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Immuno-analyse et biologie spécialisée (2013) 28, 216—222 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com REVUES GÉNÉRALES ET ANALYSES PROSPECTIVES Apport du laboratoire d’analyses de biologie médicale à l’exploration des hyperleucocytoses Contribution of the polyvalent medical laboratory in the exploration of leukocytosis T. Francia a , J. Hanna a , O. Herault a,b,a Service d’hématologie biologique, CHRU de Tours, 2, boulevard Tonnellé, 37000 Tours, France b Faculté de médecine, université Franc ¸ois Rabelais de Tours, 10, boulevard Tonnellé, 37000 Tours, France Rec ¸u le 15 avril 2013 ; accepté le 17 avril 2013 KEYWORDS Neutrophilic polynucleosis; Lymphocytosis; Monocytosis; Eosinophilia; Blood smear; Cytology; Immunophenotype; Molecular biology Summary Leukocytosis, or elevated white blood cell count, is a commonly encountered labo- ratory finding. The strategy for diagnosis depends on the patient age, the clinical features and on the blood smear. It may be sometimes difficult distinguishing malignant from benign leukocytosis. This article presents the frontline management and diagnosis of leukocytosis. © 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. MOTS CLÉS Polynucléose neutrophile ; Hyperlymphocytose ; Monocytose ; Hyperéosinophilie ; Frottis sanguin ; Cytologie ; Immunophénotypage ; Biologie moléculaire Résumé Les hyperleucocytoses, correspondant à un excès de leucocytes circulants, sont une anomalie fréquemment rencontrée. L’exploration est fonction de l’âge du patient, du contexte clinique et du frottis sanguin. Très fréquemment réactionnelles, les hyperleucocytoses peuvent aussi être le mode de révélation d’une hémopathie maligne avec parfois des difficultés diag- nostiques pour le biologiste de première ligne. Cet article présente les principales étiologies des hyperleucocytoses et les stratégies diagnostiques pour les suspecter dès la prise en charge biologique initiale. © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (O. Herault). 0923-2532/$ see front matter © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.immbio.2013.04.007

Apport du laboratoire d’analyses de biologie médicale à l’exploration des hyperleucocytoses

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Page 1: Apport du laboratoire d’analyses de biologie médicale à l’exploration des hyperleucocytoses

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mmuno-analyse et biologie spécialisée (2013) 28, 216—222

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

EVUES GÉNÉRALES ET ANALYSES PROSPECTIVES

pport du laboratoire d’analyses de biologieédicale à l’exploration des hyperleucocytoses

ontribution of the polyvalent medical laboratory in the exploration ofeukocytosis

. Franciaa, J. Hannaa, O. Heraulta,b,∗

Service d’hématologie biologique, CHRU de Tours, 2, boulevard Tonnellé, 37000 Tours, FranceFaculté de médecine, université Francois Rabelais de Tours, 10, boulevard Tonnellé, 37000 Tours, France

ecu le 15 avril 2013 ; accepté le 17 avril 2013

KEYWORDSNeutrophilicpolynucleosis;Lymphocytosis;Monocytosis;Eosinophilia;Blood smear;Cytology;Immunophenotype;Molecular biology

Summary Leukocytosis, or elevated white blood cell count, is a commonly encountered labo-ratory finding. The strategy for diagnosis depends on the patient age, the clinical featuresand on the blood smear. It may be sometimes difficult distinguishing malignant from benignleukocytosis. This article presents the frontline management and diagnosis of leukocytosis.© 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

MOTS CLÉSPolynucléoseneutrophile ;Hyperlymphocytose ;

Résumé Les hyperleucocytoses, correspondant à un excès de leucocytes circulants, sont uneanomalie fréquemment rencontrée. L’exploration est fonction de l’âge du patient, du contexteclinique et du frottis sanguin. Très fréquemment réactionnelles, les hyperleucocytoses peuventaussi être le mode de révélation d’une hémopathie maligne avec parfois des difficultés diag-nostiques pour le biologiste de première ligne. Cet article présente les principales étiologies

Monocytose ;Hyperéosinophilie ;Frottis sanguin ;Cytologie ;Immunophénotypage ;Biologie moléculaire

des hyperleucocytoses et les stratégies diagnostiques pour les suspecter dès la prise en chargebiologique initiale.© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (O. Herault).

923-2532/$ – see front matter © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits rttp://dx.doi.org/10.1016/j.immbio.2013.04.007

éservés.

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Figure 2 Évolution de la valeur normale supérieure des lym-pd

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Exploration des hyperleucocytoses

Introduction

Les hyperleucocytoses sont définies par une augmentationdes leucocytes sanguins par rapport à des valeurs normalesqui varient avec l’âge du patient [1]. Elles sont le plusfréquemment liées à une polynucléose neutrophile ou unehyperlymphocytose, et moins fréquemment à une hyper-éosinophilie, une monocytose ou une basocytose. L’étudecytologique des cellules sanguines après coloration au May-Grünwald Giemsa (MGG) est un élément clé de la démarchediagnostique qui, pour être optimale, doit être réaliséesur un frottis sanguin de sang natif. Les hyperleucocytosesrésultent soit d’une augmentation des besoins par exempleen cas d’infection (hyperleucocytose réactionnelle), soitd’une hémopathie maligne. Les principales hémopathiesà l’origine d’une hyperleucocytose sont présentées sur laFig. 1 [2].

Cet article est consacré à la prise en charge des hyper-leucocytoses par les laboratoires de biologie médicale depremière ligne qui ont un rôle essentiel dans l’enquêtediagnostique pour la détection des hémopathies malignescomme pour l’orientation vers des analyses spécialisées.

Polynucléoses neutrophiles

Généralités et étiologies

Les polynucléoses neutrophiles sont définies par une aug-mentation des polynucléaires neutrophiles (PNN) circulants,

supérieurs à 7,5 G/L chez l’adulte [3]. Chez l’enfant etsurtout chez les nourrissons, il est indispensable de prendreen compte les normes établies en fonction de l’âge (Fig. 2).Les fausses polynucléoses lors de la numération par les

q

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Figure 1 Représentation schématique de l’hématopoïèse physioloassociées à une hyperproduction cellulaire. MFI : myélofibrose idiopaiguë myéloïde ; LAL : leucémie aiguë lymphoïde ; LLC : leucémie lysyndrome myéloprolifératif.

hocytes et des polynucléaires neutrophiles selon l’âge (normesu service d’hématologie biologique du CHU de Tours).

utomates sont rares, essentiellement en cas’érythroblastémie (surtout chez les nouveau-nés). Sur unrottis sanguin après coloration au MGG, la morphologiees PNN est très caractéristique : leur diamètre est de2 à 15 �m avec un noyau polylobé et une chromatineondensée en petites mottes. Leur cytoplasme présentee nombreuses fines granulations brunes (Fig. 3e). Ils neosent en général pas de difficulté d’identification, donce risque de confusion avec des leucoblastes.

Au cours des polynucléoses neutrophiles, il peut yvoir le passage dans le sang périphérique de précurseursédullaires de la lignée granulocytaire (métamyélocytes,yélocytes, promyélocytes, voire myéloblastes) (Fig. 3a—d)

orrespondant à la myélémie. Celle-ci est non pathologiqueuand elle est transitoire et modérée (< 5 % des leucocytes).

Les polynucléoses neutrophiles s’inscrivent dans troisrands cadres syndromiques en fonction de la physiopatho-ogie [4] :

gique et pathologique présentant les principales hémopathiesathique ; LMC : leucémie myéloïde chronique ; LAM : leucémiemphoïde chronique ; SLP : syndrome lymphoprolifératif ; SMP :

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218 T. Francia et al.

F ; c : myélocyte ; d : métamyélocyte ; e : polynucléaires neutrophiles(

D

Ltàodsapil

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il faut suspecter une LMC, une affection grave et accessibleà des traitements efficaces (inhibiteurs de la tyrosine-kinaseAbelson) [5]. La LMC existe principalement chez l’adulte.Elle est souvent accompagnée d’une hyperplaquettose,d’une hyperéosinophilie, voire d’une basocytose, maisclassiquement sans anémie, ni érythroblastose sanguine, nianomalies érythrocytaires. La myélémie est généralementimportante. Le diagnostic est réalisé par des analysescytogénétiques (cellules médullaires ou sanguines en casde myélémie importante) mettant en évidence une trans-location t(9;22) (chromosome de Philadelphie rapprochantles gènes BCR et ABL) et par la détection d’un transcritBCR-ABL en biologie moléculaire. Son principal diagnosticdifférentiel est la MFI qui survient essentiellement chez lesujet âgé (Tableau 1). La splénomégalie est volumineuse.Sur l’hémogramme, l’hyperleucocytose est généralementplus faible que dans la LMC et associée à une anémie,une érythroblastémie et une myélémie modérée. Le frottissanguin objective classiquement des anomalies morpholo-giques des érythrocytes tels que des dacryocytes, des corpsde Jolly et des anneaux de Cabot. Le diagnostic est réalisépar la biopsie ostéomédullaire (BOM) et la recherche de lamutation V617F du gène JAK2, présente dans 50 % des cas.

Enfin, quand l’enquête étiologique est négative, il fautpenser à la polynucléose tabagique (plus de 15 cigarettes

Tableau 1 Éléments du diagnostic différentiel entre la leu-cémie myéloïde chronique et la myélofibrose idiopathique.

LMC MFI

Âge > 18 > 50Splénomégalie + +++Anémie — ++Anomalies érythrocytaires — ++Hyperleucocytose +++ +Myélémie ++ +Érythroblastémie — +Richesse du myélogramme + —Myélofibrose (biopsie ostéomédullaire) — +t(9;22) (cytogénétique) + —Transcrit BCR-ABL (biologie moléculaire) + —Mutation JAK2 V617F (biologie moléculaire) — +/—

igure 3 Lignée granuleuse : a : myéloblaste ; b : promyélocytecoloration MGG ; grossissement : 10 × 100).

les polynucléoses physiologiques : elles sont observées aucours de la grossesse (jusqu’à 12 G/L), chez le nouveau-né(Fig. 2), en cas de stress, d’exercice violent, de menstrua-tions ou en période postprandiale (jusqu’à 15 G/L) ;

les polynucléoses réactionnelles : classiquement transi-toires et isolées, elles sont observées dans diversespathologies (infections bactériennes aiguës, généraliséesou localisées, souvent à pyogènes, infections fongiques(actinomycose, coccidiomycose), et parfois infectionsvirales (herpès, poliomyélite) ; syndromes inflamma-toires, notamment maladies systémiques (arthrite rhu-matoïde, périartérite noueuse, colite ulcéreuse, maladiede Hodgkin. . .) et goutte ; allergies, nécroses tissulaires,notamment infarctus du myocarde, pancréatite aiguë,tumeurs malignes) et peuvent atteindre 50 G/L. On lesretrouve aussi dans les régénérations médullaires (jusqu’à20 G/L), en cas de traitement par corticoïdes, lithiumou facteur de croissance hématopoïétique (granulocytecolony-stimulating factor [G-CSF]), lors d’intoxication(tabac, monoxyde de carbone, plomb) et durant un moisaprès splénectomie (jusqu’à 15 G/L) ;

les polynucléoses des syndromes myéloprolifératifs et dessyndromes myéloprolifératifs/myélodysplasiques : ellesconcernent principalement la leucémie myéloïde chro-nique (LMC) et la myélofibrose idiopathique (MFI). Ellespeuvent atteindre 100 G/L et sont souvent accompa-gnées d’une myélémie, importante dans la LMC, et d’uneatteinte des autres lignées. Les syndromes myéloproli-fératifs/myélodysplasiques (leucémie myélomonocytairechronique [LMMC] et LMC atypique) sont beaucoup plusrares.

émarche diagnostique

a polynucléose neutrophile doit toujours être interpré-ée en fonction des données cliniques, de son association

une autre anomalie de l’hémogramme et de l’existenceu non d’un syndrome inflammatoire. La Fig. 4 présente laémarche diagnostique. Le diagnostic est souvent évidenti le tableau clinique est riche, par exemple une infectionvérée. Il est plus difficile lorsque le contexte clinique estauvre. Il est important de considérer que même modérée et

solée, une polynucléose neutrophile persistante peut êtree mode de découverte d’une hémopathie maligne.

Dans la pratique, en l’absence de syndrome infectieux etevant une polynucléose élevée avec myélémie importante,

LMC : leucémie myéloïde chronique ; MFI : myélofibrose idio-pathique ; — : absence ; + : mineur(e) ; ++ : modéré(e) ; +++ :majeur(e) ; +/— : 50 %.

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Exploration des hyperleucocytoses 219

étiqu

nl

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Figure 4 Démarche diagnostique synth

par jour) qui doit être prouvée par un test d’arrêt du tabac.Le diagnostic de polynucléose idiopathique est un diagnosticd’élimination.

Hyperlymphocytoses

Généralités et étiologies

Parmi les leucocytes, les lymphocytes sont les cellules dontles valeurs normales varient le plus en fonction de l’âge. Ildoit donc être pris en compte pour interpréter les résultats(Fig. 2). De plus, il faut toujours raisonner sur les valeursabsolues de la formule sanguine et non sur les pourcentages(par exemple, une hyperlymphocytose relative pouvant êtrela conséquence d’une neutropénie). Une des difficultés des

hyperlymphocytoses réside dans l’identification des cellulesd’allure lymphoïde en excès. Il est donc recommandé devérifier la nature de ces cellules par un examen cytolo-gique d’une lame de sang (idéalement un frottis de sang

e devant une polynucléose neutrophile.

atif) colorée au MGG pour éviter toute confusion avec deseucoblastes ou des cellules lymphomateuses [6].

Sur le plan morphologique, les lymphocytes sont des cel-ules agranulaires (diamètre de 8 à 12 �m pour les petitsymphocytes et de 12 à 15 �m pour les grands lymphocytes),ucléées avec un noyau non lobé à chromatine dense dispo-ée en mottes.

Les principales étiologies des hyperlymphocytoseseuvent être regroupées en deux cadres nosologiques enonction de l’âge [7] :

chez les enfants et les adultes jeunes : les hyperlympho-cytoses sont surtout réactionnelles d’origine infectieuse(viroses, maladie de Carl-Smith, coqueluche, brucellose).Elles sont aussi rencontrées dans les syndromes mononu-

cléosiques principalement au cours des allergies et desprimo-infections au virus Epstein-Barr (EBV), au cyto-mégalovirus (CMV) ou au virus de l’immunodéficiencehumaine (VIH) ;
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220 T. Francia et al.

Tableau 2 Classification des syndromes lymphoprolifératifs B en fonction de l’immunophénotypage et des principales anomaliescytogénétiques et moléculaires.

Lymphocyte B (CD19+)

Immunophénotypage CD5+ CD5+ CD5— CD5—CD23+ FMC7—Ig de surface faible

CD23+ FMC7—Ig de surface +

CD10+ CD10—

Cytogénétique t(11;14) t(14;18)Biologie moléculaire CCND1-IGH BCL2-IGHHémopathies Leucémie lymphoïde

chroniqueLymphome dumanteau

Lymphomefolliculaire

Lymphome de la zonemarginale

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dumLdodf

lppepptdecl

mCcCidd(ertml

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A

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chez les adultes et notamment chez les sujets âgés :les hyperlymphocytoses sont généralement chroniques ets’inscrivent dans le cadre d’hémopathies, principalementla leucémie lymphoïde chronique (LLC) et les lymphomesen phase de dissémination leucémique. Les étiologiesinfectieuses sont rares.

émarche diagnostique

a démarche diagnostique des hyperlymphocytoses estonction de l’âge du patient, du contexte clinique ete l’examen cytologique du frottis sanguin. Les princi-ales difficultés diagnostiques sont rencontrées en cas’hyperlymphocytose à lymphocytes matures. En effet,es lymphocytes hyperbasophiles orientent d’embléeers un syndrome mononucléosique et les leucoblastesignent une leucémie aiguë. Les principales causes’un syndrome mononucléosique sont les infectionsirales (mononucléose infectieuse [MNI], CMV, VIH),actériennes (syphilis secondaire, brucellose, maladie’Osler) et exceptionnellement parasitaires (toxoplas-ose), et les allergies. Les hémopathies malignes neonnent qu’exceptionnellement un syndrome mononucléo-ique.

Une hyperlymphocytose mature persistante chez l’adulteoit conduire à des explorations spécialisées et notammentn immunophénotypage des lymphocytes sanguins par cyto-étrie en flux à la recherche d’une anomalie clonale [8].

’électrophorèse des protides sériques est aussi très riche’information en mettant en évidence un pic monoclonalu une hypogammaglobulinémie. Cette dernière s’observeans l’évolution des syndromes lymphoprolifératifs et peutavoriser l’apparition de syndromes infectieux majeurs.

La LLC est l’hémopathie maligne la plus fréquente danses pays industrialisés (sauf Extrême-Orient) [9,10]. Enratique, elle doit être suspectée devant toute hyperlym-hocytose persistante chez le sujet âgé et le diagnosticst posé par immunophénotypage des lymphocytes du sangériphérique [11]. Les leucocytes sanguins sont marquésar des anticorps monoclonaux fluorescents et leurs carac-éristiques optiques sont analysées après illumination par

es lasers. Cet examen permet de rechercher une clonalitét de préciser le phénotype des cellules en excès. Trèslassiquement, la LLC et les lymphomes sont discriminés pare score de Matutes qui est basé sur l’étude des marqueurs

Hpds

embranaires des lymphocytes : CD5, CD22 (ou CD79b),D23, FMC7 et immunoglobulines de surface. Le phénotypearactéristique d’une LLC (score de Matutes à 5) estD5+ CD22— CD23+ FMC7— avec une faible expression des

mmunoglobulines de surface. Il est à noter qu’en l’absence’anémie, le myélogramme n’est pas indispensable auiagnostic de ces hémopathies. Un score de Matutes faible0 ou 1) est en faveur d’un lymphome dont le diagnosticst précisé notamment par l’expression du CD10 et par laecherche d’anomalies cytogénétiques et moléculaires :(11;14) et réarrangement CCND1-IGH dans le lymphome duanteau, et t(14;18) et réarrangement BCL2-IGH dans le

ymphome folliculaire (Tableau 2) [12].L’arbre décisionnel pour aider au diagnostic

’hyperlymphocytose est présenté sur la Fig. 5. Dansertains cas rares, l’hyperlymphocytose peut êtreiée au tabagisme, mais cette étiologie ne peut êtreetenue qu’après avoir établi la non-clonalité sur’immunophénotypage des cellules sanguines et avoirérifié sa régression lors d’un test d’arrêt du tabac.

utres hyperleucocytoses

yperéosinophilie

ne hyperéosinophilie est définie par un excès de polynu-léaires éosinophiles (PNE) dans le sang circulant (supérieur

0,50 G/L). Le PNE est une cellule arrondie (diamètre de2 à 17 �m) avec un noyau bilobé à chromatine condensée.e cytoplasme est caractérisé par de volumineuses granula-ions orangées.

Les hyperéosinophilies sont rarement responsables’hyperleucocytose, sauf en cas de valeurs très augmen-ées. Elles sont classiquement associées à des parasitoseshelminthiases), des allergies (eczéma constitutionnel,sthme réaginique, polynose, rhinite, conjonctivite aller-ique, allergies alimentaires. . .) et des dermatoses (gale,ermatose bulleuse, urticaire, herpès gestationnel). Elleseuvent être aussi rencontrées dans des hémopathies myé-oïdes (LMC, leucémie aiguë myélomonocytaire (LAM4) avecnv(16). . .) ou lymphoïdes (syndrome de Sézary, maladie de

odgkin, leucémie aiguë lymphoïde B avec t(5;14)). Uneolynucléose éosinophile supérieure à 1,5 G/L depuis pluse six mois sans étiologie retrouvée doit faire suspecter unyndrome d’hyperéosinophilie essentielle diagnostiqué en
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Exploration des hyperleucocytoses 221

thét

ncd

tpm

Figure 5 Démarche diagnostique syn

recherchant le transcrit de fusion FIP1L1-PDGFRA [13,14].Il existe de nombreuses autres causes d’hyperéosinophilienon hématologiques (tumeur maligne, vascularite, originemédicamenteuse, déficit immunitaire et cause toxique).

Monocytose

La monocytose est définie par un excès de monocytes cir-culants dans le sang (supérieur à 1 G/L). Le monocyte estune cellule de grande taille (diamètre de 15 à 20 �m) à

tfira

ique devant une hyperlymphocytose.

oyau irrégulier (réniforme), à chromatine filamenteuse. Leytoplasme est caractérisé par une coloration bleu-gris (ciel’orage) et de très fines granulations azurophiles [15].

La majorité des monocytoses sont transitoires et réac-ionnelles, au cours des maladies bactériennes, virales ouarasitaires. Elles sont aussi observées lors de régénérationédullaire et lors de syndrome inflammatoire. Les monocy-

oses chroniques, isolées et sans étiologie évidente, justi-ent d’un suivi compte tenu des risques d’apparition ulté-ieure d’une hémopathie maligne. L’association à d’autresnomalies de l’hémogramme (anémie, macrocytose. . .) ou

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[In: Hématologie. 2e ed. Arnette: Rueil-Malmaison; 2005[p. 129—32].

22

u frottis sanguin (macroplaquettes, dysgranulopoïèse,ysplasie des monocytes. . .) nécessite des explorationsématologiques spécialisées (myélogramme, et en fonctione celui-ci, immunophénotypage médullaire, cytogénétiquet biologie moléculaire) à la recherche de syndromes myé-odysplasiques, de LMMC ou d’une leucémie aiguë [16].

onclusion

’hyperleucocytose est une anomalie fréquente de’hémogramme, identifiée par les laboratoires de bio-ogie médicale. Les étiologies sont variées, allant de’infection banale aux hémopathies les plus graves. L’âgeu patient, le contexte clinique et l’analyse du frottisanguin sont les éléments clés à prendre en compte dans’interprétation des hyperleucocytoses et dans la gestiones explorations complémentaires à visée étiologique. Leiologiste de première ligne a un rôle primordial pouriloter les explorations étiologiques et éviter tout retardiagnostique.

éclaration d’intérêts

es auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enelation avec cet article.

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