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ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE D’ALFORT Année 2010 APPLICATIONS THÉRAPEUTIQUES DE LA MITOMYCINE C EN OPHTALMOLOGIE VÉTÉRINAIRE THÈSE Pour le DOCTORAT VÉTÉRINAIRE Présentée et soutenue publiquement devant LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE CRÉTEIL le…………… par Édouard LAURENT Né le 15 juin 1983 à Paris 15 ème JURY Président : Professeur à la Faculté de Médecine de CRETEIL Membres Directeur : Sabine Chahory Maître de conférences à l’ENVA Assesseur : Jean-Marie Mailhac Maître de conférences à l’ENVA

APPLICATIONS THÉRAPEUTIQUES DE LA MITOMYCINE C EN ...technique de dacryocystorhinostomie associée à une correction des paupières .....90 B. Traitement de l’épiphora chronique

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ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE D’ALFORT

Année 2010

APPLICATIONS THÉRAPEUTIQUES DE LA MITOMYCINE C EN OPHTALMOLOGIE

VÉTÉRINAIRE

THÈSE

Pour le

DOCTORAT VÉTÉRINAIRE

Présentée et soutenue publiquement devant

LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE CRÉTEIL

le……………

par

Édouard LAURENT Né le 15 juin 1983 à Paris 15ème

JURY Président :

Professeur à la Faculté de Médecine de CRETEIL

Membres Directeur : Sabine Chahory

Maître de conférences à l’ENVA Assesseur : Jean-Marie Mailhac Maître de conférences à l’ENVA

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ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE D’ALFORT

Année 2010

APPLICATIONS THÉRAPEUTIQUES DE LA MITOMYCINE C EN OPHTALMOLOGIE

VÉTÉRINAIRE

THÈSE

Pour le

DOCTORAT VÉTÉRINAIRE

Présentée et soutenue publiquement devant

LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE CRÉTEIL

le……………

par

Édouard LAURENT Né le 15 juin 1983 à Paris 15ème

JURY Président :

Professeur à la Faculté de Médecine de CRETEIL

Membres Directeur : Sabine Chahory

Maître de conférences à l’ENVA Assesseur : Jean-Marie Mailhac Maître de conférences à l’ENVA

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REMERCIEMENTS

Au Professeur de la faculté de médecine de Créteil,

Qui m’a fait l’honneur de présider le jury de thèse.

Hommage respectueux.

A Mademoiselle Sabine Chahory,

Qui m’a fait l’honneur d’accepter la direction de cette thèse,

Pour sa disponibilité, sa patience sans limite et les conseils précieux qu’elle a su m’apporter

Un très grand merci

A Monsieur Jean-Marie Mailhac,

Qui a accepté de participer au jury de thèse

Merci

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Au Docteur Firmin Weverberg,

Qui m’a permis, grâce à ses cas, d’étoffer substantiellement le contenu de cette thèse

Un grand merci

Au Docteur Jean-Yves Douet,

Dont les nombreuses photographies m’ont permis d’illustrer avec qualité ce travail

Merci

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A mes parents, qui ont toujours cru en moi et qui m’ont donné tous les moyens de parvenir là

où je suis aujourd’hui. Merci pour tout votre amour.

A ma sœur Emilie, sans laquelle je ne serais pas ce que je suis, qui sait me comprendre,

m’écouter et m’accepter tel que je suis. Tu es toujours là pour moi et espère que la réciproque

est vraie. Je t’aime !

A mes grands-parents, encore présents ou non, dont j’espère faire la fierté.

A Clémentine, qui n’a jamais douté de ma réussite. Malgré la distance, je me sens plus proche

de toi que jamais. Tu es une véritable amie.

A Héloïse, la meilleure coloc’ qui soit. Comment se remémorer tous les moments magiques

qu’on a vécus tant ils sont nombreux !

A Mathilde. L’amitié facile et sans heurt existe, tu en es la preuve ! J’espère que la distance

ne nous éloignera pas !

Au reste du groupe 8, Gamète, Glagla, Caro, DDS, Flo, Snoop, Lulu, Cosette… vous m’avez

fait passer à l’école des moments qui font partie des meilleurs de ma vie… Merci

A BEP… Que dire… Une découverte tardive, mais des plus heureuses… Merci !

A tous mes poulots, en particulier la meilleure, Alix, mais aussi Coucou, Marie, Mayousse,

Hanna, Tom, Dudulle, Verdon, Estelle. Vous avez sacrément bien assuré la relève… bravo et

merci !

A Caro, Adeline, Anne-Claire… Merci de m’avoir fait rire !

A Louise, Tony et Toc Toc… Mes amis parisiens que je ne vois plus trop mais gardent une

grande place dans mon cœur…

A ceux que j’aurais pu oublier mais qui comptent ou ont compté pour moi…

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TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION...................................................................................................................... 5 

étude bibliographique................................................................................................................. 7I.  De l’utilisation de la mitomycine C et des antimitotiques en ophtalmologie,

 

1.  lassification des antimitotiques................................................................................. 7A.  Aspects pharmacologiques de l’utilisation des antimitotiques....................................... 7 

a. Les agents alkylants................................................................................................. 7C  

b. Les anti-métabolites ................................................................................................ 8   

c. Les antibiotiques antitumoraux ou inhibiteurs des topoisomérases ........................ 9   

d Les plantes alcaloïdes.............................................................................................. 9   

e Les hormones......................................................................................................... 10.   . 

f.  Les dérivés du platine ............................................................................................ 11 

2.  a mitomycine C....................................................................................................... 11 

a. Structure et mécanisme d’action ........................................................................... 12L  

b. Métabolisme (absorption, distribution, élimination) ............................................ 13   

c. Indications thérapeutiques autres qu’ophtalmologiques ....................................... 13    

d.  Effets indésirables ................................................................................................. 13 

B.  tilisation des antimitotiques en médecine vétérinaire ........... 15 

1. Modalités d’habillage................................................................................................ 15Aspects législatifs de l’u  

 2. Modalités de stockage des médicaments anticancéreux ........................................... 15  

3. Modalités de signalements des locaux et matériels liés à l’usage des  

anticancéreux.................................................................................................................... 16 

4. Modalités de préparation sous hotte à flux d’air laminaire d’un  

m dicament anticancéreux administré par voie intraveineuse ......................................... 16 é

5. Modalités d’administration des médicaments anticancéreux par voie  

intraveineuse..................................................................................................................... 17 

.  Modalités d’administration des médicaments anticancéreux par voie  

n ratumorale .................................................................................................................... 176i

C.  itotiques, leur utilisation en ophtalmologie humaine.................................... 18t  Les antim

1.  harmacocinétique oculaire de la mitomycine C et du 5-Fluorouracil ..................... 18 

a. La mitomycine C ................................................................................................... 18P     

b.  Le 5-Fluorouracil................................................................................................... 18 

la m tomycine C ............................................................................................................... 192. Présentation et préparation en vue d’une utilisation ophtalmologique de  

3.  tilisation adjuvante à une chirurgie ........................................................................ 19i  

a. Dans la chirurgie du glaucome .............................................................................. 19U  

b. Dans la chirurgie des voies lacrymales ................................................................. 20   

c. Dans la chirurgie du ptérygion .............................................................................. 22    

d. Dans la chirurgie réfractive ................................................................................... 24 

4.  tilisation dans le traitement des tumeurs oculaires................................................. 25   

a. Néoplasies squameuses de la surface oculaire ...................................................... 25U   

b. Tumeurs mélanocytaires ....................................................................................... 27

    

1.  Application au glaucome des carnivores................................................................... 33 

 

5.  omplications oculaires associées à l’utilisation d’anti-métabolites ........................ 28   

a. Dans les chirurgies oculaires ................................................................................. 28C   

b.  Dans le cas de tumeurs oculaires........................................................................... 31 

. Mitomycine C versus 5-fluorouracil ......................................................................... 32 

6D.  Les antimitotiques, leur utilisation en ophtalmologie vétérinaire ................................ 33

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a. De la clinique et de l’étiopathogénie du glaucome des carnivores ....................... 33    

c. Traitement chirurgical du glaucome...................................................................... 44b. Traitement médical du glaucome .......................................................................... 40 

2.  pplication aux tumeurs de l’œil et de ses annexes.................................................. 53   

a. Rappels anatomiques ............................................................................................. 53A  

b. Les tumeurs des Ruminants................................................................................... 54   

c. Les tumeurs du Cheval .......................................................................................... 57   

d. Les tumeurs des Carnivores .................................................................................. 59      

e.  Traitement des tumeurs ......................................................................................... 64 

chirurgicales en ophtalmologie vétérinaire .............................................................................. 79II.  pplication clinique de l’utilisation de la mitomycine C à deux techniques A

A.  Le symblépharon du chat ............................................................................................. 79 

1. onnées cliniques ..................................................................................................... 79 

 2.  tude clinique............................................................................................................ 83

D  

a. Matériel et méthode............................................................................................... 83E  

b. Résultats ................................................................................................................ 86      

c.  Discussion.............................................................................................................. 88 

technique de dacryocystorhinostomie associée à une correction des paupières .................. 90B.  ent de l’épiphora chronique chez les carnivores domestiques : une Traitem

1.  onnées cliniques ..................................................................................................... 90 

a. L’épiphora chronique ............................................................................................ 90D   

b. Anatomie des voies lacrymales d’excrétion.......................................................... 90 

2.  tude clinique............................................................................................................ 92   

a. Matériel et méthode............................................................................................... 92E  

b. Résultats ................................................................................................................ 97    

c.  Discussion.............................................................................................................. 98  

CONCLUSION ...................................................................................................................... 101 

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TABLE DES FIGURES

Figure 1 : Structure chimique de la mitomycine C………………………………………..

Figure 2 : Cornée verticillée, aspect visible à la lampe à fente…………………………...

Figure 3 : Trépanation sclérale avec iridectomie périphérique…………………………...

Figure 4 : Temps opératoire de la sclérotomie avec cyclodialyse et iridencleisis………...

Figure 5 : Voies d’évacuation de l’humeur auqueuse après trabéculectomie…………….

Figure 6 : Résection pentagonale…………………………………………………………

Figure 7 : Traitement chirurgical classique du symblépharon……………………………

Figure 8 : Voies lacrymales d’excrétion…………………………………………………..

Figure 9 : Technique de Celsus-Hotz……………………………………………………..

Figure 10 : Technique de Celsus-Hotz modifiée………………………………………….

Figure 11 : Technique de Bigelbach………………………………………………………

Figure 12 : Technique de forage de la fosse lacrymale lors de dacryocystorhinostomie…

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TABLE DES PHOTOGRAPHIES Photo 1 : Congestion veineuse épisclérale……………………………………………….

Photo 2 : Œdème cornéen et mydriase glaucomateuse…………………………………..

Photo 3 : Ectasie sclérale………………………………………………………………...

Photo 4 : Sub-luxation du cristallin avec croissant aphaque…………………………….

Photo 5 : Cyclocryothérapie……………………………………………………………..

Photo 6 : Paupières, cornée et conjonctive d’un chien sain……………………………...

Photo 7 : Un symblépharon (adhérences entre la conjonctive paloébrale et la membrane

nictitante) ………………………………………………………………………………..

Photo 8 : Un symblépharon (adhérences entre la membrane nictitante, la cornée et les

conjonctives palpébrales) ………………………………………………………………..

Photo 9 : Un symblépharon (adhérences entre la membrane nicitante et la conjonctive

bulbaire) …………………………………………………………………………………

Photo 10 : Dissection des adhérences et ablation de la fibrose………………………….

Photo 11 : Kératectomie…………………………………………………………………

Photo 12 : Application per-opératoire de mitomycine C………………………………...

Photo 13 : Adhérences des paupières et de la membrane nictitante et fente palpébrale

réduite…………………………………………………………………………………....

Photo 14 : Persistance d’une adhérence de la membrane nictitante et fente palpébrale

un peu plus courte que sur l’œil adelphe………………………………………………...

Photo 15 : Adhérences et fibrose très importantes sur les deux yeux, aveugles…………

Photo 16 : Une adhérence de la membrane nictitante persiste mais vision recouvrée sur

l’œil droit………………………………………………………………………………...

Photo 17 : Fistulisation opératoire……………………………………………………….

Photo 18 : Radiographie de contrôle avec injection de produit de constraste…………...

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INTRODUCTION

La mitomycine C est une molécule très utilisée en médecine humaine. Son utilisation, que ce soit en tant que molécule principale de chimiothérapie dans le traitement de tumeurs ou bien en tant qu’agent adjuvant à une chirurgie d’exérèse, est très répandue. On sait de plus que la plupart des techniques vétérinaires sont empruntées à la médecine humaine après adaptation à la physiologie animale. Ainsi, on verra dans quelle mesure la mitomycine C pourra être utilisée en médecine vétérinaire et plus particulièrement en ophtalmologie car on sait que ce domaine est un secteur en pleine expansion et que l’attente des clients est de plus en plus importante. Ainsi, cet exposé traitera des diverses utilisations thérapeutiques de la mitomycine C en ophtalmologie vétérinaire. On développera ainsi dans un premier temps, grâce à une revue bibliographique, les différents aspects de l’utilisation de la mitomycine C, aussi bien pharmacologiques que législatifs, ses diverses utilisations en ophtalmologie humaine ainsi que celles calquées dans le domaine vétérinaire. Dans une seconde partie, on abordera, grâce à deux séries de cas, deux exemples particuliers de l’utilisation de la mitomycine C en ophtalmologie vétérinaire, celui du traitement du symblépharon du chat et celui du traitement de l’épiphora chronique chez les carnivores domestiques.

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I. De l’utilisation de la mitomycine C et des antimitotiques en ophtalmologie, étude bibliographique

A. Aspects pharmacologiques de l’utilisation des antimitotiques

Les médicaments utilisés en médecine vétérinaire comme des antimitotiques sont tous des médicaments que l’on peut utiliser dans le cadre d’une chimiothérapie. On les classe habituellement selon le mécanisme d’action pharmacologique et selon leur famille chimique ; on obtient alors une classification pharmaco-chimique.

1. Classification des antimitotiques

a. Les agents alkylants

i. Molécules

La famille des agents alkylants est représentée principalement par les moutardes azotées ; cyclophosphamide, chlorambucil, melphalan, busulfan et ifosfamide. Cependant, il existe d’autres médicaments classés comme agents alkylants tels les nitrosurées ; la carmustine, la fotémustine, la streptozocine, les dérivés de la tétrazine ; la DTIC ou dacarbazine, les aziridines ; la thiotépa et la mitomycine C (MMC), et les agents alkylants non classiques comme la procarbazine et l’héxaméthylmélamine [21, 86].

ii. Mécanisme d’action

Les moutardes azotées agissent en créant des ponts entre les brins d’ADN, en particulier sur la position N7 de la guanine. Ils ne sont pas dépendants de la phase du cycle cellulaire et sont donc actifs pendant la plupart des étapes du cycle cellulaire. Les nitrosurées, les dérivés de la tétrazine et les agents alkylants non classiques agissent aussi en formant des liaisons covalentes entre brins d’ADN mais surtout sur la position O6 de la guanine [11, 86].

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iii. Effets secondaires

Les effets secondaires les plus couramment observés en médecine vétérinaire sont une myélosuppression, une toxicité gastro-intestinale, et des cystites hémorragiques stériles (le cyclophosphamide et l’ifosphamide sont donnés avec un protecteur vésical (mesna = sulfonate sodique de 2-mercaptoéthane (Mistabron®) afin d’éviter des atteintes urothéliales [76]).

b. Les anti-métabolites

i. Molécules

Les médicaments anti-métabolites sont représentés par les antifolates ; le méthotrexate, les antipuriques ; l’azathiprine, la mercaptourine, la thioguanine et les antipyrimidiques ; la cytosine arabinoside, la gemcitabine, la cytidine fluorée et le 5-fluorouracil (5-FU). La L-asparaginase est un autre anti-métabolite dont l’utilisation est courante.

ii. Mécanisme d’action

Ils agissent pendant la phase S du cycle cellulaire, généralement en imitant et en prenant la place des purines et pyrimidines normales qui sont le bloc fondateur de l’ADN [76, 86]. La L-asparaginase est utile car c’est une enzyme qui inhibe les cellules de lymphome avec une spécificité absolue pour l’acide aminé asparagine pré-formé. Elle épuise les cellules cancéreuses sans affecter les cellules normales qui peuvent fabriquer de l’asparagine à partir d’autres acides aminés, tandis que les cellules de lymphome en sont généralement incapables [76].

iii. Effets secondaires

Les effets secondaires les plus courants sont la myélosuppression et la toxicité gastro-intestinale (en particulier avec le méthotrexate [76]) en médecine humaine et vétérinaire [11, 86].

iv. Molécules utilisées en pratique vétérinaire

L’agent le plus récent utilisé en médecine vétérinaire est la cytidine fluorée, analogue de la gemcitabine.

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c. Les antibiotiques antitumoraux ou inhibiteurs des topoisomérases

i. Molécules

La doxorubicine, la daunorubicine, l’épirubicine, l’idarubicine, la mitoxantrone et la bléomycine sont des représentants particulièrement puissants de cette famille.

ii. Mécanisme d’action

Ils agissent en s’intercalant dans l’ADN et en interférant avec les fonctions de la topoisomérase. La présence de l’antibiotique anti-tumoral dans la structure de l’ADN conduit à l’échec de réplication de l’ADN, à la production de protéines dénaturées par une transcription défectueuse d’ARNm, et à une cassure des bras chromosomiques due à une défaillance dans le déroulement de l’ADN via la topoisomérase.

iii. Effets secondaires

Les effets secondaires les plus courants en médecine vétérinaire sont la myélosuppression, des signes gastro-intestinaux, cardiaques (doxorubicine), pulmonaires (bléomycine), et rénaux (doxorubicine chez le chat), des chocs anaphylactiques et des alopécies [76].

iv. Molécules utilisées en pratique vétérinaire

La doxorubicine est la molécule la plus utilisée en médecine vétérinaire, en particulier dans le traitement du lymphome malin et des carcinomes mammaires.

d. Les plantes alcaloïdes

i. Molécules

Les principes actifs de cette famille sont dérivés de la pervenche (Vinca rosea) et de la podophylle (Podophyllum peltratum). La vincristine et la vinblastine sont les plus couramment utilisées ; de nouvelles molécules comme le téniposide, l’étoposide et la vinorelbine sont d’utilisation courante en médecine humaine mais encore peu utilisées en cancérologie vétérinaire. L’utilisation de nouvelles molécules de la classe des taxanes (stabilisants du fuseau) comme le paclitaxel et le docétaxel, très efficaces en médecine humaine, est en cours d’exploration en médecine vétérinaire. Ils sont dérivés de l’écorce et des aiguilles d’If du Pacifique (Taxus brevifolia). Cependant, les taxanes causent couramment des chocs anaphylactiques en raison de l’utilisation de crémophor EL pour mettre en solution le mélange de molécules qui ne sont

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pas hydrosolubles. Une prémédication minutieuse de stéroïdes et d’antihistaminiques doit donc être administrée en complément [76].

ii. Mécanisme d’action

Ces molécules sont des poisons du fuseau, actifs dans les phases G2 et M de la division cellulaire (vinca-alcaloïdes, taxanes) ou sont des agents inhibiteurs de la toposiomérase (téniposide, étoposide).

iii. Effets secondaires

La toxicité associée à la vincristine est mineure, les réactions périvasculaires représentant le principal danger. La vinblastine a un effet myélosuppresseur supérieur à celui de la vincristine. Cependant tous les composés de cette classe présentent le danger de myélosuppression. Les chocs anaphylactiques sont les principaux dangers de l’administration de taxanes bien qu’un risque de myélosuppression et de toxicité gastro-intestinale existe en médecine vétérinaire [76].

e. Les hormones

i. Molécules

Les hormones les plus utilisées, notamment en médecine vétérinaire, sont les corticostéroïdes, indiqués dans le traitement des mastocytomes, des lymphomes et des leucémies lymphoïdes [11, 76]. Elles sont utilisées de manière palliative dans certaines tumeurs ou de manière adjuvante à une autre chimiothérapie [76].

ii. Mécanisme d’action

Le mécanisme d’action par lequel les stéroïdes détruisent les cellules cancéreuses n’est pas certain ; une action sur le transport de nutriments aux cellules altérées, une induction de l’apoptose et de la différenciation cellulaire sont avancées [11].

iii. Effets secondaires

Des effets sur la fonction osseuse, oculaire ou des perturbations du métabolisme endocrinien (diabète, syndrome de Cushing iatrogène) sont les effets indésirables observés le plus couramment en médecine vétérinaire [11, 76].

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f. Les dérivés du platine

i. Molécules

Cisplatine et carboplatine, efficaces et de bonne innocuité, sont les deux molécules dont l’utilisation est la plus répandue en particulier, en médecine humaine, dans le traitement des carcinomes testiculaire, ovarien, vésicaux, pulmonaire ou thyroïdien, des neuroblastomes et ostéosarcomes [21].

ii. Mécanisme d’action

Ils forment des ponts entre les brins d’ADN, généralement sur la guanine [76].

iii. Effets secondaires

La toxicité principale du cisplatine est son effet néphrotoxique ; il doit être complémenté par une fluidothérapie diurétique adaptée. Le carboplatine, non néphrotoxique, est tout de même éliminé par voie rénale donc son utilisation doit être raisonnée sur des patients présentant une insuffisance rénale modérée. Le cisplatine est contre-indiqué chez le chat ; il cause des oedèmes pulmonaires graves dans cette espèce [76].

iv. Molécules utilisées en pratique vétérinaire

Cisplatine et carboplatine sont tous deux utilisés assez largement en médecine vétérinaire. Le cisplatine est le traitement de choix de l’ostéosarcome canin et est indiqué pour les carcinomes vésicaux et les mésothéliomes (par voie locale) [11]. En plus d’avoir les mêmes indications que le cisplatine, le carboplatine est la molécule de choix pour les traitements intratumoraux [11, 76].

2. La mitomycine C

La mitomycine C est un antibiotique isolé de Streptomyces caespitosus par Wakaki et al., en 1958. C’est un agent alkylant bioréducteur qui subit des réductions métaboliques qui l’activent. Ses effets cytotoxiques, incluant la formation de ponts entre les brins d’ADN, sont dépendants de la tension en oxygène. Elle est communément utilisée de manière systémique pour le traitement de certains cancers mais a gagné en popularité depuis environ deux décennies comme thérapie adjuvante locale dans les chirurgies oculaires et des annexes [23]

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a. Structure et mécanisme d’action [1, 23]

La mitomycine C, poids moléculaire de 344 daltons, se présente sous une forme de poudre pourpre. Elle est stable à la chaleur, soluble dans l'eau et dans les solvants organiques et a un pic d'absorption unique à 365 nanomètres. La mitomycine C en solution est lentement inactivée par la lumière visible mais pas par les ultraviolets. Elle est extrêmement instable à pH acide et à des pH très basiques. Sa structure comprend un groupe aziridine, un groupement quinone et un groupement carbamate qui interviennent chacun dans son activité [1].

Figure 1 : Structure chimique de la mitomycine C

La mitomycine C, dont la structure chimique est représentée sur la figure 1, est habituellement classée comme agent alkylant. Tous les agents alkylants sont électrophiles et participent à la formation d’ions intermédiaires carbonium. Cela aboutit à la formation de liaisons covalentes à des composés nucléophiles, spécialement l’ADN, par alkylation de différents groupements fonctionnels. Après réduction chimique spontanée ou enzymatique de la quinone et perte du groupement méthoxy au niveau intracellulaire, la mitomycine C devient un agent alkylant bifonctionnel ou trifonctionnel. La réduction survient préférentiellement dans les cellules hypoxiques. La molécule inhibe la synthèse de l’ADN et crée des ponts entre les brins d’ADN sur les positions N6 de l’adénine et O6 et N7 de la guanine. De plus, elle cause des ruptures simple brin d’ADN et des cassures de chromosomes. Bien que l’alkylation de l’ADN puisse se produire à n’importe quel stade du cycle cellulaire, les conséquences biologiques sont plus sévères pendant la synthèse d’ADN. L’inhibition de la synthèse de l’ARN et des protéines est un mécanisme non spécifique de la toxicité cellulaire. Dans des conditions aérobies, comme cela prédomine dans l’utilisation ophtalmologique, les produits intermédiaires réagissent avec l’oxygène moléculaire et génèrent des radicaux libres causant la cytotoxicité via la peroxydation des lipides et les dégâts causés à l’ADN et aux protéines. C’est aussi un puissant agent radiosensibilisant, tératogène et carcinogène chez le rongeur [23]. Lors d’utilisation ophtalmologique, il a été montré que la mitomycine C peut inhiber la migration cellulaire et la production de matrice extracellulaire. Un important mécanisme

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d’action dans l’utilisation sous-conjonctivale est l’induction de l’apoptose des fibroblastes de la capsule de Tenon. L’induction de l’apoptose est liée aux dégâts causés à l’ADN par alkylation ou par dégradation des radicaux libres [55, 145]. Il est, de plus, connu cliniquement que les effets sur les tissus peuvent se produire plusieurs années après une seule application locale [82]. Le mécanisme exact de cet effet à long terme reste obscur.

b. Métabolisme (absorption, distribution, élimination) [1, 23, 86]

L’absorption digestive de la mitomycine C est variable, justifiant en utilisation systémique une administration intraveineuse. Elle disparait rapidement du sang avec une demi-vie de 25 à 90 minutes. La molécule se distribue largement, sauf dans le cerveau. Elle est inactivée par métabolisation ou conjugaison. Moins de 10% de la molécule active est excrété dans les urines ou la bile. La mitomycine C possède une demi-vie initiale de 5 minutes, correspondant à sa répartition plasmatique, puis de 55 minutes correspondant à son absorption par les protéines plasmatiques.

c. Indications thérapeutiques autres qu’ophtalmologiques [23]

La mitomycine C est surtout utilisée, en médecine humaine, en association au 5-Fluorouracil, au cisplatine ou à la doxorubicine dans le traitement des carcinomes du col utérin, du côlon, du rectum, du sein, de la vessie, de la tête et du cou ou du poumon. Il a aussi été montré une activité contre les lymphomes et les leucémies, particulièrement les leucémies granulocytiques chroniques. Il n’a par contre pas été montré d’effets dans les myélomes, où les réponses sont de courtes durées et compliquées par une toxicité. Lors des protocoles de chimiothérapie dans le traitement des adénocarcinomes du côlon et de l’estomac, la dose usuelle (6 à 10 mg/m2) peut être administrée en bolus intraveineux toutes les 6 semaines. La dose est ajustée en fonction de la récupération hématologique. Lors d’utilisation en perfusion intraveineuse, l’extravasation cause une lésion locale sévère. Elle peut aussi être utilisée en instillations locales (0,5 à 2 mg/ml) dans la vessie pour le traitement des carcinomes superficiels.

d. Effets indésirables [23, 86]

La toxicité de la mitomycine C par voie endovésicale est purement locale en dehors des manifestations allergiques, puisque son poids moléculaire supérieur à 200 n'autorise pas son passage dans le sang. Même au cours d'utilisation précoce post-opératoire il n'a pas été noté de taux pouvant entraîner une myélosuppression. Les effets secondaires de la mitomycine C par voie intraveineuse sont la toxicité médullaire avec une myélosuppression caractérisée par une leucopénie et une thrombocytopénie marquées ; cet effet peut être retardé et cumulatif, la récupération n’intervenant qu’au bout de 6 à 8 semaines de pancytopénie. Des nausées, des vomissements, des diarrhées, une dermatite, une stomatite, une fièvre et un malaise sont aussi décrits en médecine humaine. Un syndrome hémolytique-urémique représente l’effet secondaire le plus dangereux de la mitomycine C, et il semble résulter d’une atteinte endothéliale induite par cette molécule. Des patients ayant reçu une dose totale

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supérieure à 50 mg/m2 ont présenté une hémolyse aiguë, des anomalies neurologiques, une pneumonie interstitielle, une fibrose pulmonaire (très rare) et une atteinte glomérulaire entraînant une insuffisance rénale. Enfin, elle peut potentialiser les effets cardiotoxiques de la doxorubicine quand elle lui est associée.

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B. Aspects législatifs de l’utilisation des antimitotiques en médecine vétérinaire

L’arrêté du 18 juin 2009 relatif aux bonnes pratiques d'emploi des médicaments anticancéreux en médecine vétérinaire a fixé un nouveau cadre législatif assez strict. En voici les principales modalités d’application [7].

1. Modalités d’habillage

Elles concernent le personnel réalisant ou participant aux opérations suivantes : reconstitution, dilution, administration, contention de l’animal traité, soins à l’animal traité, élimination des déchets, gestion des excréta et nettoyage et décontamination des locaux. Avant chacune des opérations citées, les montres, bracelets et bagues sont retirés avant de revêtir l’équipement de protection, un lavage des mains est effectué et la personne réalisant ou participant à la préparation, à la dilution, à l’administration du médicament anticancéreux devra porter une blouse (à usage unique, à fermeture dans le dos, à manches longues et poignets serrés), un masque, une paire de lunettes de protection, une coiffe, une paire de gants stériles.

2. Modalités de stockage des médicaments anticancéreux

Les modalités de conservation des médicaments définies par les fabricants, relatives aux conditions de température (réfrigération), de lumière (obscurité), de délai de péremption après ouverture doivent être respectées. Les médicaments anticancéreux doivent être rassemblés à l’écart des autres, en utilisant des rangements cloisonnés, par exemple des casiers en plastique. Les anticancéreux à conserver au froid doivent être rangés dans un réfrigérateur dédié aux médicaments (il est interdit d’entreposer de la nourriture et de boisson dans le même réfrigérateur que celui dédié aux médicaments). Il faut de plus établir une liste exhaustive des médicaments anticancéreux détenus et la contrôler régulièrement. Enfin, il faut placer tout flacon contenant un médicament anticancéreux reconstitué dans un sac hermétique de type Zyploc et apposer sur ce sac hermétique une étiquette mentionnant la date de reconstitution, la nature du produit ainsi qu’une mise en garde de sécurité.

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3. Modalités de signalements des locaux et matériels liés à l’usage des anticancéreux

Dès la préparation des locaux et pendant la durée des opérations de reconstitution, de préparation, de transfert et d’administration des médicaments anticancéreux, et au cours de l’hospitalisation de l’animal traité, les pièces utilisées, cages, et autres matériels doivent porter un signalement particulier. Les pièces et locaux doivent porter la mention « manipulation de produits très actifs, entrée réglementée » et les cages et boxs utilisés pour le maintien hospitalier des animaux traités, la mention « chimiothérapie : contact interdit pour les personnes non équipées ».

4. Modalités de préparation sous hotte à flux d’air laminaire d’un médicament anticancéreux administré par voie intraveineuse

La préparation a lieu au sein de la pièce réservée à la reconstitution, dans une hotte à flux d’air laminaire vertical. Le lieu où va s’effectuer la reconstitution et/ou la préparation est clairement identifié et son accès est interdit pendant cette phase. Un lavage des mains à l’eau et au savon est effectué avant et après chaque manipulation. Ce lavage ne se substitue en aucun cas au port de gants. La hotte doit être mise en route pendant 10 minutes avant d’introduire le matériel nécessaire à la préparation. Puis il faut introduire stérilement le matériel nécessaire à la préparation, en ayant pensé à mettre à tremper au préalable les flacons et ampoules dans un récipient propre contenant une solution d’alcool à 70°. Enfin, il faut mettre des gants stériles et entrer les mains sous la hotte et ne plus les sortir de dessous la hotte. En vue de la reconstitution du médicament commercialisé sous forme de poudre ou de lyophilisat, prélever le volume de solvant nécessaire à l’aide d’une seringue à embout verrouillable, chasser les bulles d’air en aspirant de l’air dans la seringue et en tapotant délicatement pour rassembler les bulles et les chasser dans une compresse, entourer le bouchon du flacon contenant la poudre ou le lyophilisat avec une compresse stérile, introduire lentement le volume de solvant le long des parois du flacon, en entourant le col du flacon et l'aiguille d'une compresse stérile afin d'éviter un aérosol médicamenteux dans l'atmosphère, retirer la seringue et l’aiguille en entourant avec une compresse la partie supérieure du flacon, agiter le flacon par des mouvements rotatifs horizontaux pour bien dissoudre le lyophilisat et essuyer l'extérieur du conditionnement final à l’aide d’une compresse humide, pour enlever toute contamination accidentelle.

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5. Modalités d’administration des médicaments anticancéreux par voie intraveineuse

Pour ce faire, il faut fixer un cathéter intraveineux à l’animal, vérifier l’intégrité / la perméabilité et la mise en continuité avec la veine en injectant un bolus de NaCl 0,9 % avant toute administration de médicament anticancéreux, administrer la solution médicamenteuse en se connectant au cathéter posé sur l’animal en adaptant la vitesse d’administration aux recommandations du laboratoire et au volume à injecter et rincer la tubulure de perfusion à l’aide d’un volume de NaCl 0,9 % supérieur au volume résiduel présent dans la tubulure, avant toute déconnexion de l’animal.

6. Modalités d’administration des médicaments anticancéreux par voie intratumorale

Tout d’abord, la pose d’un cathéter intraveineux est obligatoire. La contention chimique choisie doit permettre d’assurer une sécurité maximale pour le vétérinaire, l’animal et le matériel ; compte tenu des risques liés à la manipulation des produits, les carnivores domestiques doivent systématiquement être anesthésiés, les équidés doivent être systématiquement tranquillisés ou, de manière préférentielle, anesthésiés. Puis, une préparation chirurgicale du site d’injection est réalisée. A l’aide d’une aiguille de gros calibre montée sur une seringue à embout verrouillable, la solution médicamenteuse est administrée suivant des lignes traçantes préalablement dessinées sur la tumeur. Chaque injection puis chaque retrait d’aiguille est protégée en entourant avec une compresse le point de pénétration de l’aiguille. Enfin, le protocole des soins post-intervention doit tenir compte de la localisation de la tumeur, du bien être de l’animal, de la protection des personnes en contact avec l’animal. Les différents aspects législatifs concernant l’utilisation des médicaments anticancéreux en médecine vétérinaire en font des traitements lourds nécessitant un guide de bonne pratique et des structures adaptées.

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C. Les antimitotiques, leur utilisation en ophtalmologie humaine

1. Pharmacocinétique oculaire de la mitomycine C et du 5-Fluorouracil

a. La mitomycine C [1]

L’étude de la pharmacocinétique oculaire chez les lapins, avec une injection sous-conjonctivale de mitomycine C (0,2 mg/ml), a montré une demi-vie de 0,18 à 0,3 heure pour la conjonctive, 0,2 à 0,45 heure pour la sclère et un taux minimal de mitomycine C dans les tissus oculaires au bout de 2 à 3 heures [73]. Elle est détectable dans l’humeur aqueuse en quelques minutes après une application externe lors de trabéculectomie [132]. La concentration dans l’humeur aqueuse est plus importante après une injection sclérale qu’après une injection épisclérale. Irriguer la surface oculaire avec une solution saline, type sérum physiologique, après une application de mitomycine C réduit au cinquième la concentration initiale du médicament dans la sclère et au quinzième dans la conjonctive ; cela ne change cependant pas le temps de demi-vie du médicament [73].

b. Le 5-Fluorouracil [2]

Les études de culture tissulaire ont montré que la concentration de 5-FU requise pour induire, chez le lapin, une inhibition de la prolifération fibroblastique conjonctivale est de 0,2 µg/ml seulement. Après une unique injection sous-conjonctivale de 5-FU, le pic de concentration dans l’humeur aqueuse est de 69,5 µg/ml et la concentration 12 heures après l’injection est de 0,9 µg/ml. La concentration dans l’humeur aqueuse est plus importante après une application topique qu’après une injection sous-conjonctivale. Après une unique injection sous-conjonctivale de 5-FU chez le lapin, la concentration de 0,2 µg/ml est enregistrée pendant seulement 12 heures dans l’humeur aqueuse alors que la même concentration inhibitrice de la prolifération fibroblastique est enregistrée pendant 96 heures dans la cornée, la sclère et la conjonctive. De plus, il n’y a pas de différence dans l’effet anti-prolifératif du 5-FU sur les fibroblastes de la capsule de Tenon lorsqu’on applique une solution à 50 mg/ml pendant 1 minute ou 5 minutes. Les injections intravitréennes (1 mg) chez le lapin aboutissent à une concentration intraoculaire de 5-FU plus soutenue qu’avec une injection sous-conjonctivale, ce qui pourrait justifier son usage lors de chirurgie du vitré. A cette concentration, le médicament n’est pas toxique pour la rétine ou le nerf optique.

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2. Présentation et préparation en vue d’une utilisation ophtalmologique de la mitomycine C

En France, l’utilisation ophtalmologique se fait à partir de sa présentation (Amétycine ®) contenant 10 mg ou 20 mg de mitomycine C. En ophtalmologie, on utilisera préférentiellement le dosage à 10 mg. Plusieurs préparations sont couramment utilisées :

- Préparation de collyres dilués à la concentration de 0,02% (0,2 mg/ml) et 0,04% (0,4 mg/ml) [23, 38]

- Utilisation per-opératoire : application en une seule fois d’une solution diluée dans 25 à 50 ml de Ringer, soit 0,4 et 0,2 mg/ml, par une microsponge sur le site opératoire pendant trois minutes, suivie d’un abondant lavage au sérum physiologique [23, 38]

- Injections sous-conjonctivales d’une solution à 0,2% possibles : ce mode d’administration reste exceptionnel [38].

3. Utilisation adjuvante à une chirurgie

a. Dans la chirurgie du glaucome

La chirurgie filtrante est généralement indiquée chez les patients dont l’hypertension oculaire ne peut être contrôlée par un traitement médical et/ou un traitement de cyclocoagulation La cicatrisation conjonctivale et la cicatrice postopératoire sont les deux facteurs dont le contrôle est primordial pour atteindre la pression intra-oculaire finale espérée et donc deux acteurs du succès d’une chirurgie filtrante. Les individus ont des réponses variables de cicatrisation conjonctivale liées à différents facteurs connus tels que des chirurgies oculaires antérieures, l’âge, l’inflammation oculaire, la présence de néovascularisation et l’origine ethnique des individus. L’utilisation d’agents antimitotiques pour prévenir la cicatrisation postopératoire d’une chirurgie filtrante a été l’une des plus grosses avancées dans la chirurgie du glaucome. Avec la mise en évidence récente de la nécessité d’avoir un objectif de PIO plus bas que ce qu’il était jusqu’à présent recommandé, la modulation de la phase de cicatrisation après une chirurgie est devenue cruciale [90]. L’utilisation d’agents antimitotiques pour inhiber la fonction et la réplication fibroblastique est importante car elle permet d’obtenir une filtration précoce et d’améliorer la survie de la bulle de filtration.

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i. De la mitomycine C

La MMC est efficace pour augmenter le succès d’une chirurgie du glaucome grâce à l’inhibition de la cicatrisation, en particulier grâce à l’inhibition des fibroblastes et à l’inhibition de la réplication et de la croissance endothéliale [82]. En 1983, Chen et al. fûrent les premiers à utiliser la MMC en adjonction à une chirurgie de ptérygion [25]. Plus tard, ils appliquèrent aussi cette molécule par voie sous-conjonctivale sur le site de filtration pendant une trabéculectomie sur un œil à haut risque. Bien qu’il n’y ait pas eu de consensus en ce qui concerne sa dose optimale et sa méthode d’application, la MMC a été utilisée de plus en plus, non seulement sur des yeux à hauts risques quant à l’échec de la bulle de filtration, mais aussi sur des yeux considérés à faible risque d’échec. Cette pratique a été conduite en partie par le désir d’atteindre un objectif de PIO bas, et de ce fait augmenter les chances de garder un champ visuel stable. En plus de son utilisation adjuvante à une trabéculectomie, la MMC est utilisée dans les chirurgies combinées cataracte/glaucome, dans les chirurgies de glaucome congénital, dans les implants de drainage et dans la reprise de bulle de filtration ayant échoué [1].

ii. Du 5-Fluorouracil

L’effet localisé et ciblé sur les tissus exposés au 5-FU, sa courte demi-vie et sa facilité d’administration font aussi du 5-FU un bon anti-métabolite adjuvant aux chirurgies filtrantes de glaucome [1]. Un des premiers essais cliniques sur l’utilisation du 5-FU lors de trabéculectomie a été réalisé par Heuer et al. en 1984 [65]. Depuis, il a été utilisé fréquemment comme agent adjuvant per-opératoire ou postopératoire, même sur des yeux dont le risque d’échec chirurgical était faible. La plupart des chirurgiens l’utilise selon des bases empiriques et selon leur expérience personnelle car il n’y a pas de recommandations quant à la dose et au mode optimaux d’application. En plus de son utilisation adjuvante à une trabéculectomie, le 5-FU est utilisé dans les mêmes indications que celles de la MMC.

b. Dans la chirurgie des voies lacrymales

i. Dacryocystorhinostomie

A l’exception de modifications mineures, la DCR externe est toujours pratiquée selon la méthode décrite par Dupuy-Dutemps et Bourguet 1921 en utilisant une anastomose de muqueuses avec suture du volet muqueux au niveau de la conjonctive du canthus interne [35]. Le taux de réussite a augmenté depuis, grâce à une meilleure préparation préopératoire incluant une investigation radiologique du système naso-lacrymal, l’utilisation de matériel de suture résorbable et moins irritant et enfin des instruments chirurgicaux mieux adaptés. Le taux de réussite de la DCR est de 80 à 99% selon l’expérience du chirurgien [66]. L’obstruction de la jonction entre les canalicules lacrymaux et le sac lacrymal ainsi que la fermeture du site d’ostéotomie sont les deux causes les plus fréquentes d’échec de DCR. La

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prolifération d’un tissu fibreux et la formation d’un tissu de granulation pendant la phase de cicatrisation réduisent et compromettent l’aire du site d’ostéotomie conduisant ainsi à l’échec chirurgical. Le même processus de cicatrisation favorise aussi l’adhérence du site d’ostéotomie au septum et au cornet de la cloison nasale ou bien induit l’obstruction des canalicules communs. Linberg et al. ont montré qu’un trou de grande taille pratiqué pendant la chirurgie, peut être réduit à un trou de 2 mm de diamètre à peine après prolifération tissulaire et cicatrisation [92]. Le taux d’échec de DCR peut être significativement réduit si la prolifération fibreuse au site d’ostéotomie et au niveau du volet anastomosé est inhibée au moins partiellement par une thérapie adjuvante [1]. La MMC est appliquée sur le site d’ostéotomie et sur le volet anastomosé en vue de supprimer la réaction cicatricielle et la prolifération fibreuse. Les concentrations utilisées lors de chirurgies des voies lacrymales sont de 0,02% à 0,04%. Kao et al. fûrent les premiers à utiliser la MMC sur une série de 14 patients qui subirent une DCR avec ou sans MMC [71]. Au suivi à 6 mois, la taille du trou d’ostéotomie était plus grande de manière significative chez les patients chez qui de la MMC avait été utilisée par rapport aux patients qui n’en avaient pas reçue. Une étude prospective randomisée a aussi montré une augmentation, à la fois de la taille du trou d’ostéotomie et de sa perméabilité avec l’utilisation de MMC lors de DCR externe [156]. Cependant, d’autres études n’ont pas montré de différences significatives dans le taux de réussite des DCR avec l’utilisation de MMC [91, 121]. Bien qu’il y ait peu de données et un manque certain d’études prospectives à long terme sur l’efficacité de la MMC dans les DCR, elle est couramment utilisée en pratique. La MMC a aussi été utilisée dans les DCR sous endoscopie avec des taux de réussite variables. Concernant le 5FU, nous ne disposons que de peu d’études cliniques évaluant son effet sur l’issue d’une chirurgie de DCR. Bien que certaines études montrent que le 5FU pourrait retarder ou prévenir l’obstruction du trou d’ostéotomie, d’autres tendent à démontrer qu’il n’y a pas de meilleurs résultats en terme de récidive [66]. De nombreuses interrogations sur l’utilisation des anti-métabolites lors de DCR restent sans réponse. Le manque d’études sur de larges échantillons randomisés avec un suivi à long terme empêche de tirer des conclusions claires quant aux taux de réussite, aux doses optimales, aux temps d’application et aux groupes de patients chez lesquels cette thérapie est réellement indiquée (le 5FU et la MMC doivent-ils être utilisés dans tous les cas ou uniquement chez les patients avec des facteurs de risque comme ceux dont la chirurgie du côté controlatéral a échoué ?)

ii. Autres chirurgies des voies lacrymales

Chez les patients présentant une obstruction congénitale ou acquise des canaux lacrymaux et chez les patients présentant une dacryocystite, l’intubation au silicone du système de drainage lacrymal est indiquée. La MMC a été utilisée comme adjuvant dans ces chirurgies sans nette amélioration du taux de réussite. La sténose des points lacrymaux peut être causée par de nombreux facteurs et différentes modalités de traitement ont été décrites. Lam et Tessler furent les premiers à décrire l’utilisation intéressante de la MMC comme agent adjuvant dans les procédures d’ouverture des points lacrymaux aux ciseaux [81]. Ma’luf et al. ont rapporté leur expérience chez 50 patients et ont montré que l’utilisation de la MMC comme agent adjuvant dans la procédure d’ouverture des points lacrymaux aux ciseaux avait une bonne innocuité et une bonne efficacité [94].

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c. Dans la chirurgie du ptérygion

Le ptérygion est une dégénérescence de la conjonctive qui produit un tissu fibrovasculaire envahissant la cornée superficielle. Cette pathologie de la surface oculaire est commune à travers le monde avec une prévalence augmentée dans les zones tropicales. La pathogénie du ptérygion est principalement l’exposition aux UV [129]. Il a été aussi proposé que l’évènement biologique initial dans la pathogénie du ptérygion est une altération des cellules souches limbiques due à une exposition chronique aux UV [79]. Le ptérygion est souvent asymptomatique et ne nécessite alors pas de traitement. Les indications les plus courantes pour le traitement sont l’esthétique et l’irritation chronique. De plus, le ptérygion peut causer un déficit visuel s’il est large, proche de l’axe visuel ou s’il induit un astigmatisme. Le traitement définitif pour le ptérygion est une résection chirurgicale mais la récidive est la complication majeure. Les techniques passées consistaient à retirer le ptérygion et laisser la conjonctive à nu. Cependant, le taux de récidive avoisinait les 30 à 90% [32]. Les modifications ultérieures ont consisté à utiliser une greffe conjonctivale suturée aux marges de l’excision. La récidive associée à cette technique était de 5-39% [26]. Les autres modalités de traitement, comme la radiothérapie, la greffe de membrane amniotique et la transposition de conjonctive limbique eurent des taux de réussite variables. La MMC fut utilisée comme adjuvant à la chirurgie du ptérygion en 1963 et c’est probablement l’anti-métabolite le plus utilisé pour prévenir le risque de récidive de cette chirurgie. Il peut être utilisé en per-opératoire ou en postopératoire et sa concentration varie de 0,1 mg/ml (0,01%) à 1 mg/ml (0,1%) [26, 44, 115, 137]. Le dosage de la MMC et la méthode d’administration sont des variables importantes quant au pourcentage de réussite après l’excision chirurgicale. Le type de ptérygion joue aussi un rôle important dans la récidive : elle est plus importante si le ptérygion a déjà récidivé que si c’est un ptérygion primaire. Une des études les plus anciennes sur l’utilisation postopératoire de la MMC dans la chirurgie du ptérygion est de Murakami et al. en 1967. Les études ont montré que l’instillation postopératoire de MMC à 0,02%, deux fois par jour pendant 5 jours est efficace et sans danger pour le traitement des ptérygions primaires [62]. Des concentrations plus élevées ont induit une toxicité ; des dommages irréversibles des tissus oculaires environnants et des complications visuelles importantes [137]. Une étude randomisée prouva qu’une faible concentration de mitomycine C (0,01%), utilisée pendant 5 jours en postopératoire était aussi efficace et ne montrait pas de complications majeures [41]. Le tableau 1 résume les différentes études sur l’utilisation postopératoire de la MMC.

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Tableau 1 : Comparaison des études sur la chirurgie du ptérygion avec MMC postopératoire Etude (année)

Nb. d’yeux

Type d’étude

Type ptérygion (nb. d’yeux)

Dose MMC (%)

Durée traitement

Temps suivi

Taux récidive Limites des études

Singh et al. (1988) [137]

62 Prospective, randomisée

Primaire (48) Récidivant (14)

0,1 vs. 0,04 vs. placebo

2 sem 23 sem

2,3% MMC 88,9% placebo

Suivi court

Hayasaka et al. (1988) [62]

99 Prospective, randomisée

Primaire 0,02 vs. Excsision vs. Radiation vs. 0,04

5 j 3-8 ans

Diminution récidive avec 0,02% MMC comparé à un témoin sans MMC

Frucht-Pery et Ilsar (1994) [41]

75 Prospective, randomisée, double aveugle

Primaire (56) Récidivant (19)

0,01 vs. 0,02 vs. Β irradiation

5 j 15 mois

8% avec 0,01 4% avec 0,02 20% avec irradiation

Suivi court

Avec l’apparition de complications jusqu’à 33 mois postopératoires, l’utilisation de MMC, ne peut pas être considérée comme réellement sure [123], d’autant plus que le chirurgien n’a pas de contrôle direct sur la concentration, la durée et la localisation de l’application de MMC. Ceci a mené à des recherches sur l’utilisation de MMC, dont le protocole d’utilisation per-opératoire est décrit plus haut, comme adjuvant lors de chirurgie de ptérygion. Toutes les études montrent une diminution significative des taux de récidive avec l’utilisation adjuvante de MMC. Les études comparant l’utilisation per-opératoire et postopératoire de MMC pour les chirurgies de ptérygion montrent qu’il n’y a pas de différence significative selon le type d’application [22, 115]. Les chercheurs ont comparé les faibles doses de MMC avec des greffes conjonctivales (avec ou sans transplantation de cellules souches limbiques), et des greffes de membrane amniotique et ont démontré que le taux de récidive est identique ou inférieur qu’avec la MMC [26, 93]. Cependant, ces techniques sont chronophages, requièrent une bonne expérience chirurgicale et une manipulation importante de la conjonctive ce qui peut conduire à une diminution du nombre de cellules souches réservées à la cornée. Comparée à ces techniques, l’utilisation de la MMC est plus simple, et en cas de récidive avec usage simple de la MMC, le traitement combinant conjonctive et cellules souches est toujours envisageable. La MMC peut aussi être utilisée comme thérapie adjuvante à une greffe conjonctivale ou de membrane amniotique dans les ptérygions primaires et récidivants avec des risques de récidive réduits [93]. Le 5FU a aussi été utilisé comme agent adjuvant topique per-opératoire lors de chirurgie de ptérygion et en injections postopératoires. L’utilisation du 5FU en topique n’a pas montré de bons résultats : le taux de récidive était de 25%, ce qui est plus important qu’avec les β irradiations seules. D’un autre côté, les injections sous-conjonctivales postopératoires (10 mg/ml) avec une dose totale de 1-3 mg de 5FU, montrèrent des résultats encourageants en ralentissant l’apparition de récidive d’un ptérygion après son excision chirurgicale. Dans une étude prospective, Akarsu et al. évaluèrent l’efficacité du 5FU per-opératoire (25 mg/ml pendant 3 minutes) sur un ptérygion primaire et l’effet d’injections sous-conjonctivales

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postopératoires de 5FU (2 à 4 semaines postopératoires) sur des ptérygions récidivants [3]. 28 yeux avec des ptérygions primaires subirent une excision avec 5FU per-opératoire et 25% présentèrent une récidive à 12 mois. Cependant, la taille du ptérygion récidivant était plus petite chez les patients qui avaient été traités avec injections postopératoires supplémentaires. Dans une récente étude prospective, randomisée, Prabhasawat et al. comparent l’efficacité du 5FU en injection sous-conjonctivale et de la triamcinolone dans la diminution de la progression d’une récidive de ptérygion [114]. 109 yeux avec des ptérygions en cours de récidive furent classés de manière aléatoire en trois groupes : un groupe contrôle, un second groupe reçoit du 5FU intra-lésionnel (5 mg par semaine pendant 2 semaines) et le troisième reçoit une injection unique de 20 mg de triamcinolone intra-lésionnelle. Les deux molécules furent efficaces dans la prévention de la récidive du ptérygion par rapport au groupe témoin, le 5FU ayant prévenu l’apparition d’une récidive sur 87% des yeux, sans qu’apparaissent d’effets secondaires majeurs. Les études montrent qu’une application unique per-opératoire de 5FU n’offre pas d’avantage en terme de prévention de récidive. Une injection intra-lésionnelle permet d’obtenir une concentration plus importante de la molécule, pendant une période plus longue directement dans la zone fibrovasculaire. Cela permet d’obtenir un meilleur effet inhibiteur et diminue le nombre de récidive. Bien qu’il n’y ait pas de dose optimale, de fréquence d’application ou de durée de traitement clairement définies, les injections postopératoires de 5FU (5mg) semblent être le seul moyen sûr et efficace pour le traitement des ptérygions récidivant précocement.

d. Dans la chirurgie réfractive

Le laser Excimer ou photokératectomie réfractive (PRK) est communément utilisé dans la correction de la myopie, l’hypermétropie et de l’astigmatisme [47]. Plus récemment, il a été largement remplacé par le laser de kératoplasties lamellaires réfractives (LASIK) avec lequel il y a moins de douleur et d’opacités cornéennes postopératoires [89]. L’utilisation de corticostéroïdes topiques est probablement le traitement le plus commun pour prévenir l’apparition d’opacités cornéennes mais il n’a pas réellement montré d’efficacité dans les études contrôles [109]. De plus, quand ils sont utilisés pendant de longues périodes, des complications telles que cataracte, glaucome et infections peuvent être induites. D’autres anti-inflammatoires ont été testés comme agents adjuvants à la chirurgie réfractive au laser de la cornée, comme les AINS, les inhibiteurs de la plasmine, les vitamines A (rétinol), E (tocophérol), les acides aminés, la membrane amniotique et le coenzyme Q10 (ubiquinone ou ubidecarenone) [109]. Cependant, les données disponibles sur l’efficacité de ces traitements sont basées sur des cas cliniques ou des séries limitées et non pas sur des études cliniques contrôlées. Ce sont Talamo et al. qui appliquèrent pour la première fois la MMC comme modulateur de la cicatrisation cornéenne après une chirurgie réfractive de la cornée sur des yeux de lapins [144]. Les examens histologiques et anatomopathologiques montrèrent que la MMC inhibe la synthèse du collagène sous-épithélial. Majmudar et al. évaluèrent l’efficacité de la MMC (0,02%) à réduire l’apparition d’opacités cornéennes chez les patients ayant subi une chirurgie réfractive de la cornée [96]. Chez tous les patients, la cornée resta claire, sans aucune récidive avec un temps de suivi moyen de 14 mois. Gambato et al. évaluèrent le rôle de la MMC topique dans les PRK, où un œil de chaque patient reçut de manière aléatoire, soit de la MMC, soit un placebo [46]. Au suivi à 18 mois, il n’y avait pas d’opacité cornéenne chez les patients dont les yeux avaient été traités avec de la MMC alors que 20% des yeux témoins présentaient des opacités notables.

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Avec ces données, il parait clair que la MMC topique peut être utile dans la prévention de l’apparition d’opacités dans les chirurgies réfractives de la cornée malgré un manque de suivi à long terme.

4. Utilisation dans le traitement des tumeurs oculaires

Les tumeurs de la surface oculaire sont des lésions, bénignes ou malignes, de la conjonctive ou de la cornée. Selon les cellules dont elles dérivent, elles sont divisées en lésions mélanocytaires et lésions à cellules squameuses. Les néoplasies malignes à cellules squameuses, ou néoplasies squameuses de la surface oculaire, sont divisées en néoplasie intraépithéliale et carcinome épidermoïde invasif. Une exérèse chirurgicale complète en marges saines est le « gold standard » dans le traitement des tumeurs de la surface oculaire. Néanmoins, il peut ne pas être possible de faire l’exérèse complète de la tumeur, lorsque celle-ci est diffuse ou très étendue.

a. Néoplasies squameuses de la surface oculaire

Elles sont associées à une morbidité oculaire et systémique pouvant aller jusqu’à la mort du patient. Le taux de récidive après une exérèse chirurgicale est de 15 à 52 % avec le risque majeur de ne pas avoir fait l’exérèse en marges saines [88]. Inversement, une exérèse conjonctivale trop large induit un remaniement cicatriciel, un défaut de fonction dans la mobilité oculaire et un astigmatisme. Ces risques ont fait des thérapies adjuvantes un outil incroyablement utile. Radiothérapie, cryothérapie et immunothérapie furent grandement utilisées dans le traitement des néoplasies squameuses. La chimiothérapie par application d’anti-métabolites topiques a révolutionné le traitement des néoplasies squameuses. Frucht-Pery et Rozenman furent les premiers à utiliser la MMC dans le traitement des tumeurs intraépithéliales [43]. L’administration locale de MMC à 0,02% pendant deux semaines est un traitement efficace pour les tumeurs intraépithéliales cornéennes qui impliquent l’axe optique. Depuis, il y a eu de nombreuses études confirmant l’intérêt de l’utilisation de la MMC dans le traitement de ces tumeurs [122, 154]. La concentration de la MMC variait de 0,02 à 0,04%. La comparaison entre les études utilisant la MMC comme traitement des néoplasies squameuses de la surface oculaire est donnée dans le tableau 2. Toutes les études montrent une bonne réponse au traitement sans effet secondaire majeur.

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Tableau 2 : Comparaison d’études sur la MMC comme traitement des néoplasies squameuses de la surface oculaire Etude (année) Nb.

d’yeux Type d’étude Dose MMC

(%) Durée traitement

Temps suivi

Issue (% regression de la tumeur)

Limites des études

Wilson et al. (1997) [154]

7 Rétrospective 0,04 QID pendant 7 jours, semaines alternées

9 mois 85,5

Rétrospective, petit échantillon

Heigle et al. (1997) [63]

3 Cas cliniques 0,02-0,04 3-20 semaines

6-9 mois

100 Petit échantillon

Frucht-Pery et al. (1997) [45]

17 Série cas clinique

0,02-0,04 QID pendant 7-28 jours

6 mois 64,7 après un cycle 82 après deux cycles

Suivi court

Rozenman et Frucht-Pery (2000) [122]

8 Cas cliniques 0,02-0,04 QID pendant 14j

24-44 mois

37,5 après un cycle 87,5 après deux cycles

Petit échantillon

QID = quatre fois par jour

Ceci a conduit à examiner l’intérêt de l’utilisation de la MMC comme agent adjuvant à la chirurgie des tumeurs squameuses. Les différentes études qui utilisent la MMC comme agent adjuvant à la chirurgie des tumeurs squameuses de la surface oculaire sont résumées dans le tableau 3. Les études montrent que la MMC est un agent adjuvant très efficace dans ces chirurgies ; les doses utilisées peuvent même être réduites (0,002%) sans risque de récidive [113].

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Tableau 3 : Comparaison d’études sur la MMC comme traitement adjuvant à la chirurgie des néoplasies squameuses de la surface oculaire Etude (année) Nb.

d’yeux Type d’étude Dose MMC

(%) Durée traitement

Temps suivi

Issue (% regression de la tumeur)

Limites des études

Akpek et al. (1999) [4]

4 Cas cliniques 0,02 TID pendant 2 semaines

20 mois 100

Petit échantillon

Siganos et al. (2002) [136]

8 Retrospective 0,02 5 minutes per-opératoires

16 mois 87,5 Petit échantillon

Kemp et al. (2002) [74]

11 Retrospective 0,04 QID pendant 2 semaines et per-opératoire

6-36 mois

Bons résultats Petit échantillon

Chen et al. (2004) [24]

27 Prospective, non comparative

0,04 QID pendant 1 semaine, 2-3 cycles

27 mois Pas de récidive

TID = trois fois par jour QID = quatre fois par jour

b. Tumeurs mélanocytaires

i. Mélanose primaire acquise

Elles se produisent généralement entre soixante et soixante-dix ans, plus particulièrement chez les sujets de type caucasien [40]. C’est généralement une lésion unilatérale, localisation unique, plate, conjonctivale et brune. Les mélanoses sans atypie cellulaire ont un faible potentiel de malignité alors que si des atypies sont décrites, le risque de voir évaluer la mélanose en mélanome se situe autour de 46,4% [40]. L’exérèse accompagnée de cryothérapie est le traitement le plus commun en particulier si la biopsie met en évidence des atypies cellulaires. Depuis la première étude en 1996 [42], de nombreuses études ont mis en évidence l’intérêt de la MMC comme traitement simple ou comme agent adjuvant à une chirurgie localisée de mélanose primaire avec atypie. La concentration utilisée est la même que pour les tumeurs squameuses (0,02 à 0,04%). Pe’er et Frucht-Pery [111] ont présenté une analyse rétrospective de 12 patients avec mélanoses primaires acquises avec atypies cellulaires. Tous les patients furent traités avec 2 à 5 cycles de MMC topique 4 fois par jour. Au contrôle à 1 an, toutes les lésions avaient disparu.

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ii. Mélanomes conjonctivaux

Les mélanomes malins de la conjonctive sont rares ; leur incidence est de 0,2-0,8 par million dans la population Blanche [133]. Ils sont potentiellement létaux avec une moyenne de mortalité à 10 ans de 30%. Bien que le traitement chirurgical de référence des mélanomes conjonctivaux soit l’exérèse chirurgicale totale, celle-ci n’est pas toujours possible. La cryothérapie appliquée aux marges et à la base de la tumeur dont on a pratiqué l’exérèse réduit le risque de récidive locale [67]. Plus récemment, la MMC topique (0,04%) a été utilisée comme agent adjuvant à une exérèse chirurgicale d’un mélanome conjonctival étendu [74]. Les données de suivi à long terme de patients avec mélanome conjonctival sont rares ; cependant, des études rétrospectives n’ont pas montré d’avantage à l’utilisation de la MMC topique comparée à une exérèse locale suivi de cryothérapie ou d’irradiation [151].

5. Complications oculaires associées à l’utilisation d’anti-métabolites

a. Dans les chirurgies oculaires

i. Avec la mitomycine C

Bien que la MMC augmente le taux de succès de chirurgies oculaires en terme de contrôle de PIO à long terme, de réduction des récidives de ptérygions, de réduction d’apparition d’opacité cornéenne après une chirurgie réfractive et de chirurgies de l’appareil lacrymal, elle augmente aussi le risque de complications dont une liste est présentée dans le tableau 4. Ceci est dû à sa cytotoxicité prolongée. Les complications majeures sont reportées dans l’utilisation de la MMC comme agent adjuvant dans les chirurgies filtrantes de glaucome et de ptérygion. Son utilisation dans les autres chirurgies oculaires est uniquement associée à des complications mineures et réversibles. Les effets secondaires de la MMC ne sont pas uniquement limités à la période postopératoire [34, 57, 58, 123]. La MMC est toxique pour les fibroblastes et les cellules endothéliales vasculaires [138] et l’effet sur ces dernières cellules pourrait conduire à une ischémie de la conjonctive et de la sclère, et donc aux complications associées. L’administration de MMC pendant une chirurgie de glaucome mène souvent à une bulle de filtration à paroi fine et avasculaire. Ces bulles, bien que meilleures en terme de filtration, sont potentiellement associées à des fuites d’humeur aqueuse au développement ultérieur d’endophtalmie [57]. L’endophtalmie est une infection intraoculaire grave, complication redoutée de toute chirurgie intraoculaire et pouvant résulter à une perte de vision définitive. Le risque d’endophtalmie après une chirurgie filtrante avec bulle de filtration réussie peut persister pendant des mois voire des années [131, 140]. Bien que les espèces Streptococcus et Staphylococcus [57, 58, 140] soient les organismes les plus courants identifiés dans les endophtalmies associées aux bulles de filtrations, les champignons commes Lecythophora mutabilis ont aussi été mis en cause [131]. Dans une analyse rétrospective de 609 yeux, Greenfield et al. [58] ont mis en évidence que le taux d’endophtalmie associée à une bulle de filtration était plus important chez ceux qui avaient reçu de la MMC en agent adjuvant plutôt que chez ceux qui n’avaient pas reçu d’agent antifibrotique. De plus, les bulles à paroi fine ne permettent qu’une faible résistance à l’écoulement, donc une filtration possiblement trop importante et une hypotonie. Les conséquences d’une hypotonie oculaire incluent décollement

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rétinien, hémorragie choroïdienne, maculopathie, hypothalamie, décompensation endothéliale, rupture de la barrière hémato-aqueuse et développement de cataracte [82]. Les complications dues à la MMC lors de son utilisation comme agent adjuvant pendant une chirurgie de ptérygion peuvent aller d’un inconfort modéré à une ulcération sclérale et la formation de symblépharon [33, 123]. Le taux de complication augmente avec la dose de MMC utilisée et si l’application de MMC se fait après la chirurgie plutôt que pendant. Les sclérites débutant longtemps après la chirurgie ont été décrites sur des yeux ayant subi une chirurgie mettant à nu la sclère et avec application de MMC. On pensait que recouvrir la sclère mise à nu avec une greffe conjonctivale de glissement, après application per-opératoire de MMC réduisait le taux de complications. Cependant, même de faibles doses de MMC peuvent induire des complications sévères comme une perforation [33]. Lorsqu’elle est utilisée comme agent adjuvant dans d’autres chirurgies, les complications dues à la MMC se limitent à des kératoconjonctivites passagères. Tableau 4 : Complications associées à l’utilisation de MMC lors de chirurgies oculaires [1] Complications Glaucome Toxicité pour l’épithélium cornéen Suintement de la plaie conjonctivale Fuite de la bulle de filtration Inflammation de la bulle Maculopathie hypotonique Décollement rétinien Formation ou évolution d’une cataracte Hypothalamie Hémorragie suprachoroïdienne Endophtalmie Hyphéma Hémorragie rétinienne Kératopathie bulleuse Ptérygion Douleur oculaire Sensation de corps étranger Photophobie Défaut de substance épithéliale ne cicatrisant pas Calcification, amincissement, ectasie de la sclère Toxicité pour l’épithélium cornéen Perforation cornéenne Ulcération cornéosclérale Granulome, kyste conjonctival Symblépharon Glaucome secondaire Autres chirurgies oculaires Sensation de corps étranger Photophobie Défaut de substance épithéliale ne cicatrisant pas Toxicité pour l’épithélium cornéen

Une utilisation raisonnée de la MMC, prenant tout particulièrement en considération la concentration et le temps d’exposition, aidera à minimiser l’apparition de complications. Une irrigation, minutieuse et approfondie, avec une solution saline du site de contact est cruciale.

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ii. Avec le 5-fluorouracil

Le 5-FU étant plus toxique envers les cellules en réplication, son effet sur l’épithélium cornéen est très prononcé [82]. Cet effet est dose-dépendant et apparaît généralement pour des doses de 100 mg ou plus [134]. Les manifestations de cette toxicité sont kératite ponctuée, kératite filamenteuse, défaut de substance épithéliale et cornée verticillée. La figure 2 est une représentation d’une cornée verticillée vue à la lampe à fente.

Figure 2: Cornée verticillée, aspect visible à la lampe à fente [8]

Ces entités sont réversibles et n’ont pas d’effet à long terme sur l’acuité visuelle. Cependant, chez certains patients, des complications sévères telles qu’ulcérations bactériennes, fonte cornéenne et perforation peuvent se produire [78]. Ces complications se présentent plus particulièrement chez des patients ayant préalablement un trouble sous-jacent de la surface oculaire comme une kératoconjonctivite sèche, une kératopathie bulleuse, une kératopathie d’exposition et les patients traités par des corticostéroïdes topiques. Les injections de 5-FU avec une technique ne permettant pas un reflux du produit réduisent l’apparition de complications cornéennes [148]. Dans cette technique, le 5-FU est injecté en sous-conjonctival à l’aide d’une aiguille de 30G insérée directement sur la seringue. Après l’injection, le point d’entrée est compressé avec une microsponge afin de prévenir le reflux de produit dans le film lacrymal et à la surface oculaire. L’évaluation préopératoire du risque et l’ajustement postopératoire de la dose de 5-FU en fonction de la réponse clinique et des complications éventuelles peuvent aussi réduire la toxicité sans compromettre le taux de succès. Ces complications sont peu communes avec une utilisation per-opératoire topique du 5-FU [82]. L’endophtalmie est une des complications les plus graves de la chirurgie filtrante et pouvant résulter en une cécité [102]. L’utilisation d’anti-métabolites peut entrainer la formation d’une bulle de filtration avasculaire et à paroi fine qui, bien que plus intéressante dans le contrôle de la PIO, peut conduire à une fuite d’humeur aqueuse et à une endophtalmie [143]. Ces complications peuvent se produire jusqu’à 56 mois après la chirurgie [139]. Les agents les plus communs sont les espèces Streptococcus et Staphylococcus [140]. De plus, comme avec la MMC, les bulles à paroi fine ne permettent qu’une faible résistance à l’écoulement, donc une filtration potentiellement trop importante et une hypotonie. Les conséquences d’une hypotonie sont une perte de vision due à des complications cornéennes, maculaires ou

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rétiniennes. Bien que ces complications, dont la liste est donnée dans le tableau 5, soient rares, il est important de suivre le patient de très près lorsque ce dernier a subi une trabéculectomie avec un anti-métabolite. Tableau 5 : Complications associées à l’utilisation du 5-FU lors de chirurgies oculaires [1] Complications Glaucome Kératite ponctuée Kératite filamenteuse Cornée verticillée Suintement transconjonctival Hypothalamie Hypotonie Maculopathie hypotonique Endophtalmie Hyphéma Effusion choroïdienne Autres chirurgies oculaires Erosions épithéliales ponctuées Kératoconjonctivite

b. Dans le cas de tumeurs oculaires

i. Avec la mitomycine C

Contrairement à son utilisation comme agent adjuvant des chirurgies de glaucome et de ptérygion, les complications associées à l’utilisation de MMC dans les chirurgies de tumeurs oculaires sont modérées et temporaires. Parmi les quelques complications listées dans le tableau 5, la déficience en cellules souches limbiques et la sténose des points lacrymaux sont les complications les plus couramment associées au traitement des néoplasies à cellules squameuses [16, 34]. Dans les mélanoses primaires avec atypies, les effets secondaires sont principalement une rougeur aiguë et modérée, un chémosis et une kératite. Une étude a mis en évidence des changements similaires à ceux observés dans l’urothélium lors de l’utilisation intravésicale de MMC [125]. Ces changements sont à différentier d’une récidive tumorale. Dans les mélanomes conjonctivaux, la chimiothérapie à la MMC peut causer des cataractes intumescentes [124].

ii. Avec le 5-fluorouracil

Les complications associées à l’utilisation de 5-FU dans les tumeurs oculaires sont modérées et temporaires [114, 155].

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6. Mitomycine C versus 5-fluorouracil

L’utilisation d’anti-métabolites en pratique ophtalmologique a facilité la prise en charge de chirurgies compliquées et de tumeurs potentiellement mortelles [1, 2, 95]. Cependant, les ophtalmologistes n’ont pas abouti à un consensus général sur la substance à choisir, 5-FU ou MMC. De nombreux essais cliniques ont pour but de comparer les effets cliniques et la toxicité de ces deux molécules. Smith et al. comparent la toxicité de la MMC et du 5-FU in vitro envers des fibroblastes et des cellules endothéliales capillaires obtenus en culture [138]. Le 5-FU est toxique envers les fibroblastes mais pas contre les cellules endothéliales, alors que la toxicité de la MMC est équivalente envers les deux types cellulaires. La plupart des études comparant l’utilisation du 5-FU et de la MMC dans les chirurgies de glaucome sont des études prospectives, randomisées et comprenant des yeux à haut risque d’échec. Ainsi, aucune différence significative n’est mise en évidence entre la MMC et le 5-FU en termes d’issue et de complications [102, 138, 143]. Dans un essai prospectif et randomisé sur 80 yeux pseudoaphaques qui subirent une trabéculectomie, Lamping et Belkin comparèrent l’utilisation de MMC per-opératoire (0,04% pendant 2,5 minutes) et de 5-FU postopératoire (5mg dans 0,5ml) injecté à l’opposé du site opératoire une fois par jour pendant 10 jours [83]. Le groupe de la MMC obtint un meilleur résultat de PIO et requit une médication anti-glaucomateuse moins importante lors du suivi à 32 mois postopératoires, au détriment de complications plus nombreuses. Sur les bases des données disponibles dans la littérature, il est difficile de conclure quel anti-métabolite est supérieur dans les chirurgies oculaires ou le traitement des tumeurs oculaires. Il semble en effet qu’à la fois la MMC et le 5-FU soient des bons agents adjuvants, et quand ils sont utilisés de manière judicieuse, ils peuvent améliorer le taux de succès du traitement de nombreuses pathologies oculaires.

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D. Les antimitotiques, leur utilisation en ophtalmologie vétérinaire

1. Application au glaucome des carnivores

a. De la clinique et de l’étiopathogénie du glaucome des carnivores

La définition la plus courante en ophtalmologie vétérinaire présente le glaucome comme une affection dont la caractéristique est l’élévation de la pression intra-oculaire (PIO) incompatible avec le maintien de la physiologie des tissus intraoculaires [48]. Ce processus, d’étiologie complexe, conduit lors de son évolution à des lésions des différents composants oculaires, tuniques nerveuses, nerf optique, cornée, iris et cristallin et à une perte de vision. Elle résulte primitivement d’une dégénérescence des cellules ganglionnaires de la rétine [30]. C’est une affection relativement commune chez le chien. Sa fréquence dans la population canine est comprise entre 1 et 2% [68] mais varie largement au sein des races canines prédisposées au glaucome primaire. Le glaucome est une cause importante de cécité du fait des dommages qu’il induit dans les différentes structures oculaires. Le diagnostic souvent tardif en médecine vétérinaire assombrit le pronostic de récupération visuelle.

i. Signes cliniques [48]

Ils sont provoqués par l’élévation de PIO. La variété et l’intensité des symptômes sont fonction de la durée d’évolution et de l’importance de l’élévation de PIO. Sur le plan évolutif, on distingue les glaucomes aigus d’installation rapide et des glaucomes chroniques de début insidieux et d’aggravation progressive sur plusieurs semaines à plusieurs mois.

La douleur oculaire

C’est une affection souvent douloureuse se traduisant par un blépharospasme, une photophobie, un épiphora, une procidence de la membrane nictitante. Les répercussions de cette douleur peuvent aussi apparaître au plan général, avec un sujet apathique, pouvant présenter une dysorexie. La douleur est due à l’étirement et à la compression des fibres nerveuses sensitives de la tunique fibreuse de l’œil sous l’effet de l’augmentation de PIO. La douleur oculaire peut diminuer dans les cas de glaucomes évolués après l’atrophie de ces fibres nerveuses.

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La rougeur oculaire

C’est une congestion passive des veines épisclérales et conjonctivales s’étendant du limbe au cul-de-sac conjonctival. Cette couleur rouge foncé et ces vaisseaux d’aspects tortueux résultant de la compression en amont des plexus veineux intrascléraux liée à la mise sous tension de la sclère par l’élévation de pression sont représentés sur la photo 1.

Photo 1 : Congestion veineuse épisclérale (Photo : Dr J-Y Douet)

La mydriase

La pupille est dilatée, les reflexes photo-moteurs sont lents et incomplets. Le reflet du fond d’œil est donc plus facilement visible, comme on peut le noter sur la photo 2.

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Photo 2 : Œdème cornéen (OD) et mydriase glaucomateuse (OG) (Photo : Dr J-Y Douet)

Les modifications cornéennes

D’une part, la cornée peut se troubler de manière plus ou moins dense (œdème cornéen visible sur la photo 2) en fonction de l’augmentation de PIO. Jusqu’à 40 mm Hg, l’œdème est modéré, la transparence est en grande partie conservée. Au delà de 50 mm Hg, l’opalescence est diffuse, rendant difficile l’examen des structures situées en arrière de la cornée. L’œdème cornéen résulte de la décompensation endothéliale accompagnant l’effet de la PIO sur l’endothélium cornéen. D’autre part, une néovascularisation cornéenne est quelques fois présente sur 360° et la densité vasculaire est variable. Une pigmentation peut aussi apparaître lorsque l’œdème cornéen devient chronique (les dépôts pigmentaires partent du limbe et progressent jusqu’au centre de la cornée). Enfin, des stries de Haab (déchirures de la membrane de Descemet) peuvent apparaître et résultent de l’étirement du globe oculaire ainsi que de pics de pression [48].

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Les effets sur la tunique fibreuse

La mise sous tension du globe se traduit par une augmentation de taille de la tunique fibreuse : l’hydrophtalmie. On parle de buphtalmie lors d’augmentation extrême (en particulier chez les jeunes animaux dont la tunique fibreuse est plus mince donc plus extensible). Cette augmentation de volume peut entrainer une impossibilité à fermer complètement les paupières, donc à couvrir la cornée à chaque clignement. La partie non protégée de la cornée se dessèche et peut s’ulcérer (kératite d’exposition). La sclère étirée de façon chronique peut s’amincir et des plaques gris noirâtres apparaissent en arrière du limbe (ectasie sclérale sur la photo 3). Elles peuvent éventuellement se déchirer et aboutir à un staphylome irien.

Photo 3 : Ectasie sclérale (Photo : Dr J-Y Douet)

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Les effets sur le cristallin

L’augmentation de taille du globe entraine un étirement des fibres de la zonule qui peuvent se rompre conduisant à une sub-luxation du cristallin, comme sur la photo 4, voire une luxation complète de ce dernier.

Photo 4 : Sub-luxation du cristallin avec croissant aphaque (Photo : Dr J-Y Douet)

Tableau 6 : Éléments comparatifs entre les deux types d’apparition de glaucome [48] Glaucome aigu Glaucome chronique Apparition en quelques heures à quelques jours Douleur intense Congestion épisclérale et conjonctivale importante Mydriase Œdème de cornée important Evolution rapide vers l’hydrophtalmie Cécité possible en 48-72 heures

Evolution sur plusieurs semaines à plusieurs mois Début insidieux Elévation modérée de la PIO en début d’évolution Phase terminale : hydrophtalmie, déplacement du cristallin, atrophie du fond d’oeil

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ii. Etiologie

Le glaucome résulte d’une diminution de l’écoulement de l’humeur aqueuse par existence d’un obstacle siégeant sur la voie de passage de ce liquide : depuis sa sécrétion dans la chambre postérieure jusqu’à la voie de drainage dans l’angle irido-cornéen. La classification des glaucomes utilisée chez l’animal est calquée sur celle de l’homme. On distingue glaucomes primaire et secondaire [48].

Le glaucome primaire

Il se caractérise par une anomalie constitutionnelle des voies de drainage. Il n’est pas précédé par une autre affection oculaire et n’est pas associé à une autre affection oculaire. Il est toujours bilatéral mais l’évolution sur les deux yeux peut être décalée dans le temps (l’œil adelphe devient glaucomateux dans les 6 à 12 mois après le premier œil dans 50% des cas environ [48, 68]). Il peut se manifester dans les premières semaines de vie ; il est alors qualifié de congénital. C’est cependant rarement le cas : les sujets atteints expriment leur affection entre 4 et 10 ans avec une moyenne d’âge de 6 ans [48]. Le glaucome primaire survient dans des races canines prédisposées et son déterminisme est génétique. Sur le plan étiologique, il peut être caractérisé par un examen gonioscopique, ce qui permet de le différencier en :

Glaucome primaire à angle ouvert

C’est un glaucome peu fréquent qui représente environ 3% de l’ensemble des glaucomes canins [30]. Il est décrit chez le beagle, le caniche et l’elkhound de Norvège [51]. Il est rare chez le chat mais a été observé chez le siamois, le sacré de Birmanie et le chat européen. Il a fait l’objet de nombreuses études chez le beagle car il représente un modèle spontané du glaucome humain. C’est un glaucome chronique dont les premiers symptômes apparaissent chez le jeune chien (6-18 mois) et qui se termine par la cécité vers l’âge de 3-4 ans [48]. A l’examen histologique, l’angle irido-cornéen est normal sauf en fin d’évolution où il se ferme du fait du collapsus de la fente ciliaire. L’obstacle à l’écoulement de l’humeur aqueuse siège dans le trabeculum. Chez le beagle, des études histochimiques du trabeculum ont montré des anomalies de structure et d’hydratation des glycosaminoglycanes qui rendent ce trabeculum de plus en plus compact et augmentent ainsi la résistance à l’écoulement de l’humeur aqueuse [127].

Glaucome primaire par fermeture de l’angle (à angle étroit)

Les mécanismes de survenue sont complexes et ne sont pas parfaitement connus chez le chien. Ils se subdivisent en facteurs prédisposants et en un facteur déclenchant.

- La première condition biométrique chez l’homme est l’étroitesse de la chambre antérieure. Ces études sont rares chez le chien mais les données chez le samoyed montrent que les sujets qui développent un glaucome ont une profondeur de chambre antérieure moyenne de 3,5 mm alors que les sujets qui ne sont pas affectés ont une profondeur moyenne de 4 mm [36]

- Il existe une corrélation entre l’étroitesse de l’entrée de la fente ciliaire (hauteur du ligament pectiné) et le risque de glaucome

- Une malformation congénitale du ligament pectiné appelée dysplasie du ligament pectiné joue aussi un rôle favorisant dans l’apparition du glaucome. Il s’agit de la

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persistance d’une bande mésodermique au niveau de l’angle irido-cornéen avec défaut de mise en place du ligament pectiné [107]

Ces trois facteurs représentent donc les facteurs dits prédisposants à l’apparition du glaucome. Le facteur déclenchant est le bloc pupillaire. Il se traduit par une accumulation d’humeur aqueuse dans la chambre postérieure dont la pression, plus élevée que celle de la chambre antérieure, pousse l’iris vers l’avant. Le déplacement antérieur de l’iris occlut l’angle de filtration d’autant plus que celui-ci est prédisposé à l’occlusion. Le bloc pupillaire est provoqué par l’augmentation du contact entre le bord pupillaire de l’iris et la face antérieure du cristallin, s’opposant ainsi au passage de l’humeur aqueuse à travers la pupille. Du fait de l’apparition du bloc pupillaire, le glaucome primaire à angle étroit est un glaucome aigu [48].

Les glaucomes secondaires [48]

Les glaucomes inflammatoires des iridocyclites

Les uvéites antérieures peuvent êtres responsables de glaucome pour trois raisons principales : - Obstruction de l’angle par des protéines et des cellules inflammatoires - Synéchies postérieures avec iris bombé fermant l’angle - Goniosynéchies qui ferment l’angle

Les glaucomes post-traumatiques

- Hyphéma : glaucome secondaire dans 7% des cas d’hyphéma chez le chien [48] - Uvéite antérieure avec synéchies - Déplacement traumatique du cristallin

Les glaucomes secondaires à des déplacements du cristallin

Un déplacement du cristallin peut générer une augmentation de la pression intraoculaire par divers mécanismes :

- Lors de luxation antérieure : la présence du cristallin en chambre antérieure obstrue l’aire pupillaire et crée un bloc pupillaire

- Lors de subluxation ou luxation antérieure ou postérieure : passage de vitré en chambre antérieure qui vient obstruer l’angle de filtration

Les glaucomes secondaires aux tumeurs intraoculaires

Elles peuvent parfois être confondues initialement avec un glaucome. Son développement peut retentir sur la pression intraoculaire par déplacement antérieur de la racine de l’iris et par envahissement de l’angle.

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iii. Le diagnostic du glaucome

Eléments de suspicion clinique

Diminution ou perte de vision Mydriase Rougeur épisclérale Opacité de la cornée

Diagnostic différentiel

Syndrome de l’œil rouge : conjonctivite, kératite, uvéite, épisclérite Exophtalmie : différentiée de l’hydrophtalmie. Œdème cornéen : kératite ulcéreuse ou non, uvéite, dystrophie endothéliale Mydriase : atrophie rétinienne, neuropathie optique, atrophie du sphincter pupillaire, mydriase paralytique (atteinte des fibres parasympathiques du III)

iv. Pronostic

Il est directement lié à l’amplitude de l’augmentation de la PIO, à la durée d’évolution et à la cause déclenchante. Il vise deux paramètres, le maintien de la vision quand cela est possible, sinon la conservation d’un œil non douloureux.

b. Traitement médical du glaucome

Il a pour but de diminuer la PIO par l’utilisation de médicaments destinés, soit à réduire la formation de l’humeur aqueuse (HA), soit à en augmenter l’élimination à partir de la chambre antérieure.

i. L’humeur aqueuse, production et dynamique [30, 38, 68]

Composition de l’humeur aqueuse

L’humeur aqueuse est composée à 98% d’eau. Enzymes, électrolytes, immunoglobulines, lipides et composants organiques forment les 2% restants. Sa concentration en protéines de 0,2 à 0,3 g/L, identique à celle du liquide céphalo-rachidien, lui confère une faible viscosité ainsi qu’un aspect transparent et incolore. Elle permet le maintien de la forme du globe, le transport de métabolites jusqu’au cristallin, jusqu’au vitré et jusqu’au centre de la cornée et l’élimination des déchets provenant du métabolisme du cristallin et de l’iris.

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Production de l’humeur aqueuse

Elle se fait dans les procès ciliaires, structures formées : - d’un stroma conjonctif riche en capillaires qui possèdent un endothélium fenestré

comme les capillaires glomérulaires. La vasomotricité de ces capillaires est sous la dépendance d’une innervation adrénergique alpha et beta.

- d’un épithélium ciliaire qui recouvre le stroma et fait face à la chambre postérieure. Il est constitué de deux couches de cellules ; l’épithélium pigmenté et non pigmenté.

L’ HA résulte d’un ultrafiltrat produit par un passage des liquides plasmatiques à travers la paroi des capillaires des procès ciliaires. Une partie de cet ultrafiltrat diffuse jusqu’à la chambre postérieure en passant par les espaces intercellulaires et le reste traverse l’épithélium ciliaire en subissant des remaniements biochimiques avant d’être sécrété dans la chambre postérieure (sécrétion active). En résumé, la formation de l’humeur aqueuse dépend de trois mécanismes physiologiques : l’ultrafiltration plasmatique, la diffusion intercellulaire et la sécrétion après diffusion transcellulaire. L’humeur aqueuse est produite à environ 80% par ce phénomène actif de sécrétion [68].

Circulation et élimination de l’humeur aqueuse

L’humeur aqueuse occupe dans un premier temps la chambre postérieure, puis traverse la pupille et se déverse alors dans la chambre antérieure. Le débit de l’humeur aqueuse et sa circulation dans le segment antérieur sont régis par les courants de convection thermique résultant de la différence de température entre l’iris et la cornée, les mouvements de l’œil et de la tête et les différences de pression hydrostatique [30, 68]. Il existe deux voies principales d’élimination de l’humeur aqueuse. Chez les carnivores, la majeure partie de l’humeur aqueuse s’écoule par l’angle irido-cornéen situé entre l’iris et la cornée. Elle franchit le ligament pectiné puis progresse dans le réseau trabéculaire emplissant la fente ciliaire. Ce réseau se termine par les veines trabéculaires, d’orientation radiaire, débouchant dans le plexus veineux scléral qui communique avec les veines conjonctivales, ciliaires et vorticineuses de la circulation générale. L’humeur aqueuse restante quitte l’œil par des voies annexes, dites uvéosclérales et iriennes. Dans la voie uvéosclérale, l’HA emprunte les passages délimités entre les faisceaux longitudinaux du muscle ciliaire puis gagne l’espace suprachoroïdien où elle est réabsorbée par la circulation choroïdienne et sclérale [30]. Cette voie assure 15 % du drainage chez le chien et 3 % chez le chat. Elle aurait un rôle aussi important que la voie trabéculaire chez le cheval. L’excrétion uvéosclérale est indépendante de la PIO.

ii. Le contrôle pharmacologique de la PIO

La PIO est le résultat d’un équilibre de pression entre les structures intraoculaires et l’enveloppe de l’œil (cornée, sclère). Le volume des enveloppes oculaires étant relativement stable, c’est la quantité d’humeur aqueuse produite et présente dans l’œil qui régira la valeur de la PIO. Les valeurs physiologiques de la PIO varient selon plusieurs facteurs (méthode de mesure, conformation de l’œil, position du globe, stress de l’animal…). De manière générale,

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on peut retenir des valeurs normales (mesurées au Tonopen XL) situées entre 10 et 20 mmHg [30, 68]. L’abaissement de la PIO par des moyens pharmacologiques peut se faire en agissant sur les processus qui régissent la production de l’HA et/ou sur ceux qui facilitent son élimination par les voies de drainage.

Diminution de la formation de l’HA

La thérapeutique médicale peut agir sur l’ultrafiltration plasmatique qui s’opère à partir des capillaires des procès ciliaires ou sur les mécanismes de la sécrétion active de l’épithélium ciliaire.

Par inhibition de l’ultrafiltration

A l’état normal, les liquides plasmatiques quittent la lumière des capillaires des procès ciliaires sous l’effet de la pression hydrostatique régnant dans ces capillaires. La pression osmotique du plasma ainsi que la PIO créent des forces d’opposition à cette sortie de liquides. La pression d’ultrafiltration est donc la résultante de ces forces opposées : PUF = PHYDROST – (Posmot + PIO). Une diminution de l’ultrafiltration peut donc être obtenue soit en abaissant la pression dans les capillaires (PHYDROST), soit en augmentant la pression osmotique du plasma. La diminution de la PHYDROST peut être obtenue par réduction du débit sanguin dans les capillaires des procès ciliaires, sous l’effet d’une vasoconstriction des artérioles pré-capillaires. Les médicaments qui agissent ainsi sont : l’adrénaline par son action vasoconstrictrice α-adrénergique d’une part, et les β bloquants (ex : timolol) qui auraient également un effet vasoconstricteur sur la circulation ciliaire en rendant prédominante l’innervation α-adrénergique locale d’autre part. L’augmentation de la pression osmotique du plasma est obtenue par l’utilisation de substances à fort pouvoir osmotique représentées par le mannitol et la glycérine, qui sont les antiglaucomateux osmotiques.

Par inhibition de la sécrétion active

La sécrétion de l’humeur aqueuse par l’épithélium ciliaire est principalement sous la dépendance de systèmes de transport actif. La formation active de l’humeur aqueuse peut donc être diminuée par l’inhibition de ces systèmes ou par destruction de l’épithélium ciliaire. → Les β bloquants, en se fixant sur les récepteurs post-synaptiques des cellules non pigmentées de l’épithélium ciliaire, provoquent une inhibition du système Na+/K+/ATPase intracellulaire, responsable d’un transfert de sodium vers la chambre postérieure. → Les inhibiteurs de l’anhydrase carbonique : l’anhydrase carbonique, localisée à l’épithélium ciliaire pigmenté et non pigmenté, catalyse la réaction H2O + CO2 ↔HCO3

- + H+. Les anions ainsi formés sont neutralisés par des cations sodium et transférés dans les espaces intercellulaires puis vers la chambre postérieure. Parallèlement, s’opère un transfert osmotique d’eau. En s’opposant à la formation des bicarbonates, les inhibiteurs de l’anhydrase carbonique bloquent également la sécrétion de sodium dans la chambre postérieure et en conséquence le passage de l’eau qui constitue une partie de l’HA. → Les agonistes α2-adrénergiques : ils agissent à la jonction des terminaisons neuronales sympathiques et des cellules de l’épithélium ciliaire, en se fixant à la fois sur les récepteurs α2 pré-synaptiques (terminaison neurone sympathique) et sur les récepteurs α2 post-synaptiques (cellules épithélium ciliaire) [99, 100].

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→ La destruction chimique de l’épithélium ciliaire : la disparition des cellules qui assurent la sécrétion d’eau et d’électrolytes dans la chambre postérieure, entraîne une chute de la production de l’HA. C’est le principe de destruction de l’épithélium ciliaire par injection intravitréenne de gentamicine [17].

Augmentation de l’élimination de l’HA

Par augmentation du drainage trabéculaire

→ Les myotiques (agonistes cholinergiques) : ils diminuent la résistance à l’écoulement de l’HA par un mécanisme non démontré [60, 153]. → L’adrénaline : elle est responsable d’une augmentation de la filtration trabéculaire par son effet β-mimétique. Elle a donc deux sites d’action : la sécrétion (effets α-adrénergiques) et l’élimination trabéculaire (effets β-adrénergiques).

Par augmentation du drainage uvéoscléral

Ce mode d’action original est celui des prostaglandines (PGs) dont l’utilisation est récente. Elles provoquent une augmentation du transfert uvéoscléral en augmentant la perméabilité du muscle ciliaire au passage de l’HA. Cet effet est corrélé à la stimulation des récepteurs FP aux PGs qui se trouvent dans le muscle ciliaire. Cette stimulation provoque l’activation locale de métalloprotéases qui hydrolysent la matrice extracellulaire entre les fibres du muscle ciliaire et augmente la facilité de passage de l’HA à travers ce muscle [59].

iii. Applications cliniques

Le traitement d’urgence

Lors de glaucome aigu, l’hypertension oculaire s’installe rapidement et est généralement élevée. Elle peut survenir dans le cadre d’un glaucome primaire à angle fermé, d’un glaucome congénital ou d’un glaucome secondaire (luxation antérieure du cristallin…). Il s’agit d’une situation d’urgence nécessitant la mise en œuvre de moyens visant à réduire rapidement la PIO. L’administration intraveineuse de mannitol (1-2 g/kg) sur 20 à 30 minutes permet d’obtenir en moins d’une heure une réduction significative de la PIO qui se maintient pendant 6 à 10 heures. L’effet peut être complété par l’administration intraveineuse d’acétazolamide (5 à 10 mg/kg, Diamox®). L’objectif est d’aboutir à une PIO comprise entre 25 et 35 mm Hg au cours des 6 heures qui suivent le début du traitement. En relais, l’administration orale d’acétazolamide (10 mg/kg, Diamox®) sera prescrite pendant 24 à 48 heures.

Le traitement d’entretien

Il est mis en œuvre en continuité du traitement d’urgence ou utilisé d’emblé lors de glaucome chronique. Dans cette situation, l’augmentation de la PIO s’installe sur plusieurs semaines voire plusieurs mois et l’hypertension oculaire est plus modérée que dans le glaucome aigu. De toutes les formes de glaucome chronique, le glaucome primaire à angle ouvert est le plus facile à contrôler à long terme avec le seul traitement médical. Des études pharmacologiques

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ont montré que pour le glaucome à angle ouvert du beagle, la pilocarpine, l’ecothiopate iodure et l’adrénaline diminuent la PIO de 30 à 40% [52]. Le contrôle à long terme des glaucomes chroniques secondaires du chat et du chien est plus difficile et il n’existe pas de schéma thérapeutique standardisé et idéal. Les données cliniques, la gonioscopie ainsi que la connaissance des mécanismes d’action des antiglaucomateux, de leurs particularités pharmacologiques inter-spécifiques et de leurs effets secondaires aident à choisir le traitement le plus approprié. La pilocarpine est contre-indiquée lors d’uvéite, de subluxation du cristallin et elle a peu de chance d’être efficace si l’examen gonioscopique montre une fermeture de l’entrée de la fente ciliaire. Les β bloquants sont couramment utilisés en monothérapie avec des résultats inconstants et souvent décevants. Actuellement, il semble que les résultats les plus satisfaisants soient obtenus avec les inhibiteurs de l’anhydrase carbonique. Ils peuvent être employés en monothérapie ou associés à un analogue des prostaglandines ou à un β bloquant. Les analogues des prostaglandines peuvent aussi être administrés en monothérapie.

c. Traitement chirurgical du glaucome

Il est envisagé en cas d’échec du traitement médical seul. La meilleure indication d’intervention chirurgicale est un œil présentant un glaucome d’apparition récente et possédant encore un potentiel visuel, dont la PIO n’est pas contrôlée par un traitement médical bien conduit. On verra qu’il peut également être mis en œuvre dans le cadre de glaucomes au stade terminal. Le traitement chirurgical peut faire appel : - à des techniques diminuant la production d’humeur aqueuse, par destruction partielle du corps ciliaire. - à des techniques augmentant le drainage de l’humeur aqueuse par la création de nouvelles voies d’écoulement : ce sont les opérations fistulisantes, avec ou sans mise en place d’implants de drainage artificiels [13].

i. La cyclodestruction

Elle consiste à détruire une partie du corps ciliaire et des procès ciliaires correspondants, afin de diminuer la sécrétion de l’humeur aqueuse pour établir un équilibre tensionnel normal. Selon la technique utilisée, c’est un principe qui peut être utilisé aussi bien sur des yeux glaucomateux voyants que non voyants, sur des glaucomes débutants comme sur des glaucomes évolués. Bien que les résultats soient satisfaisants à court et moyen terme dans une majorité de cas, cette méthode expose cependant, à long terme, au risque de récidive ou à l’inverse au risque d’hypotonie irréversible avec phtisie du globe oculaire. Toute la difficulté des techniques de cyclodestruction est de détruire une quantité suffisante de procès ciliaires pour être efficace, sans entraîner toutefois une destruction trop importante qui serait source d’hypotonie majeure et de phtisie [50].

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La cyclocryothérapie

Cette technique utilise le froid pour détruire les procès ciliaires en les gelant à l’aide d’une cryode appliquée sur la sclère en regard du corps ciliaire. Le froid appliqué grâce à la cryode peut être généré par du protoxyde d’azote ou par de l’azote liquide. La température de congélation obtenue avec une cryosonde à protoxyde d’azote est comprise entre -60 et -80°C et celle atteinte avec une cryosonde alimentée par de l’azote liquide est de l’ordre de -185°C. Technique opératoire [29, 50] : l’intervention est réalisée sous anesthésie générale, avec l’animal placé en décubitus latéral ou sternal. L’extrémité de la cryode est appliquée 3 à 4 mm en arrière du limbe et le froid est activé provoquant la congélation.

Photo 5 : Cyclocryothérapie (Pr D. Brooks)

Comme on peut le voir sur la photo 5, une boule de glace se forme à l’extrémité de la sonde et s’étend à la conjonctive et à la sclère adjacente. Le temps d’application varie de 30 secondes à 2 minutes selon le matériel utilisé. Quatre à huit points d’impact sont réalisés sur la moitié

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supérieure du globe oculaire en évitant les points de 3h et 9h afin de ne pas endommager les veines ciliaires postérieures longues et les nerfs ciliaires. Le traitement postopératoire comprend une corticothérapie locale pour réduire le chémosis et l’uvéite secondaires ainsi qu’un traitement anti-glaucomateux pour prévenir l’hypertension oculaire réactionnelle. Ce traitement médical sera poursuivi pendant une semaine, au terme de laquelle l’animal sera revu pour un premier contrôle. Les complications postopératoires immédiates sont le chémosis et l’uvéite antérieure. L’augmentation de PIO est fréquente après l’intervention et elle est liée à l’inflammation postopératoire. Un placement trop antérieur de la sonde expose à des altérations iriennes et risque de léser l’endothélium cornéen. Un placement trop postérieur expose quant à lui à des risques de décollement de rétine par exsudation de la choroïde. Le PIO se stabilise en 4 semaines en moyenne. Les récidives sont possibles car l’épithélium ciliaire est capable de se régénérer partiellement en quelques mois. Elles peuvent être traitées par une deuxième cryoapplication.

La cyclophotocoagulation au laser

D’utilisation récente en ophtalmologie vétérinaire, elle est obtenue par l’énergie d’un rayon laser appliqué au corps ciliaire à travers le plan conjonctivo-scléral [29]. Les lasers utilisés sont ceux qui émettent dans le proche infrarouge : laser Nd-YAG ou laser semi-conducteur diode dont la longueur d’onde est bien transmise par la sclère et bien absorbée par les mélanocytes du corps ciliaire. L’application trans-sclérale du laser diode entraine une nécrose par coagulation qui commence aux couches profondes de la sclère et s’étend aux procès ciliaires et à la rétine périphérique. Le rayon laser est transmis au corps ciliaire par l’intermédiaire d’une fibre optique qui est appliquée sur la sclère 3 à 4 mm en arrière du limbe, en regard du corps ciliaire. Avec le laser diode, on réalise chez le chien 35 à 50 impacts répartis sur 360° en évitant les régions de 3 heures et 9 heures [28]. A titre prophylactique on réalise moins de 30 impacts. L’inflammation postopératoire est moins marquée qu’avec la cyclocryoapplication, mais une élévation de la PIO peut être observée immédiatement après le traitement laser. Elle est corrigée par paracentèse de la chambre antérieure et une médication anti-glaucomateuse [28]. Le maintien d’une PIO normale avec conservation de la vision est présente chez 50 % des patients, un an après le traitement [28]. La cataracte, l’ulcère cornéen et la kératite sont de possibles complications postopératoires.

L’injection intra-vitréenne de gentamicine

A la limite du traitement médical et chirurgical, la cyclodestruction par mise à profit de l’effet toxique de la gentamicicne sur l’épithélium ciliaire, doit être réservée aux yeux glaucomateux non-voyants et aux patients pour lesquels le propriétaire n’est pas disposé à accepter une alternative plus onéreuse. La dose de gentamicine à injecter dans le vitré est habituellement comprise entre 20 et 40 mg, mais chez les chiens âgés et ceux de petite taille elle ne doit pas dépasser 7 mg/kg sous peine d’entrainer une réaction néphrotoxique [17]. La facilité de la technique a pour corollaire l’inconstance des résultats et une possible évolution vers la phtisie. L’injection intra-vitréenne de gentamicine est contre-indiquée chez le chat car elle prédisposer à l’apparition d’un sarcome oculaire [17].

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ii. La chirurgie filtrante

Sélection des patients et préparation pré-opératoire

Elle s’applique à des yeux glaucomateux ayant une vision résiduelle et n’ayant pas de modification apparente des segments antérieur et postérieur due à la maladie glaucomateuse. Ce type d’intervention ne s’adresse qu’aux stades précoces des glaucomes primaires. Toute augmentation brusque de la PIO supérieure à 50 mm Hg ou toute élévation progressive avec une valeur comprise entre 30 et 50 mm Hg est une indication potentielle de la chirurgie filtrante. L’objectif premier est le maintien de la vision ; une décision suffisamment précoce s’impose car toute élévation de PIO au-delà de 50 mm Hg est responsable de lésions irréversibles des cellules ganglionnaires et de leurs axones en 3 à 7 jours [48]. Elle peut être utilisée à titre prophylactique sur l’œil sain adelphe d’un œil glaucomateux non voyant chez les races de chiens prédisposées au glaucome primaire. La préparation à une chirurgie filtrante comprend : le contrôle pré-opératoire de la PIO par un traitement médical, la diminution de l’inflammation oculaire si elle est présente et la mise en myosis de la pupille. Une PIO comprise entre 15 et 25 mm Hg doit être obtenue avant l’opération. Une intervention sur un globe dont la tension est élevée expose à des risques de complications per-opératoires (hémorragie, issue de vitré) et augmente les risques d’échec. Certains glaucomes s’accompagnent d’une inflammation primitive ou secondaire du segment antérieur. L’administration locale et générale de corticostéroïdes et d’anti-inflammatoires non stéroïdiens est dans ce cas indiquée pour réduire les risques de complications per- et postopératoires liées à l’inflammation. L’administration d’un collyre myotique est non seulement indiquée dans le cadre du contrôle de la pression intraoculaire préopératoire mais elle permet aussi d’obtenir le myosis préopératoire indispensable à toute chirurgie filtrante.

Les techniques opératoires

Leur point commun est de réaliser une fistule faisant communiquer la chambre antérieure et le plexus veineux de la sclère ou les espaces sous-conjonctivaux pour permettre l’évacuation de l’humeur aqueuse. Elles entraînent dans le second cas, la formation d’une bulle de filtration sous la conjonctive bulbaire.

La trépanation sclérale avec iridectomie périphérique

Une ouverture sclérale associée à une iridectomie périphérique permet à l’humeur aqueuse d’être drainée depuis la chambre postérieure jusqu’à l’espace sous-conjonctival comme cela est décrit sur la figure 3. L’iridectomie est essentielle car elle prévient l’occlusion de la fistule sclérale par l’iris. Elle doit se faire à la périphérie de l’iris qui ne contient pas de vaisseaux volumineux. L’iridectomie périphérique ne peut être efficace que si l’angle irido-cornéen reste partiellement ouvert. Cette technique, utilisée seule, est rarement indiquée [13, 38] Les complications à redouter dans ce type de chirurgie sont :

- l’uvéite postopératoire - l’obstruction de la sclérotomie par un bouchon de fibrine. Elle peut être prévenue

par l’administration intracamérulaire de 25 µg d’activateur tissulaire du plasminogène (tPA) en fin d’intervention

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- la fibrose de la fistule et de la bulle sous-conjonctivale qui conduit dans la majorité des cas à un arrêt de la filtration dans les trois à six mois suivant l’intervention

Il peut donc paraître intéressant, afin de ralentir la fibrose postopératoire, d’utiliser de la MMC en une seule application. En effet, il est prouvé qu’elle inhibe, in vitro, la prolifération cellulaire des fibroblastes sous conjonctivaux et de la capsule de Tenon [145]. Bien qu’il n’y ait pas d’étude spécifique quant à l’utilisation de la MMC associée à cette technique chirurgicale, on peut penser un protocole dans lequel, un temps opératoire est consacré au traitement du site par de la MMC.

Figure 3 : Trépanation sclérale avec iridectomie périphérique. L’humeur aqueuse traverse le trou de la sclérotomie et se collecte dans la bulle de filtration, sous la conjonctive, à partir de

laquelle elle est résorbée [119]

La sclérotomie avec cyclodialyse et iridencleisis

Dans le principe, un fragment d’iris est inséré dans un orifice de sclérotomie pour conduire l’humeur aqueuse vers les espaces sous-conjonctivaux, comme détaillé sur la figure 4 [112]. L’iridencleisis permet d’amener une section de l’iris dans l’espace sous-conjonctival en le fixant à un bord de la plaie sclérale. Cette chirurgie est associée à une cyclodialyse qui consiste en la création d’une fistule entre la chambre antérieure et l’espace supra-irido-ciliaire. Sous un volet scléral à charnière limbique, une section de l’iris est détachée depuis son bord libre jusqu’à la périphérie puis suturée à la face externe de la sclère au moyen d’un fil résorbable 6/0. Le traitement postopératoire consiste en une antibiothérapie et une corticothérapie par voies générale et locale. Le traitement myotique est poursuivi. Les complications per-opératoires redoutées sont l’hémorragie de l’uvée lors de la cyclodialyse ou de l’iridotomie et l’issue de vitré. Les complications postopératoires sont la cataracte ou le déplacement du cristallin si celui-ci a été lésé au cours de l’intervention. Les résultats publiés en 1977 par Peiffer et Schenk [112] ont montré qu’une pression intraoculaire normale était présente chez 67% des chiens 6 mois après l’intervention. La principale cause d’échec a été la fibrose de la sclérotomie qui a entraîné une obstruction de cycle de filtration.

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Encore une fois, bien qu’il n’y ait pas d’étude spécifique quant à l’utilisation de la MMC associée à cette technique chirurgicale, on pourrait imaginer l’intérêt de son utilisation dans un protocole comprenant un temps opératoire consacré au traitement du site par de la MMC.

Figure 4 : Temps opératoires de la sclérotomie avec cyclodialyse et iridencleisis [112]

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La trabéculectomie

C’est l’intervention classiquement réalisée chez l’Homme pour le traitement du glaucome chronique à angle ouvert. Décrite par Cairns en 1968 [19], elle consiste à retirer une fraction du trabeculum après avoir pratiqué un volet conjonctival puis un volet scléral afin de mettre en communication la chambre antérieure avec le plexus veineux de la sclère.

Figure 5 : Les voies d’évacuation de l’humeur aqueuse après trabéculectomie [20]

Un volet conjonctival à charnière postérieure d’environ 8 mm de long et 6 mm de large est réalisé de préférence au milieu des quadrants supérieurs du globe. Il est rabattu par des fils de traction ou par une pince clamp. Un volet scléral, particulièrement difficile à réaliser chez le chien où la structure de la sclère n’est pas lamellaire, rectangulaire de 5-6 mm de longueur à charnière limbique (épaisseur ⅓ à ½ de la sclère) est basculé sur la cornée. Un second volet scléral (reste de l’épaisseur de la sclère) est réalisé et permet d’atteindre le trabeculum puis la chambre antérieure. Une portion du limbe scléro-cornéen contenant le trabeculum est réséquée. L’intervention se termine par la remise en place du plan superficiel scléral à l’aide de quelques points de suture et du volet conjonctival à l’aide d’un surjet. L’humeur aqueuse fuit par les côtés du volet scléral avec constitution d’une bulle sous-conjonctivale de filtration, comme on peut le voir dessiné sur la figure 5 [20]. En médecine humaine, la trabéculectomie est considérée comme la meilleure des opérations anti-glaucomateuses avec des taux de réussite en ce qui concerne la stabilisation et la normalisation de la PIO allant de 45% après une trabéculectomie à 89% après deux interventions. De plus, l’application per-opératoire de MMC améliore considérablement le pronostic chirurgical pour les patients dont le glaucome est considéré à hauts risques. En effet, celle-ci peut être appliquée (solution titrée à 0,2 mg/ml) à l’aide d’une microsponge pendant 2 minutes et sans rinçage ultérieur, après la découpe du premier volet conjonctival.

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Les études vétérinaires quant à l’utilisation de cette technique opératoire restent rares et aucun résultat probant n’a été démontré. Il semblerait que la trabéculectomie seule n’ait un taux de réussite que de 50% avec un suivi de 6-12 mois [14]. Une étude réalisée en 1999 à l’ENVT (7 cas opérés de 95 à 97) [18] a permis de tester l’innocuité de la technique de trabéculectomie associée à l’application per-opératoire de MMC (5 animaux) et de trabéculectomie seule (2 animaux). Les complications postopératoires telles qu’hyphéma, réaction et aplatissement de la chambre antérieure sont comparables aux techniques de trabéculectomie classique. Enfin, les différentes études rapportent l’utilisation d’un taux de MMC allant de 0,1 à 0,5 mg/ml, avec une dose de 0,2 mg/ml (0,02%) la plus couramment utilisée. Le temps d’exposition per-opératoire varie de 2 à 5 minutes. La dose optimale pour l’application per-opératoire reste discutable, cependant, il est démontré que l’augmentation des doses est corrélé à l’augmentation du taux de complications [1, 145, 146]. Réciproquement, la dose minimale efficace n’est pas connue avec certitude mais il est probable qu’elle dépende de la de la capacité de cicatrisation de chaque individu. On pourra retenir qu’une dose à 0,02 à 0,04%, appliquée pendant 2-3 minutes peut être utilisée pour atteindre une PIO compatible avec la fonction visuelle ; les doses sont à ajuster en fonction du patient.

La trabéculorétraction

Une trabéculectomie et une iridectomie périphérique sont réalisées sous un volet scléral disséqué en deux plans ; le plan profond est découpé en trois lambeaux à charnière cornéenne ; seul le lambeau central est retiré, les deux lambeaux latéraux sont glissés entre la cornée et l’iris, le volet scléral externe protège la fistule [48] Comme dans la trabéculectomie, on peut appliquer de la MMC sur la plaie opératoire pour retarder les phénomènes de cicatrisation [29, 48].

Les implants de drainage

La réaction fibroblastique qui survient autour de la fistule chirurgicale représente la principale cause d’échec des opérations filtrantes. Globalement, ces échecs sont de l’ordre de 50% après 6 à 12 mois [118]. Le concept d’implant de drainage a été élaboré dans le but de pallier cet inconvénient. Le principe est de dériver directement l’humeur aqueuse depuis la chambre antérieure par un tube et de l’amener vers un capteur suturé à la sclère qui servira de collecteur et favorisera la résorption du liquide dans l’espace sous-conjonctival [29, 50]. Ce capteur favorise autour de lui la formation d’un tissu fibrovasculaire que l’humeur aqueuse va devoir traverser avant d’être résorbée. La dérivation de l’humeur aqueuse vers la veine jugulaire, vers le tissu sous-cutané recouvrant l’arcade zygomatique ou vers le sinus frontal a également été proposée [31]. C’est Molteno [103] qui, à la fin des années 1960, a établi les grands principes techniques que devaient respecter les implants de drainage. Tout d’abord, le matériau doit être non réactif, limitant la réaction fibroblastique. Cet implant doit favoriser la formation d’un espace sous-conjonctival qui permet la résorption de l’humeur aqueuse vers les tissus orbitaires. Enfin, l’espace potentiel de résorption qui entraine la formation d’une bulle d’humeur aqueuse doit se trouver dans la région équatoriale du globe, où l’adhérence entre sclère et conjonctive est moindre et à distance du limbe cornéo-scléral pour limiter la survenue d’une réaction inflammatoire. Il en a résulté de très nombreux systèmes très comparables. La taille du réservoir détermine partiellement la surface de diffusion de l’humeur aqueuse et l’efficacité du système. Tous ces modèles se différencient par la nature du matériau pour la tubulure et le capteur, par le type de capteur, l’existence ou non d’un système de valve destiné à limiter les risques d’hypotonie postopératoire en imposant une pression minimum dans le système avant de permettre le drainage.

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La plate forme de drainage est placée sous un volet conjonctival, telle que sa marge antérieure se situe à l’équateur du globe, 10 à 12 mm en arrière du limbe, puis est attachée directement à la sclère à l’aide d’une suture irrésorbable. Le tube est placé dans un tunnel sous-conjonctival ou scléral jusqu’au limbe où la chambre antérieure est pénétrée à l’aide d’une aiguille 21G. Le tube est alors inséré dans le tunnel jusqu’à avoir la longueur appropriée. S’il est trop long, un contact avec l’endothélium cornéen va résulter en un œdème progressif et persistant. Le tube est enfin suturé à la sclère à l’aide d’une suture irrésorbable, et la plaie conjonctivale est refermée. Les complications postopératoires immédiates sont représentées par l’hypertonie oculaire liée à une obstruction du tube de chambre antérieure (sang ou fibrine dû à l’inflammation chirurgicale, mauvaise technique d’implantation) ou par l’hypotonie oculaire résultant d’un écoulement trop important de l’humeur aqueuse et prédisposant à l’hyphéma et au décollement de rétine. La complication retardée la plus fréquente est la récidive de l’hypertension oculaire par diminution de la résorption de l’humeur aqueuse à partir du capteur périscléral secondairement au développement d’une réaction fibroblastique majeure qui empêche la diffusion de l’humeur aqueuse. L’utilisation de MMC en une seule application peut donc paraitre intéressante de par sa propriété inhibitrice de la prolifération cellulaire in vitro des fibroblastes sous-conjonctivaux et de la capsule de Tenon [145]. D’un point de vue pratique, une fois le site scléral disséqué, la zone est traitée par le biais d’une microsponge imbibée de MMC à la concentration de 0,2 à 0,5 mg/ml. Les tissus sont exposés à la MMC pendant 5 minutes puis la zone est flushée à l’aide d’un soluté salé isotonique ou de Ringer Lactate pendant 5 minutes à nouveau ; la MMC ne doit pas entrer en contact avec les structures de la chambre antérieure ou avec les bords du volet conjonctival. Cependant, une étude expérimentale menée en 1995 [146], montre qu’une bande de tissu conjonctif de 170 µm d’épaisseur se développe tout de même en moins de 60 jours autour de l’implant sur des yeux normaux équipés d’implant de Baerveldt et ceci malgré l’application per-opératoire de 0,3 ml de MMC titrée à 0,5 mg/ml. La bulle de filtration a néanmoins une durée de vie plus longue et avec PIO mieux régulée après un traitement de l’œil à la MMC plutôt qu’avec un placebo. Il ne faut toutefois pas perdre de vue qu’avec le temps, les effets sur la circulation de l’humeur aqueuse diminuent et qu’à long terme, la fibrose se produit tout de même. Une autre étude est menée en 1995 par Glover [55]. La PIO, la facilité d’écoulement de l’humeur aqueuse et la fibrose postopératoires sont évalués après application locale de MMC lors d’une chirurgie filtrante de glaucome sur des chiens cliniquement sains. La facilité d’écoulement de l’humeur aqueuse et la PIO postopératoires ne sont pas améliorées par un traitement topique per-opératoire à la MMC. Cependant, le tissu conjonctif composé de collagène dense et de fibroblastes se développant autour de l’implant est significativement moins important sur œil traité avec de la MMC que sur un œil traité avec un placebo. La fibrose est donc réduite et retardée significativement grâce à l’application per-opératoire de MMC, même si la PIO et la facilité d’écoulement de l’humeur aqueuse ne sont pas améliorées de façon significative. Cela peut tout de même laisser penser, que l’implant sera efficace plus longtemps et donc la PIO contrôlée à plus long terme avec l’utilisation per-opératoire de MMC. En conclusion, on peut retenir que Chen et al. [25] furent les premiers à utiliser la MMC en adjonction à une chirurgie oculaire. Plus tard, ils appliquèrent aussi cette molécule par voie sous-conjonctivale au niveau du site de filtration pendant une trabéculectomie sur un œil à haut risque. Bien qu’il n’y ait pas eu de consensus en ce qui concerne sa dose optimale et sa méthode d’application, la MMC a été utilisée de plus en plus, non seulement sur des yeux à

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hauts risques quant à l’échec de la bulle de filtration, mais aussi sur des yeux dits traditionnellement à faible risque d’échec.

2. Application aux tumeurs de l’œil et de ses annexes

L’utilisation vétérinaire de la MMC dans le cadre du traitement (seul ou adjuvant) des tumeurs oculaires concerne principalement les néoplasies affectant les paupières et la cornée ; l’anatomie de ces deux structures étant particulières, un rappel sera effectué.

a. Rappels anatomiques

i. Anatomie des paupières [126]

Quatre parties peuvent être distinguées dans la structure palpébrale : la couche superficielle constituée d’un revêtement cutané, la couche musculaire constituée du muscle orbiculaire, la couche stromale où se situe le tarse, et la couche interne constituée de la conjonctive palpébrale. La conjonctive est la plus exposée de toutes les muqueuses. La membrane nictitante participe à la protection de la conjonctive et de la cornée par ses mouvements, actifs ou passifs, sur la surface cornéenne.

ii. Anatomie de la cornée [126]

C’est la partie antérieure transparente de la tunique fibreuse du globe oculaire. Elle constitue une barrière de protection des structures internes de l’œil. C’est une structure avasculaire comportant 4 à 5 couches : l’épithélium antérieur et le film lacrymal précornéen, la membrane de Bowman ou lame limitante externe (n’existe que chez les Primates), le stroma cornéen, la membrane de Descemet ou lame limitante interne et l’endothélium cornéen ou épithélium postérieur de la cornée. La photo 6 montre les différentes structures palpébrales et cornéennes.

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Photo 6 : Paupières, cornée et conjonctive d’un chien sain (Photo : E. Laurent)

1 : paupière supérieure 5 : cornée 2 : paupière inférieure 3 : membrane nictitante 4 : conjonctive bulbaire

b. Les tumeurs des Ruminants

Les tumeurs développées à partir de la conjonctive et de la cornée surviennent essentiellement chez les Bovins. L’épithélioma spinocellulaire (ESC) est la tumeur de loin la plus fréquente. Un cas a été rapporté chez les Ovins [101].

i. Circonstances d’apparition [54, 64]

La fréquence de l’ESC est très variable selon les races. Dans les pays anglo-saxons, 62% surviennent en race pure Hereford et 31% sur des croisées Hereford. En France, la prévalence la plus élevée est relevée dans la race Normande et ses croisements. D’autres races sont atteintes à niveau moindre : Montbéliarde, Prim’Holstein, Charolaise. Les Bovins atteints sont relativement âgés, 8 ans en moyenne. Rare avant 4 ans, l’ESC est exceptionnel avant 18 mois. La répartition géographique est très large avec une fréquence accrue dans les zones d’élevage des races suscitées.

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Aux Etats-Unis, le taux global de morbidité, estimé à partir des relevés d’abattoir, est de 0,8 à 1,6%, et peut aller jusqu’à 5% dans certaines régions. La prévalence réelle en élevage pourrait être 2 à 4 fois supérieure. La fréquence globale semble être beaucoup plus faible en Europe et en France compte tenu de la plus faible proportion des races sensibles. Dans un élevage atteint, les cas semblent sporadiques mais peuvent être observés d’une année sur l’autre.

ii. Clinique [54]

L’ESC, le plus souvent unilatéral, peut être bilatéral et se localise dans 66% des cas au limbe, préférentiellement sur l’axe horizontal, dans 15% des cas au niveau de la conjonctive palpébrale, dans 9% des cas sur la cornée et dans 6% des cas sur la membrane nictitante. Cinq types lésionnels sont reconnus dont 3 sont reconnus comme précurseurs (le kératoacanthome, l’hyperplasie en plaque, le papillome) et 2 comme caractéristiques de l’ESC (carcinome non invasif, carcinome invasif).

Le kératoacanthome

Aussi nommé acanthome, il se développe habituellement à la jonction cutéanomuqueuse de la paupière inférieure. Il s’agit d’une hyperkératose ayant l’apparence d’une prolifération cornée brunâtre.

L’hyperplasie en plaque

L’hyperplasie des cellules du stratum spinosum appartenant à l’épithélium squameux stratifié de la cornée ou de la conjonctive conduit à l’apparition de plaques simples ou multiples. Ces plaques ont un aspect irrégulier, plus ou moins ferme et blanc-grisâtre.

Le papillome

Sous un épithélium hyperplasié avec divers degrés d’hyperkératose, la prolifération du tissu conjonctif conduit à la formation de projections papillaires. Il en résulte des papillomes sessiles ou pédiculés, de consistance ferme, souvent localisés au limbe temporal. Ces 3 lésions semblent régresser spontanément dans environ 30% des cas et évoluent vers un ESC dans seulement 12% des cas.

Le carcinome non invasif

Il présente des caractères macroscopiques proches de ceux du papillome. Cependant, les caractères cytologiques des couches profondes de l’épithélium et à un moindre degré du stratum spinosum évoquent la malignité : augmentation du nombre de mitoses, pléomorphie, noyau hyperchromatique.

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Le carcinome invasif

Au stade invasif, les carcinomes sont volumineux et envahissent dans 14% des cas la chambre antérieure, ou plus rarement l’ensemble de l’œil. Des phénomènes de nécrose apparaissent dans plus de 40% des cas. En microscopie optique, on constate la formation de foyers acellulaires de kératine entourés de couches concentriques de cellules kératinisées. Lors de tumeur peu différenciée, les cellules sont anaplasiques, petites, basophiles, sans kératine. Un infiltrat inflammatoire est souvent présent. Les métastases lorsqu’elles apparaissent sont tardives. Elles sont plus fréquentes si la tumeur s’est développée à partir des paupières plutôt qu’à partir du limbe ou de la cornée. Les cellules métastatiques migrent par voie lymphatique expliquant l’atteinte préférentielle des nœuds lymphatiques pharyngiens latéraux et médiaux. Des métastases intracrâniennes et viscérales peuvent être observées.

iii. Etiologie

Plusieurs facteurs étiologiques contribuent, isolément ou en association à l’apparition de l’ESC. L’existence de facteurs génétiques permettrait d’expliquer la prévalence élevée de l’ESC dans certaines races et dans la descendance de certains animaux. Les facteurs génétiques sont indissociables de la pigmentation oculaire et périoculaire. La fréquence des lésions semble inversement proportionnelle à la présence de pigments sur les paupières et à la jonction cornéosclérale. La pigmentation palpébrale et sclérale est moyennement héritable (h = 0,30). Les ultraviolets (UV) contribueraient aussi à l’apparition de l’ESC. Dans les races ayant tendance à l’exophtalmie, comme la Normande, les yeux seraient davantage exposés aux rayons lumineux. Expérimentalement, sur des Hereford, l’exposition artificielle aux UV conduit en 16 semaines à l’apparition de lésions prénéoplasiques [70]. Les mécanismes d’action des UV ne sont pas élucidés chez les Bovins. Différents virus ont été mis en évidence à partir des lésions de l’ESC : fréquemment le virus de l’IBR, mais aussi le virus Herpès bovin 5 et un papillomavirus. En l’absence de reproduction expérimentale, la seule présence de ces agents infectieux ne permet pas de conclure quant à leur rôle pathogène. Divers facteurs infectieux (parasites, Moraxella), mécaniques (poussières, insectes), alimentaires (carence en vitamine A, couverture suffisante ou excessive des besoins alimentaires) ont été évoqués.

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c. Les tumeurs du Cheval

i. Les tumeurs des paupières [19]

Le carcinome épidermoïde

Egalement connu sous les dénominations d’épithélioma spinocellulaire ou de carcinome à cellules squameuses, le carcinome épidermoïde est la tumeur de l’œil et des annexes la plus fréquente chez le cheval. La prévalence moyenne de cette tumeur épithéliale augmente avec l’âge. Dans une étude, l’âge moyen des animaux atteints était de 11 ans [105]. L’incidence de cette tumeur est plus élevée chez les sujets de robe blanche, grise ou palomino, c’est-à-dire principalement les chevaux chez lesquels les muqueuses sont dépigmentées. L’exposition au soleil est un facteur prédisposant au développement du carcinome épidermoïde. Les rayons UV sont responsables de lésions inflammatoires de l’épithélium conjonctival (lésions actiniques) qui peuvent ensuite se transformer en tumeur épithéliale. Les paupières, la membrane nictitante et le limbe sont les sites d’élection de cette tumeur. Elle apparaît comme une néoformation rosée, en surélévation. Certaines tumeurs palpébrales ont un comportement érosif. Le diagnostic différentiel doit faire envisager d’autres tumeurs palpébrales (papillome, sarcoïde, adénome, mastocytome…) et des granulomes inflammatoires (habronémose, corps étranger…). L’examen cytologique après raclage de la surface tumorale aide au diagnostic différentiel. L’évolution naturelle de cette tumeur se fait par extension locale dans les tissus voisins, pouvant aller jusqu’à la cavité orbitaire et les sinus. Des métastases peuvent se faire dans les nœuds lymphatiques régionaux, les glandes salivaires et dans le thorax. Après traitement, le risque de récidive est élevé.

Le sarcoïde [77]

Les sarcoïdes sont les tumeurs cutanées les plus courantes chez le Cheval. Ils ont tendance à être agressifs localement mais ils ne métastasent généralement pas. Il semble qu’il y ait une prédisposition génétique à cette affection, probablement induite par un virus. Un rétrovirus a été suggéré dans l’étiologie mais aucune confirmation n’en a été faite. Des prédisposions génétiques, familiales et de race ont été identifiées. Les Quarter Horse, les Appaloosas et les Arabes sont les races au sein desquelles le risque de développement d’un sarcoïde est le plus élevé. Ils sont suivis par les Purs Sangs. Les races « standard » sont celles au sein desquelles le risque est le plus bas. Le risque d’apparition d’un sarcoïde est important avant l’âge de 7 ans jusqu’à 15 ans environ, ensuite il diminue. Le diagnostic repose généralement sur la combinaison d’une suspicion clinique et d’une biopsie. Les sarcoïdes périorbitaires sont généralement unilatéraux (78%) et affectent la pupart du temps la paupière supérieure (67%). Le canthus médial est aussi plus souvent atteint que le canthus latéral. 86% des chevaux présentent des sarcoïdes sur d’autres parties du corps. Les

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sarcoïdes périoculaires peuvent être très invasifs dans le muscle, le tissu nerveux, le tissu conjonctif, en particulier dans la paupière supérieure. L’invasion intra-osseuse n’a cependant jamais été rapportée. La classification des sarcoïdes périorbitaires est basée sur leur apparence physique : verruqueux, nodulaire, fibroblastique, mixte et malin.

ii. Les tumeurs de la membrane nictitante [19, 105, 1116]

Le carcinome épidermoïde est la tumeur de la membrane nictitante la plus courante. Elle est le siège du carcinome épidermoïde dans environ 30% des cas à localisation oculaire. L’atteinte est très souvent unilatérale mais peut être bilatérale. L’âge moyen d’apparition est de 10 ans. L’hypopigmentation des muqueuses ainsi que l’exposition au soleil seraient deux facteurs favorisant l’apparition d’un carcinome épidermoïde à cette localisation. La tumeur apparaît généralement rosée, surélevée par rapport au plan de la membrane et d’aspect granuleux. Elle peut devenir ulcérative et nécrotique en se développant. Des métastases régionales ou thoraciques se développent dans 10 à 15 % des cas. Le diagnostic clinique peut s’appuyer sur un examen cytologique ou une biopsie sur la pièce d’exérèse.

iii. Les tumeurs de la cornée [19]

Les tumeurs primitives de la cornée du cheval sont relativement rares et ont généralement une origine épithéliale ou beaucoup plus fréquemment, conjonctivale par extension d’une tumeur primaire. On reconnaît trois types histologiques principaux qui sont probablement des étapes de différenciation de carcinomes épidermoïdes. Parmi eux, citons la kératose cornéenne qui se manifeste par une hyperplasie épithéliale à petites cellules se développant progressivement dans le stroma antérieur, accompagnée par une inflammation modérée. La suspicion clinique sera étayée par l’examen histo-pathologique. Dans le carcinome intra-épithélial, l’épithélium est progressivement remplacé par des cellules atypiques et pléiomorphes ; le diagnostic est là aussi lié à l’examen histo-pathologique. Le carcinome épidermoïde est de loin le plus fréquent et se manifeste par l’extension de cellules squameuses malignes, peu métastatiques et atypiques, intéressant l’épithélium et le stroma antérieur, et extensives vers les structures oculaires adjacentes. Souvent très vascularisée, la lésion est entourée d’une large zone d’œdème. Le diagnostic se base sur un aspect macroscopique univoque et sur l’examen histopathologique. D’autres tumeurs cornéennes sont des extensions de tumeurs limbiques (mélanomes, hémangiosarcomes, mastocytomes, adénocarcinomes…) sont rares et souvent justiciables d’énucléation ou d’exentération.

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d. Les tumeurs des Carnivores

i. Les tumeurs des paupières

chez le Chien [79, 120]

Les tumeurs palpébrales du chien se rencontrent assez fréquemment en pratique courante. Elles sont habituellement traitées par une exérèse chirurgicale. Les tumeurs les plus fréquentes sont les tumeurs des glandes sébacées, les papillomes et les mélanomes. Selon une étude menée sur 202 chiens atteints de tumeurs palpébrales, ces dernières représentent 82% des tumeurs rencontrées [79]. La majorité des tumeurs palpébrales sont bénignes (73,3% contre 26,7% de tumeurs malignes) ; les tumeurs malignes ont tendance à être localement envahissantes mais elles ne métastasent pas et récidivent rarement. Cependant, les adénocarcinomes sébacés, les carcinomes épidermoïdes, les mélanomes malins et les hémangiopéricytomes sont connus pour récidiver après exérèse chirurgicale. La classification histologique et la fréquence de chaque type tumoral sont présentées dans le Tableau 7. Dans le cadre de cette étude de 202 cas [79], on observe, lors d’exérèse chirurgicale, un pourcentage plus important de tumeurs situées sur la paupière supérieure (40,2%) que de celles situées sur la paupière inférieure (30,2%). Les tumeurs des glandes sébacées et les mélanomes ont été plus souvent observés sur les paupières supérieures, alors que les histiocytomes ont été observés sur les paupières inférieures. Seulement 4% des tumeurs concernent les canthus médial ou latéral. Une fréquence plus élevée, statistiquement significative, de tumeurs palpébrales a été observée chez les Boxers, les Colleys, les Cockers Spaniels, les Springers Spaniels, les Beagles, les Huskies et les Setters Anglais, tandis que les Bergers Allemands sont nettement moins touchés par les tumeurs palpébrales, si on les compare à une population normale (les chiens de race pure présentent un risque plus élevé de développer des tumeurs palpébrales en comparaison des chiens croisés). L’âge moyen des chiens présentant des tumeurs palpébrales est de huit ans, alors que l’histiocytome se rencontre plutôt chez les jeunes chiens (âge moyen 3,5 ans) [79, 120].

Adénome sébacé

L’adénome sébacé est la tumeur palpébrale la plus répandue chez le chien – la prévalence des tumeurs des glandes sébacées n’est pas surprenante si l’on considère l’importance des éléments glandulaires dans la paupière chez le chien. C’est une tumeur bénigne qui se développe à partir des glandes de Meibomius. Le plus souvent, seule une petite partie de la tumeur apparaît sur le bord palpébral et l’éversion de la paupière permet d’observer la base de la tumeur sur la face interne de la paupière. Cette tumeur peut devenir kystique ou se développer au-delà du bord palpébral à travers la conjonctive, causant une kératoconjonctivite et interférant avec le clignement des paupières. Cette tumeur située sur la face conjonctivale de la paupière est souvent très pigmentée par de la mélanine (issue des mélanocytes de la jonction cutanéomuqueuse). Son aspect microscopique révèle un arrangement multilobulaire où des cellules sébacées prolifératives s’agglutinent en paquets séparés par du tissu conjonctif.

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Le développement de ces tumeurs peut se compliquer de chalazion, par enserrement du canal excréteur des glandes de Meibomius. La chirurgie donne d’excellents résultats en fonction de la taille de la tumeur [79, 120].

Papillome

Le papillome est généralement superficiel et bien délimité ; il doit être enlevé si sa taille trop importante interfère avec la fonction palpébrale ou s’il irrite la cornée. Chez le jeune chien, il est souvent associé à des papillomes buccaux et régresse assez souvent spontanément. Cette tumeur est caractérisée par des modifications histologiques de dyskératose, d’acanthose et d’hyperkératose. L’analyse histologique montre des projections papillaires faites de tissu conjonctif entouré d’épithélium squameux prolifératif. Le derme est le plus souvent peu altéré, mais présente une néovascularisation pouvant conduire à une hémorragie secondaire. Elle est sensible à la cryothérapie. La simple cautérisation étant fréquemment suivie de récidive, on doit procéder à une résection de la paupière dans toute son épaisseur, résection plus ou moins étendue selon la dimension de la tumeur. Toute technique essayant de préserver le bord libre de la paupière laisse fatalement un fragment de papillome qui se développera ultérieurement [120].

Mélanome

Les mélanomes des paupières chez le chien sont habituellement superficiels, bien délimités et de couleur foncée. De caractère bénin, ils apparaissent le plus souvent chez les chiens âgés et de races à robe foncée. Ce type tumoral est à croissance lente et peut être multiple, il est rencontré le plus souvent près du bord palpébral. Certains mélanomes sont pédiculés, cependant la majorité de ces tumeurs sont des nodules dermiques bien délimités. La forme bénigne est composée de nodules superficiels bien délimités dont les cellules contiennent un taux variable de mélanine ; cette forme ne présente pas de caractéristique invasive, ni d’anisocariose ou d’anisocytose. Une inflammation et une ulcération concomitantes sont rarement rencontrées dans cette forme. La forme maligne présente une densité cellulaire plus élevée et des bordures tumorales mal délimitées. La différenciation cellulaire est restreinte et les mitoses très fréquentes ; la quantité de pigment contenu dans cette forme est souvent moins importante que dans la forme bénigne [79].

Adénocarcinome sébacé [79]

L’adénocarcinome est cliniquement identique à l’adénome sébacé, mais se rencontre beaucoup plus rarement. De taille plus importante que l’adénome, il présente une croissance plus rapide, ainsi qu’une diffusion plus importante aux tissus adjacents. L’analyse histologique révèle un pourcentage plus élevé de cellules prolifératives. Une hypervascularisation est souvent présente et une pigmentation peut apparaître associée à une prolifération de mélanocytes. Bien que son étude histologique présente des caractéristiques qui suggèrent une malignité (chromatine en motte et activité mitotique intense), il ne semble pas métastaser.

Histiocytome

L’histiocytome se rencontre très fréquemment chez le jeune en croissance ; sa spécificité étant un développement rapide. Sa taille est habituellement de moins d’1cm de diamètre ; son aspect est rose et glabre. Ce nodule alopécique régresse souvent spontanément au bout de quelques semaines [79, 141].

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Carcinome épidermoïde

Le carcinome épidermoïde est une tumeur palpébrale très rare chez le chien. Il se présente généralement comme une tumeur proliférative ou ulcérative. A l’analyse histologique le carcinome épidermoïde du chien est similaire à celui rencontré chez le chat et le cheval. On observe des cordons cellulaires d’infiltration. Les cellules néoplasiques sont habituellement polymorphes avec des noyaux de taille importante pouvant présenter de multiples nucléoles et une chromatine dense [9, 104]. Les pseudotumeurs sont des processus inflammatoires prolifératifs qu’il est difficile de différencier des tumeurs réelles. Elles se présentent habituellement sous la forme de masses sous-cutanées responsables d’une distorsion palpébrale [141]. Lorsqu’il s’agit de tumeurs palpébrales, il y a souvent une considération esthétique, cependant dans les cas de tumeurs accompagnées d’irritation cornéenne, de lagophtalmie, d’hémorragie ou lorsque l’on soupçonne une malignité, le traitement devient alors primordial. Dans tous les cas, la mise en œuvre thérapeutique est plus facile si la tumeur est de petite taille, c’est pourquoi il est conseillé d’intervenir le plus rapidement possible. Les tumeurs à croissance rapide ou largement pigmentées subissent une exérèse large conduisant le plus souvent à une blépharoplastie reconstructrice. L’exérèse tumorale doit être suivie d’une analyse histopathologique, en examinant les marges d’exérèse, pour s’assurer que celle-ci est complète. Si l’analyse histopathologique révèle une exérèse incomplète dans le cas d’une tumeur maligne, une nouvelle intervention chirurgicale est nécessaire. Tableau 7 : Classification histologique et fréquence (%) des tumeurs palpébrales chez le Chien [79, 120] Type tumoral N = 2021 (%) N = 2002 (%) Adénome sébacé 28.7 60 Papillome 17.3 10.6 Adénocarcinome sébacé 15.3 2 Mélanome bénin 12.9 17.6 Mélanome malin 7.9 2.8 Histiocytome 3.5 1.6 Mastocytome 2.5 1 Carcinome à cellules basales 2.5 1.2 Carcinome épidermoïde 2 1 Fibrome 2.1 Fibropapillome 1 Lipome 1 Autres tumeurs 3 1 Tumeurs indéterminées 0.5 1.2 Tumeur bénigne 73.3 87.8 Tumeur maligne 26.7 8.2 1 données de Krehbiel JD et Langham RF : Eyelid neoplasms of dogs, Am. J. Vet. Res. 1975 [79] 2 données de Roberts SM, Severin GA et Lavach JD : Prevalence and treatment of palpebral neoplasms in the dog: 200 cases. J. Am. Vet. Med. Ass. 1986 [120]

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chez le Chat [108]

Les carcinomes sont les tumeurs les plus fréquentes chez le Chat. Les animaux affectés sont en général des adultes en milieu ou fin de vie (10.4 ans) et aucune race n’est spécifiquement concernée par ces affections cancérologiques. La paupière inférieure et le canthus médial sont, chez le Chat, les sites privilégiés de ces tumeurs. Le plus souvent, également, le site affecté est dépigmenté, compte tenu d’une sensibilité accrue aux rayonnements UV. La classification histologique et la fréquence de chaque type tumoral sont présentées dans le Tableau 8. Tableau 8 : Classification histologique et fréquence (%) des tumeurs palpébrales chez le Chat [108] Type tumoral N = 43 (%) [108] Lymphome 7 Adénocarcinome sébacé 9.3 Schwannome 7 Hydrocystome 7 Hémangiome 4.7 Mastocytome 25.6 Carcinome épidermoïde 27.9 Hémangiosarcome 14

ii. Les tumeurs de la membrane nictitante [130]

Le diagnostic de ces tumeurs repose sur la cytoponction ou la biopsie. Selon leur nature histopathologique, une excision locale simple peut être envisagée. Lors de tumeurs agressives, une exérèse de la membrane nictitante peut être préconisée, en surveillant le maintien d’une production lacrymale correcte.

Les tumeurs épithéliales

Elles apparaissent le plus souvent sur la face externe de la membrane nictitante. Le papillome, exophytique, est aisément excisé localement. Le carcinome squameux, rare, apparaît irrégulier et souvent ulcéré chez les vieux chiens. Il présente une forte agressivité locale et peut progresser dans l’orbite. Le mélanome, très rare, débute généralement près du bord libre. Son exérèse doit être large en raison des possibilités de récidives et de métastases.

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Les tumeurs du chorion

L’hémangiome et l’angiokératome apparaissent comme des nodules rouges vifs lisses saignant à la manipulation. Une exérèse large permet d’éviter les récidives. Le lymphome apparaît comme un épaississement bilatéral des membranes nictitantes à l’origine d’une procidence incoercible. Une dépigmentation locale peut être présente, éventuellement accompagnée d’autres manifestations oculaires (hyphéma, hémorragie rétinienne…). Une procidence bilatérale peut aussi apparaître dans le cadre d’une compression vagosympathique par un lymphome médiastinal. Plus fréquent chez le chat, le lymphosarcome peut être associé à une rétrovirose dans cette espèce [130]. Le mastocytome se présente comme un épaississement unilatéral de la membrane nictitante. L’hystiocytome se présente comme un nodule lisse rosé correspondant à une simple prolifération des cellules de Langerhans.

iii. Les tumeurs de la glande nictitante [130]

L’adénocarcinome se présente comme une masse indurée, lisse et rosée pouvant mimer une glande luxée. L’exérèse est préconisée en raison de son fort potentiel métastatique. L’adénome mime également une glande luxée un peu indurée.

iv. Les tumeurs de la cornée

Carcinome épidermoïde

Les carcinomes épidermoïdes cornéens primaires chez le chien sont des masses tumorales se développant directement à partir de la cornée. Les carcinomes épidermoïdes cornéens primaires apparaissent comme des masses blanches à rosées, multilobulées et en surélévation. Le limbe cornéoscléral peut être impliqué et une vascularisation superficielle ainsi que des opalescences diffuses de la cornée sont communes. Les irritations chroniques associées à une kérato-conjonctivite sèche pourraient avoir joué un rôle dans la transformation de cellules épithéliales cornéennes en cellules cancéreuses chez un chien [53, 150].

Papillomes

Il semblerait que ces tumeurs soient les plus courantes chez le jeune chien et ont le même aspect que les excroissances papillomateuses buccales ou palpébrales [53].

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Lymphosarcome cornéen

Il peut infiltrer la cornée et ressemble à un infiltrat cellulaire blanc à rose. Ces lésions peuvent être stromales, sclérales ou épisclérales et sont couramment non douloureuses à moins d’une ulcération cornéenne. Les lymphosarcomes cornéens sont associés aux lymphosarcomes systémiques et la présence de lésions oculaires suggère une maladie au grade 5. Le pronostic pour ces chiens est mauvais [53].

Autres néoplasies cornéennes

De nombreuses autres tumeurs ont été décrites sur la cornée du chien, en particulier des hémangiomes, hémangiosarcomes et adénocarcinomes. Les hémangiomes du limbe cornéen sont rares et ils envahissent la cornée mais sont de croissance lente. Les hémangiosarcomes de la cornée sont rares aussi chez le chien mais sont assez destructeurs ; ils sont généralement accompagnés par une vascularisation cornéenne étendue et un œdème péri-lésionnel [53].

e. Traitement des tumeurs

La stratégie thérapeutique en cancérologie oculaire est tout à fait similaire à celle de la cancérologie générale. Ainsi, avant tout acte thérapeutique, il est nécessaire d’avoir réalisé un bilan d’extension de la tumeur et prédire son comportement grâce à la connaissance de sa nature histologique. Cette dernière est déterminée soit par la cytologie, soit par l’examen anatomopathologique. Ces deux éléments (bilan d’extension et nature histologique) permettent la détermination d’un pronostic précis et, de manière logique et rationnelle, le choix du traitement le plus adapté. En aucun cas, on ne doit décider un traitement lourd sans ces éléments.

i. Particularité du bilan d’extension en cancérologie oculaire [37, 98]

Le bilan d’extension d’une tumeur correspond à la recherche systématique par le clinicien de l’extension locale, régionale et générale d’un cancer. Il fait appel à l’examen clinique, aux techniques aussi bien d’imagerie médicales que d’analyses biologiques. Afin de ne rien omettre, on scinde de façon théorique la démarche en trois étapes :

- L’étape « T » pour tumeur qui correspond à l’évaluation de l’extension locale du processus

- L’étape « N » pour nœud lymphatique qui correspond à l’appréciation de l’extension loco-régionale

- L’étape « M » pour métastase, dont l’éventuelle observation signe la généralisation du cancer.

A chaque étape est affectée une note et le score global permet d’attribuer à la tumeur un stade clinique basé sur la classification TNM de l’OMS (modifiée pour les animaux domestiques par Owen en 1980).

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Le bilan d’extension en cancérologie oculaire présente essentiellement des particularités en ce qui concerne le « T ». Ainsi, pour la plupart des types histologiques rencontrés, l’extension locale de la tumeur intraoculaire à l’extérieur du globe oculaire est un facteur de mauvais pronostic. La tumeur présente d’ailleurs, dans ce cas, souvent un pouvoir métastatique élevé. De plus, pour un même type histologique ou même de manière plus générale, plus la tumeur atteint des structures internes, plus le pronostic est mauvais. Le drainage lymphatique de l’œil et de ses annexes se fait vers le lymphocentre parotidien ou vers le lymphocentre mandibulaire. Ces deux derniers sont ensuite drainés par les lymphocentres rétro-pharyngiens latéral et médial. Ce dernier est parfois difficile à visualiser cliniquement et nécessite alors un examen radiologique pour démontrer son atteinte.

ii. Choix des modalités thérapeutiques

Les différents traitements anti-cancéreux applicables lors de tumeurs oculaires sont la chirurgie, la chimiothérapie (locale ou systémique) et la radiothérapie. La mise en place de ces différentes modalités va se décider en fonction de la localisation tumorale, de la nature histologique et du bilan d’extension. Le tableau 9 représente une aide à la décision thérapeutique en fonction de ces critères. Tableau 9 : Aide à la décision thérapeutique en fonction des critères « comportement » et « bilan d’extension » de la tumeur [37, 98] Type de comportement

Bilan d’extension

Choix thérapeutique Exemple de tumeur oculaire

Bénin Négatif Chirurgie seule, pas de chimiothérapie, ni de radiothérapie

Histiocytome, mélanome bénin, adénomes palpébraux

Bénin « infiltrant » Négatif Chirurgie précoce Chirurgie tardive = délabrante (énucléation, exentération)

Neurofibrome palpébral, toute tumeur de diagnostic tardif

Malin à pouvoir métastatique élévé

Négatif Chirurgie plus chimiothérapie adjuvante

Mastocytome palpébral grade III, hémangiosarcome profond

Malin à agressivité locale élevée et pouvoir métastatique faible

Négatif Chimiothérapie plus radiothérapie (ou chimiothérapie si radiothérapie impossible)

Carcinome épidermoïde, fibrosarcome palpébral

Malin Positif Chimiothérapie palliative Lymphosarcome, toute tumeur maligne métastasée

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iii. Le traitement chirurgical [37, 98]

La chirurgie représente le traitement de base en cancérologie oculaire. Pour être « oncologique », elle doit respecter certaines règles ; parmi celles-ci, la précocité de l’intervention est fondamentale. En effet, une tumeur opérée tardivement va posséder un volume plus important. Sur une structure anatomique comme la paupière, l’exérèse peut devenir impossible et l’énucléation être la seule option chirurgicale. Il est d’ailleurs notable qu’en cancérologie, on se bat avant tout pour le pronostic vital et non pas, dans les cas avancés, pour le pronostic esthétique ou visuel. Il est plus important de sauver l’animal que de sauver sa vision (au moins sur un œil). Ainsi, en cas de doute, il ne faut pas hésiter à prendre la décision d’énucléer plutôt que de laisser en place un tissu tumoral susceptible de métastaser. La chirurgie en cancérologie oculaire peut être prise en défaut dans certains cas de figure : chirurgie trop tardive (volume tumoral trop important), agressivité locale de la tumeur marquée, pouvoir métastatique élevé. Les principales tumeurs oculaires à agressivité locale sont les carcinomes épidermoïdes (palpébraux, cornéens ou conjonctivaux), les fibrosarcomes, les mastocytomes et certains mélanomes. Les tumeurs oculaires à pouvoir métastatique sont les lymphosarcomes, les mélanomes malins, les mastocytomes de haut grade et les hémangiosarcomes sous-cutanés [98].

La chirurgie des tumeurs palpébrales

Les tumeurs de petite taille n’impliquant pas le limbe palpébral [97]

Les tumeurs n’impliquant pas le limbe ni la conjonctive, inférieures à 25% de la longueur de la paupière et d’une largeur inférieure à 5mm peuvent être excisées par une simple incision elliptique. Lorsque la tumeur n’est pas située sur le bord palpébral il y a moins de risque de compromettre la fonctionnalité de la paupière. Cependant, si une lésion trop large est excisée par simple incision elliptique, il y a un risque de développement d’un ectropion secondaire.

Les tumeurs de grande taille n’impliquant pas le limbe palpébral [12]

Le lambeau de transposition est particulièrement utile parce qu’il permet de reconstruire la peau à partir de tissu cutané situé dans une autre direction tout en évitant de générer des tensions au moment de la suture. De plus, ce lambeau peut être utilisé à la fois lors de la reconstruction de la paupière supérieure et inférieure, par utilisation du tissu cutané de la région dorsale, temporale, ou jugale. Un inconvénient de cette technique est son résultat esthétique moins intéressant que celui obtenu par le lambeau d’avancement pédiculé, si l’on considère le changement d’orientation des poils. Il est par contre nécessaire de faire attention à la direction des poils du lambeau afin d’éviter une irritation de la cornée secondaire à l’intervention. Un lambeau cutané est créé avec un angle de 90 degrés par rapport à la plaie puis est tourné afin de combler le déficit. Il doit servir à combler le déficit sans tensions : ainsi la largeur du lambeau correspond à celle du déficit, tandis que sa base vient se positionner directement sur un côté du déficit. La longueur du lambeau est mesurée en partant de l’extrémité de la base la plus éloignée du déficit (ou point pivot) et en allant jusqu’à la localisation finale de

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l’extrémité du lambeau. Le lambeau est ensuite créé par une incision cutanée et une dissection des tissus sous-jacents. Il est alors tourné selon un angle de 90 degrés pour venir combler le déficit, puis est suturé en place par des points cutanés simples de fil non résorbable 6-0 ; le site donneur est suturé de la même façon. Le lambeau de rotation est surtout utilisé pour les déficits palpébraux de forme triangulaire. Cependant lors de déficit de la paupière inférieure chez un chien ne possédant pas assez de peau adjacente à la lésion pour permettre un simple lambeau d’avancement, le lambeau de rotation s’avère utile. Le lambeau peut être créé à partir de la région temporale ou jugale afin de combler le déficit. La peau est incisée en forme d’arc de cercle. La longueur de cet arc de cercle devant correspondre à trois fois celle de la lésion. Le lambeau est ensuite libéré des tissus sous-jacents par dissection. Il est alors tourné pour venir combler le déficit, puis est suturé en place par des points cutanés simples de fil non résorbable 6-0.

Les tumeurs de petite taille impliquant le limbe palpébral [6, 97, 106]

Les tumeurs impliquant moins d’un tiers de la longueur du bord palpébral peuvent être traitées par une résection palpébrale de pleine épaisseur de forme triangulaire ou pentagonale. L’exérèse triangulaire est utilisée lorsque la portion tumorale la plus large est située sur le bord palpébral, alors que l’on choisira de préférence l’exérèse pentagonale lorsque la portion tumorale la plus large n’implique pas le bord palpébral. L’exérèse pentagonale permet une moindre perte du bord palpébral et une meilleure apposition des berges cutanées. Le remodelage de la paupière compensant les pertes tissulaires de faible importance, les sutures de la conjonctive et du tissu cutané sont suffisantes puisque ces deux plans ont une plus grande élasticité que le plan musculaire palpébral [61]. Pour ces raisons, on ne développera que la résection pentagonale. Une plaque à paupières de Jaeger est placée sous la paupière lésée afin de protéger le globe lors de l’incision en pleine épaisseur de la paupière. Le tissu cutané adjacent à la tumeur (en respectant une marge de 2 à 3mm) est incisé à l’aide d’une lame N°15 par deux traits parallèles entre eux et perpendiculaires au bord palpébral se réunissant en pointe par deux incisions en biais et convergentes. Cette incision cutanée est complétée, à l’aide de ciseaux pointus, à travers le muscle orbiculaire, le tarse et la conjonctive palpébrale pour permettre l’exérèse « en bloc » de la tumeur. On peut aussi se servir de la pince à chalazion, ou des pinces Mosquito, pour stabiliser la paupière et permettre une hémostase de la même manière que lors de l’exérèse triangulaire. Le plan conjonctival est suturé par un surjet simple de fil résorbable 5-0 ou 6-0, en partant du fornix et en se dirigeant vers le bord palpébral, de sorte que les points soient enfouis entre la conjonctive et la peau. Le plan du muscle orbiculaire n’est pas suturé (ceci permet aux tissus conjonctival et cutané de s’étirer). La suture cutanée doit permettre un ajustement précis du bord palpébral par un premier point en lacet de bottine suivi de trois à cinq points simples de suture non résorbable 4-0 ou 5-0.

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Figure 6 : Résection pentagonale (d’après [106])

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Les tumeurs de grande taille impliquant le limbe palpébral [6, 97, 106]

Les néoformations impliquant plus du tiers de la longueur du bord palpébral exigent, en général, une reconstruction plastique pour préserver le fonctionnement palpébral après excision de la tumeur. Dans de nombreux cas, une cryothérapie préopératoire ou une radiothérapie peuvent être utilisées pour réduire la taille de la tumeur avant l’excision. Cette méthode permet une plus grande préservation du tissu palpébral ainsi que du fonctionnement physiologique de la paupière. Il ne doit pas s’exercer de tension sur les tissus proches des lignes de suture. On doit également veiller à la direction qui sera prise par les poils, lors de leur repousse, afin d’éviter la formation de trichiasis secondaires à l’intervention. De très nombreuses techniques ont été décrites dans la littérature vétérinaire ; on ne développera ici qu’une seule technique, assez simple et qui est applicable dans un grand nombre de tumeurs palpébrales représentant plus d’1/3 de la longueur de la paupière, le lambeau d’avancement pédiculé. Après l’exérèse tumorale un lambeau cutané, dont la base est ventrale au déficit palpébral si ce dernier implique la paupière inférieure (et vice-versa si le déficit est sur la paupière supérieure), est créé avec une largeur correspondant à celle du déficit. Grâce à la vascularisation abondante du tissu cutané palpébral, la longueur du pédicule peut atteindre jusqu’à deux fois celle du déficit si nécessaire. Un triangle de peau est excisé de chaque côté de la base du lambeau, afin de permettre à ce dernier d’avancer sans créer de plis cutanés. La peau est disséquée au niveau du tissu conjonctif lâche sous-cutané, puis le lambeau est mobilisé pour venir recouvrir le déficit. L’extrémité du lambeau doit dépasser le bord palpébral de 0.5 à 1mm en prévision de la contraction tissulaire postopératoire. Les deux incisions situées sur le bord palpébral sont suturées en premier, en utilisant des points de bottine. La conjonctive est suturée à l’extrémité du lambeau cutané par un surjet simple de fil résorbable 6-0 ou 7-0. Il faut absolument éviter de créer des tensions sur la conjonctive, sinon un entropion cicatriciel peut se développer. La peau est suturée par des points simples à l’aide de fil non résorbable 5-0 ou 6-0. Ce lambeau est très efficace lors de reconstruction de la paupière supérieure ; si une immobilité partielle de la paupière apparait la protection cornéenne reste cependant suffisante. Toutefois, cette technique est aussi applicable à la paupière inférieure chez le chien. Si la conjonctive palpébrale ne peut être préservée, la face postérieure du lambeau cutané peut être doublée spontanément par des cellules conjonctivales ; un lambeau conjonctival créé dans la conjonctive adjacente, la conjonctive de la membrane nictitante ou de la paupière opposée peut aussi être utilisé pour doubler le lambeau cutané.

La chirurgie des tumeurs cornéennes [53, 72]

Les tumeurs cornéennes rencontrées en pratique sont dans une grande majorité de cas des tumeurs épithéliales. La kératectomie partielle sera donc la technique chirurgicale la plus adaptée à cette exérèse tumorale. Tout d’abord, il faudra trouver un plan de clivage. Il doit correspondre à une profondeur suffisante de cornée pour inclure toute l’épaisseur de la lésion. Il doit donc passer nécessairement sous la tumeur cornéenne. De plus, la dissection du lambeau cornéen est importante. Il faudra tenir la lèvre de l’incision, côté partie à disséquer avec la pince de Bonn, et disséquer le stroma cornéen avec le couteau cliveur ou la lame de rasoir en appuyant sur la partie convexe sur le fond de l’incision (côté stroma cornéen) et en lui donnant une angulation de 30° environ. Par des mouvements de va-et-vient du couteau ou de la lame, on débute le plan de clivage et on poursuit en portant un soin particulier à maintenir ce plan.

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D’un point de vue technique, il faut dans un premier temps tracer l’incision non perforante jusqu’à la profondeur désirée. Puis, il faut trouver le plan de clivage sous la lésion cornéenne en disséquant le stroma avec la pointe de la lame. Puis, il faut saisir le bord du lambeau cornéen ainsi dégagé pour le soulever. Enfin, il faudra engager le couteau cliveur ou la pointe de la lame sous ce lambeau et disséquer le stroma en suivant le plan de clivage initial. Il faut ensuite poursuivre la dissection jusqu’à permettre l’exérèse complète du fragment de cornée. Afin de favoriser et de rendre plus rapide la cicatrisation cornéenne, une greffe conjonctivale par lambeau de glissement, par lambeau de rotation, une greffe de biomatériau, une greffe conjonctivale en ilot ou une greffe de membrane amniotique peuvent être réalisées.

iv. La chimiothérapie

Elle peut être pratiquée soit de manière systémique soit par voie locale. Lors d’une utilisation systémique, on peut rechercher soit un effet systémique de prévention des métastases soit une action locale au niveau du site tumoral. Dans ce second cas, son emploi vise à prévenir la récidive locale. Localement, elle est injectée (dans la tumeur ou en zone péri-cicatricielle) ou appliquée sous forme de topique (collyre). Les tumeurs susceptibles de répondre à un traitement cytotoxique en cancérologie oculaire sont les mastocytomes, les mélanomes malins, les lymphosarcomes, les fibrosarcomes, les hémangiosarcomes et les carcinomes épidermoïdes.

Chimiothérapie des mastocytomes [27, 141]

La chimiothérapie ne doit pas être systématique lors de mastocytomes. Son indication dépend de critères cliniques : chirurgie infaisable ou insuffisante et bilan d’extension positif mais aussi de critères histologiques : marges infiltrées, grade II avec Ki67>10% ou grade III. Le protocole de choix combine chimiothérapie à base de vinblastine (Velbe®) et corticothérapie. La vinblastine est injectée par voie intraveineuse stricte (pose de cathéter obligatoire) à la dose de 2 mg/m² quatre fois à une semaine d’intervalle, puis quatre fois à deux semaines d’intervalle. En fonction de chaque cas (en particulier le grade III), ces injections peuvent être prolongées indéfiniment à un rythme bihebdomadaire, pendant au moins 6 mois. La principale toxicité à surveiller est médullaire : réalisation de numération-formule (NF) avant chaque séance et 7 jours après chaque séance. La corticothérapie utilise la prednisone à la dose initiale de 2 mg/kg/jour pendant 28 jours puis en corticothérapie à jours alternés. Les effets digestifs sont tout particulièrement à surveiller. On peut prescrire à titre préventif de la cimétidine (Tagamet®) à 5 mg/kg, 3 fois par jour et ce d’autant plus que cette molécule présente également des propriétés anti-tumorales.

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Chimiothérapie du mélanome malin [27, 98]

De même que pour les mastocytomes, la chimiothérapie ne sera mise en œuvre que sous certaines conditions. Il faut être sûr du caractère malin pour les mélanomes intéressants le territoire cutané. Le meilleur indice est alors le Ki67 (caractère malin du mélanome lorsque le marqueur est supérieur à 15%). Pour les autres localisations, la décision se fait selon les critères définis dans le tableau 10. La molécule de choix à l’heure actuelle, pour traiter un mélanome est certainement le carboplatine (Carboplatine®, Paraplatine®). Elle s’utilise chez le chien à la dose de 300 mg/m² par voie intraveineuse au sein d’une perfusion de courte durée et toutes les 3 semaines. Chez le chat, la dose est de 200 mg/m² toutes les 4 semaines. La principale toxicité est médullaire ; les toxicités digestive et rénale du cisplatine sont rares avec le carboplatine. La fonction rénale devra cependant être surveillée. Tableau 10 : Aide décisionnelle à la chimiothérapie des mélanomes péri-oculaires [27, 98] Localisation Espèce Comportement Chimiothérapie Palpébral Chien et chat Comme mélanome

cutané, globalement bénin

Oui si Ki67>15%

Conjonctival Chien et chat Infiltrant, risque de récidive, potentiellement métastatique

Oui si chirurgie insuffisante, si atteinte membrane nictitante, si indice métastatique élevé

Limbique Chien et chat Croissance lente, potentiellement infiltrant

Non sauf si chirurgie prise en défaut ou bilan d’extension positif

Chimiothérapie du lymphome [98]

Le lymphome peut exister sous deux formes distinctes au niveau oculaire. La première est celle du lymphome T-épithéliotrope qui atteint les jonctions cutéano-muqueuses donc les paupières. Son traitement repose, au stade érythémateux, sur l’association rétinoïdes de synthèse et corticoïdes. Le rétinoïde de synthèse employé est l’acitrétine (Soriatane®) à la dose de 1 à 3 mg/kg/jour par voie orale. La prednisone utilisée en parallèle est prescrite à 1mg/kg/jour en dose initiale. Lors de la phase tumorale, un protocole (L-LP) associant la L-asparaginase (en induction) à la lomustine et aux corticoïdes est recommandé. Les atteintes oculaires lors de lymphomes multicentriques sont nombreuses et peuvent alors provoquer différentes lésions : uvéite antérieure, postérieure, hémorragie, infiltration conjonctivale… Le traitement employé est alors celui du lymphome multicentrique et fait appel à des protocoles de polychimiothérapie de type COPLA (association de vincristine (Oncovin®) 0,7 mg/m² en IV stricte, de L-asparaginase (Kidrolase®) 10000 U/m² IM, de cyclophosphamide (Endoxan®) 250 mg/m² IV ou voie orale, de doxorubicine (Adriblastine®) 30 mg/m² en perfusion et de prednisone à 1 mg/kg/jour puis en corticothérapie à jours alternés) chez le chien et L-OP (association de vincristine 0,7 mg/m² en IV stricte, de L-asparaginase 10000 U/m² IM et de prednisone à 1 mg/kg/jour puis en corticothérapie à jours

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alternés) chez le chat. Les cas présentant une atteinte oculaire auraient un plus mauvais pronostic que ceux sans atteinte [98].

Chimiothérapie de l’hémangiosarcome

Elle est mise en place si l’atteinte oculaire correspond à une métastase d’une localisation primitive splénique ou cardiaque. Elle ne sera alors que palliative. La chimiothérapie adjuvante peut être décidée lors d’infiltration profonde sous-cutanée des paupières. Trois protocoles peuvent être utilisés ; la doxorubicine seule (30 mg/m², 6 fois à 3 semaines d’intervalle), le protocole AC (doxorubicine 30 mg/m² J1 et cyclophosphamide 50 à 75 mg/m² J3 à J6, 6 fois à 3 semaines d’intervalle) ou le protocole VAC (doxorubicine 30 mg/m² et cyclophosphamide 100 mg/m² J1, vincristine 0,75 mg/m² J8 et J15, 6 fois à 3 semaines d’intervalle). Chez le chat, la dose de doxorubicine est de 1 mg/kg [27].

Chimiothérapie du fibrosarcome félin

Le fibrosarcome félin est une tumeur susceptible de recevoir un traitement par chimiothérapie systémique lorsque la radiothérapie n’est pas possible. On recherche alors à éviter la récidive locale. La doxorubicine est alors la molécule de choix. Elle s’utilise chez le chat à la dose de 1 mg/kg toutes les 3 semaines, au sein d’une perfusion par voie intraveineuse stricte. Une surveillance de la fonction rénale est nécessaire car il s’agit d’une molécule potentiellement néphrotoxique. Dans l’espèce féline, on ne doit pas dépasser 8 séances à cause de cette toxicité [27].

Chimiothérapie systémique du carcinome épidermoïde

L’épithélioma spino-cellulaire, ou carcinome épidermoïde peut également faire l’objet d’un traitement systémique. Quatre familles de produits peuvent être employées [27].

La chimiothérapie

Les molécules possédant une certaine activité sur ce type tumoral sont le carboplatine et la doxorubicine [27, 98].

Les AINS [27]

Le piroxicam (Felden®) et vraisemblablement le meloxicam possèdent une action anti-tumorale sur les tumeurs présentant des récepteurs cox dont fait partie le carcinome à cellules transitionnelles de la vessie mais aussi le carcinome épidermoïde. Le piroxicam est prescrit à la dose de 0,3 mg/kg/jour en permanence. L’ajout de misoprostol (Cytotec® 200 µg/kg) est utile pour prévenir les lésions gastriques éventuellement induites par l’AINS [147].

Les rétinoïdes de synthèse

Ils sont efficaces sur les stades débutants (carcinome in situ, carcinome superficiel). L’acitrétine est la molécule de première intention dans cette indication à la dose initiale de 1 à 2 mg/kg/jour [27, 76].

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L’imiquimod (Aldara®)

C’est un agent immunomodulateur qui agit après application topique en inhibant la synthèse d’interféron gamma et en augmentant celle de l’interféron alpha. Ce mécanisme d’action peut être mis à profit dans le traitement de certaines dermatoses néoplasiques palpébrales en applications topiques tous les deux jours : kératose actinique, carcinome baso-cellulaire, carcinome épidermoïde, éventuellement maladie de Bowen et, chez le cheval, sarcoïde de Jackson. Ce produit reste malheureusement assez onéreux et présente certains effets secondaires locaux imposant le port de gants chez le manipulateur et du carcan chez le chat traité. En raison de son effet irritant local, il ne faut absolument pas mettre de produit dans l’œil ; l’application se fait ainsi au coton-tige [27].

Chimiothérapie locale

Une utilisation locale de la chimiothérapie peut permettre, par rapport à la voie systémique : - soit une plus grande concentration de la molécule cytotoxique au niveau du site

tumoral, parfois même dans la tumeur elle-même

- soit une diminution des effets secondaires par non-diffusion du produit à partir du

site de traitement ou par utilisation d’une dose locale beaucoup moins importante

que la dose utilisée par voie systémique

Ces éléments permettent ainsi la mise en œuvre locale de drogues interdites par voie générale. Cependant, des précautions doivent être envisagées avec deux risques possibles :

- diffusion du produit à partir du site local et risque de toxicité systémique inhérent

- retour à une action locale de la chimiothérapie sans possibilité de traiter des foyers

multicentriques ou disséminés.

A ce titre, l’utilisation de 5-FU en pommade (Efudix Roche®) est contre-indiquée chez le chat dans le traitement des carcinomes épidermoïdes de la truffe et des paupières à cause du risque d’ingestion du produit très neurotoxique et de décès dans cette espèce [27].

Chimiothérapie locale injectable [27]

L’injection locale de chimiothérapie va concerner essentiellement en cancérologie oculaire, les tumeurs palpébrales : épithélioma spino-cellulaire (surtout chez le chat), mélanome, fibrosarcome et autres sarcomes. Les deux drogues utilisées dans cette indication sont le cisplatine et le carboplatine. Les injections intra-lésionnelles se font sous anesthésie générale, à raison d’une par semaine pendant 4 semaines. Le coût global de cette technique (drogue, anesthésie générale, collagène permettant un relargage progressif de la molécule) est assez important. C’est essentiellement lié au prix du collagène qui semble pouvoir être remplacé sans trop de complications par de l’huile de sésame. Il est indispensable, avec cette technique de réaliser un bilan d’extension correct en raison de la non-diffusion du produit. Si la tumeur s’étend en profondeur et que les injections sont réalisées uniquement en surface, on aboutira à un échec thérapeutique. De même, si des métastases préexistent, la chimiothérapie n’aura aucun effet sur celles-ci.

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Chimiothérapie locale topique

Il s’agit d’une méthode de traitement très développée en médecine humaine et qui a son intérêt dans le traitement de certaines tumeurs en cancérologie vétérinaire, en particulier chez le cheval. Elle consiste en l’administration locale d’agents cytotoxiques (5-FU, MMC) sous forme de collyre. Le coût de tels traitements est peu important mais ils ne peuvent s’appliquer qu’à des tumeurs superficielles. Les indications sont essentiellement les tumeurs épithéliales malignes (carcinome épidermoïde) cornéennes ou conjonctivales superficielles [27, 98, 141].

La radiothérapie [84]

Elle fait également partie de l’arsenal thérapeutique en cancérologie oculaire. Il s’agit, comme la chirurgie, d’une modalité d’action locale qui ne peut servir à prévenir le phénomène métastatique. Elle empêche la récidive et sert à traiter les tumeurs pour lesquelles la chirurgie est impossible.

Effets secondaires oculaires de la radiothérapie

L’œil, et à moindre titre ses annexes, sont sensibles à la radiothérapie. Parmi les effets secondaires possibles de celle-ci, on peut citer : cataracte, hémorragies rétiniennes, KCS, conjonctivite, kératite et dépigmentation palpébrale. On retiendra surtout la grande sensibilité du cristallin qui empêche tout traitement des tumeurs intraoculaires et qui nécessite une protection lors du traitement de tumeurs situées en dehors du globe.

Indications de la radiothérapie

Il s’agit des types histologiques radio-sensibles et situés sur le plan anatomique au niveau des paupières essentiellement : mastocytome, lymphome, sarcome récididvant (fibrosarcome, neurofibrosarcome, hémangiosarcome…), carcinome épidermoïde, adénocarcinome, mélanome [84].

v. Utilisation de la mitomycine C dans le traitement des tumeurs de l’œil et de ses annexes

Une étude menée par Lawrence en 2007 [85] a pour but d’évaluer l’efficacité et l’innocuité de l’utilisation de la MMC dans le traitement des carcinomes épidermoïdes de la surface oculaire, chez l’Homme. Les participants à l’étude sont 48 patients avec carcinome épidermoïde non invasif de la surface oculaire dont le diagnostic de certitude a été établi par biopsie. Le traitement mis en place consiste en l’administration locale sous forme de gouttes de MMC à 0,4 mg/ml ou d’un placebo, 4 fois par jour pendant trois semaines. S’il n’y a pas de régression de la tumeur au bout de 6 semaines, les gouttes sont échangées. Le succès du traitement est évalué par une disparition complète de la tumeur grâce à un examen à la lampe à fente après 6 à 8 semaines de traitement. Un second suivi avec contrôle de la résolution histologique est effectué après 6 semaines. On ne note aucune guérison clinique parmi les 20 patients du groupe placebo, alors que la guérison est observée sur 24 des 26 patients du groupe utilisant la MMC. Aucune complication n’a été mise en évidence au cours de cette étude. En conclusion, cette étude démontre que les gouttes de MMC (0.4 mg/ml) utilisées 4 fois par jour pendant 3 semaines sont un agent efficace pour la guérison clinique précoce des carcinomes épidermoïdes non invasifs de la surface oculaire.

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Une autre étude, menée Shields et al. [135], a pour objectif d’évaluer l’efficacité de l’application locale de MMC dans le traitement des carcinomes épidermoïdes cornéens et conjonctival récurrents. 10 patients (10 yeux) présentant un carcinome épidermoïde cornéen et conjonctival récurrent étendu sont étudiés. Les patients reçoivent une goutte quatre fois par jour de MMC 0.04% dans l’œil présentant la tumeur. Le cycle de traitement est défini par une semaine avec MMC suivie par une semaine sans MMC. De tels cycles de traitement sont répétés jusqu’à guérison clinique évidente de la tumeur conjonctivale. La réponse tumorale et les complications liées au traitement sont les deux paramètres pris en compte. Avant d’être référés, les patients ont subi en moyenne deux résections de la tumeur conjonctivale révélant le diagnostic de carcinome épidermoïde in situ dans 3 cas et de carcinome épidermoïde localement invasif dans 6 cas. Au moment de la présentation, la tumeur occupait le limbe et la cornée dans les 10 cas, la conjonctive du fornix dans 3 cas et la conjonctive palpébrale dans 1 cas. L’invasion cornéenne est en moyenne de 50 % de sa surface (20-100%). La MMC 0.04% à la posologie de 4 fois par jour a été appliquée en moyenne pendant 3 cycles (de 1 à 4 cycles). La régression complète de la tumeur s’est opérée dans les 10 cas. Il n’y a pas eu de récidive notée pendant le temps du suivi, en moyenne de 22 mois (6-50 mois). La MMC a causé une irritation locale modérée temporaire, une rougeur conjonctivale et un chémosis, mais aucune complication intra- ou extra-oculaire à long terme. Sur la base de cette petite série, l’application locale de MMC 0.04% apparait une méthode sûre et efficace pour traiter les carcinomes épidermoïdes cornéens ou conjonctivaux, même quand il s’agit d’une tumeur récidivante et extensive localement. Une troisième étude, menée par Chen et al. [24], avait pour but de tester cette fois-ci, non plus l’utilité de la MMC employée seule dans le traitement des tumeurs à cellules squameuses de la surface oculaire, mais l’efficacité de la MMC utilisée localement comme agent adjuvant d’une chirurgie d’exérèse de carcinome épidermoïde de la surface oculaire. On s’intéresse donc ici à une série de 27 cas de carcinomes épidermoïdes de la surface oculaire sur 26 patients traité sur une période de 4 ans. Les 27 cas ont été traités par une exérèse chirurgicale avec des marges de 2 mm (jugées selon l’aspect de la conjonctive) et deux cycles de cryothérapie au niveau du limbe et de la conjonctive. Cette intervention chirurgicale est suivie par une administration locale de MMC à 0,04% après cicatrisation complète. La MMC est appliquée 4 fois par jour pendant au moins deux cycles ; un cycle se composant d’une semaine avec application de MMC, suivie par une semaine sans MMC. 19 patients reçurent 3 cycles de MMC. 8 patients ne reçurent que 2 cycles de MMC pour cause d’allergie au produit se développant assez tardivement au cours du second cycle : rougeur, démangeaison et discret chemosis. Après arrêt du traitement à la MMC, tous les symptômes d’allergie à la molécule ont disparu rapidement. Tous les patients ont été suivis ; la durée moyenne du suivi pour les 26 patients est de 27 mois. Aucun patient n’a présenté de récidive clinique au terme du suivi. Le traitement à la MMC comme agent adjuvant à une exérèse chirurgicale réduit donc le taux de récidive des néoplasies primaires de la surface oculaire. Enfin, Khong et Muecke [75] évaluèrent dans leur étude les complications associées à l’utilisation de la MMC dans le traitement des néoplasies des surfaces oculaires. Cette étude rétrospective sur 100 yeux chez 91 patients avec une tumeur de la surface oculaire et traités avec de la MMC entre novembre 1998 et janvier 2005 examine les complications liées à l’utilisation de la MMC et le traitement de celles-ci. 1 à 3 cycles de 7 jours de MMC locale 0.04% à raison de 4 fois par jour ont été administrés à 59 yeux présentant une tumeur intraépithéliale cornéo-conjonctivale localisée, à 19 yeux présentant une tumeur intraépithéliale cornéo-conjonctivale diffuse, à 6 yeux présentant une tumeur intraépithéliale cornéo-conjonctivale récurrente, à 1 œil présentant un carcinome épidermoïde de la surface oculaire, à 3 yeux présentant une mélanose acquise primaire avec atypie, à 9 yeux avec un

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mélanome conjonctival malin, à 2 yeux avec un adénocarcinome des glandes sébacées et un œil avec un fibroxanthome atypique malin. 9 patients présentent une tumeur intraépithliale cornéo-conjonctivale bilatérale. 31 cas (34%) développèrent une réaction allergique à la MMC et 14 (14%) yeux présentèrent un épiphora secondaire à une sténose des points lacrymaux avec une durée moyenne du suivi étant de 26,5 mois. Dans la plus large étude examinant les complications liées à l’utilisation de la MMC dans le traitement des tumeurs de la surface oculaire, les réactions allergiques et la sténose des points lacrymaux sont donc relativement courants. Cependant, l’absence de complications sérieuses à moyen terme, suggère la possibilité d’une utilisation sûre de la MMC dans le traitement des tumeurs de la surface oculaire. Dans la littérature vétérinaire, les articles ou études mentionnant l’utilisation de la MMC dans le traitement des tumeurs de la surface oculaire sont plutôt rares. Cependant, on peut penser que l’utilisation de cette molécule, en suivant les lignes recommandées dans la littérature scientifique humaine, est tout à fait réalisable et que son efficacité chez l’animal est aussi bonne que chez l’humain. Karasawa et al. ont publié un cas de carcinome épidermoïde cornéen chez un chien, traité par une kératectomie superficielle et de la MMC locale [72]. Une femelle West Higland White terrier de 10 ans est présentée à la consultation pour une kératite chronique réfractaire évoluant depuis 1 mois. La chienne n’a pas d’historique de kératite traumatique ou de kératoconjonctive sèche (KCS). Trois semaines avant d’être référée, la chienne a subi un recouvrement par la membrane nictitante de sa cornée gauche avec application locale d’antibiotiques. Après le retrait du recouvrement, la kératite était toujours présente, accompagnée d’un tissu de granulation inhabituel sur la cornée. La lésion en surélévation dans le quadrant inférotemporal est vascularisée, opaque, beige-rosé et d’environ 5 mm de diamètre. Les autres paramètres de l’examen clinique oculaire sont normaux sur les deux yeux. Le diagnostic différentiel d’une lésion cornéenne granuleuse atypique comprend une pseudotumeur histiocytome fibreux-like, un granulome, un mélanome achromique, un carcinome épidermoïde, un papillome, un lymphosarcome, un hémangiome/hémangiosarcome. Sous anesthésie générale, une kératectomie superficielle permet de retirer la lésion, qui est soumis à un examen anatomo-pathologique. Un recouvrement conjonctival permet de recouvrir la cornée affectée après l’exérèse. L’examen anatomo-pathologique a permis de conclure un carcinome épidermoïde cornéen assez agressif, une tumeur peu courante dans cette localisation. Après retrait du recouvrement conjonctival, une légère opacification est visible dans le quadrant dorsotemporal mais aucune récidive tumorale n’est visible. Comme l’exérèse totale de la tumeur n’est pas certaine, on administre localement de la MMC 0,04%, 4 fois par jour pendant 8 semaines. Aucun effet secondaire n’a été remarqué par le propriétaire pendant la durée du traitement. Six mois après l’exérèse chirurgicale, l’examen ophtalmologique ne montre aucun signe de récidive tumorale. Dans ce cas clinique, l’exérèse chirurgicale de la tumeur est combinée à l’administration locale de MMC ; un bon pronostic est obtenu. Le résultat montre que la combinaison de traitements utilisée dans ce cas pourrait être un choix thérapeutique approprié pour les carcinomes épidermoïdes cornéens chez le chien. Une seconde étude, publiée en 2006, est disponible dans la littérature vétérinaire. En effet, Rayner et Van Zyl publient une série de cas dont le but est de vérifier l’efficacité de l’application locale de MMC comme agent adjuvant à l’ablation chirurgicale au laser CO2 d’un carcinome épidermoïde oculaire chez le cheval [116]. Huit chevaux sont présentés sur une période de 17 mois pour évaluer et traiter une suspicion de carcinome épidermoïde oculaire. Au total, 10 yeux sont touchés parmi 4 juments et 4 hongres dont la moyenne d’âge est de 10,1 ans (5-14 ans). Le temps entre la détection des lésions par le propriétaire et la

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présentation au vétérinaire varie de 3 semaines à 4 mois. Dans la plupart des cas, le signe d’appel est un nodule rose ou rouge ; certains chevaux y associent un œdème cornéen. Un écoulement oculaire et un blépharospasme sont aussi décrits dans deux cas. Après un examen clinique ophtalmologique, un diagnostic macroscopique de carcinome épidermoïde est fait sur tous les yeux, sur la base de l’aspect typique des lésions. Six chevaux présentent une atteinte unilatérale, les deux restants ont une atteinte bilatérale. Une anesthésie générale gazeuse est induite afin de pratiquer la résection chirurgicale et la chimiothérapie locale. Les lésions cornéennes, sclérales ou de la jonction cornéo-sclérale sont retirées grâce à un laser CO2. Un lavage avec une solution saline est ensuite effectué afin de rincer le tissu brûlé reséqué. Une éponge imprégnée d’une solution de MMC à 0,4 mg/ml est ensuite appliqué sur le site opératoire pendant 1 minute sur 5 yeux et pendant 5 minutes sur les 5 autres yeux. Un lavage abondant avec un soluté salé est ensuite effectué après le retrait de l’éponge. Un traitement antibiotique et anti-inflammatoire est mis en place en postopératoire. Le suivi à long terme de chaque cas est effectué par téléphone avec le propriétaire. 3 des 5 yeux (60%) traités pendant 1 minute avec de la MMC et 4 des 5 (80%) traités pendant 5 minutes ne montrent aucun signe de récidive tumorale 11 mois après le traitement. Deux yeux montrèrent des signes de récidive 6 mois après le premier traitement ; ces chevaux avaient été traités par une application d’une minute de MMC. Après un nouveau traitement utilisant le même protocole que précédemment mais en appliquant la MMC pendant 5 minutes, ces deux cas ne montrèrent pas de signe de récidive à 16 et 17 mois respectivement. Ainsi, 6 des 7 yeux (86%) traités par une application de 5 minutes de MMC ne montrèrent pas de récidive. Dans l’ensemble, 9 des 10 yeux (90%) traités ne montrèrent aucun signe de récidive tumorale. Tous les yeux traités sont non douloureux pendant la période postopératoire, seuls un blépharospasme minime et un épiphora sont observés. Un œdème cornéen localisé est visualisé sur deux yeux mais ils disparaissent en quelques semaines. Aucun autre effet secondaire n’est noté par les propriétaires ou les vétérinaires suivant les animaux. En conclusion de cette série de cas, la MMC apparaît offrir une alternative solide aux autres thérapies adjuvantes couramment employées dans le traitement des carcinomes épidermoïdes oculaires du cheval.

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II. Application clinique de l’utilisation de la mitomycine C à deux techniques chirurgicales en ophtalmologie vétérinaire

A. Le symblépharon du chat

1. Données cliniques

Le symblépharon est une adhérence, d’origine cicatricielle, entre les paupières et le globe. Il se caractérise par la formation d’adhérences entre les conjonctives palpébrales et bulbaire, entre les conjonctives palpébrales et la cornée, ainsi qu’entre la membrane nictitante et les autres conjonctives. Il est quelques fois accompagné d’un recouvrement partiel ou total de la cornée par du tissu fibreux ou conjonctival. Ces lésions cicatricielles et fibreuses font suite à la nécrose et à la desquamation de l’épithélium conjonctival et cornéen, ainsi qu’à la destruction des cellules souches du limbe qui permettent l’envahissement de la cornée par du tissu conjonctival [5, 128, 152]. Chez le chien, le symblépharon est le plus souvent la conséquence d’une brûlure ou d’un traumatisme (pouvant être chirurgical) et peu de récidives sont observées après traitement. Chez le chat, il est principalement consécutif à des infections sévères au virus Herpes de type 1 (FHV-1) chez de très jeunes individus. Les lésions peuvent être importantes :

- une diminution ou une absence des culs-de-sacs conjonctivaux - une limitation de la mobilité de l’œil - des déformations cicatricielles des paupières - un épiphora du fait de l’occlusion ou du déplacement des points lacrymaux - une lagophtalmie associée à un déficit de la mobilité palpébrale - une extension sur la cornée pouvant gêner la vision si elle est importante

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Photo 7 : Symblépharon (adhérences entre la conjonctive palpébrale et la membrane nictitante) (Photo : Dr J-Y Douet)

Photo 8 : Symblépharon (adhérences entre la membrane nictitante, la cornée et les conjonctive palpébrales) (Photo : Dr J-Y Douet)

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Photo 9 : Symblépharon (adhérences entre la membrane nictitante et la conjonctive bulbaire) (Photo : Dr J-Y Douet)

Le diagnostic est le plus souvent aisé et l’observation des culs-de-sac montre l’adhérence des conjonctives bulbaire et palpébrales. L’extension sur la cornée se manifeste sous la forme d’une membrane de conjonctive, mince et vascularisée [5, 128]. Le traitement est difficile et souvent frustrant car les récidives sont fréquentes [142]. Elles sont dues à l’inflammation chronique, à des réadhérences des plaies chirurgicales et à la destruction des cellules souches du limbe ouvrant la voie à la conjonctivalisation de la cornée. Le traitement classique du symblépharon est chirurgical. L’objectif de ce traitement classique est de pratiquer l’exérèse des adhérences fibreuses entre la conjonctive et la cornée, ainsi que de retrouver des surfaces épithéliales normales sur les conjonctives bulbaire et palpébrales et sur la cornée. Des lentilles à symblépharon, des pansements silicone sont disponibles pour séparer physiquement les surfaces conjonctivales en cicatrisation et aider à reformer et à préserver le fornix conjonctival. Ces implants temporaires sont généralement maintenus en position par une blépharorraphie pendant quelques semaines, le temps que la cicatrisation conjonctivale se fasse. Si la cicatrisation épithéliale cornéenne ou conjonctivale n’est pas totale, des adhérences se formeront à nouveau [142, 152]. Après avoir anesthésié l’animal, tondu et préparé chirurgicalement les paupières, le champ opératoire est drapé pour la chirurgie. Un blépharostat est mis en place afin de maintenir les paupières ouvertes et la conjonctive adhérente à la cornée est disséquée par une kératectomie lamellaire superficielle. Si le symblépharon s’étend à la conjonctive, l’incision est continuée et la conjonctive affectée est enlevée. Quand la conjonctive est facilement mobilisable, son bord est apposé au niveau du limbe avec des points simples et du fil résorbable 5-0 à 7-0. Pour recouvrir la cornée en cicatrisation et afin d’éviter le développement de nouvelles adhérences entre cornée et conjonctive, une protection cornéenne en plastique méthyl-méthacrylate peut être placée. Une lentille de contact souple peut aussi être utilisée à la place de la protection cornéenne épaisse. Afin de maintenir la lentille en place et réduire le mouvement des

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paupières, une blépharorraphie partielle temporaire peut être pratiquée. Après le réveil de l’anesthésie, une collerette sera mise en place afin d’éviter toute automutilation ou traumatisme [49]. Une solution antibiotique locale est appliquée quatre à six fois par jour en postopératoire. Des antibiotiques par voie générale sont aussi administrés. Une fois la cicatrisation cornéenne complète, des corticostéroïdes locaux sont administrés pour diminuer la formation de tissu cicatriciel. Après 2 à 4 semaines, les sutures de la blépharorraphie sont enlevées et permettent d’enlever la lentille de contact cornéenne [49]. Cette procédure donne de bons résultats chez les chiens et les chats dont le symblépharon est d’origine traumatique ou dû à une brûlure chimique. Cependant, cette méthode est moins efficace chez les chats dont le symblépharon est dû au FHV-1. En effet, la réactivation du virus ou l’herpèsvirose chronique peuvent causer de nouveaux dommages cornéens ou conjonctivaux et de nouvelles adhérences peuvent se former [49, 152].

Figure 7 : Traitement chirurgical classique du symblépharon [49]

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Les résultats obtenus par ces techniques sont donc souvent décevants et la réapparition des adhérences est fréquente. Chez l’homme, une affection de la conjonctive, le ptérygion, a la même propension à récidiver que le symblépharon du chat, les lésions étant souvent aggravées lors de récidives. C’est une pseudo-tumeur conjonctivale qui envahit progressivement la cornée depuis le limbe médial jusqu’à l’apex. Le traitement consiste en l’ablation chirurgicale des néoformations conjonctivales, avec ou sans greffe conjonctivale, accompagnée de l’application d’un agent antifibroblastique, la MMC qui permet de limiter les récidives [3, 22, 26].

2. Etude clinique

a. Matériel et méthode

L’étude de cas comprend 12 chats (15 yeux) opérés sur une période allant de novembre 2005 à juillet 2007, 11 chats ayant été opérés dans la clinique du Docteur Firmin Weverberg à Enghien, Belgique et un chat opéré dans le service d’ophtalmologie de l’Ecole Vétérinaire d’Alfort par le Docteur Sabine Chahory. Les chats (dont sept Européens, un Abyssin, un Somali et trois Mau Egyptiens) sont âgés de 2 mois à 2 ans au moment de l’intervention chirurgicale. Le suivi postopératoire est de trois mois à deux ans. Les informations relatives aux différents cas sont détaillées dans le tableau 11. Les chats 2, 5, 6, 10, 11 et 12 sont aveugles de l’œil concerné par le symblépharon au moment de l’intervention chirurgicale. Le chat 10 a déjà subi deux interventions chirurgicales et un traitement local à base de corticoïdes avant d’être référé. Enfin, le chat 11 est non visuel de l’œil présentant le symblépharon et présente un globe controlatéral en phtisie.

Tableau 11 : Informations relatives aux différents cas entrants dans l’étude.

Race Nombre d’yeux opérés

Date de l’intervention chirurgicale

Age au moment de l’intervention chirurgicale

Temps de suivi post-opératoire

Chat 1 Européen 2 24/05/2006 2 mois 2 ans Chat 2 Européen 2 24/05/2006 2 mois 6 mois Chat 3 Somali 1 02/11/2005 5 mois 25 mois Chat 4 Abyssin 1 02/11/2005 5 mois 25 mois Chat 5 Européen 1 20/09/2006 2 mois 16 mois Chat 6 Européen 1 11/2006 4 mois 14 mois Chat 7 Mau Egyptien 2 06/03/2007 3 mois 9 mois Chat 8 Mau Egyptien 1 23/05/2007 10 mois 9 mois Chat 9 Mau Egyptien 1 11/10/2006 3 mois 9 mois Chat 10 Européen 1 10/07/2007 2 mois Chat 11 Européen 1 17/07/2007 2 ans

Chat 12 Européen 1 02/02/2007 8 mois 1 mois Après injection d’un anti-inflammatoire non stéroïdien (acide tolfénamique (Tolfédine®) à la dose de 4 mg/kg, ou méloxicam (Métacam®) à la dose de 0,2 mg/kg) et d’un antibiotique (céfalexine (Rilexine®) à la dose de 30 mg/kg), l’induction de l’anesthésie est réalisée. L’induction consiste en l’injection de médétomidine (Domitor®) à la dose de 80 µg/kg et de

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kétamine (Kétamine Virbac®) à la dose de 5 mg/kg. L’intubation trachéale est ensuite réalisée afin de prendre le relais anesthésique avec un mélange Isoflurane/O2. L’animal est ensuite placé sur la table chirurgicale en décubitus latéral afin d’avoir un bon accès à la zone concernant l’intervention chirurgicale, la cornée. La région péri-oculaire est préalablement tondue, les cils sont coupés avec des ciseaux enduits de gel évitant qu’ils ne tombent sur l’œil. La zone péri-oculaire et la surface oculaire sont ensuite désinfectées à l’aide respectivement d’une solution de polyvidone iodée (Vétédine solution®) à la concentration de 2% et 0,2%. Les champs opératoires sont enfin mis en place. Le traitement chirurgical du symblépharon consiste, comme vu précédemment, en l’exérèse microchirurgicale minutieuse des adhérences entre les conjonctives palpébrales et le globe pour libérer ce dernier et recréer des culs-de-sacs conjonctivaux, suivie de l’exérèse des membranes fibreuses recouvrant la cornée, accompagnée si nécessaire d’une kératectomie superficielle.

Photo 10: Dissection des adhérences et ablation de la fibrose (Photo : Dr F. Weverberg)

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Photo 11 : Kératectomie (Photo : Dr F. Weverberg)

Elle est suivie de l’application d’une solution extemporanée de MMC à la concentration de 0,04 mg/ml sur les lésions à l’aide d’une microsponge chirurgicale. Cette application cornéenne et dans les culs-de-sacs se fait pendant 3 minutes et n’est pas suivie d’un rinçage.

Photo 12 : Application per-opératoire de mitomycine C (Photo : Dr F. Weverberg)

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Le traitement antifibroblastique est poursuivi en phase postopératoire par l’application d’une goutte de MMC à la même concentration, utilisée en collyre deux à trois fois par jour pendant quatre semaines. Pendant cette période d’un mois, les animaux sont revus toutes les semaines pour contrôler la cicatrisation cornéenne. Ensuite, les suivis s’espacent ; le suivant est à 3 mois puis à 6 mois. Enfin, si tout se passe normalement, le suivi devient téléphonique ensuite.

b. Résultats

i. Revue de cas

Tableau 12 : Tableau résumant les résultats des interventions chirurgicales dans le traitement du symblépharon

Race Nombre d’yeux opérés

Age au moment de l’intervention chirurgicale

Temps de suivi post-opératoire

Résultats

Chat 1 Européen 2 2 mois 2 ans Bon

Chat 2 Européen 2 2 mois 6 mois Résultat visuel correct malgré les deux paupières supérieures festonnées et avec quelques adhérences persistantes

Chat 3 Somali 1 OG 5 mois 25 mois Persistance d’adhérences

Chat 4 Abyssin 1 OD 5 mois 25 mois Persistance d’adhérence avec la membrane nictitante, baisse de mobilité

Chat 5 Européen 1 OG 2 mois 16 mois Œil visuel mais persistance de membranes cornéennes

Chat 6 Européen 1 OG 4 mois 14 mois Œil retrouvant la vision. Bon résultat

Chat 7 Mau Egyptien 2 3 mois 9 mois Bon

Chat 8 Mau Egyptien 1 OG 10 mois 9 mois Bon

Chat 9 Mau Egyptien 1 OD 3 mois 9 mois Bon

Chat 10 Européen 1 2 mois Vision retrouvée en postopératoire puis rechute de symblépharon et œil de nouveau non visuel

Chat 11 Européen 1 OD 2 ans

Vision limitée, résultat moyen, persistance d’adhérences sur la membrane nictitante

Chat 12 Européen 1 OG 8 mois 1 mois Bonne évolution, transparence cornéenne retrouvée malgré une adhérence conjonctivale dans l’angle externe

ii.

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iii. Résultats

Cette technique opératoire permet, dans la grande majorité des cas, d’améliorer le fonctionnement palpébral et l’aspect de l’œil. Si l’amélioration fonctionnelle est régulière, les résultats ne sont jamais parfaits d’un point de vue esthétique.

Photo 14 : chat 8, six semaines après l’intervention. Persistance d’une

adhérence de la membrane nictitante et fente palpébrale un peu plus courte que

sur l’œil adelphe. (Photo : Dr F. Weverberg)

Photo 13 : chat 8, adhérences des paupières et de la membrane nictitante. La fente palpébrale est réduite. (Photo : Dr F.

Weverberg)

La cornée retrouve de la transparence, mais reste terne et d’aspect grisâtre. Lorsque la paupière supérieure est atteinte, elle tend parfois à rester festonnée. La fente palpébrale peut être plus courte. Sur des yeux très atteints, une partie des adhérences se reforme parfois. En effet, les chats 2, 3, 4, 5, 10, 11 et 12 présentent tous une réapparition d’adhérences persistantes au niveau autant cornéen que conjonctival. Cependant, le résultat fonctionnel demeure bien meilleur qu’avant l’intervention chirurgicale. Tous les animaux présentés aveugle à la consultation initiale ont récupéré leur fonction visuelle malgré une cornée plus terne et à l’aspect légèrement dépoli par rapport à une cornée saine. Seul le chat 10 n’a pas récupéré une fonction visuelle malgré une amélioration temporaire de celle-ci en postopératoire. On peut très probablement attribuer cet échec thérapeutique au fait que l’animal a été présenté chez le Dr Weverberg après deux échecs chirurgicaux antérieurs. Les récidives après intervention chirurgicale sur symblépharon étant très courantes, l’état de l’œil à la présentation laissait présager de la difficulté et du challenge thérapeutique que représentait cet œil. Malheureusement, l’amélioration et la récupération visuelles ne furent que de courte durée et la cornée devint de nouveau opaque tandis que des adhérences se reformaient entre les conjonctives. Malgré cet échec sur un œil en mauvais état, le chat 11, âgé de 2 ans au moment de la présentation, a été opéré avec des résultats satisfaisants. En effet, il est présenté avec l’œil gauche en phtisie (il sera énucléé lors de l’intervention) et le droit aveugle ; ce dernier est très atteint, la cornée a perdu toute transparence. Malgré cet aspect négatif, l’intervention a permis

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de rendre une vision partielle à ce chat en rendant sa cornée transparente même si elle est terne, de libérer les adhérences conjonctivo-conjonctivales mais une adhérence de la membrane nictitante persiste. Il a recouvré sa vision de l’œil droit et vit normalement.

Photo 16 : chat 11, 6 mois après l’intervention. Une adhérence de la

membrane nictitante persiste mais vision recouvrée sur l’œil droit. (Photo : Dr F.

Weverberg)

Photo 15 : chat 11, adhérences et fibrose très importantes sur les deux yeux,

aveugles. (Photo : Dr F. Weverberg)

c. Discussion

On vient donc de voir que l’application per- et postopératoire de MMC diminue le risque de récidives. En effet, même si des récidives sont toujours présentes sur quelques animaux, elles n’handicapent pas, dans la majorité des cas, la vision de l’animal. De plus, la plupart des animaux sont présentés en étant aveugle de l’œil concerné par le symblépharon. Cette technique, même si elle n’est pas parfaite, tant sur le plan fonctionnel qu’esthétique, rend une vision à l’animal qui en était dépourvu jusque là. De plus, l’intervention chirurgicale en elle-même (la kératectomie correctrice) créant un ulcère superficiel dans les cas où le symblépharon est cornéen, il est important d’instaurer un contrôle postopératoire avec le test à la fluorescéine. En effet, l’ulcère superficiel ainsi créé peut être très étendu et ainsi compromettre l’issue finale du traitement ainsi mis en place. Si l’ulcère superficiel est étendu, un traitement classique de l’ulcère peut être mis en place, à base d’un lubrifiant cornéen (Viskyal® par exemple) et d’un antibiotique local sous forme de pommade ophtalmique (Ophtalon® par exemple) afin d’obtenir un temps de contact avec la surface oculaire prolongé (2-3 heures), améliorant ainsi la biodisponibilité et permettant un rythme d’application moins fréquent. Enfin, on peut imaginer une combinaison de deux techniques chirurgicales en vue d’améliorer encore les résultats de la chirurgie correctrice du symblépharon. En effet, même si peu de cas ont été publié dans l’espèce féline, la greffe de membrane amniotique dans la reconstruction de la surface oculaire est bien documentée dans l’espèce équine. En 2005, Barros et al. publient une série de trois cas de reconstruction de la surface oculaire par greffe de membrane

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amniotique, dont un cas est un chat [10]. Un Siamois femelle de 4 ans présente un symblépharon bilatéral important avec ankyloblépharon après une rhinotrachéite. L’intervention chirurgicale consiste en la résection des adhérences conjonctivales et de la conjonctive recouvrant la cornée ainsi qu’une greffe de membrane amniotique canine congelée. Un patch de membrane amniotique canine congelée est suturé par un surjet simple sur la surface entière de la cornée à l’aide d’un nylon monofilament 9-0. Un traitement postopératoire à base de tobramycine collyre (Tobrex®) six fois par jour et de diclofenac collyre (Voltarène collyre®) est mis en place. Deux jours après la chirurgie, une zone de cornée périphérique de 2 mm² est transparente, un leucome central et une vascularisation sont notés. Aucun signe de douleur n’est mis en évidence. Trente jours après la chirurgie, seule une petite cicatrice cornéenne est présente et aucune récidive d’adhérence n’est mise en évidence. Cependant, le point négatif de cette étude est le temps très court du suivi après la chirurgie qui n’est que de trente jours ; l’échec chirurgical du symblépharon étant considéré après recolonisation rapide en moins de six semaines. On aurait donc trouvé cela intéressant de suivre le cas pendant deux mois postopératoires. On peut cependant penser que la greffe de membrane amniotique peut être utilisée pour la reconstruction de la surface oculaire avec de bons résultats et une cicatrice peu importante chez les petits animaux. On a donc vu que l’application postopératoire de MMC rend l’intervention chirurgicale de la correction du symblépharon chez le chat, simple, rapide et peu onéreuse tout en diminuant fortement le risque de récidive. Elle permet de retrouver une certaine transparence cornéenne en limitant l’épaisseur de la conjonctivalisation et de la fibrose. Cette technique donne des résultats satisfaisants sur le plan fonctionnel. On peut aussi penser qu’en combinant cette technique chirurgicale à la greffe de membrane amitotique dans la reconstruction de la surface cornéenne dans les cas où une kératectomie est pratiquée, les résultats pourraient être encore meilleurs. Ainsi, on peut raisonnablement penser que la combinaison de ces deux techniques, même si la technicité du chirurgien doit être plus fine, constitue un avenir prometteur dans le traitement de cette affection difficilement traitable qu’est le symblépharon du chat.

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B. Traitement de l’épiphora chronique chez les carnivores domestiques : une technique de dacryocystorhinostomie associée à une correction des paupières

1. Données cliniques

a. L’épiphora chronique

L'épiphora, débordement de larmes par-dessus les paupières, est un syndrome fréquent chez nos carnivores domestiques. Son diagnostic étiologique est délicat et son traitement peut s'avérer complexe. On peut distinguer différentes causes à l'épiphora :

sécrétion excessive de larmes, déficit qualitatif (phase mucinique) du film lacrymal (n'entrent pas dans le cadre de cette étude)

défaut d'écoulement des larmes idiopathique, à savoir un épiphora existant en présence d'une sécrétion lacrymale

normale et d'un système naso-lacrymal apparemment fonctionnel [110]. L'étiologie souvent multifactorielle de l'épiphora chronique nous amène à proposer un traitement associant, si nécessaire, la correction chirurgicale des paupières à une nouvelle technique de dacryocystorhinostomie (DCR).

b. Anatomie des voies lacrymales d’excrétion [126]

Les voies lacrymales commencent aux points lacrymaux et se poursuivent par les canalicules lacrymaux, le sac lacrymal et le conduit lacrymo-nasal qui débouche dans la cavité nasale par l’ostium lacrymo-nasal.

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Figure 8 : Voies lacrymales d’excrétion [126]

(P : points lacrymaux, C : canalicules, LS : sac lacrymal, ND : conduit naso-lacrymal) Les points lacrymaux sont des orifices ouverts situés à l’intérieur du bord libre des paupières. Au nombre de deux (point supérieur et inférieur), ils se situent de 2 à 5 mm de part et d’autre de l’angle interne. Observés en lampe à fente, ils apparaissent ronds ou en fente allongée. Leur orifice, quelques fois dépigmenté, est situé au sommet d’une petite surélévation ou au centre d’une légère dépression. Leur diamètre est d’environ 0,5 mm chez le chien. Les canalicules lacrymaux supérieur et inférieur font suite aux points lacrymaux et s’enfoncent pour suivre le bord palpébral en direction médiane. Ils ont une longueur de 3 à 7 mm chez le chien et convergent pour s’aboucher en formant une partie commune, le sac lacrymal. Ce dernier, moins développé que chez l’homme, mesure 0,2 à 0,5 cm de long et 0,5 à 2 mm de large chez le chien et se loge dans une légère dépression de l’os lacrymal : la fosse du lac lacrymal. Le conduit naso-lacrymal quitte le sac lacrymal vers l’avant et se dirige vers la cavité nasale. De 2 à 7 cm de long chez le chien, il est formé de trois parties. Tout d’abord, une portion proximale enfermée dans un conduit osseux traverse l’os lacrymal et le maxillaire : le canal lacrymal. Puis, une partie moyenne court contre la face médiale de l’os maxillaire, dans le sillon lacrymal, et est recouverte par la muqueuse nasale. Enfin, une dernière partie rostrale se dirige vers le seuil de la cavité nasale. L’ostium lacrymo-nasal correspond à l’abouchement nasal du canal lacrymo-nasal et sa position est variable chez le chien, dépendant de la conformation faciale du sujet.

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2. Etude clinique

a. Matériel et méthode

L’étude de cas inclut 16 chiens (30 yeux) et 4 chats opérés sur une période allant de novembre 2003 à décembre 2005 dans la clinique du Docteur Firmin Weverberg à Enghien, Belgique. En fonction de la cause de l'épiphora, la technique de DCR a été réalisée seule ou associée à une correction des paupières. Les techniques utilisées sont les suivantes selon l’importance de la correction palpébrale à apporter :

- La technique dite de « Celsus-Hotz » : il s’agit de la technique la plus couramment utilisée en médecine vétérinaire. On commence par calculer l’excision nécessaire sur l’animal vigile avec l’anesthésie locale. La chirurgie se pratique en réalisant un croissant, parallèle au bord palpébral, à environ 2 mm de celui ci, comme expliqué sur la figure 9. La largeur du croissant varie en fonction du type d’entropion et de la correction à apporter. Une dissection fine des tissus est réalisée et le surplus de peau est excisée à l’aide des ciseaux de Mayo. Les sutures sont réalisées par points simples avec un fil monofilament en commençant toujours par la zone centrale de la plaie pour bien fixer les deux berges bord à bord [149].

Figure 9 : Technique de Celsus-Hotz (d’après [149])

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- La technique de Celsus-Hotz modifiée, détaillée sur la figure 10, ou correction par excision en pointe de flèche sur le canthus externe : cette technique chirurgicale est applicable lors d’un entropion situé au canthus latéral de l’œil. C’est une technique classique directement dérivée de la technique de Celsus-Hotz. Il s’agit de réaliser une côte de melon, à environ 2 mm du canthus latéral de l’œil, en forme caractéristique de pointe de flèche, la pointe étant dirigée vers l’extérieur. La largeur de la flèche formée est dépendante de la correction nécessaire à apporter et nécessite un bon coup d’œil du chirurgien. La seule particularité de cette technique réside dans la suture. En effet, il faut fixer le tout premier point, celui passant par la pointe de la flèche, au canthus latéral de l’œil. Ce point permettra en effet un bon ancrage des sutures mais également de régler la position des paupières l’une par rapport à l’autre en positionnant de façon correcte le canthus. Ensuite, le reste de la plaie formée est suturé de façon classique par des points simples séparés [117].

Figure 10 : Technique de Celsus-Hotz modifiée (d’après

[117])

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- La technique de tarsoraphie-canthoplastie combinée de Bigelbach est détaillée sur la figure 11 : elle est utilisée lors de macrofente palpébrale. Nous commençons par réaliser une incision de 2mm de longueur perpendiculairement au bord palpébral, sur les deux paupières. Nommons les points A et B les points de départ de l’incision le long du bord palpébral. Puis une incision de deux fois la longueur entre la zone anormale et le canthus en suivant la courbe de la paupière inférieure et en partant du canthus latéral est réalisée. Le point d’arrivée est appelé D. Le même principe est appliqué en suivant la paupière supérieure et en partant du canthus. On note le point d’arrivée point E. Nous retirons entre le canthus, le point D et le point E une partie du muscle orbiculaire (forme de triangle). Nous relions par une incision les points A et D puis les points B et E. Une forme de losange où il n’y a plus de peau et au sein de ce losange un triangle sans muscle orbiculaire sont obtenus. Nous restaurons par un point en huit ou par un lacet de bottine le canthus latéral de l’œil puis on referme de façon traditionnelle par des points simples la plaie créée. Il faudra prendre soin de passer les fils le long du fascia du muscle pour prendre appui et donc avoir une meilleure solidité des fils [15].

Figure 11 : Technique de Bigelbach (d’après [15])

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Associée aux techniques précédemment décrites, la technique de DCR utilisée dérive d’une technique de médecine humaine qui consiste à créer une fistule osseuse large puis à appliquer de la MMC. Après injection d’un anti-inflammatoire non stéroïdien, le méloxicam ((Métacam®) à la dose de 0,2 mg/kg), l’induction de l’anesthésie est réalisée. L’induction consiste en l’injection de médétomidine (Domitor®) à la dose de 80 µg/kg et de tilétamine et zolazepam (Zoletil®) à la dose de 10 mg/kg chez les chiens et de 7,5 mg/kg chez les chats. L’intubation trachéale est ensuite réalisée afin de prendre le relais anesthésique avec un mélange Isoflurane/O2. L’animal est ensuite placé sur la table chirurgicale en décubitus latéral afin d’avoir un bon accès à la zone concernant l’intervention chirurgicale. La région péri-oculaire est préalablement tondue, les cils sont coupés avec des ciseaux enduits de gel évitant qu’ils ne tombent sur l’œil. La zone péri-oculaire et la surface oculaire sont ensuite désinfectées à l’aide respectivement d’une solution de polyvidone iodée (Vétédine solution®) à la concentration de 2% et 0,2%. Les champs opératoires sont mis en place. Au début de l’intervention, la membrane nictitante est fixée par un point en U dans le fornix conjonctival supérieur afin de faciliter l’accès au site opératoire et de protéger l’œil lors du temps chirurgical et de l’application de la Mitomycine C. Les canalicules lacrymaux supérieur et inférieur sont ensuite ouverts jusqu’au sac lacrymal avec des ciseaux de Sevrin-Stevens. La dissection mousse est poursuivie jusqu’à la fosse lacrymale de l’os lacrymal, l’os étant à nu et visible. Une broche de Steinman de 2,5 à 3 cm de diamètre est alors utilisée. Un guide mèche va alors servir à introduire la broche et à n’en laisser dépasser qu’1,5 mm de profondeur. Le périoste et l’os lacrymal sont perforés au niveau de la fosse ; le forage doit s’effectuer à 45° et de façon très médiale, sur une profondeur d’1,5 mm, comme cela est expliqué sur la figure 12.

Figure 12 : Technique de forage de la fosse lacrymale lors de DCR (d’après [56])

Il est important de ne pas léser la paroi nasale du sinus maxillaire lors de la pénétration avec la broche afin d’éviter de toucher aux cornets nasaux et de provoquer des hémorragies. La fistule est agrandie à l’aide d’une pince Mosquito avec mors souris jusqu’à obtenir un diamètre de 5 à 6 mm afin que la cicatrisation osseuse et fibreuse ne se fasse pas trop rapidement et ne vienne pas obturer l’orifice.

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Photo 17 : Fistulisation opératoire (Photo : Dr F. Weverberg)

Un tampon de gaze ou de coton imbibé d’une solution de Mitomycine C à la concentration de 0,2 mg/ml est appliqué dans la fistule osseuse pendant 10 minutes. La plaie opératoire est laissée telle quelle, la membrane nictitante est libérée et l’animal reçoit une pommade antibiotique avec de la cortisone 2 à 3 fois par jour pendant 10 jours. Lors du contrôle post-opératoire, certains animaux subissent une radiographie facile avec injection de produit de contraste à travers la plaie opératoire afin de vérifier le passage correct de ce dernier et s’assurer que l’orifice artificiel de drainage des larmes ne s’est pas étanchéifié. Ces radiographies ne sont effectuées que sur quelques animaux seulement et ne seront pas analysées ici.

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Photo 18 : Radiographie de contrôle avec injection de produit de contraste (Image : Dr F. Weverberg)

b. Résultats

Les résultats sont résumés dans le tableau 13 :

Tableau 13 : Tableau résumant les résultats des interventions chirurgicales dans le traitement de l’épiphora chronique des carnivores domestiques

Espèce Etiologie Nb (yeux) DCR seule yeux

Paup seule yeux

DCR + paupière yeux

Résultats yeux + -

idiopathique 13 (26) 2 1 23 26 - post infectieux 1 (1) 1 - - 1 - tumeur paupière 1 (1) - - 1 1 -

Chien

non déterminée 1 (2) - - 2 1 1 symblépharon 1 (2) 2 - - - 2 traumatique 1 (1) 1 - - 1 -

Chat

non déterminée 2 (2) 2 - - 2 -

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Sont considérés comme bons résultats (+), les animaux présentant une diminution de l'épiphora de plus de 50%, avec un propriétaire satisfait du résultat. Sur les 28 yeux de chiens dont l’épiphora chronique est idiopathique, 2 ont subi une DCR seule, 1 une correction palpébrale seule et 25 une DCR associée à une correction palpébrale. Les résultats chirurgicaux sont positifs sur 27 des 28 yeux, le dernier présentant toujours un débordement des larmes identique à celui présenté avant l’intervention chirurgicale. L’unique œil présentant un épiphora post-infectieux dans l’espèce canine a subi une DCR seule avec un résultat positif sur le larmoiement. L’œil présentant une tumeur palpébrale a, quant à lui, subi une DCR associée à une correction palpébrale avec un résultat positif. Chez les chats, les résultats sont plus mitigés. Deux yeux dont l’épiphora était dû à des séquelles post infectieuses de symblépharon ont été traités avec une DCR seule, n’ayant pas amélioré leur défaut. L’œil de chat sur lequel l’épiphora était d’origine traumatique a subi une DCR avec de bons résultats. Enfin, les deux yeux dont l’épiphora était d’origine indéterminée ont subi une DCR seule avec des résultats positifs. Le taux de réussite est donc d’environ 90%, espèces canine et féline confondues. De plus, on a pu constater que 5 yeux traités par la technique de tarsorraphie-canthoplastie combinée (technique dite de Bigelbach) associée à une DCR ont présenté une déhiscence de la plaie chirurgicale de correction palpébrale. Quatre des yeux ont ainsi guéri par seconde intention, le dernier ayant nécessité la pose d’un point. Nous avons, enfin, constaté les échecs suivants :

une DCR bilatérale avait été réalisée chez un Epagneul Cavalier King Charles sans correction palpébrale associée et sans amélioration de l’épiphora. Cette erreur a été corrigée à l’occasion d'une seconde intervention chirurgicale avec un très bon résultat (résultat + dans le tableau)

apparition d'une KCS sur un œil chez un Caniche de 12,5 ans, 2 mois après l'intervention chirurgicale, alors que le résultat était bon sur les 2 yeux jusque là et que les valeurs du test de Schirmer étaient normales avant et 15 jours après l’intervention

réapparition progressive de l'épiphora chez un chat souffrant de symblépharon.

c. Discussion

A la vue des résultats précédents, on peut se demander quelle est la technique la plus appropriée afin de recréer un lac lacrymal normal sans débordement des larmes. On a ainsi vu qu’il était possible de pratiquer différentes techniques chirurgicales dans le traitement de l’épiphora des carnivores. Il est donc possible de pratiquer une DCR seule, une technique de correction palpébrale seule (ici la technique de tarsorraphie - canthoplastie associée, dite technique de Bigelbah) ou enfin une combinaison des deux précédentes techniques. En fonction de l’étiologie, le chirurgien devra prendre une décision pour sa technique chirurgicale. Si le système lacrymal présente une obstruction, il sera alors nécessaire de pratiquer au minimum une DCR seule, ou associée à la technique de correction palpébrale si un léger enroulement de la paupière est mis en évidence. Chez le chien, on a pu voir par exemple qu’après un larmoiement post-infectieux, seule une DCR avec des résultats positifs avait été mise en place. Cela peut s’expliquer par l’atrésie probable des points lacrymaux, ayant conduit le chirurgien à ne pas envisager la technique de correction palpébrale qui n’aurait eu que peu d’intérêt dans ce cas de figure. A contrario, lorsque l’on se retrouve face à un épiphora dit idiopathique, avec un système lacrymal perméable, il est préférable de conjuguer les deux techniques, comme on a pu le voir dans les résultats, afin d’éviter de passer à côté d’un composante palpébrale, aussi minime soit-elle, dans la pathogénie de

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l’épiphora. Dans l’espèce féline, le choix a été de ne pratiquer que des DCR isolées dans le traitement chirurgical de l’épiphora. L’enroulement palpébral restant assez rare dans l’espère féline, la correction palpébrale présente donc peu d’intérêt. Cependant, celui-ci existe tout de même, en particulier comme séquelle post-infectieuse. On peut donc se demander s’il n’aurait pas été judicieux, au moins sur les deux chats présentés avec un épiphora résultant de symblépharons, de combiner la technique de correction palpébrale à la DCR. Cela, aurait peut-être permis d’obtenir un résultat positif contrairement au résultat obtenu avec une simple DCR. Un deuxième point que l’on peut aborder est le risque de déhiscence des sutures de la technique de tarsorraphie – canthoplastie associée. En effet, cette technique étant ici effectuée dans l’angle interne de l’œil, il existe plus de tension sur les sutures qu’il n’en existe quand cette technique est appliquée au niveau de l’angle externe. A ce risque couru à chaque fois que cette technique est pratiquée dans l’angle externe, vient s’ajouter le risque de l’utilisation d’un antimitotique, dans ce cas précis la MMC. En effet, la plaie chirurgicale de la DCR n’étant pas suturée, le risque que la MMC appliquée au niveau de la fistule osseuse diffuse et vienne imbiber les tissus environnants, en particulier les tissus palpébraux du canthus interne n’est pas négligeable. Ceci explique très probablement que 5 des yeux traités avec la combinaison des techniques de DCR et de correction palpébrale aient présenté une déhiscence de la plaie de correction palpébrale. Il n’a toutefois fallu poser un point que sur une des cinq déhiscences de plaie, les quatre autres ayant cicatrisé par seconde intention. Ce risque est donc à courir sachant qu’il ne met pas en danger le résultat final de l’intervention si celui-ci est normalement détecté par les propriétaires et amené en contrôle afin que le chirurgien procède à la pose de points s’il le juge nécessaire. On a vu précédemment que les interventions sur les chats présentant un épiphora à la suite d’un symblépharon avaient toutes deux échoué. Il est possible, comme on en a formulé l’hypothèse, que l’échec soit dû au fait de ne pas avoir combiné la DCR à une technique de correction palpébrale. On peut cependant s’interroger sur une autre cause possible de cet échec. En effet, selon la localisation des adhérences conjonctivales, le résultat de la chirurgie peut être mis en péril. Si les adhérences sont localisées entre la conjonctive de la membrane nictitante et les conjonctives bulbaire ou palpébrales, la mobilisation de la membrane nictitante peut être plus difficile qu’à l’accoutumée, entraînant ainsi une application de la MMC au niveau de la plaie opératoire moins aisée et pouvant par la même occasion jouer sur le résultat final. Le traitement de l’épiphora ne peut être efficace que si ce syndrome est traité de façon globale et si le chirurgien s’attache à restaurer la dynamique lacrymale, soit une correction des paupières, une restauration du lac lacrymal et du flux lacrymal. Les bons résultats obtenus dans cette étude, notamment pour le traitement de l’épiphora idiopathique, indiquent que la technique de DCR combinée à une correction des paupières répond parfaitement à ces critères. Actuellement, compte tenu des résultats préliminaires, le Dr. Weverberg réalise quasi systématiquement la technique de DCR avec application de MMC associée à la technique de tarsorraphie-canthoplastie combinée de Bigelbach dans le traitement des épiphoras idiopathiques.

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CONCLUSION

Les médicaments utilisés en médecine vétérinaire comme des antimitotiques sont tous des médicaments que l’on peut utiliser dans le cadre d’une chimiothérapie. En particulier, la mitomycine C est un antibiotique isolé de Streptomyces caespitosus par Wakaki et al., en 1958. Très largement utilisée en médecine humaine, en association avec le 5-Fluorouracil, le cisplatine ou la doxorubicine, elle fait partie du traitement des carcinomes du col utérin, du côlon, du rectum, du sein, de la vessie, de la tête et du cou ou du poumon et des mélanomes ; elle est alors administrée par voie intraveineuse ou intravésicale. Aussi très largement usitée en ophtalmologie humaine sous forme de collyres ou lors d’application per-opératoire, elle peut servir de thérapie adjuvante à une intervention chirurgicale, que ce soit dans le traitement du glaucome, dans les chirurgies des voies lacrymales, dans les exérèses de ptérygion, de néoplasies oculaires et même lors de chirurgie réfractive. Cette utilisation très large dans le domaine ophtalmologique a conduit les vétérinaires à l’utiliser de plus en plus. L’utilisation de cette molécule en médecine vétérinaire est donc grandement calquée sur son utilisation en médecine humaine. En effet, lors de l’échec du traitement médical du glaucome, la MMC peut être utilisée en application per-opératoire lors d’une trabéculectomie, d’une trabéculorétraction ou lors de la pose d’un implant de drainage. Cependant, ces interventions de haute technicité sont peu pratiquées en médecine vétérinaire, bien qu’elles soient les interventions standards en médecine humaine, et restreignent donc l’utilisation de la MMC en tant qu’adjuvant à la chirurgie du glaucome. Il existe, en revanche, peu de littérature vétérinaire décrivant l’utilisation de la MMC en tant qu’agent adjuvant d’une chirurgie dans le traitement de tumeurs de la surface oculaire. Il a tout de même été montré que la MMC apparaît offrir une alternative solide aux autres thérapies adjuvantes couramment employées dans le traitement des carcinomes épidermoïdes oculaires du cheval. Enfin, on a pu grâce aux cas traités pas le Dr. Weverberg, mettre en évidence l’intérêt de l’utilisation de la MMC en tant qu’agent adjuvant à une chirurgie dans le traitement des symblépharons du chat (application per-opératoire au niveau des adhérences) et de l’épiphora chronique des carnivores (application per-opératoire au niveau de la fistule osseuse). Malgré une utilisation moins répandue qu’en médecine humaine, la MMC est donc une molécule d’intérêt en médecine vétérinaire, en particulier en ophtalmologie vétérinaire, domaine auquel s’intéressait ce travail. Il est donc raisonnable de penser que son utilisation pourrait s’accroître dans les prochaines années, en particulier dans les deux domaines des symblépharons et de l’épiphora chronique.

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APPLICATIONS THERAPEUTIQUES DE LA MITOMYCINE C EN OPHTALMOLOGIE VETERINAIRE

NOM et Prénom : LAURENT Edouard Résumé : L’utilisation des anitmitotiques, tels que la mitomycine C et le 5-fluorouracil est courante en ophtalmologie humaine. Leur emploi en tant qu’adjuvant dans divers actes chirurgicaux tels que les chirurgies du glaucome, des voies lacrymales, du ptérygion ou dans les chirurgies réfractives, s’avère précieux. Ils sont aussi fréquemment utilisés dans les traitements des tumeurs oculaires. La mitomycine C, antibiotique isolé de Streptomyces caespitosus par Wakaki et al., en 1958, est aussi utilisée en ophtalmologie vétérinaire. Son champ d’utilisation est calqué sur celui de l’ophtalmologie humaine. En effet, on peut l’utiliser en tant qu’adjuvant dans le traitement chirurgical du glaucome des carnivores ainsi que dans le traitement des tumeurs oculaires des ruminants, du cheval et des carnivores. Enfin, deux séries de cas nous ont permis de juger de son efficacité dans le traitement du symblépharon du chat ainsi que dans celui de l’épiphora chronique des carnivores domestiques par une technique de dacryocystorhinostomie associée à une correction des paupières. Mots clés : OPHTALMOLOGIE, GLAUCOME, TUMEUR OCULAIRE, THERAPEUTIQUE, CHIRURGIE, ANTIBIOTIQUE, MITOMYCINE C, SYMBLEPHARON, EPIPHORA, DACRYOCYSTORHINOSTOMIE Jury : Président : Professeur à la Faculté de Médecine de Créteil Directeur : Dr. Sabine Chahory Assesseur : Dr. Jean-Marie Mailhac Adresse de l’auteur : LAURENT Edouard, 23 avenue de Lombez, Bâtiment A, 31300 Toulouse

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MITOMYCIN C: THERAPEUTIC APPLICATIONS IN VETERINARY OPHTHALMOLOGY

Author: LAURENT Edouard Summary: Antimitotic drugs such as mitomycin C and 5-Fluorouracil are commonly used in human ophthalmology, particularly as adjuvants in surgery, such as glaucoma surgery, lacrimal duct surgery, pterygium excision or in refractive surgery. They are also frequently used in the treatment of ocular tumors. Mitomycin C, an antibiotic isolated from Streptomyces caespitosus by Wakaki et al., in 1958, is also used in veterinary ophthalmology. Its indications are the same as in human ophthalmology. Indeed, it can be used as adjuvant in the surgical treatment of glaucoma as well as in the treatment of ocular tumours in ruminants, horses and dogs. Two series of cases enabled us to assess its efficiency in the treatment of symblepharon in the cat and in the treatment of chronic epiphora in dogs and cats by dacryocystorhinostomy associated with a correction of the eyelids. Keywords: OPHTHALMOLOGY, GLAUCOMA, OCULAR TUMOUR, THERAPEUTIC, SURGERY, ANTIBIOTIC, MITOMYCIN C, SYMBLEPHARON, EPIPHORA, DACRYOCYSTORHINOSTOMY Jury: Président : Professeur à la Faculté de Médecine de Créteil Directeur : Dr. Sabine Chahory Assesseur : Dr. Jean-Marie Mailhac Author’s address: LAURENT Edouard, 23 avenue de Lombez, Bâtiment A, 31300 Toulouse