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ANCIENNE ECOLE DE CHIMIE
GENÈVE
parcelle no 736
feuille 36, Genève Plainpalais
22, boulevard des Philosophes
1205 Genève
Etude historique et architecturale
Catherine COURTIAU, historienne de l'art
Mandat du
Département des constructions et des technologies de l’information DCTI
Genève, octobre 2007
Ancienne Ecole de chimie de Genève
30 octobre 2007 / Catherine Courtiau / 2
Table des matières
Préambule..............................................................................................................................3 L’Ecole de chimie à Genève – l’institution universitaire et le contexte historique de sa
création et de son extension...................................................................................................4 Henri Bourrit et Jacques Simmler, les architectes du premier bâtiment de chimie à Genève..7
Voyages d’études : repères – inspirations – influences.......................................................9 Rapport du 8 avril 1876 et conseils de Henri Bourrit après son voyage d’études .......11 Voyage d’études et projet de l’architecte Arnold Hoechel en 1959.............................13
Devis, adjudications et chantier de 1877 et 1878 .................................................................14 Terrassement, maçonnerie et pierre de taille (récapitulant les soumissions, cahier des
charges du 1er octobre 1877) .....................................................................................14 Sculptures (conventions du 18 octobre 1878) ............................................................17 Ciment (adjudication du 21 octobre 1878) .................................................................18 Menuiserie (cahier des charges du 25 octobre 1878) ................................................19
Les diverses interventions, réaffectations et transformations................................................22 Rapide usure et nombreux travaux incontournables .........................................................22
Plan de développement de l’Université en 1943...................................................................27 Projet non abouti de la construction d’une nouvelle Ecole de chimie ................................27 La surélévation de l’aile sud en 1943................................................................................27 Diverses transformations intérieures de 1946 à 1952 .......................................................30 Modifications de la grande cheminée en 1952/53 .............................................................30 Concours pour un nouveau bâtiment d’Ecole de chimie en 1961/62.................................32
Départ de l’Ecole de chimie au bord de l’Arve dès 1980 et travaux d’envergure dans les
années 1980 et 1990 ...........................................................................................................33 Aménagement de bibliothèques de la Faculté des lettres, puis de l’imprimerie .............33 Cage d’ascenseur pour handicapés ..............................................................................33 Suppression du petit amphithéâtre ................................................................................33 Grande réfection de la toiture et des façades, 1992-1998 .............................................34
Description ...........................................................................................................................35 Grand amphithéâtre...................................................................................................38 Petit amphithéâtre .....................................................................................................40
En guise de conclusion ........................................................................................................42
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Préambule
Le présent rapport sur l’ancienne Ecole de chimie a fait l’objet d’investigations et de
dépouillements de divers dossiers de documents écrits et iconographiques dispersés dans
les nombreuses archives genevoises. Le nombre d’interventions, de transformations, mais
surtout l’absence de la plupart des autorisations de construire (surélévation de l’aile sud,
transformation de la cheminée centrale, etc.), l’absence de rapports de chantier relatant les
travaux réellement réalisés n’ont pas rendu la tâche facile.
Les plans réunis – et il en manque aussi, malheureusement – ne présentent souvent qu’une
étape des projets en cours et ne constituent pas nécessairement des plans d’exécution.
Nous avons dû procéder, hélas, avec de modestes moyens à la reproduction des plans
anciens, les tarifs pratiqués aux Archives d’Etat de Genève AEG ne nous permettant pas
d’en faire des tirages de qualité.
Pour ne pas alourdir le texte du rapport, nous l’avons peu illustré et avons reproduit dans
deux annexes une sélection des nombreuses photographies anciennes et récentes, ainsi
que les plans historiques et actuels. Ces annexes permettent de deviner, entrevoir ou
constater les techniques employées et les matériaux utilisés au cours de certaines étapes
d’interventions, en particulier les photos illustrant les grands travaux effectués dans les
années 1990. Ces photos n’étaient malheureusement pas légendées et il a fallu procéder à
des déductions parfois incertaines.
La soussignée tient à remercier ici toutes les personnes qui ont aimablement contribué à
réaliser ce travail : mes mandants du DCTI, Bernard Zumthor, Sabine Nemec-Piguet et Yves
Peçon ; Claude Butty, du GAU Groupe Architectes, mandaté pour la restauration du
bâtiment ; Armand Zambrella, Michel Sandoz, documentation du DCTI ; Pierre Zillweger,
Direction des bâtiments du DCTI ; Martine Jaquet et Anne-Marie Viaccoz (DCTI) ; Véronique
Probst, archiviste aux AEG-Terrassière ; Chantal Renevey Fry, archiviste du DIP ;
Dominique Torrione-Vouilloz, archiviste de l’Université ; Bernadette Odoni, archiviste de
l’IAUG, Fonds Hoechel ; Lionel Breitmeyer du CIG ; Julien Menoud, architecte ; Pierre
Leprat, tailleur de pierre ; Michel Pelletier, professeur de chimie, Armand Brulhart, historien
de l’art ; Jean-Christophe Curtet, bibliothécaire du Département d’histoire de l’art.
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L’Ecole de chimie à Genève – l’institution universitaire et le contexte historique de sa création et de son extension
Commémoration de la fondation en 1559 du Collège et de l'Académie,
sous l'influence de Calvin1. (coll. privée)
La construction d’une Ecole de chimie à Genève fut décidée par le Conseil d’Etat en 1875,
sous le régime radical d’Antoine Carteret2, chef du Département de l’instruction publique, à
l’instigation notamment de Carl Vogt, recteur et conseiller national, de Jean-Charles
Galissard de Marignac, responsable de tout l’enseignement de la chimie à Genève, de son
gendre Emile Ador, professeur de chimie organique, de Denys Monnier, professeur de
chimie analytique3.
1 Jean Calvin (1509-1564), réformateur ; premier séjour à Genève de 1536 à 1538, puis dès 1541. 2 Antoine Carteret (1813-1889), chef du Département de l’instruction publique ; conseiller d’Etat de 1851 à 1855 et de 1870 à 1888. Ayant été favorable à la dissolution du Sonderbund, il s’acharna ensuite contre l’ultramontanisme, soit contre le pouvoir absolu du pape. 3 Carl Vogt (1817-1895). – Jean-Charles Galissard de Marignac (1817-1894). – Emile Ador (1845-1920). – Denys Monnier (1834-1898).
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En 1872, Carteret et Vogt venaient de réformer l’Instruction publique et de transformer
l’Académie en Université, à l’issue de l’édification du complexe universitaire aux Bastions4,
grand chantier qui fut suivi de celui de l’Ecole de médecine inaugurée le 26 octobre 18765.
Auparavant, les précurseurs de la chimie genevoise travaillaient dans leurs laboratoires
personnels, avant de s’installer, en 1818, dans l’ancien hôtel du Résident de France à la
Grand-Rue en Vieille-Ville. Puis en 1872, les laboratoires de chimie et de physique
emménagèrent dans les sous-sols du nouveau bâtiment de l’Université aux Bastions. Mais
les locaux s’avérèrent très vite trop exigus et en quantité insuffisante, en raison du nombre
toujours croissant des étudiants. De surcroît, les salles manquaient de lumière et de
ventilation et les gaz toxiques se répandaient dans les couloirs et escaliers au grand dam
des usagers. Il fallut donc remédier à cette situation précaire en prévoyant la construction
d’un nouveau bâtiment exclusivement destiné à la recherche et aux laboratoires de chimie,
qui fut inauguré le 22 octobre 18796.
Dans son rapport du 3 mars 18777, Antoine Carteret prenait, à juste titre, pour exemple les
laboratoires au système nouveau qui existaient en Allemagne depuis plusieurs années déjà,
où il était prévu comme condition indispensable que chaque étudiant ait, de sa place, « une
échappée du ciel, afin de pouvoir bien juger la couleur des précipités et des liqueurs ».
L’Allemagne était en effet à l’avant-garde des recherches en chimie et de son enseignement.
Comme nous le verrons, leurs laboratoires ou écoles polytechniques étaient installés dans
des édifices récents les plus modernes, parfaitement adaptés aux nombreuses et complexes
exigences de cette science.
4 Complexe construit par Jean Franel et Francis Gindroz en 1868-1872 (inauguré en 1873), d’après les plans qu’ils avaient conçus avec Joseph Collart. Ce dernier s’était retiré après avoir été appelé à faire partie du Conseil d’Etat. – Catherine Courtiau (en coll. pour les plans avec l’atelier d’architecture Face à Face, Genève), « Bibliothèque publique et universitaire (BPU), Rapport de recherche historique et architecturale », mandat du Département municipal de l’aménagement, des constructions et de la voirie, Conservation du patrimoine architectural de la Ville de Genève, décembre 2002. – Catherine Courtiau, « Université des Bastions Genève. Bâtiment central et aile Jura (anc. Muséum d’histoire naturelle). Etude historique et architecturale », mandat du DCTI, août 2007. 5 Construction en 1875/76 par Emile Reverdin, Charles Gampert et Antoine Gouy aux nos 20-22 de l’actuelle rue de l’Ecole-de-Médecine. – Marc Cramer, Jean Starobinski, Marc-A. Barblan, La Faculté de Médecine de Genève 1876-1976, Genève 1976. 6 Achille Benakis, Armand Buchs, Louis Devaud, Théodore Posternak, et al., Université de Genève. Centenaire de l’Ecole de Chimie 1879-1979, Genève 1979. 7 Mémorial du Grand Conseil, « Deuxième rapport du Conseil d’Etat sur la création d’un laboratoire pour l’étude la chimie », Genève, 3 mars 1877.
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Façade nord donnant sur le boulevard des Philosophes avec, en son centre, la grande cheminée en briques surmontée d’un campanile, peu après l’inauguration en 1879 (CIG P 1800, B. 136)
Le transfert des laboratoires de l’Université dans le nouveau bâtiment de l’Ecole de chimie,
construit au boulevard des Philosophes, eut lieu en 1879. Ces laboratoires y restèrent durant
un siècle, jusqu’à l’achèvement du bâtiment de Science II sur les rives de l’Arve, au no 30 du
quai Ernest-Ansermet8, à proximité de l’Ecole de médecine de 1876 et de l’Institut de
physique datant de 19529.
La plaque commémorant l’inauguration de l’Ecole de chimie le 22 octobre 1879, portant
également la date de la loi du 5 mai 1877 qui décréta la construction et l’aménagement d’un
édifice affecté spécifiquement à la science et à la recherche en chimie, se trouve aujourd’hui
dans le bâtiment de Sciences II, sur la paroi faisant face à l’entrée du grand hall central.
8 Construction par étapes de 1967 à 1979, par Charles, Eric et André Billaud, auteurs du projet ZENITH A. 9 Inauguration le 8 octobre 1952 de l’Institut de physique construit par Denis Honegger en 1948/49 au quai Ernest-Ansermet 22. Déménagement de l’Université des Bastions en 1951/52.
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Henri Bourrit et Jacques Simmler, les architectes du premier bâtiment de chimie à Genève
Le bâtiment de l’Ecole de chimie, construit en 1878/79 au boulevard des Philosophes par
Henri Bourrit (1841-1890)10 et Jacques Simmler (1841-1901)11, associés à Genève de 1869 à
1887, est presque contemporain de l’édification par les mêmes architectes de l’Ecole des
arts industriels, l’actuelle Ecole des arts décoratifs, réalisée en 1877/78 à proximité de la
gare de Cornavin. Ces deux chantiers se situent sur des tronçons de la ceinture urbaine, dite
ceinture fazyste, créée après la démolition des fortifications dès 1850.
Toutefois, parallèlement à ces chantiers de grande envergure pour Genève, Bourrit et
Simmler subirent une amère déconvenue. Ils furent écartés de la construction du Palais
fédéral de justice à Lausanne12, alors qu’ils avaient obtenu le 1er prix du concours. Le jury
estimait que les plans ne pouvaient être appliqués tels quels et l’un des architectes primés,
le Vaudois Benjamin Recordon13 (3e prix), fut chargé par la Municipalité de l’étude d’un
nouvel avant-projet en puisant dans les projets retenus.
Mais à Genève, Bourrit et Simmler eurent l’aubaine de pouvoir construire les deux
importantes écoles spécialisées, chantiers précédés de voyages d’études instructifs. En
effet, la décision du Conseil d’Etat genevois de créer en 1876 l’Ecole des arts industriels
fut suivie de longs débats sur la forme à donner à ce nouveau bâtiment. Les architectes
protagonistes de l’édifice se rendirent à plusieurs reprises à Paris pour y puiser l’inspiration.
Il ne fait aucun doute que l’extension du Louvre en 1852-1857 par Hector-Martin Lefuel
d’après les plans de Louis Visconti, tous deux anciens élèves des Beaux-Arts parisiens, allait
influencer les architectes notamment pour le rythme des façades sur rues, le traitement des
cheminées, des lucarnes ornementées et des dômes. D’autre part, l’utilisation de briques et
la structure métallique sur cour révèlent un emprunt à l’architecture industrielle.
Quant à l’Ecole de chimie, la rigueur du style néo-classique d’inspiration germanique la
distingue nettement de l’esprit éclectique parisien des Beaux-Arts affiché à l’Ecole des arts
industriels.
10 Henri Bourrit, *23 octobre 1841 à Cologny, †12 septembre 1890 à Cannes. Nécrologies : Schweizerische Bauzeitung, 22 mars 1890, vol. XVI, no 12, p. 75, et 27 septembre 1890, vol. XVI, no 13, pp. 83-84. – Isabelle Rucki, Dorothee Huber (éd.), Architektenlexikon der Schweiz 19./20. Jahrhundert, 1998, p. 78, notice Catherine Courtiau. 11 Jacques Simmler, *29 juillet 1841 à Zurich, †11 février 1901 à Zurich. Nécrologie : Schweizerische Bauzeitung, 16 février 1901, vol. XXXVII, p. 75. – Isabelle Rucki, Dorothee Huber (éd.), Architektenlexikon der Schweiz 19./20. Jahrhundert, 1998, p. 78, notice Catherine Courtiau. 12 Concours ouvert en juillet 1877, décision du jury en janvier 1878. – Bulletin de la Société vaudoise des ingénieurs et des architectes, mars 1879, no 1, p. 1. – Die Eisenbahn, 1879, vol. 10, pp. 31-34. 13 Benjamin Recordon, 1845-1938.
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E. Imer-Schneider, Notes et Croquis techniques sur Genève, 1re édition, Genève, 189214, pp. 46-47. – Les deux édifices scolaires de Bourrit et Simmler sont disposés en regard dans toutes les éditions de ce fascicule.
Cette diversité peut s’expliquer par la double formation du Genevois Henri Bourrit. Celui-ci
avait été l’élève de Gottfried Semper au Polytechnicum de Zurich entre 1858 et 1862, où il
avait obtenu son diplôme d’architecte, après avoir fait des études au Collège impérial
Bonaparte à Paris. Semper l’engagea ensuite dans son bureau où il rencontra le Zurichois
Jacques Simmler, dessinateur, qui avait aussi suivi des cours chez Semper et ainsi acquis
un grand savoir architectural. Tous deux furent envoyés à Cannes, puis revinrent à Genève
en 1869 pour y créer leur propre bureau d’architectes. Ils réalisèrent ensemble, jusqu’en
1887, d’importants édifices, comme l’église évangélique de Menton, le château du grand-duc
de Mecklenburg-Schwerin à Cannes, le château El Masr à Cologny, le château Sans-Souci à
Versoix et de nombreuses églises.
Lors de la conception de ces deux grandes écoles genevoises, Bourrit, ami de Viollet-le-Duc,
enseignait l’architecture à l’Académie de Lausanne et venait de traduire le remarquable
ouvrage de Edouard Guyer, Les hôtels modernes, paru à Paris en 1877. 14 Apparaissent comme éditeurs : E. Imer-Schneider, ingénieur-conseil, P. Piccard, ingénieur-constructeur, G. Autran, ingénieur des chemins de fer du Salève. Publication de 64 pages avec de nombreuses illustrations et publicités : Imprimerie Suisse, 6, rue du Commerce, Genève.
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Voyages d’études : repères – inspirations – influences
Parallèlement à l’élaboration de leur projet et plans destinés à la construction d’une nouvelle
Ecole de chimie à Genève, Henri Bourrit et le professeur de chimie analytique Denys
Monnier firent un voyage en 1876 pour étudier les laboratoires de chimie alors d’avant-
garde15. Ils y furent partout accueillis avec grand enthousiasme.
Henri Bourrit établit un tableau synoptique (voir ci-dessous) des plans de ces principaux
édifices, disposés à la même échelle que le bâtiment projeté à Genève, soit ceux de Bonn,
Pest, Munich (projet), Berlin, Vienne, Graz, Leipzig, Heidelberg, Aix-la-Chapelle (projet),
Dresde (polytechnicum inauguré le 4 novembre 1876).
Les bâtiments projetés ou réalisés dans les Etats allemands étaient donc à la base de la
réflexion des architectes de l’édifice genevois, Henri Bourrit et Jacques Simmler.
15 Rapport au Conseil d’Etat de la République et Canton de Genève concernant les édifices affectés à l’enseignement de la chimie en Allemagne, avec, en annexe, un Tableau synoptique des principaux laboratoires de Chimie. Rapport présenté par Henri Bourrit, architecte, Genève, 1876 (BPU, Br. 520).
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Dans son rapport au Conseil d’Etat publié en 1876, Henri Bourrit exprimait ainsi son vif
intérêt pour les « palais scientifiques » qu’il avait visités :
« C’est ici de remarquer que les Etats allemands rivalisent entre eux dans la création
et la dotation des établissements d’instruction publique et, dans un même Etat, cette
noble rivalité se manifeste entre les diverses universités et écoles polytechniques ; il
n’est pas jusqu’aux simples écoles industrielles où nous n’ayons trouvé, comme à
Chemnitz, en Saxe, des installations modèles et de précieuses instructions. […]
Chacun de ces palais scientifiques est largement traité, bien dégagé, entouré de cours
et de plantations qui en assurent l’aération. »
Pour les concepteurs d’écoles spécialisées, l’étude des récents laboratoires de chimie, avec
le concours d’éminents professeurs et donc praticiens, utilisateurs, devenait dès lors
impérative. Henri Bourrit, reprenant les propos de Hermann Kolbe, illustre professeur de
Leipzig, précisait avec grande sagesse :
« Construire aujourd’hui un nouveau laboratoire de Chimie, c’est assumer une grave
responsabilité, attendu qu’il s’agira nécessairement dans cette œuvre nouvelle, non
seulement de concilier dans la mesure du possible tous les mérites des laboratoires
existants, mais encore d’en éviter ou d’en atténuer les défauts. »16
C’est ainsi que lors du concours d’architecture en 1888 pour la construction de l’Ecole de
chimie et de physique à Lausanne (1891-1893), des laboratoires suisses et étrangers les
plus modernes de l’époque furent visités : Zurich (terminé en 1886), Munich, Stuttgart,
Francfort, Bonn, Ludwigshafen, Heidelberg, Strasbourg et Fribourg-en-Brisgau.17 Les
architectes, lauréats du concours, Louis Bezencenet et Alexandre Girardet de Lausanne,
furent conseillés pour la conception et l’aménagement par le professeur Heinrich Brunner.
Pendant le chantier, ils visitèrent notamment les « équipements de pointe » à Genève, dont
l’édifice était donc devenu une construction exemplaire, doté des installations les plus
perfectionnés !
16 Op. cit., Rapport au Conseil d’Etat…, 1876, p. 3. 17 Catherine Schmutz-Nicod, « Histoire et architecture de l’ancienne Ecole de chimie et de physique, place du Château », in Mémoire vive, pages d’histoire lausannoise, 2001, no 10, pp. 24-31.
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Rapport du 8 avril 1876 et conseils de Henri Bourrit après son voyage d’études Dans son rapport au Conseil d’Etat de 1876, Henri Bourrit énonçait d’importantes
découvertes, règles et leçons à suivre, données qu’il appliqua en grande partie à Genève.
Elles sont ici librement reprises et résumées :
- la séparation des auditoires des laboratoires proprement dits, à placer si possible à
des niveaux différents ; éviter, à l’instar de Dresde et de Bonn, de placer des
laboratoires aux étages ; placer l’auditoire ou amphithéâtre plutôt à l’étage
- dans un amphithéâtre de chimie, il faut entendre, mais surtout que de sa place,
chacun découvre librement la table d’expériences ; lorsqu’il y a deux amphithéâtres,
le plus petit sert plutôt à des répétitions et à des cours libres
- si les places doivent être nombreuses, on n’obtient pas la pente suffisante des
gradins dans la hauteur normale d’étage ; on est alors obligé ou de faire passer
l’auditoire au travers de deux étages ; il faut que le rayon visuel tendant du centre de
la table d’expériences passe par-dessus la tête de l’étudiant placé devant
- précaution : écarter le premier rang de la table d’expériences de l’auditoire d’une
distance telle que les élèves soient, sinon complètement, du moins le plus possible
hors de portée des explosions (à Aix-la-Chapelle, distance de 2,6 m)
- la table d’expériences doit occuper toute la largeur de la salle d’enseignement
- la paroi derrière la table d’expériences dans les amphithéâtres est occupée par
diverses installations utiles à l’enseignement : « chapelles » (hottes aspirantes)18,
fours, étagères à produits, mais l’essentiel, une spacieuse ouverture, d’ordinaire dans
l’axe de la salle et communiquant librement avec le local affecté à la préparation des
cours, sorte de passe-plat, faisant en même temps fonction de « chapelle », un
conduit le surmontant pour l’évacuation du gaz ; de part et d’autre, il est fermé par un
vitrage qui, du côté de la salle, est tantôt apparent, tantôt masqué par la planche
noire, selon que celle-ci est abaissée ou relevée ; des planches noires auxiliaires
sont souvent disposées de la même manière contre des « chapelles » latérales, par
exemple en pan coupé aux angles de la salle (comme à Leipzig)
- arrangements encore peu fréquents, mais judicieux (à Munich, à Aix-la-Chapelle) :
une hotte avec sa gaine d’évacuation recouvrant tout l’espace consacré à
l’enseignement ; hotte qui descend comme une sorte de rideau à 2 ou 3 mètres en
contrebas du plafond
- à l’intérieur de la hotte, une double rampe de gaz qui éclaire la table tout en laissant
dans l’ombre l’auditoire
18 On entend par « chapelles » les cages, surmontées d’une hotte avec cheminée d’évacuation, à l’intérieur desquelles on fait évaporer les substances qui répandent des vapeurs nuisibles.
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- lumière naturelle : une grande abondance de jour ; procurer aux locaux la plus
grande surface possible de fenêtres ; jours latéraux
- pour les laboratoires de grande hauteur avec fenêtres de part et d’autre
- vitrages en toiture (pour les auditoires, notamment)
- disposer les tables de travaux, ainsi que les « chapelles » et fourneaux, de telle sorte
que le jour soit parfaitement utilisé
- importance des « chapelles » dans un laboratoire, à adapter aux trumeaux entre les
fenêtres, où elles ont suffisamment de jour
- une mesure plus ou moins grande de confort, consistant essentiellement dans
l’alimentation d’eau et de gaz employée, puis aussi pour certains services, une
alimentation de vapeur
- disposer les canalisations de telle sorte qu’elles soient, dans tout leur parcours, sinon
visibles, au moins facilement accessibles
- créer des locaux obscurs, sans fenêtres, ou dont les jours peuvent se condamner
hermétiquement, requis pour certains usages, comme pour traiter des substances qui
craignent la lumière, le chlore par exemple, puis pour la spectroscopie et la
photométrie (à Dresde, simple niche circulaire, noircie intérieurement, de 1,7 m de
diamètre de vide ; à Strasbourg, sorte de guérite carrée faisant saillie dans le
laboratoire et mesurant 1,5 m)
- ventilation et chauffage des locaux ; à Leipzig, chaque « chapelle » est surmontée
d’un canal d’évacuation à la base duquel on allume un bec de gaz pour y déterminer
ou activer le tirage ; on y extrait aussi l’air des salles au moyen de gaines chauffées
par des becs de gaz ; c’est sans doute pour obvier en quelque mesure au conflit
entre la ventilation des salles et le tirage spécial des « chapelles » qu’au
polytechnicum de Munich on a ménagé des courants d’air provenant directement du
dehors dans les « chapelles »
- installation la plus remarquable est à Manchester, à recommander : le chauffage s’y
fait, comme à Leipzig, à la vapeur, un canal amenant dans les salles l’air nouveau
préalablement chauffé à la température convenable au contact des tuyaux. D’autre
part, l’air vicié des salles et les gaz de toutes les « chapelles » vont se réunir dans
une haute et spacieuse cheminée affectée uniquement à cet usage. L’action de cette
cheminée est étendue jusqu’aux tables mêmes des élèves qui, ayant chacun à sa
place un orifice d’aspiration, peuvent manipuler sans aucun inconvénient, ni pour
eux-mêmes, ni pour l’atmosphère de la salle, le H2S et toutes autres substances
nauséabondes.
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Finalement, Henri Bourrit et Jacques Simmler s’inspirèrent en particulier de l’Ecole de Bonn
(Chemisches Institut der Universität Bonn), érigée à l’instigation du professeur de chimie
August Wilhelm von Hofmann en 1864 et 1867 par les architectes August Dieckhoff et Jacob
Neumann, une réduction du plan avec transept inséré dans un grand rectangle.
Voyage d’études et projet de l’architecte Arnold Hoechel en 1959 Dans le même esprit de recherche d’une perfection conceptuelle et constructive que celui
des architectes de l’Ecole de chimie à Genève, l’architecte Arnold Hoechel19, professeur à
l’Ecole d’architecture de Genève, responsable de divers travaux de restauration du
désormais vétuste bâtiment et de l’aménagement de salles et laboratoires, effectua lui aussi,
quatre-vingts ans après Henri Bourrit, en novembre 1959, un voyage d’études en Hollande et
en Allemagne.
En effet, parallèlement aux travaux d’entretien, de restaurations et de transformations de
l’ancien bâtiment, il était prévu de construire un nouvel édifice destiné à recevoir l’Ecole de
chimie à Genève, un édifice adapté aux nouvelles exigences en perpétuelle évolution de
cette science. Arnold Hoechel visita et étudia l’Ecole polytechnique d’Aix-la-Chapelle
(construite dès 1952), Eindhoven (Pays-Bas, projet d’agrandissement), Münster (Westphalie,
projet d’une nouvelle école, concours ouvert en automne 1959), Munich (concours en 1953,
locaux terminés début 1960)20.
19 Arnold Hoechel (1889-1974). 20 Archives IAUG, fonds Arnold Hoechel, 205.02.002, HOE 23.
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Devis, adjudications et chantier de 1877 et 1878
Le devis établi pour la construction de la première école de chimie à Genève prévoyait une
dépense de fr. 645'000.- pour le bâtiment, fr. 213'000.- pour le chauffage, la ventilation, les
aménagements et le mobilier, fr. 35'000.- pour les aménagements extérieurs, fr. 24'000.-
pour les appareils et ustensiles. Enfin, après approbation des plans et devis des architectes
Henri Bourrit et Jacques Simmler, la loi du 5 mai 1877 décréta la construction et
l’ameublement d’une Ecole de chimie au boulevard des Philosophes, accordant un crédit de
fr. 967'000 francs. Les travaux furent aussitôt entamés, les fondations achevées en
décembre 1877 et la première pierre posée à Pâques 1878.
Le bâtiment coûta finalement fr. 985'732.- à l’Etat21.
Terrassement, maçonnerie et pierre de taille (récapitulant les soumissions, cahier des charges du 1er octobre 1877)
Le 1er octobre 1877, le cahier des charges pour les travaux de terrassement, maçonnerie et
pierre de taille22 fut établi, récapitulant en outre les soumissions à Olivet Frères, Saulnier,
Simond, Barretta, Schaefer, Koch&Jaquet, Vez, Riondel, Bouet, Rouge Marie.
Il y était cependant précisé que « la construction de la cheminée d’usine à partir des
fondations ferait l’objet d’une adjudication spéciale23, ainsi que les canalisations et les
dallages en ciment ».
Voici un large extrait de ce cahier des charges :
« L’adjudication des travaux étant tranchée le 28 septembre 1877, […] les
maçonneries devront être sorties de terre le 20 novembre prochain. Le bâtiment sera
prêt à recevoir les charpentes dans toutes ses parties le 1er juillet suivant. Tous autres
travaux de maçonnerie, tant extérieurs qu’intérieurs, seront faits aussitôt après, soit à
première réquisition. »
Qualité et emploi des matériaux – Description des ouvrages : « Le mortier sera fait
d’un tiers de chaux et de deux tiers de sable bien lavé et bien pur ; le tout gâché avec
soin en pâte ferme. […] Tous les mortiers seront faits avec de la chaux hydraulique de
Virieu. Pour tous travaux pendant lesquels des épuisements d’eau seraient
nécessaires, il ne pourra être employé que de la chaux lourde de Virieu. – Pour la pose
de la pierre de taille, pour la maçonnerie de brique et pour les plâtrissages, on
n’emploiera dans le mortier que du sable fin. […] Le béton, préparé au fur et à mesure
21 Archives DIP – Secrétariat général, 1985 va 5.3.21 (24 novembre 1904). 22 République et canton de Genève. Cahier des charges pour les travaux de terrassement, maçonnerie et pierre de taille de l’Ecole de Chimie, boulevard des Philosophes, 1er octobre 1877. 23 Nous n’avons hélas pas retrouvé l’adjudication pour la cheminée à partir de ses fondations.
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des besoins, sera composé de deux parties de chaux hydraulique éteinte, en poudre,
trois parties de sable bien pur et cinq parties de gravier roulé. La chaux sera d’abord
broyée à part avec le sable. Le béton sera damé avec soin. – Les murs seront faits en
moellons de la Balme de bel échantillon représentant de bons lits. Ils seront posés à
bain de mortier, liés, bien garnis et serrés avec le marteau. La maçonnerie sera pleine,
jointoyée, crépie sur tous les parements apparents ou non ; les parements seront
parfaitement droits, d’aplomb, et les crépissages dressés à la règle. La maçonnerie
sera élevée par arasements généraux, les retranches ne seront faites qu’en moellons
de gros échantillons. […] La maçonnerie en moellons essemillés sera exécutée en
pierres de la Balme de bel échantillon avec parements bien dressés et par assise
réglées et avec arêtes ciselées. Les lits de joints seront parfaitement à l’équerre. Le
cimentage sera fait en ciment de la Porte-de-France passé au fer. – Les arcs de
décharge sur les portes et dans les murs de refend feront l’épaisseur de mur ; ceux sur
les fenêtres auront la largeur de l’embrasure. Tous ces arcs seront en pierre du
Fenalet et auront au moins 0,3 de hauteur à la clef. – Les briques employées dans les
maçonneries seront sonores, bien cuites et sans grains de chaux. Elles seront
imprégnées d’eau au moment de leur emploi. – Les canaux rectangulaires de
cheminées auront une section de 0,55 sur 0,28 de vide, toutes les faces en briques de
plat ; ils seront plâtris intérieurement. Les canaux cylindriques auront 0,25 de diamètre
et seront complètement garnis en briques. Les coulisses pour calorifères, fils
électriques, eau, évaporation et ventilation seront ménagées dans la maçonnerie ; une
face sera fermée en plots de champ. Les dites coulisses seront plâtries intérieurement
et auront le vide coté aux plans. – Le tuf sera sec et dur. Il pourra être employé pour
parpaings, voûtes ou autres usages. – Les pierres de taille seront homogènes, sans
fils ni moies, parfaitement pleines, et ayant toutes les qualités requises pour donner
après la taille un parement régulier. Elles seront dans chaque espèce d’une couleur
uniforme. La maçonnerie de pierre de taille (granits, roches, grès et molasses) sera
exécutée conformément aux panneaux et détails d’appareil qui seront remis à
l’entrepreneur durant le cours de l’exécution. […] Les lits et joints des pierres seront
retournés d’équerre et soigneusement dressés, les lits dans toute leur étendue, les
joints suivant des plans prolongés jusqu’à 0,2 au moins du parement. Les parements
seront parfaitement taillés, sans flâches, ni écornures, ni mastic, ni pièces rapportées.
Les moulures seront exactement conformes aux panneaux donnés par l’architecte, et
taillées d’une manière correcte en relevant toutes les arêtes au trait de ciseau. Les
pierres seront en général posées sur leur lit de carrière et présenteront des lits et joints
aussi petits que possible (0,006 à 0,007 au plus). – Les granits proviendront des
carrières de Monthey (Valais). Ils seront posés sans amaigrissements, écornures, ni
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pièces rapportées. Ils seront de couleur uniforme et devront être taillés à la gradine
avec arêtes vives. Les marches seront à boudin et filet ou unies, selon les indications.
Toutes les marches et les paliers devront être jointoyés soigneusement et posés en
pente pour l’écoulement de l’eau. – Les différentes roches proviendront des carrières
indiquées par la série de prix et selon le choix qui sera fait par l’Administration. Les
pierres de taille seront appareillées en crosses, lancets, boutisses et cadettes, suivant
les plans fournis par les architectes. En général, la taille sera celle dite de carrière
(moyenne boucharde) pour les surfaces unies aussi bien que pour les moulures,
refends, etc., excepté pour les parties où l’architecte demandera une taille faite sur le
chantier (fine boucharde) ; ces deux genres de taille seront payés selon la série. – Les
grès seront tirés de bancs non sujets à se déliter ; ils seront d’un grain fin et serré. Ces
grès proviendront des carrières d’Aïze (Bonneville) ; ils seront de la meilleure qualité,
parfaitement sains, sans aucuns délits et de nuance égale. Ils seront employés pour
dallages. Les dallages pour paliers, vestibules, etc., auront 0,05 à 0,06 d’épaisseur.
Les joints seront aussi petits que possible et coulés au ciment. Les grès de Verrières
seront d’un grain fin et serré, et pourront être employés pour escaliers, socles, bases,
chapiteaux, tablettes, couvertes, cordons, corniches, etc. – La molasse de Berne
proviendra des carrières d’Ostermundigen. Elle sera non friable, d’un grain moyen,
d’une teinte jaune-verdâtre uniforme, sans aucune veine argileuse et sans délits. La
taille sera soigneusement exécutée, bien unie et polie, soit frottée. Les parties
moulurées seront ou taillées sur le chantier avant la pose, ou épannelées pour être
moulurées après la pose, au moment du ravalement des façades, selon les ordres
donnés à cet égard par les architectes. […] La molasse de Lausanne sera employée
pour liaison dans les murs, piliers intérieurs, etc. chaque molasse de liaison devra
avoir au moins 0,3 sur 0,3 d’équarrissage, et l’entrepreneur n’en mettra qu’aux endroits
où cela sera très nécessaire. Elles seront taillées à la pique. – Le plâtrissage extérieur
sera fait d’un mélange de mortier de chaux blutée de Virieu et de sablon du lac avec
de la chaux fusée comme la chaux grasse, purgée de tout grain et préparée quelques
semaines à l’avance. Ce mélange sera employé immédiatement. Sur ce plâtrissage,
imprégné de deux couches d’eau, il sera passé trois couches de peinture en détrempe
de la teinte indiquée par l’architecte. Cette peinture sera faite d’une pâte de chaux
maigre et de chaux grasse en égale proportion, laquelle pâte sera délayée avec de
l’huile dans la proportion d’une seille et demie de pâte pour deux litres d’huile. Le tout
sera étendu d’eau et coloré au moyen de couleurs minérales telles que de l’ocre jaune,
de la terre de Vérone, du noir, etc. »
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Sculptures (conventions du 18 octobre 1878) Le 18 octobre 1878, des conventions furent signées entre le DTP, représenté par le bureau
d’architectes Bourrit & Simmler, et les sculpteurs E. Botinelli, P. Gilli et Michel Bohrhauer.24
Ces deux derniers étaient déjà adjudicataires de la sculpture à l’Ecole des arts industriels.
Botinelli était tenu de mettre les modèles à disposition de Gilli et Bohrhauer tout le temps
qu’ils leur étaient nécessaires et aussitôt qu’ils en auraient besoin pour ne pas entraver la
marche des travaux. Ces sculpteurs avaient été recommandés par Jules Samlson25. Les
travaux de Gilli et Bohrhauer consistaient à réaliser six chapiteaux des pilastres du 1er étage,
quatre motifs des œils-de-bœuf, quatre clefs des grandes fenêtres cintrées du 1er étage.26
(Photo Pierre Zillweger, DCTI, Direction des bâtiments, après restauration, vers 1996)
24 AEG TP 1878/409. 25 Salmson, Jean-Jules (*18.7.1823 Paris, †7.5.1902 Coupvray, Seine-et-Marne F), Suédois d'origine, sculpteur et médailleur. Etudes à l'Ecole des Beaux-Arts de Paris. Elève d'Etienne Ramey, d'Augustin Dumont et de Toussaint. Il participa à deux reprises au Grand Prix de Rome. Il débuta au Salon de 1859. Médaille de deuxième classe en 1863 et 1867; chevalier de la Légion d'honneur la même année. Il fut appelé en 1876 à Genève comme premier directeur de la nouvelle Ecole des arts industriels. Garnier lui avait demandé une statue de Haendel pour l'Opéra de Paris. A peine arrivé à Genève, il réalisa la statue de la Musique sur le perron du Grand Théâtre, et, dans le grand foyer, la cheminée décorative monumentale en marbre rouge richement ornée des figures en bronze des Génies et du buste d'Apollon, exécutés par l'Ecole des arts industriels. 26 Cf. Annexe photos, pp. 4, 5.
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Bourrit et Simmler précisaient dans leur lettre du 18 octobre 1878 à Alexandre Gavard,
conseiller d’Etat chargé du DTP27 :
« Nous avons opéré la répartition de la sculpture de l’Ecole de chimie entre M. Botinelli
au montant de 1976 fr. et MM. Gilli et Bohrhauer 1835 fr., ensemble 3811 fr., soit un
total un peu inférieur à chacune des soumissions séparément. 3) Comme cela a eu
lieu pour l’Ecole des Arts industriels, nous avons demandé des prix pour travaux en
ciment à l’Ecole de chimie, soit à la maison Boissonnas et Stattelmann, soit à l’Usine
de l’Union, en y ajoutant toutefois MM. Olivet Frères28, à cause des difficultés et
complications résultant de l’enchevêtrement tout à fait particulier entre les canaux d’air
maçonnés et les canaux d’écoulement en ciment. L’Etat serait exposé à l’inconvénient
de ne pas savoir à qui s’en prendre ultérieurement en cas de rupture ou fuite
quelconque des canaux qui se croisent et s’enchevêtrent à l’infini dans le sol, si vous
ne trouviez moyen de remettre le travail dans une seule et même main. En outre, les
passages des canaux en travers des murs du bâtiment ayant été naturellement
ménagés en construisant les raccords nombreux qui en résultent seraient la source de
conflits et faux frais. Vous jugerez donc, comme nous, qu’il faut, en ce cas spécial,
aviser à attribuer ce travail à MM. Olivet pour peu que ces prix le permettent. »
Ciment (adjudication du 21 octobre 1878) Le 21 octobre 187829, les travaux de dallages, de soubassements, de canaux en ciment
furent ainsi adjugés à Olivet Frères, selon leur devis :
« Dallages en ciment de 0,1 d’épaisseur unis à la truelle (4,45 fr./m2) ; dallage
bouchardé sans joint d’appareil (4,60 fr./m2) ; dallage bouchardé avec joints (4,95
fr./m2) ; soubassements de 0,03 d’épaisseur ayant 0,40 de hauteur et au-dessous (le
mètre linéaire 2,50) ; soubassement au-dessus de 0,40 de hauteur (5,85 fr./m2) ; enduit
sur murs repiqués (5 fr./m2) ; canaux en ciment de forme ronde de 0,6/0,5 (le mètre
linéaire fr. 10,60) ; diverses autres sections ; canaux cylindriques, etc. Les
adjudicateurs s’engageant expressément à mettre à la tête des susdits ouvrages de
ciment un chef parfaitement expérimenté dans cette spécialité et agréé par l’architecte
qui pourra en tout temps le faire remplacer […]. »
27 AEG TP 1878/410. 28 Jean Marteau, Entreprise Olivet 1850-1938. Société anonyme Victor Olivet, Genève, Société d’entreprise Victor Olivet, Gaillard, Genève 1938. Maison fondée en 1850 par Denarié, associé vers 1853 avec Alexis Olivet. Raisons sociales successives : 1871, Alexis Olivet, 1872-1883, Olivet Frères, dont Alexis ; puis 1883-1904, Etienne Olivet ; 1904-1905, Ernest Olivet & ses Fils ; 1906-1914, Olivet Frères ; 1915-1920, Victor Olivet ; 1921, Société anonyme Victor Olivet. 29 AEG TP 1878/410.
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Menuiserie (cahier des charges du 25 octobre 1878) Le cahier des charges pour les travaux de menuiserie fut établi le 25 octobre 187830 et pour
lesquels Frédéric Ody et Alph. Cartier étaient soumissionnaires. Nous reproduisons ci-
dessous de larges passages de ce texte :
« Les bois employés seront de la meilleure qualité dans l’espèce indiquée par le
devis… sans nœud ni autre défaut…
Le sapin sera résineux. Il proviendra des forêts du canton de Vaud ou d’autres localités
acceptées par l’architecte, à l’exclusion des bois de Savoie.
Les bois durs seront fins et assortis. Les travaux en bois dur prévus au devis seront en
chêne ou en noyer. …
Les menuiseries en sapin ne seront pas peintes. »
Bois de noyer ou de chêne « si l’architecte le préfère pour certaines parties » : porte
d’entrée principale, suivant plan no 12631, à deux vantaux, à châssis ouvrants et à
imposte vitrée ouvrante, ferrée sur cadre en bois, corniche d’attique et encadrement de
l’enseigne en marbre ; portes vitrées extérieures, à deux vantaux, avec ou sans
imposte vitrée ouvrante, ferrées sur cadres en bois, profils et épaisseurs de bois
semblables à ceux du modèle de fenêtre déposé au chantier, sauf la battue des
vantaux à feuillure ; fenêtres à la française sans imposte, et soupiraux s’ouvrant à
bascule, profils, épaisseurs des bois, pièce d’appui comme au modèle ; fenêtres à la
française à imposte, ouvrante, pareilles au modèle ; fenêtres (plein cintre), avec cadre
carré formant panneaux dans les angles, suivant plan no 127 ; seuils pour portes
intérieures à un vantail ; seuils pour portes à deux vantaux ; sièges de cabinet avec
dossier à assemblage ; main-courante, profil ovale pour escalier tournant.
Bois de sapin : portes intérieures à un vantail, bâtis de 0,038, à quatre panneau, à
recouvrement de 0,027, plan no 128, soit toutes les portes des corridors donnant accès
dans les salles, à l’exception de celles des auditoires32 et de l’appartement (le
recouvrement sera du côté du corridor) ; portes intérieures à deux vantaux, à l’attique
ou non, mêmes conditions, plan no 128 ; portes intérieures à un vantail, à moulures de
deux côtés, pour communication entre les salles et pour l’appartement ; portes
intérieures à deux vantaux, à moulures de deux côtés ; portes intérieures à deux
vantaux, au vestibule du 1er étage, suivant plan no 129 ; boiserie à assemblage à un
parement bois, de 0,027, pour embrasures, faux cadres, contre-cœurs et
soubassement de même hauteur que les contre-cœurs, appliquée seulement sur les 30 AEG TP 1878/426 à 428. 31 En l’état actuel de la recherche, nous n’avons pas retrouvé les divers plans auxquels ce cahier des charges fait référence. 32 Pour désigner ces auditoires, le terme d’amphithéâtre a été privilégié dans le texte du présent rapport, tel qu’il figure sur la porte d’entrée.
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parties de murs restant apparentes entre les meubles dans les locaux nos 46, 47, 55,
57, 59, 66, 71, 72, 76, 79, 80, 85, 92, 93, 99, 102, 103 ; plinthes, cordons des
soubassement ci-dessus ; boiserie de hauteur dans les deux auditoires, suivant plans
nos 130, 131, 132, 134 ; plinthes et corniches du soubassement des auditoires ; faces
d’armoires et côtés en boiserie à assemblage en bois de 0,027 ; aisseliers bruts,
bandes de porte-manteaux pour recevoir des crochets en fer. »
L’inauguration solennelle de l’Ecole de chimie, le premier bâtiment construit à Genève pour
être destiné à la recherche et à l’enseignement de la chimie, conçu selon le modèle des
établissements allemands les plus modernes, eut lieu le 22 octobre 1879.
Table d’expériences du grand amphithéâtre avec « chapelle » ménagée dans le mur et protégée par des portes vitrées (cf. à ce sujet les plans et photos, en particulier dans ce rapport, p. 38). Cours donné par le chimiste allemand de Francfort-sur-le-Main (1841-1927), Carl Graebe, professeur à Genève de 1878 à 1906 (tiré du livre du centenaire de l’Ecole de chimie, Genève 1979, p. 54)
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Porte d’entrée au grand amphithéâtre au 1er étage (photo Yves Peçon, DCTI, septembre 1996)
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Les diverses interventions, réaffectations et transformations
Rapide usure et nombreux travaux incontournables
Mais très vite, hélas, le grand nombre d’étudiants, leurs travaux constants et les énormes
dégagements et écoulements d’acides divers rongèrent tout ce qui était métal, de sorte que
des réfections générales des canalisations, tuyauteries, plomberies, robinetteries, vannes,
chauffage, matériel contre incendie devinrent urgentes, tout comme l’intégration de nouvelles
installations dans les laboratoires. Ces travaux, fort coûteux, grevèrent lourdement le crédit
ordinaire d’entretien. En plus de ces interventions régulières, il y eut d’importantes
réparations relatées dans les rapports administratifs du Conseil d’Etat qui parlait, en 1899
déjà, « d’un bâtiment fatigué, car très utilisé ».
• 1901, installation, pour M. le professeur Duparc, d’une table de combustion pour les
expériences dangereuses. Cette table, de grandes dimensions, a coûté assez cher du fait de
sa construction spéciale en fer et béton sur hourdis, le tout recouvert et entouré de catelles
fines.
• 1902, le tuyautage en plomb et la robinetterie des tables de laboratoires ont été remis en
état pendant les vacances d’été, des laboratoires et « chapelles », ou hottes aspirantes,
réparées, d’autres rénovées, les cheminées ramonées, ce qui n’avait jamais été fait depuis
la construction. L’installation du chauffage a été visitée et entièrement restaurée.
• 1903, réfection des peintures et aménagement du laboratoire du professeur Duparc. A la
demande de l’Inspecteur des chaudières, il a été établi un échappement à air libre à la
machinerie.
• 1904, réfection des peintures dans plusieurs salles du professeur Graebe. Les réparations
de plomberie et des installations nouvelles dans les laboratoires occasionnent des frais qui
grèvent fortement le crédit ordinaire d’entretien.
• 1905, l’appareil à distiller l’eau, qui datait de la construction, a été remplacé pendant les
vacances par un appareil perfectionné, à double distillation, pouvant fournir 500 litres d’eau
par jour. La base en molasse de la grande cheminée, fortement rongée par les infiltrations
d’eau, a été ravalée et passée au silicate. Une gouttière métallique a été posée dans le but
d’éviter de nouvelles détériorations. Nombreuses réparations et réfection de la peinture
d’une salle au sous-sol, occupée par le professeur Duparc.
• 1906, installation d’une turbine pour la production du courant continu. Augmentation du
nombre de places (40 environ) du grand amphithéâtre.
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• 1908, remise en état du générateur (tubes tartrés et en mauvais état de la chaudière ont
été changés), réparation qui n’avait pas été exécutée depuis plus de 10 ans. Importantes
réparations de plomberie.
• 1909, établissement d’un câble électrique d’une section suffisante pour pouvoir, dans
l’avenir, fournir l’éclairage dans tout le bâtiment. Il ne sert actuellement que pour la lanterne
à projections du petit amphithéâtre, installation demandée à plusieurs reprises par les
professeurs.
• 1910, remise en état des laboratoires des professeurs Duparc et Pictet.
• 1911, installation de l’eau à haute pression dans les laboratoires du professeur Duparc et la
réfection des peintures des laboratoires de Pictet et Chavanne. Comme les années
précédentes, il a été effectué d’importantes réparations de plomberie. La réfection de la
canalisation d’eau, incendie, s’imposera à bref délai.
• 1912, le DTP a consacré une somme importante à la réfection des laboratoires. A part les
réparations habituelles de plomberie, il a fait procéder à l’installation de W.-C. au sous-sol, à
la vérification et remise en état complète du matériel contre incendie.
• 1913, pendant les vacances d’été, tous les vestibules, corridors, dégagements des 1er et 2e
étages ont été nettoyés et repeints ainsi que quelques salles et laboratoires. La ventilation
des laboratoires, laissant à désirer, il a été procédé à des essais à poursuivre en 1914 et à
une épreuve de la petite chaudière, qui ne donne plus satisfaction et qui devra être changée.
• 1914, le Rapport administratif du Conseil d’Etat énonçait comme suit la situation précaire
du bâtiment :
« Pendant les vacances d’été, il a été procédé aux réparations habituelles de
plomberie, serrurerie, etc., plusieurs laboratoires ayant un besoin urgent de
réparations, les peintures ont été refaites. Le laboratoire d’optique, continuellement
menacé d’inondation par la présence de colonnes d’eau, a dû être installé à nouveau
dans un local mieux approprié ; il en a été de même du laboratoire d’électrolyse de M.
le professeur Duparc. Par son arrêté du 14 juillet 1914, le Conseil d’Etat a autorisé
l’achat d’une nouvelle chaudière et de ventilateurs. La grosse chaudière date de la
construction du bâtiment et ne pouvait plus répondre au service qui lui était demandé ;
en effet, elle avait à fournir la vapeur pour le chauffage de tout le bâtiment, pour les
appareils à eau distillée, pour la machine du grand ventilateur ainsi que pour la
production de l’eau chaude des laboratoires. Il a été constaté l’insuffisance notable de
cette chaudière et la crainte d’un accident en pleine marche arrêtant ainsi
complètement les travaux de l’Ecole a prévalu en faveur de l’acquisition d’une
deuxième chaudière spécialement affectée au service d’eau chaude installé dans tout
le bâtiment. Ce mode de faire a le gros avantage de décharger beaucoup la chaudière
principale et d’en supprimer totalement la marche en été, procurant ainsi une notable
Ancienne Ecole de chimie de Genève
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économie de combustible tout en rendant le service beaucoup plus pratique. Cette
installation, ainsi que le remplacement de la commande du grand ventilateur par le
système électrique a constitué à l’Ecole de Chimie une heureuse innovation qui a déjà
donné d’excellents résultats. »
• 1915, réfection complète des couloirs du rez-de-chaussée inférieur, dont l’état laissait fort à
désirer, installation partielle de la lumière électrique et établissement d’un nouvel appareil à
eau distillée alimenté par la chaudière à eau chaude placée en 1914.
• 1916, installation de la lumière électrique dans les laboratoires de chimie du professeur
Duparc, dans les corridors et les vestibules. L’appareil à eau distillée a été changé et donne
d’excellents résultats.
• 1917, les canalisations de fer et plomb continuent à exiger une surveillance très suivie et
de coûteuses réparations. Il a été procédé à la transformation des W.-C. du rez-de-chaussée
qui ne répondaient plus aux conditions de propreté et d’hygiène d’un tel établissement.
D’autre part, vu la pénurie du gaz, le système d’éclairage du bâtiment a été modifié et la
lumière électrique installée dans tous les locaux où elle n’existait pas encore ; il résulte de ce
fait une économie notable du gaz d’éclairage.
• 1919, toujours et encore important entretien de plomberie. Aménagement d’un laboratoire
de détermination des minéraux.
• 1922, agrandissement de la bibliothèque de l’école. La chaudière à vapeur, qui donnait
depuis quelques années certaines craintes, a dû être complètement révisée. Les travaux
exécutés à Uni Bastions et à l’Ecole de chimie ont fait l’objet de la loi du 5 juillet 1922.
• 1923, des réparations ont été effectuées pendant les vacances dans divers locaux,
notamment au laboratoire de travaux pratiques de minéralogie. La modification du système
de distribution d’eau, qui avait été entreprise il y avait quelques années, a été « poursuivie
dans une autre partie du bâtiment ».
• 1924, le chauffage du petit auditoire, dont l’appareillage laissait fort à désirer, a été
remplacé, l’appartement du concierge réparé, l’installation de l’eau à pression directe
effectuée dans les laboratoires où elle n’existait pas encore, notamment au laboratoire no 22
et annexe.
• 1925, le programme de l’installation de l’eau à haute pression a été continué pour les
laboratoires nos 17, 19 et 25.
• 1926, poursuite de l’entretien des tuyautages et canalisations, soumis à une usure rapide.
• 1927, le laboratoire no 10 a été entièrement repeint, les « chapelles » améliorées et une
nouvelle « salle pour machines » installée au sous-sol.
• 1928, l’entretien des installations donne chaque année lieu à des travaux très importants ;
les canalisations de plomb et de fer, les « chapelles », les éviers doivent être révisés
sérieusement. Les laboratoires nos 10 et 12 ont été entièrement repeints, le local des
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chaudières remis en état. La question de la ventilation et du chauffage est à l’étude ; une
expertise des installations a démontré qu’une modification très importante du système devait
être entreprise dans un avenir très rapproché.
• 1929, la loi du 26 juin ouvrant au Conseil d’Etat un crédit de 52'500 francs pour des travaux
de transformation de chauffage et de ventilation dans divers bâtiments cantonaux, dont 5500
francs pour d’assez importantes améliorations à effectuer au système de ventilation à l’Ecole
de chimie. Il s’agit spécialement de supprimer le danger occasionné par la mauvaise
évacuation des gaz de l’hydrogène sulfuré. Un nouveau ventilateur spécial a permis de
supprimer ces inconvénients. D’autre part, le grand ventilateur central a été changé. Il reste
encore à exécuter certains travaux de modification dont l’étude se poursuit.
• 1930, les laboratoires 8 et 31 ont été complètement peints à neuf. D’autre part,
d’importantes modifications ont été apportées à la distribution électrique ainsi qu’au réseau
de gaines de ventilation.
• 1931, le petit amphithéâtre, dont l’urgence de la remise en état des rideaux, a été
transformé et restauré. « Nous allons recevoir ces jours l’épidiascope que nous devons à la
libéralité de la Société académique. Or une bonne utilisation de ce bel instrument est
conditionnée par l’état des rideaux. »33 Ce bâtiment demande toujours une surveillance
attentive des importantes installations spéciales, mais le nombre des locaux réservés aux
laboratoires est insuffisant. De surcroît, ils ne répondent plus aux exigences actuelles.
• 1932, à part l’entretien important et nécessaire de cet immeuble, les chaudières ont été
équipées pour le chauffage au mazout. Cette installation a réalisé une économie sensible sur
la main-d’œuvre puisqu’elle a permis de supprimer le poste de mécanicien de l’Ecole.
• 1933, aménagement moderne des laboratoires de chimie organique et inorganique, travaux
prévus par l’arrêté législatif du 4 mars 1933 (fr. 57'000.-). En outre, les dispositions prises
après le départ du professeur Duparc ont rendu nécessaires certaines modifications de
locaux dans le même bâtiment.
• 1934, transformations diverses dans les laboratoires (crédit spécial voté le 20 octobre).
• 1935, liste datée du 23 novembre34 énumérant les travaux que l’Université désirerait voir
figurer dans le programme de 1936 pour l’Ecole de chimie :
1) Une étude des améliorations à apporter aux installations de ventilation, d’aération et
de chauffage a abouti à la présentation d’un rapport accompagné de devis. Ces pièces
sont en possession du DTP. Travaux pouvant être exécutés par étapes.
2) Sur le programme de réfections et réparations des salles proposé pour l’année
1935, il reste à faire les travaux suivants : entresol de l’Ecole de chimie, salles 27 et 31
(magasin central), peinture et blanchiment ; salle 21 (local servant de dépôt et de 33 Archives DIP – Secrétariat général, 1985 va 5.3.297. 34 Archives DIP – Secrétariat général, 1985 va 5.3.367.
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magasin spécial pour le laboratoire TTE), peinture et blanchiment ; sous-sol de l’Ecole
de chimie, salle 16 (salle des machines du laboratoire TTE), peinture et blanchiment ;
salle 16 bis (petit local du laboratoire IOPA), peinture et blanchiment ; en outre peuvent
être envisagés à l’entresol de l’Ecole de chimie, salle 17, Laboratoire d’électrochimie,
peinture, blanchiment, réfection des hottes, modification du chauffage, amenée du
courant électrique sur les places, autrement dit, travaux semblables à ceux qui ont été
faits dans toutes les autres salles de l’Ecole de chimie. Salle 18, raccords et
rhabillages de peinture.
• 1938, installation d’un nouveau laboratoire de microchimie. Transformation d’une partie de
l’ancien chauffage.
Laboratoire de chimie technique et théorique au rez-de-chaussée supérieur, à droite de l’entrée, côté boulevard des Philosophes, avec « chapelle » ou hotte aspirante au fond (CIG, 38, photo Auguste Dubois)
Ancienne Ecole de chimie de Genève
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Plan de développement de l’Université en 1943
Projet non abouti de la construction d’une nouvelle Ecole de chimie
Lors de la séance du sénat le 16 février 1943, le recteur Eugène Bujard présenta son plan
de développement de l’Université de Genève. Son projet fut accepté et transmis à l’Etat
comme constituant « une vue d’ensemble très utile pour les modifications et
agrandissements à apporter à l’Université durant les années à venir ». Il prévoyait35 :
- le regroupement des Sciences dites morales et des services administratifs aux
Bastions
- la reconstruction de l’Ecole de Médecine et des autres instituts de cette faculté dans
le voisinage de l’Hôpital cantonal
- le rapprochement des instituts de la Faculté des sciences, tous sortis du bâtiment des
Bastions, de ceux qui existent déjà au dehors. L’Ecole de chimie serait reconstruite et
se situerait près du nouvel Institut de physique36 et aurait une bibliothèque commune
avec cet institut.
Il fallut cependant attendre plusieurs décennies pour que ce projet se concrétise avec la
construction en 1967-1979 du bâtiment de Sciences II37.
La surélévation de l’aile sud en 1943
Comme nous l’avons vu, le bâtiment avait subi depuis sa construction de perpétuels travaux
et transformations, d’aménagement de nouvelles salles de travail, de laboratoires. Le
manque de laboratoires s’était manifesté très tôt et pour parer à ce problème, il fut décidé de
surélever l’aile sud.
En 192638, il avait déjà été prévu de créer de nouvelles salles de laboratoires par
rehaussement de l’aile centrale, d’aménager un grand laboratoire de quarante places, une
petite salle à huit places ainsi qu’un bureau.
En l’état actuel de la recherche, aucune autorisation de construire n’a été trouvée. Mais le
rapport de 1992, réalisé par le bureau technique A.R. Spycher39, présente la surélévation
datée de 1943 de l’aile sud dans la coupe B-B reproduite ci-dessous.
35 Louis Devaud, « D’une Ecole de Chimie centenaire… à Sciences II », in Université de Genève. Centenaire de l’Ecole de Chimie 1879-1979, Genève 1979, p. 93. 36 Concernant l’Institut de physique, alors au stade de projet, cf. note op. cit. 37 Concernant Sciences II, cf. note op. cit. 38 Paul-E. Martin, Histoire de l’Université de Genève. L’Université de 1914 à 1956, Genève 1958. – Histoire de l’Université de Genève. Annexes. Historique des facultés et des instituts 1914-1956, Genève 1959.
Ancienne Ecole de chimie de Genève
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Cette surélévation a de toute évidence été construite sous la direction de l’architecte Arnold
Hoechel, car le plan 2583, conservé dans le Fonds Hoechel des Archives IAUG, porte son
tampon, le titre « Ecole de Chimie. Surélévation. Plan du 1er étage » et la date du 8 mai
194340. Les rapports administratifs du Conseil d’Etat mentionnent d’ailleurs Hoechel comme
architecte des diverses interventions à l’Ecole de chimie dans les années 1940 et 1950.
39 A.R. Spycher, ing. civil AGI, « Possibilités de charge des dalles d’étage de l’ancienne Ecole de chimie pour sa réaffection en bibliothèque de la Faculté des lettres », rapport réalisé pour le Bureau des bâtiments du DTP, mai 1992, révisé en octobre 1992 (DCTI, dossier Peçon, Ecole de chimie). 40 Archives IAUG, fonds Arnold Hoechel, dossier juré, classeur fédéral noir no 61/2, cote 205.02.002/1, boîte HOE 23.
Ancienne Ecole de chimie de Genève
30 octobre 2007 / Catherine Courtiau / 29
Le laboratoire de chimie analytique étant destiné à de nombreux étudiants, toute l’aile sud de
l’Ecole de chimie (rez-de-chaussée et sous-sol) fut attribuée aux grands laboratoires
didactiques, tandis que le sous-sol de la partie sud du bâtiment principal longitudinal était
réservé aux laboratoires spéciaux et à la minéralogie.
Les nouveaux locaux de l’aile sud ainsi surélevée furent mis en service en automne 1943.
Ancienne Ecole de chimie de Genève
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Diverses transformations intérieures de 1946 à 1952
En 1945, le Conseil d’Etat accorda un crédit extraordinaire de 15'000 francs pour des
travaux urgents à effectuer à l’Ecole de chimie41. Dans son rapport administratif de 1946, il fit
état de transformations diverses confiées à l’architecte John Torcapel, sans en préciser la
nature. Puis en avril 1947, le conseiller d’Etat en charge du DIP, Albert Picot, confirma au
recteur de l’Université, Paul-E. Martin, que les travaux prévus à l’Ecole de chimie se feraient
par étapes et que la première était en cours. Les détails et précisions manquent, mais il
s’agissait notamment d’aménager de nouveaux laboratoires par l’architecte Arnold Hoechel,
travaux exécutés jusqu’en 1952. L’année suivante, il aménagea un laboratoire spécialisé
pour l’étude des corps radioactifs dans l’ancien magasin de verrerie.
Modifications de la grande cheminée en 1952/53
Dans son rapport administratif de l’année 1953, le Conseil d’Etat précisait que la grande
cheminée était complètement fissurée et qu’elle avait dû être « transformée après un
important travail exécuté par une entreprise spécialisée ». Comme pour l’adjudication des
travaux de la cheminée d’origine, le nom de l’entreprise n’a pas été trouvé en l’état actuel
des recherches. C’est sans doute à cette époque qu’elle fut tronquée et que le campanile en
ferronnerie disparut, comme en témoignent les photographies historiques. L’autorisation de
construire fait également défaut.
Bourrit&Simmler, détail, mars 1881 (cf. Annexe plans) 41 AEG, Tables décennales du Registre du Conseil, RC rép. 32, fo 1388.
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En haut, photo peu après la construction en 1879 (BDG Cl. 29), en bas en 2007 (photo C. Courtiau)
Ancienne Ecole de chimie de Genève
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Concours pour un nouveau bâtiment d’Ecole de chimie en 1961/62
Malgré ces réaménagements, la surélévation de l’aile sud, l’Ecole de chimie ne répondait
plus, depuis longtemps, aux exigences de l’enseignement et de la recherche. La pénurie de
locaux, le manque de commodité et de sécurité suffisantes imposaient donc, parallèlement
aux travaux de réfection, de prévoir la construction d’un nouveau bâtiment moderne pour
recevoir l’Ecole de chimie. Reprenant ainsi le projet de 1943, un concours d’architecture fut
lancé en 1961/62 et Arnold Hoechel42 fut nommé membre du jury. Ce bâtiment devait être
érigé près de l’Institut de physique, sur une parcelle achetée par l’Etat de Genève à
l’Hospice général, située au bord de l’Arve. Le bâtiment de Sciences II fut enfin construit par
étapes de 1967 à 1979 par Charles, Eric et André Billaud43.
Mais en attendant la réalisation de ce vaste projet, l’ancien bâtiment de l’Ecole de chimie
imposait encore des travaux d’entretien et de restauration d’envergure. Selon les rapports
administratifs du Conseil d’Etat, tous les W.-C. et deux laboratoires furent rénovés en 1963,
les groupes principaux de ventilateurs, attaqués par les vapeurs d’acides, remis en état et un
laboratoire d’électrophorèse fut créé. L’année suivante, trois laboratoires firent l’objet de
réfections. Le laboratoire H2S fut agrandi et les réseaux de ventilation restaurés.
Laboratoire de chimie analytique, salle d’analyses quantitatives au rez-de-chaussée inférieur ou 1er sous-sol de l’aile sud, aujourd’hui occupé par la bibliothèque d’histoire de l’art (tiré du livre sur le centenaire de l’Ecole de chimie, Genève, 1979, p. 20)
42 Cf. ci-dessus, chapitre consacré à son voyage en Allemagne et aux Pays-Bas en 1959. 43 Archives IAUG, fonds Arnold Hoechel, dossier juré, classeur fédéral noir no 61/1-4, cote 205.02.002/1, boîte HOE 23.
Ancienne Ecole de chimie de Genève
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Départ de l’Ecole de chimie au bord de l’Arve dès 1980 et travaux d’envergure dans les années 1980 et 1990
L’Ecole de chimie quitta le bâtiment du boulevard des Philosophes peu après avoir célébré
son 100e anniversaire, le 5 octobre 1979 au Parc des Eaux-Vives, en présence d’André
Chavanne, délégué du Conseil d’Etat.44
Aménagement de bibliothèques de la Faculté des lettres, puis de l’imprimerie Ce changement d’affectation du bâtiment, entraîna évidemment de nombreux travaux de
transformation et de restauration successifs. En 1981, la bibliothèque du Département de
l’allemand s’installa à l’étage de l’aile sud. Au rez-de-chaussée inférieur ou 1er sous-sol de
cette même aile, la bibliothèque du Département d’histoire de l’art fut aménagée sur deux
niveaux45. Les planchers furent renforcés par le bureau Dentan. Au même niveau, mais à
l’extrémité sud-ouest, l’atelier d’impression de l’Université vint s’installer en automne 1986,
ce qui imposa également le renforcement du sol, soit du plafond du 2e sous-sol. Le rapport
de 1992 réalisé par l’ingénieur A.R. Spycher46 énonce toutes les données constructives et
techniques de l’édifice « …parmi les premiers bâtiments genevois dont les planchers
principaux ont été réalisés avec des poutrelles métalliques, remplaçant les traditionnelles
solives de bois. Le remplissage entre poutrelles est en béton de mâchefer. »
Cage d’ascenseur pour handicapés Le 17 février 1983, l’autorisation47 fut délivrée pour la création d’un ascenseur de 630 kg par
la direction régionale Genève de l’entreprise Schindler + Schlieren SA. Il fut encastré dans la
cour intérieure ouest, à l’angle des façades sud et ouest, avec trois arrêts du même côté, un
local de machines en haut et une cabine respectant des dimensions à l’usage de
handicapés. Son installation fut achevée en 198748
Suppression du petit amphithéâtre Spycher explique49 que « la suppression de deux laboratoires superposés, avec escalier et
plancher intermédiaire, a augmenté la surface du petit amphithéâtre. » Il s’agit peut-être des
travaux effectués selon les plans d’Arnold Hoechel de 195650. « Les meubles commandés,
44 AEG, Tables décennales du Registre du Conseil, RC rép. sans cote, fo 2350. 45 Cf. op.cit. A.R. Spycher, « Possibilités de charge des dalles… »,1992. 46 Cf. op cit. A.R. Spycher, « Possibilités de charge des dalles… », 1992. 47 DCTI, microfilm, D 78'699, avec plan et coupes du 29 mars 1982. 48 Rapport administratif du Conseil d’Etat. 49 Cf. op cit. A.R. Spycher, « Possibilités de charge des dalles… », 1992. 50 Cf. Annexe plans.
Ancienne Ecole de chimie de Genève
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en remplacement des gradins d’origine, vétustes et inadaptables à l’agrandissement,
nécessitent une fixation au sol. […] Les anciens gradins en bois avaient été construits sur la
dalle brute. […] Le renforcement nécessaire a été exécuté en 1989 par une solidarisation
des poutrelles existantes et de la chape béton rapportée. »
Grande réfection de la toiture et des façades, 1992-1998 Le 27 novembre 1991, le Service entretien et transformations du DTP déposa une requête51
pour la réfection de la toiture, des façades avec la reconstitution de l’architecture d’origine en
plusieurs étapes. L’autorisation fut accordée le 16 mars 1992 à Ambrosetti SA générale
d’entreprises, Genève, et le chantier ouvert le 8 juin suivant. Enfin, le permis d’occuper fut
délivré le 1er septembre 1998. Les travaux s’échelonnèrent jusqu’à la fin de la décennie.
A défaut de rapports écrits détaillés, les nombreuses photographies52 du chantier nous
permettent de suivre les travaux effectués aux façades et aux toitures :
- sur le bâtiment longeant le boulevard des Philosophes : à l’origine, ardoises à
cornières, pose au clou + ferblanterie en zinc ; remplacées par des ardoises
rectangulaires, pose au crochet, ferblanterie en cuivre étamé
- sur l’aile sud : à l’origine, sans doute en ardoises rectangulaires, puis en tuiles
mécaniques avec sous-couverture
- sur les pans des toitures à la Mansart des deux petites ailes adossées au bâtiment
principal longitudinal : à l’origine, ardoises en écaille, pose au clou, ferblanterie en
zinc ; remplacées par des ardoises en écaille, pose au clou, ferblanterie en cuivre
étamé
Ces travaux furent exécutés par les entreprises Macullo SA Toitures et Ferblanterie et
Sanitoit SA, les pierres de taille restaurées par Pierre Leprat, en collaboration avec Allegra,
Mello, Perrin SA53. En 1992/93, des travaux furent entrepris dans les salles de lecture54, la
statique et le rapport sur les charges des dalles assurés par le bureau A.R. Spycher55. Puis,
en 1996, Eric Favre-Bulle de l’atelier Saint-Dismas, fut mandaté pour procéder aux sondages
pour conserver et restaurer les diverses peintures intérieures56, puisqu’il avait été prévu de
tout blanchir et de recouvrir les peintures d’origine, il est vrai, passablement noircies.
51 DCTI, microfilm, D 91'523. 52 Albums aimablement mis à notre disposition par Pierre Zillweger, responsable du chantier, collaborateur de la Direction des bâtiments de l’Etat. – Photographies d’Yves Peçon, DCTI. – Cf. ci-dessous, Annexe photos. 53 Je remercie l’architecte Julien Menoud et le tailleur de pierres Pierre Leprat de ces informations. 54 Rapport administratif du Conseil d’Etat 55 Cf. op. cit., A.R. Spycher, « Possibilité de charge des dalles… », 1992. 56 Atelier Saint-Dismas, Restauration d’œuvres d’art, « Rapport de sondages et essais de faisabilités d’intervention. Estimation du coût des travaux de conservation et de restauration. Ancienne Ecole de chimie », Genève, 6 septembre 1996.
Ancienne Ecole de chimie de Genève
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Description
L’ancienne Ecole de chimie, aux caractéristiques « semperiennes », inspirées de
l’architecture Renaissance avec son grand soubassement et le portail monumental surmonté
d’un fronton, est implantée sur une parcelle formant un triangle en forte pente. Elle est
composée de plusieurs corps de bâtiments : le bâtiment principal longeant le boulevard des
Philosophes, les deux petits bâtiments adossés perpendiculairement au premier et reliés à
angle droit à l’aile sud pour former deux cours intérieures. Un ascenseur fut installé dans la
cour intérieure ouest en 1983. Ce complexe de bâtiments est dominé en son centre par la
grande cheminée en briques, autrefois couronnée d’un campanile, puis tronquée en 1952/53
probablement.
La rampe longeant la façade orientale de l’aile sud mène au sous-sol qui pourrait être
considéré comme un rez-de-chaussée inférieur, puisque l’imposant soubassement est en
grande partie ajouré de fenêtres, sauf à l’est, en raison de la déclivité du terrain.
Dans cette rampe, le bâtiment no 259 adossé au terre-plein de la pelouse à l’est, figurant sur
les cadastres après 1895, était désigné sur le plan du sous-sol de 192357 comme étant un
dépôt de chimie analytique. Sa toiture est encore visible sur les photos des années 1990,
mais a disparu depuis lors58. Le bâtiment est cadastré comme transformateur ; il en est de
même du petit pavillon, à l’angle de la rue du Petit-Salève et du boulevard de la Tour,
cadastré le 27 mai 191459.
Les divers corps de bâtiments présentent des hauteurs diverses. Seul le bâtiment
longitudinal possède deux niveaux sur le grand soubassement ajouré. Son corps central,
57 Cf. Annexe plans, p. 15. 58 Cf. Annexe photos, pp. 6, 12, 18. 59 Informations aimablement fournies par Martine Jaquet, DCTI. Le bâtiment no 259 ne figure pas sur le cadastre Dufour.
Ancienne Ecole de chimie de Genève
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avec le portail d’entrée, est plus élevé, le deuxième niveau nécessitant une hauteur de
plafond plus importante pour recevoir les deux amphithéâtres. Le petit amphithéâtre, situé
dans son aile ouest, a été dépourvu de ses gradins dès 1968, après avoir perdu sa fonction
d’origine. L’aile sud, autrefois d’un niveau sur le soubassement, fut surélevée en 1943.
La semi-rotonde à deux niveaux, communément appelée le cul-de-four, dépourvue de
fenêtres et adossée à l’extrémité de l’aile sud, servait à l’origine de pièces destinées à traiter
des substances craignant la lumière, le chlore par exemple, puis aux travaux de
spectroscopie et de photométrie. Elles pouvaient et devaient être hermétiquement fermées
par des portes. Elles furent ensuite utilisées comme « bureaux » par les assistants et servent
aujourd’hui de dépôts. Henri Bourrit avait fait la description de ces locaux obscurs dans son
rapport de 1876 et précisait : « A Dresde, on a annexé à chaque Laboratoire une simple
niche circulaire, noircie intérieurement, de 1,7 m de diamètre de vide. A Strasbourg, on ne
dispose que d’une sorte de guérite carrée. »60
Il serait vain de vouloir faire une description détaillée de l’intérieur, celui-ci ayant été
considérablement modifié depuis l’origine de la construction. Lorsque ce complexe était
encore affecté à l’enseignement de la chimie, de nombreux laboratoires avaient déjà été
transformés ou créés. Dès le départ de l’école à partir de 1980, il subit de nouvelles
interventions qui ont profondément dénaturé les espaces affectés à sa fonction première, à
l’exception du hall d’entrée, des escaliers et du hall central à l’étage, du grand amphithéâtre,
des couloirs et escaliers latéraux. Les gaines de ventilation ou d’évacuation de l’air vicié qui
menaient à la grande cheminée centrale ont été obturées. Des nombreuses « chapelles » ou
hottes aspirantes, il n’en subsiste qu’une, à présent murée.
Le parcours intérieur est labyrinthique, un vrai dédale, rempli de surprises ! Depuis l’entrée
principale située au boulevard des Philosophes, un assez large escalier central mène au
couloir longitudinal de l’étage, pavé de mosaïques, quelque peu endommagées. Dans le hall
d’entrée, une porte en bois aux vitrages biseautés s’ouvre, à gauche, sur l’ancienne loge du
concierge elle-même située légèrement en contrebas. A droite de ce hall, une rampe
d’escalier droit conduit au rez-de-chaussée inférieur ou 1er sous-sol (ajouré).
A l’étage, en haut des premières marches depuis l’entrée, le couloir longitudinal s’ouvre, à
ses extrémités, sur les escaliers latéraux, ménagés dans les petites ailes perpendiculaires.
Ils desservent tous les niveaux. Au haut de la première rampe d’escalier, au centre du
couloir, se trouve un tableau d’affichage au cadre en bois, depuis peu dépourvu de son
horloge centrale61. De là, à droite, parallèlement aux premières larges marches, un escalier
d’une seule volée, avec un palier intermédiaire et une seconde montée, donne sur le hall
central, richement ornementé, situé au-dessus de la première volée de marches de l’entrée. 60 Cf. op. cit., Henri Bourrit, Rapport au Conseil d’Etat…, 1876, p. 21, et résumé ci-dessus. 61 Cf. photos p. 43.
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Le plafond de cette cage d’escalier et du hall supérieur, à la fois relativement modeste et
complexe, les parois et les colonnes peintes sur du plâtre, les portes en bois avec leurs
tympans qui agrémentent l’espace ne laissent pas indifférent. Le tout est hélas peu respecté
et mal entretenu !
Me référant au rapport de l’atelier Saint-Dismas de 199662, « les faux marbres peints du hall
des amphithéâtres sont d’origine. Ils n’ont pas reçu de surpeint, à l’exception des bases et
d’une petite partie des colonnes. […] Les inscriptions des dessus de portes sont d’origine :
trompe-l’œil peint pour imiter une incision en gris clair et foncé, sur un fond évoquant un
marbre de teinte jaune clair. »
Certains éléments constructifs63, caractéristiques de la fonction première de l’Ecole de
chimie, sont encore visibles comme en témoignent les illustrations reproduites ci-dessous :
les oculi ménagés dans les plafonds des deux amphithéâtres, aujourd’hui obturés, les
espaces alloués aux « chapelles » à l’arrière de la table d’expériences. La table
d’expériences du grand amphithéâtre (il en était de même dans le petit amphithéâtre comme
le montre la coupe) est surmontée d’un pan vitré incliné, lui-même ajourée par une verrière
zénithale en toiture. Un système de rideau permettant d’obscurcir l’espace est toujours en
place, mais guère plus utilisable. Deux rampes d’escalier incurvées conduisent encore aux
gradins supérieurs du grand amphithéâtre.64
Ancienne « chapelle » à présent murée, donnant sur le boulevard, en 2007
62 Cf. op. cit. Atelier Saint-Dismas, « Rapport de sondages… », 1996, p. 4. 63 Cf. ci-dessus les divers cahiers des charges et conventions de 1877 et 1878. 64 Cf. le rapport de Bourrit du 8 avril 1976 et le résumé ci-dessus. Cf. aussi Annexe photos, pp. 19-21.
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Grand amphithéâtre
Détail de la coupe longitudinale de Bourrit & Simmler de 1881 et photos de l’oculus du plafond, visible sur la coupe, mais à présent obturé dans le grand amphithéâtre et dans les combles. Il en est de même de l’ancienne ouverture dans le plafond du petit amphithéâtre (cf. ci-jointes, Annexes plans et photos)
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A l’origine, systèmes d’ouverture en pan, au-dessus de la table d’expériences des deux amphithéâtres. Ici encore présents dans le grand amphithéâtre, avec les éléments de manipulation d’ouverture des rideaux obscurcissant les baies vitrées en pan donnant dans les combles. En toiture, une verrière permettait de laisser pénétrer la lumière zénithale jusque sur la table d’expériences (photos C. Courtiau, 2007).
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Petit amphithéâtre
Coupe de 1881 et oculus du plafond du petit amphithéâtre et l’utilisation actuelle des locaux. Sur la photo à droite, la cage d’ascenseur visible au travers de la baie vitrée (photos C. Courtiau, 2007)
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En guise de conclusion
Bien qu’inscrite dans le périmètre protégé de la Vieille-Ville, l’ancienne Ecole de chimie n’a
pas bénéficié d’une mesure de classement préconisée dans les années 1980.
Ce complexe fut construit pour assurer l’enseignement et la recherche en chimie. Il a été
conçu dans une structure architecturale et aménagé à l’époque avec les moyens et données
les plus récentes. Comme les grandes écoles de chimie, en particulier en Allemagne, il a été
étudié et pensé par des architectes en quête d’inventivité et de perfectionnement technique,
en étroite collaboration avec les professeurs de chimie. Mais très vite, la structure fut
dépassée par les besoins toujours croissants et des technologies en perpétuelle évolution.
Sa réaffectation quelque peu chaotique, le manque d’entretien et de respect des lieux ont
considérablement altéré ses structures et espaces. Il est indéniable que la suppression de la
conciergerie a été une grave erreur, ayant ainsi contribué à la détérioration du bâtiment.
Une importante campagne de restauration, en particulier de l’intérieur, s’impose, afin de
réhabiliter cet intéressant complexe, ses espaces et ses décors.
Plafond du hall et porte d’entrée au grand amphithéâtre dans le hall à l’étage (photos C. Courtiau, 2007)
Ancienne Ecole de chimie de Genève
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Le panneau d’affichage au cadre de bois, au haut de la volée du grand escalier. Conformément aux sondages datés 1996 par Eric Favre-Bulle de l’Atelier Saint-Dismas :
- en 1996 avec horloge, les boiseries et paroi surpeintes d’un vert foncé (photo Y. Peçon) - en 2007 sans horloge, les boiseries décapées et la paroi avec sa couleur d’origine beige clair
(photo C. Courtiau) Hélas, un des nombreux exemples d’irrespect de l’édifice, autant d’objets incongrus qui jalonnent les espaces et qui lui sont parfaitement indignes !
ANNEXES
PHOTOS
Ancienne Ecole de chimie, Genève
Campagne photographique réalisée par Pierre Zillweger, avant, pendant et après les grands
travaux des années 1990 (DCTI, Direction des bâtiments).....................................................4 Vues aériennes avant et après les travaux des années 1990...............................................10 Photos extérieures de 1991et intérieures de septembre 1996 (Yves Peçon, DCTI) .............11 Photos septembre 2007 (Catherine Courtiau) ......................................................................16
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Ecole de chimie, façade nord donnant sur le boulevard des Philosophes (en haut : CIG P 1800, 4003, B.136 ; en bas : BDG Cl. 29)
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Façade du boulevard des Philosophes, 21 juin 1971 (CIG VG 29-7, photo Roland Kallmann)
Ecole de chimie vue du sud-ouest, 1974 (CIG VG 61-2, photo Roland Kallmann)
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Campagne photographique réalisée par Pierre Zillweger, avant, pendant et après les grands travaux des années 1990 (DCTI, Direction des bâtiments)
Porte d’entrée après restauration ; en dessous, les armes de Genève avant et après restauration
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Extérieur de la porte d’entrée démontée et gonds à l’intérieur après restauration
Chapiteau remonté après dépose et restauration ; diverses clefs après restauration
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Aile ouest et aile est avec toiture du dépôt dans le rampe longeant l’aile sud
Façade ouest de l’aile sud
Fenêtres en toiture à la Mansart sur la face sud de l’aile est et fronton de l’entrée principale
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Aile ouest, oculus, vue par-dessus la cour intérieure ouest
En bas, à gauche diverses sortes de couvertures (tuiles, ardoises, zinc), et cage d’ascenseur de la cour ouest
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Base de la grande cheminée dans les combles
Sur les pans de la toiture à la Mansart, ardoises en écaille, avant et après
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Anciennes ardoises et pose des nouvelles
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Vues aériennes avant et après les travaux des années 1990
Vues aériennes en direction du sud. En haut photo Brutsch&Brutsch avant travaux des toitures des années 1990.
En bas, orthophoto actuelle du DCTI après travaux.
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Photos extérieures de 1991et intérieures de septembre 1996 (Yves Peçon, DCTI)
Façade nord sur le boulevard des Philosophes
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De gauche à droite et de haut en bas : façades sud-ouest et sud de l’aile ouest – façade ouest de l’aile sud – descente le long de la façade est de l’aile sud, avec dépôt – façade est de l’aile sud
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Cage d’escalier et hall principal à l’étage
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Hall et couloir longitudinal à l’étage, avec son sol en mosaïques, colonnades et …affichages et entreposage «sauvages»…
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Photos septembre 2007 (Catherine Courtiau)
Façade nord donnant sur le boulevard des Philosophes
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Angle aile ouest et aile sud – « cul-de-four » de l’aile sud – façade sud de l’aile ouest
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A gauche, rampe longeant l’aile sud, sans le dépôt (cf. photos Zillweger, p. 6, Peçon p. 12) – façade est
Fenêtres des toits à la Mansart côté sud, à gauche sur l’aile ouest, à droite sur l’aile est avec lambrequins
Une des fenêtres dotées d’un lambrequin en tôle, surmontée d’une clef non ornementée (cf. photos précédentes)
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Vue sur les baies vitrées du grand amphithéâtre, côté sud, depuis l’ancien appartement du concierge, à droite, au dernier étage de l’aile sud Les escaliers latéraux qui mènent aux gradins supérieurs du grand amphithéâtre, avec belle volée incurvée de la rampe en bois (en réalité de même couleur !)
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Le grand amphithéâtre, son plafond avec oculus obturé (le même existe dans l’ancien petit amphithéâtre)
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Baies vitrées en pan, au fond du grand amphithéâtre, au-dessus de la table d’expériences – l’ancien système de manipulation des rideaux dans les combles – l’arrière des derniers gradins avec trous d’aération
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Escaliers de l’aile ouest à gauche et ceux de l’aile est à droite
Dans l’entrée principale, porte latérale donnant accès à l’ancien office, et sol en mosaïque à l’étage
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Hall à l’étage, jouxtant la volée droite du grand escalier, et dessus-de-porte donnant accès à la salle de lecture
ANNEXES
PLANS
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Plans de 1878-1881, pour la plupart signés Bourrit & Simmler (AEG Travaux BB 17/55).......3 Divers plans (1923, 1933, 1935, 1943, 1956) du Fonds Hoechel (Archives IAUG)...............17 Relevés de Henry Minner et Ernest Martin, décembre 1944.................................................22 (Archives DIP – Secrétariat général, 1985 va 5.3.515) .........................................................22 Relevés et projet de Philippe Renaud, architecte, 2003 (DCTI, Service des bâtiments) .......24 Relevés GAU Groupe architectes UNI, novembre 2007 .......................................................33
3
Plans de 1878-1881, pour la plupart signés Bourrit & Simmler (AEG Travaux BB 17/55)
Plan du 1er étage, Bourrit & Simmler, 6 mai 1878
14
Elévation façade ouest, Bourrit & Simmler, mars 1881
Coupe façade ouest et élévation façade ouest de l’aile sud, Bourrit & Simmler, mars 1881
17
Divers plans (1923, 1933, 1935, 1943, 1956) du Fonds Hoechel (Archives IAUG)
En haut : plan du sous-sol, DTP, architecte cantonal, mai 1923 En bas : plan du rez-de-chaussée supérieur, DTP, architecte cantonal, 30 janvier 1933
21
Sur la page précédente, coupe d’un laboratoire et salle de réunion et détails d’une « chapelle », sans date ni
signature [1956 ?]. – Ci-dessous, plan d’un laboratoire dans le petit amphithéâtre, 11 mai 1956
22
Relevés de Henry Minner et Ernest Martin, décembre 1944
(Archives DIP – Secrétariat général, 1985 va 5.3.515)
Sous-sol