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UNIVERSITÉ du SUD, TOULON-VAR Laboratoire de Sondages Électromagnétiques de l’Environnement Terrestre Mémoire présenté pour obtenir l’Habilitation à Diriger des Recherches Discipline : Sciences de l’Univers par Anne Molcard Études du transport en milieu côtier à l’aide de modèles et de systèmes d’observations intégrés JURY M. Alain COLIN DE VERDIERE, LPO, Brest rapporteur M. Pierre DE MEY, LEGOS, Toulouse rapporteur M. Philippe FRAUNIE M.me Nadia PINARDI, INGV, Ravenna M. Gilles REVERDIN, LOCEAN, Paris rapporteur M. Joaquin TINTORE, IMEDEA, Palma de Maiorca

Anne Molcard Études du transport en milieu côtier à l’aide …lseet.univ-tln.fr/~molcard/HDR/HDR-intro.pdfMohamed Iskandarani, Paolo Laj, Simona Masina, Mario Astraldi, Gian Pietro

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UNIVERSITÉ du SUD, TOULON-VAR

Laboratoire de Sondages Électromagnétiques de l’Environnement Terrestre

Mémoire présenté pour obtenir

l’Habilitation à Diriger des Recherches

Discipline : Sciences de l’Univers

par

Anne Molcard

Études du transport en milieu côtier à l’aide de modèles et de systèmes

d’observations intégrés

JURY

M. Alain COLIN DE VERDIERE, LPO, Brest rapporteur

M. Pierre DE MEY, LEGOS, Toulouse rapporteur

M. Philippe FRAUNIE

M.me Nadia PINARDI, INGV, Ravenna

M. Gilles REVERDIN, LOCEAN, Paris rapporteur

M. Joaquin TINTORE, IMEDEA, Palma de Maiorca

Remerciements

Merci à Alain Colin de Verdière, Pierre de Mey, Philippe Fraunié, Nadia Pinardi, Gilles Reverdin et Joaquin Tintoré d’avoir accepté d’être membres de ce jury. Mon parcours professionnel est caractérisé par un travail de groupe, avec la présence de très bons formateurs. Tout ce qui est présenté dans ce document est le résultat de ce travail de groupe. En particulier, je voudrais remercier : - Nadia Pinardi qui a encadré ma thèse, m'a initiée au travail de la recherche et m’a présentée à la communauté scientifique européenne et américaine. Avec elle, j'ai réalisé ce qu’était le travail d'un responsable de projet international et d'un groupe ; - Annalisa Griffa avec qui j'ai travaillé depuis la fin de ma thèse, reste une très proche collaboratrice. Elle m’a accueillie dans le groupe « lagrangien » de l'Université de Miami au RSMAS. J'ai appris avec elle à me poser les bonnes questions, à aimer ce travail ; - Tamay Ozgokmen, jeune chercheur confirmé, a été mon principal collaborateur pendant ces années de post-doc et d'assistant scientist ; - Philippe Fraunié, qui depuis mon recrutement au LSEET m’a toujours soutenue avec enthousiasme dans mes projets scientifiques et mes démarches administratives. Je remercie tous les co-auteurs de mes publications. Je tiens aussi à remercier toutes les personnes qui ont contribué, directement ou indirectement à ma formation et à ma carrière dans la recherche. En ordre chronologique d’apparition au cours de mon vie professionnelle : Michel Crepon, Christophe Herbaut, Laurent Mortier, Roberto Ansaloni, Mohamed Iskandarani, Paolo Laj, Simona Masina, Mario Astraldi, Gian Pietro Gasparini, Stefano Aliani, Leonid Piterbarg, Manuel Fiadeiro, Andrew Poje, Milena Veneziani, Antonello Provenzale, Bruno Zakardjian. Je tiens aussi à remercier Amandine Schaeffer et Elisa Casella, pour avoir été mes premières thésardes. Et aussi, tous les membres des laboratoires que j’ai connu (IMGA à Bologne, IOF à La Spezia, RSMAS à Miami, LSEET à Toulon), et qui ont tous contribué à l’ambiance agréable et constructive qui y régnait. Enfin merci à ma famille et à mes amis d’être toujours présents.

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Liste de Publications

Introduction

1. Le passé

1.1 La modélisation

1.2 Le lagrangien

1.2.1 Assimilation

1.2.2 Stratégie de déploiement

1.3 Les applications

2. Le présent

2.1 Recherche

2.1.1 Les observations

2.1.2 Les études de processus

2.2 Responsabilités et enseignement

3. Les perspectives

3.1 Recherche

3.2 Enseignement

4. Discussion et conclusion

Références

Annexe A) CV

Annexe B) Publications

Annexe C) Poster Schaeffer et al.; Poster Marmain et al.; LAPCOD09 ; TOSCA.

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Liste de Publications

-2) E. CASELLA, MOLCARD A., PROVENZALE A.: Simulations of sub-mesoscale eddies in

the Ligurian Sea. Submitted to J. Marine Systems, September 2009. -1) SCHAEFFER A., MOLCARD A., P. FORGET, P. FRAUNIE, P. GARREAU.: Generation

mechanism of sub-msesocale eddy in the Gulf of Lions: radar observation and modelling. Submitted to J. Geophys. Res, July 2009.

0) MOLCARD A., POULAIN P.M., FORGET P., GRIFFA A., BARBIN Y., GAGGELLI J., DE MAISTRE J.C., RIXEN M., 2009: Comparison between VHF radar observations and data from drifter clusters in the Gulf of La Spezia (Mediterranean Sea), 2009, J. Marine Systems, (78), S79-S89.

1) P.-M. POULAIN, R. BARBANTI, J. FONT, A. CRUZADO, C. MILLOT, I. GERTMAN, A. GRIFFA, A. MOLCARD, V. RUPOLO, S. LE BRAS AND L. PETIT DE LA VILLEON, 2007: MEDARGO: A Drifting Profiler Program in the Mediterranean Sea. Ocean Science, 3, (3), 379-395.

2) HAZA, A., A. GRIFFA, P. MARTIN, A. MOLCARD, T.M.OZGOKMEN, A.C. POJE, R. BARBANTI, J. BOOK, P.M. POULAIN, M. RIXEN, AND P. ZANASCA, 2007: Model-based directed drifter launches in the Adriatic Sea: Results from the DART experiment. Geophys. Res. Letters, 34, L10605, doi:10.1029/2007GL029634.

3) A. MOLCARD, T., OZGOKMEN, A. GRIFFA, L. PITERBARG, T.M. CHIN, 2007. "Lagrangian data assimilation in ocean general circulation models”, Lagrangian Analysis and Prediction Coastal Ocean Dynamics (LAPCOD), Eds A. Griffa, A.D. Kirwan, A.J. Mariano, T.M. Ozgokmen and T. Rossby, Cambridge University Press.

4) A. GRIFFA, A. MOLCARD, F. RAICICH, V. RUPOLO, 2006: Assessment of the impact of TS assimilation from ARGO floats in the Mediterranean Sea. Ocean Science, 2, (2), 237-248.

5) S. ALIANI, GP. GASPARINI, C. MICHELI, A. MOLCARD, A. PEIRANO, 2006: Can southern meadows of the Mediterranean seagrass posidonia oceanica (l.) delile supply northern ones? a multidisciplinary approach in the ligurian sea. Biologia Marina Mediterranea, 13(2), 262-266.

6) V. TAILLANDIER, A. GRIFFA, A. MOLCARD, 2006: A variational approach for the reconstruction of regional scale Eulerian velocity fields from Lagrangian data. J. Ocean modelling (IF:2.9), 13,(1), 1-24

7) A.MOLCARD, A. POJE, T. OZGOKMEN, 2005. "Direct drifter launch strategies for Lagrangian data assimilation using hyperbolic trajectories”, J. Ocean Modelling, 10.1016/ j.ocemod.2005.06.004.

8) A. MOLCARD, A. GRIFFA, T. OZGOKMEN, 2005. "Lagrangian data assimilation in multilayer Primitive equation ocean models”, J. Atmos. Oceanic Technol. 22, 1, 70-83.

9) S. ALIANI, A. MOLCARD, 2003. “Hitch-hiking on floating debris: a contribution from a macrobenthic species in the Western Mediterranean”. Hydrobiologia, 503, 59-67.

10) S. ALIANI, A. GRIFFA, A. MOLCARD, 2003. “Floating debris in the Ligurian Sea, north-western Mediterranean.” Marine Pollution Bulletin, 46, 1142-1149.

11) T. OZGOKMEN, A. MOLCARD, T.M. CHIN, L. PITERBARG, A. GRIFFA, 2003. "Assimilation of drifter positions in primitive equation models of midlatitude ocean circulation”, J. Geophys. Res., 108, C7, 3238.

12) A. MOLCARD , L. PITERBARG , A. GRIFFA, T. OZGOKMEN, A.MARIANO, 2003. "Assimilation of drifter positions for the reconstruction of the Eulerian circulation field.”, J. Geophys. Res., 108, C3, 3056.

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13) A. MOLCARD, L. GERVASIO , A. GRIFFA, L. MORTIER, G.P.GASPARINI, T. OZGOKMEN, 2002. "Numerical investigation of the Sicily Channel dynamics: density currents and water mass advection.”, J. Mar. Res., 36,(3-4), 219-238.

14) A.MOLCARD, N.PINARDI, M.ISKANDARANI, D.HAIDVOGEL, 2002. "Wind driven general circulation of the Mediterranean Sea simulated with a Spectral Element Ocean Model", Dyn. Atm. Oc., 35,97-103.

15) A.MOLCARD, N.PINARDI, R.ANSALONI, 1998. "A Spectral Element Ocean Model on the Cray T3D: the interannual variability of the Mediterranean Sea general circulation", Physics and Chemistry of the Earth, 23/5-6, 491-495.

Schéma récapitulatif : cursus professionnel géographique, domaines de recherche et publications

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Introduction Les publications réunies dans ce dossier, écrites entre 1995 et 2009, se veulent une contribution à la recherche en océanographie physique. Mon domaine de recherche concerne plus particulièrement l’étude des courants marins, appliquée au transport et à la dispersion, dans un premier temps numérique et ensuite plus expérimental, en essayant aujourd’hui de coupler ces deux volets complémentaires. Huit années post doctorales dans plusieurs laboratoires de recherche m'ont permis d’appréhender différents domaines de l’océanographie : la modélisation avec des codes complexes, les études de processus avec des modèles simplifiés, l’assimilation de données (lagrangienne et théorique), les méthodologies de traitement, et enfin les observations, en particulier par les flotteurs et les radars côtiers. Depuis mon recrutement à l’Université du Sud, Toulon-Var (USTV) en tant que maître de conférences, mon travail de recherche a été couplé avec mes activités d’enseignement. Malgré la difficulté de mener ces deux carrières en parallèle, l’enseignement m’a apporté non seulement l’opportunité de combler certaines lacunes de ma formation, mais aussi une complémentarité dans mon travail de recherche grâce à un échange intellectuel permanent avec les étudiants, et à un environnement de travail très constructif. Par ailleurs, j’ai maintenu mes collaborations avec l’Italie et les USA en poursuivant les projets en cours et j’ai rattrapé mon retard et ma méconnaissance des structures au niveau national (acronymes, projets et appels d’offre…). Je souhaite maintenant construire de nouveaux projets que je décrirai dans le dernier chapitre.

Ce dossier de synthèse est présenté de façon chronologique, un choix simple qui toutefois explique mon parcours professionnel, mes déplacements géographiques et mes différentes thématiques de recherche. Le rapport adopte un plan en trois parties, correspondant aux différentes périodes de mes travaux : le passé, les travaux actuels et les perspectives. Les principaux résultats y sont présentés de façon descriptive en faisant référence aux publications jointes en Annexe B. Les thématiques abordées lors de mon parcours (les modèles numériques, les méthodologies lagrangiennes, les observations) vont me conduire naturellement à proposer des perspectives de recherche centrées sur l’étude du transport en zone côtière.

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1. Le passé

La période ici considérée couvre 11 ans, du début de ma thèse (1994) à mon recrutement à l'Université du Sud, Toulon-Var au sein du Laboratoire de Sondages Électromagnétiques de l’Environnement Terrestre, UMR6017 en 2005.

1.1 La modélisation J’ai réalisé mon travail de thèse en Italie, à Bologne, dans le groupe «naissant» de Nadia Pinardi qui démarrait d’importants projets européens (MTP-MATER Mediterranean targeted project II-mass transfer and ecosystem response, MFSPP Mediterranean Forecasting System Pilot Project) dans le domaine de l'océanographie numérique et opérationnelle. Le but de ce doctorat, intitulé « simulations numériques de la circulation générale de la Méditerranée avec un modèle aux éléments finis spectraux » et financé par une bourse Pierre et Marie Curie, était de tester un nouveau modèle, nouveau en terme de techniques de discrétisation, et de l'implémenter sur la Méditerranée. Cette technique numérique associe la flexibilité géométrique des éléments finis pour une représentation correcte du trait de côte avec la haute précision des méthodes spectrales. Contrairement à la méthode traditionnelle des différences finies pour résoudre numériquement les équations de la dynamique de l'océan, où les dérivées partielles sont remplacées par leur développement en série de Taylor, et dont l'approximation est faite sur l'opérateur, la méthode des éléments finis résout la forme variationnelle des équations aux dérivées partielles sur un domaine fini avec l'approximation qui est faite sur la solution. La dynamique étudiée est celle de la circulation forcée par le vent dans l'approximation de gravité réduite (modèle 1.5 couche). En forçant le modèle avec différents

jeux de données de vent, nous avons mis en évidence la variabilité saisonnière et interannuelle des structures à l'échelle des sous bassins et des courants côtiers, et le lien entre les pics de la variabilité temporelle et les échelles spatiales de la circulation. Une partie importante de ma thèse était dédiée à l'implémentation numérique, c'est-à-dire à l’application de la méthode des éléments finis, peu triviale, avec construction manuelle de la grille, et à la partie informatique concernant le code et la parallélisation. En effet, ces techniques numériques sont beaucoup plus lourdes que les différences finies traditionnelles, et demandent une mémoire et des processeurs plus performants (par exemple pour l’inversion de matrices pleines). Ainsi, il a été nécessaire de « porter » le code sur un supercalculateur Cray T3E, en collaboration avec un ingénieur informaticien ([15]). Une fois le code implémenté et opérationnel, la partie scientifique de mon travail a consisté en l'étude des forçages atmosphériques (à différentes résolutions spatiales et temporelles) et de leur impact sur la circulation de la Méditerranée. L'analyse EOF (Empirical Orthogonal Function) des sorties a mis en évidence certaines structures de méso-échelle de la circulation directement corrélées aux structures du vent ([14]). Le bilan de ces trois ans et demi de thèse a été très positif: j'ai acquis de l’expérience au niveau informatique (parallélisation, programmation fortran) et en analyse numérique. De plus cela a été un premier contact avec le monde de l'océanographie, l'étude de la circulation générale de la Méditerranée, des forçages atmosphériques et de la variabilité spatio-temporelle des structures de méso-échelle. À la fin de ma thèse, j’ai obtenu mon premier contrat post-doctoral au sein du laboratoire ISMAR-CNR à La Spezia, dans une équipe plus petite, traditionnellement expérimentale. Annalisa Griffa (directeur de recherche au CNR et professeur à l’université de Miami, RSMAS) forme alors un groupe de

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modélisation. Dans le cadre d'une collaboration naissante avec le LODYC (devenu depuis le LOCEAN, Laboratoire d’Océanographie et du Climat : Expérimentation et Approches Numériques), le code OPA (Ocean PArallel, Madec et al., 1998) est implémenté sur le canal de Sicile, zone d'étude privilégiée du groupe italien du point de vue expérimental. En effet depuis les années 80, ce laboratoire s’est spécialisé dans les mesures hydrologiques, avec des campagnes régulières en Méditerranée Occidentale, et la mise en place de courantomètres dans les Canaux de Corse et de Sicile, points clés des échanges entre les différents bassins (Astraldi et Gasparini, 1992, Astraldi et al., 1999, Manzella et al., 1988). Le but de mon travail au sein de ce laboratoire a été d'étudier la circulation et les parcours de masses d'eau dans le canal de Sicile. Pour ces études de processus, le modèle était idéalisé et forcé par des gradients de densité, et les simulations ont été comparées avec les données in situ, à l'aide d'analyses statistiques eulériennes et lagrangiennes ([13]). Tout en faisant connaissance avec un autre modèle largement utilisé (OPA), ce travail a été mon premier contact avec les données réelles, leur traitement, et les techniques statistiques. De plus, profitant de l'expertise de A. Griffa dans le domaine du transport lagrangien, j'ai commencé à travailler avec les bouées dérivantes et les vitesses lagrangiennes déduites de positions successives, en prenant compte de la richesse des informations complémentaires apportées par le système de description lagrangien.

1.2 Le lagrangien

1.2.1 Assimilation C'est au cours de cette période que j'intègre le groupe lagrangien de la Rosensteil School of Marine and Atmospheric Sciences (RSMAS) de l’université de Miami, dans le cadre d'un financement post-doctoral de l'Office of Naval Research (ONR), groupe que je ne quitterai plus du point de vue des collaborations. Les instruments lagrangiens jouent un rôle essentiel dans les systèmes d’observation de l’océan. Durant les dernières années, le nombre de bouées dérivantes a considérablement augmenté et a permis d’obtenir des informations directes sur le transport et la circulation horizontale. Les données lagrangiennes peuvent être utilisées pour calculer les propriétés statistiques de la circulation (champ moyen) (Poulain, 2001, Bauer et al., 1998, Veneziani et al., 2005), pour étudier le transport et le mélange avec des outils mathématiques basés sur la théorie des systèmes dynamiques (Wiggins, 1992, Poje et al., 2002, Couillette et al., 2000), pour développer des modèles statistiques (Griffa, 1996), pour des études de prévision ou encore pour estimer des vitesses euleriennes (Ozgokmen et al., 2000, Castellari et al., 2001, Piterbarg, 2001, Toner et al., 2001). La quantité croissante de flotteurs maintenant disponibles s’ajoute aux récents progrès dans le domaine de la prévision des courants par les modèles de circulation océanique. Le thème que j'étais chargée de développer était l'assimilation lagrangienne, ou comment utiliser le nombre grandissant de données de bouées dérivantes pour améliorer la prévision des modèles. La problématique étant d'adapter le caractère lagrangien de la donnée au modèle de circulation: en effet l'information est la position des bouées, alors que la variable pronostique du modèle est la vitesse

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eulérienne. Le but de l'assimilation est de corriger la prévision d'une variable pronostique faite par un modèle à l'aide d'observations. Cette correction est pondérée soit par un rayon d'influence spatial (méthode de Cressman), soit par un terme qui dépend des matrices de corrélations du modèle et des observations (Optimal Interpolation), soit enfin elle est calculée par des méthodes variationnelles qui tiennent compte de l'ensemble des observations (dans le temps et dans l'espace) (3DVAR-4DVAR). Une méthode originale basée sur l'interpolation optimale (OI) pour la correction de la vitesse par données lagrangiennes a été implémentée, testée et appliquée à différents modèles. La méthode d’assimilation OI se base sur la théorie Bayesienne (Lorenc, 2000) et s’écrit sous forme matricielle :

!

ua = ub + K(y "H(ub )) ,

!

ua étant le vecteur

vitesse corrigée par assimilation,

!

ub

(background) la vitesse ébauche, première prévision du modèle, y le vecteur observation,

!

H(ub) la fonction qui relie les variables d’état

du modèle avec les observations, et K la matrice de gain qui dépend des matrices de covariance d’erreurs du modèle et des observations. Le point central de cette assimilation est le fait que nous voulons intégrer des observations lagrangiennes, et donc des positions, dans un modèle dont la variable pronostique est la vitesse eulérienne. Le vecteur observation représente donc les positions successives

!

xi(t) et

!

H(ub) est

l’équation d’advection d’un traceur passif au sein du modèle de prévision, avec des interpolateurs spatiaux (bilinéaires ou « splines ») et temporels (Runge-Kutta du 4ème ordre), pour obtenir ce que l’on appelle les « trajectoires synthétiques ».

Figure 1 : schéma d’assimilation lagrangienne : deux observations successives (A1, A2) permettent de corriger l’ébauche (première estimation du modèle C1), dans un certain rayon d’influence, pour obtenir une estimation corrigée (C2) plus proche de l’observation. Le schéma sur la figure 1 décrit la technique d’assimilation lagrangienne : la vitesse eulérienne ébauchée par le modèle est corrigée dans un rayon d’influence fixé, tel que la trajectoire d’un traceur passif advecté par le modèle se rapproche de la trajectoire réelle. La méthode développée a été testée en termes de performance dans le cadre des expériences jumelles (« twin experiments ») : plutôt que d’utiliser des données réelles, celles-ci sont extraites d’une simulation numérique, représentant théoriquement la « réalité », et assimilées dans une deuxième simulation, différente, représentant cette fois le modèle à corriger. Cette approche est largement utilisée dans le domaine de l'assimilation car malgré la simplification et la réduction des degrés de liberté par rapport à l’utilisation de données réelles, elle permet de vérifier la méthodologie de façon exhaustive, la réalité étant connue (ou plutôt simulée) en tout point.

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Figure 2 : expériences jumelles sur un modèle quasi-géostrophique: les données (en haut à gauche) proviennent de la simulation « réelle » (en haut à droite), et sont assimilées (en bas à gauche). L’évolution du modèle sans assimilation est montrée en bas à droite. Ainsi nous avons testé l'impact de la correction sur un modèle simple quasi-géostrophique (QG) ([12], Figure 2), sur un modèle multi-variables (modèle aux équations primitives 1.5 couche) et multi-couches (Primitive Equation Model (PE) à 3 couches). On vérifie ainsi l ‘impact de l’assimilation sur des variables liées dynamiquement (par géostrophie et conservation de masse) ([11]) et la projection verticale de la correction([8]). Ce travail est résumé dans un ouvrage publié à la suite d'un colloque ([3]). Ce travail initialement méthodologique a été poursuivi par Vincent Taillandier qui, lors d'un premier post-doc a l'ISMAR de la Spezia, a appliqué l'assimilation lagrangienne à un modèle de prévision réaliste (dans le cadre du programme MFSTEP). Ainsi la reconstruction du champ eulérien avec les bouées dérivantes a été proposée ([6]): ici la correction est faite off-line, c'est-à-dire en dehors de l'évolution de la dynamique du système océan.

1.2.2. Stratégie de déploiement Une autre thématique développée à la suite de la méthode d'assimilation était celle de la stratégie de déploiement d'instruments lagrangiens: la dépendance du déploiement initial est étudiée en terme de performance d’assimilation, et une stratégie de lancement, basée sur le suivi des structures de multiplicité qui se développent dans des régions fortement hyperboliques, est proposée. Ce travail se base sur les théories des systèmes dynamiques appliquées aux mouvements lagrangiens dans les flux géophysiques. Ces techniques cherchent à identifier les trajectoires hyperboliques dans le champ lagrangien, caractérisées par l’intersection d’un attracteur stable (le long duquel les particules fluides sont attirées), et un d’un attracteur instable à partir d’un champ de vitesse ayant une variabilité complexe. Il a été montré que cette méthode permettait de localiser les frontières de structures cohérentes de méso-échelle et d’optimiser l’échantillonnage pour la reconstruction du champ eulérien (Poje et al., 2002, Toner and Poje, 2004, Wiggins, 1992). L’idée ici est d’optimiser l’ensemble des observations pour l’assimilation, que ce soit sur le nombre d’instruments (flotteurs) utilisés, l’échantillonnage ou la position de lancement. L’optimisation dépend de l’objectif : par exemple le nombre d’instruments disponibles est un paramètre à considérer, ainsi que l’identification des phénomènes que l’on veut mesurer. L’objectif posé dans ce travail est d’améliorer les performances de l’assimilation, donc d’obtenir le plus d’informations possibles (en temps et en espace) avec un nombre donné de plateformes instrumentales. Nous avons montré que l’alignement des positions initiales des bouées le long des frontières lagrangiennes, optimise la

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dispersion relative et l’échantillonnage des structures énergétiques. Les frontières lagrangiennes sont identifiées soit à partir des lignes d’attraction du champ eulérien (en calculant les points d’arrêt et de rebroussement de l’écoulement), soit, plus simplement, par le calcul des « Finite Scale Lyapounov Exponents » (FSLE), qui sont une mesure du temps nécessaire à une paire de particules pour se séparer (Aurell et al., 1997, Artale et al., 1997). Les FSLE (de dimension s-1) sont définies par

!

"(x, t,#i,r) =

1

$log r ,

!

" étant le temps requis à

une paire de particules initialement séparées de

!

"i, centrée en x à t, pour se séparer de

!

" f = r"i .

Figure 3: stratégie de déploiement optimal : un lâcher de bouées dérivantes le long des lignes de dispersion maximale permet un meilleur échantillonnage des structures dynamiques.

Si ces lignes existent, alors elles caractérisent les structures quasi-permanentes de l’écoulement, et constituent des barrières infranchissables pour le transport. Ainsi la convergence du schéma d’assimilation est consistante et est considérablement améliorée par cette stratégie de lancement direct (Fig.3, [7]).

1.3 Les applications Dans le cadre du programme européen MFSTEP (« Mediterranean Forecasting System Toward Environmental Predictions »), j'ai participé aux études en amont (OSSE, Observing System Simulation Experiments) pour la mise en place d'un système d'observation lagrangien. Ainsi un ensemble de recommandations pour le programme MedArgo en support à l'océanographie opérationnelle en Méditerranée a été proposé, en particulier sur le cycle et la fréquence d'échantillonnage des profileurs ([1]). Par ailleurs, une étude sur l'impact de l'assimilation des données de température et salinité acquises par les profileurs propose un dessin de couverture optimale ([4]). La thématique du transport lagrangien offre un domaine d'applications très vaste, par exemple en biologie marine. En couplant certaines observations, soit de macro-déchets tels que sacs en plastique, soit des identifications d'espèces retrouvées, avec des modèles de circulation et de dispersion, on obtient des informations sur la route de traceurs passifs, permettant d’avancer des hypothèses sur la provenance de certaines espèces envahissante qui déséquilibrent la biodiversité ([9,5]), ou de proposer des cartes de concentrations « zoning » ([10]).

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La dernière année de mon contrat post doctoral, précédant mon recrutement au LSEET de l'université de Toulon à été financée par un projet européen, « network of excellence » sur la thématique de la turbulence. Dans ce cadre j’ai eu l’occasion de connaître une autre communauté de chercheurs, plus théoricienne, et de collaborer avec Antonello Provenzale, chercheur au CNR ISAC de Turin, et avec Marina Levy du LOCEAN. Nous avons étudié les sorties numériques du modèle OPA couplé avec le module biologique (LOBSTER), en caractérisant quantitativement les structures tourbillonnaires à l’aide, entre autre, de la métrique Okubo-Weiss. Nous envisageons toujours de poursuivre cette étude et de publier les résultats, peut-être dans le cadre d’un stage de master.

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2. Le présent

Le présent concerne la période allant de mon recrutement au LSEET (septembre 2005) sur un poste « sauvons la recherche », à aujourd'hui. Quatre années, toutes nécessaires pour m'adapter à l'enseignement et au monde de la recherche française. Parallèlement à mon service d'enseignement, activité totalement nouvelle pour moi, qui concerne essentiellement le parcours « Physique et Sciences pour l’Ingénieur » de l'USTV en L3 et M1 (annexe A), j’ai maintenu mes collaborations internationales, grâce, surtout, au détachement de six mois accordé par le CNRS en 2006.

2.1. Recherche 2.1.1. Les observations J'ai participé à deux grandes campagnes sous l’égide de l'OTAN (NURC, La Spezia) et du NRL: Dynamics of Adriatic in Real-Time (DART 06) en Adriatique et Marine Rapid Environment Assesment (MREA 07) dans le golfe de La Spezia. La première m'a permis de mettre en pratique les méthodologies développées dans la thématique du transport lagrangien, en particulier la stratégie de déploiement optimal. Les bouées dérivantes ont été larguées en temps réel selon les indications obtenues à partir de notre analyse FSLE (présentées au chapitre 1.3) des champs de courant de surface du modèle de prévision américain NCOM (NCAR) : en identifiant les points de rebroussement, nous voulions couvrir le plus large domaine possible avec un nombre réduit d'instruments.

Figure 4 : «real-time optimal sampling» : la position des lâchers de deux flotteurs est calculée à partir des lignes de FSLE des champs eulériens NCOM. En temps réel, l'analyse des champs de surface fournis par le modèle de prévision nous indiquait les positions optimales de lancement, que nous transmettions à l'équipage à bord des navires. En fonction des conditions météorologiques, de la position du bateau et du plan de campagne, un certain nombre de « lâchers optimaux » ont pu ainsi être testé (figure 4). Cette stratégie de lancement s’est révélée très fructueuse et a démontré l'utilité et le succès de cette méthodologie [2, Annexe B]. Le programme MREA/LASIE (Marine Rapid Environment Assessment, Ligurian Air Sea Interaction Experiment) m'a initiée, peu après mon arrivée au LSEET, à la courantologie radar, spécialité du laboratoire, qui permet une couverture quasi synoptique de la surface de l'océan, et l’établissement de séries de cartes de courants à très haute résolution spatiale et temporelle.

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Dans le cadre de l'opération MREA pour sa composante en circulation côtière POET (Pilot Oceanographic and Environmental Trial) dans le golfe de La Spezia, j'ai mis en place un système d’observation des courants de surface par radar. Grâce aux compétences de l'équipe d'ingénieurs du LSEET, le système de radars WERA du laboratoire a été déployé en fonctionnement VHF (45MHz) pour la première fois et les paramètres du radar ont été adaptés et fixés pour cette zone géographique réduite. En règle générale l’analyse des signaux récupérés par le système radar nécessite un traitement (post-processing) contraignant : les signaux doivent être filtrés et nettoyés pour ne garder que ceux qui concernent les courants, et souvent les paramètres de traitement passent à travers différentes étapes. Dans le cadre de cette expérience, nous voulions obtenir des cartes en temps réel, pour décider la position des lâchers en fonction de la situation dynamique. Ainsi, la configuration du système a été fixée après plusieurs jours de tests, et nous avons pu obtenir en temps quasi-réel des cartes de courant de surface pendant les 15 jours d'opérations, à une résolution spatiale de 300m et temporelle d’une demi-heure. Ces données de courantologie radar nous ont permis dans un premier temps d'identifier les positions de largage des bouées dérivantes. La stratégie était ici de faire des lâchers groupés (« cluster ») pour avoir des informations directes sur la dispersion et les vitesses du courant à très petite échelle. Les flotteurs étant à transmission GPS-GSM nous avions deux impératifs: pouvoir récupérer les bouées avant qu'elles ne sortent de la zone de couverture GSM et mesurer le plus de variabilité possible. Cet objectif ayant été atteint, l'étape suivante a été de valider les données radar avec celles obtenues par les flotteurs. On a pu comparer les mesures directes eulériennes radar avec celles déduites des déplacements de ces flotteurs d'une part et les trajectoires lagrangiennes synthétiques prédites par les champs de courant radar et celles des flotteurs d'autre part (Figure 5).

Figure 5 : positions successives des flotteurs réels (rouge) superposées à celles « synthétiques » (noires) calculées à partir des champs radar. De plus, les structures de dispersion horizontale à partir des trajectoires synthétiques sont en accord avec celles mesurées par les flotteurs. Ces comparaisons valident la technique radar pour donner des informations eulériennes et lagrangiennes des courants de surface ([0], Annexe B). 2.1.2 Les études de processus La thématique du transport Lagrangien est menée en parallèle de deux études de modélisation en Méditerranée Nord-Occidentale dans le cadre de deux thèses que je co-dirige. La thèse de Amandine Schaeffer (Ifremer-Météo France) concerne la circulation du Golfe du Lion forcée par le vent, du point de vue observations et modélisation. Nous utilisons le modèle de l'Ifremer MARS3D, initialement conçu pour des prévisions réalistes, implémenté dans une configuration idéalisée (bathymétrie lissée, forçages atmosphériques homogènes, veine du courant nord imposée) pour une étude de processus dans le Golfe du Lion, afin de

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déterminer la sensibilité de la circulation aux forçages atmosphériques. Dans un premier temps, l’étude a concerné la circulation à l’échelle du golfe du Lion. La sensibilité des transports de masse d’eau au forçage atmosphérique a été mise en évidence et les résultats sont en accord avec la bibliographie. Ensuite nous nous sommes intéressés à une structure de méso-échelle particulière, observée lors de la campagne radar ECOLO (programme PNEC/PATOM 2006-07) : un tourbillon anti-cyclonique situé au Nord-Est du Golfe, de dimension 40km (Figure 6). Cette structure détectée en surface par courantologie radar n’apparaît pas sur les simulations réalistes, malgré sa dimension et ses multiples apparitions.

Figure 6: observations radar instantanées de la circulation de surface en décembre 2006, au large de Marseille. Nous avons voulu comprendre les mécanismes de formation qui pourraient expliquer sa fréquence irrégulière (5 événements en décembre 2006), sa durée de vie variable (de quelques heures à 3 jours) et son déplacement. Le rôle du vent est supposé prépondérant, mais les analyses des données de vent

(modèles de prévision MM5 associés aux données de stations fixes), ne suffisent pas pour corréler les épisodes de ce tourbillon. Le rôle respectif des différents forçages (conditions aux frontières ouvertes et atmosphériques) et des configurations (bathymétrie, trait de côte, panache du Rhône) a été analysé et nous a permis de proposer un possible mécanisme de génération. Un fort vent de nord ou nord-ouest (Mistral) continu dans le temps (au moins 4 jours) et homogène sur le Golfe du Lion permet la génération du tourbillon en profondeur (jusqu'à 150m) dû à l'interaction du courant côtier avec le trait de côte. Sa signature en surface n'est possible qu'après relaxation du vent lorsque le tourbillon est étiré, mais seul un vent du sud-est pourrait expliquer les évènements persistants. En règle générale, le tourbillon n'apparaît en surface que lorsque sa structure verticale est déjà formée. Le tourbillon a été observé en profondeur dans le cadre d'autres campagnes in-situ, à l'aide d'ADCP et de mouillages (Petrenko, 2003), et ces nouvelles observations ont confirmé notre hypothèse.

Figure 7: distribution du paramètre de Okubo-Weiss (différence entre le carré de l’étirement et le carré de la vorticité) pour une sortie du modèle MARS. Le maximum de vorticité correspond, en taille et position, au tourbillon observé.

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La veine du Courant Nord entrant dans le golfe, mieux simulée par le modèle, renforcerait et maintiendrait cette structure tourbillonnaire, une fois présente en surface. Les forçages de flottabilité sont également très idéalisés dans cette version du modèle: seul le gradient vertical en équilibre géostrophique ainsi qu'un gradient horizontal pour tracer le courant nord sont modélisés. Ce travail fait l'objet d'une publication soumise ([-1]), et a été présenté à plusieurs reprises lors de congrès nationaux et internationaux (Annexe C.1). La deuxième partie de la thèse (en cours) concerne une application plus réaliste sur la zone du Golfe du Lion, toujours à l’aide du modèle numérique MARS dans la version opérationnelle, en utilisant des données atmosphériques provenant du centre de Météo-France (Aladin et Arome). Ainsi nous pouvons évaluer l’importance des échelles spatiales et temporelles, et des forçages atmosphériques, en comparant plusieurs bases de données et leur impact sur la circulation côtière.

La thèse de Elisa Casella (co-tutelle avec l’Université de Basilicata-Genova) s’intéresse à la circulation de la Mer Ligure à l'aide d’un modèle numérique. Cette étude concerne en particulier les tourbillons et leur effet sur les variables biogéochimiques liées au plancton. Le modèle implémenté pour ces simulations est le Regional Ocean Modeling System (ROMS, Shchepetkin and McWilliams, 2005).

La simulation à haute résolution du courant Liguro-Provençal-Catalan dans la Mer Ligure a révélé la présence d’instabilités conduisant à la formation de structures tourbillonnaires. Ces tourbillons sont particulièrement intenses lorsque le forçage du vent provient d'un modèle météorologique à haute résolution spatiale et temporelle (du centre italien de prévision météorologique, Limited Area Model Italy, non-hydrostatic, compressible, resolution 1/16°, 3h). Au contraire, l’utilisation de vents climatologiques à basse résolution comme forçage, induit des structures moins intenses et moins nombreuses. Les simulations forcées avec des vents réels permettent la formation d'intenses tourbillons anticycloniques entre le courant Liguro-Provençal et la côte.

Figure 8 : Zoom instantané (8 novembre 2006) d’une sortie ROMS à 1km de résolution: paramètre de Okubo-Weiss superposé au champ de vitesse superficiel.

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Ces tourbillons se déplacent lentement avec le courant, et sont associés à des structures de vitesse verticale complexes.

Figure 9 : champ de vitesse verticale le long d’une section méridionale (longitude 7.5E) du vortex.

La simulation montre en augmentant la résolution, d'importantes vitesses verticales positives (upwelling) près de la côte qui peuvent induire la remontée de masses d’eaux riches en nutriments, et des vitesses verticales négatives au centre du tourbillon. Ces vitesses peuvent atteindre des valeurs de l’ordre de la dizaine de mètres par jour et peuvent avoir un rôle significatif pour la dynamique de l’écosystème marin de la Mer Ligure ([-2]). Elles peuvent apporter en surface des masses d’eaux riches en nutriments qui peuvent mettre en route la chaîne trophique liée à la production primaire. Tous les vivants sont liés directement ou indirectement à cette production. Pour étudier l’impact des structures à méso-échelle sur les variables biologiques nous avons appliqué un module biogéochimique couplé au modèle hydrodynamique. Les résultats mettent en évidence la complexité du comportement des variables biogéochimiques en présence des structures dynamiques, ainsi que leur variabilité en fonction du type de tourbillons (cyclonique ou anticyclonique). Les tourbillons cycloniques représentent essentiellement des zones de croissance de biomasse, alors que les anticyclones sont des zones d’accumulation de biomasse associées à

des zones de croissance de biomasse due à la remontée d’eaux riches en nutriment au bord du tourbillon. Les résultats de ce travail de thèse montrent l’importance des processus à la méso-échelle, l’impact des tourbillons sur la production biologique et la nécessité d'adopter une résolution spatio-temporelle suffisamment haute pour le modèle océanique et pour les forçages atmosphériques.

2.2 Responsabilités et enseignement

Durant ces quatre années, j'ai participé à la soumission de plusieurs projets nationaux et européens (Plan Pluri-Formation, Interrreg, Medprog) qui m'ont permis de connaître les règles françaises et européennes, mais aussi de collaborer avec de nouvelles institutions (Imedea Baléares, Toulon Var Technologies, Università Parthenope di Napoli) J'ai aussi participé à l'organisation de deux événements internationaux : le colloque Lagrangian Analysis and Prediction of Coastal Ocean Dynamics, dans sa troisième édition en 2005 à Lerici, et l'école d'été sur l'océanographie côtière à Toulon. Enfin en septembre 2009, j’ai organisé la quatrième édition du LAPCOD, à La Londe les Maures qui a réuni 60 chercheurs de différentes nationalités (Annexe C.3, site web: www.rsmas.miami.edu/LAPCOD). Pour me permettre de maintenir une étroite collaboration avec l'équipe lagrangienne de RSMAS et aussi avec l'ISMAR de La Spezia, des subventions de la région PACA et de l’ONR (Office of Naval Research Global, London) dans le cadre d'un programme de visiting scientist, financent mes séjours dans ces deux laboratoires. Mon enseignement à l'université de Toulon (L3, M1, M2) me permet de suivre les

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étudiants dans leur parcours, de leur enseigner les bases de l'océanographie, les techniques d'analyse et de modélisation, et de leur montrer en dernière année en quoi consiste notre travail de recherche, un monde méconnu pour eux, en appliquant les concepts théoriques vus au cours de leur cursus. J'ai participé à la mise en place de « stages de recherche » en L3 et M1, pour que les étudiants aient un premier aperçu plus précoce d'un laboratoire de recherche et de ses activités. J’ai pris, depuis 2007, la responsabilité du parcours « physique de l’environnement » de la filière L3. Mon activité d'enseignement traditionnelle a aussi été complétée par l'organisation des travaux pratiques en mer, qui avaient été abandonnés depuis quelques années. Dans le cadre du PRES Euro-Méditerranéen Genova-Torino-Toulon-Corse-Nice-Paris et de ma collaboration avec le CIMA de Savona (structure de l’université de Genova), je suis aussi responsable, depuis 2007, du cours d'océanographie pour les étudiants de 3ème année de l'école d'ingénieurs des sciences de l'environnement. Durant le second semestre, je fais plusieurs séjours au CIMA de Savona pour faire cet enseignement de 30 heures.

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3. Perspectives

3.1 Recherche La thématique de recherche que je souhaite développer dans les prochaines années concerne principalement les phénomènes de transport et les effets de la circulation et des interactions entre structures dynamiques de différentes échelles sur la dispersion. Les courants côtiers et leurs instabilités peuvent générer des structures tourbillonnaires qui accélèrent les phénomènes de transport horizontal et vertical et ont un impact important sur la dispersion et sur toute la chaîne biologique. Les observations en Méditerranée occidentale ont souvent montré la présence de structures de méso-échelle (Marullo et al. 1985, Millot, 1991, Gasparini et al., 1999, Robinson et al., 2001), souvent confirmée par les simulations numériques (Echevin et al., 2003, Mounier et al. 2005). Ces structures tourbillonnaires jouent un rôle essentiel dans les processus de transport et sur les propriétés statistiques du champ turbulent (Provenzale, 1999, Bracco et al, 2003, Koszalka, 2009) et sont associées à des structures complexes de vitesses verticales, qui peuvent avoir un rôle significatif sur la dynamique de l’écosystème (Falkowski, 1991, Lévy and Klein, 2004; Pasquero et al., 2005). On ne connaît théoriquement que peu de phénomènes physiques responsables de la génération des structures tourbillonnaires de méso-échelle. Mc Williams (1985) et Robinson (1983) détaillent un certain nombre de mécanismes de génération pour les tourbillons cohérents de sub et méso-échelle : courants barotropes ou instabilités baroclines, effets topographiques ou aux frontières (frottements lorsque le fluide contourne la topographie), étirement ou compression d’une

masse d’eau créant une vorticité potentielle, ajustements et mélanges dans une région frontale instable, effet bêta dû à la variation du paramètre de Coriolis avec la latitude, effet du rotationnel du vent (Orlic et al., 1994, Estournel et al., 2003). Le couplage du volet modélisation et du volet observations, poursuite naturelle de ma formation et de l’expérience acquise, me permettra de travailler sur deux axes thématiques principaux. Le premier concerne la mise en place d’un système d’observation intégré pour l’étude de la circulation et des processus qui y sont associés et la prévision du devenir des traceurs, avec de nombreuses applications, allant de la dispersion des nappes de pétrole et macro-déchets aux concentrations de gélatineux. Le deuxième axe concerne les techniques d’identification des barrières de transport, les études et paramétrisations des petites échelles, et l’assimilation. Les campagnes internationales d'observation DART (Dynamics Adriatic Real-Time) 05 et 06 en Mer Adriatique et MREA (Marine Rapid Environment Assessment) en Mer Ligure, organisées par l'OTAN (NURC) et le NRL, ont permis d'obtenir un nombre important de données in situ (bouées dérivantes, CTD, radars, gliders) et à partir de modèles (NCOM). Ce travail est en cours de publication et concerne la valorisation de l'ensemble des données lagrangiennes obtenus lors de DART05 et l’amélioration du modèle de prévision NCOM à partir de ces données à l'aide de la méthode de Lagrangian sub-grid-scale (LSGS, Haza et al., 2007). À partir des données lagrangiennes, réelles et synthétiques simulées par le modèle NCOM, on peut calculer des paramètres statistiques qui caractérisent le champ réel et celui simulé. Ces paramètres, temps de décorrelation lagrangien TL et la variance, sont obtenus à partir de la fonction d’auto-corrélation (Griffa et al., 1995). La correction de la prévision du

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modèle eulérien est faite en termes lagrangiens, le but n’étant pas de reproduire exactement la trajectoire réelle (tâche impossible), mais d’obtenir, à partir de la vitesse corrigée, une meilleure prévision du transport et de la dispersion du point de vue statistique. Ces résultats préliminaires ont été présentés lors du colloque LAPCOD 09 à La Londe les Maures (Annexe C.2).

En ce qui concerne l’expérience MREA07, une exploitation exhaustive (eulérienne et lagrangienne) des champs de courant radar, acquis à la cadence d'une demi-heure, est en cours pour décrire la dynamique dans la zone : étude des forçages atmosphériques, lien entre le vent et les courants de circulation à grande échelle, et tests des méthodes conceptuelles de traitement du transport lagrangien telles que Finite Size Lyapunov Exponent (FSLE).

Figure 10 : positions successives de flotteurs superposées aux structures FSLE calculées à partir des données radar

La comparaison des trajectoires réelles avec les structures cohérentes lagrangiennes (LCS) calculées à partir de FSLE a montré leur cohérence avec l’évolution spatiale et temporelle des champs FSLE. Les flotteurs suivent les barrières FSLE sans les traverser (Figure 10), ce qui confirme la correspondance de celles-ci avec les barrières naturelles de transport du fluide.

En ce qui concerne les nouveaux projets, ils s’inscrivent dans le cadre de la stratégie scientifique de la nouvelle équipe renforcée océanographique du laboratoire LSEET, et des projets nationaux et internationaux que nous avons soumis.

Le pivot central de tous ces projets est la mise en place d’une nouvelle expérience radar dans le Golfe des Iles d’Or. Cette expérience s’inscrit dans le cadre: du réseau national MOOSE qui vise à établir un observatoire pérenne de la Méditerranée Occidentale ; du projet ECCOP (soumission LEFE09) qui veut étudier la dynamique du Courant Nord et sa variabilité saisonnière ; du projet MedProgram TOSCA (Annexe C.4) pour le surveillance des zones côtières en cas de pollutions chimique (nappes de pétrole), biologique (méduses) ou par des macro-déchets. Outre l’aspect observation et description des courants de surface, l’idée est d’y coupler un modèle de transport lagrangien passif ou actif (en paramétrant un mouvement vertical des gélatineux, ou un effet de diffusion d’un produit chimique) pour prévoir la dispersion d’objets flottants.

La mise en place de ce système d’observation constitué d’un couple de radars côtiers, de flotteurs de surface, de gliders (dans le cadre de la collaboration avec LOCEAN et la DT-INSU), d’ADCP, couplé avec un modèle haute résolution (NEMO-GLAZUR) 1/64° en développement au LSEET (Langlais et al., 2009, Ourmières et al., 2009), permettra d’observer en quatre dimensions la zone concernée et d’évaluer les erreurs du modèle. Ces dernières pourront être corrigées en

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assimilant les données de vitesse obtenues par les positions successives des flotteurs (Molcard et al., 2004), et par les radars (Breivik and Saetra, 2000, Barth et al., 2008, Shulman and Paduan, 2008).

3.2 Enseignement

Le laboratoire proposera un nouveau sujet de thèse cette année sur la dynamique lagrangienne dans la zone concernée par notre système d’observation, le Golfe des Iles d’or, dont le titre est « développement de méthodologies pour la correction des modèles de prévision de circulation à l’aide de données in-situ lagrangiennes et de la courantologie radar : application au transport lagrangien. » Le travail proposé a pour objectif général d'améliorer les techniques théoriques de correction des vitesses (assimilation lagrangiennes [3,12], déploiement optimal [2,7], correction statistique LSGS, Haza et al., 2007, reconstruction du champ eulérien par approche variationnelle, [6]) et leurs applications. Dans un premier temps, l’étude portera sur le développement méthodologique de ces techniques avec application aux campagnes in-situ précédemment effectuées. Dans un deuxième temps, ce travail s'inscrira dans le cadre de l’expérience prévue dans le Golfe des Iles d’Or avec utilisation de radars côtiers et du modèle de circulation océanique national communautaire dans sa version côtière (NEMO-GLAZUR) développé au LSEET. Plus précisément, les différents objectifs et étapes du travail sont : - effectuer un travail de synthèse des informations disponibles (campagnes en Adriatique, dans le Golfe de La Spezia, dans le Golfe du Lion), permettant de quantifier les échanges et de décrire la dynamique du transport lagrangien (distribution de traceurs passifs, barrières de transport,..); - tester les techniques de reconstruction et de correction sur les expériences précédentes en

Adriatique avec les sorties des modèles de circulation et les données de flotteurs; - participer à la campagne utilisant les radars courantométriques, et mettre en place une stratégie d’observation pour l’analyse du transport (déploiement de flotteurs en groupe pour mesurer les phénomènes de petite échelle, route optimale des planeurs); - développer une méthodologie de correction des courants de surface fournis par le modèle en assimilant les données de surface disponibles (flotteurs et radar). L’assimilation des données radar se fera selon la méthode de Paduan and Shulman (2004), qui consiste à corriger la vitesse en surface avec une méthode d’assimilation classique (Optimal Interpolation, Kalman filter), et de projeter la correction dans la colonne d’eau avec des considérations physiques (conservation de l’énergie, transfert de quantité de mouvement de type Ekman) plutôt que statistiques (matrices de covariance). -analyser la circulation et étudier la variabilité du courant côtier. Enfin, en collaboration avec le CIMA de l’université de Savona et l’université de Barcelone, je souhaite proposer un projet Master Erasmus Mundus « ingénierie de l’environnement et développement durable», qui permettrait aux étudiants de compléter leur formation auprès d’universités partenaires, et de soutenir et d’accroître la visibilité et l’attrait d’un programme de troisième cycle européen. La phase initiale en cours consiste à mettre en place des semestres ad hoc dans chaque université ouverts aux étudiants européens : il s’agit donc de programmer un cursus avec des enseignements généraux et spécialisés, complémentaires de chaque université, et en langue anglaise.

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4. Discussion et Conclusion

Ce document présente mes activités professionnelles par ordre chronologique pour expliquer ma démarche scientifique et mes perspectives de recherche. Dans ce dernier chapitre, je vais relier entre elles les différentes activités de recherche présentées et les placer dans le contexte scientifique international. Les premiers modèles de circulations océaniques, avec la méthode aux différences finies appliquée aux équations primitives océaniques, initialement proposés par Bryan and Cox (1967) et Blumberg and Mellor (1983) ont été très controversés dans la communauté océanographique, traditionnellement expérimentale et théorique. On ne croyait pas aux résultats des simulations numériques et à la possibilité de prévoir les courants. Depuis, la communauté des modélisateurs n’a cessé de s’agrandir et de développer de nouvelles techniques numériques. Aujourd’hui l’océanographie est devenue une science qui allie la partie modélisation avec celles des observations et de la théorie: plus personne ne contredit l’utilité des modèles, tout en gardant à l’esprit leurs limites. Il existe de nombreux modèles de circulation générale, caractérisés par des différences de code (langage, optimisation calculatoire, parallélisation), de méthodes numériques et de discrétisation pour la résolution (différences finies, éléments finis, méthodes spectrales, sigma-layer ou density-layer), et de paramétrisations des processus à échelle inférieure à la grille (turbulence, mélange, dissipation). Depuis mes débuts en océanographie, j’ai pu appliquer un certain nombre de ces codes, et apprécier leurs différences.

Pour améliorer les prévisions proposées par les modèles, et pour corriger les erreurs dûes aux approximations discrètes des PDE, l’assimilation de données a fait son apparition dans les années 90, surtout en ce qui concernait les données altimétriques avec les nouveaux programmes des agences spatiales (Ezer and Mellor, 1997, Malanotte-Rizzoli and Tziperman, 1996, Pinardi et al., 1994, Demirov et al., 2004). L’assimilation des données lagrangiennes que j’ai développée se place dans ce contexte, alors que des programmes fournissent depuis une dizaine d’années des bases de données de courants en temps quasi-réel : - d’une part, à partir de bouées dérivantes développées dans le cadre de TOGA (Tropical Ocean Global Atmosphere), puis WOCE (World Ocean Circulation Experiment), et mises en œuvre en réseau au sein du programme SVP (Surface Velocity Program) fournissant des vitesses de surface ; - d’autre part, avec le déploiement de flotteurs profilants depuis le milieu des années 90 et structuré au sein du programme ARGO depuis 2001, offrant des déplacements de sub-surface entre deux profils. L’utilité de l’assimilation des vitesses était à prouver, vu le problème des échelles qui caractérisent les courants de surface. C’est en effet dans la couche de mélange de surface que les effets de la tension du vent et des flux à l’interface air-mer se ressentent le plus directement, et là où les effets de la turbulence sont le plus difficile à paramétrer dans les modèles. De plus, les flotteurs mesurent toutes les échelles du mouvement et contiennent les informations de la grande échelle jusqu’à leur taille physique (1m), alors que les modèles de circulation générale ont une résolution au mieux de l’ordre du kilomètre. Nous avons donc développé cette méthodologie qui garde le caractère lagrangien des données (contrairement aux précédentes tentatives dites pseudo-

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lagrangiennes qui assimilent directement les vitesses lagrangiennes dans le code eulérien) et en l’appliquant sur des modèles d’abord simples, et de plus en plus complexes. Taillandier and Griffa (2006) et Taillandier et al. (2006), ont montré par la suite que ces données de positions peuvent apporter une contribution importante à l’amélioration de la prévision des courants en temps quasi-réel dans les système de prévisions. Les nombreuses informations lagrangiennes sont ainsi optimisées dans le cadre de l’assimilation, mais peuvent aussi donner des informations directes sur la circulation et le transport. L’analyse statistique des données permet ainsi de décrire la circulation (Maurizi et al., 2004, Garraffo et al., 2001, Veneziani et al. 2004) et de caractériser certaines régions dynamiques en terme de structures cohérentes et de régimes sub ou super-diffusifs (Griffa et al., 2008), et de tester de nouvelles parametrisations du transport et des processus de dispersion en terme de modèles lagrangiens stochastiques. Ces modèles décomposent la vitesse d’une particule en une partie déterministe caractéristique de la large échelle, supposée connue (champ moyen du modèle ou à partir de données historiques), et une fluctuation décrite par une équation différentielle stochastique d’ordre plus ou moins élevé (Griffa, 2006), qui dépend des trajectoires. La prévision des trajectoires de particules est très importante pour des applications pratiques comme la recherche d’objets perdus en mer, l’étude des problèmes écologiques tel que la dispersion des larves ou des nappes de pétrole, ou bien encore pour la définition de système d’observation. Les structures lagrangiennes sont souvent chaotiques, même dans le cadre d’une circulation régulière et simple, ce qui rend la tâche de prévision d’une trajectoire très complexe. Un certain nombre de travaux ont

été publiés sur la correction de la prévision d’une trajectoire à l’aide de modèles stochastiques et d’observations lagrangiennes (Ozgokmen et al., 2001, Griffa et al., 2004, Piterbarg et al., 2007, Haza et al., 2007). Parallèlement à la prévision d’une trajectoire de particules, il est apparu plus stable et robuste d’identifier des structures lagrangiennes principales qui contrôlent le transport. La théorie classique des systèmes dynamiques a été récemment adaptée aux problèmes lagrangiens dans le cadre de séries temporelles finies, soit avec des méthodes d’identification d’attracteurs (Haller and Poje, 1998), soit avec les FSLE (Artale et al., 1997). C’est ici que se placent mes travaux sur l’identification des barrières de transport dans le cadre d’une stratégie de déploiement. Il reste cependant un point crucial qu’il convient d’approfondir. Une hypothèse forte de cette théorie dynamique est d’avoir des échelles de décorrélation lagrangiennes plus petites que celles eulériennes. Cette condition est souvent valable dans le cadre de la circulation de large échelle, mais peut être invalidée en circulation côtière, là justement où l’identification de barrières de transport est essentielle. La zone côtière est importante car elle domine l’intérêt économique de la mer, et la circulation y est complexe. En effet, la topographie et le trait de côte associés à la forte variabilité spatio-temporelle du vent, y génèrent des instabilités de courants, des jets côtiers et des tourbillons à large spectre d’échelles. Les processus de mélanges et les transferts d’énergie aux échelles de 100 à 50 km sont encore peu connus, mais caractérisent la circulation côtière. Les courants côtiers sont responsables du déplacement de matière sur de longues distances, et de forts gradients. C’est aussi là où les phénomènes d’upwelling enrichissent l’écosystème.

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Les modèles de circulation océanique ne permettent pas de résoudre toutes les échelles du mouvement concernées, surtout lorsque l’on s’intéresse à la circulation côtière, et l’observation nécessite une bonne couverture à très hautes résolutions spatiale et temporelle, pour capturer toutes les échelles de la dynamique. Ce besoin est partiellement comblé par l’utilisation de radars HF côtiers, qui permettent d’observer l’évolution temporelle des structures de la circulation de surface, tels que les tourbillons. Ces structures de méso-échelle (10-100 km) sont très énergétiques, intermittentes en temps et espace, peuvent se déplacer de plusieurs centaines de km pendant leur durée de vie, et jouer un rôle important en transportant chaleur, salinité et communautés planctoniques d’un environnement à un autre. L’assimilation simultanée de mesures radar et de données lagrangiennes dans les modèles de circulation régionale permettra sans aucun doute d’améliorer la compréhension et la prévision du transport en milieu côtier. L’observation des phénomènes de dissipation à petite échelle, soit en augmentant la résolution des radars, soit en déployant des groupes de flotteurs à petites distances, permettra aussi de progresser dans le domaine de la paramétrisation des coefficients de mélange et diffusion. Je porterai donc mes efforts de recherche de manière à atteindre ces objectifs.

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Légendes des Figures

Figure 1 : schéma d’assimilation lagrangienne : deux observations successives (A1, A2) permettent de corriger l’ébauche (première estimation du modèle C1) pour obtenir une estimation corrigée (C2) plus proche de l’observation. Figure 2 : expériences jumelles sur un modèle quasi-géostrophique: les données (en haut à gauche) proviennent de la simulation « réelle » (en haut à droite), et sont assimilées (en bas à gauche). L’évolution du modèle sans assimilation est montrée en bas à droite. Figure 3 : stratégie de déploiement optimal : un lâcher de bouées dérivantes le long des lignes de dispersion maximale permet un meilleur échantillonnage des structures dynamiques Figure 4 : « real-time optimal sampling » : la position des lâchers des flotteurs 14715 et 44924 est calculée à partir des lignes de FSLE des champs eulériens NCOM. Figure 5 : positions successives des flotteurs réels (rouge) superposées à celles « synthétiques » (noires) calculées à partir des champs radar. Figure 6 : observations radar instantanées au large de Marseille de la circulation de surface en décembre 2006. Figure 7 : distribution du paramètre de Okubo-Weiss (différence entre le carré de l’étirement moins le carré de la vorticité) pour une sortie du modèle MARS Le maximum de vorticité correspond, en taille et position, au tourbillon observé. Figure 8 : zoom instantané (8 novembre 2006) d’une sortie ROMS à 1km de résolution: paramètre de Okubo-Weiss superposé au champ de vitesse superficiel.

Figure 9 : champ de vitesse verticale le long d’une section méridionale (longitude 7.5E) du vortex.

Figure 10 : positions successives de flotteurs+ FSLE à partir des données radar

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