises, les prestations banales aux entreprises (sécurité, nettoyage, secrétariat et conditionnement à façon), l’intérim, les études techniques et les services à la production. À l’inverse, les services supérieurs (informatique de haut niveau, conseil, publicité, etc.) sont très peu présents et demeurent soit très centraux (comme les architectes et les activités juridiques), soit principalement présents dans des technopôles en péri-phérie (comme l’informatique de haut niveau).

La déconcentration des services aux entreprises et plus précisément leur implantation en grande périphérie concerne donc encore pour l’instant des pres-tations plutôt techniques ou « bas de gamme ». Les activités typiques de la centralité métropolitaine sont à l’inverse très peu présentes, mis à part dans les communes principales, c’est-à-dire dans le pôle de l’Isle d’Abeau et dans une moindre mesure au nord, à proximité de Villefranche-sur-Saône.

Illustration 3 : localisation des établissements de services aux entreprises en couronne périurbaine à Lyon en 1996

0 2 4 6 8 10 12 14 16

comptabi litéactivités juridiques

publicitéconseil pour les affaires et lainformatique de haut niveau

architectesservices divers à la production

études techniquesintérim

prestations banales auxadministration d’entreprises

%

Source : Insee, SIRENE.

29 Les 11 groupes de services aux entreprises correspondent à la typologie établie dans (Aguiléra-Bélanger, 2001) et dont le détail est rappelé en Annexe 3.

Rapport INRETS n° 277 123

Les services aux entreprises dans les espaces périurbains

Les seules données issues du répertoire SIRENE ne nous permettent cepen-dant pas d’aller beaucoup plus loin dans la comparaison des services en fonction de leur localisation. Tout au plus apparaît-il que la taille (évaluée par l’effectif sala-rié) n’est pas discriminante, c’est-à-dire que les établissements ne s’installent pas en grande périphérie parce qu’ils sont de taille plus importante. C’est assez logi-que parce qu’on a affaire à des activités qui nécessitent des bureaux et rarement de très grandes surfaces. La seule vraie variable qui diffère significativement en fonction de la localisation concerne la proportion de créations. Le mode d’im-plantation en grande périphérie provient pour les trois quarts des établissements d’une création contre 69 % en banlieue et 62 % au centre. Ce résultat indique que la suburbanisation des services aux entreprises ne résulte pas principalement de délocalisations depuis le reste de la métropole et conforte les conclusions de Matthew (1993) à propos de l’espace métropolitain de Toronto. L’enquête sur Lyon va nous permettre d’apprécier les composantes principales de l’attractivité du périurbain.

5. Les stratégies de localisation des services aux entreprises dans le périurbain

5.1. Présentation de l’enquête

Nous avons réalisé une enquête postale au printemps 1999. Elle n’a concerné que des établissements comptant plus d’un salarié et si possible plus de trois. En effet, la localisation des petites unités (sans salarié) est souvent celle du domicile du chef d’entreprise, ce qui est de peu d’intérêt pour notre travail. Nous n’avons en outre sélectionné que des établissements implantés depuis moins de dix ans sur leur site actuel.

Les questions portaient principalement sur les caractéristiques de l’implanta-tion actuelle (prix, surface, etc.), l’activité, en particulier l’aire de marché, ainsi que les stratégies de localisation par l’intermédiaire une grille de facteurs dont le chef d’entreprise était chargé d’évaluer l’importance30.

Au total, nous avons recueilli 310 questionnaires exploitables, soit un taux de réponse légèrement supérieur à 10 %, conformément à ce qui est générale-ment observé dans ce type d’enquête. Dix-sept établissements faisaient partie de l’espace périurbain31 contre 197 au centre et 183 en banlieue. Ces 17 établisse-ments sont localisés dans les principales communes du périurbain, notamment l’Isle d’Abeau à l’est et Givors au sud.

Ce faible nombre de questionnaires nous a, bien sûr, cantonnés à une analyse globale et non intrasectorielle. Mais nous avons toutefois pu établir des résultats intéressants en termes de comparaison entre les services aux entreprises du périurbain et ceux implantés en zone centrale dense.

30 Échelle de 1 = pas important à 4 = très important.31 Ce faible chiffre s’explique par le fait que l’objectif initial de l’enquête n’était pas l’analyse du périurbain mais plutôt du centre et de la proche banlieue.

124 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

5.2. Des coûts de localisation moins élevés mais une offre immobilière encore restreinte

Comme on pouvait s’y attendre, les locaux sont moins onéreux dans le périu-bain. Le prix32 annuel au m2 est d’environ 61 euros en grande périphérie contre 80 euros en banlieue et même plus de 100 euros au centre, avec des variations importantes selon les arrondissements de Lyon.

Le facteur « coût des locaux » est pourtant un peu moins bien noté dans le périurbain qu’ailleurs (Graphique 2), peut-être parce qu’il y a moins de différences en la matière entre les communes ce qui fait que les chefs d’entreprise y accor-dent moins d’attention. En revanche, la sensibilité à la fiscalité locale est signifi-cativement plus forte dans le périurbain (Illustration 4), témoignant d’une certaine influence du plus faible niveau des taxes (notamment de la taxe professionnelle) en dehors de la zone dense — et spécifiquement à l’extérieur du périmètre de la Communauté urbaine — sur la suburbanisation des services aux entreprises.

Illustration 4 : sensibilité au coût des locaux et aux taxes locales

0 1 2 3

coût des

locaux

taxes locales

notation

périurbain

banlieue

centre

Source : d’après Aguiléra-Bélanger, 2001.

Par ailleurs, les établissements périurbains sont à 35 % propriétaires de leurs locaux contre à peine 10 % dans le reste de la métropole. Cette différence exprime un certain déficit de l’offre locative en grande périphérie. Pour preuve, le choix effec-tif d’une localisation occasionne un recours à des professionnels de l’immobilier dans à peine un quart des cas, contre près des trois quarts en zone dense. Dans le périurbain, les chefs d’entreprise font en fait plus souvent appel à la mairie de la commune prospectée mais aussi à d’autres entreprises implantées sur le site envi-sagé, tandis que ces comportements sont rares en banlieue et surtout au centre.

5.3. La nature des aménités locales

Malgré la relative faiblesse de l’offre, la qualité des locaux est jugée très positi-vement par les chefs d’entreprise qui placent ce facteur en première position des raisons de localisation (comme d’ailleurs au centre et en banlieue).

32 Il s’agit du prix de location ou, dans le cas où l’établissement était propriétaire, du prix « estimé » de location.

Rapport INRETS n° 277 125

Les services aux entreprises dans les espaces périurbains

Les possibilités d’extension sont particulièrement valorisées, beaucoup plus qu’en zone dense où il existe de fait une certaine saturation, en particulier à Lyon et à Villeurbanne.

Le cadre de vie est également très apprécié. Surtout, les établissements périurbains se distinguent par l’importance qu’ils accordent à la possibilité d’être localisés à proximité du lieu de résidence du chef d’entreprise et, de façon moins prépondérante, de celui des employés, alors que ces facteurs sont très peu pris en compte en zone dense. Un des atouts du périurbain semble donc être une cer-taine qualité de vie, en particulier la possibilité de rapprocher le lieu de résidence et le lieu d’emploi du fait d’une moins forte tension sur le marché immobilier.

Illustration 5 : sensibilité aux aspects qualitatifs de la localisation

0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5

qualité des locaux

possibilités d'extension

cadre de vie

proximité lieu de résidence

chef d'entr

proximité lieu de résidence

employés

notation

périurbain

banlieue

centre

Source : d’après Aguiléra-Bélanger, 2001.

5.4. Un déficit dans l’offre de services

Le périurbain mais aussi la banlieue souffrent par contre encore d’un déficit en termes d’offre de services33, ce qui contraint les établissements qui y sont loca-lisés à internaliser un plus grand nombre de services que ceux qui sont implan-tés au centre. En moyenne, les services aux entreprises implantés en périphérie (banlieue et périurbain) ont un taux d’internalisation proche de 25 contre 17 % au centre. Par ailleurs, ces mêmes activités périphériques n’achètent que 15 % des services dont elles ont besoin dans leur commune de localisation (alors que ce taux est de 45 % à Lyon et Villeurbanne) et 56 % dans le reste de l’aggloméra-tion, vraisemblablement au centre mais les enquêtes ne permettent pas d’avoir ce niveau de précision. D’autres travaux ont toutefois pu mettre en évidence la dépendance au centre en termes d’achats de services (Ihlanfeldt et Raper, 1990 ; Schwartz, 1993).

33 La consommation de services était évaluée par l’intermédiaire d’un tableau proposant une liste de 16 services : le chef d’entreprise devait préciser pour chacun s’il l’utilisait, et, si oui, s’il était réalisé en interne ou bien acheté à un prestataire extérieur. Il devait, dans ce cas, préciser la localisation de ce dernier. En moyenne, les établissements enquêtés utilisent 63 % des services proposés.

126 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Le questionnaire s’intéressait également à l’influence de la proximité à d’autres entreprises. Le facteur est très mal noté, quelle que soit la localisation, c’est-à-dire y compris au centre et dans le technopole de l’ouest de l’aire urbaine, témoignant de la faible importance accordée aux considérations d’« économies de localisa-tion » en intra-urbain (Gordon et McCann, 2000), alors que ce type d’élément est au contraire déterminant au niveau du choix d’une ville, spécifiquement dans le cas des services aux entreprises (Jouvaud, 1997).

5.5. Une aire de marché étendue

En moyenne, les établissements de services aux entreprises lyonnais réalisent un peu plus de 60 % de leur chiffre d’affaires auprès de clients extramétropolitains, notamment 20 % dans le reste de la région Rhône-Alpes et 30 % dans le reste de la France. La part des ventes réalisées à l’étranger est par contre très faible.

Les établissements implantés en périphérie et précisément dans le périurbain sont en moyenne aussi exportateurs que ceux du centre, puisque plus de 55 % du chiffre d’affaires des services périurbains est obtenu hors de l’aire urbaine (Illustration 6). Par contre, contrairement aux établissements du centre et de la banlieue, la majorité des ventes extramétropolitaines s’effectue à destination du reste de la région Rhône-Alpes (31 % du chiffre d’affaires), c’est-à-dire que l’im-plantation aux limites de l’aire urbaine de Lyon semble être une stratégie d’accès à d’autres marchés essentiellement régionaux. D’ailleurs, l’accès aux clients est très important (note de 2,6) et aussi bien noté qu’au centre (2,8) qu’en banlieue (2,6). Ce résultat s’explique par la bonne desserte de cette partie de la métro-pole par le réseau autoroutier. Pour preuve l’accès à un axe de transport rapide, qui arrive en troisième position des facteurs de localisation derrière la qualité des locaux et les conditions de stationnement, est aussi important qu’en zone dense. L’extension des infrastructures de transport constitue donc un facteur majeur de suburbanisation des services aux entreprises, y compris dans l’espace périurbain.

Illustration 6 : répartition géographique du chiffre d’affaires en fonction de la localisation

05

101520253035404550

aireurbaine

resteR

hône-A

lpes

régionparisienne

resteF

rance

étranger

% d

u ch

iffre

d'a

ffaire

s

ensemble

périurbain

Source : d’après Aguiléra-Bélanger, 2001.

Rapport INRETS n° 277 127

Les services aux entreprises dans les espaces périurbains

Par ailleurs, les établissements qui ont une aire de marché plutôt locale, c’est-à-dire qui réalisent plus de la moitié de leur chiffre d’affaires dans la métropole, et qui sont implantés en périurbain vendent beaucoup hors du centre de l’aire urbaine (48 % du chiffre d’affaires) mais également au centre (32 % du chiffre d’affaires). Leurs clients périphériques appartiennent de surcroît pour l’essentiel à la commune dans laquelle ils sont localisés (35 % du chiffre d’affaires), ce qui n’est pas le cas pour les établissements implantés en banlieue dont l’aire de mar-ché périphérique est plus large en raison de la densité d’établissements dans les communes environnantes. Ces résultats montrent que la suburbanisation des services aux entreprises en périurbain répond pour partie à l’accroissement de la demande locale de services, fruit de la suburbanisation des autres secteurs de l’économie dont celle de services aux entreprises eux-mêmes qui constituent une part importante de la clientèle. Dans la métropole lyonnaise, les clients industriels représentent en effet en moyenne 40 % du chiffre d’affaires (mais 50 % en périur-bain) et les services aux entreprises 30 % (mais seulement 14 % en périurbain).

L’enquête ne permet par contre pas d’établir de différence en termes de besoins de contacts avec les clients ou plus généralement d’autres entreprises en fonction de la localisation. Nous avons cependant précédemment montré que la nature des prestations assurées était effectivement discriminante et que les services pour lesquels la relation de service, au sens de la relation entre le prestataire et le client, était moins développée et l’aire de marché peu étendue avaient plus de faciliter à s’éloigner du centre et principalement de la gare TGV (Aguiléra, 2003b). Toutefois, notre enquête ne permet pas de quantifier correctement le volume des rencontres face à face, son importance sur la suburbanisation reste donc à éclair-cir dans des travaux ultérieurs.

Conclusion

La déconcentration des services aux entreprises, notamment des plus banals d’entre eux, favorise de façon croissante l’espace périurbain mais concerne essentiellement les communes déjà les plus importantes et les mieux desservies par les principaux axes de transport.

Ce développement répond, pour partie, à l’accroissement de la demande de services, du fait de l’arrivée de nouveaux établissements des secteurs industriels et tertiaires. L’espace périurbain offre par ailleurs des coûts moindres (locaux et fiscalité locale), un environnement agréable, et peut favoriser le rapprochement entre le lieu d’habitation et le lieu de travail. La suburbanisation de services aux entreprises en périurbain est donc bien concomitante au développement d’éco-nomies d’agglomération dans les plus importantes communes de cette partie de la métropole.

Si, à l’échelle de la métropole, la déconcentration de services aux entrepri-ses en grande périphérie demeure pour l’instant limitée, leur développement en périurbain nous semble toutefois être le signe d’un dynamisme qui ne peut que s’accélérer. L’enjeu pour les pouvoirs publics est maintenant d’organiser au mieux cette croissance. La décision des zones de construction de bureaux sera déter-minante en la matière.

128 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

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Rapport INRETS n° 277 131

Les services aux entreprises dans les espaces périurbains

Annexes

Annexe 1 : les services aux entreprises selon les nomenclatures NAP* et NAF** de l’Insee

Type d’activité Code NAP en 600 positions Code NAF en 700 positions

Conseil/études et informatique

Matériel de traitement de l’information (2701), holdings (7600), études économiques et sociologiques (7702), études informatiques (7703), travaux à façon informatiques (7704), conseil en information et documentation (7707), cabinets juridiques (7708), expertise comptable et analyse financière (7709)

Activités juridiques (741A), activités comptables (741C), études de marché et sondages (741E), conseil pour les affaires et la gestion, (741G), administration d’entreprises (741J) conseil en systèmes informatiques (721Z), réalisation de logiciels (722Z), traitement de données (723Z), activités de banque de données (724Z), entretien de machines et de matériel informatique (725Z), autres activités rattachées à l’informatique (726Z)

Analyses techniques et contrôles

Études techniques (7701), architectes (7705), métreurs, géomètres (7706)

Activités d’architecture (742A), métreurs et géomètres (742B), ingénierie, études techniques (742C), contrôle technique automobile (743A), analyses, essais et inspections techniques (743B)

Publicité Créateurs et intermédiaires en publicité (7710), régies publicitaires (7711)

Gestion de supports de publicité (744A), conseil en publicité (744B)

Intérim Prestation temporaire de personnel (7713)

Sélection et mise à disposition de personnel (745A), travail temporaire (745B)

Services à la production, sécurité et nettoyage

Travaux à façon divers (7712), services divers rendus principalement aux entreprises (7714), nettoyage (8708)

Sécurité (746Z), nettoyage (747Z), conditionnement à façon (748D), secrétariat et traduction (748F), organisation de foires et salons (748J), services annexes à la production (748K)

Entre parenthèses sont indiqués les codes NAP ou NAFNAP = Nomenclature des activités et des produitsNAF = Nomenclature des activités françaisesSource : INSEE.

Annexe 2 : typologie des services aux entreprises

Type d’activité Code NAF

Activités juridiques (jurid) 741A

Architectes (archi) 742A

Publicité (pub) 744A, 744B, 748J

Intérim (intérim) 745A, 745B

Comptabilité (compta) 741C

Informatique de haut niveau (infosup) 721Z, 722Z, 723Z, 724Z

Conseil pour les affaires et la gestion, études de marché (conseil)

741G, 741E

Services divers à la production (serv) 748K

Études techniques (techn) 742B, 742C, 743A, 743B

Administration d’entreprises (adm) 741J

Prestations banales aux entreprises (presta) 725Z, 726Z, 746Z, 747Z, 748D, 748FSource : Aguiléra-Bélanger, 2001.

Rapport INRETS n° 277 133

Les investissements étrangers directs dans le secteur des services à Mexico

María Antonia Correa Serrano

La Ville de Mexico, qui comprend le District Fédéral, a joué un rôle très impor-tant dans l’interconnexion entre le global et le local. Cela est dû au fait que c’est dans cette ville que se concentrent les bureaux administratifs des grandes entre-prises, où l’on contrôle et on gère les services avancés et de télécommunications qui servent de base à un réseau global de production et d’échanges commer-ciaux. En ce sens, la Ville de Mexico marque une tendance à la concentration de l’investissement dans le secteur des services en lien avec les technologies de pointe, alors que la part de la fabrication des produits industriels a baissé.

Cette nouvelle configuration de Mexico avec une tendance à la spécialisation dans les services a conduit certains spécialistes à affirmer qu’il y a une autre divi-sion nationale du travail (Parnreiter, 2000) où la Ville de Mexico se spécialise en activités de gestion et de contrôle économique ; tandis que les zones d’influence et surtout les territoires qui entourent Mexico, ont tendance à se spécialiser dans l’in-dustrie manufacturière, comme c’est le cas également à la frontière Nord du pays.

La Ville de Mexico a concentré 54,6 % de l’investissement étranger direct (IED) au cours de l’année 2002. Cependant, cette concentration était de l’ordre de 65 % neuf ans auparavant. En 2002, les activités manufacturières représentaient 48 % des IED qui se trouvent dans la Ville de Mexico.

La tendance marquée vers une plus grande spécialisation dans le secteur des services à Mexico pour les investissements nationaux et pour les IED a beaucoup à voir avec les avantages qu’offre la Ville de Mexico en tant que grande métropole et le rôle qu’elle joue depuis l’ouverture et la libéralisation, comme interconnexion entre le global et le local.

De la même façon, dans ce processus d’interconnexion, une plus grande pola-risation de l’espace de la Ville de Mexico s’est produite du fait que les secteurs qui se globalisent sont ceux qui servent de connexion avec la production et les servi-ces au niveau mondial (production d’une chaîne de valeur ajoutée globale), ces services étant essentiellement les activités financières et commerciales. Ainsi, ce n’est pas l’ensemble de la ville de Mexico (celle-ci est comprise comme la zone du District Fédéral), qui s’interconnecte avec le réseau global de production, mais ce

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Les formes de la métropolisation

sont seulement cinq délégations, où se concentrent la plus grande partie des ser-vices, qui rendent possible cette interconnexion et qui coexistent avec des pôles d’activités traditionnelles qui génèrent des services pour le marché intérieur.

Nous analysons ici les IED dans le secteur des services dans la Ville de Mexico à partir de 1994. Le choix de la période obéit au manque d’information statistique pour les années antérieures, de même que la limitation des données ne permet pas de faire une analyse plus approfondie de l’interconnexion des services glo-baux avec l’espace local. Cependant, nous essayerons de compenser ce manque de données empiriques. Ainsi, la première partie aborde le rôle de Métropole de la Ville de Mexico et le rôle qu’a joué le secteur des services comme nœud dans les interactions globales. Dans une deuxième partie est effectuée une analyse des sous-secteurs du secteur des services les plus importants pour l’établissement des IED, et notamment les services financiers et le commerce.

1. Importance de la Ville de Mexico

Historiquement, la Ville de Mexico a été le cœur traditionnel de l’industrie pour les entreprises nationales et étrangères. Cependant, à partir des années 1980, elle a vécu de grandes transformations telles que la tendance à la décentralisa-tion de l’industrie et la plus grande concentration des services, surtout dans le District Fédéral.

Le processus de déconcentration industrielle a été plus accentué à partir des politiques de protection de l’environnement suivies durant l’administration de Carlos Salinas de Gortari (1988–1994). L’industrie a traversé un processus de relocalisation et la localisation de nouvelles usines s’est effectué dans les états voisins de la Ville de Mexico et à la frontière nord. L’établissement de nouvelles usines créées par les investissements étrangers directs sur la frontière nord a été encouragé tant par le rôle qu’a joué la région dans le processus de restruc-turation de l’industrie aux États-Unis d’Amérique dans les années 1980, que par le processus d’intégration économique des deux régions. Par ailleurs, l’industrie relocalisée dans la région du centre cherche à profiter des avantages de la proxi-mité avec la Ville de Mexico, où se concentrent la majeure partie des services, notamment les services aux entreprises (publicité, comptabilité…). En outre, ce processus de relocalisation a profité des avantages des voies de communication terrestres articulées autour du marché américain.

La tendance à la concentration des services à Mexico, surtout les services financiers et les services aux entreprises (assurances et services professionnels), confirme son rôle de grande métropole. « La grande métropole est elle-même partie prenante comme tête de réseau d’un système urbain régional ou national assez fortement hiérarchisé, comprenant des grandes villes, des villes moyennes et des petites villes en interaction. Les métropoles exercent des fonctions tertiai-res particulières : activités d’administration générale et d’encadrement, direction et sièges sociaux de grandes entreprises, services financiers, bancaires, et d’as-surance, professions rares et spécialisées, services publics supérieurs et activités de contrôle politique, etc. » (Derycke, 1999 : 5–7).

Rapport INRETS n° 277 135

Les investissements étrangers directs dans le secteur des services à Mexico

La ville de Mexico présente quelques caractéristiques qui ont fait que quelques auteurs lui ont donné la qualification de ville globale, en tant qu’espace d’inter-connexion entre le global et le local, où se concentrent les bureaux administratifs des grandes entreprises et les services supérieurs. Cependant, la concentration des services n’est pas une caractéristique suffisante pour attribuer le caractère de ville mondiale, si par ailleurs ce n’est pas un lieu où s’exerce un pouvoir ou une influence d’envergure globale et si par ailleurs elle est caractérisée par une vulnérabilité au capital international.

Les villes mondiales sont des lieux où s’entrelacent les réseaux de produc-tion, d’échange, de finances et de services aux entreprises. Ces villes étroitement interconnectées au niveau de la prise de décision et du contrôle des finances, constituent les nœuds critiques du réseau global (Borrego, 1990). Une partie importante du réseau global de marchandises et de production apparaît dans les zones centre et semi-périphériques du système mondial34. Ce sont des lieux de production, commerce et consommation où se concentrent les services financiers légaux, de comptabilité, d’assurances, ou immobiliers. En outre, les villes glo-bales se connectent entre elles à travers des flux de capitaux, d’information, de marchandises, etc., créant un réseau global de villes (Parnreiter, 2000).

Le développement du secteur des services à Mexico est dû au processus d’in-tégration de l’économie mexicaine à l’économie globale, qui à son tour a renforcé le rôle que la Ville de Mexico joue comme nœud d’interconnexion entre le global et le local. Ce processus s’est autoalimenté avec l’ouverture de l’Accord de libre échange nord-américain (ALÉNA).

Cependant, ce n’est pas toute la Ville de Mexico qui joue le rôle d’intercon-nexion global. Ce sont seulement cinq délégations où se concentrent les éta-blissements des principales entreprises transnationales du secteur des services (Cuauhtemoc, Miguel Hidalgo, Benito Juárez, Alvaro Obregón et Coyoacan, Illustration 1) et notamment les services financiers, le commerce, les services aux entreprises et les communications. Au sein de ces cinq délégations apparaissent des espaces encore plus caractérisés et identifiés comme lieux privilégiés de la concentration : Paseo de la Réforma, Polanco, Insurgentes Sur, Périférico Sur et El Corredor Santa Fe (ce dernier est un nouvel espace en création) de telle sorte que le nœud d’interconnexion implique non seulement une centralisation à Mexico, mais aussi la production d’espaces centraux hautement globalisés par rapport au reste de la ville.

34 Aux villes mondiales traditionnelles, comme Tokyo, Los Angeles, San Francisco, New York, Londres, Paris, et Bonn, s’ajoutent de nouvelles villes qui ont acquis ce rang plus récemment, comme Randstadt, Frankfurt, Zurich, Miami, Houston, Le Caire, Bankok, Singapour, Hong Kong, La Ville de Mexico et Sao Polo.

136 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Illustration 1 : principales zones de concentration d’entreprises à capitaux étrangers dans le secteur des services dans la Ville de Mexico

Miguel Hidalgo

Cuauhtemoc

Benito JuárezAlvaro Obregón

Principales areas de concentración empresarial de IED en el sector servicios en el DF

Miguel Hidalgo

Cuauhtemoc

Benito JuárezAlvaro Obregón

Mayor concentración (Cuauhtemoc y Miguel Hidalgo)

Menor concentración (Benito Juárez y Alvaro Obregón)

Principales areas de concentración empresarial de IED en el sector servicios en el DF

Source : élaboration propre sur la base de données du Secrétariat de l’économie.

Il existe une tendance marquée vers une plus grande spécialisation dans le secteur des services à Mexico, que ce soit pour les investissements nationaux et pour les IED. Ces activités font apparaître une différence nette quant à la nature de la spécialisation et/ou de la concentration. Cette différence est liée aux avan-tages qu’offre la Ville de Mexico en tant que grande métropole et au rôle qu’elle joue à partir de l’ouverture et de la libéralisation comme interconnexion entre le global et le local.

Le processus de globalisation incorpore et discrimine. Ce ne sont pas toutes les régions, ni tous les secteurs productifs, qui y participent. Ceci n’est pas le résultat d’une politique définie ni par une institution internationale ni par l’État, c’est une conséquence des activités propres aux entreprises transnationales. Ce sont elles qui prennent les décisions de localisation à partir d’une vision qualita-tive de l’espace géographique et de sa haute capacité à affronter les risques.

Les agents centraux déterminent quel lieu ou emplacement offre les meilleu-res conditions pour telle ou telle activité, que ce soit pour un processus productif complet ou une partie d’une chaîne de production. Ceci n’empêche pas que des gouvernements urbains ou organes régionaux puissent parfois intervenir dans

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Les investissements étrangers directs dans le secteur des services à Mexico

l’élaboration des conditions de cette compétitivité territoriale (Hiernaux, 2000) : tel est le cas du nouveau Corridor Santa Fe, territoire qui il y a quelques années n’était qu’une périphérie de la ville, sans la moindre infrastructure pour la locali-sation d’entreprises. C’était le lieu préféré des classes à faibles ressources pour les « emplacements irréguliers » ; cependant, il est devenu un des lieux les plus chers de la Ville de Mexico, tant pour la localisation des entreprises que pour la construction de logements.

La concentration dans seulement cinq délégations du District Fédéral met en évidence des différences très notables quant aux services générés par les entre-prises nationales et les services générés par les entreprises étrangères. En effet, les services aux entreprises, la comptabilité et les affaires juridiques, sont déte-nus par des entreprises nationales. Cela est dû au fait que les caractéristiques de ces services impliquent la connaissance des normes et des politiques natio-nales ; tandis que les services de conseils financiers, de publicité, d’organisation et de stratégies d’entreprises sont réalisés par des entreprises étrangères. De la même façon, bien qu’il y ait une participation croissante de l’investissement étran-ger dans les communications, la majeure partie de ces services est concédée à l’entreprise nationale Teléfonos de México (TELMEX). Cependant, la privatisation de cette entreprise, en 1990, par le Groupe Carso et le co-investissement avec Southwestern Bell et France Telecom, a permis la création d’une superstructure capable de rivaliser sur le marché mondial, tant pour l’installation de fibres opti-ques que pour le développement de l’Internet.

2. Les IED dans le secteur des services dans la Ville de Mexico

Le comportement des IED dans la Ville de Mexico marque la même tendance que l’investissement national, en termes de spécialisation dans le secteur des services, ce qui est à la fois cause et effet d’une plus grande interconnexion entre le global et le local.

Tableau 1 : PIB, IED et emploi dans le District Fédéral par grandes activités

PIB (2001)IED

(1994–2002)Emploi (2002)

Division I : aliments, boissons et tabac 3,6 % 2,3 % 8,1 %

Division V : chimie, dérivés du pétrole, caoutchouc et plastique

4,0 % 1,1 % 12,0 %

Division VIII : produits métalliques, machines et équipes

4,2 % 2,0 % 1,1 %

GD 4 : construction 5,8 % 3,0 % 2,1 %

GD 6 : commerce, restaurants et hôtels 19,7 % 13,3 % 16,1 %

GD 7 : transport, logistique et communication 12,4 % 2,1 % 5,1 %

GD 8 : services financiers, assurances, activités immobilières et de location

11,1 % 36,5 % 5,1 %

GD 9 : services communaux, sociaux et personnels

39,2 % 3.7 % 43,1 %

Source : élaboration propre sur la base de données de l’INEGI et Secrétariat de l’économie, plusieurs années.

138 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Cette spécialisation vers le secteur des services a également conduit à une réduction de la participation du District Fédéral, tant dans l’emploi que dans le PIB national. En termes du PIB, en 1993, le District Fédéral produisait 23,9 % du total national, tandis qu’en 2001, sa participation est de 22,4 %. Si la baisse du poids du District Fédéral en emploi n’est pas étonnante, l’absence d’effet multi-plicateur de la part des services dans le PIB l’est. En effet, durant les dernières années, ce sont les services professionnels, le commerce, les services financiers et les communications qui ont généré les plus grands pourcentages de PIB et IED (Tableau 1).

La tendance vers une spécialisation dans les services vise surtout les services financiers. Leur participation se situe à 36,5 % du total des IED sur la période (Illustration 2). Ces services financiers sont le point principal d’interconnexion entre le global et le local. Cela est une conséquence du processus de libéralisa-tion des marchés financiers depuis 1989 et de l’entrée en vigueur de l’ALENA. En réalité, cette tendance fait partie du processus de globalisation. Ses promoteurs favorisaient l’élimination des freins locaux à la mobilisation du capital et la diversi-fication d’opportunités basées sur les asymétries existantes entre les pays (Rozo Bernal, 2000).

Illustration 2 : principales branches pour les IED dans le District Fédéral 1994–2002

Principales branches pour la IED dans le District Fédéral 1994-2002(pourcentage par rapport au total dans le district fédéral)

36.45%

7.35%7.11%

5.99%3.82% 3.68% 3.51%

2.46%

0.00%

5.00%

10.00%

15.00%

20.00%

25.00%

30.00%

35.00%

40.00%

1

Institutions de crédit, bancaires et auxilières de crédit

Commerce de produits non alimentaires en gros

Automotrice

Commerce de produits alimentaires en détail

Boissons

Services professionels, téchniques et spécialisés

Substance et produits chimiques

Communications

Source : élaboration propre avec base de données du Secrétariat de l’économie.

2.1. Les services financiers

La tendance à la spécialisation des IED dans les services financiers dans le District Fédéral est due à l’arrivée de nouveaux concurrents et à l’achat des prin-cipales banques nationales par des investisseurs étrangers (Tableau 2), grâce aux opportunités de rentabilité qu’offre la situation des pays émergents dont la

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Les investissements étrangers directs dans le secteur des services à Mexico

principale caractéristique est la carence d’économie interne et sa forte dépen-dance à l’économie externe. Cela permet d’offrir de meilleurs taux d’intérêt et un fort développement du marché financier en direction des marchés du capital via les instruments financiers.

Tableau 2 : fusions et acquisitions de banques dans le DF

BanqueInvestisseur

étrangerPays

d’origineAcquisition–

fusionAnnée

Montant ( $ Us mill.)

Bital HSBC Angleterre Acquisition 2002 1 140

Banamex Citigroup États-Unis Acquisition 2001 1 250

Inverlat Scotiabank Canada Fusion 2001 ND

Serfin Santander Espagne Acquisition 2000 ND

Bancomer BBVA Espagne Acquisition 2000 NDSource : www.terra.com.mx/noticias/nota/200//0723 et www.mtf.news.yahoo.com

Vers le milieu des années 1990, quelques fusions et acquisitions de banques avaient déjà été menées dans le but de diminuer les effets de la crise de 1995. Banco Mexicano fût acquise par le groupe espagnol Santander, Mercantil Probursa, par la banque espagnol BBV et Banca Confia par City Bank. Cependant, le plus fort était à venir, puisque durant les deux dernières années, il s’est produit un authentique « ouragan » d’investissements dans le système financier mexicain : BBVA a acquis à la fin de juin les 2 % qui lui manquaient pour avoir la majorité absolue des actions du Groupe Financier Banco Bilbao Vizcaya Bancomer.

Banco Santander de son côté a acheté, en 2000, le Groupe Financier Serfin. De la même façon, la banque canadienne Scotiabank a pris une participation importante dans Inverlat et la banque hollandaise ING a acquis Seguros Comercial America, la plus grande société d’assurance du pays. En 2001, Citybank a acquis la plus grande banque mexicaine, Banamex, pour 12 500 millions de dollars. Ce qui fait qu’automatiquement les IED ont augmenté en 2001, même quand les flux d’investissement se sont réduits au niveau mondial, suite à la récession américaine.

Enfin, en août 2002, avec l’achat de la banque mexicaine Bital par Hong Kong Shangai Banking Corporation (HSBC) pour 1 140 millions de dollars, quatre des cinq plus grandes sociétés financières mexicaines sont entre les mains d’investis-seurs étrangers. De plus, 50 % des actifs du système financier mexicain est négo-cié par des banques européennes, et il n’y a plus maintenant que deux sociétés financières importantes à capital mexicain : Banorte, qui continue d’être à capital cent pour cent mexicain et Inbursa en fusion avec Scotiabank, qui possède 55 % des actions et dont la dénomination sociale est Scotiabank Inverlat S.A.35.

35 Scotiabank possède aussi une grande partie des actions du groupe financier Inverlat en maison de bourse et maison d’échange, dénommées : Scotia Inverlat maison de bourse et Scotia Inverlat maison de change. www.Inverlat .com.

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Les formes de la métropolisation

Illustration 3 : IED dans les services financiers dans le District Fédéral

78.68%

9.17%7.22%

0.00%

10.00%

20.00%

30.00%

40.00%

50.00%

60.00%

70.00%

80.00%

IED dans les services financiers

Serv d’Inst de crédit, Bancaires et Aux deCrédit

Serv d’Inst Financières et marché de valeur

Serv d’Inst d’assurances et garanties

Source : www.economia.gob.mx.

L’achat de banques a été l’élément principal des flux d’investissement dans le marché financier, suivi des services des institutions financières et du marché des valeurs. La tendance globale et locale a été celle d’une plus grande spécialisation de ce marché, sous la houlette des États-Unis. Le dynamisme de ce secteur au Mexique demeure subordonné autant dans son organisation que dans sa struc-ture au processus même de globalisation. Ainsi, l’établissement tant des banques que des institutions de valeurs se trouve concentré dans la zone d’interconnexion globale du District Fédéral, qui se limite aux délégations de Cuauhtémoc, Miguel Hidalgo, Alvaro Obregón et Benito Juárez (Illustration 1).

Cependant, l’interconnexion globale du marché financier est surtout dirigée vers le marché nord-américain, celui-là même qui concentre à peu près 85 % de l’investissement dans ce secteur durant la période 1994–2002 ; en outre des 750 entreprises de services financiers qui existent dans le District Fédéral, près de 90 % appartiennent aux États-Unis. L’intérêt principal d’investir dans le secteur financier réside dans les différentiels de taux d’intérêt que le pays a maintenu, afin d’attirer des capitaux, face à la carence de l’économie interne. Garantir la stabilité du taux de change devait maintenir la confiance des investisseurs étrangers dans le marché financier. La qualification des entreprises, comme Standard et Poors, a réduit le risque d’investir au Mexique, et cela a à son tour concerné aussi bien les IED que le marché de valeurs. La Ville de Mexico est le nœud central pour les ser-vices financiers, mais aussi le lieu où se trouvent notamment les infrastructures de télécommunications qui facilitent la globalisation de ces marchés. D’où l’intérêt des banques espagnoles de réaliser des fusions et acquisitions dans la Ville de México afin de connecter ses services avec le marché espagnol des États-Unis où ils ont prévu d’étendre leur présence36.

36 Près de 60 % des hispanos qui résident aux États-Unis sont d’origine mexicaine et ont une haute pénétration dans les populations des états de la région ouest américaine (Arizona, Nuevo Mexico et California).

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Les investissements étrangers directs dans le secteur des services à Mexico

2.2. Le commerce

L’autre sous-secteur des services, qui est devenu dynamique, est le com-merce (commerce en gros de produits non alimentaires et commerce en détail de produits alimentaires, Tableau 1). Il concentre le PIB et l’emploi, tout comme les services financiers.

Ce secteur concentre près de 35 % du total des entreprises de IED qui existent dans la Ville de Mexico. Le dynamisme de ce sous-secteur, tout comme le sec-teur financier, trouve son explication dans l’entrée en vigueur de l’ALENA. Grâce à la réduction et la libéralisation des tarifs douaniers, beaucoup de produits ont rencontré une forte demande sur le marché mexicain. Dans ce secteur, un plus grand dynamisme du processus d’interconnexion entre le global et le local a été observé, puisqu’il y a une plus grande expansion des ventes des entreprises vers d’autres villes du pays. Cette même expansion a été possible à partir de la straté-gie des entreprises qui en s’alliant avec les grandes chaînes de commerce natio-nales ont pu profiter de toutes les infrastructures créées (entreprises de transport et de distribution).

Les principales entreprises qui ont dynamisé ce sous-secteur sont : Grupo Corvi, entreprise alimentaire ayant un vaste réseau de distribution avec à peu près 15 sociétés dans le pays. L’entreprise Nadro et Grupo Casa Autrey, distributeurs de produits pharmaceutiques et qui sont parmi les 50 premières grandes entrepri-ses de la revue Expansion durant l’année 2001. On peut aussi souligner que pour le niveau des ventes, les entreprises Arabela Holding, Pargo, Maquinaria IGSA et Automotriz Meta, toutes de grandes entreprises de commerce de Mexico37 se détachent.

2.3. Les services aux entreprises

Parmi les services aux entreprises, assurés par des entreprises étrangères pour les producteurs nationaux, se trouvent les services d’études, les services financiers, la publicité et l’organisation de l’entreprise. Les demandes d’intégration du pays au processus de globalisation ont produit un vaste réseau de services afin de s’adapter à la demande internationale et aux nouvelles formes d’orga-nisation de l’entreprise, ce qui impliquait un changement dans la culture patro-nale et de nouvelles manières de comprendre la qualité au niveau international. L’adaptation aux normes de qualité internationales et les nouvelles formes d’or-ganisation de la production ont attiré une grande quantité d’entreprises tant pour adapter les normes que pour étudier (étude patronale) la capacité d’accommoda-tion aux modèles de production flexible, d’amélioration continue et de « juste à temps ». Cela a marqué le début d’une forte entrée d’entreprises d’études et de conseil tant pour la production que pour le commerce international. En 1994, les normes de qualité internationale ISO ont été établies, ce qui fût la cause et l’effet de l’attraction d’entreprises d’études, dont l’objectif principal est de préparer les entreprises du point de vue de la production et des services pour une plus grande interconnexion globale.

37 Revue Expansion, « Les 500 plus importantes entreprises à Mexico », années 2000–2002 (juillet).

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Les formes de la métropolisation

2.4. Les télécommunications

Après la privatisation de TELMEX en 1990, on a observé une croissance du sous-secteur. Cependant, on a maintenu des niveaux de protection face aux investisseurs étrangers, et son ouverture a été graduelle et sélective, situation qui lui a ôté tout dynamisme et maintenu des prix élevés pour beaucoup des services, comme la téléphonie, la téléphonie cellulaire, la télévision par câble et l’internet. Néanmoins, c’est l’un des plus modernes en Amérique Latine. Le niveau de protection du sous-secteur fait que la participation des IED est réduite, puisqu’il représente à peine 2,5 % du total dans la Ville de Mexico. L’entrée d’en-treprises comme Southwestern Bell et France Telecom dans ce secteur a permis la connexion avec le réseau de télécommunications des États-Unis, l’expansion des services traditionnels de télécommunications et l’accès massif à l’Internet (Parnreiter, 2000).

Ainsi, depuis la privatisation et l’ouverture du secteur, Mexico s’est intégré de manière rapide au réseau global de télécommunications avec une haute concen-tration dans la Ville de Mexico où se trouve le nœud central de la communication moderne, qui connecte les autres régions du pays (Parnreiter, 2000). En plus de cette inégalité régionale, on observe que dans le secteur des technologies de l’in-formation, il existe une plus grande inégalité au niveau urbain où les délégations Cauhtémoc, Miguel Hidalgo, Alvaro Obregón, Benito Juárez et Coyoacan (cf. Illustration 1) concentrent les principales entreprises avec à IED dans ce sous-sec-teur : Satélites Méxicanos, Corporación Nacional de Radiodeterminación, América Móvil et Movistar, toutes en co-investissement avec du capital américain.

Conclusion

Le caractère de grande métropole de la Ville de Mexico se reflète dans la tendance à la spécialisation dans le secteur des services. Pour cela, on peut dire qu’on se retrouve avec une tendance à une nouvelle division du travail au niveau national dans laquelle la Ville de Mexico se spécialise dans le secteur des services et les régions Centre et Nord dans le secteur industriel, bien que cette dernière région soit une « maquiladora ».

Les services que les IED génèrent se trouvent beaucoup plus concentrés que les services dans les entreprises nationales, puisque ce sont les entreprises prê-teuses de services étrangers qui déterminent le processus et les formes d’inté-gration. Ainsi, dans la pratique, les entreprises transnationales ne les intéressent pas, ni tous les espaces, ni tous les secteurs de la production. Dans le cas des services, elles se situent dans les régions et secteurs qui ont une capacité d’inter-connexion et qui sont passés par un processus d’adaptation tant en infrastructure qu’en normativité, ce qui implique ouverture et libéralisation des secteurs. Ainsi, coexistent dans la même Ville de Mexico des espaces régionaux incorporés au processus de globalisation et d’autres qui restent en marge de ce processus. Les délégations Cuauhtemoc, Miguel Hidalgo, Alvaro Obregón, Benito Juárez et Coyoacan, sont des délégations surtout intégrées.

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Les investissements étrangers directs dans le secteur des services à Mexico

Au niveau local, le processus de globalisation a généré des gagnants et des perdants. Les secteurs les plus intégrés gagnent. Ce sont ceux qui servent de point d’interconnexion entre le global et le local.

De la même façon, la Ville de Mexico marque une tendance à la transfor-mation d’une grande métropole en une ville globale, bien que ceci soit plus une réflexion qu’une conclusion. Néanmoins son niveau dans le système hiérarchique complexe de la globalisation est celui d’une dépendance face aux villes globales des pays industrialisés. Cela est dû au fait que Mexico est un lieu clef pour le fonctionnement de l’ALENA et la globalisation, mais manque de pouvoir quant à la redéfinition de ce processus, qui reste subordonné aux décisions des États-Unis, tant dans sa politique économique que dans ses formes d’intégration.

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Partie 3

Métropolisation et ségrégation spatiale

Rapport INRETS n° 277 147

Dynamique locale et processus d’expansion de la région métropolitaine de Mexico

Enrique Contreras Montiel

La ville de Mexico, située dans la Vallée du Mexique, exerce un rayonnement économique à la fois sur les villes et communes rurales de la Vallée, mais aussi au-delà, formant ainsi avec son aire d’attraction une véritable mégapole. Dans cette communication, on s’intéressera à deux régions de la Vallée du Mexique localisées dans l’État de Hidalgo dont le dynamisme est impulsé par la capitale.

1. Rappel historique

Les régions analysées ici se situent au voisinage de La Vallée du Mexique, mais elles se sont constituées essentiellement à partir de centres de peuplement précolombiens. La Vallée du Mexique a connu la plus forte concentration de popu-lation du Haut Plateau. Selon plusieurs chercheurs, cette concentration aurait été l’une des plus élevées du monde à l’époque38. Le système d’organisation et de division territoriale s’est établi à l’origine sur la base de communautés constituées autour d’une personnalité forte, connue actuellement sous le titre de « cacique », sorte de seigneur féodal. L’invasion des Européens s’est établie à partir de cette structure avec deux particularités : la caste des prêtres a été radicalement élimi-née ; à certains égards, les pratiques religieuses ont subsisté surtout à travers l’organisation sociale, les méthodes, les modalités et les formes d’organisation pour la production, la distribution et la solidarité sociale. La vice-royauté s’est établie de fait sur cette structure en changeant plus le nom que la forme des rap-ports de pouvoir. La fusion des aristocraties et des formes d’organisation initiales diluèrent peu à peu l’organisation indigène. Le tribut, la transmission de la pro-priété, les moyens d’organisation de la production indigène survécurent et, dans quelques cas, continuent à subsister de nos jours.

38 Charles Gibson, chercheur, spécialiste de l’histoire du Mexique a souligné la référence à la Vallée de Mexico : « Nous pouvons estimer la population indigène à 1 500 000 habitants en 1519, une brusque réduction ensuite avec approximativement 70 000 dans le courant du xviie siècle, puis une croissance à nouveau avec une estimation de 275 000 personnes à la fin de la période coloniale » (Gibson, 1967 : 9).

148 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Ce rappel n’est pas inutile, car de nombreuses pratiques sociales, politiques et religieuses actuelles sont d’origine indigène.

2. Économie et population traditionnelles

L’État de Hidalgo est dans une région à forte composante de population tradi-tionnelle. À l’heure actuelle, dans des villes, même les plus importantes, la popu-lation indigène est majoritaire. Ni la géographie difficile ni même la culture n’ont empêché que les zones de peuplement traditionnel voient leurs vies boulever-sées par la formation de grandes agglomérations et par le développement des marchés modernes qui les accompagnent. Toutefois, le fait culturel est enraciné dans certains traits du comportement des consommateurs et des producteurs que l’on pourrait qualifier de traditionnels.

La présence d’une importante population indigène dans l’État de Hidalgo est sans doute une explication des raisons pour lesquelles la population de cet État augmente de manière erratique et à un rythme inférieur à celui de l’ensemble du Mexique. La population de langue indigène est passée de 327 990 habitants en 1995 à 339 866 en 2000, soit un taux de croissance inférieur à 1 % (INEGI, 1991, 2001). Cela s’explique par le fait qu’entre ces deux dates les villes à popu-lation indigène majoritaire ont connu le plus fort taux d’émigration de l’État de Hidalgo.

Les recensements de population au Mexique assimilent les populations indi-gènes à celles qui parlent effectivement une langue indigène. Cette définition restrictive explique que la population indigène de Hidalgo représente seulement 17,2 % de la population totale.

Les cultures indigènes comportent deux caractéristiques qu’il convient de sou-ligner. D’un côté, une tendance à s’établir ou se constituer en petits groupes, essentiellement familiaux au sens traditionnel du Mexique. D’un autre côté, les indigènes essaient de maintenir les liens familiaux et culturels, raisons pour les-quelles ils tendent à se regrouper dans certaines aires géographiques, principa-lement dans les régions refuge, au sens où l’entend l’anthropologue G. Aguirre Beltran (1991). Ces deux caractéristiques transparaissent à travers les résultats du dernier recensement. La population indigène est concentrée dans 28 des 84 municipalités de la Fédération du Mexique où elle représente 30 % au moins de la population totale. Cette population indigène urbaine regroupe 57,8 % de la population indigène de l’État.

Dans les municipalités indigènes, la population vit dispersée entre de petites localités, en marge de l’économie de marché dans la grande majorité des cas. L’autoconsommation est dominante, la monoculture est la règle, les petites entre-prises et les exploitations sont familiales, mais certains secteurs de l’économie indigène établissent, même d’une façon marginale, des liens avec les grands marchés.

La dispersion de la population entre de petites localités dans des régions rura-les d’accès difficile rend peu aisée la mise en place de services publics de base

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Dynamique locale et processus d’expansion de la région métropolitaine de Mexico

pour ces habitants. Au Mexique, on utilise des indices de « marginalité » pour identifier le retard et la pauvreté de la population. Sur cette base, on observe que la grande majorité des municipalités indigènes de l’État de Hidalgo figure dans la catégorie de forte ou de très forte marginalité, ce qui est le cas des 4/5 des 28 municipalités indigènes.

Identifier la population indigène, sur la base des personnes qui parlent une langue traditionnelle, ne suffit pas à saisir toutes les dimensions de la situation et ses implications. Les cultures indigènes sont non seulement une langue, mais aussi une culture, une manière de produire et distribuer de la richesse et des revenus au sein de la communauté, associée à des rituels mythiques religieux. Ainsi, si les pratiques agricoles traditionnelles sont un élément d’identité sociocul-turelle, malgré l’abandon de la pratique d’une langue, on peut dire qu’au moins 50 % de la population du territoire conservent des liens importants avec les prati-ques culturelles indigènes.

Cette analyse ne prétend pas introduire une vision anthropologique des cultu-res traditionnelles, mais plutôt mettre l’accent sur l’origine de la rigidité ou de l’iné-lasticité prix et revenu de la demande de maïs et de ses dérivés ainsi que d’autres produits, la rigidité et la fixité du marché de la main-d’œuvre, de même que les fractures régionales dans l’économie et la société à travers le déplacement de la main-d’œuvre.

L’inélasticité sur les marchés locaux a de fortes répercussions sur les structu-res du marché à l’échelle régionale et même des grands marchés du pays. Il est courant de trouver des marchés de concurrence imparfaite, oligopolistiques et monopolistiques dans tout le pays. Cette tendance se renforce avec la taille crois-sante des marchés et le pouvoir d’achat de la population, ce qui laisse peu de place à la concurrence parfaite pour l’offre et la demande de nombreux produits et services indispensables.

3. Méthodologie

La première étape a consisté en l’analyse des 84 municipalités de l’État de Hidalgo, afin de repérer celles qui concentrent et apportent le plus fort dynamisme économique et démographique à l’État. Les premiers critères de la sélection furent les plus forts taux de croissance tant de concentration économique que de population municipale. Ainsi, 26 des municipalités concentrent plus de 90 % de l’activité économique. L’étape suivante a été celle de l’analyse des dynamiques internes de ces régions. Pour y parvenir, on a mené une analyse détaillée des données de recensements économiques, en retenant les variables suivantes : le nombre d’établissements, la population employée, les revenus, les actifs fixes nets, la production brute totale, la valeur ajoutée brute. Les secteurs analysés ont été les suivants : mines et extraction pétrolière, industries manufacturières, construction, commerce, transports et communications, services du secteur privé à l’exclusion des services financiers. On ne s’intéressera ici qu’aux résultats du secteur industriel.

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Les formes de la métropolisation

L’analyse a été menée jusqu’au niveau de la branche d’activité, et l’objectif premier fut de dégager le profil de l’industrie qui apporte le plus grand dynamisme à l’ensemble des activités économiques d’une région et qui est à la base de la for-mation de pôles autour desquels se constituent les régions ou les sous-régions.

Pour déterminer le profil des unités économiques et leur capacité à transmet-tre leur dynamisme à d’autres secteurs de l’économie régionale, on a élaboré un indicateur d’efficacité économique à partir des variables suivantes :

(PO/UE) emplois/unités économiques, indicateur indirect de la taille des –établissements ;(REM/PO) : rémunérations/population employée, exprimant le niveau –des revenus de la population occupée et de la répartition des revenus dans la région ;(VACB/PO) : valeur ajoutée brute/population employée, indicateur de la –productivité du travail ;(VACB/UE) : valeur ajoutée brute/unités économiques. Bien que cela –ne soit pas très exact, on a un indicateur indirect de la productivité du capital et de l’utilisation des technologies.

La microéconomie fait référence aux acteurs de base de l’activité économique, que sont les entreprises et les consommateurs individuels. S’agissant des entreprises, elles recourent à des méthodes de production, c’est-à-dire à des combinaisons de facteurs de production spécifiques et elles utilisent des intrants (consommations intermédiaires). Les méthodes de production reposent sur une fonction de production, concept qui fait référence à « un rapport purement technique qui relie les intrants et le volume » de production (Koutzoyiannis, 1985 : 79).

La discussion sur les caractéristiques de la fonction de la production et de son rôle dans le progrès technique est très vaste (Ferguso, 1985). Dans ce cha-pitre, on ne cherchera pas à entrer dans le débat et, à vrai dire, on aurait une approche considérée comme trop pointue pour interpréter les résultats de l’expé-rience empirique. Cette démarche est proche de celle de Krugman selon lequel (Krugman, 1994 : 230) :

« Le grand économiste anglais du début du siècle, Alfred Marshall, a déjà signalé que de nombreuses industries de son pays étaient concentrées dans cer-tains districts industriels (...) Marshall en a donné une explication encore classi-que pour sa clarté :

En premier lieu, la concentration d'entreprises par type d’activité dans la –même région offre un vaste marché de l’emploi aux personnes qualifiées et spécialisées. Ce qui signifie que ces travailleurs sont assurés, dans une certaine mesure, contre le chômage, et dans le même temps, les entrepri-ses sont assurées, dans une certaine mesure, contre la pénurie de la main-d'œuvre(…).En second lieu, une concentration spatiale d’activités industrielles permet la –présence et le maintien de services spécialisés nécessaires (...) ;

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Dynamique locale et processus d’expansion de la région métropolitaine de Mexico

Enfin, une concentration d’entreprises favorise l'échange d'information et, –par là même le progrès technologique (…) ».39

Ces aspects remettent en question les hypothèses de base de la concur-rence parfaite sur lesquelles repose la fonction de la production. Ils montrent que d’autres facteurs, comme les externalités, les économies d’échelle et le progrès technique, les structures de marché monopolistiques et de concurrence impar-faite, contribuent à l’agglomération des entreprises industrielles.

Comme on pourrait le supposer, les variables utilisées ici ont une double fonc-tion : d’un côté, identifier les concentrations industrielles et de main-d’œuvre, et de l’autre, permettre d’expliciter les avantages comparatifs, que ce soit en matière de technologie, de main-d’œuvre ou de spécialisation.

Toutefois, l’offre de biens et de services, y compris le marché du travail, ne correspond pas à une décision unilatérale, mais résulte de la confrontation entre l’offre et la demande. Les consommateurs sont présents à travers les caractéris-tiques et le volume de l’offre.

Selon cette analyse, deux régions entretiennent un lien étroit avec la dyna-mique de la ZMCM, comme un grand marché auquel s’approvisionnent les entreprises, raison pour laquelle cette analyse a été centrée sur deux régions : Pachuca-Tizayuca et Tula-Tepeji del Río.

On trouve une démarcation forte entre les municipalités traditionnelles, fonda-mentalement indigènes, et celles qui abritent l’industrie manufacturière ayant le plus grand dynamisme, la productivité la plus élevée de l’État de Hidalgo, et qui font appel aux technologies modernes. Ces dernières subissent directement l’in-fluence de Mexico. Cette démarcation est une fracture qui conduit à une margina-lisation pas uniquement régionale, mais aussi à une fracture au sein de la société, qui a ses racines dans la marginalité des méthodes productives traditionnelles et avec elles de la population qui en vit.

4. Économie, traditions et régions dans l’État de Hidalgo

Au sein de l’État d’Hidalgo, on observe deux modèles distincts de concentra-tion économique avec des entreprises très dynamiques, accompagnant l’urba-nisation. Les deux régions Pachuca-Tizayuca et Tula-Tepeji sont favorisées par le relief et encore plus par les voies de communication qui les traversent et se dirigent vers d’autres régions du nord industriel et commercial de la nation et vers le pays voisin, les États-Unis.

39 Du même auteur, sur le même sujet, on peut se référer à Géographie et faire du commerce (1992 : 10) on lit que : « la négligence des questions spatiales dans l’économie provient, en majeure partie, d’un tel fait simple : la façon dont on conçoit la structure du marché. Essentiellement, pour dire quelque chose d’utile ou d’intéressant sur la localisation de l’activité économique dans l’espace, il est nécessaire de dépasser les approches basées sur les rendements d’échelle constants et sur la concurrence parfaite ; approche qui domine encore l’analyse économique. Tant que les économistes ont manqué d’outils analytiques pour une pensée économique rigoureuse sur les rendements croissants et la compétition imparfaite, l’étude de la géographie économique a été condamnée à rester isolée et exclue ».

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Les formes de la métropolisation

Tableau 1 : le poids économique des régions Pachuca-Tizayuca et Tula-Tepeji en 1998

En pourcentage UE PO REM AFN FBCF PBT VACB

Région Pachuca-Tizayuca 27,7 33,7 30,6 10,8 1,9 16,9 21,2

Région Tula-Tepeji 16,5 22,9 38,4 62,6 89,7 56,3 36,0

Reste de l’État d’Hidalgo 55,8 43,4 31,0 26,6 8,4 26,8 42,8

Total 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0Source : données du recensement économique 1998, INEGI, Mexique, 2001.

Les deux régions sont caractérisées par une tension entre économies tra-ditionnelle et moderne. On peut parler de régions en transition, avec une tra-jectoire qui les rattache au bout d’une trentaine d’années à l’aire urbaine de la ZMCM. Aujourd’hui, ce sont de minuscules satellites de la mégapole à l’intérieur desquels se localisent des entreprises travaillant pour le grand marché urbain.

Les capacités de production des deux régions excédent les capacités d’ab-sorption de leur demande locale. Elles participent à plus de 70 % au produit brut de l’État. Près de la moitié des entreprises et de la population employée de l’État se trouvent dans ces deux régions. Elles représentent près de 70 % de la masse salariale distribuée dans l’État, ce qui signifie que la population ayant un emploi a un revenu moyen supérieur au revenu moyen de l’État. De plus, les projets d’in-vestissements se concentrent fortement dans ces deux régions et principalement dans celle de Tula-Tepeji del Río.

Conséquence d’un « effet » statistique, et bien que beaucoup de valeurs se situent au-dessus de la moyenne, les données ne permettent pas d’apprécier l’im-portance des grosses entreprises dynamiques en raison du grand nombre de peti-tes entreprises en place, principalement dans la région de Pachuca-Tizayuca.

Tableau 2 : indices de productivité de l’activité économique dans les régions Pachuca-Tizayuca et Tula-Tepeji en 1998

En pourcentage PO/UE REM/PO VACB/PO VAC/UE

État d’Hidalgo 3,7 21,4 79,1 289,6

Région Pachuca-Tizayuca 4,5 19, 4 49,7 221,4

Région Tula-Tepeji 5,1 35,9 124,4 632,8

Moyenne des deux régions 4,7 26,1 79,9 374,8Source : données du recensement économique 1998, INEGI, Mexique, 2001.

Les indices de productivité confirment le fait que les capacités productives des entreprises et du travail sont plus élevées dans ces deux régions que dans l’ensemble de l’État.

5. La région de Pachuca-Tizayuca

C’est dans la région de Pachuca-Tizayuca que se trouvent les pouvoirs poli-tiques de l’État. La capitale de l’État de Hidalo concentre la majeure partie de

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Dynamique locale et processus d’expansion de la région métropolitaine de Mexico

l’activité économique et de la population. C’est le centre politique et commercial. Ne détenant pas de manière patente une industrie si efficiente, elle partage son caractère de pôle avec Tizayuca, laquelle doit sa qualité de pôle à sa proximité et à son ancrage avec la Ville de Mexico. Cette position stratégique a fait de Tizayuca un pôle d’attraction pour les entreprises.

5.1. Concentration

Le gros de l’activité économique se concentre à Pachuca. Bien que la diffé-rence de taille de population entre Pachuca et Tizayuca, soit d’un à six environ, et d’un à trois pour le nombre d’entreprises, il n’en demeure pas moins que la population employée et les salaires sont supérieurs à Tizayuca. Cela conduit à considérer aujourd’hui l’existence de grands écarts entre les régions sur le plan du nombre d’entreprises et du personnel employé : Tizayuca a des établisse-ments de plus grande taille, avec des technologies supérieures et avec une main-d’œuvre beaucoup plus qualifiée, étant entendu que le niveau des rémunérations est en corrélation directe avec la qualification du travail.

Minéral de la Réforma, au moins dans sa partie urbaine, est une partie de la région métropolitaine de la Ville de Pachuca. Dans cette municipalité, la localité la plus peuplée est Pachuquilla. Comme son nom l’indique, Pachuquilla est la petite Pachuca, et toutes les deux coexistent au sein du même espace. Cela ne concerne pas que la population, puisqu’à Pachuquilla, on trouve d’importantes activités économiques qui tendent à se localiser dans les zones périphériques, en marge de la ville.

Tolcayuca et Zapotlán de Juárez ont été considérées comme rattachées à la région en raison de la forte croissance de leur population. De plus, elles accueillent de nouvelles entreprises dont les caractéristiques diffèrent du profil traditionnel de la population native. Ces caractéristiques de la population et leur nouveau profil économique sont le résultat de la formation d’un marché de la main-d’œuvre, d’une association des grandes entreprises à la recherche de la force de travail.

5.2. Efficacité

En matière d’efficacité productive, dans la région étudiée, tous les indices sont inférieurs à la moyenne de l’État, à l’exception de la taille des entreprises repré-sentée par le ratio population employée/effectifs des entreprises. La vision précé-dente change quand on entre dans le détail, au niveau de chaque municipalité. La conjoncture à la baisse affecte les municipalités de Tolcayuca, Zapotlán de Juárez et Pachuca. Ainsi, Pachuca a pratiquement tous ses indices d’efficacité inférieurs à la moyenne de ceux de l’État. Les municipalités ayant des indices d’efficacité supérieurs à la moyenne sont Minéral de la Réforme et Tizayuca, alors que Tolcayuca a un indice supérieur seulement pour la productivité des entrepri-ses, représentée par le rapport VACB/effectifs des entreprises.

Ces résultats tendent à montrer que les entreprises nouvelles et modernes cherchent à se localiser à la marge des conurbations, et c’est le cas de Pachuca, avec la conurbation de Minéral de la Réforma. Ce même phénomène affecte par-ticulièrement Tizayuca, du fait de sa localisation par rapport à la ZMCM. Dans les

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Les formes de la métropolisation

deux cas, les municipalités doivent leur dynamisme économique aux avantages que leur procure leur localisation à proximité de la ZMVM, comme à un niveau plus local, à la proximité à la conurbation de Pachuca.

5.3. Spécialisation

On a déjà mentionné que l’augmentation de la population à Minéral de la Reforma rentre dans le processus d’expansion de la ville de Pachuca. Néanmoins, différencier ces deux zones comme deux entités politiques différentes permet d’accentuer quelques traits de la croissance urbaine de la région. Près de la moi-tié des entreprises et plus de la moitié de la population employée ont un profil d’économie traditionnelle pour ce contexte régional. Cela concerne aussi bien les rémunérations, que les caractéristiques de la production et la valeur ajoutée. Mais, on peut observer que le développement des activités modernes au sein d’une même ville tend à se faire à sa périphérie.

Mineral de la Reforma a des valeurs moyennes de productivité supérieures à celles de Pachuca, basées sur l’établissement de la population et des nouvel-les entreprises en périphérie de Pachuca. Les plus forts taux de croissance de la population comme des branches les plus modernes, pour le contexte local, comme les branches 3130, industrie des boissons, et 3220, fabrication de vête-ments, se trouvent en périphérie de la ville. Même le type d’emploi généré là est au-dessus des moyennes qui prédominent dans la ville. C’est le cas de la produc-tivité et dans quelques cas des rémunérations moyennes.

Bien que Pachuca bénéficie d’une forte concentration d’industries, ses indices de spécialisation sont en réalité relativement faibles, inférieurs à la moyenne de l’État, pour une grande partie de ses activités. Par contre, Minéral de la Reforma, partie de la zone conurbée de Pachuca, offre un paysage manufacturier ayant de meilleurs indices, lesquels sont accompagnés de forts taux de croissance de la population.

Tizayuca reproduit également le modèle d’expansion urbaine et de localisation de branches manufacturières modernes dans la périphérie de la ville, mais, dans ce cas, dans la périphérie de la ZMCM.

Bien que Tizayuca reproduise le même schéma de développement de bran-ches relativement traditionnelles, comme les branches 3115 (élaboration des produits de la boulangerie), 3116 (farine de maïs et production de tortillas), elle présente aussi des branches d’un profil dynamique et de haute productivité, dont quelques-unes qui appartiennent aux sous-secteurs 35 (substances chimiques, produits dérivés du pétrole et du charbon en caoutchouc et en plastique) et 38 (produits métalliques, machines et équipements, qui inclut des instruments chirur-gicaux et de précision).

La grande majorité des indices d’efficacité de ces branches se trouvent au-dessus de la moyenne, ce qui les qualifie comme relativement modernes dans le contexte régional. Il s’agit en particulier des branches 3560 (fabrication de pro-duits plastiques) et 3842 (production et assemblage d’équipements de transport, sauf automobiles et poids lourds).

Rapport INRETS n° 277 155

Dynamique locale et processus d’expansion de la région métropolitaine de Mexico

Ce profil d’activité manufacturière montre la dualité de l’économie. D’un côté, il y a un type de demande traditionnelle qui génère une inélasticité entre prix et demande pour les produits de base, comme ceux des dérivés du maïs et du blé. De l’autre côté, un processus de modernisation qui, pour le moment, ne corres-pond pas au profil de la demande locale, mais à celui du grand marché urbain de la ville de Mexico.

6. La région de Tula-Tepeji

Bien que l’origine de ses populations puisse remonter à l’époque précolom-bienne, la situation stratégique récente de cette région est due à sa proximité à des axes de communication, routiers et ferroviaires, qui relient les pôles industriels et de commerces avec le pays voisin. En d’autres mots, la région est connectée au monde.

Les municipalités englobées dans la région sont au nombre de huit dont qua-tre ont un profil de grand dynamisme économique : Atitalaquía, Atotonilco de Tula, Tepeji del Río et Tula d’Allende. Les autres, Mixquiahuala de Juárez, Tetepango, Tezontepec de Aldama et Tlaxcoapan, ont un taux élevé de croissance démo-graphique. Parmi les huit, seulement deux d’entre elles ont une fonction de pôle régional, chacune avec un profil propre : Tula de Allende et Tepeji del Río.

6.1. Concentration

Tula de Allende et Tepeji del Río concentrent la plus grande part de l’activité économique, notamment pour l’industrie manufacturière, avec presque 50 % des entreprises, environ 70 % des effectifs employés et 50 % de la masse salariale de ce secteur.

Le dynamisme de ces deux pôles influe également sur les municipalités voi-sines. Par exemple, Atitalaquía enregistre une production brute totale de 66,7 % de la région. Ceci peut être dû à un biais statistique du fait d’un décompte dans cette ville–gare du fret ferroviaire et routier des autres régions. Néanmoins, il n’en est pas moins certain que la valeur ajoutée brute de la région est bien supérieure à celle de l’État.

De plus, cette région a le taux de croissance de la population le plus élevé de l’État, en adéquation avec le grand dynamisme économique qui la caractérise.

6.2. Efficacité

Les indices de productivité sont pratiquement supérieurs à la moyenne de l’État dans les quatre municipalités ayant un profil manufacturier. Concernant la spécificité des profils des deux pôles, Tula de Allende est surtout caractérisé par le sous-secteur 36 (production de ciment, chaux, plâtre et autres produits à base de minéraux non métalliques) et une autre activité importante, celle du sous-secteur 35 (raffinage du pétrole), présente à Tulla et enregistrée principalement à Atitalaquía. Par contre, les activités prédominantes à Tepeji del Río sont les industries textiles du sous-secteur 32 (textiles, vêtements et industrie du cuir).

156 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

6.3. Spécialisation

Les deux pôles principaux présentent des cas différents de dynamisme éco-nomique et de choix dans les facteurs de production. Dans les cas de Tula et Atitalaquía, il y a un usage intensif de la technologie de très haute productivité, combiné à un emploi avec une haute rémunération pour le contexte régional. Cette combinaison s’entend pour la branche 3530 (raffinage du pétrole). Á Atotonilco de Tula, la branche prédominante est la 3691 (production de ciment…). Ce pôle est également caractérisé par une industrie plus productive et un personnel mieux rémunéré que la moyenne régionale.

Par contre, à Tepeji del Río, la branche qui dénote le plus grand dynamisme et une spécialisation croissante est la 3212 (fils, tissus…) ainsi que la 3220 (confection de vêtements). Dans ce cas, le chemin suivi par les entreprises a été celui de l’intensité de la force de travail. En moyenne, ces entreprises emploient 566 personnes pour la branche 3212 et 214 personnes pour la branche 3220. Les rémunérations moyennes sont entre la moitié et le quart de ce qui se pratique à Atitalaquía et Tula de Allende.

7. Le marché du travail

L’activité manufacturière la plus intense de l’État de Hidalgo et qui emploie la majeure partie de la population se développe dans les deux régions décrites dans ce chapitre.

7.1. Le marché du travail dans la région Pachuca-Tizayuca

L’importance de la région Pachuca-Tizayuca est légèrement diluée dans les statistiques, à cause du poids de la ville de Pachuca. Dans ce cas, le secteur dominant est le tertiaire, celui du commerce et des services. Par contre, Tizayuca a 40 % de sa population occupée dans le secteur secondaire, une proportion plus grande qu’au niveau de l’ensemble du pays.

Les caractéristiques de la population permettent d’expliquer ce qui se passe dans la région. Les municipalités de la région montrent des taux de croissance supérieurs à la moyenne de l’État. Il faut préciser ici que l’État, en plus d’être l’un des plus pauvres et avec des indices de marginalité les plus hauts du pays, est le lieu d’une émigration importante. Néanmoins, dans cette région, les données migratoires sont positives et supérieures à la moyenne de l’État, ce qui la place parmi les principales régions d’accueil des flux migratoires. De plus, elle a des taux très élevés de population en provenance d’autres entités de la République. Tizayuca se détache ainsi, en cela que 50,9 % de ses habitants sont nés ailleurs, et 16,5 % des cinq ans et plus résidaient dans d’autres États du Mexique en 1995. Ce fait plus l’importance des flux de véhicules qui empruntent l’autoroute Pachuca–Tizayuca (une des plus circulées du pays) révèlent également qu’une part importante de la force de travail se déplace quotidiennement pour le travail dans cette région.

Rapport INRETS n° 277 157

Dynamique locale et processus d’expansion de la région métropolitaine de Mexico

On peut ainsi mettre en évidence un marché local du travail qui est relative-ment décalé par rapport à la force de travail locale et qui entraîne une localisa-tion résidentielle accrue dans les zones urbaines pour des personnes provenant d’ailleurs et notamment de la ZMCM.

7.2. Le marché du travail dans la région Tula-Tepeji del Río

Dans cette région, des municipalités ont un profil très traditionnel, avec des activités exclusivement locales, comme l’agriculture, l’élevage et le commerce de détail, réalisées au sein d’entreprises familiales. Pour cette raison, les entreprises de grande taille sont sous-représentées. À l’inverse, pour les municipalités dans lesquelles prédomine l’activité manufacturière, le secteur primaire est peu pré-sent. Ainsi, à Atotonilco de Tula, par exemple, la part de la population employée dans les secteurs secondaires et tertiaires est respectivement de 49,5 et 42,2 %. Pour Tepeji del Río, les chiffres sont encore plus élevés avec 55,9 et 39,9 %

Le taux de croissance de la population était relativement haut dans la première moitié des années 1990 et est descendu ensuite à 1,3 % dans la seconde moi-tié. Dans quelques cas, on a pu enregistrer des taux très faibles, voire négatifs. Ces chiffres contrastent avec ceux relatifs aux migrations, données qui mettent en évidence des municipalités à forte capacité d’absorption, qui sont celles qui ont une vocation manufacturière et qui ont été identifiées comme ayant un grand dynamisme industriel. Les cas les plus flagrants d’accueil de personnes nées en dehors de l’État sont Atitalaquía, Atotonilco de Tula, Tepeji del Río et Tula d’Allende.

Ces données permettent également de dresser un profil très intéressant du marché du travail. Les bas taux de croissance, malgré la forte migration, pour-raient n’être que le résultat d’une fuite de la population native.

Conclusion

Les régions de Pachuca-Tizayuca et Tula-Tepeji del Rio sont formées à partir des petits satellites en orbite autour de la région métropolitaine du Mexico. Dans ceux-ci se sont installées des entreprises manufacturières neuves et modernes. La demande à laquelle ces entreprises répondent n’est pas locale, pour la simple raison qu’elle excède largement les capacités locales d’absorption.

La spécialisation peut être vue à travers la formation de regroupements d’en-treprises qui cherchent à améliorer leur rentabilité tout en maîtrisant les coûts. L’agglomération permet de disposer d’un même marché du travail, de services de base fournis par le secteur public et de la formation d’un marché de services professionnels et aux entreprises au sein de l’espace en constitution.

Le dynamisme généré par la ZMCM à ces satellites produit également des fractures régionales à deux niveaux. Tout d’abord, au niveau régional, du fait d’un faible accès et de réticences à participer à la dynamique urbaine et à l’adoption de profils de demande et de production liés à ces espaces métropolitains, des populations rurales et surtout indigènes restent isolées.

158 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

D’un autre côté, aussi longtemps que les producteurs locaux avec un profil productif (méthodes, organisation, technologies et rentabilité) n’ont pas la capa-cité de fournir une telle demande si rapide, ils sont remplacés par des entreprises d’autres régions et même d’autres pays. Les enjeux en termes d’éducation, de formation d’une main-d’œuvre plus qualifiée, deviennent primordiaux, même si cela doit prendre plusieurs générations.

La population qui arrive contribue peu à une intégration économique et sociale plus harmonieuse, du fait d’un mode de vie urbain. Le tissu économique local traditionnel inadapté à la demande se voit repoussé et condamné à la marginalité et à l’économie informelle. La fracture sociale est patente.

Bibliographie

G. Aguirre Beltran. Obra antropologica IX, Regiones de Refugio, El desarrollo de la comunidad y el proceso dominical en mestizoamerica, México, Fondo de Cultura Economica, 1991.

C.F. Ferguso. Teoría Neoclásica de la Producción y la Distribución, México,Trillas, 1985.

C. Gibson. Los Aztecas Bajo el Dominio Español 1519–1810, México, Siglo Veintiuno, 1967.

A. Koutzoyiannis. Microeconomía Moderna, Argentina, Amorrourtu Editores, 1985.

P. Krugman. Geografía y comercio, España, Antoni Bosch, editor, 1992.P. Krugman. Vendiendo prosperidad, España, Editorial Ariel, 1994.INEGI. XI Censo general de población y vivienda 1990, México, INEGI, 1991.INEGI. XII Censo general de población y vivienda 2000, México, INEGI, 2001.INEGI. Censo económico 1998. Hidalgo, México, INEGI, 2001.

Rapport INRETS n° 277 159

La ségrégation spatiale dans les villes françaises :

le cas de trois agglomérations de la région Rhône-Alpes

Danièle Bloy

L’objectif de ce chapitre est de déterminer si l’évolution des formes de la crois-sance urbaine entraîne des organisations différentes de localisation des popula-tions. Peut-on faire émerger « des ségrégations résidentielles » ou des disparités géographiques à partir de variables de revenus des ménages et de la catégo-rie socioprofessionnelle des habitants40 ? L’étalement urbain est-il générateur de ségrégations sociospatiales et quelles sont les déformations constatées sur une période intercensitaire de dix ans ? Nous essayerons de répondre à travers des données de revenus et des classifications socioprofessionnelles disponibles grâce aux deux recensements de la population française de 1990 et de 1999.

1. Le territoire concerné et la méthodologie

Nous avons pris en compte un périmètre qui comprend les trois villes les plus importantes de la région Rhône-Alpes et les communes qui appartiennent à leur aire d’influence. Ainsi, avons-nous choisi quatre départements :

le département du Rhône, dont le chef-lieu est Lyon ; –le département de l'Isère, dont le chef-lieu est Grenoble ; –le département de la Loire, dont le chef-lieu est Saint-Étienne ; –le département de l'Ain, contiguë du département du Rhône et dont –beaucoup de communes appartiennent à l'aire urbaine41 de Lyon.

Le tableau ci-après montre l’évolution de la population entre 1990 et 1999 dans les trois villes et les départements déjà cités.

40 Cf. chapitre 1.41 Aire urbaine : selon l’Insee, ensemble de communes d’un seul tenant et sans enclave, constitué par un pôle urbain et par des communes rurales ou unités urbaines dont au moins 40 % de la population résidente ayant un emploi travaille dans le pôle ou dans les communes attirées par celui-ci.Unité urbaine : ensemble constitué d’une ou plusieurs communes constituant une continuité du bâti (pas de coupures de plus de 200 m entre deux constructions) et comptant au moins 2 000 habitants.

160 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Tableau 1 : population en 1990 et 1999

Superficie (km2)

1990 nombre d'habt.

1999 nombre d'habt.

Variation (%)

Lyon 47,87 415 487 445 452 7,2

Grenoble 18,13 150 758 153 317 1,7

Saint-Étienne 79,07 199 396 180 210 –9,6

Ain 5 762,44 471 019 515 270 9,4

Rhône 3 249,12 1 508 966 1 578 869 4,6

Loire 4 780,99 746 288 728 524 –2,4

Isère 7 431,44 1 016 228 1 094 006 7,7

Lyon, au cours de la décennie 1990–1999, a vu sa population augmenter contrairement à la période précédente. Le centre a retrouvé son attrait. Grenoble a également légèrement augmenté. C’est une ville extrêmement dynamique qui a su développer le tertiaire supérieur. Saint-Étienne, ville industrielle, prospère dans l’après-guerre, vivait de l’industrie du charbon et de l’industrie textile. Avec les mines qui ont fermé et l’industrie textile qui a périclité et s’est délocalisée, elle n’a pas su se diversifier, sa population a baissé de près de 10 % en dix ans.

L’espace, excepté autour des grandes villes, est peu urbanisé. Cet ensemble comprend 1 556 communes.

Pour caractériser la ségrégation spatiale, trois sortes de variables ont été rete-nues : des variables liées au revenu, des variables caractérisant la population et des variables fonction de la catégorie socioprofessionnelle des ménages.

Variables de revenu

impôt sur le revenu moyen par ménage (IRMOY90, IRMOY99), –revenu net moyen par ménage (RNETMO90, RNETMO99), –pourcentage de foyers imposables par rapport au total des foyers de la –commune ( % FOYI90, % FOYI99).

Variables caractérisant la population

pourcentage d’actifs occupés par rapport aux actifs totaux ( % ACTOC/ –actTot),pourcentage de la population active totale par rapport à la population totale –de la commune (POPactT/popT),pourcentage de retraités par rapport à la population totale (retraites/popT). –

Variables caractérisant les professions catégories socioprofessionnelles des populations au lieu de résidence, selon les définitions de l'Insee :

agriculteurs, –artisans–commerçants–chefs d’entreprise, –cadres–professions artistiques, –professions intermédiaires (techniciens, etc.), –

Rapport INRETS n° 277 161

La ségrégation spatiale dans les villes françaises : trois agglomérations de Rhône-Alpes

employés, –ouvriers. –

Pour faire ressortir des types de communes homogènes, nous avons utilisé une méthode classique d’analyse de données : la classification ascendante hié-rarchique 42. Cette classification permet de faire émerger des types homogènes de communes.

2. Une ségrégation affirmée

En 1990 et 1999, la classification a donné des résultats comparables. Nous avons pu faire ressortir six types de communes.

Type 1 : communes urbaines des classes supérieures

Ce type fait apparaître un « impôt sur le revenu moyen » et un « revenu net moyen » bien supérieurs à la moyenne, un pourcentage de cadres également important, un taux d’agriculteurs très faible.

Type 2 : communes urbaines à statut social diversifié

Ce type a la même forme que le précédent, mais avec des taux pour l’impôt sur le revenu et un pourcentage de cadres beaucoup moins élevés ; le taux d’agri-culteurs est également très faible.

Type 3 : communes à dominante agricole

Ce type se caractérise par un impôt sur le revenu et un revenu net moyen faibles, un taux d’agriculteurs très supérieur à la moyenne. Ces communes se situent surtout dans la Loire.

Type 4 : communes à environnement rural et à faible statut social

Ces communes se caractérisent par un taux d’agriculteurs et d’artisans supé-rieur à la moyenne, un faible taux de cadres et un taux de retraités supérieurs à la moyenne.

Type 5 : communes urbaines à dominante industrielle et faible statut social

Ce type se caractérise par un faible taux d’agriculteurs et des taux supérieurs pour les employés et les ouvriers avec une inversion des proportions entre 1990 et 1999. En 1990, le taux d’ouvriers était plus important que celui des employés.

Type 6 : communes à profil moyen

En 1990, ce type connaissait un taux plus faible d’agriculteurs qu’en 1999 ; tous les autres taux sont très proches (en plus ou en moins) du taux moyen.

42 On trouvera une explication succincte de la classification ascendante hiérarchique en annexe.

162 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

2.1. Évolution des communes entre 1990 et 1999Au cours de la décennie 1990–1999, comment les communes ont-elles évo-

luées par rapport aux différentes caractéristiques que nous avons préalablement définies ? Le Tableau 1 croise les classifications des communes en 1990 et 1999.

Tableau 1 : les types de communes selon leur niveau de revenu et caractéristiques de population en 1990 et 1999

Classification 1999

Classification 1990 Type 1 Type 2 Type 3 Type 4 Type 5 Type 6 Inc Total

Type 1Communes urb. résid. des classes sociales supérieures

30 30

Type 2Communes urb. à statut diversifié

71 166 83 1 11 1 333

Type 3Communes à dominante agricole et faibles revenus

1 13 46 3 27 2 92

Type 4Communes à environnement rural et faibles revenus

2 28 217 71 29 153 500

Type 5Communes urb. à dominante indus. et faible statut social

35 2 45 82 164

Type 6 Communes à profil moyen 2 37 251 7 47 77 1 422

Inconnu 1 6 5 3 15

Total 106 231 600 133 140 343 3 1 556

L’évolution de la typologie entre 1990 et 1999 permet tout d’abord de révéler un renforcement du type de communes les mieux dotées. Ainsi, toutes les com-munes du type 1 de 1990 (qui regroupe les communes urbaines résidentielles des classes sociales supérieures) se retrouvent dans le même type en 1999, même si d’autres communes s’y ajoutent. Certaines communes urbaines du type 2, ayant au départ un profil diversifié, ont pu rejoindre le type 1 en 1999.

À l’inverse, les communes du type 5 en 1990 (communes urbaines à domi-nante industrielle et faible statut social) changent majoritairement de type en 1999 et la majorité d’entre elles affichent un profil « moyen » (type 6).

Nous confirmons ainsi que la croissance de la ségrégation intra-urbaine obser-vée, par ailleurs, est plus tirée par un enrichissement avéré des communes aisées que par un appauvrissement supposé des communes pauvres. Nous analysons par la suite plus en détail les types 1 et 2.

Rapport INRETS n° 277 163

La ségrégation spatiale dans les villes françaises : trois agglomérations de Rhône-Alpes

Illustration 1 : typologie selon les variables de revenu et catégories professionnelles des habitants en 1990

1

2

3

4Retraites/popT

%AT90TOU

%AT90TEM

%AT90TPI

%AT90TCA%AT90TAR

%AT90TAG

POPactT/popT

%ACTOC/ActTot

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1

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POPactT/popT

%ACTOC/ActTot

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RNETMO90IRMOY90

Typologie selon les PCS et des variables de revenus en 1990

Communes urbaines résidentielles des classes sociales supérieures Communes urbaines à statut diversifié

Communes à dominante agricole Communes à environnement rural et faible statut social

Communes urbaines à dominante industrielles et faible statut social Communes à profil moyen

30 333

92

500

164 422

164 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Illustration 2 : typologie selon les variables de revenu et catégories professionnelles des habitants en 1999

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4retrai/poptot

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AT99TEM

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1

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RNETMY98IRMOY98

Typologie selon les PCS et des variables de revenus en 1999

Communes urbaines résidentielles des classes sociales supérieures

106 231

600

133

140

343

Communes urbaines à statut diversifié

Communes à profil moyen

Commues à dominante agricole Communes à environnement rural et faible statut social

Communes urbaines à dominante industrielle et faible satatut social

Rapport INRETS n° 277 165

La ségrégation spatiale dans les villes françaises : trois agglomérations de Rhône-Alpes

Illustration 3 : typologie selon les variables de revenu et catégories professionnelles des habitants en 1990

N

0 50000 M

Classement des communes selon des variables de revenu et les PCS au lieu de résidence en 1999

Communes urbaines résidentielles des classes sociales supérieures

Communes urbaines à statut diversifié

Communes à dominante agricole et à faibles revenus

Communes à environnement rural et faible statut social faible statut socialé

Communes urbaines à dominante industrielle et faible statut social

Communes à profil moyen

Source : élaboration propre, données INSEE

166 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Illustration 4 : typologie selon les variables de revenu et catégories professionnelles des habitants en 1999

N

0 50000 M

Classement des communes selon des variables de revenu et les PCS au lieu de résidence en 1999

Communes urbaines résidentielles des classes sociales supérieures

Communes urbaines à statut diversifié

Communes à dominante agricole et à faibles revenus

Communes à environnement rural et faible statut socialfaible statut social

Communes urbaines à dominante industrielle et faible statut social

Communes à profil moyen

Source : élaboration propre, données INSEE

2.2. Évolution du type 1

Le nombre de communes constituant le type 1 est passé de 30 en 1990 à 106 en 1999. Comme nous l’avons vu précédemment, ce type se caractérise par les valeurs de revenus toutes supérieures à la moyenne. En 1990, l’impôt sur le revenu moyen est très supérieur à la moyenne, mais cela est dû à la situation aty-pique d’une commune (cf. annexe). Le taux de cadres est également très supé-rieur à la moyenne, alors que le taux d’ouvriers et d’agriculteurs est très faible.

Toutes les communes classées en type 1 en 1990, le sont restées en 1999. La quasi-totalité des communes qui ont rejoint cette classe est de type 2, c’est-à-

Rapport INRETS n° 277 167

La ségrégation spatiale dans les villes françaises : trois agglomérations de Rhône-Alpes

dire un type très proche, mais où les catégories socioprofessionnelles sont plus diversifiées. Cela signifie que la composition socioprofessionnelle a changé. La proportion de cadres a baissé, mais celle des retraités a augmenté. Ce glisse-ment se fait toutefois entre ménages à revenus élevés.

Illustration 5 : origine des communes du type 1 en 1999

0

Communes urbaines résidentielles des classes sociales supérieures

Communes urbaines à statut diversifié

Communes à dominante agricole et à faibles revenus

Communes à environnement rural et faible statut socialfaible statut social

Communes urbaines à dominante industrielle et faible statut social

Communes à profil moyen

Source : élaboration propre, données INSEE

L’illustration 5 indique la localisation des communes qui ont intégré cette classe. On remarque que celles-ci sont quasiment toujours contiguës aux com-munes qui étaient déjà de type 1. Les deux régions qui ont le plus bénéficié de cette évolution sont les régions lyonnaise et grenobloise, alors que la région sté-phanoise fortement touchée par le chômage n’apparaît que très peu.

168 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

2.3. Évolution du type 5

Nous avons défini ce type comme correspondant à des communes industrielles à faible statut social et revenus faibles. Cette classe est passée de 164 communes en 1990 à 140 en 1999. Seules 45 communes étaient déjà classées dans cette catégorie. Elles étaient principalement situées dans la banlieue des villes centres.

Illustration 6 : origine des communes du type 5 en 1999

0 50000 M

N

Communes urbaines résidentielles des classes sociales supérieures

Communes urbaines à statut diversifié

Communes à dominante agricole et à faibles revenus

Communes à environnement rural et faible statut socialfaible statut social

Communes urbaines à dominante industrielle et faible statut social

Communes à profil moyen

Source : élaboration propre, données INSEE

Quarante-sept communes sont issues du type 6, qui est le profil moyen, mais étaient situées dans la fourchette basse des revenus.

Vingt-neuf étaient du type « à environnement rural » à faible revenu. C’est la structure des Professions catégories socioprofessionnelles (PCS), ou plutôt son évolution, qui les a fait changer de type. Dans tous les cas, le taux des agricul-teurs a diminué dans ces communes qui se sont urbanisées. Ces communes sont souvent situées le long des axes de transport, où le foncier était moins cher et contiguës aux communes déjà classées dans ce type.

Rapport INRETS n° 277 169

La ségrégation spatiale dans les villes françaises : trois agglomérations de Rhône-Alpes

En 1990, onze étaient classées dans la classe 2, classe à statut diversifié et à revenus supérieurs à la moyenne. Ces communes sont, pour la plupart, situées près des communes de la classe 5. Elles se sont paupérisées.

Conclusion

Cette analyse fait ressortir des territoires « ségrégués ». Elle indique qu’en dix ans le profil des communes reste globalement comparable, mais que leur compo-sition évolue, souvent dans le sens d’un renforcement des types principaux.

Les communes à fort revenu et aux classes sociales élevées ont élargi leur zone d’influence autour de celles qui l’étaient déjà. La tendance au déclin de l’agriculture s’est concrétisée au profit d’une péri-urbanisation, souvent le long des axes de transport. Les communes à faible revenu le sont restées, mais leur composition socioprofessionnelle a souvent changé.

Cette analyse confirme ainsi l’accroissement de la ségrégation spatiale par un renforcement des profils des classes extrêmes.

170 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Annexes

La Classification ascendante hiérarchique (CAH) est une méthode d’analyse de données qui permet, à partir d’une série de données, de faire émerger des classes d’individus relativement homogènes. La CAH regroupe successivement, de façon binaire les unités élémentaires en fonction de leur ressemblance par rapport à un certain nombre de critères. Le logiciel utilisé propose un indice de dissimilarité fondé sur la distance euclidienne et le critère d’agrégation est l’in-dice de Ward. Cette méthode agrège successivement deux groupes de sorte que l’inertie intraclasse soit la plus petite possible pour que les classes restent homo-gènes. La CAH produit un arbre binaire de classification appelé dendrogramme. La troncature permettant une bonne représentation du phénomène est alors réali-sée. Selon la troncature effectuée, le nombre de classes est plus ou moins impor-tant. En début d’analyse, le nombre de classes est égal au nombre d’éléments pour arriver à la fin à une seule classe. On choisit donc la césure qui permet la meilleure explication du phénomène.

Dendrogramme de la CAH en 1990Dendrogramme de la CAH en 1990

0,00

670,00

1340,00

2010,00

2680,00

3350,00

4020,00

Dissimilarité

Dendrogramme

La CAH fait ressortir des types. Pour caractériser chaque type, on définit un profil moyen de chaque classe rapporté au profil moyen de l’échantillon. Dans cette étude, l’échantillon est représenté par les communes des quatre départe-ments concernés : le Rhône, l’Ain, l’Isère et la Loire. Pour mieux visualiser les résultats, les différents types ont été représentés par des graphiques en radar où la moyenne de l’échantillon total est égale à 1. Chaque variable se définit donc par rapport à cette norme. Ensuite, une représentation cartographique permet de visualiser les résultats.

Rapport INRETS n° 277 171

La ségrégation spatiale dans les villes françaises : trois agglomérations de Rhône-Alpes

Dendrogramme de la CAH en 1999

0,00

810,00

1620,00

2430,00

3240,00

4050,00

4860,00

En fin de classification, il reste deux groupes qui se divisent pour le groupe 1 au niveau 6 en trois sous-groupes et le groupe 2 en quatre groupes. Le premier groupe comprend une petite commune atypique qui, en 1990, avec un revenu moyen par foyer très important faisait ressortir cette commune. Cela correspond sans doute à un contribuable ayant de très forts revenus en 1990 qui, en 1999, soit avait déménagé ou dont les revenus avaient très significativement baissé (la commune est passée d’un revenu moyen de 735 322 F en 1990 à 185 779 F en 1999). Cette classe a été regroupée avec la classe la plus proche pour former le type 1.

Rapport INRETS n° 277 173

Métropolisation et ségrégation dans la ville de Mexico

Hilda Rosario Dávila, Roberto Constantino Toto et Cuauhtémoc Pérez Llanas

La métropolisation comme processus de concentration d’activités productives, de population et d’expansion des territoires urbains a entraîné l’aggravation du processus d’inégalité à l’intérieur des villes. Cette inégalité dans les conditions de vie et l’accès aux avantages du développement se traduit dans l’espace urbain par une ségrégation sociale et spatiale.

Ce phénomène doit-il être considéré comme naturel et, par conséquent, comme inévitable et inhérent au processus de métropolisation, ou bien pourrait-il et devrait-il être inversé par les acteurs politiques à travers une stratégie alterna-tive qui tendrait à éliminer ou, au moins, à réduire ces disparités ? Cette ques-tion représente une partie essentielle du questionnement des enquêtes urbaines actuellement.

Un premier élément pour répondre à la question précédente est de caractéri-ser ce processus, par la connaissance de l’ampleur et de l’évolution des inégali-tés, afin d’affiner la conceptualisation du phénomène de ségrégation.

Si ce processus de ségrégation est commun à toutes les grandes métropo-les, il acquiert des caractéristiques particulières dans les pays en voie de déve-loppement ou périphériques. Quelles sont ces spécificités ? Comment sont-elles distribuées dans l’espace ? Est-ce que la différence tend à augmenter ? Nous chercherons, dans ce chapitre, à répondre à ces questions à travers l’étude du phénomène dans la cité de Mexico au cours de la dernière décennie.

Dans la République mexicaine, la pauvreté et l’inégalité, freins au dévelop-pement, sont les problèmes les plus sérieux et les plus urgents auxquels le pays doit faire face. L’inégalité est présente sur presque tous les plans : niveaux de vie, éducation, accès à la santé et par conséquent dans l’espérance de vie. L’inégalité persiste entre la campagne et la ville et à l’intérieur des deux espaces, elle s’approfondit.

1. Métropolisation et ségrégation

La ségrégation de l’espace à l’échelle mondiale, nationale, régionale et urbaine comme phénomène inhérent au processus d’urbanisation et de métropolisation a

174 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

été étudiée par divers auteurs (pour le cas français : May, 1993 ; Camagni, 1993 ; Lacour et Puissant, 1999 ; Mignot, 2003 ; parmi d’autres).

Le processus de globalisation, qui est caractérisé principalement par un déve-loppement technologique rapide des télécommunications et l’élargissement des marchés, et des processus de production à l’échelle mondiale, avec pour consé-quence la division internationale du travail, oblige à une modification du vieux concept de ville par une alternative qui rend compte des nouveaux rapports, pro-duits de ces transformations économiques et sociales.

La proximité géographique n’est plus une condition privilégiée de l’échange, élément fondamental dans la conformation des espaces urbains. Dans la mesure où les marchés sont constitués d’espaces plus distants, et où la valeur ajoutée est produite par des services spécialisés qui n’exigent pas de contact personnel, mais plutôt des moyens de télécommunication, les rapports qui traditionnellement se produisaient entre les villes et les régions, entre les régions et le reste du pays, mais principalement à l’intérieur des villes vont se transformer.

Les rapports qui existent entre une partie des agents et secteurs d’une ville, avec les agents et secteurs d’une autre ville qui peut être géographiquement très loin, sont plus forts et plus complémentaires que ceux qui existent entre ces agents et le reste des agents et secteurs de leur propre espace urbain. Cela pro-duit un processus de ségrégation à l’intérieur des villes qui augmente continuelle-ment. Ainsi, la synergie qui peut être créée parmi les différents secteurs sera plus grande à l’extérieur qu’à l’intérieur de l’espace urbain (Sassen, 1996 ; Bassand 1997 ; May 1993, 1994).

Le développement d’une économie à tendance globale engendre des contra-dictions entre la production et les intérêts territoriaux (cf., par exemple, San Salvador Atenco).

Au Mexique, les premières études à propos des inégalités territoriales peuvent être trouvées dans l’analyse de la disparité entre la campagne et la ville, notam-ment pendant la période du modèle de développement stabilisateur (1954–1970). L’inégalité entre le secteur rural et le secteur urbain a été largement argumentée pendant les années 1960 et 1970 du siècle dernier. Ces études ont été à l’origine d’une série de propositions sur le développement régional dont le but était d’atté-nuer les disparités.

Dans les dernières décennies du xxe siècle, l’objet d’études a été orienté prin-cipalement vers les disparités au sein des grandes métropoles comme les cités de Mexico, Guadalajara et Monterrey et le reste du territoire urbain. Dès lors, une série de politiques pour le développement des villes considérées comme moyen-nes ont été conçues. Durant les dernières années, l’attention a été ciblée sur le problème de la ségrégation sociospatiale à l’intérieur des villes, surtout dans les études de Rosa María Rubalcava et Martha Schteingart (Ruba1cava, 1999 ; Rubalcava et Chavarría, 1999a et 1999b ; Rubalcava et Schteingart, 1985, 1988, et 2000). Les auteurs ont étudié le phénomène de la ségrégation dans les princi-pales régions métropolitaines du pays pour les années 1980 et 1990.

Rapport INRETS n° 277 175

Métropolisation et ségrégation dans la ville de Mexico

Dans ce chapitre, nous avons utilisé une méthodologie d’analyse pour le trai-tement statistique de l’information très semblable à celle utilisée dans les travaux précédemment mentionnés. Celle-ci permettra, avec certaines exceptions, de comparer nos résultats pour l’année 2000 avec ceux obtenus pour 1990 dans les études précédentes.

2. Méthodologie

Pour l’étude de la ségrégation sociospatiale de la Région métropolitaine de la cité de Mexico (AMCM), on a pris comme références les délimitations géogra-phiques définies par l’Institut national de statistique, géographie et informatique (INEGI), acceptées par la plupart des spécialistes. Ainsi, notre espace d’étude est constitué par la région urbaine continue (la tache urbaine) formé par les 16 délégations politiques du District Fédéral (DF) et 34 villes environnantes de l’État de Mexico. Cette définition diffère de celle de la région métropolitaine de la cité (ZMCM), puisque celle-ci est constituée par le groupe de délégations et munici-palités qui contiennent une partie de la structure urbaine. Le concept de ZMCM est défini par les unités politiques administratives, alors que celui qui a été utilisé dans notre travail est un concept de peuplement : c’est ainsi que, dans notre étude, n’ont pas été incluses les régions rurales des délégations et de banlieue. Ce concept est dynamique par définition (Garza, 2000b).

La ségrégation urbaine est analysée par la comparaison des conditions de vie de la population à l’intérieur de l’espace urbain. Comme unités d’analyse ont été sélectionnées les Régions géostatistiques de base (AGEB), qui constituent les unités les plus désagrégées sur lesquelles l’information démographique et socioéconomique est fournie. Pour ce travail, l’information a été fournie par le XIIe recensement de population et de logements, réalisé au cours de l’année 2000.

L’indicateur utilisé pour mesurer le niveau de ségrégation des différents AGEB est très semblable à celui utilisé par le Conseil national de Population (2000) pour mesurer la marginalité de l’entité fédérative. La marginalité, comme concept, apporte l’idée d’une exclusion des avantages du développement pour certains groupes sociaux localisés dans un espace défini. L’exclusion a été mesurée par une série d’indicateurs concernant les carences au niveau socioéconomique et par les conditions d’accès aux services publics.

Si les métropoles sont structurées par des éléments reliés par des réseaux qui permettent le fonctionnement du groupe, c’est l’absence de connexion de certains espaces à ces réseaux qui rend compte de leur niveau d’exclusion. Terrazas de Revilla (1998) a détecté pour la région métropolitaine, les éléments principaux qui offrent une infrastructure régionale telle que les systèmes d’eau potable, d’égouts, le gaz, le pétrole, l’électricité parmi les plus importants. Leur absence peut les iso-ler du groupe, et, en ce sens, elle les exclue.

Les systèmes de communication métropolitaine et régionale, c’est-à-dire les systèmes de transport, équipement au niveau régional, national et de la cité s’ana-lysent en référence aux installations caractéristiques des grandes villes, comme

176 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

les universités, les hôpitaux et les centres culturels, les espaces consacrés aux activités productives, administratives ou destinés aux loisirs.

2.1. Les indicateurs de la marginalité

Avant d’essayer de mesurer le niveau de connexion des différents espaces à l’intérieur d’une région métropolitaine, nous devons sélectionner des variables empiriques qui peuvent être utilisées comme indicateurs du phénomène. L’index obtenu a nécessairement des limites à cause de la disponibilité de l’information. Les variables sélectionnées sont de trois catégories :

accès aux services publics : variables mesurant l’accès aux services tels –que les égouts, l'adduction d’eau, l’électricité ;conditions de vie : indicateurs de logement tels que le type de construction, –le nombre de personnes par chambre, l’existence de pièces exclusivement réservées à la cuisine ;situation socioéconomique : indicateurs tels que le niveau des revenus, la –scolarité et la possession de biens meubles et immeubles.

La ségrégation peut être mesurée à partir de l’accès ou non à une série d’avan-tages du développement. La stratégie adoptée pour explorer les deux alternatives a été de sélectionner des variables qui servent d’indicateur du niveau du bien-être et de variables qui servent d’indicateur de l’exclusion. Les indicateurs spécifiques sont présentés dans l’Encadré 1.

Les espaces géostatistiques de base étant issus de populations diverses, pour éviter des biais possibles, il a été décidé de convertir toutes les variables en pourcentage par rapport au total de la variable correspondante de l’AGEB. La méthode utilisée pour obtenir le coefficient qui a quantifié les niveaux de ségrégation a été l’analyse factorielle, en particulier l’analyse en composantes principales qui a permis d’associer des pondérations à chaque variable en correspondance avec sa contribution à la variance (Johnson, 2000 ; Kerlinger et Howard, 2001).

2.2. Un premier cadrage

Les indicateurs d’exclusion ou de marginalité sont plus représentatifs que les indicateurs de bien-être pour expliquer la dispersion parmi les AGEB, à l’intérieur de la région métropolitaine et à l’intérieur de la ville. Dès qu’ils expliquent le même phénomène de ségrégation à partir des perspectives opposées, une sélection des variables est alors possible pour élaborer un indice qui a de fait ensuite été adopté.

Rapport INRETS n° 277 177

Métropolisation et ségrégation dans la ville de Mexico

Encadré 1 : indicateurs de marginalité et de bien-être

Indicateurs de marginalité

• Accès aux services urbains :

Logements :

- sans accès à l’électricité ;

- avec l’eau courante ;

- sans accès à électricité et l’eau courante.

• Conditions de logement :

Logements :

- avec seulement une pièce ;

- avec sol de terre battue ;

- nombre d’occupants par pièce ;

- sans salle de bains à usage exclusif.

• Conditions socioé-conomiques :

Population :

- illettrée de 15 ans ou plus ;

- sans études d’éducation élémentaire complètes ;

- qui reçoit des revenus inférieurs à deux salaires minimums (250 $ US mensuels).

Indicateurs de bien-être

• Accès aux services publics :

- logements avec eau courante.

• Conditions de logement :

- avec cuisine ;

- avec service sanitaire exclusif ;

- logements propres ;

- logements payés ;

- logements avec automobile.

• Conditions socioéconomiques

Population occupée : ouvriers indépendants

- avec des revenus supérieurs à cinq salaires minimums (650 $ US mensuels) ;

- avec des études supérieures à l’école primaire ;

- avec des études de baccalauréat ou supérieures ;

- avec 35 à 40 heures hebdomadaires.

178 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Dans les deux cas, la variance expliquée est de l’ordre de 80 % . Les variables et leurs poids sont présentés dans le Tableau 1.

Tableau 1 : Les variables explicatives du coefficient de ségrégation pour l’aire métropolitaine de la cité de Mexico en 2000

Le pourcentage de population âgée de plus de 15 ans et n’ayant pas achevé l’école primaire

0,839

Pourcentage de logements avec une seule pièce 0,893

Pourcentage de logements avec eau courante -0,924

La moyenne du nombre d’occupants par pièce 0,955

Le pourcentage de la population occupée avec un revenu inférieur à deux salaires minimums

0,869

Méthode d’extraction : analyse en composantes principales

Variance expliquée totale 80,466

Valeur du déterminant 0,008791Source : élaboration propre à partir du XIIe recensement de la population et de l’habitat, inegi, 2000.

On peut déduire de ce tableau que ce sont les variables de logement qui expli-quent le plus la ségrégation, alors que les variables sur le niveau d’éducation et de revenu sont d’une importance moindre,

À partir des variables standardisées, des indices de marginalité ou de ségré-gation ont été produits pour les années 1990 et 2000. Les valeurs qui ressortent varient de –7,76 à 20,45 en 1990 et de –6,51 à 19,45 en 2000. Ensuite, une méthode de classification hiérarchique permet de mettre en évidence cinq gran-des classes d’AGEB.

L’indice de marginalité d’espaces de différents niveaux économiques est pré-senté dans le Tableau 2.

Tableau 2 : coefficients de marginalité 1990–2000

Strates Minimum Maximum Moyen Demi

1990 2000 1990 2000 1990 2000 1990 2000

Très bas –7,76 –6,51 –3,53 –3,91 –4,54 –4,97 –4,44 –4,98

Sous –3,53 –3,91 –0,71 –1,32 –2,05 –2,55 –2,52 –2,52

Demi –0,70 –1,32 0,70 1,28 0,03 0,01 0,02 0,02

Haut 0,71 1,28 3,52 3,87 1,97 2,45 2,38 2,38

Très haut 3,53 3,88 20,45 19,45 5,30 6,08 5,51 5,51

Total –7,76 –6,51 20,45 19,45 0,11 0,11 0,01 0,01Source : élaboration propre à partir du XIIe recensement de la population et de l’habitat, inegi, 2000.

Les extrêmes constituent une preuve de l’hétérogénéité dans les niveaux d’ac-cès aux bénéfices de la croissance. Dans le secteur « très haut » se retrouvent les espaces avec les meilleures conditions de vie. Il est principalement constitué

Rapport INRETS n° 277 179

Métropolisation et ségrégation dans la ville de Mexico

par des arrondissements résidentiels, avec des grandes maisons et logements qui ont tous les services publics, comme l’eau, l’électricité, etc. Dans le cas de la cité de Mexico, cela correspond aux arrondissements connus comme Bosques de Chapultepec et la Colonia Del Valle et les délégations Benito Juárez et Coyoacán. La moyenne de l’indice de ségrégation a été de –4,54 en 1990 et –4,97 en 2000.

Une marginalité certaine peut se trouver dans les arrondissements populaires, où les habitants ont accès aux services publics, mais où les revenus sont bas. La plupart d’entre eux se trouvent dans l’état de Mexico, et les délégations de Iztapalapa, Tlàhuac y Milpa Alta. La valeur moyenne de l’indice était de 1,97 en 1990 et 2,45 en 2000.

Une plus haute marginalité peut également être mise en évidence et corres-pond à des conditions particulières : pas d’accès aux services publics, non-accès aux équipements urbains, logements construits avec des matériaux de mau-vaise qualité et revenus des habitants au-dessous des 250 dollars par mois. La moyenne de l’indice de ce secteur était de 5,30 en 1990 et 6,80 en 2000.

3. Distribution spatiale de la ségrégation en l’an 2000

La ville de Mexico est le centre politique du pays depuis l’époque préhispani-que, néanmoins c’est pendant le xxe siècle qu’elle a connu les transformations les plus importantes, la concentration des activités économiques dans le centre du pays a entraîné une explosion démographique. Pendant la période 1910–2000, la population est passée de 491 000 habitants à 16 millions d’habitants. En 2000, la superficie de la région métropolitaine atteint près de 1 500 km2. La région est passée d’une prédominance industrielle à la spécialisation des services, principa-lement professionnels, pédagogiques et financiers. En 1970, plus des 2/5 de la production du secteur secondaire du pays était produit à Mexico, en 1998 cette proportion a diminué d’un quart, ce qui a fait passer l’activité tertiaire à 38 % (Garza, 2000a).

Le développement explosif de la cité de Mexico s’est effectué surtout par la migration du reste du pays, pendant la période de la révolution mexicaine (1910–1921) et pendant la substitution des importations (1930–1970). Le développement des premières années du siècle dernier a été un mécanisme de sécurité devant le danger que représentaient les fréquentes confrontations des différents groupes politiques, la capitale du pays restait isolée de ces événements, en accueillant la population qui voulait échapper á la violence des campagnes. En revanche, la rapide industrialisation a transformé les villes comme Monterrey et Guadalajara en centres d’attraction.

La campagne a expulsé le surplus de ses habitants, qui sont partis vers les grandes cités, dans l’espoir d’obtenir un emploi et de meilleures conditions de vie. Pendant les années 1970, le processus a diminué, et le taux de migration de la campagne vers la ville a commencé à diminuer aussi, mais la migration intra-urbaine a augmenté.

180 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Vers les années 2000, la migration interne à la région a été très importante. Le DF s’est transformé et a expulsé des habitants, surtout de jeunes couples qui cherchaient des terrains moins chers pour vivre.

L’incorporation continue et désordonnée à la région métropolitaine de nou-velles municipalités a été la cause de l’installation de cette population dans des conditions précaires où malgré leur proximité à la cité, il n’y a pas d’accès à la plupart des services publics. L’écart entre les dynamiques de la population, des services publiques et de la structure urbaine a augmenté pendant les dernières années, notamment du fait de la réduction et de la réorganisation des finances publiques.

La méthodologie décrite ici a permis de segmenter l’espace urbain de l’espace métropolitain de la cité de Mexico, à partir du niveau de ségrégation (indice de marginalité). En 2000, le recensement démographique dénombre une population de 17 577 809 habitants, dont 48,8 % habitent au DF et le reste (51,2 %) dans les municipalités de l’État de Mexico, 4 111 segments AGEB parmi les 4 698 seg-ments géostatistiques urbains ont pu être renseignés et analysés, 2 082 appar-tiennent au DF et le reste à l’État de Mexico.

Concernant les niveaux de ségrégation, 632 AGEB avec un très haut niveau de ségrégation ont été mis en évidence et localisés, comprenant une population de 2 188 655 habitants (13,2 % de la population totale). Par ailleurs, quatre mil-lions d’individus sont considérés dans un haut niveau de marginalité (24 %). En résumé, près de 40 % des habitants de l’espace métropolitain font face au phéno-mène de la ségrégation (Tableau 3).

La distribution spatiale des différents segments peut être observée sur l’illus-tration 2, les groupes de population avec une haute et très haute marginalité sont principalement localisés dans les périphéries orientale et nord de la cité, dans les municipalités de l’État de Mexico. Le centre historique et les délégations voisines représentent des coefficients de marginalité inférieurs. Nous sommes face à un modèle de ségrégation selon des axes centre–périphérie et est-nord. Plusieurs éléments d’explication peuvent être proposés :

géographiques, le Sud et l’Ouest ont de meilleures conditions climatologi- –ques et écologiques, ce qui augmente le prix du sol et en exclut la popula-tion à bas salaires ;économiques, les nouveaux centres de développement financier et les ser- –vices spécialisés sont localisés dans le centre historique et dans la région Est ;politiques, depuis plusieurs années, la politique effectuée par le DF a limité –la création des nouveaux établissements dans la partie nord et orientale de l'État de Mexico, région où il y avait un plus grand espace.

Rapport INRETS n° 277 181

Métropolisation et ségrégation dans la ville de Mexico

Illustration 1 : les AGEB urbains par classe de marginalité en 1990

Estratos

Sin Datos Muy Bajo Bajo Medio Alto Muy Alto

Limite estatal Limite Delegacional y Municipal

Source : élaboration propre à partir des XIe et XIIe recensements de la population et de l’habitat, inegi, 1990.

182 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Illustration 2 : les AGEB urbains par classe de marginalité en 2000

EstratosSin Datos Muy Bajo Bajo Medio Alto Muy Alto

Limite estatal Limite Delegacional y MunicipalLimite de Agebs 1990

Source : élaboration propre à partir des XIe et XIIe recensements de la population et de l’habitat, inegi, 2000

Rapport INRETS n° 277 183

Métropolisation et ségrégation dans la ville de Mexico

Tableau 3 : les indicateurs de marginalité des AGEBS urbains, 1990–2000

Niveau de marginalité

Population en millions Nombre d’AGEBSNombre de logements

en milliers

1990 2000 1990 2000 1990 2000

Nbr. % Nbr. % Nbr. % Nbr. % Nbr. % Nbr. %

Total 14,0 100 16,6 100 3 104 100 4 111 100 2 913 100 3 937 100

Très bas 1,8 12,7 2,08 12,5 481 15,5 682 16,6 456 15,7 584 14,8

Bas 3,5 25,1 3,4 20,6 761 24,5 858 20,9 774 26,6 845 21,5

Moyen 2,6 18,4 4,9 29,7 490 15,8 1043 25,4 519 17,8 1149 29,2

Haut 4,7 33,7 4,0 24,0 966 31,1 896 21,8 900 30,9 888 22,6

Très haut 1,4 10,1 2,2 13,2 406 13,1 632 15,4 264 9,0 470 12,0Source : élaboration propre à partir des XIe et XIIe recensements de la population et de l’habitat, inegi, 1990 et 2000.

4. Les caractéristiques de la ségrégation

L’analyse des caractéristiques de la ségrégation met en évidence l’existence d’un processus à l’œuvre, conduisant à une ségrégation accrue.

4.1. Les caractéristiques de la ségrégation à l’échelle de la région métropolitaine

Durant l’année 2000, la population avec des niveaux de ségrégation très fai-bles possède dans sa presque totalité des études primaires complètes (97,7 %) et reçoit de hauts salaires. Les logements ont l’eau courante et ne présentent aucun problème d’assainissement.

Parmi la population avec des très hauts niveaux de marginalité, 10 % n’ont pas d’études primaires complètes ; 59 % reçoivent des revenus inférieurs à 250 dol-lars par mois, 20 % n’ont pas d’accès à l’eau potable, et toute la famille habite dans une seule chambre, sans cuisine et sans toilette, sans réseau d’assainisse-ment. On peut déduire des conditions de vie décrites que ces groupes de popu-lation sont complètement étrangers les uns aux autres. Une partie importante de la population n’a même pas accès aux réseaux d’eau, une autre partie n’a pas les niveaux élémentaires d’éducation, ce qui entraîne cette population vers l’éco-nomie informelle et les bas salaires, ce qui les empêche d’accéder aux marchés de produits et services, et les marginalise pour une grande quantité de produits provenant du marché mondial et national. Les caractéristiques socioéconomiques et de logement des différents niveaux de marginalité pour la décennie 1990–2000 sont présentées dans le Tableau 4.

Pour tenir compte des différences dans les conditions de vie parmi les seg-ments, plusieurs coefficients ont été mesurés pour quantifier la dispersion à l’in-térieur de chacune des variables représentatives de l’indice de marginalité. Les indicateurs calculent la relation entre la valeur de la variable du niveau de margi-nalité maximum au regard de celui de marginalité minimum.

184 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

De cette façon, le coefficient de variation peut mesurer la dispersion dans cha-cune des variables (Tableau 4).

Des valeurs calculées on peut déduire que l’exclusion de l’éducation entraîne la ségrégation. Bien que de manière moins intense, l’exclusion se manifeste éga-lement dans les niveaux des revenus et dans une différenciation des conditions de logement, mais ce n’est pas le cas dans l’accès aux services publics où la dispersion est inférieure.

Tableau 4 : caractéristiques de la ségrégation de la région métropolitaine de la ville de Mexique 1990–2000

Secteur

Pourcentage de la population de plus de 15 ans et

n’ayant pas achevé l’école primaire

Pourcentage de logements d’une

seule pièce

Pourcentage de logements avec eau

courante dans le logement

1990 2000 1990 2000 1990 2000

Très bas Moyenne 7,8 2,3 1,4 1,2 95,4 97,2

Bas Moyenne 14,6 4,2 3,6 3,2 84,1 90,5

Moyen Moyenne 20,9 5,8 6,9 7,9 63,7 70,4

Haut Moyenne 26,8 7,1 10,5 11,9 41,0 46,4

Très haut Moyenne 36,8 9,5 20,6 21,0 18,7 22,3

Total Moyenne 21,2 5,7 8,2 8,7 60,7 66,4

Très haut / moyenne 1,73 1,66 2,52 2,41 0,31 0,34

Très bas / moyenne 0,37 0,40 0,17 0,13 1,57 1,46

Très haut / très bas 4,75 4,11 15,15 17,88 0,20 0,23

Coefficient / variation 0,47 0,49 0,90 0,89 0,48 0,42

Secteur

Moyenne d’occupants par

pièce en logement particulier

Pourcentage de la population occupée

qui reçoit moins de deux salaires

minimums

1990 2000 1990 2000

Très bas Moyenne 1,5 0,9 42,3 21,2

Bas Moyenne 2,0 1,2 59,6 36,4

Moyen Moyenne 2,4 1,4 67,2 45,3

Haut Moyenne 2,6 1,7 72,6 52,7

Très haut Moyenne 3.0 2,2 77,7 59,0

Total Moyenne 2,3 1,5 64,6 43,2

Très haut / moyenne 1,29 1,49 1,20 1,37

Très bas / moyenne 0,67 0,58 0,66 0,49

Très haut / très bas 1,94 2,56 1,84 2,78

Coefficient / variation 0,22 0,31 0,21 0,32

Source : élaboration propre à partir des XIe et XIe recensements de la population et de l’habitat, inegi 1990 et 2000.

Rapport INRETS n° 277 185

Métropolisation et ségrégation dans la ville de Mexico

4.2. Comparaison entre le DF et le reste de l’espace métropolitain

Comme on l’a déjà mentionné, les groupes qui souffrent de la plus grande exclusion sont localisés dans l’état de Mexico, 22,8 % des AGEB de l’État de Mexico ont un niveau de marginalité très haut, pendant que dans le DF, seule-ment 7,2 % se trouvent dans la même situation. Pendant que 23,9 % des AGEB du DF sont classifiées avec une marginalité très basse, seulement 10,8 % des AGEB de l’État de Mexico ont accès à ces services.

Tableau 5 : distribution des AGEB selon l’indice de marginalité 2000

SecteurDistrict Fédéral État de Mexique Total

1990 2000 1990 2000 1990 2000

Très bas 19,97 23,92 9,30 10,08 15,50 16,6

Bas 31,34 26,32 15,07 16,20 24,5 20,90

Moyen 16,53 29,01 14,76 21,35 15,8 25,40

Haut 24,74 13,50 39,97 29,61 31,1 21,8

Très haut 7,43 7,25 20,91 22,76 13,1 15,40

% total 100 100 100 100 100 100

Source : élaboration propre à partir des XIe et XIIe recensements de la population et de l’habitat, inegi 1990 et 2000.

Les conditions de vie entre les deux régions sont très différentes, tous les indicateurs utilisés (le niveau d’éducation, les conditions de logements, l’accès aux services et le niveau de revenu) sont toujours supérieurs au DF Néanmoins, à l’intérieur des unités politico-administratives, l’hétérogénéité est très forte.

4.3. Le processus de ségrégation

Durant la période 1990–2000, la réforme de l’économie mexicaine, qui avait commencé dans la décennie antérieure, a eu de graves répercussions sur les dépenses publiques, ce qui s’est traduit par une réduction de la participation de l’État dans tous les secteurs, y compris les dépenses sociales. Ainsi, en 1995, le pays a vécu une des crises les plus importantes de son histoire moderne, ce qui s’est répercuté fortement sur le niveau d’emploi et des salaires de presque la totalité de la population de la région.

Pour mettre en évidence les tendances du processus de ségrégation, les dis-tributions des coefficients de marginalité des AGEB, durant la période de 1990 à 2000, ont été comparées.

Pendant la décennie 1990, les AGEB ainsi que la population, qui se trouvent dans les extrêmes, augmentent considérablement. Le segment avec le niveau de marginalité le plus élevé s’étend dans l’espace (population et logements), surtout dans les municipalités voisines de l’État de Mexico.

Les zones de peuplement créées en 1990, dans un processus de d’urbanisation rapide, s’installent loin du centre historique. La dynamique de la population est beaucoup plus accélérée que le processus d’accès aux services, ce qui augmente

186 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

considérablement la proportion de population qui reste exclue du processus de métropolisation.

Comme on peut le voir sur l’illustration 3, les évolutions les plus significatives du processus de marginalisation urbaine dans l’espace métropolitain de la cité de Mexico, pour les années de 1990 à 2000, ont été une croissance des AGEB de très haute marginalité, et l’écart entre les types d’AGEB ségrégés et non ségré-gés augmente.

Illustration 3 : distribution des indices de marginalité des AGEB en 1990, puis en 2000

Coun

t

Distribution del Indice de Marginacion del AMCM 1990

200

150

100

50

0-5.00 0.00 5.00 10.00

10.Media = 0.096Desv. estandar = 3.13Coef. Varaicion = 31.93Rango = 21.07Sesgo = 0.230Curtoris = -0.205

Coun

t

Distribution del Indice de Marginacion del AMCM 2000

200

150

100

50

0-5.00 0.00 5.00 10.00 15.00

Media = 0.108Desv. estandar = 3.66Coef. Varaicion = 33.88Rango = 23.09Sesgo = 0.450Curtoris = -0.029

Rapport INRETS n° 277 187

Métropolisation et ségrégation dans la ville de Mexico

La moyenne du coefficient de marginalité a augmenté de 1990 à 2000. La distance entre les extrêmes du coefficient de marginalité croît. En l’an 2000, la proportion des AGEB qui se trouvent dans les segments de la partie droite de la courbe augmente. C’est-à-dire qu’entre 1990 et 2000, les inégalités se sont accrues.

En même temps, on peut observer un processus de convergence entre les types « moyens » et les types les moins ségrégés. Un pourcentage important de la population était situé, en 1990, dans le segment de droite (haute marginalité) de la distribution qui passe dans la partie du milieu en l’an 2000.

La ségrégation est un phénomène dynamique et relatif. Ainsi, si à travers l’ana-lyse des distributions des indices de marginalité on obtient une ségrégation plus forte, cela ne veut pas dire que les niveaux socioéconomiques ont diminué dans la même proportion. En effet, dans quatre des variables incorporées pour le calcul des indices de ségrégation il y a une amélioration en termes absolus. Ce qui n’est pas le cas des revenus dont la croissance a été inférieure à l’inflation constatée pendant la réalisation de cette recherche.

L’amélioration des indicateurs des conditions de vie n’a pas été homogène dans les deux entités. Alors que le DF présente une hausse plus dynamique et générale des indicateurs ; pour le reste de l’espace métropolitain, les condi-tions de vie, en moyenne, sont restées au même niveau, à l’exception du niveau d’éducation.

La différence des dynamiques existantes pour accéder aux bénéfices de la métropolisation augmente la ségrégation, fait ressortir des contradictions entre les groupes et provoque des conflits sociaux qui se traduisent notamment par des problèmes de sécurité dans la cité. Apparaît donc très nettement la nécessité d’une meilleure coopération entre les entités fédérales et les municipalités res-ponsables des projets de politique urbaine.

Conclusion

Le processus de métropolisation au cours des dernières décennies, s’est accompagné d’une ségrégation accrue de la population. Celle-ci est un phéno-mène permanent dans le développement du pays, mais qui présente des particu-larités, surtout dans les grandes cités et en particulier pour Mexico.

La distribution spatiale de la ségrégation dans l’espace métropolitain de la cité de Mexico a suivi une trajectoire « classique » du centre vers la périphérie. Au fur et à mesure que s’étend la tache urbaine, les régions exclues s’éloignent vers l’est et le nord de la ville, dans les municipalités de l’État de Mexico.

La ségrégation est la manifestation de l’exclusion des bénéfices du dévelop-pement, principalement de l’éducation, des services publics et de l’accès à la ville. Les revenus de la population sont également et globalement très bas, et les conditions du logement très mauvaises. La comparaison effectuée entre les années 1990 et 2000 met en évidence un renforcement de cette tendance.

188 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

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Rapport INRETS n° 277 191

Les disparités de revenus à différentes échelles spatiales

en France

Louafi Bouzouina et Dominique Mignot

La définition de la métropolisation comme un « processus de concentration des hommes et des activités dans les espaces déjà les plus développés » (Buisson et al., 1995) nécessite d’être complétée. Alors que pour les villes françaises, par exemple, le double phénomène de concentration et d’étalement urbain semblait globalement pouvoir décrire les évolutions à l’œuvre, il semble dorénavant néces-saire de parler d’un triple phénomène de concentration, d’étalement urbain et de ségrégation. Ce triple phénomène permet de décrire et d’expliquer un renforce-ment de la hiérarchie urbaine au niveau mondial autour d’espaces métropolisés de plus en plus étendus mais aussi de plus en plus ségrégués. Ce qui avait pu être mis en évidence dans les villes globales de Sassen (1996) s’applique de fait à nombre de métropoles.

La concentration des activités et de la population dans des métropoles toujours plus vastes semble encore une caractéristique essentielle du processus de métropolisation, comme l’ont montré ou suggéré nombre de travaux portant sur différentes échelles spatiales (Fujita, 1994 ; Krugman, 1995 ; Arthur, 1995 ; Lacour et Puissant, 1999). Cette concentration privilégie toujours le niveau le plus élevé de la hiérarchie urbaine, qui continue ainsi à se développer. Au sein de ces agglomérations, le centre historique garde un rôle important, et la concentration se fait aussi en des espaces privilégiés, au centre mais également ailleurs (étalement urbain sélectif), en particulier sur des pôles périphériques bien situés le long des axes de transport, très stables dans le temps et qui ne cessent de gagner des emplois (Mignot et al., 2004). Nous ne détaillerons pas ici ces tendances à la concentration et à l’étalement urbain déjà analysées dans nombre de travaux.

Par contre, la question de l’augmentation des inégalités sociales et/ou territoriales, qui a depuis longtemps intéressé les sociologues et les politologues (Philpott, 1978 ; Mayer, 2001 ; Jargowsky, 1997), vient au cœur des préoccupations des économistes et des géographes, tant aux États-Unis (Cutler et Glaeser, 1997 ; Johnston et al., 2003) qu’en France (Rhein, 1994 ; Maurin, 2004 ; Fitoussi et al., 2004). Ainsi, des travaux récents soulignent que la ségrégation dont tous constatent une progression au cours des 20 dernières années est accentuée par l’évolution à la hausse des populations et des territoires les plus riches. Les

192 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

travaux à l’échelle des villes et notamment à l’échelle intra-urbaine sont plus rares, notamment en France, et méritent une attention particulière.

1. Territoires et disparité

1.1. Villes et disparité

Le questionnement sur les disparités spatiales a, tout d’abord, concerné l’échelle des régions et notamment les relations entre urbain et rural. C’est le constat d’un déséquilibre Paris-Province qui conduit, en France, à la mise en place des politiques d’aménagement du territoire dans les années 1950, « Paris et le désert français » de J.-F. Gravier est publié en 1947. Dans un autre contexte qui est celui du Mexique, les premières études sur les inégalités territoriales concer-nent également la disparité ville–campagne et ont été nombreuses au cours des années 1960 et 1970 (Rosario Dávila et al., 2003). Après les nombreux travaux développés aux États-Unis à l’échelle intra-urbaine, beaucoup de sociologues puis des économistes français ont investi ce champ.

Les communes-centres ou les quartiers centraux ne sont pas les seuls espa-ces en croissance. Des lieux privilégiés du développement apparaissent en péri-phérie des villes, alors que parallèlement, sur d’autres espaces, voire les mêmes, le chômage se développe, et la population se paupérise. Avec le développement du chômage et de la précarité, les politiques urbaines basées sur une conver-gence et une croissance des revenus de tous par une croissance économique de la ville ne sont plus pertinentes.

Parallèlement, la dissociation habitat/emploi s’est accentuée au cours des années 1980 et 1990, volonté des individus (étalement urbain et développement de la bi-activité au sein des ménages) ou contrainte (développement du chômage et de la précarité du travail), amenant les personnes à se déplacer plus, et plus loin, pour chercher du travail, sans que cela se traduise ensuite par un choix de relocalisation résidentielle.

Plusieurs études concordent pour mettre en évidence une tendance à la crois-sance des écarts et analysent les disparités de revenu sur le territoire à différentes échelles (Buisson et Mignot, 2005). Toutes partent de la même base de données : l’imposition sur le revenu des foyers fiscaux.

1.2. La ségrégation par le revenu

L’ensemble des études qui traitent de l’évolution de la ségrégation font face à une difficulté méthodologique liée en premier lieu à la définition même du terme. Et nous sommes d’accord avec Brun (1994) qui définit la ségrégation comme un « état » et un « processus ségrégatif ».

La ségrégation est un processus, alimenté par un ensemble de mécanismes, qui conduit à un moment donné à une disparité socioéconomique (catégorie sociale, revenu) visible entre les unités (quartiers, communes) d’un espace (aire urbaine, région) et une homogénéisation au sein de ces unités.

Rapport INRETS n° 277 193

Les disparités de revenus à différentes échelles spatiales en France

Même si cette définition peut se confondre avec la différenciation spatiale, elle a l’avantage de prendre en compte l’ensemble de la population43, car elle ne se focalise pas seulement sur les groupes défavorisés et elle n’oblige pas de distin-guer ce qui est choisi de ce qui est subi.

Concernant la mesure de la ségrégation, de nombreux indices ont été déve-loppés depuis celui de Duncan et Duncan (1955) et sont repris dans les articles de Massey et Denton (1988) et d’Apparicio (2000). Cette mesure quantitative, la plus utilisée, est face à d’autres difficultés, car toute mesure d’inégalité implique des jugements de valeur et les indices utilisés ne sont jamais neutres (Atkinson et al., 2001 : 17). Par contre, l’étude du processus ségrégatif conduit à identifier les causes et les effets de la ségrégation et surtout à préciser l’analyse. Les études en France sont peu nombreuses et plus récentes.

Plusieurs types de ségrégation sont identifiés et certains font l’objet de mesu-res (Rhein, 1994), comme la ségrégation résidentielle, scolaire et celle à l’em-ploi44. Les indicateurs utilisés pour mesurer ces ségrégations sont eux-mêmes de nature différente. Ainsi, l’indicateur le plus utilisé aux États-Unis est la race et l’origine ethnique (Philpott, 1978 ; Cutler et Glaeser, 1997 ; Cutler et al., 1999 ; Poulsen et al., 2002), associées parfois à d’autres indicateurs tels que le revenu (Massey et Eggers, 1990 ; Jargowsky, 1996 ; Mayer, 2001). La majorité des étu-des en France, à quelques exceptions près (Felouzis, 2003), se focalisent sur des groupes sociaux selon les catégories socioprofessionnelles (Tabard, 1993 ; Lajoie, 1998 ; Préteceille et al., 2004) ou sur le revenu (Fitoussi et Van Haeperen, 1998 ; Atkinson et al., 2001 ; François et al., 2003). Les résultats des études ne sont pas toujours comparables et semblent parfois être contradictoires. D’une part, il ne s’agit pas toujours du même revenu par exemple, car il peut représenter le salaire, le revenu fiscal ou le revenu disponible (le niveau de vie) ; et d’autre part, l’échelle, le zonage et le niveau de renseignement sont différents d’une étude à l’autre. Toutefois, au-delà des nombreux avantages dans l’utilisation des revenus fiscaux pour l’étude de la ségrégation et des inégalités, mais aussi des inconvénients et des reproches (Champagne et Maurice, 2001 ; Houriez et Roux, 2001), cette source demeure la plus fiable et la seule capable de supporter ce genre d’études sur une longue durée.

Les inégalités de revenu, en France, ont baissé au cours du dernier siècle (Atkinson et al., 2001). Pendant la période d’industrialisation, le développement de la formation et de l’éducation a permis de répondre à des besoins importants en main-d’œuvre de qualification moyenne et de resserrer les écarts de qualifica-

43 L’homogénéité sociale des beaux quartiers fait prendre conscience de l’ambivalence de la ségrégation : elle n’est jamais seulement séparation, mais aussi toujours agrégation et recherche de son semblable. Les deux processus sont liés. (Pinçon et Pinçon-Charlot, 2004 : 92).44 Les trois s’attachent à l’espace, élément crucial dans l’étude de la ségrégation. Même si l’étude de la ségrégation doit tenir compte de l’ensemble de l’espace de vie (lieu de résidence, école, emploi, lieux publics et tout lieu ou la proximité est susceptible de générer des interactions et des liens sociaux), la plupart des études utilisent le lieu de résidence comme référence au sein d’une échelle d’étude qui structure le mieux la quotidienneté.

194 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

tions et de salaires, dans les pays développés (Piketty, 1997). Depuis la désindus-trialisation, les nouveaux secteurs moteurs de l’économie (services supérieurs, communication…) ont ciblé les personnes très qualifiés en rejetant les autres vers les secteurs les moins productifs et le chômage.

Deux comparaisons internationales des inégalités de revenu, basées sur la banque de données du Luxembourg Income Study (LIS) des budgets des ména-ges, placent la France dans une situation intermédiaire entre les pays scandi-naves et le Benelux, les moins inégalitaires, et les pays anglo-saxons les plus inégalitaires. En 1984, le coefficient de Gini sur les revenus bruts par ménage était de 0,374 en France, de 0,351 en Suède en 1987 et de 0,421 aux États-Unis en 1986 (Fitoussi et Van Haeperen, 1998 : 40). De la même manière, mais cette fois-ci sur les niveaux de vie45, il était de 0,286 en France en 1994, contre environ 0,223 en Suède 1995 et 0,304 aux États-Unis en 1994 (Sastre et Trannoy, 2001 : 325).

L’évolution à l’échelle nationale semble être stable entre 1979 et 1984, puis-que l’indice de Gini calculé sur le revenu brut par ménage reste stable autour de 0,37 et celui sur le revenu net ajusté46 environ 0,30 (Fitoussi et Van Haeperen, 1998 : 40). Par contre, Sastre et Trannoy (2001 : 329) montrent une croissance de l’indice de Gini sur le niveau de vie, il passe de 0,256 à 0,286 entre 1984 et 1995. À partir des données de revenus issues des enquêtes de l’Insee–DGI de 1996 à 2001, Legendre (2004) montre que le niveau de vie a augmenté en France, pen-dant cette période, notamment pour les deux déciles extrêmes, mais que le niveau d’inégalités est resté relativement stable (l’indice de Gini baisse de 1996 à 1998 de 0,271 à 0,268, puis augmente pour atteindre 0,272 en 2001). Une autre étude sur les revenus fiscaux déclarés par unité de consommation montre que les iné-galités baissent entre 1970 et 1997, l’indice de Gini, entre autres, baisse de 0,41 à 0,34 entre les deux dates en passant par 0,36 en 1984 (Hourriez et Roux, 2001 : 280). Mais, en restant sur le même revenu et sur la même source de données, l’indice de Gini a de nouveau augmenté en 2000 et 2001, respectivement 0,3603 et 0,3611 (Insee–DGI, 2004), ce qui donne une relative stabilité, voire une légère croissance entre 1984 et 2001. Une autre étude, se basant sur les données de la Direction générale des impôts, qui permettent d’apprécier les hauts revenus contrairement à ceux de l’Insee, montre que derrière la légère augmentation de l’indice de Gini (de 0,440 à 0,445), calculé sur le revenu imposable des foyers fiscaux entre 1991 et 1999, il y a un accroissement des écarts entre les faibles revenus et les revenus les plus élevés (Champagne et Maurice, 2001 : 292).

45 Revenu net ajusté après redistribution. Il est égal, selon l’Insee–DGI, au revenu disponible du ménage divisé par le nombre d’unités de consommation. Il comprend les revenus déclarés au fisc et les prestations imputées, nets des impôts directs (impôts sur le revenu, taxe d’habitation, et diverses contributions obligatoires).46 L’échelle d’ajustement est celle de l’OCDE qui attribue un poids de 1 au premier adulte du ménage, un poids de 0,7 aux autres adultes et un poids de 0,5 aux enfants de moins de 18 ans. Tandis que l’échelle modifiée utilisée par l’Insee donne un poids de 1 unité de consommation au premier adulte, 0,5 pour les autres personnes de 14 ans ou plus et 0,3 pour les enfants de moins de 14 ans.

Rapport INRETS n° 277 195

Les disparités de revenus à différentes échelles spatiales en France

Ces inégalités de revenus se traduisent aussi par une ségrégation spatiale, comme nous le verrons dans la suite de l’article. Même s’ils sont différents dans leur rapport avec l’espace, les deux sont extrêmement liées. Mayer (2001) a par ailleurs mis en évidence une relation entre la croissance des inégalités et la ségrégation.

1.3. Méthodologie

Dans cette communication, nous analysons l’évolution des disparités spatiales de 1985 à 2001, à partir des revenus nets moyens imposables des foyers fiscaux au niveau de la commune47, sur l’ensemble des régions et des aires urbaines de plus de 100 000 habitants48. Nous utilisons ensuite le découpage infracommunal en quartiers49 pour tester le degré de ségrégation intra-urbaine à un niveau plus fin, en fin de la période (2001), à partir des revenus déclarés des ménages fiscaux avant tout abattement (Insee–DGI, 2004).

La disposition de plusieurs indicateurs en plus de la mesure de la tendance centrale est nécessaire pour mieux décrire les disparités et la ségrégation. D’une part, les différents indices tels que le coefficient de Gini (Mussard et al., 2004) per-mettent d’évaluer la concentration des revenus, et d’autre part, de simples outils statistiques, tels que les ratios entre les groupes de revenus les plus élevés et les plus bas, apportent des explications supplémentaires. Nous nous baserons prin-cipalement dans cette communication sur la comparaison des revenus moyens et des indices de Gini sur différents zonages Insee de 1985 à 2001.

L’indice de Gini est souvent considéré comme a-spatial, mais il sera utilisé, ici, sur des espaces bien définis à partir des plus petites unités spatiales renseignées (k) qui sont les communes et les quartiers50.

Pour analyser l’évolution des disparités intercommunales à partir de cet indice (Gk), le revenu moyen sera pondéré par le nombre de foyers fiscaux de chaque

47 Ce sont des revenus bruts après déduction des charges et des abattements sans redistribution (Impôts, revenu moyen d’insertion, aide personnalisée au logement…). Il est différent du revenu disponible et il ne peut pas refléter le niveau de vie.48 Même si nous ne présentons ici que les résultats des 15 plus grandes aires urbaines.49 Nous appellerons « quartiers » ou « IRIS » les zones « Îlots regroupés pour l’information statistique » définies par l’Insee. Le découpage en IRIS-2000® est un regroupement des plus petites unités statistiques (îlots) selon des caractéristiques socioéconomiques communes au sein de toutes les communes de plus de 10 000 habitants. Ayant entre 2 000 et 5 000 habitants environ, ces unités spatiales (IRIS) sont relativement homogènes. Les communes non découpées (moins de 10 000 habitants) sont également prises en compte dans le cadre de notre étude afin d’avoir le plus d’information possible. Ce découpage est proche du principe du tract aux États-Unis utilisé dans les études sur le voisinage ou le quartier.

50

tel que : y ki est le revenu du ménage i résidant dans l’unité k qui

prend la valeur de son revenu moyen ; n est le nombre de ménage dans l’aire urbaine et µ est son revenu moyen.

196 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

commune pour réduire de potentielles surestimations des revenus dans des peti-tes communes. Dans ces dernières, le revenu moyen est très sensible à l’arrivée ou au départ d’un très riche foyer fiscal, par rapport aux grandes communes.

Même si l’indice (Gk) explique une grande partie de la ségrégation, il ne prend pas en compte la distribution des revenus au niveau individuel au sein de l’en-semble des unités spatiales. Un indice de Gini de ségrégation (Gs) est suscep-tible de résoudre ce problème. Il s’agit du ratio de l’indice précédent (Gk) et de l’indice de Gini calculé au niveau des ménages (Gi). Cet indice, formulé à partir de la courbe de Lorenz (Kim et Jargowsky, 2005), revient à rapporter la courbe de Lorenz du Gini calculé en supposant que les ménages du même quartier ont le même revenu à la courbe de Lorenz du Gini calculé sur le revenu individuel des ménages. Il représente la part due à l’inégalité de revenu des unités spatiales dans l’inégalité totale de revenu des ménages. En cela, il constitue bien à notre sens un indice de ségrégation spatiale. Plus sa valeur est proche de 1, plus le niveau de ségrégation est important.

Faute d’informations sur la distribution des revenus au niveau individuel, cet indice ne peut pas être utilisé pour calculer le niveau de ségrégation sur la période 1985–2001. Par contre, l’indice de Gini (Gi) ainsi que l’écart-type sont disponibles dans la base des revenus fiscaux des ménages de l’Insee–DGI (2004), ce qui per-met de calculer le (Gs) sur les différents découpages de l’Insee et, en particulier, les aires urbaines.

Il faut signaler que les différentes formes de l’indice de Gini utilisés ici ne nécessitent pas un découpage par classes de revenus (Jargowsky, 1996).

L’échantillon permettant d’analyser l’évolution des disparités représente envi-ron (90 %) des communes de la France métropolitaine. Pour limiter les biais liés à l’agrégation dans cette analyse, nous serons conduits à sélectionner unique-ment les communes de plus de 2 000 habitants (selon le RGP 1999), puisque les communes de petite taille influent sur les ratios (communes riches/communes pauvres) : par exemple, elles peuvent avoir un revenu moyen très élevé, mais un nombre limité de foyers fiscaux51. Certes, ces grandes communes ne présentent que 14 % du nombre total des communes renseignées en 2001 (4 544 commu-nes), mais elles regroupent plus de 75 % des foyers fiscaux et plus de 77 % des revenus fiscaux imposables de l’ensemble des communes de la France métropo-litaine renseignés à cette date.

Les informations sont plus détaillées pour les revenus déclarés des ménages52 contrairement aux revenus imposables des foyers fiscaux par commune. Elles permettent de prendre en compte la distribution au sein même du quartier, même

51 Sachant que le seuil de diffusion dans cette base de données est de seulement 11 foyers fiscaux imposés par commune pour le revenu imposable, la définition des groupes ou déciles des communes pauvres et riches basée sur le nombre de commune peut biaiser les résultats.52 Dans cette étude, nous utilisons les revenus fiscaux des ménages par unités de consommation (UC), car ils sont plus proches des niveaux de vie des ménages.

Rapport INRETS n° 277 197

Les disparités de revenus à différentes échelles spatiales en France

si le seuil de diffusion dans le cadre du secret statistique est plus strict et crée des biais pour certaines aires urbaines. Mais cela ne nous empêche pas d’utiliser l’indice (Gs) qui selon nous, reflète mieux le niveau de ségrégation des quartiers par le revenu dans chaque aire urbaine. Pour dépasser cette difficulté liée au degré d’exhaustivité des Iris (quartiers), nous estimons les revenus moyens des quelques Iris manquants à partir des simulations sur les revenus par quartile ou les revenus médians53. Pour les petits Iris non renseignés sur le revenu (Iris généralement de type « divers » ou de type « activités ») et qui concentrent moins de 0,5 % de la population dans chaque aire urbaine, nous les regroupons au sein d’un seul soi-disant Iris, et nous lui attribuons le revenu moyen de l’aire urbaine.

2. Les évolutions des disparités à l’échelle nationale et régionale

2.1. Au niveau national

Le revenu net imposable moyen a augmenté entre 1985 et 2001, au niveau des différents zonages de l’Insee. Après une hausse entre 1985 et 1990, il a baissé jusqu’en 1996 avant d’augmenter et atteindre la valeur la plus importante de la période.

Il est plus important dans les zones urbaines et notamment les plus grandes d’entre elles (les aires urbaines de plus de 100 000 habitants), comme le montre le Graphique 1.

Le nombre de foyers fiscaux a également progressé de 29,7 % pendant la période, avec une moyenne annuelle de 1,6 %.

La dispersion des revenus a augmenté entre 1985 et 2001, sauf pour l’espace rural où l’indice de Gini (Gk) a notablement baissé entre 1990 et 1996. Elle est plus importante dans l’espace urbain.

Globalement, la dispersion du revenu moyen net imposable des foyers fiscaux s’accentue sur la période 1985–2001 (Graphique 2). Cette tendance est relative-ment similaire à celle identifiée au niveau individuel par Champagne et Maurice (2001) sur la période 1991–1999.

53 Le seuil de diffusion des revenus moyens (avec l’ensemble des informations telles que les déciles, l’écart-type, …) est de 2 000 habitants par unité spatiale (commune ou iris), tandis qu’il est de 50 ménages pour le revenu médian, ce qui donne à ce dernier l’avantage de recouvrir plus d’unités spatiales. La taille des plus petites unités spatiales (nous utilisons indifféremment le terme quartiers ou Iris) varie de 50 ménages à 10 000 habitants.

198 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Graphique 1 : évolution du revenu moyen net imposable des foyers fiscaux au sein des différents découpages de l’Insee-1999, de 1985 à 200154

(Euro constant 200355)

11000

13000

15000

17000

19000

1002599109915891

Rev

enu

moy

en

Données Direction Générale des Impôts.

Graphique 2 : évolution de la dispersion du revenu moyen net imposable des foyers fiscaux par commune au sein des différents découpages de

l’Insee-1999, de 1985 à 2001

0,08

0,1

0,12

0,14

0,16

0,18

1985

1990

1995

2001

Gin

i

Données Direction générale des impôts.

54 La valeur de 1999 est obtenue par extrapolation.55 À partir des coefficients de variation des prix à la consommation de la DGI : instruction du 23 octobre 2003.

Rapport INRETS n° 277 199

Les disparités de revenus à différentes échelles spatiales en France

2.2. Au niveau régional

Les disparités intercommunales ont augmenté au sein de la majorité des régions, entre 1985 et 2001. À l’exception du Limousin et de la Corse, les deux régions les moins peuplées, où plus de 70 % des communes sont rurales, l’indice de Gini (Gk) a augmenté dans l’ensemble des régions françaises. Les hausses les plus fortes concernent les régions qui ont le moins de communes rurales. Globalement, l’indice de Gini a augmenté au niveau des différentes régions, entre 1985 et 2001, même dans celles où le revenu moyen des déciles des communes pauvres augmente.

Nous constatons une évolution du revenu moyen qui suit les mêmes tendan-ces constatées au niveau national, à l’exception de la région d’Alsace qui continue d’augmenter son revenu moyen même pendant la période de baisse (1990–1995) ou la Corse qui voit son revenu moyen baisser pendant la première période favo-rable, ainsi que sur l’ensemble de la période. La moitié des régions ont connu une hausse comprise entre 5 et 10 %. La plus forte hausse est celle enregistrée en Alsace (+18,7 %) devant l’Île-de-France (+14,7 %) et Rhône-Alpes (+14,5 %). Sur la même région de l’Île-de-France, une étude similaire de l’IAURIF (Sagot, 2002) sur les revenus fiscaux des ménages au niveau communal montre une croissance des disparités spatiales, entre 1984 et 1996. L’indice d’inégalité (de Theil) a dou-blé pendant la période de conjoncture favorable (1984–1990), notamment sous l’effet d’un enrichissement des communes classées dans le décile supérieur ; cet indice s’est ensuite légèrement amorti (–10 %) pendant la période de conjoncture défavorable (1990–1996) (Fitoussi et al., 2004 : 15).

Comme l’indique le Tableau 1 (qui classe les régions de la plus riche à la plus pauvre), l’écart du revenu entre la région la plus riche (Île-de-France), et la région la plus pauvre (Corse) est supérieur à 73 %. Il est aussi important avec la deuxième région la plus pauvre (Languedoc-Roussillon, 59 %).

Il faut signaler que l’écart, d’environ 26 %, entre la première et la deuxième région (Alsace) est le même que celui entre cette deuxième région et l’avant-der-nière (Languedoc-Roussillon), ce qui montre en premier lieu la grande richesse de la région parisienne par rapport aux autres régions et la pauvreté de la Corse.

Pour préciser l’analyse de cette dispersion, nous avons défini le décile des communes le plus riche et le décile le plus pauvre56 dans chaque région, en fonction des revenus en 2001. À l’intérieur des régions, les évolutions des deux déciles extrêmes sont complètement divergentes :

Sur les 22 régions, 17 ont eu une évolution négative entre 1985 et 2001 du revenu moyen du décile des communes pauvres. On relèvera toutefois qu’entre 1995 et 2001, tous les revenus des déciles pauvres ont augmenté dans l’ensem-ble des régions à l’exception de la région la plus riche57 et de la région la plus

56 La région de Corse ne contient que 24 communes de plus de 2 000 habitants, ce qui nous a conduit à prendre cinq communes de chaque côté au lieu du décile.57 L’étude de François et al. (2003) montre justement un appauvrissement de la proche banlieue Nord qui forment en 1999 un noyau vaste et compact qui recouvre une part importante du territoire de la Seine-Saint-Denis et qui mord sur le sud-est du Val-d’Oise (François et al., 2003 : 74)

200 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

pauvre. À un niveau plus fin, nous constatons que, en Île-de-France, 94 % des 54 communes qui appartiennent au décile le plus pauvre ont vu une évolution négative de leurs revenus (68 % en Provence–Alpes–Côte-d’Azur, notamment Marseille et 86 % en Lorraine avec ses bassins miniers en crise). Tandis qu’elles ne représentent que moins de 30 % en Bretagne, Pays-de-la-Loire et en Alsace.

Tableau 1 : revenu moyen des communes riches et pauvres par région entre 1985 et 2001(en Euro constant 2003)

RégionsRevenu moyen en 2001

Évolution du revenu moyen des communes

pauvres

Évolution du revenu moyen des communes

riches

Revenu moyen des communes

riches/Revenu

moyen des communes

pauvres

1985–1990

1990–1995

1995–2001

1985–2001

1985–1990

1990–1995

1995–2001

1985–2001

1985 2001

Île-de-France 21 703 –1,0 –6,4 –0,9 –8,1 +33,7 –11,6 +26,7 +49,6 2,17 3,54

Alsace 17 207 +3,1 –2,1 +3,8 +4,8 +13,7 +6,8 +11,3 +35,2 1,37 1,77

Rhône-Alpes 16 700 –1,1 –5,1 +4,1 –2,3 +17,7 –6,8 +23,2 +35,1 1,77 2,44

Centre 15 573 +0,9 –6,2 +4,6 –1,1 +7,9 +1,8 +5,4 +15,7 1,60 1,87

Provence–Alpes–Côte d’Azur

15 339 –2,8 –7,0 +1,1 –8,7 +10,0 –7,0 +9,9 +12,4 1,71 2,10

Haute-Normandie

15 295 –3,6 –6,6 +3,9 –6,5 +10,1 –0,2 +8,4 +19,2 1,83 2,34

Franche-Comté 15 128 +0,1 –5,4 +6,2 +0,6 +9,7 +3,2 +6,1 +20,1 1,52 1,81

Pays-de-la-Loire 15 107 –1,1 –1,3 +7,9 +5,4 +6,7 +1,1 +13,8 +22,7 1,61 1,87

Champagne-Ardenne

15 104 –1,1 –6,8 +5,3 –2,9 +8,9 –9,4 +12,7 +11,2 1,79 2,05

Bretagne 15 100 –4,4 –0,6 +11,0 +5,5 +7,9 +1,2 +12,9 +23,2 1,61 1,89

Picardie 15 040 –0,4 –7,7 +1,1 –7,0 +12,9 –1,6 +4,6 +16,2 1,74 2,17

Bourgogne 14 946 –0,5 –5,4 +3,3 –2,7 +7,5 –1,8 +6,4 +12,3 1,63 1,88

Aquitaine 14 850 –3,1 –6,7 +3,8 –6,2 +5,2 –4,6 +14,6 +15,0 1,64 2,01

Midi-Pyrénées 14 638 –2,8 –2,2 +5,3 +0,1 +8,4 –1,8 +9,7 +16,9 1,68 1,96

Basse-Normandie

14 428 –3,2 –5,8 +6,5 –2,8 +7,6 –0,9 +10,1 +17,4 1,56 1,88

Lorraine 14 320 –0,4 –10,5 +0,3 –10,5 +4,0 +1,5 +7,2 +13,2 1,77 2,24

Poitou-Charentes

14 172 –1,6 –5,6 +5,0 –2,5 +5,4 +1,9 +12,2 +20,6 1,47 1,82

Auvergne 14 108 –1,8 –5,9 +7,4 –0,8 +5,0 +2,6 +5,5 +13,6 1,73 1,98

Nord-Pas-de-Calais

13 947 –2,5 –5,8 +2,3 –5,9 +13,1 –1,0 +7,2 +20,2 1,80 2,30

Limousin 13 837 –3,2 –3,5 +5,5 –1,4 +13,1 –9,4 +11,6 +14,3 1,53 1,78

Languedoc-Roussillon

13 662 –1,5 –6,4 +4,7 –3,4 +4,1 –3,4 +12,1 +12,8 1,69 1,98

Corse 12 537 –10,9 –5,6 –0,1 –15,9 –0,4 –2,9 +5,2 +1,8 1,42 1,72

Données Direction générale des impôts.

Rapport INRETS n° 277 201

Les disparités de revenus à différentes échelles spatiales en France

Le revenu moyen du décile des communes les plus riches a augmenté dans toutes les régions même en Corse (+1,8 %) de 1985 à 200158. L’augmentation était très élevée dans les trois régions les plus riches (49,6 %, 35,2 %, 35,1 %), mais aussi dans des régions beaucoup moins riches (Nord-Pas-de-Calais, 20,2 %).

Enfin, l’écart entre le revenu moyen du premier décile et celui du deuxième décile s’est de plus en plus creusé, au sein de chaque région. Si la région pari-sienne était la seule ayant un écart supérieur à 2 en 1985, en 1990 les régions Rhône-Alpes, Haute-Normandie et le Nord-Pas-de-Calais l’ont rejoint. En 2001, près de la moitié des régions ont atteint cet écart.

3. La ségrégation spatiale intra-urbaine

3.1. Les évolutions des disparités communales

Pour les aires urbaines françaises, l’analyse de l’évolution de la répartition des revenus fiscaux moyens par commune, au cours de la période 1985–2001, mon-tre également un accroissement de cette dispersion (Graphique 3). Les variations du coefficient de Gini (Gk) montrent une tendance nette à la croissance.

Graphique 3 : évolution de la dispersion du revenu moyen des foyers fiscaux par commune entre 1984 et 2004 pour les 15 plus grandes aires urbaines françaises

0,02

0,04

0,06

0,08

0,1

0,12

0,14

0,16

0,18

0,2

0,22

84 85 86 87 88 89 90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04

Année

Indi

ce d

e G

ini (

Gk)

Paris

Lyon

Marseille

Lille

Toulouse

Nice

Bordeaux

Nantes

Strasbourg

Toulon

Douai-Lens

Rennes

Rouen

Grenoble

Montpellier

Données Direction générale des impôts.

58 Pourtant, ce revenu avait baissé pendant la période de conjoncture (1990–1995), notamment en Île-de-France (–11,6 %). En classant les communes franciliennes en sept catégories, de très aisées au très pauvres, François et al. (2003) ont montré un reclassement de plus d’un tiers des communes spécialisées dans la résidence des ménages les plus aisées dans les deux gammes de communes en dessous, entre 1990 et 1999.

202 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Une analyse plus fine montre que c’est l’ensemble des communes les moins riches qui voient par ailleurs la progression la plus faible de leur revenu fiscal moyen, alors que les communes aux revenus les plus élevées sont également caractérisées par les progressions les plus fortes.

Si l’on retient les cinq communes les plus pauvres et les cinq communes les plus riches de chaque aire urbaine de plus de 100 000 habitants en 199959, on dispose ainsi de 47 aires urbaines qui seront étudiées sur la période 1985–2001. On constate une progression du revenu moyen entre 1985 et 1990, puis un déclin entre 1990 et 1995, enfin une hausse entre 1995 et 2001.

Globalement, sur l’ensemble de cette période, on constate les évolutions suivantes :

les revenus moyens des aires urbaines en 2001 varient de 21 692 – €/foyer fiscal60, pour Paris la plus élevée de l’échantillon, à 12 189 €/foyer fiscal, à Douai-Lens pour la plus faible, soit un écart de près de 78 %. Cet écart important est comparable avec celui observé au niveau des régions, mais il peut être très considérable si on descend à des niveaux plus bas. Un rapport de l’Association des Maires de grandes villes (2004) montre que, pour les vil-les de plus de 100 000 habitants, l’écart s’est accentué entre 1992 et 2001 ;sur ces 47 aires urbaines, l’aire urbaine frontalière de Thionville (située à –une trentaine de kilomètres de la capitale luxembourgeoise) est la seule qui a eu une évolution globale négative (–3 %) sur la période (en revenu moyen constant), tandis que 19 avaient une progression supérieure à 10 %. Les deux croissances les plus fortes sont celle d’Annecy avec 18 % et celle de Strasbourg avec 16,4 %. Seize aires urbaines ont une croissance située entre 0 et 5 %, donc relativement faible ;dans 45 % des aires urbaines étudiées, le revenu moyen des communes –pauvres a baissé (21/47). Pour les aires urbaines dont le revenu des com-munes pauvres a progressé, cette hausse reste faible (entre 0 et 7 %), sauf dans deux cas (Rennes +19,4 % et Nantes +15 % où la croissance été très forte entre 1985 et 1990 ;le revenu moyen des communes riches a augmenté dans toutes les aires –urbaines à l’exception de Thionville (–4,7 %). L’augmentation est supérieure à 10 % dans toutes les aires urbaines et atteint jusqu’à +62 % à Paris et +51 % à Lyon ;enfin, l’écart entre le revenu moyen des communes riches et le revenu –moyen des communes pauvres au sein d’une même aire urbaine est de plus en plus élevé. En 1985, seules trois aires urbaines avaient des écarts supérieurs à 2 ; ce sont Paris, Lyon et Lille. En 2001, les écarts se sont élar-gis, ils sont de 5,5 à Paris et 4,3 à Lyon, comme le montre le Tableau 2.

59 On limite l’analyse aux communes de plus de 2 000 habitants au sein de chaque aire urbaine. En outre, les communes intermédiaires devront être au moins au nombre de cinq. Des seuils de 10 et de 20 communes ont été testés sur les plus grandes aires urbaines. Ils donnent les mêmes tendances.60 Les montants sont actualisés en euros 2003.

Rapport INRETS n° 277 203

Les disparités de revenus à différentes échelles spatiales en France

Ainsi, la croissance des revenus dans les communes riches est très forte, et, même si certaines communes pauvres ne perdent pas, les écarts se creusent, car les revenus moyens dans ces communes progressent peu.

Tableau 2 : revenu moyen des communes riches et pauvres de quelques aires urbaines entre 1985 et 2001

(aires urbaines dont l’écart communes riches / communes pauvres est supérieur à 2 en 2001)

Évolution au sein des aires urbaines du revenu moyen entre

1985 et 2001

Revenu moyen des communes riches/revenu moyen des

communes pauvres

Aires urbainesCommunes

pauvresCommunes

riches1985 2001

Paris –16,1 +61,9 2,83 5,46

Lyon –7,2 +50,8 2,20 4,27

Lille –8,2 +19,8 2,19 2,86

Marseille –19,5 +16,6 1,90 2,75

Grenoble –1,2 +33,1 1,91 2,57

Rouen –6,2 +16,7 1,95 2,42

Bordeaux –9,7 +18,2 1,72 2,25

Metz +1,7 + 24,5 1,79 2,19

Montpellier –8,5 +16,0 1,58 2,01

Données Direction générale des impôts.

L’analyse par commune recouvre, elle aussi, des disparités qui peuvent être très importantes entre quartiers. Au sein d’une même commune on peut mettre ainsi en évidence la juxtaposition de quartiers de niveau de revenu très différents. Mais ce zonage étant relativement récent, il n’est pas actuellement possible de suivre l’évolution de ces disparités dans le temps. Il nous permet, cependant, de mieux préciser le niveau de la ségrégation intra-urbaine et de rectifier quelques biais liés à l’agrégation.

3.2. Les disparités à l’échelle des quartiers en 2001

Nous avons jusque-là mis en évidence une croissance des disparités à diffé-rentes échelles à partir des revenus moyens des foyers fiscaux par commune. Les résultats obtenus à partir des revenus moyens et médians déclarés au niveau des quartiers (Insee–DGI, 2004) confirment le niveau de disparité entre les com-munes dans chaque aire urbaine en 2001 (Mignot et Bouzouina, 2005). Ils met-tent également en évidence que les disparités entre les quartiers au sein de la même aire urbaine sont encore plus fortes que les disparités entre les communes. Même certaines aires urbaines, qui semblent avoir un niveau moindre de dispari-tés au niveau de la commune, sont marquées par des disparités plus importantes à l’échelle des quartiers, à l’image de Lille, Strasbourg et Nice. Cette dernière est en plus parmi les aires urbaines les plus inégalitaires (Gini de 0,384) juste après Paris et Marseille (0,395 et 0,391), comme on peut le voir dans le Tableau 3.

204 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

Une étude de l’Insee et de la région Alsace (2004) montre une concentra-tion des très hauts revenus en périphérie des grandes communes (Strasbourg, Mulhouse et Colmar), sachant que le degré des disparités interquartiers dans ces aires urbaines est important par rapport aux autres aires urbaines de la même région. À l’inverse, en région Bretagne, les aires urbaines connaissent moins de disparités à ce niveau (Gk moins de 0,097). Il existe bien dans cette région, consi-dérée comme la moins inégalitaire de toutes les régions en matière de revenus déclarés, une hétérogénéité des niveaux de revenus entre quartiers (Le Verre, 2004 : 10).

Tableau 3 : degré d’inégalités et de ségrégation sur les 15 plus grandes aires urbaines et leurs communes-centres

calculés sur les revenus déclarés des ménages fiscaux en 2001

Aire urbaine

Indices de Gini sur l’AU

Revenu moyen de l’AU

Indices de Gini sur le centre de l’AU

Revenu moyen

du centre de l’AU

Inégalité des

revenus des

ménages (UC) Gi*

Inégalité des

revenus des Iris

Gk

Ségréga-tion Gs

Inégalité des

revenus des

ménages (UC) Gi*

Inégalité des

revenus des Iris

Gk

Ségréga-tion Gs

Paris 0,395 0,208 0,526 21 767 0,471 0,228 0,484 27 356

Lyon 0,348 0,152 0,436 18 533 0,374 0,144 0,385 19 826

Marseille 0,391 0,191 0,488 16 291 0,426 0,216 0,507 14 971

Lille 0,375 0,185 0,493 16 342 0,430 0,204 0,474 14 980

Toulouse 0,346 0,122 0,352 18 291 0,405 0,152 0,375 17 439

Nice 0,384 0,145 0,378 17 858 0,403 0,165 0,409 16 553

Bordeaux 0,341 0,128 0,375 17 725 0,409 0,174 0,425 18 552

Nantes 0,326 0,129 0,396 17 523 0,381 0,168 0,441 17 664

Strasbourg 0,343 0,146 0,425 18 702 0,411 0,211 0,513 17 431

Toulon 0,357 0,141 0,394 16 171 0,385 0,166 0,431 14 825

Douai-Lens 0,363 0,131 0,361 12 855 / / /

Rennes 0,315 0,115 0,366 18 085 0,362 0,150 0,414 18 115

Rouen 0,343 0,162 0,473 16 841 0,399 0,176 0,441 16 672

Grenoble 0,338 0,161 0,477 18 548 0,375 0,151 0,403 16 831

Montpellier 0,377 0,147 0,389 16 918 0,433 0,156 0,360 14 953

* Calcul Insee – Données Insee–DGI, 2004.

Nous interprétons la présence d’une forte disparité entre les quartiers d’une aire urbaine et une importante homogénéité des ménages au sein de ces voisina-ges comme le résultat du processus ségrégatif. L’indice de ségrégation (Gs) prend en compte ces deux critères en identifiant la part de l’inégalité entre les quartiers dans l’inégalité totale au sein de l’aire urbaine. Plus il est proche de 1 plus l’inéga-lité totale est expliquée par celle entre les quartiers et donc la ségrégation est forte. Il nous permet de comparer le niveau de ségrégation entre les aires urbaines, leurs centres, ainsi qu’entre chaque aire urbaine et son centre en 2001.

Rapport INRETS n° 277 205

Les disparités de revenus à différentes échelles spatiales en France

Les aires urbaines de Paris, Lille et Marseille semblent les plus ségréguées. Elles connaissent les plus fortes disparités entre les quartiers (Gk) et inégalités des ménages (Gi), mais surtout la plus importante ségrégation des quartiers (Gs). Ce dernier est égal à 0,532 à Paris, 0,496 à Lille–Roubaix–Tourcoing et 0,461 à Marseille–Aix (Tableau 3).

Par ailleurs, Lyon, Strasbourg, Rouen et Grenoble, bien que moins inégali-taires que Paris ou Marseille (Gi respectivement de 0,348, 0,343, 0,343 et 0,338 contre 0,395 et 0,391) semblent tout autant marquées par la ségrégation spatiale, puisque l’indice (Gs) est proche de celui de Paris et de Marseille (Tableau 3).

Rennes demeure l’aire urbaine la moins inégalitaire (Gi de 0,315) (y compris son centre : G

i de 0,362) où la disparité entre les quartiers est la plus faible (Gk

égal à 0,113), et la ségrégation est parmi les plus modestes (Gs égal à 0,357).

L’aire urbaine duocentrique de Douai–Lens, fusionnée en 1999, apparaît la moins ségrégée (Gs égal à 0,315). Faut-il en conclure pour autant que les aires urbaines polycentriques sont moins ségrégées ? Les exemples de Lille et Marseille tendraient à prouver le contraire.

Aux États-Unis, Pendall et Carruthers (2003 : 581–582) ont mis en évidence que l’étalement — au moins comme faible densité — n’est pas directement asso-cié ni responsable de la ségrégation par le revenu. Au contraire, ils trouvent, au niveau régional, que la ségrégation est plus faible dans les régions à faible den-sité ou à densité très décroissante, entre 1980 et 2000, par rapport aux régions à densité forte ou stable. Mais ils trouvent en même temps, au niveau urbain, que la ségrégation est plus faible dans les aires métropolitaines (MSA) les plus den-ses et dans celles qui voient leurs densités croître même légèrement par rapport aux aires métropolitaines à densité moyenne ou stable entre 1980 et 2000. Ils soulignent l’importance de la densité pour les politiques visant à réduire la ségré-gation et instaurer une mixité sociale, mais qui risque d’être une simple période intermédiaire vers une plus vaste gentrification chassant les ménages pauvres du centre.

En France, le logement social de type HLM, qui, par sa concentration dans des banlieues, conduit à des quartiers homogènes et à la ségrégation, peut maintenir une certaine hétérogénéité au sein même de certains voisinages comme l’ont souligné Pinçon et Pinçon-Charlot (2004) sur Paris, pour peu que des politiques adéquates aient été menées afin de soustraire une partie du marché du logement à la spéculation. La politique du logement fait donc partie d’un processus ségré-gatif général aux effets directement perceptibles à l’échelle des quartiers.

3.3. Les mécanismes de la ségrégation par le revenu

Il nous semble important d’insister sur les mécanismes de ségrégation pour mieux appréhender l’avenir des villes (Jargowsky, 1996) et essayer de compren-dre les forces de concentration et de dispersion qui les entretiennent notamment au niveau intra-urbain. La complexité des études qui traitent de la ségrégation réside dans le fait que ces causes et ces effets ne sont pas forcément extérieurs, ce qui montre la capacité du phénomène à s’autoalimenter et à être dynamique.

206 Rapport INRETS n° 277

Les formes de la métropolisation

De plus, les mécanismes, liés à la résidence, à l’emploi et l’école, qui peuvent l’expliquer ne sont pas seulement économiques, mais correspondent aussi à des comportements individuels et collectifs.

L’ensemble de la littérature a mis en évidence un certain nombre de relations de causalité qui sont loin d’être exhaustives, mais qui permettent d’approcher l’explication du phénomène de la ségrégation et d’éclairer les enjeux pour l’inter-vention des politiques.

Marché foncier et ségrégation résidentielle

La ségrégation résidentielle est expliquée par les lois économiques sur la localisation des ménages de l’économie néoclassique, qui font appel à la rente foncière différentielle (Derycke, 1979, 1982 ; Aydalot, 1985). Le ménage, compte tenu de son revenu choisit sa localisation en arbitrant entre le prix du foncier et le coût du transport pour accéder aux lieux d’emplois et au centre-ville. Par contre, les travaux des sociologues montrent que le marché foncier est plutôt une consé-quence de la ségrégation selon qu’il s’agit d’une valorisation ou d’une dévalorisa-tion de l’usage du sol (Grannelle, 2004). L’environnement social et la qualité du voisinage est un élément de valorisation–dévalorisation. Le marché foncier est donc à la fois cause et conséquence de la ségrégation résidentielle.

Effectivement, le prix du foncier n’est pas déterminé uniquement par la qualité du logement et de l’accessibilité au lieu d’emploi, mais aussi par la qualité du voisinage et des équipements. Les ménages mobiles (ayant les moyens) peuvent choisir leurs logements seulement en fonction de l’image du quartier en cherchant une « proximité rassurante » pour être « entre soi » (Maurin, 2004). La proxi-mité de voisins influents peut générer des bénéfices et des externalités positives (Schelling, 1978 ; Wilson, 1987) où les enfants peuvent jouer un rôle de rappro-chement. Chez la grande bourgeoisie, cet entre-soi permet, en plus, de vivre en permanence au sein d’un amoncellement de richesses à la fois matérielles et culturelles (Pinçon et Pinçon-Charlot, 2004 : 91). Schelling (1978) montre dans son modèle microéconomique comment une ville intégrée peut devenir une ville ségréguée, même si aucun agent ne préfère la ségrégation.

Beaucoup d’études ont montré, également, l’impact des bonnes écoles (parmi l’ensemble des aménités et des équipements publics) sur le prix du logement dans leurs aires de recrutement notamment aux États-Unis et en Grande-Bretagne.

Ségrégation scolaire et ségrégation résidentielle

Cette relation vient selon Tiebout (1956) des préférences des ménages pour les aménités locales telles que les bonnes écoles mais aussi de l’existence d’ex-ternalités. Un nombre croissant d’études ont montré l’impact des systèmes sco-laires basés sur le voisinage « carte scolaire » sur la ségrégation résidentielle par le revenu (Bénabou, 1993 ; Nechyba, 2003). Cela crée une homogénéisation des élèves, et l’école devient le microcosme de l’aire de recrutement. En France, et à l’exception de certaines zones urbaines et surtout franciliennes (Maresca, 2003), il n’y a pas de travaux qui mettent en évidence une ségrégation produite par la mon-

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Les disparités de revenus à différentes échelles spatiales en France

tée des « stratégies d’évitement » des familles par l’école61 (Duru-Bellat, 2004), sachant que la valorisation de l’école n’est pas moins importante en France que dans les autres pays, puisque la compétition commence dès le primaire (Maurin, 2004). En même temps, il est largement prouvé que le regroupement des sco-laires des quartiers défavorisés influe sur leurs résultats, ainsi qu’une partie non négligeable de l’échec scolaire semble pouvoir s’expliquer par des effets de voi-sinage (Goux et Maurin, 2004 : 5). Cette concentration peut même faciliter l’in-fluence des comportements négatifs des jeunes et favoriser l’effet « contagion » par des externalités négatives (Wilson, 1987 ; Crane, 1991). La ségrégation sco-laire est non seulement susceptible de jouer sur le prix des logements, mais elle peut être, pour partie, à l’origine d’une ségrégation résidentielle.

Le niveau d’éducation et de qualification ou même la réputation des écoles fréquentées est ensuite indispensable pour accéder à certains emplois, même si le niveau de formation ne garantit pas cet accès à l’emploi, notamment du fait d’effets de quartiers.

Marché de travail et ségrégation résidentielle

Une grande partie des problèmes d’emploi des populations ségrégées est liée à des effets de quartier. La faiblesse des réseaux sociaux (O’Reagan et Quigley, 1998) et la discrimination à l’emploi par rapport au lieu de résidence redlining (Zenou et Boccard, 2000) représente un des freins à l’embauche indépendam-ment de la distance aux opportunités d’emplois.

La théorie du mauvais appariement spatial (spatial mismatch) résultant d’une discrimination aux marchés de logement, crée une distance entre les quartiers ségrégés et les lieux d’emploi (Kain, 1968). Cette hypothèse est largement testée aux États-Unis (Ihlanfeldt et Sjoquist, 1990 ; Raphael, 1998 ; Weinberg, 2000) et même en France (Bouabdallah et al., 2002 ; Gobillon et Selod, 2002 ; Gaschet et Gaussier, 2003). Ainsi, la ségrégation résidentielle affecte l’accès aux marchés d’emploi.

L’emploi reste la source principale du revenu en France. Ce dernier joue un rôle important dans le choix des résidences, et les ménages modestes choisis-sent leurs logements dans des quartiers où le loyer est le moins élevé (selon le marché foncier). On retrouve là le rôle des politiques du logement, notamment le logement social.

L’impact des politiques du logement

Si on analyse la législation française depuis la fin de la Seconde Guerre mon-diale (Deschamps, 1998), on se rend compte que le droit au logement social a joué un rôle primordial dans le regroupement des résidents de revenu faible dans des territoires particuliers, notamment certaines communes de banlieue où ont été construites les zone à urbaniser en priorité (ZUP).

61 Selon Éric Maurin, les questions de l’économie de l’éducation sont, en général, sous-exploitées en France.

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Les formes de la métropolisation

La non-prise en compte de l’espace global de l’agglomération dans la répar-tition de ce type de logement social et de son occupation, pendant toute cette période, a été la cause principale de la défaillance de l’ensemble de ces disposi-tifs et la dérive vers la ségrégation.

Un grand nombre de mesures de lutte contre la ségrégation ont été mis en place depuis la circulaire Guichard de 1973, en passant par la politique de la ville, sans que cela ne remette en cause cette tendance à la ségrégation.

Les enjeux actuels pointent bien la nécessité d’une analyse et d’une politique à la fois à l’échelle de l’ensemble de l’agglomération et à une échelle fine, celle des quartiers.

Conclusion

Nous avons mis en évidence des disparités et une ségrégation à différentes échelles et notamment au niveau intra-urbain.

Les écarts de revenus se sont creusés entre les communes riches et les com-munes pauvres pendant la période 1985–2001. Les résultats au niveau infra-communal confirment les inégalités de revenus au sein des aires urbaines en fin de période. Ils confirment la pertinence de cette échelle d’étude et l’importance de sa prise en compte dans la politique de la ville. À ce niveau fin, l’étude de la ségrégation intra-urbaine nous a permis d’avoir une photographie du niveau de la ségrégation de revenu des aires urbaines et de leurs centres. Mais les mécanis-mes du processus ségrégatif sont multiformes, et les liens de causalités ne sont pas facilement identifiables.

Un ensemble de travaux met en évidence un certain nombre d’interdépen-dances autour de la résidence, les aménités et l’emploi sans que l’impact de la forme urbaine et notamment la multipolarisation ne soit clairement abordé. Une étude de la ségrégation raciale aux États-Unis (Poulsen et al., 2002) montre que les deux villes postmodernes caractérisées par leurs edge cities (Los Angeles, Miami) sont moins ségrégées que les deux autres villes modernes (Chicago, New York), ce qui nous laisse penser que la création de nombreux centres permet de réduire la ségrégation en offrant plus d’opportunités aux marchés d’emplois et de logements.

L’émergence de pôles secondaires diversifiés, en France, est susceptible de rapprocher les habitants périphériques de leurs emplois et de créer de la centra-lité et du lien social, sans que ces pôles soient forcement substituables au centre historique (Gaschet, 2001).

Une comparaison, qui reste à faire, de villes polycentriques et monocentri-ques, apportera des éléments de réponse.

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Imprimé en France – JOUVE, 1 rue du Dr Sauvé – 53100 Mayenne485515C - Dépôt légal : Août 2009

L E S C O L L E C T I O N S D E L ’ I N R E T S

Les formes de La métropoLisation

dominique mignot diana rebeca Villarreal GonzálezCoordinateurs

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partant d’une interrogation sur la perma-nence des formes de la métropolisation,

les travaux présentés dans cet ouvrage indi-quent sans ambiguïté que la métropolisation est un processus dont les trois caractéristi-ques de concentration, d’étalement urbain et de ségrégation intra-urbaine sont indissocia-bles et sont à l’œuvre simultanément.La première partie, « les formes de la métro-polisation », vise à expliciter les permanences de ces formes. La deuxième partie, « les dyna-miques économiques », analyse en quoi les évolutions du tissu économique jouent sur les formes de la métropolisation et, notamment, sur les polarisations intra-urbaines. enfin, la troisième partie, « métropolisation et ségré-gation spatiale », confirme la pertinence des travaux sur la ségrégation spatiale pour analy-ser le processus de métropolisation à l’œuvre à différentes échelles spatiales.

Rapport n° 277Juin 2009

15,24 €

Dominique Mignot, docteur habilité à diriger des recherches en sciences économiques de l’université de Lyon et ingénieur des Ponts et Chaussées, directeur scientifique adjoint de l’INRETS, chercheur associé au Laboratoire d'économie des transports (LET) à l'université Lumière Lyon 2.

Diana Rebeca Villarreal González, docteur en sociologie de l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS, Paris), professeur du doctorat en sciences sociales et au départe-ment de production économique de l'université autonome métropolitaine, unité Xochimilco, Mexico.

ISSN 0768-9756ISBN 978-2-85782-673-6

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Costa Rica, France et Mexique

Légende de la photo de couverture : « Une rue fermée illégalement par les habitants de Mexico », Dominique Mignot, 2008.