7
Université Paris-Sud - Lycée de l’Essouriau Chimie PSI, 2014–2015 Approche documentaire de chimie n˚1 Le phénomène d’osmose Le travail consiste à prendre connaissance des différents documents proposés pour ensuite répondre aux questions posées en fin d’énoncé. Le but de cette approche documentaire est de discuter de l’influence de la pression sur le potentiel chimique au travers du phénomène d’osmose et d’en voir différentes applications. L’osmose est un phénomène de diffusion de matière à travers une membrane semi-perméable. Lorsque deux solutions sont séparées par une membrane semi-perméable (perméable au solvant mais pas aux solutés), un transfert de solvant se produit de la solution la moins concentrée (milieu hypotonique) vers la solution la plus concentrée (milieu hypertonique) jusqu’à l’équilibre (milieux isotoniques). C’est le phénomène d’osmose. De même, quand la membrane sépare du solvant pur et une solution de ce même solvant, un afflux de solvant dans la solution est observé. On appelle pression osmotique π la surpression qui doit être appliquée à la solution pour empêcher cet afflux de solvant. Si une pression supérieure à la pression osmotique est appliquée à la solution, le transfert de solvant s’effectue dans l’autre sens. C’est le phénomène d’osmose inverse. Ces phénomènes peuvent être résumés sur le schéma suivant : 1

Approche documentaire de chimie n˚1 Le phénomène …pcsipsiauxulis.com/IMG/pdf/-103.pdf · est la masse volumique du solvant en kg.m 3 et h est la hauteur de la colonne de solution

  • Upload
    tranque

  • View
    216

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Université Paris-Sud - Lycée de l’Essouriau Chimie PSI, 2014–2015

Approche documentaire de chimie n˚1Le phénomène d’osmose

Le travail consiste à prendre connaissance des différents documents proposés pour ensuite répondre aux questionsposées en fin d’énoncé. Le but de cette approche documentaire est de discuter de l’influence de la pression sur lepotentiel chimique au travers du phénomène d’osmose et d’en voir différentes applications.

L’osmose est un phénomène de diffusion de matière à travers une membrane semi-perméable.Lorsque deux solutions sont séparées par une membrane semi-perméable (perméable au solvant mais

pas aux solutés), un transfert de solvant se produit de la solution la moins concentrée (milieu hypotonique)vers la solution la plus concentrée (milieu hypertonique) jusqu’à l’équilibre (milieux isotoniques). C’est lephénomène d’osmose.

De même, quand la membrane sépare du solvant pur et une solution de ce même solvant, un afflux desolvant dans la solution est observé. On appelle pression osmotique π la surpression qui doit être appliquéeà la solution pour empêcher cet afflux de solvant.

Si une pression supérieure à la pression osmotique est appliquée à la solution, le transfert de solvants’effectue dans l’autre sens. C’est le phénomène d’osmose inverse.

Ces phénomènes peuvent être résumés sur le schéma suivant :

1

1 Un peu d’histoire (Wikipedia)

Il semble que le phénomène d’osmose ait été découvert parhasard par le physicien, ecclésiastique et épicurien français Jean-Antoine Nollet, en 1748. En effet, l’abbé Nollet, pour conserverla fraicheur de son vin, aurait utilisé un morceau de vessie ani-male tendue et attachée fermement autour du col d’une fiole àdemi remplie de vin, qu’il a ensuite immergée dans l’eau froide.Au bout de quelques heures, le volume de la solution à l’inté-rieur de la fiole avait augmenté jusqu’à la capacité maximale dela fiole. Fort heureusement, le vin était encore frais et consom-mable, bien que moins alcoolisé...

En 1886, le chimiste néerlandais Jacobus Van’t Hoff (1852-1911) ex-plique par la thermodynamique le phénomène d’osmose et publie une ana-logie entre la pression osmotique au sein des solutions aqueuses et l’équa-tion des gaz parfaits. Il recevra en 1901 le premier prix Nobel de chimie« en reconnaissance des services extraordinaires qu’il a rendus par la dé-couverte des lois de la dynamique chimique et de la pression osmotiquedans les solutions ».

En 1950, le phénomène d’osmose inverse est mis en évidence par le physicien américain Reid.

2

2 Thermodynamique de l’osmoseLe phénomène d’osmose repose sur le transfert de particules à tra-

vers une membrane semi-perméable. Constituées souvent de polymèresorganiques (acétate de cellulose, polyamides, ...) elles apparaissent àl’échelle moléculaire comme un enchevêtrement de macromolécules(figure 1). Les cavités entre les chaînes sont assez larges pour laisserpasser des petites molécules de solvant (eau souvent) mais trop petitespour que des solutés hydratés la traversent. Néanmoins, la taille ne faitpas tout et des molécules plus grosses que les cavités peuvent aussi tra-verser la membrane qui se déforme alors localement pour solubiliser lesespèces.

Figure 1

D’une façon plus générale, les membranes permettent de réaliser des filtrations et le tableau ci-dessousindique la taille des particules stoppées et les domaines d’application :

Technique séparative Taille des particules stoppées ApplicationsFiltration conventionnelle supérieure à 5 µm Filtration classique

Microfiltration supérieure à 1 µm Potabilisation de l’eau, traitement des ef-fluents, ...

Ultrafiltration supérieure à 50 nm Industrie agroalimentaire, bio-industries, ...Nanofiltration supérieure à 1 nm Élimination d’ions multivalents, régénéra-

tion de bains usés de traitements de surface,...

Osmose, osmose inverse supérieure à 0,4 nm Production d’eau pure, dessalement eau demer, ...

Rappel : la taille d’une molécule d’eau est de l’ordre de 0,3 nm.Pour comprendre l’origine du phénomène d’osmose nous allons

considérer le système ci-contre (figure 2) :• Un compartiment (1) contenant nA(1) mol de solvant A et nB(1)

mol de soluté B à une température T et sous une pression P.• Un compartiment (2) contenant nA(2) mol de solvant A et nB(2)

mol de soluté B à une température T et sous une pression P.• Une membrane semi-perméable entre les 2 compartiments ne lais-

sant passer que les molécules de solvant.On considèrera que la solution (2) est plus concentrée que la solution(1) (xB(2) > xB(1)) et que les solutions sont idéales.

L’osmose directe se traduit alors par un flux de solvant du com-partiment (1) au compartiment (2) donc de la solution la moinsconcentrée vers la plus concentrée (figure 2).

En effet, en considérant la pression et la température constantes onpeut écrire la différentielle de l’enthalpie libre totale du système dGcomme :

dG = µA(1)dnA(1)+µA(2)dnA(2) =(µA(1)−µA(2)

)dnA(1)

et donc

dG = RT ln

(xA(1)

xA(2)

)dnA(1).

Spontanément, le solvant passe donc du compartiment (1) au comparti-ment (2) jusqu’à ce que dG = 0.

Figure 2

3

Si le compartiment (1) contient du solvant pur, onpeut définir la pression osmotique comme la surpres-sion à appliquer à la solution du compartiment (2)pour empêcher l’afflux de solvant dans la solution etavoir le système ci-contre (figure 3) à l’équilibre.

Figure 3

En traduisant l’égalité des potentiels chimiques du solvant dans les 2 compartiments à l’équilibre ther-modynamique, on peut montrer après quelques lignes de calcul et approximations que la pression osmotiqueπ des solutions idéales diluées se met sous la forme suivante, appelée loi de Van’t Hoff :

π = csRT

où π est la pression osmotique en Pascal, cs est la concentration molaire volumique du soluté en mol.m−3,R = 8,314 J.K−1.mol−1 est la constante des gaz parfaits et T est la température en Kelvin. On peut alorsfaire les remarques suivantes :

1. Si la solution contient plusieurs solutés, la pression osmotique se met sous la forme

π = ∑i

ciRT

2. Si la solution n’est pas idéale, on admet généralement que l’équation de Van’t Hoff se réduit aupremier terme du développement polynomial suivant :

π = csRT(1+acs +bc2

s + . . .)≈ csRT (1+acs) ,

où a est la constante du viriel osmotique.

Pour mesurer les pressions osmotiques, des osmomètres ont étéconstruits, correspondant au montage ci-contre (figure 4). La si-tuation se complique alors un peu : au début, les niveaux sont à lamême hauteur dans le solvant et dans la solution, qui contient uneconcentration cs,init en soluté. L’afflux de solvant dans la solutiondilue le soluté et provoque une montée de la solution dans l’os-momètre. On atteindra l’équilibre quand la pression hydrostatiquede la colonne de solution coïncidera avec la pression osmotique.Cela permet d’établir facilement la formule :

π = cs, f inRT = ρsolvantghFigure 4

où g est l’accélération de la pesanteur (9,81 m.s−2), cs, f in est la concentration finale en mol.m−3, ρsolvantest la masse volumique du solvant en kg.m−3 et h est la hauteur de la colonne de solution en m.

Les pressions osmotiques peuvent atteindre des valeurs très importantes. Ainsi, pour de l’eau de mer(assimilée à une solution de chlorure de sodium à 32 g.L−1) à 15˚C, elle atteint plus de 20 bars !

4

3 Une application au laboratoire : détermination des masses mo-laires par osmométrie

L’une des applications les plus courantes de l’osmométrie est la mesure des masses molaires des ma-cromolécules telles que les protéines et les polymères synthétiques.

3.1 L’hémoglobineLa masse molaire de l’hémoglobine peut ainsi être déterminée à partir de la mesure de pression osmo-

tique suivante : en dissolvant dans 100 mL d’eau 4,00 g d’hémoglobine humaine, on obtient une solutiondont la pression osmotique à 7,4˚C est de 13,4 mbar.

L’hémoglobine est une protéine constituée de quatre chaînesidentiques deux à deux. Chacune de ces chaînes est associée à ungroupement particulier, l’hème, constitué d’un ion fer (II) partiel-lement complexé. Contenue dans les globules rouges, son rôle estde transporter l’oxygène des poumons aux tissus et le dioxyde decarbone dans le sens inverse. La masse molaire de l’hémoglobinehumaine est de l’ordre de 65000 g.mol−1 .

3.2 Le polychlorure de vinyleRéaliser une série de mesure à des concentrations différentes permet d’améliorer la précision de la masse

molaire obtenue. Ainsi, pour mesurer la masse molaire moyenne d’un échantillon de PVC (polychlorure devinyle), des chercheurs ont réalisé différentes solutions (non idéales à cause de la taille des macromolécules)à 25˚C dans la cyclohexanone. Le tableau suivant indique les hauteurs de solution (ρ = 0,980 kg.L−1) dansl’osmomètre en fonction de la concentration massique en polymère, ce qui a permis aux chercheurs dedéterminer que la masse molaire moyenne M du polymère était de 120 kg.mol−1 et que son degré depolymérisation moyen n était de 1920.

c (g.L−1) 1,00 2,00 4,00 7,00 9,00h (cm) 0,28 0,71 2,01 5,10 8,00

Le polychlorure de vinyle, ou PVC, est un polymère constitué de macromolécules dans lesquelles lemotif unitaire (-CH2-CHCl-) se répète un très grand nombre de fois.

4 Une application à l’industrie : dessalement de l’eau de mer parosmose inverse

Le document vidéo proposé ci-dessous est un prolongement du travail effectué en première année surl’eau (méthodes de détection d’espèces, procédés mis en jeu pour la séparation des espèces...). Il réinvestitégalement la méthode de distillation vue en thermodynamique.

D’eau et de selSerge Bigot, CNRS Images, 2011, 14 min.

5

Quelques questions1. Définir une membrane semi-perméable et donner des exemples.2. Lorsque deux solutions de concentrations différentes sont de part et d’autre d’une membrane semi-

perméable, qu’observe-t-on en terme de migration d’espèces ?3. Commenter le réalisme de l’anecdote de l’abbé Nollet.4. Redémontrer l’expression de dG proposée dans le document 2. En tenant compte des hypothèses citées

pour la température et la pression, expliquer la conclusion aboutissant au phénomène d’osmose de lafigure 2.

5. À température constante, écrire la condition d’équilibre du solvant dans les deux compartiments de lafigure 3 du document 2. Justifier l’introduction de la pression osmotique π dans la formule du potentielchimique µi proposée sur la figure 3.

6. Démontrer la loi de Van’t Hoff en précisant les hypothèses.7. Calculer la pression osmotique π de l’eau de mer et la hauteur h associée. On assimilera l’eau de mer à

une solution de chlorure de sodium à 32 g.L−1 . Faire un commentaire sur l’idéalité.8. Évaluer la masse molaire de l’hémoglobine.9. Pourquoi cette protéine permet le transport du dioxygène ?

10. À partir des données expérimentales obtenues pour le PVC, déterminer sa masse molaire moyenne. Endéduire son degré de polymérisation moyen.

11. Comment qualifier la disponibilité en eau prévue en France en 2025 ?12. Quelles améliorations ont été apportées aux installations industrielles de distillation ?13. Quel est le principe de l’osmose inverse ? Pourquoi la valeur de la pression P = 60 bar citée dans le film

est-elle très supérieure à la valeur calculée dans le document 2 ? Citer quatre avantages et un inconvénientde la méthode d’osmose inverse.

14. Quelles sont les trois causes de dépôt colmatant sur les membranes semi-perméables ? Quelle méthodepermet d’observer ces dépôts ? Quel traitement de l’eau peut-on faire au préalable pour éviter certainsde ces dépôts ?

6

Annexes

Quelques formulesDifférentielle de l’enthalpie libre

dG =V dP−SdT +∑i µidni

Variation du potentiel chimique par rapport à la pression(∂µi

∂P

)T,n j 6=i

=Vm,i où Vm,i est le volume molaire partiel du constituant i.

Relation fondamentale de la statique des fluides

dP =−ρgdz

Mélanges idéaux et non idéauxUn mélange est dit idéal si et seulement si le potentiel chimique de chaque constituant i se met sous la

forme :µi(T,P,xi) = µpur

i (T,P)+RT lnxi.

Si l’on considère que le mélange est constitué de molécules A et de molécules B, cela nécessite queles interactions entre molécules A et molécules B soient du même ordre de grandeur énergétique qu’entremolécules de type A ou entre molécules de type B.

En pratique, ce n’est jamais le cas et on traduit l’écart à l’idéalité en introduisant un coefficient γi appelécoefficient d’activité, tel que :

µi(T,P,xi) = µpuri (T,P)+RT ln(γixi) ,

pour les mélanges réels.Plus les molécules A et B auront des caractéristiques physico-chimiques proches, plus le mélange aura

un comportement proche de l’idéalité, c.-à-d. γ→ 0. Par ailleurs, une solution aura un comportement d’au-tant plus idéal qu’elle est diluée. En effet, plus la solution est diluée, moins les interactions entre les solutéset le solvant auront d’influence.

Le tableau ci-dessous permet de voir l’évolution du coefficient d’activité ionique moyen d’une solutionde chlorure de sodium à 20˚C en fonction de la concentration en ions :

cNaCl (mol.L−1) 0,0 0,1 0,2 0,25 0,4 0,5 0,6lnγ 0 −0,248 −0,308 −0,328 −0,368 −0,384 −0,397

RéférencesDocument 1 : WikipediaDocument 2 : Atkins « chimie physique » + concours E3a PSI 2007Document 3 : Atkins « chimie physique », Mc Quarrie/Rock « chimie générale »Document 4 : La vidéothèque du CNRS http://videotheque.cnrs.fr/index.php

7