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Apprendre Apprendre à à comprendre comprendre les les oe oe uvres de litt uvres de litt é é rature de jeunesse rature de jeunesse « …une question de développement, d’apprentissage, et de progressivité. » Un Un é é clairage th clairage th é é orique par: orique par: Véronique BOIRON, Maître de conférences en sciences du langage et enseignante chercheuse à l’IUFM d’Aquitaine

Apprendre à comprendre - DSDEN 47ecolia47.ac-bordeaux.fr/.../Apprendre_a_comprendre.pdf · Apprendre à comprendre les ... Les images aident à la compréhension et les albums sont

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Apprendre Apprendre àà comprendrecomprendreles les œœuvres de littuvres de littéérature de jeunesserature de jeunesse

« …une question de développement,

d’apprentissage, et de progressivité. »Un Un ééclairage thclairage thééorique par:orique par:

Véronique BOIRON , Maître de conférences en sciences du

langage et enseignante chercheuse à l’IUFM

d’Aquitaine

On lit de plus en plus de livres, de plus en plus complexes

�� Processus de Processus de «« complexificationcomplexification »» depuis depuis 1515--20ans, transformations profondes du 20ans, transformations profondes du monde de lmonde de l’é’éditiondition……

�� Cela nuit aux jeunes enfantsCela nuit aux jeunes enfants� Leur développement, lui, n'a pas changé

(ils apprennent (ils apprennent àà marcher, marcher, ààparlerparler……toujours au même âge!)toujours au même âge!)

� L’une des plus grandes difficultés langagières pour les élèves des cycles 1, 2 et 3 va être de :

« COMPRENDRE le langage écrit »

� Même difficulté que pour apprendre une langue étrangère

Apprendre à comprendre les textes écrits (contes, albums, récits illustrés…) c ’est :

�� Ne pas croire que Ne pas croire que «« comprendrecomprendre »» est innest innééet/ou en relet/ou en relééguer la responsabilitguer la responsabilitéé ààll’’environnement social de lenvironnement social de l’’enfantenfant

�� En faire un rEn faire un rééel objet del objet d’’apprentissage apprentissage ààll’é’école cole

�� Aider Aider àà la construction dla construction d’’outils langagiers, outils langagiers, culturels et littculturels et littéérairesraires

�� SS’’assurer de cette construction, assurer de cette construction, éévaluervaluer

Discours problDiscours probléématiques, matiques, ididéées rees reççuesues

� Aucune étude à ce jour ne permet d’affirmer que plus on lit de textes et d’albums aux jeunes élèves, mieux ils les comprennent !

� Aucune étude à ce jour ne permet de dire que la seule lecture assure la compréhension

� Aucune étude à ce jour ne permet de dire que la compréhension se construit dans la fréquentation d ’oeuvres résistantes ...

Des Des «« croyancescroyances »» qui qui interrogentinterrogent……

� La complexité des textes assure le développement de la compréhension.

� Un texte intéressant est un texte qui résiste.

� Les images aident à la compréhension et les albums sont plus faciles à comprendre.

� Plus on lit, mieux on comprend. � Le rappel de récit est un moyen de savoir

ce que chaque élève comprend.

� Il nous faut résister face à ces croyances très problématiques du point de vue du développement de l’enfant

Des savoirs

� AUCUN texte n ’est simpliste pour les enfants car c’est du langage écrit

� La langue française et l’acte de lire sont des obstacles à la compréhension (même par la médiation d’un bon lecteur, l’enseignant en l’occurrence…)

� La compréhension s ’enseigne par le maître et doit s’apprendre progressivement …

Développement de l’enfant de 3 ans

� il ne comprend pas les textes écrits (même oralisés)� il n’a pas construit le récit oral � il prélève des éléments épars (détails) sur les

images = pas de mise en cohérence � il ne mobilise pas encore d’images mentales � il mobilise une relation affective aux objets du

monde � il a une histoire très courte (peu d'appuis cognitifs) � la question des expériences est cruciale : même si

l'enfant a expérimenté (la neige, le château de sable, le marché...) sans le langage (des adultes), ces expériences ne sont pas construites et donc pas « convoquables »...

Comprendre un texte c'est en effet ::

� gérer ce qui est fondamental � éliminer les informations qui sont jugées

inutiles � convoquer des savoirs encyclopédiques

et des expériences � produire des inférences à partir des

traces d'information et des savoirs préalables du lecteur

Pour que l’enfant comprenne la lecture d ’un texte illustré on non

il faut que : � le vocabulaire soit familier (air de famille) � l’élève dispose d’un temps suffisant

(stabiliser = relire) � les inférences soient « simples »� le prélèvement demandé concerne

principalement des informations explicites.

La question des images

Entre 3 et 6 ans, l'enfant ne sait pas lire les ima ges . � Comme avec le récit, il procède par énum ération et

juxtaposition (y'a un chat pi une maison pi un nuage pi une souris pi y'a un arbre...)

� •Sans l'aide du maître, il n'organise pas la cohérence de l'image, il ne s'oriente pas dans l'image

� La lecture d'images relève d'un apprentissage programmé, progressif (pas naturel) comme tout ce qui relève de l'écrit

Beaucoup d’indices, de référents culturels à prélever sur cette image d’apparence simple pour mettre en cohérence illustration et récit.

Un élève de 3 ans est-il capable de cette démarche seul ?

La question des exp ériences

� Pour comprendre tout texte, il faut convoquer des exp ériences , des savoirs, des pré-requis(du déjà-là)

� Aussi, faut-il proposer des expériences tout en restant dans le programme de développement de l'enfant :

� Eviter l'inconnu, le lointain, l'étrange qui empêchent de penser PS-MS

� Éviter les récits qui créent des ruptures (gérer les différences de valeurs, de modes de vie) : Au bain ! PS-MS

Combien d’enfants de nos classes ont une maman pour qui « l’heure du bain »c’est aller au bain avec eux ?

� S'appuyer sur les expériences partagées = construites par l'école,

pour être sûr de convoquer une expérience commune

� Construire les expériences par le langage, l'observation (GS)

Obstacles à la compréhension du langage écrit

L’acte de lecture est opaque � l’action de lire est une activité invisible pour les autres

(lien entre rétine et cerveau)� les enfants n’ont pas accès à ce qui se passe quand

quelqu’un lit. � Ils ne font pas le lien entre les « pattes de mouches »

sur le papier et le langage qui sort de la bouche de l’adulte (lecture à haute voix).

� Ils pensent que le maître invente, que c’est lui qui a écrit l’histoire, ils confondent lire/parler/raconter/réciter…

� Tout cela constitue autant d’obstacles à la compréhension du langage écrit ET à la construction de représentations de l’ACTE DE LIRE.

Seule la verbalisation de son activitépar le maître leur permet de comprendre ce que c’est que lire et leur permet de différencier les activités langagières :

� lire à voix haute (permanence de l’écrit)� raconter (pas de texte)� parler, reformuler� réciter par coeur…

Comment aider les Comment aider les ééllèèves ves ààAPPRENDRE A COMPRENDRE APPRENDRE A COMPRENDRE

(albums, contes, r(albums, contes, réécits) ?cits) ?

� Raconter et RERACONTER � Résumer AVANT de lire � Lire et RELIRE � Lire des récits non illustrés � NE PAS MODIFIER les textes � Donner des savoirs encyclopédiques � Construire des savoirs littéraires (stéréotypes…) � Proposer différents modes de lecture (petits

groupes en ateliers dirigés ; duelle ; collective)

Mais aussi:Mais aussi:

� Construire une progression des lectures de la PS à la GS et plus tard (liaison GS-CP)

� Utiliser les mêmes supports (albums ou récits ou contes) dans une progression d’activités (raconter ; raconter puis lire ; lire)

� Proposer des lectures magistrales interprétatives

� Dire ou lire la fin avant de poursuivre � Éviter de trop instrumentaliser la littérature � Ritualiser les moments de lecture � Mobiliser le langage (verbal et non verbal) du

maître pour apprendre à comprendre

Des questions pour aider àcomprendre

� Des questions à poser systématiquement àl’oral :

� 1. C’est l’histoire de qui ? = repérer le(s) personnage(s) principal(aux)

� 2. Qu’est-ce qui lui (leur) arrive ? OU qu’est-ce que ça raconte ? = repérer la raison du récit

� 3. De quoi ça parle ? � 4. Comment s’appelle la petite fille ? Quel âge a-

t-elle ? ... = une question de type informatif � 5. Comment ça se fait que …? Comment a-t-il

réussi à …? Comment tu expliques que… ? = une question portant sur un implicite

Des questions fondamentales pour interpréter

•Comment ça se fait que les bébés chouettes se serrent fort les uns contre les autres ? •Qu’est-ce qu’elle aurait bien pu faire la maman pour que ses bébés n’aient pas peur ?

Ces questions permettent d ’aller au -delàdu texte, d ’ajouter du langage et des savoirs du monde (exp ériences)

Ou encore:

� Comment ça se fait que le renard, lui, il arrive àmanger la galette ? (Roule galette)

� Comment ça se fait que le loup se couche dans le lit de la grand-mère ? (Petit Chaperon rouge)

Ce type de questions construit les stéréotypes littéraires (la ruse…) et les savoirs littéraires (le système de personnages : loup/petite fille)

Ce type de questions construit la pensée des personnages et donne sens à leurs actions

inexpliqu ées

Comment ça se fait que la maman renverse la soupe ? (L’âne Trotro fait de la soupe)

Lire des livres à l’é cole : au moins 8 bonnes raisons de le faire pour TOUS les

élèves

� Construire des pratiques sociales, culturelles et langagières à propos des livres

� Construire un imaginaire culturel � Construire une compréhension collective et singulière � Construire et s’approprier à travers les oeuvres littéraires

les valeurs de l’école, de la Nation � Construire la culture scolaire et faire coexister

différentes cultures � Multiplier les expériences du monde , de soi, de l’autre � Construire des expériences langagières (manières de

dire), culturelles, encyclopédiques, affectives, esthétiques, cognitives…

� Se construire comme apprenti lecteur et apprenti interprète des textes, des images

bibliographie� Elisabeth Bautier (2006). Apprendre à l’école, apprendre

l’école. éd. Chronique sociale � Véronique Boiron (2011). « Lire des albums à l’école

maternelle : caractéristiques d’une expertise en actes », INRP, Repères n° 42.

� Véronique Boiron & Maryse Rebière (2009). « Quels albums pour la petite section ? », in La littérature en corpus, CRDP de Bourgogne, Scérén.

� Mireille Brigaudiot (2008). « Les difficultés de compréhension en maternelle » Cahiers pédagogiques, n°462.

� Jérôme Bruner (1996). L’éducation, entrée dans la culture, Retz.

� Frédéric François (1993). Pratiques de l’oral, Nathan. � Francis Grossmann (1996). Enfances de la lecture, éd.

Peter Lang. � Richard Hoggart (1957). La culture du pauvre, éd. De Minuit.