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travailleurs engagent une action générale contre l'exploitation capi- taliste et l'état bourgeois. M. Van Acker, publiquement, se place du côté des exploiteurs et de la police. Si le cas de ce Monsieur est le plus flagrant, celui de Major, secrétaire général de la F.G.T.B., de Léo CoUard, président du P.S.B., et des autres parlementaires < socia- listes », n'est guère meilleur : s'ils ont évité de faire, à l'instar de Van Acker, des déclarations fracassantes, ils n'en ont pas moins adopté une ligne de conduite analogue. On l'a vu, le président du P.S.B. a adressé, en pleine g'rève, un mémorandum au roi, manifestant ainsi sans équivoque son désir de s'en remettre au monarque du soin de régler le conflit survenu entre le capital et le travail ; pouvait-il un instant douter que l'arbitrage royal s'exercerait aux dépens des ouvriers ? L'action générale, « la lutte nationale unique à direction centralisée, autrement dit la lutte des classes, est une lutte politique >, écrivaient, à Bruxelles même, en 1847, Marx et Engels dans le Manifeste du Parti Communiste. Les chefs socialistes en sont bien d'accord ! Seulement, pour eux, l'objectif politique de la lutte des classes n'est autre que d'amener le pouvoir royal, le pouvoir de la bourgeoisie, à concéder quelques maroquins aux dirigeants du P.S.B. Occuper les strapontins ministériels, quel honneur ! Les mineurs, du Borinage et leurs familles, angoissés par un avenir incertain, les fonctionnaires excédés par les mesures antisociales incluses dans la loi unique, les travailleurs intime- ment persuadés de la volonté du capital et de son état de leur faire payer, et à eux exclusivement, les frais nécessités par la modernisation de l'industrie belge, se sont engagés dans la grève générale. Les gré- vistes se tournèrent alors vers leurs dirigeants, leur montrant la voie : ils voulaient marcher sur Bruxelles, c'est-à-dire livrer assaut au pou- voir du capital. Mais les dirigeants préféraient, une fois encore, être conviés à la table des « grands » de ce monde. Ils ont refusé d'écouter la voix qui partait d'en bas. A nouveau, comme le chef du parti socia- liste français, Guy Mollet, comme le dirigeant du Labour Party, Gaits- kell, les chefs socialistes belges ont préféré se coucher devant le capital et contribuer à leur façon au « maintien de l'ordre » ! L'attitude du parti communiste de Belgique, pour être en apparence plus équivoque, n'en a pas moins été dictée par sa volonté de maintenir l'action dans les voies de la démocratie bourgeoise. En Belgique, le P.C., minoritaire, appelait à la grève générale ; en France, le P.C., organisation majori- taire de la classe ouvrière, a condamné avec la plus extrême violence la grève générale en 1953, en 1955, en 1958. Mais l'un et l'autre parti» communistes n'oublient, ni en Belgique, ni en France, d'indiquer aux travailleurs que leur lutte de classe ne doit pas sortir du cadre da parlementarisme bourgeois. L'essence de la démocratie bourgeoise est de « décider périodique- ment, pour un certain nombre d'années, quel membre de la classe dirigeante (i) foulera aux pieds et écrasera le peuple au parlement », écrivait Marx. L'expérience historique a vérifié complètement cet -^ÏTI^^Jourd'hui, il faut ajouter: duel membre de l'appareil • des parti» ouvriers... -58 H •enseignement. La majorité parlementaire du Front républicain a investi M. Guy Mollet, en janvier 1956, pour faire la paix en Algérie. Le président « socialiste » du conseil des ministres, bénéficiant du vote unanime des députés du P.C.F., a demandé et obtenu, le 12 mars 1956, lès pouvoirs spéciaux qui ont inauguré la guerre totale, sous la direction de Massu, Salan et autres généraux réactionnaires. Aucun doute n'est permis. Pour peu que l'occasion s'y prête, M . Spaak illustrera, à l'imi- tation de son collègue français, la tactique efficace de l'utilisation, chère à M. Khrouchtchev, des voies parlementaires pour réaliser le socialisme. ANDRÉ RENARD DANS LA GRÈVE GÉNÉRALE Le lô décembre i960, au comité national de la F.G.T.B., André Renard déposait une résolution proposant le principe de la grève générale illimitée, objectif final d'une tactique prévoyant comme étapes successives des débrayages régionaux, une grève générale de 24 heures et un référendum à organiser dans toutes les entreprises. La résolution Renard recueillit 475.823 mandats contre 496.487 et 53.000 abstentions. Ce vote indiquait avec précision le niveau de combativité de la classe ouvrière belge. Il ne faut pas oublier que les participants au Comité national élargi appartiennent, dans une large mesure, à l'appareil de la F.G.T.B. La faible majorité obtenue par l'aile droite démontrait que, derrière l'aile gauche dirigée par Renard, s'était regroupée l'immense majorité des travailleurs. Car toute représentation, à fortiori dans une organisation bureaucratique, comme le sont devenues toutes les centrales syndicales, est toujours une représentation déformée, bien au-dessous du niveau de combativité de la base. Ainsi, la pression des masses était si puissante que la représentation bureaucratique des travailleurs n'a pu éviter d'y répondre. Le 20 décembre i960, à la suite de la grève illimitée décidée par la C.G.S.P., toutes les corporations, spontanément, passant même par- dessus le plan élaboré par André Renard, s'engageaient dans la grève générale : la totalité des ouvriers wrallons, les secteurs flamands décisifs d'Anvers et de Gand. Les 27 et 28 décembre, le mouvement atteignait son sommet, le gouvernement était impuissant, paralysé. La grève générale était maîtresse du pays. A partir du 28, la grève générale piétinait. Spontanément, les travailleurs, dans les meetings et les démonstrations de rues, fixaient eux-mêmes le prochain objectif à atteindre : la marche sur Bruxelles, c'est-à-dire l'affrontement direct avec l'appareil d'état bourgeois dont les organes dirigeants, gouverne- ment, parlement, trône, sont concentrés dans la capitale. 59

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travail leurs engagent une action générale contre l 'exploitation capi­taliste et l'état bourgeois. M . V a n A c k e r , publiquement, se place du côté des exploiteurs et de la police. S i le cas de ce Monsieur est le plus flagrant, celui de Major , secrétaire général de la F . G . T . B . , de Léo CoUard, président du P.S.B. , et des autres parlementaires < socia­listes », n'est guère meil leur : s'ils ont évité de faire, à l ' instar de V a n Acker , des déclarations fracassantes, i ls n'en ont pas moins adopté une ligne de conduite analogue. O n l 'a vu, le président du P . S . B . a adressé, en pleine g'rève, un mémorandum au r o i , manifestant ainsi sans équivoque son désir de s'en remettre au monarque du soin de régler le conflit survenu entre le capital et le travai l ; pouvait- i l un instant douter que l'arbitrage royal s'exercerait aux dépens des ouvriers ? L 'act ion générale, « la lutte nationale unique à direction centralisée, autrement dit la lutte des classes, est une lutte politique >, écrivaient, à Bruxel les même, en 1847, M a r x et Engels dans le Manifeste du Parti Communiste. Les chefs socialistes en sont bien d'accord ! Seulement, pour eux, l 'objectif politique de la lutte des classes n'est autre que d'amener le pouvoir royal , le pouvoir de la bourgeoisie, à concéder quelques maroquins aux dirigeants du P .S .B . Occuper les strapontins ministériels, quel honneur ! Les mineurs, du Borinage et leurs famil les, angoissés par un avenir incertain, les fonctionnaires excédés par les mesures antisociales incluses dans la l o i unique, les travailleurs intime­ment persuadés de la volonté du capital et de son état de leur faire payer, et à eux exclusivement, les frais nécessités par la modernisation de l ' industrie belge, se sont engagés dans la grève générale. Les gré­vistes se tournèrent alors vers leurs dirigeants, leur montrant l a voie : i ls voulaient marcher sur Bruxel les , c'est-à-dire l i v r e r assaut au pou­voir du capital. M a i s les dirigeants préféraient, une fois encore, être conviés à l a table des « grands » de ce monde. Ils ont refusé d'écouter la voix qui partait d'en bas. A nouveau, comme le chef du parti socia­liste français, Guy M o l l e t , comme le dirigeant du Labour Party , Gaits-ke l l , les chefs socialistes belges ont préféré se coucher devant le capital et contribuer à leur façon au « maintien de l 'ordre » ! L'att itude du parti communiste de Belgique, pour être en apparence plus équivoque, n'en a pas moins été dictée par sa volonté de maintenir l 'act ion dans les voies de la démocratie bourgeoise. E n Belgique, le P.C., minoritaire, appelait à la grève générale ; en France, le P.C., organisation majori­taire de la classe ouvrière, a condamné avec la plus extrême violence la grève générale en 1953, en 1955, en 1958. M a i s l 'un et l 'autre parti» communistes n'oublient, n i en Belgique, n i en France, d'indiquer aux travailleurs que leur lutte de classe ne doit pas sort ir du cadre da parlementarisme bourgeois.

L'essence de la démocratie bourgeoise est de « décider périodique­ment, pour un certain nombre d'années, quel membre de l a classe dirigeante ( i ) foulera aux pieds et écrasera le peuple au parlement », écrivait M a r x . L'expérience historique a vérifié complètement cet

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•enseignement. L a majorité parlementaire du Front républicain a investi M . Guy M o l l e t , en janvier 1956, pour faire la paix en Algérie. L e président « socialiste » du conseil des ministres, bénéficiant du vote unanime des députés du P . C . F . , a demandé et obtenu, le 12 mars 1956,

lès pouvoirs spéciaux qui ont inauguré la guerre totale, sous la direction de Massu, Salan et autres généraux réactionnaires. A u c u n doute n'est permis. Pour peu que l'occasion s'y prête, M . Spaak i l lustrera, à l ' i m i ­tation de son collègue français, la tactique efficace de l 'ut i l isation, chère à M . Khrouchtchev, des voies parlementaires pour réaliser le socialisme.

ANDRÉ RENARD

DANS LA GRÈVE GÉNÉRALE

L e lô décembre i960, au comité national de la F . G . T . B . , André Renard déposait une résolution proposant le principe de la grève générale illimitée, objectif final d'une tactique prévoyant comme étapes successives des débrayages régionaux, une grève générale de 24 heures et un référendum à organiser dans toutes les entreprises. L a résolution Renard recuei l l i t 475.823 mandats contre 496.487 et 53.000 abstentions. Ce vote indiquait avec précision le niveau de combativité de la classe ouvrière belge. I l ne faut pas oublier que les participants au Comité national élargi appartiennent, dans une large mesure, à l 'appareil de la F . G . T . B . L a faible majorité obtenue par l 'ai le droite démontrait que, derrière l 'ai le gauche dirigée par Renard, s'était regroupée l'immense majorité des travailleurs. Car toute représentation, à f o r t i o r i dans une organisation bureaucratique, comme le sont devenues toutes les centrales syndicales, est toujours une représentation déformée, bien au-dessous du niveau de combativité de la base. A i n s i , la pression des masses était s i puissante que la représentation bureaucratique des travailleurs n'a pu éviter d'y répondre.

L e 20 décembre i960, à la suite de la grève illimitée décidée par la C.G.S.P., toutes les corporations, spontanément, passant même par­dessus le plan élaboré par André Renard, s'engageaient dans la grève générale : la totalité des ouvriers wrallons, les secteurs flamands décisifs d'Anvers et de Gand. Les 27 et 28 décembre, le mouvement atteignait son sommet, le gouvernement était impuissant, paralysé. L a grève générale était maîtresse du pays. A part ir du 28, la grève générale piétinait. Spontanément, les travailleurs, dans les meetings et les démonstrations de rues, fixaient eux-mêmes le prochain objectif à atteindre : la marche sur Bruxelles, c'est-à-dire l'affrontement direct avec l 'appareil d'état bourgeois dont les organes dirigeants, gouverne­ment, parlement, trône, sont concentrés dans la capitale.

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