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Grosses délivrées aux parties le : RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 5 - Chambre 5-7 ARRÊT DU 23 MARS 2010 (n° 54,13 pages) Numéro d'inscription au répertoire général: 2009/09599 Décision déférée à la Cour: 09-D-14 rendue le 25 mars 2009 par l'AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE DEMANDEUR AU RECOURS: - La société GAZ ET ÉLECTRICITÉ DE GRENOBLE - GEG, S.E.M. Prise en la personne de son représentant légal dont le siège social est: 8 place Robert Schumann 38000 GRENOBLE représentée par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULA Y, avoués associés près la Cour d'Appel de PARIS assistée de Maître Nicolas LEVEQUE, avocat au barreau de PARIS 31 avenue Pierre 1 er de Serbie 75782 PARIS CEDEX 16 EN PRÉSENCE DE: - Mme LE MINISTRE DE L'ECONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI D.G.C.C.R.F Bât.5, 59 boulevard Vincent Auriol 75703 PARIS CEDEX 13 non représentée - M. LE PRESIDENT DE L'AUTORITE DE LA CONCURRENCE Il rue de l'Echelle 75001 PARIS représenté par Mme Irène LUC, munie d'un pouvoir COMPOSITION DE LA COUR: L'affaire a été débattue le 02 février 2010, en audience publique, devant la Cour composée de : - M. Thierry FOSSIER, Président de chambre - M. Christian REMENIERAS, Conseiller - M. Jean-Jacques GILLAND, Vice-Président placé qui en ont délibéré 1/

ARRÊT DU 23 MARS 2010 - autoritedelaconcurrence.fr · a conclu le 5 janvier 2005 un contrat d'accès au réseau public de transport de l'électricité ... Quelques jours après les

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Grosses deacutelivreacutees aux parties le

REacutePUBLIQUE FRANCcedilAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCcedilAIS

COUR DAPPEL DE PARIS

Pocircle 5 - Chambre 5-7

ARREcircT DU 23 MARS 2010

(ndeg 5413 pages)

Numeacutero dinscription au reacutepertoire geacuteneacuteral 200909599

Deacutecision deacutefeacutereacutee agrave la Cour ndeg 09-D-14 rendue le 25 mars 2009 par lAUTORITEacute DE LA CONCURRENCE

DEMANDEUR AU RECOURS

- La socieacuteteacute GAZ ET EacuteLECTRICITEacute DE GRENOBLE - GEG SEM Prise en la personne de son repreacutesentant leacutegal dont le siegravege social est 8 place Robert Schumann 38000 GRENOBLE

repreacutesenteacutee par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULA Y avoueacutes associeacutes pregraves la Cour dAppel de PARIS assisteacutee de Maicirctre Nicolas LEVEQUE avocat au barreau de PARIS 31 avenue Pierre 1er de Serbie 75782 PARIS CEDEX 16

EN PREacuteSENCE DE

- Mme LE MINISTRE DE LECONOMIE DE LINDUSTRIE ET DE LEMPLOI DGCCRF Bacirct5 59 boulevard Vincent Auriol 75703 PARIS CEDEX 13

non repreacutesenteacutee

- M LE PRESIDENT DE LAUTORITE DE LA CONCURRENCE Il rue de lEchelle 75001 PARIS

repreacutesenteacute par Mme Iregravene LUC munie dun pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR

Laffaire a eacuteteacute deacutebattue le 02 feacutevrier 2010 en audience publique devant la Cour composeacutee de

- M Thierry FOSSIER Preacutesident de chambre - M Christian REMENIERAS Conseiller - M Jean-Jacques GILLAND Vice-Preacutesident placeacute

qui en ont deacutelibeacutereacute 1

GREFFIER lors des deacutebats M Benoicirct TRUET-CALLU

MINISTEgraveRE PUBLIC

Laffaire a eacuteteacute communiqueacutee au ministegravere public repreacutesenteacute lors des deacutebats par M Franccedilois V AISSETTE Substitut Geacuteneacuteral qui a fait connaicirctre son avis

ARREcircT

- contradictoire

- prononceacute par mise agrave disposition de larrecirct au greffe de la Cour les parties en ayant eacuteteacute preacutealablement aviseacutees dans les conditions preacutevues au deuxiegraveme alineacutea de larticle 450 du code de proceacutedure civile

- signeacute par M Thierry FOSSIER preacutesident et par M Benoicirct TRUET-CALLU greffier

CIRCONSTANCES FAITS ET PROCEDURE

Le secteur en cause

A lorigine du litige se trouve louverture agrave la concurrence du marcheacute de la fourniture deacutelectriciteacute par la loi nO 2000-108 du 10 feacutevrier 2000 Celle-ci a permis agrave compter du 1 er juillet 2004 agrave tous les professionnels dacheter leur eacutelectriciteacute aupregraves du ou des fournisseurs de leur choix agrave un prix deacutetermineacute par le marcheacute et non agrave un tarif reacuteglementeacute Ces professionnels sont des clients dits eacuteligibles Lors des faits en 2005 lexercice dune telle eacuteligibiliteacute par un professionnel eacutetait irreacuteversible puisque la faculteacute de retour aux tarifs reacuteglementeacutes a eacuteteacute mise en place par une loi du 7 deacutecembre 2006

Louverture du secteur de leacutelectriciteacute agrave la concurrence na cependant eacuteteacute que partielle dans la mesure ougrave seules les activiteacutes de production et de fourniture deacutelectriciteacute y sont soumises le transport et la distribution deacutelectriciteacute demeurant des monopoles de lopeacuterateur historique et des laquodistributeurs non nationaliseacutesraquo (DNN)lt

Tous les opeacuterateurs alternatifs aux fournisseurs historiques doivent preacutesenter des garanties suffisantes sous peine de se voir interdire lexercice de lactiviteacute par le ministre chargeacute de leacutenergie

Les entreprises en preacutesence Gaz Electriciteacute de Grenoble et Poweo

La gestion du reacuteseau de distribution deacutelectriciteacute est assureacutee agrave Grenoble par une entreprise locale de distribution (ELD) Gaz Electriciteacute de Grenoble (la SEM GEG) socieacuteteacute deacuteconomie mixe locale deacutetenue agrave 5001 plOO par la ville et agrave 42 plOO par le groupe Suez en position de monopole sur sa zone de desserte Le chiffre daffaires consolideacute de la SEM GEG sest eacuteleveacute agrave 126645 millions deuros en 2007 Le montant des ventes deacutelectriciteacute effectueacutees par la SEM GEG repreacutesentait environ 64 millions deuros en 2007 soit 02 p1 00 de parts du marcheacute national

ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RG ndeg 200909599 - 2egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

POWEO est une socieacuteteacute anonyme qui deacuteveloppe des activiteacutes dans le secteur de leacutenergie En tant quopeacuterateur alternatif et afin de desservir ses clients la socieacuteteacute Poweo a conclu le 5 janvier 2005 un contrat daccegraves au reacuteseau public de transport de leacutelectriciteacute dEDF ainsi quun contrat avec les gestionnaires des reacuteseaux de distribution approvisionnant ses clients dont la SEM GEG pour la zone grenobloise

La saisine de la CRE et du Conseil de la concurrence

Par application de larticle 39 de la loi du 10 feacutevrier 2000 preacuteciteacutee la Commission de reacutegulation de leacutenergie a le 8 juillet 2005 porteacute agrave la connaissance du Conseil de la concurrence un communiqueacute de presse paru dans le Dauphineacute Libeacutereacute agrave deux reprises les 13 et 18 avril 2005 Ce communiqueacute eacutetait ainsi reacutedigeacute laquo GEG appelle ses clients professionnels agrave la vigilance La Direction de Gaz Electriciteacute de Grenoble met en garde tous ses clients professionnels contre des deacutemarchages commerciaux abusifs et mensongers Ces derniers jours agrave Grenoble certains commerccedilants sont deacutemarcheacutes de maniegravere abusive par un nouvel opeacuterateur reacutecemment arriveacute sur le marcheacute de leacutelectriciteacute deacutesormais ouvert agrave la concurrence pour tous les professionnels Cet opeacuterateur leur annonce agrave tort quil a conclu un partenariat avec GEG voire mecircme quil a racheteacute GEG et que ces derniers doivent par conseacutequent signer un nouveau contrat pour changer defournisseur deacutelectriciteacute Ces propos sont eacutevidemment mensongers GEG tient agrave rappeler agrave tous ses clients quelle na conclu daccord avec aucun fournisseur deacutelectriciteacute agrave Grenoble et condamne ces agissements malintentionneacutes et contraires agrave toute eacutethique commerciale Louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute aux professionnels a vu apparaicirctre de nouveaux opeacuterateurs pour qui le meacutetier et lexpeacuterience de distributeur et defournisseur deacutenergie sont reacutecents Certains dentre eux ont une conception de la qualiteacute de services tregraves relative et nheacutesitent pas agravefaire usage de meacutethodes peu scrupuleuses pour parvenir agrave leurs fins souvent strictement financiegraveres GEG est le fournisseur deacutenergie historique agrave Grenoble depuis plus de cent ans et a toujours deacutefendu les valeurs du service public local Lentreprise a deacuteveloppeacute un savoirjaire et des services de proximiteacute compeacutetitifs Elle place la satisfaction de ses clients au cœur de ses preacuteoccupations GEG invite tous les clients concerneacutes par ces deacutemarchages abusift agrave prendre contact avec leurs conseillers commerciauxraquo

La CRE a proceacutedeacute agrave la saisine du Conseil de la concurrence le 8 juillet 2005

La publication de ce communiqueacute de presse fait suite aux deacutemarchages entrepris par la socieacuteteacute Poweo agrave compter du mois de feacutevrier 2005 Ces deacutemarchages meneacutes par des laquo revendeurs indirectsraquo avaient pour objet de convaincre les professionnels dexercer leur eacuteligibiliteacute en souscrivant aux offres de Poweo Certains commerciaux seraient alleacutes jusquagrave mener une campagne de deacutesinformation aupregraves des professionnels afin dobtenir leur signature

En conseacutequence la SEM GEG se serait convaincue de la neacutecessiteacute de riposter contre les pratiques quelle jugeait peu loyales de son concurrent Poweo en publiant un communiqueacute dans la presse locale dont le contenu est reproduit en note

Les proceacutedures intenteacutees par la SEM GEG

Quelques jours apregraves les publications du communiqueacute de presse le 22 avril 2005 la SEM GEG a assigneacute en reacutefeacutereacute Poweo pour concurrence deacuteloyale devant le Tribunal de commerce de Grenoble Poweo a alors formeacute une demande reconventionnelle afin dobtenir la reconnaissance des actes de concurrence deacuteloyale auxquels se serait livreacutee la SEM GEG et de voir ordonner leur cessation sous astreinte La socieacuteteacute Poweo a obtenu gain de cause aussi bien devant le preacutesident du Tribunal de Commerce de Grenoble que devant la Cour dappel de Grenoble au motif que la S EM G E G avait laquocommis des actes de concurrence deacuteloyale notamment par voie de presse en proceacutedant au deacutenigrement de la personne de son concurrent la socieacuteteacute Poweo en discreacuteditant la reacuteputation lhonnecircteteacute lhonorabiliteacute limage les meacutethodes de travail et la qualiteacute des services de celle-ci raquo La socieacuteteacute POWEO a obtenu une provision de 7500 euros

ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 3egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

La SEM GEG et Poweo ont conclu un accord afin de reacutegler les suites de cette proceacutedure judiciaire accord dont le contenu demeurait au j our de la deacutecision de lAutoriteacute secret

Le grief notifieacute

Le Conseil de la concurrence a estimeacute que ce communiqueacute de presse pouvait viser agrave critiquer de faccedilon systeacutematique Poweo ainsi quagrave valoriser la SEM GEG au deacutetriment de ses concurrents tout en entretenant une confusion entre les activiteacutes de fournisseur de la SEM GEG - soumises agrave concurrence - et celles de distribution pour lesquelles la SEM GEG conserve de droit un monopole

Le 14 mai 2008 sur le fondement de larticle L 420-2 du Code de commerce le Rapporteur du Conseil a fait grief agrave la SEM GEG davoir laquo abuseacute de sa position dominante sur le marcheacute de leacutelectriciteacute agrave lusage des professionnels sur la zone de desserte de Grenoble en se livrant courant 2005 et notamment par voie de presse agrave des pratiques de deacutenigrement agrave lencontre de son concurrent Poweo et en associant agrave ces pratiques la diffusion dune communication institutionnelle entretenant la confusion entre ses activiteacutes de distributeur exerceacutees dans le cadre du service public et celles de fournisseur soumises agrave la concurrence raquo Ces pratiques auraient eu pour objet ou pour effet de limiter laccegraves de Poweo au marcheacute de leacutelectriciteacute agrave lusage des clients professionnels

La sanction

Sur le rapport de son Rapporteur geacuteneacuteral en date du 3 novembre 2008 lAutoriteacute de la concurrence a infligeacute une sanction peacutecuniaire de 320000 euros agrave la SEM GEG pour avoir enfreint les dispositions de larticle L 420-2 du Code de commerce

LACOUR

Vu la Deacutecision nO 09-D-14 de lAutoriteacute de la concurrence en date du 25 mars 2009 (ltlt la Deacutecision raquo) relative agrave des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la fourniture deacutelectriciteacute

Vu le meacutemoire eacutetabli et deacuteposeacute au greffe le 2 juin 2009 par la SEM Gaz et Electriciteacute de Grenoble au soutien de sa deacuteclaration de recours demandant agrave la cour de

Dire et juger que le deacutelai de la proceacutedure devant lAutoriteacute na pas eacuteteacute raisonnable au sens de larticle 6 de la convention ESDH En conseacutequence annuler la Deacutecision et ordonner le remboursement immeacutediat par le Treacutesor public de la somme de 320000 euros payeacutee par la SEM GEG en exeacutecution de la Deacutecision attaqueacutee assorti des inteacuterecircts au taux leacutegal agrave compter de larrecirct et avec application de larticle 1154 du Code civil Sur le fond constater que lAutoriteacute a commis une erreur de droit en limitant le marcheacute pertinent agrave celui de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels eacuteligibles dans la reacutegion de Grenoble constater au contraire que le marcheacute pertinent doit ecirctre deacutefini comme celui de la fourniture aux clients professionnels eacuteligibles ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute qui revecirct une dimension nationale constater degraves lors que la SEM GEG ne peut pas avoir deacutetenu une quelconque position dominante sur un tel marcheacute agrave leacutepoque des faits et na pu agrave plus forte raison abuser dune telle position En conseacutequence annuler la Deacutecision et ordonner le remboursement immeacutediat par le Treacutesor public de la somme de 320000 euros payeacutee par la SEM GEG en exeacutecution de la Deacutecision attaqueacutee assorti des inteacuterecircts au taux leacutegal agrave compter de larrecirct et avec application de larticle 1154 du Code civil A titre subsidiaire constater que le communiqueacute de presse publieacute dans laquo Le Dauphineacute Libeacutereacuteraquo agrave linitiative de la SEM GEG la eacuteteacute agrave deux reprises seulement entre le 13 et le 18 avril 2005 constater quil nest pas reprocheacute agrave la

Il ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 4egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

SEM GEG la diffusion dautres messages preacutetendument laquo deacutenigrants constater que ledit communiqueacute de presse a revecirctu une porteacutee tregraves limiteacutee et quil visait agrave reacutepondre de maniegravere circonstancieacutee aux pratiques commerciales commises en avril 2005 par des repreacutesentants commerciaux agissant pour le compte de Poweo qui avaient eacuteteacute jugeacutees critiquables par la SEM GEG sur le terrain de la concurrence deacuteloyale constater que la pratique reprocheacutee agrave la SEM GEG na eu aucun objet visant agrave laquo eacutevincerraquo Poweo du marcheacute en cause et que leffet anticoncurrentiel du communiqueacute de presse litigieux na pas eacuteteacute deacutemontreacute par lAutoriteacute constater quil nexiste aucun lien neacutecessaire entre la pratique limiteacutee reprocheacutee agrave la SEM GEG et la situation concurrentielle agrave Grenoble deacutecrite par lAutoriteacute constater que la pratique reprocheacutee agrave la SEM GEG ne pouvait ecirctre la cause de la preacutetendue eacuteviction de Poweo agrave Grenoble qui najamais eacuteteacute deacutemontreacutee par lAutoriteacute constater que la pratique reprocheacutee agrave la SEM GEG na pas davantage eu deffet de forclusion sur le marcheacute en cause en conseacutequence annuler la Deacutecision et ordonner le remboursement immeacutediat par le Treacutesor public de la somme de 320000 euros payeacutee par la SEM GEG en exeacutecution de la Deacutecision attaqueacutee assorti des inteacuterecircts au taux leacutegal agrave compter de larrecirct et avec application de larticle 1154 du Code civil A titre tregraves subsidiaire constater le caractegravere tregraves disproportionneacute des sanctions infligeacutees agrave la SEM GEG degraves lors que lAdlC na pas deacutemontreacute lexistence dun dommage agrave leacuteconomie ni mecircme la graviteacute des pratiques alleacutegueacutees reacuteformer la Deacutecision en conseacutequence Condamner la Ministre chargeacutee de leacuteconomie agrave payer la somme de 50000 euros pour frais irreacutepeacutetibles de proceacutedure et les entiers deacutepens

Vu les observations de lAutoriteacute de la concurrence en date du 5 novembre 2009

Vu les observations de Madame la Ministre chargeacutee de leacuteconomie en date du 20 novembre 2009

Vu le meacutemoire en reacuteplique de la SEM Gaz et Electriciteacute de Grenoble en date du 18 deacutecembre 2009 tendant aux mecircmes fins que le meacutemoire du 2 juin 2009

Vu les conclusions de Monsieur le Procureur Geacuteneacuteral en date du 26 janvier 2010

Ouiuml le conseil de la SEM Gaz et Electriciteacute de Grenoble et les repreacutesentants de lAutoriteacute de la concurrence et de Monsieur le Procureur Geacuteneacuteral agrave laudience du 2 feacutevrier 2010 la socieacuteteacute requeacuterante ayant pu reacutepliquer et eu la parole en dernier

SUR QUOI

A - Sur le respect de larticle 6 de la Convention ESDH et la dureacutee de la proceacutedure

Consideacuterant que la SEM GEG demande agrave la cour de dire et juger que le deacutelai de la proceacutedure devant lAutoriteacute na pas eacuteteacute raisonnable au sens de larticle 6 de la convention ESDH que la SEM GEG qualifie la dureacutee de la proceacutedure dexcessive au motifque linstruction a dureacute pregraves de quatre anneacutees (apregraves deux anneacutees eacutecouleacutees pour que le Rapporteur geacuteneacuteral deacutesigne deux Rapporteurs successifs) alors que laffaire eacutetait deacutenueacutee de toute complexiteacute autre que de pur droit et que les actes dinstruction nont pas eacuteteacute nombreux

Que ce deacutelai a porteacute atteinte aux droits de la SEM GEG car il a inducircment diffeacutereacute lexercice des droits de la deacutefense le deacutebat contradictoire ne pouvant exister quagrave compter de la notification de griefs et compte tenu du caractegravere essentiellement ponctuel et circonstancieacute de la pratique qui lui est reprocheacutee que concregravetement des collaborateurs ont quitteacute la SEM GEG pendant la longue peacuteriode denquecircte et ceci a rendu impossible la mise en place de la deacutefense de cette SEM devant l AdlC

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG ndeg 200909599 - 5egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Mais consideacuterant que le respect des droits de la deacutefense revecirctant une importance capitale dans les proceacutedures telles que celle en lespegravece il importe deacuteviter que ces droits puissent ecirctre irreacutemeacutediablement compromis notamment en raison dune dureacutee excessive de la phase denquecircte et que cette dureacutee soit susceptible de faire obstacle agrave leacutetablissement de preuves visant agrave reacutefuter lexistence de comportements de nature agrave engager la responsabiliteacute des entreprises concerneacutees que pour cette raison lexamen de leacuteventuelle entrave agrave lexercice des droits de la deacutefense ne doit pas ecirctre limiteacute agrave la phase mecircme dans laquelle ces droits produisent leur plein effet agrave savoir la seconde phase de la proceacutedure administrative que lappreacuteciation de la source de leacuteventuel affaiblissement de lefficaciteacute des droits de la deacutefense doit seacutetendre agrave lensemble de cette proceacutedure en se reacutefeacuterant agrave la dureacutee totale de celle-ci enquecircte comprise que pour autant la dureacutee excessive de la proceacutedure ne peut ecirctre deacutetermineacutee en soi de maniegravere abstraite

Quen lespegravece une dureacutee de trois ans et demi ne peut ecirctre consideacutereacutee comme excessive au sens de la Convention europeacuteenne de sauvegarde des droits de 1 homme si la socieacuteteacute requeacuterante ne deacutemontre pas en quoi in concreto elle aurait eacuteteacute priveacutee du droit de se deacutefendre

Quagrave ce sujet il peut ecirctre constateacute quapregraves une saisine intervenue le 12juillet 2005 agrave linitiative de la Commission de reacutegulation de leacutenergie le preacutesident de la SEM GEG a eacuteteacute entendu par le rapporteur le 10 juillet 2007 en lui donnant connaissance de la lettre de saisine que la SEM GEG a disposeacute eacutegalement des deacutelais preacutevus par larticle L 463-2 du code de commerce pour faire valoir ses observations quil ne reacutesulte daucune deacutemonstration et mecircme daucune assertion claire de la requeacuterante quelle nait pas pu preacuteparer de maniegravere satisfaisante sa deacutefense devant lAutoriteacute puis devant la cour quelle invoque mais ne prouve pas une impossibiliteacute de recueillir des teacutemoignages agrave deacutecharge notamment du fait des changements susceptibles dintervenir dans la composition des organes dirigeants des entreprises concerneacutees et des mouvements affectant les autres personnels de celles-ci quelle na pas agrave deacuteplorer non plus la perte des documents commerciaux ou internes des notes ou courriers-papier les courriels et comptes-rendus de conversations teacuteleacutephoniques dont la destruction aurait eacuteteacute deacutecideacutee apregraves un temps bref en quoi la SEM GEG napporte aucun eacuteleacutement seacuterieux preacutecis et concret dune violation de ses droits de la deacutefense

Que le moyen sera rejeteacute

B - Sur la deacutefinition du marcheacute pertinent

Consideacuterant que la SEM GEG relegraveve que le marcheacute de produits retenu par lAutoriteacute est celui de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels eacuteligibles que pourtant le marcheacute des clients professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute cest-agrave-dire le marcheacute ouvert agrave la concurrence le la juillet 2004 doit seul ecirctre pris en consideacuteration la clientegravele eacutetant cloisonneacutee selon le type doffre (tarif reacuteglementeacute ou prix du marcheacute) quelle a choisi et une faible part ayant choisi le marcheacute en raison dun effet de ciseau que la SEM GEG sappuie agrave ce titre sur la deacutecision n0 07-MC-Ol dans laquelle le Conseil de la concurrence a retenu que lirreacuteversibiliteacute du passage vers les offres de marcheacute eacutetait lun des principaux eacuteleacutements permettant de deacutefinir un marcheacute distinct de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute

Que sagissant du marcheacute geacuteographique si lAutoriteacute la deacutefini comme local la SEM GEG entend deacutemontrer que celui-ci est national car la reacuteglementation libeacuteralisant le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute est national et les conditions - et les opeacuterateurs (dont Poweo) - de commercialisation de leacutelectriciteacute sont les mecircmes sur lensemble du territoire

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG na 200909599 - 6egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Mais consideacuterant sur le marcheacute de produits que le marcheacute se deacutefinit comme le lieu sur lequel se rencontrent loffre et la demande pour un produit ou un service speacutecifique que sur un marcheacute donneacute les uniteacutes offertes sont parfaitement substituables pour les consommateurs qui peuvent ainsi arbitrer entre les offreurs lorsquil y en a plusieurs ce qui implique que chaque offreur est soumis agrave la concurrence par les prix des autres

Que le 1 er juillet 2004 les clients petits professionnels se sont vu reconnaicirctre le droit dacheter de leacutelectriciteacute aupregraves du fournisseur de leur choix tout en conservant la possibiliteacute de continuer agrave sapprovisionner aupregraves de leur fournisseur historique et de beacuteneacuteficier de la part de celui-ci des tarifs reacuteglementeacutes fixeacutes par lEtat que de feacutevrier agrave avril 2005 des clients de la SEM GEG ont quitteacute le fournisseur historique au profit du fournisseur alternatif ce qui deacutemontre quil existait agrave ce moment de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute agrave la concurrence une substituabiliteacute entre les services offerts par la SEM GEG et Poweo et quen conseacutequence ces deux entreprises intervenaient sur le mecircme marcheacute

Consideacuterant que du tout il seacutevince comme la affirmeacute la Deacutecision (parag 40 agrave 51) que le marcheacute pertinent est bien le marcheacute de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels et non le marcheacute des seuls professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute

Consideacuterant en outre sur le marcheacute geacuteographique que le marcheacute geacuteographique comprend le territoire sur lequel les entreprises concerneacutees sont engageacutees dans loffre des biens et services en cause sur lequel les conditions de concurrence sont suffisamment homogegravenes et qui peut ecirctre distingueacute de zones geacuteographiques voisines parce que en particulier les conditions de concurrence y diffegraverent de maniegravere appreacuteciable

Quen lespegravece les clients professionnels situeacutes dans la zone de desserte de la SEM GEG ne peuvent acheter de leacutelectriciteacute quaupregraves de la SEM GEG fournisseur exclusif deacutelectriciteacute au tarif reacuteglementeacute sur sa zone ou aupregraves de fournisseurs alternatifs deacutelectriciteacute au prix de marcheacute qui ont conclu un contrat daccegraves au reacuteseau de distribution geacutereacute en monopole par la SEM GEG pour acheminer leur eacutelectriciteacute jusquau client final quil en reacutesulte quils ne peuvent se procurer de leacutelectriciteacute quagrave linteacuterieur de la zone geacuteographique couverte par le distributeur non nationaliseacute

Consideacuterant quen conseacutequence le marcheacute pertinent est la zone desservie par le reacuteseau de distribution de leacutelectriciteacute de Grenoble que le moyen contraire de la SEM GEG sera rejeteacute

C - Sur lexistence dune position dominante

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie avoir occupeacute sur le marcheacute tel quelle la consideacutereacute une position dominante au moment des faits puisquelle gegravere et fournit 059 pl 00 en volume et 067 pl 00 des sites que sa position dopeacuterateur preacutetenducircment historique a de toute faccedilon eacuteteacute aneacuteantie par louverture du marcheacute agrave la concurrence eacutevolution sur laquelle la Deacutecision est demeureacutee taisante

Mais consideacuterant que comme il a eacuteteacute eacutenonceacute preacuteceacutedemment le marcheacute pertinent nest pas celui que preacutetend la SEM GEG en sorte que son raisonnement devant la cour est neacutecessairement vicieacute

Consideacuterant par ailleurs que le marcheacute de la fourniture deacutelectriciteacute nayant eacuteteacute ouvert agrave la concurrence que le 1er juillet 2004 et la SEM GEG deacutetenant jusquagrave cette date un monopole sur ce marcheacute la reacutepartition des parts de marcheacute navait pas sensiblement eacutevolueacute au moment des faits en avril 2005 puisque seule la socieacuteteacute POWEO avait pris des initiatives (cf Deacutecision parag 55)

ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 Cour dAppel de Paris

RG na 200909599 - 7egraveme page

Que lors dune audition dun responsable de la SEM GEGle 10 juillet 2007 il a eacuteteacute eacutetabli que la part de marcheacute de la SEM GEG seacutelevait agrave 80 quil neacutetait donc pas anormal pour lAdlC de consideacuterer que cette part ait eacuteteacute plus importante au moment des faits deux ans plus tocirct agrave un moment ougrave louverture du marcheacute eacutetait balbutiante

Consideacuterant quen conseacutequence lexistence dune position dominante de la SEM GEG sur le marcheacute local de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles est aveacutereacutee et que le moyen de la requeacuterante de ce chef sera rejeteacute

Consideacuterant pour reacutepondre complegravetement aux arguties de la requeacuterante et relativement agrave la perte juridique de position monopolistique de la SEM GEG que quand bien mecircme louverture agrave la concurrence dun monopole entraicircne neacutecessairement une perte de parts de marcheacute pour lopeacuterateur historique une analyse concregravete peut permettre de constater toutefois que lopeacuterateur historique conserve une position de monopole de fait ou de quasi-monopole du fait de sa notorieacuteteacute par exemple quen loccurrence lAutoriteacute eacutetait fondeacutee agrave relever que la position dominante de la SEM GEG ne pouvait quecirctre renforceacutee par sa notorieacuteteacute dopeacuterateur historique aux yeux des clients eacuteligibles et par son monopole sur les marcheacutes connexes de la distribution deacutelectriciteacute et de fourniture deacutelectriciteacute aux clients reacutesidentiels et sur lactiviteacute gaziegravere quen teacutemoigne le fait que degraves 2006 elle a pu restaurer sa position de monopoleur comme il sera dit plus loin

D - Sur la pratique de deacutenigrement constitutive de labus de position dominante

Consideacuterant que la SEM GEG affirme que les communiqueacutes de presse litigieux dailleurs tregraves peu nombreux nont eu aucun objet anticoncurrentiel ne relegraveveraient au pire que de laction en reacuteparation pour concurrence deacuteloyale mais nont mecircme pas eu de caractegravere de deacutenigrement que la cour en jugerait-elle autrement agrave linstar de lAdIC tout deacutenigrement dont une entreprise en position dominante serait lauteur nest pas neacutecessairement constitutif dun abus de position dominante quil est toujours neacutecessaire deacutetablir un lien entre la domination de lentreprise et la pratique de deacutenigrement que sous cet angle la SEM GEG avance que le communiqueacute de presse litigieux ne consistait quagrave deacutementir les informations fausses ou deacuteloyales diffuseacutees par certains agents commerciaux mandateacutes par Poweo apregraves leacutechec dune deacutemarche amiable en forme de mise en demeure cinq j ours avant le premier des deux communiqueacutes de presse que le discreacutedit ne pouvait pas ecirctre qualifieacute de systeacutematique puisque la reacuteaction de la SEM GEG eacutetait ponctuelle et circonstancieacutee Poweo ne contestant pas que la pratique a cesseacute degraves le deacutebut de la proceacutedure judiciaire dindemnisation le 22 avril 2005 quenfin la SEM GEG conteste la confusion qui lui est reprocheacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees dans le secteur ouvert agrave la concurrence en sorte que le lien de causaliteacute entre la position dite dominante et le deacutenigrement nexiste pas et ne peut deacutegeacuteneacuterer en abus

Mais consideacuterant en premier lieu que lAutoriteacute de la concurrence a veilleacute agrave souligner que labus de position dominante ne se confond pas avec une pratique de concurrence deacuteloyale quen effet alors que laction en concurrence deacuteloyale protegravege les concurrents la sanction de labus de position dominante vise agrave proteacuteger lordre public eacuteconomique en sorte dailleurs que labsence de POWEO aux deacutebats devant la cour ne preacutesente strictement aucun inconveacutenient quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement aux assertions de la requeacuterante il faut rappeler quen matiegravere dabus de position dominante les comportements fautifs de lentreprise au regard des dispositions geacuteneacuterales de larticle 1382 du code civil constituent des abus de position dominante

Consideacuterant en deuxiegraveme lieu que le communiqueacute de presse litigieux contenait des mentions de deacutenigrement agrave leacutegard de Poweo nouvel entrant sur le marcheacute que ce communiqueacute faisait eacutetat de laquoconception de la qualiteacute de services tregraves relative raquo de l ( usage de meacutethodes peu scrupuleusesraquo et de la poursuite de laquo fins strictement financiegraveresraquo que certaines mentions eacutetaient en outre de nature agrave induire les clients eacuteligibles en erreur dans la mesure ougrave il eacutetait indiqueacute que laquocet opeacuterateur annonce agrave tort quil a conclu un partenariat

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avec la SEM GEG raquo alors que Poweo avait effectivement conclu un contrat daccegraves au reacuteseau de distribution le 5 janvier 2005

Consideacuterant en troisiegraveme lieu sur le lien entre position dominante et deacutenigrement que plusieurs eacuteleacutements agrave juste titre releveacutes par la Deacutecision leacutetablissent

Que le communiqueacute de presse a constitueacute un argumentaire des agents commerciaux de la SEM GEG pour inciter des clients qui avaient souscrit un contrat avec Poweo agrave le reacutesilier et agrave renouer avec le seul autre opeacuterateur la SEM GEG que le communiqueacute litigieux a ainsi eacuteteacute non pas un acte isoleacute mais le point de deacutepart dune contre-offensive fondeacutee sur un deacutenigrement systeacutematique et destineacutee agrave affaiblir le concurrent et qui neacutetait concregravetement possible que pour un opeacuterateur en position dominante

Que ce faisant la SEM GEG a profiteacute du caractegravere tregraves reacutecent de louverture du marcheacute agrave la concurrence (la juillet 2004 soit agrave peine neufmois auparavant) et a pu user de la notorieacuteteacute et de limage encore preacutesentes aux esprits lieacutees agrave lactiviteacute de monopole geacuterant un service public

Que cette analyse est corroboreacutee par les chiffres reacuteunis en annexe au procegraves-verbal daudition du responsable de la SEM GEG devant le Rapporteur de lAutoriteacute qui fait apparaicirctre en tenant compte du temps-retard des souscriptions et des reacutesiliations que le nombre de contrats passeacutes par des clients avec Poweo a augmenteacute tregraves fortement en mars et avril 2005 mais na cesseacute de deacutecroicirctre ensuite comme il sera redit par la cour agrave propos des effets des pratiques en sorte que la SEM GEG a retrouveacute finalement sa position historique

Consideacuterant en quatriegraveme lieu que le deacutenigrement eacutetait dautant plus rechercheacute que les fOlmulations du communiqueacute de presse semblaient preacutesenter Poweo cornnle incapable dassumer la fonction de distributeur alors que cette socieacuteteacute na jamais preacutetendu agrave cette fonction et ne laurait leacutegalement pas pu que de mecircme et encore le communiqueacute nie tout partenariat entre la SEM GEG et Poweo alors quun contrat les liait depuis janvier 2005 comme il a eacuteteacute eacutenonceacute preacuteceacutedemment

Consideacuterant que du tout il reacutesulte que les communiqueacutes litigieux ont constitueacute en eux-mecircmes et par lusage ulteacuterieur qui en a eacuteteacute fait un deacutenigrement adosseacute agrave la position dominante de la SEM GEG et constitutif par conseacutequent dun abus de cette position

E - Sur les effets des pratiques

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie la pertinence de lanalyse juridique de lAutoriteacute selon laquelle les pratiques ont eu agrave la fois pour objet et pour effet dentraver le deacuteveloppement dun concurrent et de le deacutecider agrave mettre un terme agrave son action commerciale agrave Grenoble

Quen fait selon la socieacuteteacute GEG lAutoriteacute ne peut pas se contenter de mentionner le nombre de contrats signeacutes par Poweo resteacute stable (autour de 190)jusquenjanvier 2006 quagrave supposer que la progression se soit affaiblie agrave compter des publications du communiqueacute de presse dautres facteurs peuvent expliquer ce fait preacutetendu notamment (i) le communiqueacute de presse na eu quune porteacutee limiteacutee (caractegravere limiteacute dans le temps et caractegravere geacuteneacuteral contrairement au deacutemarchage cibleacute de POWEO) (ii) POWEO a modifieacute sa strateacutegie commerciale (arrecirct des deacutemarchages et prospections) (iii) les prix de gros de leacutelectriciteacute ont fortement augmenteacute et ont deacutepasseacute les tarifs reacuteglementeacutes rendant peu inteacuteressante la conclusion dun contrat avec un opeacuterateur alternatif ( ciseau tarifaire) (iv) POWEO a manifesteacute sa volonteacute de se deacutesengager de la fourniture (marcheacute aval) pour se concentrer sur la production deacutelectriciteacute (marcheacute amont)

1 ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RG na 200909599 - 9egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Quen outre la SEM GEG se fonde surle nombre de points de service alimenteacutes par Poweo cest~agrave-dire les sites de livraison aux clients eacuteligibles quelle estime ecirctre lindicateur le plus pertinent pour mesurer le poids respectif des diffeacuterents acteurs que ce nombre est passeacute trois mois apregraves la publication du communiqueacute de presse de 15 agrave 190 (tableau GEG parag222 p41) que par ailleurs la SEM GEG affirme que la pratique na pas pu avoir deffet deacuteviction car le message commercial na eacuteteacute diffuseacute quagrave deux reprises que le nombre de reacutesiliations eacutetabli agrave 27 sur 190 contrats signeacutes est faible et la preuve na pas eacuteteacute apporteacutee que les agents commerciaux de la SEM GEG auraient relayeacute sur le terrain les eacuteleacutements deacutenigrants du communiqueacute de presse que la SEM GEG en conclut quil nexiste donc aucun lien neacutecessaire entre la publication du communiqueacute de presse et la preacutetendue sortie du marcheacute de POWEO

Que sur leffet de forclusion la SEM GEG avance quil existe dautres fournisseurs alternatifs sur le marcheacute de Grenoble quainsi GDF est le premier fournisseur agrave Grenoble en offre de marcheacute

Quen somme comme en teacutemoigne la pratique deacutecisionnelle de lAutoriteacute il nest plus permis darticuler des preacutesomptions sur les effets des pratiques et en lespegravece aucune deacutemonstration nest faite par la Deacutecision

Mais consideacuterant quen droit lAutoriteacute avait bien pour mission de rechercher leffet anticoncurrentiel des pratiques de la SEM GEG au sens de larticle L 420-2 Ccom

Que la recherche de leffet anticoncurrentiel de la pratique poursuivie est preacutesenteacutee par la SEM GEG tantocirct comme le but poursuivi concregravetement par la SEM GEG auquel cas lanalyse se confond avec celle de labus meneacutee preacuteceacutedemment par la cour tantocirct comme le ressort essentiel du comportement (pratique anticoncurrentielle per se) auquel cas la conjonction OU queacutenonce la loi indique que leffet anticoncurrentiel suffit agrave consacrer le grief poursuivi

Consideacuterant quen fait lAutoriteacute a pu relever la concomitance entre la publication agrave deux reprises du communiqueacute de presse les 13 et 18 avril 2005 et la baisse du nombre de contrats signeacutes par Poweo quapregraves correction tenant au deacutecalage entre la date de souscription des contrats et celle de prise deffet des changements de fournisseur le nombre de contrats signeacutes a eacutevolueacute de la maniegravere suivante Ont eacuteteacute signeacutes par Poweo en feacutevrier 2005 un contrat en mars 14 en avril 107 puis en mai 68 en juin 0 et en juillet et au delagrave aucun contrat que du 17 avril au 17 mai 2005 la socieacuteteacute Poweo a reccedilu 36 lettres de reacutesiliation dont 27 eacutetaient comme la SEM GEG nen disconvient pas identiques en la forme et une envoyeacutee des locaux de la SEM GEG elle-mecircme quenfin la socieacuteteacute Poweo na conclu aucun nouveau contrat entre juin 2005 et juin 2008 quen somme elle na pu conserver une bonne part des contrats dorigine que par le jeu de lirreacuteversibiliteacute leacutegale deacutecrite preacuteceacutedemment

Consideacuterant que degraves lors lAutoriteacute a pu agrave bon droit relever les effets anticoncurrentiels des pratiques de la SEM GEG contrairement agrave ce que celle-ci soutient

F - Sur leacutevaluation de la sanction

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie que les pratiques incrimineacutees aient preacutesenteacute un degreacute significatif de graviteacute

Quelle estime aussi que les pratiques nont pas occasionneacute un quelconque dommage agrave leacuteconomie quelle indique plus en deacutetail que Gaz de France a reacuteussi agrave simplanter pendant la peacuteriode incrimineacutee et agrave devenir le premier fournisseur en offre de

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG ndeg 200909599 - 10egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

marcheacute agrave Grenoble que le surplus du consommateur na pas eacuteteacute significativement affecteacute par les pratiques litigieuses comme leacutenonce la Deacutecision elle-mecircme que le ciseau tarifaire eacutetait la seule question qui se posait reacuteellement et qui a conduit agrave la preacutetendue eacuteviction de Poweo

Quelle rappelle au titre de lindividualisation de la sanction quelle dispose dune faible surface financiegravere

Mais consideacuterant sur la graviteacute du comportement que celle-ci ne se confond pas avec la reacutealiteacute de labus de position dominante examineacutee preacuteceacutedemment mais doit proceacuteder dune anal yse des meacutethodes utiliseacutees par la S EM G EG pour parvenir agrave ses fins dune mesure des parts de marcheacute que deacutetient lentreprise poursuivie dun examen de la dureacutee du comportement anticoncurrentiel de leacutetendue ou la complexiteacute des processus anticoncurrentiels de laffectation directe des prix jusques et y compris les prix de deacutetail dune analyse des marcheacutes concerneacutes selon quil sagit de marcheacutes sensibles ou qui le sont moins de marcheacutes touchant directement le consommateur final ou pas de lidentification de clients personnes physiques ou petites entreprises ou de clients vulneacuterables (enfants personnes acircgeacutees malades ) ou dune clientegravele captive au sens eacuteconomique de la continuation du comportement anticoncurrentiel apregraves la saisine de lAutoriteacute ou encore du fait quil sagisse dun marcheacute public

Quen lespegravece lAutoriteacute a pu retenir tour agrave tour que la SEM GEG a opeacutereacute une confusion deacutelibeacutereacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees en concurrence (DeacutecO sect 70 suiv deacutejagrave examineacutes plus haut) que le discours deacutenigrant du communiqueacute de presse est particuliegraverement reacutepreacutehensible car il provient de lopeacuterateur historique (DeacutecO sect 91) que les pratiques nont pas eacuteteacute instantaneacutees puisquelles ont eacuteteacute preacuteceacutedeacutees de courriers (DeacutecO sect 94) et suivies de deacutemarchages aupregraves des anciens clients pour regagner leur confiance

Quil faut ajouter que les pratiques incrimineacutees ont eu pour but dentraver le deacuteveloppement dun concurrent sur le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles de Grenoble au moment crucial et symbolique de louverture agrave la concurrence

Que reacuteciproquement il ne peut ecirctre reprocheacute agrave lAutoriteacute de ne pas avoir tenu compte des facteurs habituels datteacutenuation qui eacutetaient eacutetrangers agrave lespegravece tels que lancienneteacute des faits - la saisine de lAutoriteacute ayant eacuteteacute immeacutediate - la cessation du comportement anticoncurrentiel agrave partir de la saisine de lAutoriteacute - labandon du marcheacute par Poweo ayant restaureacute la position de monopoleur de la SEM GEG - ou le pouvoir de marcheacute de Poweo - tout-agrave-fait modeste ainsi quil a eacuteteacute dit -

Que degraves lors il ne peut ecirctre fait aucun reproche agrave la Deacutecision ni en droit ni en fait dans lexamen de la graviteacute du comportement

Consideacuterant encore sur le dommage causeacute agrave leacuteconomie que lAutoriteacute a pu valablement caracteacuteriser une probabiliteacute raisonnable de dommage collectif

Que la proceacutedure a deacutemontreacute que la SEM GEG a empecirccheacute louverture du marcheacute agrave la concurrence en reacuteduisant le nombre des opeacuterateurs au point que cette entreprise a pu revenir agrave la situation qui eacutetait la sienne avant le 1 er juillet 2004 soit anteacuterieurement agrave louverture du marcheacute agrave la concurrence en restaurant sa position de monopoleur

Que cependant comme le reconnaicirct agrave juste titre la Deacutecision ce dommage a eacuteteacute limiteacute agrave la zone de desserte de Grenoble

Que lAutoriteacute a pris soin encore deacutecarter expresseacutement le facteur important dit daffectation significative du surplus du consommateur quen effet si la SEM GEG sest retrouveacutee en position de monopole de fait sur le marcheacute pertinent apregraves le retrait de Poweo elle neacutetait pas libre den profiter et de pratiquer tes prix de monopole car elle devait

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appliquer le tarif reacuteglementeacute fixeacute par la puissance publique que de plus au vu des conditions du marcheacute libre de leacutelectriciteacute linteacuterecirct de la clientegravele de masse sauf bouleversement des prix de marcheacute [eacutetait] de rester aux tarifs reacuteglementeacutes (DeacutecO sect 97 suiv) notamment en raison du ciseau tarifaire tel quil a eacuteteacute exposeacute preacuteceacutedemment

Que reacuteciproquement lAutoriteacute na tireacute aucun argument dautres facteurs significatifs du dommage agrave leacuteconomie na notamment pas exageacutereacute leacutetendue du marcheacute affecteacute par le comportement anticoncurrentiel ni les perturbations du marcheacute

Que lAutoriteacute admet eacutegalement les rapports dactiviteacute de la CRE depuis 2005 qui font eacutetat de la stagnation du rythme de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute pour les clients professionnels et ce sur lensemble du territoire national que lAutoriteacute nimpute pas labsence dopeacuterateurs alternatifs en tout cas jusquagrave larriveacutee de ODF sur le marcheacute aux pratiques de la SEM GEG

Quenfin lAutoriteacute na pas neacutegligeacute de tenir compte de ce que Poweo na pas deacuteposeacute plainte devant lAutoriteacute de la concurrence pour abus de position dominante le Rapporteur ayant meneacute son instruction sur la seule saisine de la CRE et de ce que Poweo ne sest pas non plus jointe agrave la proceacutedure par la suite quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement agrave un argument de la SEM GEO lAutoriteacute de la concurrence dans sa mission de protection des consommateurs na pas besoin de lappui ou de lassentiment des concurrents moyennant quoi la reacuteparation accordeacutee auxdits concurrents par les voies de droit commun na pas dinfluence sur la proceacutedure de reacutegulation punitive et preacuteventive fondeacutee sur lordre public eacuteconomique

Quen somme loin dexageacuterer le dommage agrave leacuteconomie occasionneacute par le comportement poursuivi et apregraves avoir reacutepondu point par point aux arguments de Poweo lAutoriteacute a fait de ce dommage une analyse tregraves pondeacutereacutee que la cour approuve

Consideacuterant enfin sagissant de lindividualisation de la sanction (sect 104 agrave 106) et que lAutoriteacute de la concurrence a preacuteciseacute que le chiffre daffaires consolideacute de la SEM OEG avait atteint en 2007 124645 millions deuros avec pour conseacutequence que le montant maximum de la sanction encourue seacutelegraveve agrave 12 500 000 euro que ces consideacuterations sont incontestables et incontesteacutees et quelles incluent neacutecessairement leacutevaluation de la capaciteacute contributive de la SEM GEG qui na pas traverseacute agrave leacutepoque des faits poursuivis ni posteacuterieurement des difficulteacutes particuliegraveres qui commanderaient une autre analyse

Quagrave titre superfeacutetatoire mais sans inexactitude il a eacuteteacute tenu compte par lAutoriteacute du fait que les ventes deacutelectriciteacute reacutealiseacutees par la SEM GEO nont cesseacute de progresser entre 2004 et 2007 pour atteindre 64 261 401 euros en 2007

Quenfin il ny a pas lieu de tenir compte de lindemnisation provisionnelle accordeacutee agrave Poweo par la juridiction commerciale pour les raisons susdites

Consideacuterant quayant ainsi proceacutedeacute sans erreur agrave lanalyse de la graviteacute de la pratique anticoncurrentielle ayant ensuite eacutevalueacute avec pondeacuteration le dommage agrave leacuteconomie et ayant preacuteciseacutement examineacute les facteurs dindividualisation de la sanction lAutoriteacute a exactement proportionneacute celle-ci agrave une hauteur dagrave peine trois pour mille du meilleur chiffre daffaires annuel de la peacuteriode consideacutereacutee que la demande de reacuteformation de la SEM GEG est manifestement infondeacutee

PAR CES MOTIFS

Rejette le recours

ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RO ndeg 200909599 - 12egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Condamne la SEM GEG aux deacutepens

LE [REFFIER

Thierry FOSSIER

Cour dAppel de Paris ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 RG nO 200909599 - 13egraveme page

GREFFIER lors des deacutebats M Benoicirct TRUET-CALLU

MINISTEgraveRE PUBLIC

Laffaire a eacuteteacute communiqueacutee au ministegravere public repreacutesenteacute lors des deacutebats par M Franccedilois V AISSETTE Substitut Geacuteneacuteral qui a fait connaicirctre son avis

ARREcircT

- contradictoire

- prononceacute par mise agrave disposition de larrecirct au greffe de la Cour les parties en ayant eacuteteacute preacutealablement aviseacutees dans les conditions preacutevues au deuxiegraveme alineacutea de larticle 450 du code de proceacutedure civile

- signeacute par M Thierry FOSSIER preacutesident et par M Benoicirct TRUET-CALLU greffier

CIRCONSTANCES FAITS ET PROCEDURE

Le secteur en cause

A lorigine du litige se trouve louverture agrave la concurrence du marcheacute de la fourniture deacutelectriciteacute par la loi nO 2000-108 du 10 feacutevrier 2000 Celle-ci a permis agrave compter du 1 er juillet 2004 agrave tous les professionnels dacheter leur eacutelectriciteacute aupregraves du ou des fournisseurs de leur choix agrave un prix deacutetermineacute par le marcheacute et non agrave un tarif reacuteglementeacute Ces professionnels sont des clients dits eacuteligibles Lors des faits en 2005 lexercice dune telle eacuteligibiliteacute par un professionnel eacutetait irreacuteversible puisque la faculteacute de retour aux tarifs reacuteglementeacutes a eacuteteacute mise en place par une loi du 7 deacutecembre 2006

Louverture du secteur de leacutelectriciteacute agrave la concurrence na cependant eacuteteacute que partielle dans la mesure ougrave seules les activiteacutes de production et de fourniture deacutelectriciteacute y sont soumises le transport et la distribution deacutelectriciteacute demeurant des monopoles de lopeacuterateur historique et des laquodistributeurs non nationaliseacutesraquo (DNN)lt

Tous les opeacuterateurs alternatifs aux fournisseurs historiques doivent preacutesenter des garanties suffisantes sous peine de se voir interdire lexercice de lactiviteacute par le ministre chargeacute de leacutenergie

Les entreprises en preacutesence Gaz Electriciteacute de Grenoble et Poweo

La gestion du reacuteseau de distribution deacutelectriciteacute est assureacutee agrave Grenoble par une entreprise locale de distribution (ELD) Gaz Electriciteacute de Grenoble (la SEM GEG) socieacuteteacute deacuteconomie mixe locale deacutetenue agrave 5001 plOO par la ville et agrave 42 plOO par le groupe Suez en position de monopole sur sa zone de desserte Le chiffre daffaires consolideacute de la SEM GEG sest eacuteleveacute agrave 126645 millions deuros en 2007 Le montant des ventes deacutelectriciteacute effectueacutees par la SEM GEG repreacutesentait environ 64 millions deuros en 2007 soit 02 p1 00 de parts du marcheacute national

ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RG ndeg 200909599 - 2egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

POWEO est une socieacuteteacute anonyme qui deacuteveloppe des activiteacutes dans le secteur de leacutenergie En tant quopeacuterateur alternatif et afin de desservir ses clients la socieacuteteacute Poweo a conclu le 5 janvier 2005 un contrat daccegraves au reacuteseau public de transport de leacutelectriciteacute dEDF ainsi quun contrat avec les gestionnaires des reacuteseaux de distribution approvisionnant ses clients dont la SEM GEG pour la zone grenobloise

La saisine de la CRE et du Conseil de la concurrence

Par application de larticle 39 de la loi du 10 feacutevrier 2000 preacuteciteacutee la Commission de reacutegulation de leacutenergie a le 8 juillet 2005 porteacute agrave la connaissance du Conseil de la concurrence un communiqueacute de presse paru dans le Dauphineacute Libeacutereacute agrave deux reprises les 13 et 18 avril 2005 Ce communiqueacute eacutetait ainsi reacutedigeacute laquo GEG appelle ses clients professionnels agrave la vigilance La Direction de Gaz Electriciteacute de Grenoble met en garde tous ses clients professionnels contre des deacutemarchages commerciaux abusifs et mensongers Ces derniers jours agrave Grenoble certains commerccedilants sont deacutemarcheacutes de maniegravere abusive par un nouvel opeacuterateur reacutecemment arriveacute sur le marcheacute de leacutelectriciteacute deacutesormais ouvert agrave la concurrence pour tous les professionnels Cet opeacuterateur leur annonce agrave tort quil a conclu un partenariat avec GEG voire mecircme quil a racheteacute GEG et que ces derniers doivent par conseacutequent signer un nouveau contrat pour changer defournisseur deacutelectriciteacute Ces propos sont eacutevidemment mensongers GEG tient agrave rappeler agrave tous ses clients quelle na conclu daccord avec aucun fournisseur deacutelectriciteacute agrave Grenoble et condamne ces agissements malintentionneacutes et contraires agrave toute eacutethique commerciale Louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute aux professionnels a vu apparaicirctre de nouveaux opeacuterateurs pour qui le meacutetier et lexpeacuterience de distributeur et defournisseur deacutenergie sont reacutecents Certains dentre eux ont une conception de la qualiteacute de services tregraves relative et nheacutesitent pas agravefaire usage de meacutethodes peu scrupuleuses pour parvenir agrave leurs fins souvent strictement financiegraveres GEG est le fournisseur deacutenergie historique agrave Grenoble depuis plus de cent ans et a toujours deacutefendu les valeurs du service public local Lentreprise a deacuteveloppeacute un savoirjaire et des services de proximiteacute compeacutetitifs Elle place la satisfaction de ses clients au cœur de ses preacuteoccupations GEG invite tous les clients concerneacutes par ces deacutemarchages abusift agrave prendre contact avec leurs conseillers commerciauxraquo

La CRE a proceacutedeacute agrave la saisine du Conseil de la concurrence le 8 juillet 2005

La publication de ce communiqueacute de presse fait suite aux deacutemarchages entrepris par la socieacuteteacute Poweo agrave compter du mois de feacutevrier 2005 Ces deacutemarchages meneacutes par des laquo revendeurs indirectsraquo avaient pour objet de convaincre les professionnels dexercer leur eacuteligibiliteacute en souscrivant aux offres de Poweo Certains commerciaux seraient alleacutes jusquagrave mener une campagne de deacutesinformation aupregraves des professionnels afin dobtenir leur signature

En conseacutequence la SEM GEG se serait convaincue de la neacutecessiteacute de riposter contre les pratiques quelle jugeait peu loyales de son concurrent Poweo en publiant un communiqueacute dans la presse locale dont le contenu est reproduit en note

Les proceacutedures intenteacutees par la SEM GEG

Quelques jours apregraves les publications du communiqueacute de presse le 22 avril 2005 la SEM GEG a assigneacute en reacutefeacutereacute Poweo pour concurrence deacuteloyale devant le Tribunal de commerce de Grenoble Poweo a alors formeacute une demande reconventionnelle afin dobtenir la reconnaissance des actes de concurrence deacuteloyale auxquels se serait livreacutee la SEM GEG et de voir ordonner leur cessation sous astreinte La socieacuteteacute Poweo a obtenu gain de cause aussi bien devant le preacutesident du Tribunal de Commerce de Grenoble que devant la Cour dappel de Grenoble au motif que la S EM G E G avait laquocommis des actes de concurrence deacuteloyale notamment par voie de presse en proceacutedant au deacutenigrement de la personne de son concurrent la socieacuteteacute Poweo en discreacuteditant la reacuteputation lhonnecircteteacute lhonorabiliteacute limage les meacutethodes de travail et la qualiteacute des services de celle-ci raquo La socieacuteteacute POWEO a obtenu une provision de 7500 euros

ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 3egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

La SEM GEG et Poweo ont conclu un accord afin de reacutegler les suites de cette proceacutedure judiciaire accord dont le contenu demeurait au j our de la deacutecision de lAutoriteacute secret

Le grief notifieacute

Le Conseil de la concurrence a estimeacute que ce communiqueacute de presse pouvait viser agrave critiquer de faccedilon systeacutematique Poweo ainsi quagrave valoriser la SEM GEG au deacutetriment de ses concurrents tout en entretenant une confusion entre les activiteacutes de fournisseur de la SEM GEG - soumises agrave concurrence - et celles de distribution pour lesquelles la SEM GEG conserve de droit un monopole

Le 14 mai 2008 sur le fondement de larticle L 420-2 du Code de commerce le Rapporteur du Conseil a fait grief agrave la SEM GEG davoir laquo abuseacute de sa position dominante sur le marcheacute de leacutelectriciteacute agrave lusage des professionnels sur la zone de desserte de Grenoble en se livrant courant 2005 et notamment par voie de presse agrave des pratiques de deacutenigrement agrave lencontre de son concurrent Poweo et en associant agrave ces pratiques la diffusion dune communication institutionnelle entretenant la confusion entre ses activiteacutes de distributeur exerceacutees dans le cadre du service public et celles de fournisseur soumises agrave la concurrence raquo Ces pratiques auraient eu pour objet ou pour effet de limiter laccegraves de Poweo au marcheacute de leacutelectriciteacute agrave lusage des clients professionnels

La sanction

Sur le rapport de son Rapporteur geacuteneacuteral en date du 3 novembre 2008 lAutoriteacute de la concurrence a infligeacute une sanction peacutecuniaire de 320000 euros agrave la SEM GEG pour avoir enfreint les dispositions de larticle L 420-2 du Code de commerce

LACOUR

Vu la Deacutecision nO 09-D-14 de lAutoriteacute de la concurrence en date du 25 mars 2009 (ltlt la Deacutecision raquo) relative agrave des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la fourniture deacutelectriciteacute

Vu le meacutemoire eacutetabli et deacuteposeacute au greffe le 2 juin 2009 par la SEM Gaz et Electriciteacute de Grenoble au soutien de sa deacuteclaration de recours demandant agrave la cour de

Dire et juger que le deacutelai de la proceacutedure devant lAutoriteacute na pas eacuteteacute raisonnable au sens de larticle 6 de la convention ESDH En conseacutequence annuler la Deacutecision et ordonner le remboursement immeacutediat par le Treacutesor public de la somme de 320000 euros payeacutee par la SEM GEG en exeacutecution de la Deacutecision attaqueacutee assorti des inteacuterecircts au taux leacutegal agrave compter de larrecirct et avec application de larticle 1154 du Code civil Sur le fond constater que lAutoriteacute a commis une erreur de droit en limitant le marcheacute pertinent agrave celui de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels eacuteligibles dans la reacutegion de Grenoble constater au contraire que le marcheacute pertinent doit ecirctre deacutefini comme celui de la fourniture aux clients professionnels eacuteligibles ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute qui revecirct une dimension nationale constater degraves lors que la SEM GEG ne peut pas avoir deacutetenu une quelconque position dominante sur un tel marcheacute agrave leacutepoque des faits et na pu agrave plus forte raison abuser dune telle position En conseacutequence annuler la Deacutecision et ordonner le remboursement immeacutediat par le Treacutesor public de la somme de 320000 euros payeacutee par la SEM GEG en exeacutecution de la Deacutecision attaqueacutee assorti des inteacuterecircts au taux leacutegal agrave compter de larrecirct et avec application de larticle 1154 du Code civil A titre subsidiaire constater que le communiqueacute de presse publieacute dans laquo Le Dauphineacute Libeacutereacuteraquo agrave linitiative de la SEM GEG la eacuteteacute agrave deux reprises seulement entre le 13 et le 18 avril 2005 constater quil nest pas reprocheacute agrave la

Il ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 4egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

SEM GEG la diffusion dautres messages preacutetendument laquo deacutenigrants constater que ledit communiqueacute de presse a revecirctu une porteacutee tregraves limiteacutee et quil visait agrave reacutepondre de maniegravere circonstancieacutee aux pratiques commerciales commises en avril 2005 par des repreacutesentants commerciaux agissant pour le compte de Poweo qui avaient eacuteteacute jugeacutees critiquables par la SEM GEG sur le terrain de la concurrence deacuteloyale constater que la pratique reprocheacutee agrave la SEM GEG na eu aucun objet visant agrave laquo eacutevincerraquo Poweo du marcheacute en cause et que leffet anticoncurrentiel du communiqueacute de presse litigieux na pas eacuteteacute deacutemontreacute par lAutoriteacute constater quil nexiste aucun lien neacutecessaire entre la pratique limiteacutee reprocheacutee agrave la SEM GEG et la situation concurrentielle agrave Grenoble deacutecrite par lAutoriteacute constater que la pratique reprocheacutee agrave la SEM GEG ne pouvait ecirctre la cause de la preacutetendue eacuteviction de Poweo agrave Grenoble qui najamais eacuteteacute deacutemontreacutee par lAutoriteacute constater que la pratique reprocheacutee agrave la SEM GEG na pas davantage eu deffet de forclusion sur le marcheacute en cause en conseacutequence annuler la Deacutecision et ordonner le remboursement immeacutediat par le Treacutesor public de la somme de 320000 euros payeacutee par la SEM GEG en exeacutecution de la Deacutecision attaqueacutee assorti des inteacuterecircts au taux leacutegal agrave compter de larrecirct et avec application de larticle 1154 du Code civil A titre tregraves subsidiaire constater le caractegravere tregraves disproportionneacute des sanctions infligeacutees agrave la SEM GEG degraves lors que lAdlC na pas deacutemontreacute lexistence dun dommage agrave leacuteconomie ni mecircme la graviteacute des pratiques alleacutegueacutees reacuteformer la Deacutecision en conseacutequence Condamner la Ministre chargeacutee de leacuteconomie agrave payer la somme de 50000 euros pour frais irreacutepeacutetibles de proceacutedure et les entiers deacutepens

Vu les observations de lAutoriteacute de la concurrence en date du 5 novembre 2009

Vu les observations de Madame la Ministre chargeacutee de leacuteconomie en date du 20 novembre 2009

Vu le meacutemoire en reacuteplique de la SEM Gaz et Electriciteacute de Grenoble en date du 18 deacutecembre 2009 tendant aux mecircmes fins que le meacutemoire du 2 juin 2009

Vu les conclusions de Monsieur le Procureur Geacuteneacuteral en date du 26 janvier 2010

Ouiuml le conseil de la SEM Gaz et Electriciteacute de Grenoble et les repreacutesentants de lAutoriteacute de la concurrence et de Monsieur le Procureur Geacuteneacuteral agrave laudience du 2 feacutevrier 2010 la socieacuteteacute requeacuterante ayant pu reacutepliquer et eu la parole en dernier

SUR QUOI

A - Sur le respect de larticle 6 de la Convention ESDH et la dureacutee de la proceacutedure

Consideacuterant que la SEM GEG demande agrave la cour de dire et juger que le deacutelai de la proceacutedure devant lAutoriteacute na pas eacuteteacute raisonnable au sens de larticle 6 de la convention ESDH que la SEM GEG qualifie la dureacutee de la proceacutedure dexcessive au motifque linstruction a dureacute pregraves de quatre anneacutees (apregraves deux anneacutees eacutecouleacutees pour que le Rapporteur geacuteneacuteral deacutesigne deux Rapporteurs successifs) alors que laffaire eacutetait deacutenueacutee de toute complexiteacute autre que de pur droit et que les actes dinstruction nont pas eacuteteacute nombreux

Que ce deacutelai a porteacute atteinte aux droits de la SEM GEG car il a inducircment diffeacutereacute lexercice des droits de la deacutefense le deacutebat contradictoire ne pouvant exister quagrave compter de la notification de griefs et compte tenu du caractegravere essentiellement ponctuel et circonstancieacute de la pratique qui lui est reprocheacutee que concregravetement des collaborateurs ont quitteacute la SEM GEG pendant la longue peacuteriode denquecircte et ceci a rendu impossible la mise en place de la deacutefense de cette SEM devant l AdlC

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Mais consideacuterant que le respect des droits de la deacutefense revecirctant une importance capitale dans les proceacutedures telles que celle en lespegravece il importe deacuteviter que ces droits puissent ecirctre irreacutemeacutediablement compromis notamment en raison dune dureacutee excessive de la phase denquecircte et que cette dureacutee soit susceptible de faire obstacle agrave leacutetablissement de preuves visant agrave reacutefuter lexistence de comportements de nature agrave engager la responsabiliteacute des entreprises concerneacutees que pour cette raison lexamen de leacuteventuelle entrave agrave lexercice des droits de la deacutefense ne doit pas ecirctre limiteacute agrave la phase mecircme dans laquelle ces droits produisent leur plein effet agrave savoir la seconde phase de la proceacutedure administrative que lappreacuteciation de la source de leacuteventuel affaiblissement de lefficaciteacute des droits de la deacutefense doit seacutetendre agrave lensemble de cette proceacutedure en se reacutefeacuterant agrave la dureacutee totale de celle-ci enquecircte comprise que pour autant la dureacutee excessive de la proceacutedure ne peut ecirctre deacutetermineacutee en soi de maniegravere abstraite

Quen lespegravece une dureacutee de trois ans et demi ne peut ecirctre consideacutereacutee comme excessive au sens de la Convention europeacuteenne de sauvegarde des droits de 1 homme si la socieacuteteacute requeacuterante ne deacutemontre pas en quoi in concreto elle aurait eacuteteacute priveacutee du droit de se deacutefendre

Quagrave ce sujet il peut ecirctre constateacute quapregraves une saisine intervenue le 12juillet 2005 agrave linitiative de la Commission de reacutegulation de leacutenergie le preacutesident de la SEM GEG a eacuteteacute entendu par le rapporteur le 10 juillet 2007 en lui donnant connaissance de la lettre de saisine que la SEM GEG a disposeacute eacutegalement des deacutelais preacutevus par larticle L 463-2 du code de commerce pour faire valoir ses observations quil ne reacutesulte daucune deacutemonstration et mecircme daucune assertion claire de la requeacuterante quelle nait pas pu preacuteparer de maniegravere satisfaisante sa deacutefense devant lAutoriteacute puis devant la cour quelle invoque mais ne prouve pas une impossibiliteacute de recueillir des teacutemoignages agrave deacutecharge notamment du fait des changements susceptibles dintervenir dans la composition des organes dirigeants des entreprises concerneacutees et des mouvements affectant les autres personnels de celles-ci quelle na pas agrave deacuteplorer non plus la perte des documents commerciaux ou internes des notes ou courriers-papier les courriels et comptes-rendus de conversations teacuteleacutephoniques dont la destruction aurait eacuteteacute deacutecideacutee apregraves un temps bref en quoi la SEM GEG napporte aucun eacuteleacutement seacuterieux preacutecis et concret dune violation de ses droits de la deacutefense

Que le moyen sera rejeteacute

B - Sur la deacutefinition du marcheacute pertinent

Consideacuterant que la SEM GEG relegraveve que le marcheacute de produits retenu par lAutoriteacute est celui de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels eacuteligibles que pourtant le marcheacute des clients professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute cest-agrave-dire le marcheacute ouvert agrave la concurrence le la juillet 2004 doit seul ecirctre pris en consideacuteration la clientegravele eacutetant cloisonneacutee selon le type doffre (tarif reacuteglementeacute ou prix du marcheacute) quelle a choisi et une faible part ayant choisi le marcheacute en raison dun effet de ciseau que la SEM GEG sappuie agrave ce titre sur la deacutecision n0 07-MC-Ol dans laquelle le Conseil de la concurrence a retenu que lirreacuteversibiliteacute du passage vers les offres de marcheacute eacutetait lun des principaux eacuteleacutements permettant de deacutefinir un marcheacute distinct de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute

Que sagissant du marcheacute geacuteographique si lAutoriteacute la deacutefini comme local la SEM GEG entend deacutemontrer que celui-ci est national car la reacuteglementation libeacuteralisant le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute est national et les conditions - et les opeacuterateurs (dont Poweo) - de commercialisation de leacutelectriciteacute sont les mecircmes sur lensemble du territoire

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Mais consideacuterant sur le marcheacute de produits que le marcheacute se deacutefinit comme le lieu sur lequel se rencontrent loffre et la demande pour un produit ou un service speacutecifique que sur un marcheacute donneacute les uniteacutes offertes sont parfaitement substituables pour les consommateurs qui peuvent ainsi arbitrer entre les offreurs lorsquil y en a plusieurs ce qui implique que chaque offreur est soumis agrave la concurrence par les prix des autres

Que le 1 er juillet 2004 les clients petits professionnels se sont vu reconnaicirctre le droit dacheter de leacutelectriciteacute aupregraves du fournisseur de leur choix tout en conservant la possibiliteacute de continuer agrave sapprovisionner aupregraves de leur fournisseur historique et de beacuteneacuteficier de la part de celui-ci des tarifs reacuteglementeacutes fixeacutes par lEtat que de feacutevrier agrave avril 2005 des clients de la SEM GEG ont quitteacute le fournisseur historique au profit du fournisseur alternatif ce qui deacutemontre quil existait agrave ce moment de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute agrave la concurrence une substituabiliteacute entre les services offerts par la SEM GEG et Poweo et quen conseacutequence ces deux entreprises intervenaient sur le mecircme marcheacute

Consideacuterant que du tout il seacutevince comme la affirmeacute la Deacutecision (parag 40 agrave 51) que le marcheacute pertinent est bien le marcheacute de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels et non le marcheacute des seuls professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute

Consideacuterant en outre sur le marcheacute geacuteographique que le marcheacute geacuteographique comprend le territoire sur lequel les entreprises concerneacutees sont engageacutees dans loffre des biens et services en cause sur lequel les conditions de concurrence sont suffisamment homogegravenes et qui peut ecirctre distingueacute de zones geacuteographiques voisines parce que en particulier les conditions de concurrence y diffegraverent de maniegravere appreacuteciable

Quen lespegravece les clients professionnels situeacutes dans la zone de desserte de la SEM GEG ne peuvent acheter de leacutelectriciteacute quaupregraves de la SEM GEG fournisseur exclusif deacutelectriciteacute au tarif reacuteglementeacute sur sa zone ou aupregraves de fournisseurs alternatifs deacutelectriciteacute au prix de marcheacute qui ont conclu un contrat daccegraves au reacuteseau de distribution geacutereacute en monopole par la SEM GEG pour acheminer leur eacutelectriciteacute jusquau client final quil en reacutesulte quils ne peuvent se procurer de leacutelectriciteacute quagrave linteacuterieur de la zone geacuteographique couverte par le distributeur non nationaliseacute

Consideacuterant quen conseacutequence le marcheacute pertinent est la zone desservie par le reacuteseau de distribution de leacutelectriciteacute de Grenoble que le moyen contraire de la SEM GEG sera rejeteacute

C - Sur lexistence dune position dominante

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie avoir occupeacute sur le marcheacute tel quelle la consideacutereacute une position dominante au moment des faits puisquelle gegravere et fournit 059 pl 00 en volume et 067 pl 00 des sites que sa position dopeacuterateur preacutetenducircment historique a de toute faccedilon eacuteteacute aneacuteantie par louverture du marcheacute agrave la concurrence eacutevolution sur laquelle la Deacutecision est demeureacutee taisante

Mais consideacuterant que comme il a eacuteteacute eacutenonceacute preacuteceacutedemment le marcheacute pertinent nest pas celui que preacutetend la SEM GEG en sorte que son raisonnement devant la cour est neacutecessairement vicieacute

Consideacuterant par ailleurs que le marcheacute de la fourniture deacutelectriciteacute nayant eacuteteacute ouvert agrave la concurrence que le 1er juillet 2004 et la SEM GEG deacutetenant jusquagrave cette date un monopole sur ce marcheacute la reacutepartition des parts de marcheacute navait pas sensiblement eacutevolueacute au moment des faits en avril 2005 puisque seule la socieacuteteacute POWEO avait pris des initiatives (cf Deacutecision parag 55)

ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 Cour dAppel de Paris

RG na 200909599 - 7egraveme page

Que lors dune audition dun responsable de la SEM GEGle 10 juillet 2007 il a eacuteteacute eacutetabli que la part de marcheacute de la SEM GEG seacutelevait agrave 80 quil neacutetait donc pas anormal pour lAdlC de consideacuterer que cette part ait eacuteteacute plus importante au moment des faits deux ans plus tocirct agrave un moment ougrave louverture du marcheacute eacutetait balbutiante

Consideacuterant quen conseacutequence lexistence dune position dominante de la SEM GEG sur le marcheacute local de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles est aveacutereacutee et que le moyen de la requeacuterante de ce chef sera rejeteacute

Consideacuterant pour reacutepondre complegravetement aux arguties de la requeacuterante et relativement agrave la perte juridique de position monopolistique de la SEM GEG que quand bien mecircme louverture agrave la concurrence dun monopole entraicircne neacutecessairement une perte de parts de marcheacute pour lopeacuterateur historique une analyse concregravete peut permettre de constater toutefois que lopeacuterateur historique conserve une position de monopole de fait ou de quasi-monopole du fait de sa notorieacuteteacute par exemple quen loccurrence lAutoriteacute eacutetait fondeacutee agrave relever que la position dominante de la SEM GEG ne pouvait quecirctre renforceacutee par sa notorieacuteteacute dopeacuterateur historique aux yeux des clients eacuteligibles et par son monopole sur les marcheacutes connexes de la distribution deacutelectriciteacute et de fourniture deacutelectriciteacute aux clients reacutesidentiels et sur lactiviteacute gaziegravere quen teacutemoigne le fait que degraves 2006 elle a pu restaurer sa position de monopoleur comme il sera dit plus loin

D - Sur la pratique de deacutenigrement constitutive de labus de position dominante

Consideacuterant que la SEM GEG affirme que les communiqueacutes de presse litigieux dailleurs tregraves peu nombreux nont eu aucun objet anticoncurrentiel ne relegraveveraient au pire que de laction en reacuteparation pour concurrence deacuteloyale mais nont mecircme pas eu de caractegravere de deacutenigrement que la cour en jugerait-elle autrement agrave linstar de lAdIC tout deacutenigrement dont une entreprise en position dominante serait lauteur nest pas neacutecessairement constitutif dun abus de position dominante quil est toujours neacutecessaire deacutetablir un lien entre la domination de lentreprise et la pratique de deacutenigrement que sous cet angle la SEM GEG avance que le communiqueacute de presse litigieux ne consistait quagrave deacutementir les informations fausses ou deacuteloyales diffuseacutees par certains agents commerciaux mandateacutes par Poweo apregraves leacutechec dune deacutemarche amiable en forme de mise en demeure cinq j ours avant le premier des deux communiqueacutes de presse que le discreacutedit ne pouvait pas ecirctre qualifieacute de systeacutematique puisque la reacuteaction de la SEM GEG eacutetait ponctuelle et circonstancieacutee Poweo ne contestant pas que la pratique a cesseacute degraves le deacutebut de la proceacutedure judiciaire dindemnisation le 22 avril 2005 quenfin la SEM GEG conteste la confusion qui lui est reprocheacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees dans le secteur ouvert agrave la concurrence en sorte que le lien de causaliteacute entre la position dite dominante et le deacutenigrement nexiste pas et ne peut deacutegeacuteneacuterer en abus

Mais consideacuterant en premier lieu que lAutoriteacute de la concurrence a veilleacute agrave souligner que labus de position dominante ne se confond pas avec une pratique de concurrence deacuteloyale quen effet alors que laction en concurrence deacuteloyale protegravege les concurrents la sanction de labus de position dominante vise agrave proteacuteger lordre public eacuteconomique en sorte dailleurs que labsence de POWEO aux deacutebats devant la cour ne preacutesente strictement aucun inconveacutenient quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement aux assertions de la requeacuterante il faut rappeler quen matiegravere dabus de position dominante les comportements fautifs de lentreprise au regard des dispositions geacuteneacuterales de larticle 1382 du code civil constituent des abus de position dominante

Consideacuterant en deuxiegraveme lieu que le communiqueacute de presse litigieux contenait des mentions de deacutenigrement agrave leacutegard de Poweo nouvel entrant sur le marcheacute que ce communiqueacute faisait eacutetat de laquoconception de la qualiteacute de services tregraves relative raquo de l ( usage de meacutethodes peu scrupuleusesraquo et de la poursuite de laquo fins strictement financiegraveresraquo que certaines mentions eacutetaient en outre de nature agrave induire les clients eacuteligibles en erreur dans la mesure ougrave il eacutetait indiqueacute que laquocet opeacuterateur annonce agrave tort quil a conclu un partenariat

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avec la SEM GEG raquo alors que Poweo avait effectivement conclu un contrat daccegraves au reacuteseau de distribution le 5 janvier 2005

Consideacuterant en troisiegraveme lieu sur le lien entre position dominante et deacutenigrement que plusieurs eacuteleacutements agrave juste titre releveacutes par la Deacutecision leacutetablissent

Que le communiqueacute de presse a constitueacute un argumentaire des agents commerciaux de la SEM GEG pour inciter des clients qui avaient souscrit un contrat avec Poweo agrave le reacutesilier et agrave renouer avec le seul autre opeacuterateur la SEM GEG que le communiqueacute litigieux a ainsi eacuteteacute non pas un acte isoleacute mais le point de deacutepart dune contre-offensive fondeacutee sur un deacutenigrement systeacutematique et destineacutee agrave affaiblir le concurrent et qui neacutetait concregravetement possible que pour un opeacuterateur en position dominante

Que ce faisant la SEM GEG a profiteacute du caractegravere tregraves reacutecent de louverture du marcheacute agrave la concurrence (la juillet 2004 soit agrave peine neufmois auparavant) et a pu user de la notorieacuteteacute et de limage encore preacutesentes aux esprits lieacutees agrave lactiviteacute de monopole geacuterant un service public

Que cette analyse est corroboreacutee par les chiffres reacuteunis en annexe au procegraves-verbal daudition du responsable de la SEM GEG devant le Rapporteur de lAutoriteacute qui fait apparaicirctre en tenant compte du temps-retard des souscriptions et des reacutesiliations que le nombre de contrats passeacutes par des clients avec Poweo a augmenteacute tregraves fortement en mars et avril 2005 mais na cesseacute de deacutecroicirctre ensuite comme il sera redit par la cour agrave propos des effets des pratiques en sorte que la SEM GEG a retrouveacute finalement sa position historique

Consideacuterant en quatriegraveme lieu que le deacutenigrement eacutetait dautant plus rechercheacute que les fOlmulations du communiqueacute de presse semblaient preacutesenter Poweo cornnle incapable dassumer la fonction de distributeur alors que cette socieacuteteacute na jamais preacutetendu agrave cette fonction et ne laurait leacutegalement pas pu que de mecircme et encore le communiqueacute nie tout partenariat entre la SEM GEG et Poweo alors quun contrat les liait depuis janvier 2005 comme il a eacuteteacute eacutenonceacute preacuteceacutedemment

Consideacuterant que du tout il reacutesulte que les communiqueacutes litigieux ont constitueacute en eux-mecircmes et par lusage ulteacuterieur qui en a eacuteteacute fait un deacutenigrement adosseacute agrave la position dominante de la SEM GEG et constitutif par conseacutequent dun abus de cette position

E - Sur les effets des pratiques

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie la pertinence de lanalyse juridique de lAutoriteacute selon laquelle les pratiques ont eu agrave la fois pour objet et pour effet dentraver le deacuteveloppement dun concurrent et de le deacutecider agrave mettre un terme agrave son action commerciale agrave Grenoble

Quen fait selon la socieacuteteacute GEG lAutoriteacute ne peut pas se contenter de mentionner le nombre de contrats signeacutes par Poweo resteacute stable (autour de 190)jusquenjanvier 2006 quagrave supposer que la progression se soit affaiblie agrave compter des publications du communiqueacute de presse dautres facteurs peuvent expliquer ce fait preacutetendu notamment (i) le communiqueacute de presse na eu quune porteacutee limiteacutee (caractegravere limiteacute dans le temps et caractegravere geacuteneacuteral contrairement au deacutemarchage cibleacute de POWEO) (ii) POWEO a modifieacute sa strateacutegie commerciale (arrecirct des deacutemarchages et prospections) (iii) les prix de gros de leacutelectriciteacute ont fortement augmenteacute et ont deacutepasseacute les tarifs reacuteglementeacutes rendant peu inteacuteressante la conclusion dun contrat avec un opeacuterateur alternatif ( ciseau tarifaire) (iv) POWEO a manifesteacute sa volonteacute de se deacutesengager de la fourniture (marcheacute aval) pour se concentrer sur la production deacutelectriciteacute (marcheacute amont)

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Quen outre la SEM GEG se fonde surle nombre de points de service alimenteacutes par Poweo cest~agrave-dire les sites de livraison aux clients eacuteligibles quelle estime ecirctre lindicateur le plus pertinent pour mesurer le poids respectif des diffeacuterents acteurs que ce nombre est passeacute trois mois apregraves la publication du communiqueacute de presse de 15 agrave 190 (tableau GEG parag222 p41) que par ailleurs la SEM GEG affirme que la pratique na pas pu avoir deffet deacuteviction car le message commercial na eacuteteacute diffuseacute quagrave deux reprises que le nombre de reacutesiliations eacutetabli agrave 27 sur 190 contrats signeacutes est faible et la preuve na pas eacuteteacute apporteacutee que les agents commerciaux de la SEM GEG auraient relayeacute sur le terrain les eacuteleacutements deacutenigrants du communiqueacute de presse que la SEM GEG en conclut quil nexiste donc aucun lien neacutecessaire entre la publication du communiqueacute de presse et la preacutetendue sortie du marcheacute de POWEO

Que sur leffet de forclusion la SEM GEG avance quil existe dautres fournisseurs alternatifs sur le marcheacute de Grenoble quainsi GDF est le premier fournisseur agrave Grenoble en offre de marcheacute

Quen somme comme en teacutemoigne la pratique deacutecisionnelle de lAutoriteacute il nest plus permis darticuler des preacutesomptions sur les effets des pratiques et en lespegravece aucune deacutemonstration nest faite par la Deacutecision

Mais consideacuterant quen droit lAutoriteacute avait bien pour mission de rechercher leffet anticoncurrentiel des pratiques de la SEM GEG au sens de larticle L 420-2 Ccom

Que la recherche de leffet anticoncurrentiel de la pratique poursuivie est preacutesenteacutee par la SEM GEG tantocirct comme le but poursuivi concregravetement par la SEM GEG auquel cas lanalyse se confond avec celle de labus meneacutee preacuteceacutedemment par la cour tantocirct comme le ressort essentiel du comportement (pratique anticoncurrentielle per se) auquel cas la conjonction OU queacutenonce la loi indique que leffet anticoncurrentiel suffit agrave consacrer le grief poursuivi

Consideacuterant quen fait lAutoriteacute a pu relever la concomitance entre la publication agrave deux reprises du communiqueacute de presse les 13 et 18 avril 2005 et la baisse du nombre de contrats signeacutes par Poweo quapregraves correction tenant au deacutecalage entre la date de souscription des contrats et celle de prise deffet des changements de fournisseur le nombre de contrats signeacutes a eacutevolueacute de la maniegravere suivante Ont eacuteteacute signeacutes par Poweo en feacutevrier 2005 un contrat en mars 14 en avril 107 puis en mai 68 en juin 0 et en juillet et au delagrave aucun contrat que du 17 avril au 17 mai 2005 la socieacuteteacute Poweo a reccedilu 36 lettres de reacutesiliation dont 27 eacutetaient comme la SEM GEG nen disconvient pas identiques en la forme et une envoyeacutee des locaux de la SEM GEG elle-mecircme quenfin la socieacuteteacute Poweo na conclu aucun nouveau contrat entre juin 2005 et juin 2008 quen somme elle na pu conserver une bonne part des contrats dorigine que par le jeu de lirreacuteversibiliteacute leacutegale deacutecrite preacuteceacutedemment

Consideacuterant que degraves lors lAutoriteacute a pu agrave bon droit relever les effets anticoncurrentiels des pratiques de la SEM GEG contrairement agrave ce que celle-ci soutient

F - Sur leacutevaluation de la sanction

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie que les pratiques incrimineacutees aient preacutesenteacute un degreacute significatif de graviteacute

Quelle estime aussi que les pratiques nont pas occasionneacute un quelconque dommage agrave leacuteconomie quelle indique plus en deacutetail que Gaz de France a reacuteussi agrave simplanter pendant la peacuteriode incrimineacutee et agrave devenir le premier fournisseur en offre de

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG ndeg 200909599 - 10egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

marcheacute agrave Grenoble que le surplus du consommateur na pas eacuteteacute significativement affecteacute par les pratiques litigieuses comme leacutenonce la Deacutecision elle-mecircme que le ciseau tarifaire eacutetait la seule question qui se posait reacuteellement et qui a conduit agrave la preacutetendue eacuteviction de Poweo

Quelle rappelle au titre de lindividualisation de la sanction quelle dispose dune faible surface financiegravere

Mais consideacuterant sur la graviteacute du comportement que celle-ci ne se confond pas avec la reacutealiteacute de labus de position dominante examineacutee preacuteceacutedemment mais doit proceacuteder dune anal yse des meacutethodes utiliseacutees par la S EM G EG pour parvenir agrave ses fins dune mesure des parts de marcheacute que deacutetient lentreprise poursuivie dun examen de la dureacutee du comportement anticoncurrentiel de leacutetendue ou la complexiteacute des processus anticoncurrentiels de laffectation directe des prix jusques et y compris les prix de deacutetail dune analyse des marcheacutes concerneacutes selon quil sagit de marcheacutes sensibles ou qui le sont moins de marcheacutes touchant directement le consommateur final ou pas de lidentification de clients personnes physiques ou petites entreprises ou de clients vulneacuterables (enfants personnes acircgeacutees malades ) ou dune clientegravele captive au sens eacuteconomique de la continuation du comportement anticoncurrentiel apregraves la saisine de lAutoriteacute ou encore du fait quil sagisse dun marcheacute public

Quen lespegravece lAutoriteacute a pu retenir tour agrave tour que la SEM GEG a opeacutereacute une confusion deacutelibeacutereacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees en concurrence (DeacutecO sect 70 suiv deacutejagrave examineacutes plus haut) que le discours deacutenigrant du communiqueacute de presse est particuliegraverement reacutepreacutehensible car il provient de lopeacuterateur historique (DeacutecO sect 91) que les pratiques nont pas eacuteteacute instantaneacutees puisquelles ont eacuteteacute preacuteceacutedeacutees de courriers (DeacutecO sect 94) et suivies de deacutemarchages aupregraves des anciens clients pour regagner leur confiance

Quil faut ajouter que les pratiques incrimineacutees ont eu pour but dentraver le deacuteveloppement dun concurrent sur le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles de Grenoble au moment crucial et symbolique de louverture agrave la concurrence

Que reacuteciproquement il ne peut ecirctre reprocheacute agrave lAutoriteacute de ne pas avoir tenu compte des facteurs habituels datteacutenuation qui eacutetaient eacutetrangers agrave lespegravece tels que lancienneteacute des faits - la saisine de lAutoriteacute ayant eacuteteacute immeacutediate - la cessation du comportement anticoncurrentiel agrave partir de la saisine de lAutoriteacute - labandon du marcheacute par Poweo ayant restaureacute la position de monopoleur de la SEM GEG - ou le pouvoir de marcheacute de Poweo - tout-agrave-fait modeste ainsi quil a eacuteteacute dit -

Que degraves lors il ne peut ecirctre fait aucun reproche agrave la Deacutecision ni en droit ni en fait dans lexamen de la graviteacute du comportement

Consideacuterant encore sur le dommage causeacute agrave leacuteconomie que lAutoriteacute a pu valablement caracteacuteriser une probabiliteacute raisonnable de dommage collectif

Que la proceacutedure a deacutemontreacute que la SEM GEG a empecirccheacute louverture du marcheacute agrave la concurrence en reacuteduisant le nombre des opeacuterateurs au point que cette entreprise a pu revenir agrave la situation qui eacutetait la sienne avant le 1 er juillet 2004 soit anteacuterieurement agrave louverture du marcheacute agrave la concurrence en restaurant sa position de monopoleur

Que cependant comme le reconnaicirct agrave juste titre la Deacutecision ce dommage a eacuteteacute limiteacute agrave la zone de desserte de Grenoble

Que lAutoriteacute a pris soin encore deacutecarter expresseacutement le facteur important dit daffectation significative du surplus du consommateur quen effet si la SEM GEG sest retrouveacutee en position de monopole de fait sur le marcheacute pertinent apregraves le retrait de Poweo elle neacutetait pas libre den profiter et de pratiquer tes prix de monopole car elle devait

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appliquer le tarif reacuteglementeacute fixeacute par la puissance publique que de plus au vu des conditions du marcheacute libre de leacutelectriciteacute linteacuterecirct de la clientegravele de masse sauf bouleversement des prix de marcheacute [eacutetait] de rester aux tarifs reacuteglementeacutes (DeacutecO sect 97 suiv) notamment en raison du ciseau tarifaire tel quil a eacuteteacute exposeacute preacuteceacutedemment

Que reacuteciproquement lAutoriteacute na tireacute aucun argument dautres facteurs significatifs du dommage agrave leacuteconomie na notamment pas exageacutereacute leacutetendue du marcheacute affecteacute par le comportement anticoncurrentiel ni les perturbations du marcheacute

Que lAutoriteacute admet eacutegalement les rapports dactiviteacute de la CRE depuis 2005 qui font eacutetat de la stagnation du rythme de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute pour les clients professionnels et ce sur lensemble du territoire national que lAutoriteacute nimpute pas labsence dopeacuterateurs alternatifs en tout cas jusquagrave larriveacutee de ODF sur le marcheacute aux pratiques de la SEM GEG

Quenfin lAutoriteacute na pas neacutegligeacute de tenir compte de ce que Poweo na pas deacuteposeacute plainte devant lAutoriteacute de la concurrence pour abus de position dominante le Rapporteur ayant meneacute son instruction sur la seule saisine de la CRE et de ce que Poweo ne sest pas non plus jointe agrave la proceacutedure par la suite quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement agrave un argument de la SEM GEO lAutoriteacute de la concurrence dans sa mission de protection des consommateurs na pas besoin de lappui ou de lassentiment des concurrents moyennant quoi la reacuteparation accordeacutee auxdits concurrents par les voies de droit commun na pas dinfluence sur la proceacutedure de reacutegulation punitive et preacuteventive fondeacutee sur lordre public eacuteconomique

Quen somme loin dexageacuterer le dommage agrave leacuteconomie occasionneacute par le comportement poursuivi et apregraves avoir reacutepondu point par point aux arguments de Poweo lAutoriteacute a fait de ce dommage une analyse tregraves pondeacutereacutee que la cour approuve

Consideacuterant enfin sagissant de lindividualisation de la sanction (sect 104 agrave 106) et que lAutoriteacute de la concurrence a preacuteciseacute que le chiffre daffaires consolideacute de la SEM OEG avait atteint en 2007 124645 millions deuros avec pour conseacutequence que le montant maximum de la sanction encourue seacutelegraveve agrave 12 500 000 euro que ces consideacuterations sont incontestables et incontesteacutees et quelles incluent neacutecessairement leacutevaluation de la capaciteacute contributive de la SEM GEG qui na pas traverseacute agrave leacutepoque des faits poursuivis ni posteacuterieurement des difficulteacutes particuliegraveres qui commanderaient une autre analyse

Quagrave titre superfeacutetatoire mais sans inexactitude il a eacuteteacute tenu compte par lAutoriteacute du fait que les ventes deacutelectriciteacute reacutealiseacutees par la SEM GEO nont cesseacute de progresser entre 2004 et 2007 pour atteindre 64 261 401 euros en 2007

Quenfin il ny a pas lieu de tenir compte de lindemnisation provisionnelle accordeacutee agrave Poweo par la juridiction commerciale pour les raisons susdites

Consideacuterant quayant ainsi proceacutedeacute sans erreur agrave lanalyse de la graviteacute de la pratique anticoncurrentielle ayant ensuite eacutevalueacute avec pondeacuteration le dommage agrave leacuteconomie et ayant preacuteciseacutement examineacute les facteurs dindividualisation de la sanction lAutoriteacute a exactement proportionneacute celle-ci agrave une hauteur dagrave peine trois pour mille du meilleur chiffre daffaires annuel de la peacuteriode consideacutereacutee que la demande de reacuteformation de la SEM GEG est manifestement infondeacutee

PAR CES MOTIFS

Rejette le recours

ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RO ndeg 200909599 - 12egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Condamne la SEM GEG aux deacutepens

LE [REFFIER

Thierry FOSSIER

Cour dAppel de Paris ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 RG nO 200909599 - 13egraveme page

POWEO est une socieacuteteacute anonyme qui deacuteveloppe des activiteacutes dans le secteur de leacutenergie En tant quopeacuterateur alternatif et afin de desservir ses clients la socieacuteteacute Poweo a conclu le 5 janvier 2005 un contrat daccegraves au reacuteseau public de transport de leacutelectriciteacute dEDF ainsi quun contrat avec les gestionnaires des reacuteseaux de distribution approvisionnant ses clients dont la SEM GEG pour la zone grenobloise

La saisine de la CRE et du Conseil de la concurrence

Par application de larticle 39 de la loi du 10 feacutevrier 2000 preacuteciteacutee la Commission de reacutegulation de leacutenergie a le 8 juillet 2005 porteacute agrave la connaissance du Conseil de la concurrence un communiqueacute de presse paru dans le Dauphineacute Libeacutereacute agrave deux reprises les 13 et 18 avril 2005 Ce communiqueacute eacutetait ainsi reacutedigeacute laquo GEG appelle ses clients professionnels agrave la vigilance La Direction de Gaz Electriciteacute de Grenoble met en garde tous ses clients professionnels contre des deacutemarchages commerciaux abusifs et mensongers Ces derniers jours agrave Grenoble certains commerccedilants sont deacutemarcheacutes de maniegravere abusive par un nouvel opeacuterateur reacutecemment arriveacute sur le marcheacute de leacutelectriciteacute deacutesormais ouvert agrave la concurrence pour tous les professionnels Cet opeacuterateur leur annonce agrave tort quil a conclu un partenariat avec GEG voire mecircme quil a racheteacute GEG et que ces derniers doivent par conseacutequent signer un nouveau contrat pour changer defournisseur deacutelectriciteacute Ces propos sont eacutevidemment mensongers GEG tient agrave rappeler agrave tous ses clients quelle na conclu daccord avec aucun fournisseur deacutelectriciteacute agrave Grenoble et condamne ces agissements malintentionneacutes et contraires agrave toute eacutethique commerciale Louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute aux professionnels a vu apparaicirctre de nouveaux opeacuterateurs pour qui le meacutetier et lexpeacuterience de distributeur et defournisseur deacutenergie sont reacutecents Certains dentre eux ont une conception de la qualiteacute de services tregraves relative et nheacutesitent pas agravefaire usage de meacutethodes peu scrupuleuses pour parvenir agrave leurs fins souvent strictement financiegraveres GEG est le fournisseur deacutenergie historique agrave Grenoble depuis plus de cent ans et a toujours deacutefendu les valeurs du service public local Lentreprise a deacuteveloppeacute un savoirjaire et des services de proximiteacute compeacutetitifs Elle place la satisfaction de ses clients au cœur de ses preacuteoccupations GEG invite tous les clients concerneacutes par ces deacutemarchages abusift agrave prendre contact avec leurs conseillers commerciauxraquo

La CRE a proceacutedeacute agrave la saisine du Conseil de la concurrence le 8 juillet 2005

La publication de ce communiqueacute de presse fait suite aux deacutemarchages entrepris par la socieacuteteacute Poweo agrave compter du mois de feacutevrier 2005 Ces deacutemarchages meneacutes par des laquo revendeurs indirectsraquo avaient pour objet de convaincre les professionnels dexercer leur eacuteligibiliteacute en souscrivant aux offres de Poweo Certains commerciaux seraient alleacutes jusquagrave mener une campagne de deacutesinformation aupregraves des professionnels afin dobtenir leur signature

En conseacutequence la SEM GEG se serait convaincue de la neacutecessiteacute de riposter contre les pratiques quelle jugeait peu loyales de son concurrent Poweo en publiant un communiqueacute dans la presse locale dont le contenu est reproduit en note

Les proceacutedures intenteacutees par la SEM GEG

Quelques jours apregraves les publications du communiqueacute de presse le 22 avril 2005 la SEM GEG a assigneacute en reacutefeacutereacute Poweo pour concurrence deacuteloyale devant le Tribunal de commerce de Grenoble Poweo a alors formeacute une demande reconventionnelle afin dobtenir la reconnaissance des actes de concurrence deacuteloyale auxquels se serait livreacutee la SEM GEG et de voir ordonner leur cessation sous astreinte La socieacuteteacute Poweo a obtenu gain de cause aussi bien devant le preacutesident du Tribunal de Commerce de Grenoble que devant la Cour dappel de Grenoble au motif que la S EM G E G avait laquocommis des actes de concurrence deacuteloyale notamment par voie de presse en proceacutedant au deacutenigrement de la personne de son concurrent la socieacuteteacute Poweo en discreacuteditant la reacuteputation lhonnecircteteacute lhonorabiliteacute limage les meacutethodes de travail et la qualiteacute des services de celle-ci raquo La socieacuteteacute POWEO a obtenu une provision de 7500 euros

ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 3egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

La SEM GEG et Poweo ont conclu un accord afin de reacutegler les suites de cette proceacutedure judiciaire accord dont le contenu demeurait au j our de la deacutecision de lAutoriteacute secret

Le grief notifieacute

Le Conseil de la concurrence a estimeacute que ce communiqueacute de presse pouvait viser agrave critiquer de faccedilon systeacutematique Poweo ainsi quagrave valoriser la SEM GEG au deacutetriment de ses concurrents tout en entretenant une confusion entre les activiteacutes de fournisseur de la SEM GEG - soumises agrave concurrence - et celles de distribution pour lesquelles la SEM GEG conserve de droit un monopole

Le 14 mai 2008 sur le fondement de larticle L 420-2 du Code de commerce le Rapporteur du Conseil a fait grief agrave la SEM GEG davoir laquo abuseacute de sa position dominante sur le marcheacute de leacutelectriciteacute agrave lusage des professionnels sur la zone de desserte de Grenoble en se livrant courant 2005 et notamment par voie de presse agrave des pratiques de deacutenigrement agrave lencontre de son concurrent Poweo et en associant agrave ces pratiques la diffusion dune communication institutionnelle entretenant la confusion entre ses activiteacutes de distributeur exerceacutees dans le cadre du service public et celles de fournisseur soumises agrave la concurrence raquo Ces pratiques auraient eu pour objet ou pour effet de limiter laccegraves de Poweo au marcheacute de leacutelectriciteacute agrave lusage des clients professionnels

La sanction

Sur le rapport de son Rapporteur geacuteneacuteral en date du 3 novembre 2008 lAutoriteacute de la concurrence a infligeacute une sanction peacutecuniaire de 320000 euros agrave la SEM GEG pour avoir enfreint les dispositions de larticle L 420-2 du Code de commerce

LACOUR

Vu la Deacutecision nO 09-D-14 de lAutoriteacute de la concurrence en date du 25 mars 2009 (ltlt la Deacutecision raquo) relative agrave des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la fourniture deacutelectriciteacute

Vu le meacutemoire eacutetabli et deacuteposeacute au greffe le 2 juin 2009 par la SEM Gaz et Electriciteacute de Grenoble au soutien de sa deacuteclaration de recours demandant agrave la cour de

Dire et juger que le deacutelai de la proceacutedure devant lAutoriteacute na pas eacuteteacute raisonnable au sens de larticle 6 de la convention ESDH En conseacutequence annuler la Deacutecision et ordonner le remboursement immeacutediat par le Treacutesor public de la somme de 320000 euros payeacutee par la SEM GEG en exeacutecution de la Deacutecision attaqueacutee assorti des inteacuterecircts au taux leacutegal agrave compter de larrecirct et avec application de larticle 1154 du Code civil Sur le fond constater que lAutoriteacute a commis une erreur de droit en limitant le marcheacute pertinent agrave celui de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels eacuteligibles dans la reacutegion de Grenoble constater au contraire que le marcheacute pertinent doit ecirctre deacutefini comme celui de la fourniture aux clients professionnels eacuteligibles ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute qui revecirct une dimension nationale constater degraves lors que la SEM GEG ne peut pas avoir deacutetenu une quelconque position dominante sur un tel marcheacute agrave leacutepoque des faits et na pu agrave plus forte raison abuser dune telle position En conseacutequence annuler la Deacutecision et ordonner le remboursement immeacutediat par le Treacutesor public de la somme de 320000 euros payeacutee par la SEM GEG en exeacutecution de la Deacutecision attaqueacutee assorti des inteacuterecircts au taux leacutegal agrave compter de larrecirct et avec application de larticle 1154 du Code civil A titre subsidiaire constater que le communiqueacute de presse publieacute dans laquo Le Dauphineacute Libeacutereacuteraquo agrave linitiative de la SEM GEG la eacuteteacute agrave deux reprises seulement entre le 13 et le 18 avril 2005 constater quil nest pas reprocheacute agrave la

Il ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 4egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

SEM GEG la diffusion dautres messages preacutetendument laquo deacutenigrants constater que ledit communiqueacute de presse a revecirctu une porteacutee tregraves limiteacutee et quil visait agrave reacutepondre de maniegravere circonstancieacutee aux pratiques commerciales commises en avril 2005 par des repreacutesentants commerciaux agissant pour le compte de Poweo qui avaient eacuteteacute jugeacutees critiquables par la SEM GEG sur le terrain de la concurrence deacuteloyale constater que la pratique reprocheacutee agrave la SEM GEG na eu aucun objet visant agrave laquo eacutevincerraquo Poweo du marcheacute en cause et que leffet anticoncurrentiel du communiqueacute de presse litigieux na pas eacuteteacute deacutemontreacute par lAutoriteacute constater quil nexiste aucun lien neacutecessaire entre la pratique limiteacutee reprocheacutee agrave la SEM GEG et la situation concurrentielle agrave Grenoble deacutecrite par lAutoriteacute constater que la pratique reprocheacutee agrave la SEM GEG ne pouvait ecirctre la cause de la preacutetendue eacuteviction de Poweo agrave Grenoble qui najamais eacuteteacute deacutemontreacutee par lAutoriteacute constater que la pratique reprocheacutee agrave la SEM GEG na pas davantage eu deffet de forclusion sur le marcheacute en cause en conseacutequence annuler la Deacutecision et ordonner le remboursement immeacutediat par le Treacutesor public de la somme de 320000 euros payeacutee par la SEM GEG en exeacutecution de la Deacutecision attaqueacutee assorti des inteacuterecircts au taux leacutegal agrave compter de larrecirct et avec application de larticle 1154 du Code civil A titre tregraves subsidiaire constater le caractegravere tregraves disproportionneacute des sanctions infligeacutees agrave la SEM GEG degraves lors que lAdlC na pas deacutemontreacute lexistence dun dommage agrave leacuteconomie ni mecircme la graviteacute des pratiques alleacutegueacutees reacuteformer la Deacutecision en conseacutequence Condamner la Ministre chargeacutee de leacuteconomie agrave payer la somme de 50000 euros pour frais irreacutepeacutetibles de proceacutedure et les entiers deacutepens

Vu les observations de lAutoriteacute de la concurrence en date du 5 novembre 2009

Vu les observations de Madame la Ministre chargeacutee de leacuteconomie en date du 20 novembre 2009

Vu le meacutemoire en reacuteplique de la SEM Gaz et Electriciteacute de Grenoble en date du 18 deacutecembre 2009 tendant aux mecircmes fins que le meacutemoire du 2 juin 2009

Vu les conclusions de Monsieur le Procureur Geacuteneacuteral en date du 26 janvier 2010

Ouiuml le conseil de la SEM Gaz et Electriciteacute de Grenoble et les repreacutesentants de lAutoriteacute de la concurrence et de Monsieur le Procureur Geacuteneacuteral agrave laudience du 2 feacutevrier 2010 la socieacuteteacute requeacuterante ayant pu reacutepliquer et eu la parole en dernier

SUR QUOI

A - Sur le respect de larticle 6 de la Convention ESDH et la dureacutee de la proceacutedure

Consideacuterant que la SEM GEG demande agrave la cour de dire et juger que le deacutelai de la proceacutedure devant lAutoriteacute na pas eacuteteacute raisonnable au sens de larticle 6 de la convention ESDH que la SEM GEG qualifie la dureacutee de la proceacutedure dexcessive au motifque linstruction a dureacute pregraves de quatre anneacutees (apregraves deux anneacutees eacutecouleacutees pour que le Rapporteur geacuteneacuteral deacutesigne deux Rapporteurs successifs) alors que laffaire eacutetait deacutenueacutee de toute complexiteacute autre que de pur droit et que les actes dinstruction nont pas eacuteteacute nombreux

Que ce deacutelai a porteacute atteinte aux droits de la SEM GEG car il a inducircment diffeacutereacute lexercice des droits de la deacutefense le deacutebat contradictoire ne pouvant exister quagrave compter de la notification de griefs et compte tenu du caractegravere essentiellement ponctuel et circonstancieacute de la pratique qui lui est reprocheacutee que concregravetement des collaborateurs ont quitteacute la SEM GEG pendant la longue peacuteriode denquecircte et ceci a rendu impossible la mise en place de la deacutefense de cette SEM devant l AdlC

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG ndeg 200909599 - 5egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Mais consideacuterant que le respect des droits de la deacutefense revecirctant une importance capitale dans les proceacutedures telles que celle en lespegravece il importe deacuteviter que ces droits puissent ecirctre irreacutemeacutediablement compromis notamment en raison dune dureacutee excessive de la phase denquecircte et que cette dureacutee soit susceptible de faire obstacle agrave leacutetablissement de preuves visant agrave reacutefuter lexistence de comportements de nature agrave engager la responsabiliteacute des entreprises concerneacutees que pour cette raison lexamen de leacuteventuelle entrave agrave lexercice des droits de la deacutefense ne doit pas ecirctre limiteacute agrave la phase mecircme dans laquelle ces droits produisent leur plein effet agrave savoir la seconde phase de la proceacutedure administrative que lappreacuteciation de la source de leacuteventuel affaiblissement de lefficaciteacute des droits de la deacutefense doit seacutetendre agrave lensemble de cette proceacutedure en se reacutefeacuterant agrave la dureacutee totale de celle-ci enquecircte comprise que pour autant la dureacutee excessive de la proceacutedure ne peut ecirctre deacutetermineacutee en soi de maniegravere abstraite

Quen lespegravece une dureacutee de trois ans et demi ne peut ecirctre consideacutereacutee comme excessive au sens de la Convention europeacuteenne de sauvegarde des droits de 1 homme si la socieacuteteacute requeacuterante ne deacutemontre pas en quoi in concreto elle aurait eacuteteacute priveacutee du droit de se deacutefendre

Quagrave ce sujet il peut ecirctre constateacute quapregraves une saisine intervenue le 12juillet 2005 agrave linitiative de la Commission de reacutegulation de leacutenergie le preacutesident de la SEM GEG a eacuteteacute entendu par le rapporteur le 10 juillet 2007 en lui donnant connaissance de la lettre de saisine que la SEM GEG a disposeacute eacutegalement des deacutelais preacutevus par larticle L 463-2 du code de commerce pour faire valoir ses observations quil ne reacutesulte daucune deacutemonstration et mecircme daucune assertion claire de la requeacuterante quelle nait pas pu preacuteparer de maniegravere satisfaisante sa deacutefense devant lAutoriteacute puis devant la cour quelle invoque mais ne prouve pas une impossibiliteacute de recueillir des teacutemoignages agrave deacutecharge notamment du fait des changements susceptibles dintervenir dans la composition des organes dirigeants des entreprises concerneacutees et des mouvements affectant les autres personnels de celles-ci quelle na pas agrave deacuteplorer non plus la perte des documents commerciaux ou internes des notes ou courriers-papier les courriels et comptes-rendus de conversations teacuteleacutephoniques dont la destruction aurait eacuteteacute deacutecideacutee apregraves un temps bref en quoi la SEM GEG napporte aucun eacuteleacutement seacuterieux preacutecis et concret dune violation de ses droits de la deacutefense

Que le moyen sera rejeteacute

B - Sur la deacutefinition du marcheacute pertinent

Consideacuterant que la SEM GEG relegraveve que le marcheacute de produits retenu par lAutoriteacute est celui de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels eacuteligibles que pourtant le marcheacute des clients professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute cest-agrave-dire le marcheacute ouvert agrave la concurrence le la juillet 2004 doit seul ecirctre pris en consideacuteration la clientegravele eacutetant cloisonneacutee selon le type doffre (tarif reacuteglementeacute ou prix du marcheacute) quelle a choisi et une faible part ayant choisi le marcheacute en raison dun effet de ciseau que la SEM GEG sappuie agrave ce titre sur la deacutecision n0 07-MC-Ol dans laquelle le Conseil de la concurrence a retenu que lirreacuteversibiliteacute du passage vers les offres de marcheacute eacutetait lun des principaux eacuteleacutements permettant de deacutefinir un marcheacute distinct de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute

Que sagissant du marcheacute geacuteographique si lAutoriteacute la deacutefini comme local la SEM GEG entend deacutemontrer que celui-ci est national car la reacuteglementation libeacuteralisant le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute est national et les conditions - et les opeacuterateurs (dont Poweo) - de commercialisation de leacutelectriciteacute sont les mecircmes sur lensemble du territoire

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG na 200909599 - 6egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Mais consideacuterant sur le marcheacute de produits que le marcheacute se deacutefinit comme le lieu sur lequel se rencontrent loffre et la demande pour un produit ou un service speacutecifique que sur un marcheacute donneacute les uniteacutes offertes sont parfaitement substituables pour les consommateurs qui peuvent ainsi arbitrer entre les offreurs lorsquil y en a plusieurs ce qui implique que chaque offreur est soumis agrave la concurrence par les prix des autres

Que le 1 er juillet 2004 les clients petits professionnels se sont vu reconnaicirctre le droit dacheter de leacutelectriciteacute aupregraves du fournisseur de leur choix tout en conservant la possibiliteacute de continuer agrave sapprovisionner aupregraves de leur fournisseur historique et de beacuteneacuteficier de la part de celui-ci des tarifs reacuteglementeacutes fixeacutes par lEtat que de feacutevrier agrave avril 2005 des clients de la SEM GEG ont quitteacute le fournisseur historique au profit du fournisseur alternatif ce qui deacutemontre quil existait agrave ce moment de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute agrave la concurrence une substituabiliteacute entre les services offerts par la SEM GEG et Poweo et quen conseacutequence ces deux entreprises intervenaient sur le mecircme marcheacute

Consideacuterant que du tout il seacutevince comme la affirmeacute la Deacutecision (parag 40 agrave 51) que le marcheacute pertinent est bien le marcheacute de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels et non le marcheacute des seuls professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute

Consideacuterant en outre sur le marcheacute geacuteographique que le marcheacute geacuteographique comprend le territoire sur lequel les entreprises concerneacutees sont engageacutees dans loffre des biens et services en cause sur lequel les conditions de concurrence sont suffisamment homogegravenes et qui peut ecirctre distingueacute de zones geacuteographiques voisines parce que en particulier les conditions de concurrence y diffegraverent de maniegravere appreacuteciable

Quen lespegravece les clients professionnels situeacutes dans la zone de desserte de la SEM GEG ne peuvent acheter de leacutelectriciteacute quaupregraves de la SEM GEG fournisseur exclusif deacutelectriciteacute au tarif reacuteglementeacute sur sa zone ou aupregraves de fournisseurs alternatifs deacutelectriciteacute au prix de marcheacute qui ont conclu un contrat daccegraves au reacuteseau de distribution geacutereacute en monopole par la SEM GEG pour acheminer leur eacutelectriciteacute jusquau client final quil en reacutesulte quils ne peuvent se procurer de leacutelectriciteacute quagrave linteacuterieur de la zone geacuteographique couverte par le distributeur non nationaliseacute

Consideacuterant quen conseacutequence le marcheacute pertinent est la zone desservie par le reacuteseau de distribution de leacutelectriciteacute de Grenoble que le moyen contraire de la SEM GEG sera rejeteacute

C - Sur lexistence dune position dominante

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie avoir occupeacute sur le marcheacute tel quelle la consideacutereacute une position dominante au moment des faits puisquelle gegravere et fournit 059 pl 00 en volume et 067 pl 00 des sites que sa position dopeacuterateur preacutetenducircment historique a de toute faccedilon eacuteteacute aneacuteantie par louverture du marcheacute agrave la concurrence eacutevolution sur laquelle la Deacutecision est demeureacutee taisante

Mais consideacuterant que comme il a eacuteteacute eacutenonceacute preacuteceacutedemment le marcheacute pertinent nest pas celui que preacutetend la SEM GEG en sorte que son raisonnement devant la cour est neacutecessairement vicieacute

Consideacuterant par ailleurs que le marcheacute de la fourniture deacutelectriciteacute nayant eacuteteacute ouvert agrave la concurrence que le 1er juillet 2004 et la SEM GEG deacutetenant jusquagrave cette date un monopole sur ce marcheacute la reacutepartition des parts de marcheacute navait pas sensiblement eacutevolueacute au moment des faits en avril 2005 puisque seule la socieacuteteacute POWEO avait pris des initiatives (cf Deacutecision parag 55)

ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 Cour dAppel de Paris

RG na 200909599 - 7egraveme page

Que lors dune audition dun responsable de la SEM GEGle 10 juillet 2007 il a eacuteteacute eacutetabli que la part de marcheacute de la SEM GEG seacutelevait agrave 80 quil neacutetait donc pas anormal pour lAdlC de consideacuterer que cette part ait eacuteteacute plus importante au moment des faits deux ans plus tocirct agrave un moment ougrave louverture du marcheacute eacutetait balbutiante

Consideacuterant quen conseacutequence lexistence dune position dominante de la SEM GEG sur le marcheacute local de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles est aveacutereacutee et que le moyen de la requeacuterante de ce chef sera rejeteacute

Consideacuterant pour reacutepondre complegravetement aux arguties de la requeacuterante et relativement agrave la perte juridique de position monopolistique de la SEM GEG que quand bien mecircme louverture agrave la concurrence dun monopole entraicircne neacutecessairement une perte de parts de marcheacute pour lopeacuterateur historique une analyse concregravete peut permettre de constater toutefois que lopeacuterateur historique conserve une position de monopole de fait ou de quasi-monopole du fait de sa notorieacuteteacute par exemple quen loccurrence lAutoriteacute eacutetait fondeacutee agrave relever que la position dominante de la SEM GEG ne pouvait quecirctre renforceacutee par sa notorieacuteteacute dopeacuterateur historique aux yeux des clients eacuteligibles et par son monopole sur les marcheacutes connexes de la distribution deacutelectriciteacute et de fourniture deacutelectriciteacute aux clients reacutesidentiels et sur lactiviteacute gaziegravere quen teacutemoigne le fait que degraves 2006 elle a pu restaurer sa position de monopoleur comme il sera dit plus loin

D - Sur la pratique de deacutenigrement constitutive de labus de position dominante

Consideacuterant que la SEM GEG affirme que les communiqueacutes de presse litigieux dailleurs tregraves peu nombreux nont eu aucun objet anticoncurrentiel ne relegraveveraient au pire que de laction en reacuteparation pour concurrence deacuteloyale mais nont mecircme pas eu de caractegravere de deacutenigrement que la cour en jugerait-elle autrement agrave linstar de lAdIC tout deacutenigrement dont une entreprise en position dominante serait lauteur nest pas neacutecessairement constitutif dun abus de position dominante quil est toujours neacutecessaire deacutetablir un lien entre la domination de lentreprise et la pratique de deacutenigrement que sous cet angle la SEM GEG avance que le communiqueacute de presse litigieux ne consistait quagrave deacutementir les informations fausses ou deacuteloyales diffuseacutees par certains agents commerciaux mandateacutes par Poweo apregraves leacutechec dune deacutemarche amiable en forme de mise en demeure cinq j ours avant le premier des deux communiqueacutes de presse que le discreacutedit ne pouvait pas ecirctre qualifieacute de systeacutematique puisque la reacuteaction de la SEM GEG eacutetait ponctuelle et circonstancieacutee Poweo ne contestant pas que la pratique a cesseacute degraves le deacutebut de la proceacutedure judiciaire dindemnisation le 22 avril 2005 quenfin la SEM GEG conteste la confusion qui lui est reprocheacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees dans le secteur ouvert agrave la concurrence en sorte que le lien de causaliteacute entre la position dite dominante et le deacutenigrement nexiste pas et ne peut deacutegeacuteneacuterer en abus

Mais consideacuterant en premier lieu que lAutoriteacute de la concurrence a veilleacute agrave souligner que labus de position dominante ne se confond pas avec une pratique de concurrence deacuteloyale quen effet alors que laction en concurrence deacuteloyale protegravege les concurrents la sanction de labus de position dominante vise agrave proteacuteger lordre public eacuteconomique en sorte dailleurs que labsence de POWEO aux deacutebats devant la cour ne preacutesente strictement aucun inconveacutenient quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement aux assertions de la requeacuterante il faut rappeler quen matiegravere dabus de position dominante les comportements fautifs de lentreprise au regard des dispositions geacuteneacuterales de larticle 1382 du code civil constituent des abus de position dominante

Consideacuterant en deuxiegraveme lieu que le communiqueacute de presse litigieux contenait des mentions de deacutenigrement agrave leacutegard de Poweo nouvel entrant sur le marcheacute que ce communiqueacute faisait eacutetat de laquoconception de la qualiteacute de services tregraves relative raquo de l ( usage de meacutethodes peu scrupuleusesraquo et de la poursuite de laquo fins strictement financiegraveresraquo que certaines mentions eacutetaient en outre de nature agrave induire les clients eacuteligibles en erreur dans la mesure ougrave il eacutetait indiqueacute que laquocet opeacuterateur annonce agrave tort quil a conclu un partenariat

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 8egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

avec la SEM GEG raquo alors que Poweo avait effectivement conclu un contrat daccegraves au reacuteseau de distribution le 5 janvier 2005

Consideacuterant en troisiegraveme lieu sur le lien entre position dominante et deacutenigrement que plusieurs eacuteleacutements agrave juste titre releveacutes par la Deacutecision leacutetablissent

Que le communiqueacute de presse a constitueacute un argumentaire des agents commerciaux de la SEM GEG pour inciter des clients qui avaient souscrit un contrat avec Poweo agrave le reacutesilier et agrave renouer avec le seul autre opeacuterateur la SEM GEG que le communiqueacute litigieux a ainsi eacuteteacute non pas un acte isoleacute mais le point de deacutepart dune contre-offensive fondeacutee sur un deacutenigrement systeacutematique et destineacutee agrave affaiblir le concurrent et qui neacutetait concregravetement possible que pour un opeacuterateur en position dominante

Que ce faisant la SEM GEG a profiteacute du caractegravere tregraves reacutecent de louverture du marcheacute agrave la concurrence (la juillet 2004 soit agrave peine neufmois auparavant) et a pu user de la notorieacuteteacute et de limage encore preacutesentes aux esprits lieacutees agrave lactiviteacute de monopole geacuterant un service public

Que cette analyse est corroboreacutee par les chiffres reacuteunis en annexe au procegraves-verbal daudition du responsable de la SEM GEG devant le Rapporteur de lAutoriteacute qui fait apparaicirctre en tenant compte du temps-retard des souscriptions et des reacutesiliations que le nombre de contrats passeacutes par des clients avec Poweo a augmenteacute tregraves fortement en mars et avril 2005 mais na cesseacute de deacutecroicirctre ensuite comme il sera redit par la cour agrave propos des effets des pratiques en sorte que la SEM GEG a retrouveacute finalement sa position historique

Consideacuterant en quatriegraveme lieu que le deacutenigrement eacutetait dautant plus rechercheacute que les fOlmulations du communiqueacute de presse semblaient preacutesenter Poweo cornnle incapable dassumer la fonction de distributeur alors que cette socieacuteteacute na jamais preacutetendu agrave cette fonction et ne laurait leacutegalement pas pu que de mecircme et encore le communiqueacute nie tout partenariat entre la SEM GEG et Poweo alors quun contrat les liait depuis janvier 2005 comme il a eacuteteacute eacutenonceacute preacuteceacutedemment

Consideacuterant que du tout il reacutesulte que les communiqueacutes litigieux ont constitueacute en eux-mecircmes et par lusage ulteacuterieur qui en a eacuteteacute fait un deacutenigrement adosseacute agrave la position dominante de la SEM GEG et constitutif par conseacutequent dun abus de cette position

E - Sur les effets des pratiques

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie la pertinence de lanalyse juridique de lAutoriteacute selon laquelle les pratiques ont eu agrave la fois pour objet et pour effet dentraver le deacuteveloppement dun concurrent et de le deacutecider agrave mettre un terme agrave son action commerciale agrave Grenoble

Quen fait selon la socieacuteteacute GEG lAutoriteacute ne peut pas se contenter de mentionner le nombre de contrats signeacutes par Poweo resteacute stable (autour de 190)jusquenjanvier 2006 quagrave supposer que la progression se soit affaiblie agrave compter des publications du communiqueacute de presse dautres facteurs peuvent expliquer ce fait preacutetendu notamment (i) le communiqueacute de presse na eu quune porteacutee limiteacutee (caractegravere limiteacute dans le temps et caractegravere geacuteneacuteral contrairement au deacutemarchage cibleacute de POWEO) (ii) POWEO a modifieacute sa strateacutegie commerciale (arrecirct des deacutemarchages et prospections) (iii) les prix de gros de leacutelectriciteacute ont fortement augmenteacute et ont deacutepasseacute les tarifs reacuteglementeacutes rendant peu inteacuteressante la conclusion dun contrat avec un opeacuterateur alternatif ( ciseau tarifaire) (iv) POWEO a manifesteacute sa volonteacute de se deacutesengager de la fourniture (marcheacute aval) pour se concentrer sur la production deacutelectriciteacute (marcheacute amont)

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Quen outre la SEM GEG se fonde surle nombre de points de service alimenteacutes par Poweo cest~agrave-dire les sites de livraison aux clients eacuteligibles quelle estime ecirctre lindicateur le plus pertinent pour mesurer le poids respectif des diffeacuterents acteurs que ce nombre est passeacute trois mois apregraves la publication du communiqueacute de presse de 15 agrave 190 (tableau GEG parag222 p41) que par ailleurs la SEM GEG affirme que la pratique na pas pu avoir deffet deacuteviction car le message commercial na eacuteteacute diffuseacute quagrave deux reprises que le nombre de reacutesiliations eacutetabli agrave 27 sur 190 contrats signeacutes est faible et la preuve na pas eacuteteacute apporteacutee que les agents commerciaux de la SEM GEG auraient relayeacute sur le terrain les eacuteleacutements deacutenigrants du communiqueacute de presse que la SEM GEG en conclut quil nexiste donc aucun lien neacutecessaire entre la publication du communiqueacute de presse et la preacutetendue sortie du marcheacute de POWEO

Que sur leffet de forclusion la SEM GEG avance quil existe dautres fournisseurs alternatifs sur le marcheacute de Grenoble quainsi GDF est le premier fournisseur agrave Grenoble en offre de marcheacute

Quen somme comme en teacutemoigne la pratique deacutecisionnelle de lAutoriteacute il nest plus permis darticuler des preacutesomptions sur les effets des pratiques et en lespegravece aucune deacutemonstration nest faite par la Deacutecision

Mais consideacuterant quen droit lAutoriteacute avait bien pour mission de rechercher leffet anticoncurrentiel des pratiques de la SEM GEG au sens de larticle L 420-2 Ccom

Que la recherche de leffet anticoncurrentiel de la pratique poursuivie est preacutesenteacutee par la SEM GEG tantocirct comme le but poursuivi concregravetement par la SEM GEG auquel cas lanalyse se confond avec celle de labus meneacutee preacuteceacutedemment par la cour tantocirct comme le ressort essentiel du comportement (pratique anticoncurrentielle per se) auquel cas la conjonction OU queacutenonce la loi indique que leffet anticoncurrentiel suffit agrave consacrer le grief poursuivi

Consideacuterant quen fait lAutoriteacute a pu relever la concomitance entre la publication agrave deux reprises du communiqueacute de presse les 13 et 18 avril 2005 et la baisse du nombre de contrats signeacutes par Poweo quapregraves correction tenant au deacutecalage entre la date de souscription des contrats et celle de prise deffet des changements de fournisseur le nombre de contrats signeacutes a eacutevolueacute de la maniegravere suivante Ont eacuteteacute signeacutes par Poweo en feacutevrier 2005 un contrat en mars 14 en avril 107 puis en mai 68 en juin 0 et en juillet et au delagrave aucun contrat que du 17 avril au 17 mai 2005 la socieacuteteacute Poweo a reccedilu 36 lettres de reacutesiliation dont 27 eacutetaient comme la SEM GEG nen disconvient pas identiques en la forme et une envoyeacutee des locaux de la SEM GEG elle-mecircme quenfin la socieacuteteacute Poweo na conclu aucun nouveau contrat entre juin 2005 et juin 2008 quen somme elle na pu conserver une bonne part des contrats dorigine que par le jeu de lirreacuteversibiliteacute leacutegale deacutecrite preacuteceacutedemment

Consideacuterant que degraves lors lAutoriteacute a pu agrave bon droit relever les effets anticoncurrentiels des pratiques de la SEM GEG contrairement agrave ce que celle-ci soutient

F - Sur leacutevaluation de la sanction

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie que les pratiques incrimineacutees aient preacutesenteacute un degreacute significatif de graviteacute

Quelle estime aussi que les pratiques nont pas occasionneacute un quelconque dommage agrave leacuteconomie quelle indique plus en deacutetail que Gaz de France a reacuteussi agrave simplanter pendant la peacuteriode incrimineacutee et agrave devenir le premier fournisseur en offre de

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG ndeg 200909599 - 10egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

marcheacute agrave Grenoble que le surplus du consommateur na pas eacuteteacute significativement affecteacute par les pratiques litigieuses comme leacutenonce la Deacutecision elle-mecircme que le ciseau tarifaire eacutetait la seule question qui se posait reacuteellement et qui a conduit agrave la preacutetendue eacuteviction de Poweo

Quelle rappelle au titre de lindividualisation de la sanction quelle dispose dune faible surface financiegravere

Mais consideacuterant sur la graviteacute du comportement que celle-ci ne se confond pas avec la reacutealiteacute de labus de position dominante examineacutee preacuteceacutedemment mais doit proceacuteder dune anal yse des meacutethodes utiliseacutees par la S EM G EG pour parvenir agrave ses fins dune mesure des parts de marcheacute que deacutetient lentreprise poursuivie dun examen de la dureacutee du comportement anticoncurrentiel de leacutetendue ou la complexiteacute des processus anticoncurrentiels de laffectation directe des prix jusques et y compris les prix de deacutetail dune analyse des marcheacutes concerneacutes selon quil sagit de marcheacutes sensibles ou qui le sont moins de marcheacutes touchant directement le consommateur final ou pas de lidentification de clients personnes physiques ou petites entreprises ou de clients vulneacuterables (enfants personnes acircgeacutees malades ) ou dune clientegravele captive au sens eacuteconomique de la continuation du comportement anticoncurrentiel apregraves la saisine de lAutoriteacute ou encore du fait quil sagisse dun marcheacute public

Quen lespegravece lAutoriteacute a pu retenir tour agrave tour que la SEM GEG a opeacutereacute une confusion deacutelibeacutereacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees en concurrence (DeacutecO sect 70 suiv deacutejagrave examineacutes plus haut) que le discours deacutenigrant du communiqueacute de presse est particuliegraverement reacutepreacutehensible car il provient de lopeacuterateur historique (DeacutecO sect 91) que les pratiques nont pas eacuteteacute instantaneacutees puisquelles ont eacuteteacute preacuteceacutedeacutees de courriers (DeacutecO sect 94) et suivies de deacutemarchages aupregraves des anciens clients pour regagner leur confiance

Quil faut ajouter que les pratiques incrimineacutees ont eu pour but dentraver le deacuteveloppement dun concurrent sur le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles de Grenoble au moment crucial et symbolique de louverture agrave la concurrence

Que reacuteciproquement il ne peut ecirctre reprocheacute agrave lAutoriteacute de ne pas avoir tenu compte des facteurs habituels datteacutenuation qui eacutetaient eacutetrangers agrave lespegravece tels que lancienneteacute des faits - la saisine de lAutoriteacute ayant eacuteteacute immeacutediate - la cessation du comportement anticoncurrentiel agrave partir de la saisine de lAutoriteacute - labandon du marcheacute par Poweo ayant restaureacute la position de monopoleur de la SEM GEG - ou le pouvoir de marcheacute de Poweo - tout-agrave-fait modeste ainsi quil a eacuteteacute dit -

Que degraves lors il ne peut ecirctre fait aucun reproche agrave la Deacutecision ni en droit ni en fait dans lexamen de la graviteacute du comportement

Consideacuterant encore sur le dommage causeacute agrave leacuteconomie que lAutoriteacute a pu valablement caracteacuteriser une probabiliteacute raisonnable de dommage collectif

Que la proceacutedure a deacutemontreacute que la SEM GEG a empecirccheacute louverture du marcheacute agrave la concurrence en reacuteduisant le nombre des opeacuterateurs au point que cette entreprise a pu revenir agrave la situation qui eacutetait la sienne avant le 1 er juillet 2004 soit anteacuterieurement agrave louverture du marcheacute agrave la concurrence en restaurant sa position de monopoleur

Que cependant comme le reconnaicirct agrave juste titre la Deacutecision ce dommage a eacuteteacute limiteacute agrave la zone de desserte de Grenoble

Que lAutoriteacute a pris soin encore deacutecarter expresseacutement le facteur important dit daffectation significative du surplus du consommateur quen effet si la SEM GEG sest retrouveacutee en position de monopole de fait sur le marcheacute pertinent apregraves le retrait de Poweo elle neacutetait pas libre den profiter et de pratiquer tes prix de monopole car elle devait

ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 11egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7 1

appliquer le tarif reacuteglementeacute fixeacute par la puissance publique que de plus au vu des conditions du marcheacute libre de leacutelectriciteacute linteacuterecirct de la clientegravele de masse sauf bouleversement des prix de marcheacute [eacutetait] de rester aux tarifs reacuteglementeacutes (DeacutecO sect 97 suiv) notamment en raison du ciseau tarifaire tel quil a eacuteteacute exposeacute preacuteceacutedemment

Que reacuteciproquement lAutoriteacute na tireacute aucun argument dautres facteurs significatifs du dommage agrave leacuteconomie na notamment pas exageacutereacute leacutetendue du marcheacute affecteacute par le comportement anticoncurrentiel ni les perturbations du marcheacute

Que lAutoriteacute admet eacutegalement les rapports dactiviteacute de la CRE depuis 2005 qui font eacutetat de la stagnation du rythme de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute pour les clients professionnels et ce sur lensemble du territoire national que lAutoriteacute nimpute pas labsence dopeacuterateurs alternatifs en tout cas jusquagrave larriveacutee de ODF sur le marcheacute aux pratiques de la SEM GEG

Quenfin lAutoriteacute na pas neacutegligeacute de tenir compte de ce que Poweo na pas deacuteposeacute plainte devant lAutoriteacute de la concurrence pour abus de position dominante le Rapporteur ayant meneacute son instruction sur la seule saisine de la CRE et de ce que Poweo ne sest pas non plus jointe agrave la proceacutedure par la suite quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement agrave un argument de la SEM GEO lAutoriteacute de la concurrence dans sa mission de protection des consommateurs na pas besoin de lappui ou de lassentiment des concurrents moyennant quoi la reacuteparation accordeacutee auxdits concurrents par les voies de droit commun na pas dinfluence sur la proceacutedure de reacutegulation punitive et preacuteventive fondeacutee sur lordre public eacuteconomique

Quen somme loin dexageacuterer le dommage agrave leacuteconomie occasionneacute par le comportement poursuivi et apregraves avoir reacutepondu point par point aux arguments de Poweo lAutoriteacute a fait de ce dommage une analyse tregraves pondeacutereacutee que la cour approuve

Consideacuterant enfin sagissant de lindividualisation de la sanction (sect 104 agrave 106) et que lAutoriteacute de la concurrence a preacuteciseacute que le chiffre daffaires consolideacute de la SEM OEG avait atteint en 2007 124645 millions deuros avec pour conseacutequence que le montant maximum de la sanction encourue seacutelegraveve agrave 12 500 000 euro que ces consideacuterations sont incontestables et incontesteacutees et quelles incluent neacutecessairement leacutevaluation de la capaciteacute contributive de la SEM GEG qui na pas traverseacute agrave leacutepoque des faits poursuivis ni posteacuterieurement des difficulteacutes particuliegraveres qui commanderaient une autre analyse

Quagrave titre superfeacutetatoire mais sans inexactitude il a eacuteteacute tenu compte par lAutoriteacute du fait que les ventes deacutelectriciteacute reacutealiseacutees par la SEM GEO nont cesseacute de progresser entre 2004 et 2007 pour atteindre 64 261 401 euros en 2007

Quenfin il ny a pas lieu de tenir compte de lindemnisation provisionnelle accordeacutee agrave Poweo par la juridiction commerciale pour les raisons susdites

Consideacuterant quayant ainsi proceacutedeacute sans erreur agrave lanalyse de la graviteacute de la pratique anticoncurrentielle ayant ensuite eacutevalueacute avec pondeacuteration le dommage agrave leacuteconomie et ayant preacuteciseacutement examineacute les facteurs dindividualisation de la sanction lAutoriteacute a exactement proportionneacute celle-ci agrave une hauteur dagrave peine trois pour mille du meilleur chiffre daffaires annuel de la peacuteriode consideacutereacutee que la demande de reacuteformation de la SEM GEG est manifestement infondeacutee

PAR CES MOTIFS

Rejette le recours

ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RO ndeg 200909599 - 12egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Condamne la SEM GEG aux deacutepens

LE [REFFIER

Thierry FOSSIER

Cour dAppel de Paris ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 RG nO 200909599 - 13egraveme page

La SEM GEG et Poweo ont conclu un accord afin de reacutegler les suites de cette proceacutedure judiciaire accord dont le contenu demeurait au j our de la deacutecision de lAutoriteacute secret

Le grief notifieacute

Le Conseil de la concurrence a estimeacute que ce communiqueacute de presse pouvait viser agrave critiquer de faccedilon systeacutematique Poweo ainsi quagrave valoriser la SEM GEG au deacutetriment de ses concurrents tout en entretenant une confusion entre les activiteacutes de fournisseur de la SEM GEG - soumises agrave concurrence - et celles de distribution pour lesquelles la SEM GEG conserve de droit un monopole

Le 14 mai 2008 sur le fondement de larticle L 420-2 du Code de commerce le Rapporteur du Conseil a fait grief agrave la SEM GEG davoir laquo abuseacute de sa position dominante sur le marcheacute de leacutelectriciteacute agrave lusage des professionnels sur la zone de desserte de Grenoble en se livrant courant 2005 et notamment par voie de presse agrave des pratiques de deacutenigrement agrave lencontre de son concurrent Poweo et en associant agrave ces pratiques la diffusion dune communication institutionnelle entretenant la confusion entre ses activiteacutes de distributeur exerceacutees dans le cadre du service public et celles de fournisseur soumises agrave la concurrence raquo Ces pratiques auraient eu pour objet ou pour effet de limiter laccegraves de Poweo au marcheacute de leacutelectriciteacute agrave lusage des clients professionnels

La sanction

Sur le rapport de son Rapporteur geacuteneacuteral en date du 3 novembre 2008 lAutoriteacute de la concurrence a infligeacute une sanction peacutecuniaire de 320000 euros agrave la SEM GEG pour avoir enfreint les dispositions de larticle L 420-2 du Code de commerce

LACOUR

Vu la Deacutecision nO 09-D-14 de lAutoriteacute de la concurrence en date du 25 mars 2009 (ltlt la Deacutecision raquo) relative agrave des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la fourniture deacutelectriciteacute

Vu le meacutemoire eacutetabli et deacuteposeacute au greffe le 2 juin 2009 par la SEM Gaz et Electriciteacute de Grenoble au soutien de sa deacuteclaration de recours demandant agrave la cour de

Dire et juger que le deacutelai de la proceacutedure devant lAutoriteacute na pas eacuteteacute raisonnable au sens de larticle 6 de la convention ESDH En conseacutequence annuler la Deacutecision et ordonner le remboursement immeacutediat par le Treacutesor public de la somme de 320000 euros payeacutee par la SEM GEG en exeacutecution de la Deacutecision attaqueacutee assorti des inteacuterecircts au taux leacutegal agrave compter de larrecirct et avec application de larticle 1154 du Code civil Sur le fond constater que lAutoriteacute a commis une erreur de droit en limitant le marcheacute pertinent agrave celui de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels eacuteligibles dans la reacutegion de Grenoble constater au contraire que le marcheacute pertinent doit ecirctre deacutefini comme celui de la fourniture aux clients professionnels eacuteligibles ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute qui revecirct une dimension nationale constater degraves lors que la SEM GEG ne peut pas avoir deacutetenu une quelconque position dominante sur un tel marcheacute agrave leacutepoque des faits et na pu agrave plus forte raison abuser dune telle position En conseacutequence annuler la Deacutecision et ordonner le remboursement immeacutediat par le Treacutesor public de la somme de 320000 euros payeacutee par la SEM GEG en exeacutecution de la Deacutecision attaqueacutee assorti des inteacuterecircts au taux leacutegal agrave compter de larrecirct et avec application de larticle 1154 du Code civil A titre subsidiaire constater que le communiqueacute de presse publieacute dans laquo Le Dauphineacute Libeacutereacuteraquo agrave linitiative de la SEM GEG la eacuteteacute agrave deux reprises seulement entre le 13 et le 18 avril 2005 constater quil nest pas reprocheacute agrave la

Il ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 4egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

SEM GEG la diffusion dautres messages preacutetendument laquo deacutenigrants constater que ledit communiqueacute de presse a revecirctu une porteacutee tregraves limiteacutee et quil visait agrave reacutepondre de maniegravere circonstancieacutee aux pratiques commerciales commises en avril 2005 par des repreacutesentants commerciaux agissant pour le compte de Poweo qui avaient eacuteteacute jugeacutees critiquables par la SEM GEG sur le terrain de la concurrence deacuteloyale constater que la pratique reprocheacutee agrave la SEM GEG na eu aucun objet visant agrave laquo eacutevincerraquo Poweo du marcheacute en cause et que leffet anticoncurrentiel du communiqueacute de presse litigieux na pas eacuteteacute deacutemontreacute par lAutoriteacute constater quil nexiste aucun lien neacutecessaire entre la pratique limiteacutee reprocheacutee agrave la SEM GEG et la situation concurrentielle agrave Grenoble deacutecrite par lAutoriteacute constater que la pratique reprocheacutee agrave la SEM GEG ne pouvait ecirctre la cause de la preacutetendue eacuteviction de Poweo agrave Grenoble qui najamais eacuteteacute deacutemontreacutee par lAutoriteacute constater que la pratique reprocheacutee agrave la SEM GEG na pas davantage eu deffet de forclusion sur le marcheacute en cause en conseacutequence annuler la Deacutecision et ordonner le remboursement immeacutediat par le Treacutesor public de la somme de 320000 euros payeacutee par la SEM GEG en exeacutecution de la Deacutecision attaqueacutee assorti des inteacuterecircts au taux leacutegal agrave compter de larrecirct et avec application de larticle 1154 du Code civil A titre tregraves subsidiaire constater le caractegravere tregraves disproportionneacute des sanctions infligeacutees agrave la SEM GEG degraves lors que lAdlC na pas deacutemontreacute lexistence dun dommage agrave leacuteconomie ni mecircme la graviteacute des pratiques alleacutegueacutees reacuteformer la Deacutecision en conseacutequence Condamner la Ministre chargeacutee de leacuteconomie agrave payer la somme de 50000 euros pour frais irreacutepeacutetibles de proceacutedure et les entiers deacutepens

Vu les observations de lAutoriteacute de la concurrence en date du 5 novembre 2009

Vu les observations de Madame la Ministre chargeacutee de leacuteconomie en date du 20 novembre 2009

Vu le meacutemoire en reacuteplique de la SEM Gaz et Electriciteacute de Grenoble en date du 18 deacutecembre 2009 tendant aux mecircmes fins que le meacutemoire du 2 juin 2009

Vu les conclusions de Monsieur le Procureur Geacuteneacuteral en date du 26 janvier 2010

Ouiuml le conseil de la SEM Gaz et Electriciteacute de Grenoble et les repreacutesentants de lAutoriteacute de la concurrence et de Monsieur le Procureur Geacuteneacuteral agrave laudience du 2 feacutevrier 2010 la socieacuteteacute requeacuterante ayant pu reacutepliquer et eu la parole en dernier

SUR QUOI

A - Sur le respect de larticle 6 de la Convention ESDH et la dureacutee de la proceacutedure

Consideacuterant que la SEM GEG demande agrave la cour de dire et juger que le deacutelai de la proceacutedure devant lAutoriteacute na pas eacuteteacute raisonnable au sens de larticle 6 de la convention ESDH que la SEM GEG qualifie la dureacutee de la proceacutedure dexcessive au motifque linstruction a dureacute pregraves de quatre anneacutees (apregraves deux anneacutees eacutecouleacutees pour que le Rapporteur geacuteneacuteral deacutesigne deux Rapporteurs successifs) alors que laffaire eacutetait deacutenueacutee de toute complexiteacute autre que de pur droit et que les actes dinstruction nont pas eacuteteacute nombreux

Que ce deacutelai a porteacute atteinte aux droits de la SEM GEG car il a inducircment diffeacutereacute lexercice des droits de la deacutefense le deacutebat contradictoire ne pouvant exister quagrave compter de la notification de griefs et compte tenu du caractegravere essentiellement ponctuel et circonstancieacute de la pratique qui lui est reprocheacutee que concregravetement des collaborateurs ont quitteacute la SEM GEG pendant la longue peacuteriode denquecircte et ceci a rendu impossible la mise en place de la deacutefense de cette SEM devant l AdlC

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG ndeg 200909599 - 5egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Mais consideacuterant que le respect des droits de la deacutefense revecirctant une importance capitale dans les proceacutedures telles que celle en lespegravece il importe deacuteviter que ces droits puissent ecirctre irreacutemeacutediablement compromis notamment en raison dune dureacutee excessive de la phase denquecircte et que cette dureacutee soit susceptible de faire obstacle agrave leacutetablissement de preuves visant agrave reacutefuter lexistence de comportements de nature agrave engager la responsabiliteacute des entreprises concerneacutees que pour cette raison lexamen de leacuteventuelle entrave agrave lexercice des droits de la deacutefense ne doit pas ecirctre limiteacute agrave la phase mecircme dans laquelle ces droits produisent leur plein effet agrave savoir la seconde phase de la proceacutedure administrative que lappreacuteciation de la source de leacuteventuel affaiblissement de lefficaciteacute des droits de la deacutefense doit seacutetendre agrave lensemble de cette proceacutedure en se reacutefeacuterant agrave la dureacutee totale de celle-ci enquecircte comprise que pour autant la dureacutee excessive de la proceacutedure ne peut ecirctre deacutetermineacutee en soi de maniegravere abstraite

Quen lespegravece une dureacutee de trois ans et demi ne peut ecirctre consideacutereacutee comme excessive au sens de la Convention europeacuteenne de sauvegarde des droits de 1 homme si la socieacuteteacute requeacuterante ne deacutemontre pas en quoi in concreto elle aurait eacuteteacute priveacutee du droit de se deacutefendre

Quagrave ce sujet il peut ecirctre constateacute quapregraves une saisine intervenue le 12juillet 2005 agrave linitiative de la Commission de reacutegulation de leacutenergie le preacutesident de la SEM GEG a eacuteteacute entendu par le rapporteur le 10 juillet 2007 en lui donnant connaissance de la lettre de saisine que la SEM GEG a disposeacute eacutegalement des deacutelais preacutevus par larticle L 463-2 du code de commerce pour faire valoir ses observations quil ne reacutesulte daucune deacutemonstration et mecircme daucune assertion claire de la requeacuterante quelle nait pas pu preacuteparer de maniegravere satisfaisante sa deacutefense devant lAutoriteacute puis devant la cour quelle invoque mais ne prouve pas une impossibiliteacute de recueillir des teacutemoignages agrave deacutecharge notamment du fait des changements susceptibles dintervenir dans la composition des organes dirigeants des entreprises concerneacutees et des mouvements affectant les autres personnels de celles-ci quelle na pas agrave deacuteplorer non plus la perte des documents commerciaux ou internes des notes ou courriers-papier les courriels et comptes-rendus de conversations teacuteleacutephoniques dont la destruction aurait eacuteteacute deacutecideacutee apregraves un temps bref en quoi la SEM GEG napporte aucun eacuteleacutement seacuterieux preacutecis et concret dune violation de ses droits de la deacutefense

Que le moyen sera rejeteacute

B - Sur la deacutefinition du marcheacute pertinent

Consideacuterant que la SEM GEG relegraveve que le marcheacute de produits retenu par lAutoriteacute est celui de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels eacuteligibles que pourtant le marcheacute des clients professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute cest-agrave-dire le marcheacute ouvert agrave la concurrence le la juillet 2004 doit seul ecirctre pris en consideacuteration la clientegravele eacutetant cloisonneacutee selon le type doffre (tarif reacuteglementeacute ou prix du marcheacute) quelle a choisi et une faible part ayant choisi le marcheacute en raison dun effet de ciseau que la SEM GEG sappuie agrave ce titre sur la deacutecision n0 07-MC-Ol dans laquelle le Conseil de la concurrence a retenu que lirreacuteversibiliteacute du passage vers les offres de marcheacute eacutetait lun des principaux eacuteleacutements permettant de deacutefinir un marcheacute distinct de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute

Que sagissant du marcheacute geacuteographique si lAutoriteacute la deacutefini comme local la SEM GEG entend deacutemontrer que celui-ci est national car la reacuteglementation libeacuteralisant le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute est national et les conditions - et les opeacuterateurs (dont Poweo) - de commercialisation de leacutelectriciteacute sont les mecircmes sur lensemble du territoire

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG na 200909599 - 6egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Mais consideacuterant sur le marcheacute de produits que le marcheacute se deacutefinit comme le lieu sur lequel se rencontrent loffre et la demande pour un produit ou un service speacutecifique que sur un marcheacute donneacute les uniteacutes offertes sont parfaitement substituables pour les consommateurs qui peuvent ainsi arbitrer entre les offreurs lorsquil y en a plusieurs ce qui implique que chaque offreur est soumis agrave la concurrence par les prix des autres

Que le 1 er juillet 2004 les clients petits professionnels se sont vu reconnaicirctre le droit dacheter de leacutelectriciteacute aupregraves du fournisseur de leur choix tout en conservant la possibiliteacute de continuer agrave sapprovisionner aupregraves de leur fournisseur historique et de beacuteneacuteficier de la part de celui-ci des tarifs reacuteglementeacutes fixeacutes par lEtat que de feacutevrier agrave avril 2005 des clients de la SEM GEG ont quitteacute le fournisseur historique au profit du fournisseur alternatif ce qui deacutemontre quil existait agrave ce moment de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute agrave la concurrence une substituabiliteacute entre les services offerts par la SEM GEG et Poweo et quen conseacutequence ces deux entreprises intervenaient sur le mecircme marcheacute

Consideacuterant que du tout il seacutevince comme la affirmeacute la Deacutecision (parag 40 agrave 51) que le marcheacute pertinent est bien le marcheacute de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels et non le marcheacute des seuls professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute

Consideacuterant en outre sur le marcheacute geacuteographique que le marcheacute geacuteographique comprend le territoire sur lequel les entreprises concerneacutees sont engageacutees dans loffre des biens et services en cause sur lequel les conditions de concurrence sont suffisamment homogegravenes et qui peut ecirctre distingueacute de zones geacuteographiques voisines parce que en particulier les conditions de concurrence y diffegraverent de maniegravere appreacuteciable

Quen lespegravece les clients professionnels situeacutes dans la zone de desserte de la SEM GEG ne peuvent acheter de leacutelectriciteacute quaupregraves de la SEM GEG fournisseur exclusif deacutelectriciteacute au tarif reacuteglementeacute sur sa zone ou aupregraves de fournisseurs alternatifs deacutelectriciteacute au prix de marcheacute qui ont conclu un contrat daccegraves au reacuteseau de distribution geacutereacute en monopole par la SEM GEG pour acheminer leur eacutelectriciteacute jusquau client final quil en reacutesulte quils ne peuvent se procurer de leacutelectriciteacute quagrave linteacuterieur de la zone geacuteographique couverte par le distributeur non nationaliseacute

Consideacuterant quen conseacutequence le marcheacute pertinent est la zone desservie par le reacuteseau de distribution de leacutelectriciteacute de Grenoble que le moyen contraire de la SEM GEG sera rejeteacute

C - Sur lexistence dune position dominante

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie avoir occupeacute sur le marcheacute tel quelle la consideacutereacute une position dominante au moment des faits puisquelle gegravere et fournit 059 pl 00 en volume et 067 pl 00 des sites que sa position dopeacuterateur preacutetenducircment historique a de toute faccedilon eacuteteacute aneacuteantie par louverture du marcheacute agrave la concurrence eacutevolution sur laquelle la Deacutecision est demeureacutee taisante

Mais consideacuterant que comme il a eacuteteacute eacutenonceacute preacuteceacutedemment le marcheacute pertinent nest pas celui que preacutetend la SEM GEG en sorte que son raisonnement devant la cour est neacutecessairement vicieacute

Consideacuterant par ailleurs que le marcheacute de la fourniture deacutelectriciteacute nayant eacuteteacute ouvert agrave la concurrence que le 1er juillet 2004 et la SEM GEG deacutetenant jusquagrave cette date un monopole sur ce marcheacute la reacutepartition des parts de marcheacute navait pas sensiblement eacutevolueacute au moment des faits en avril 2005 puisque seule la socieacuteteacute POWEO avait pris des initiatives (cf Deacutecision parag 55)

ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 Cour dAppel de Paris

RG na 200909599 - 7egraveme page

Que lors dune audition dun responsable de la SEM GEGle 10 juillet 2007 il a eacuteteacute eacutetabli que la part de marcheacute de la SEM GEG seacutelevait agrave 80 quil neacutetait donc pas anormal pour lAdlC de consideacuterer que cette part ait eacuteteacute plus importante au moment des faits deux ans plus tocirct agrave un moment ougrave louverture du marcheacute eacutetait balbutiante

Consideacuterant quen conseacutequence lexistence dune position dominante de la SEM GEG sur le marcheacute local de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles est aveacutereacutee et que le moyen de la requeacuterante de ce chef sera rejeteacute

Consideacuterant pour reacutepondre complegravetement aux arguties de la requeacuterante et relativement agrave la perte juridique de position monopolistique de la SEM GEG que quand bien mecircme louverture agrave la concurrence dun monopole entraicircne neacutecessairement une perte de parts de marcheacute pour lopeacuterateur historique une analyse concregravete peut permettre de constater toutefois que lopeacuterateur historique conserve une position de monopole de fait ou de quasi-monopole du fait de sa notorieacuteteacute par exemple quen loccurrence lAutoriteacute eacutetait fondeacutee agrave relever que la position dominante de la SEM GEG ne pouvait quecirctre renforceacutee par sa notorieacuteteacute dopeacuterateur historique aux yeux des clients eacuteligibles et par son monopole sur les marcheacutes connexes de la distribution deacutelectriciteacute et de fourniture deacutelectriciteacute aux clients reacutesidentiels et sur lactiviteacute gaziegravere quen teacutemoigne le fait que degraves 2006 elle a pu restaurer sa position de monopoleur comme il sera dit plus loin

D - Sur la pratique de deacutenigrement constitutive de labus de position dominante

Consideacuterant que la SEM GEG affirme que les communiqueacutes de presse litigieux dailleurs tregraves peu nombreux nont eu aucun objet anticoncurrentiel ne relegraveveraient au pire que de laction en reacuteparation pour concurrence deacuteloyale mais nont mecircme pas eu de caractegravere de deacutenigrement que la cour en jugerait-elle autrement agrave linstar de lAdIC tout deacutenigrement dont une entreprise en position dominante serait lauteur nest pas neacutecessairement constitutif dun abus de position dominante quil est toujours neacutecessaire deacutetablir un lien entre la domination de lentreprise et la pratique de deacutenigrement que sous cet angle la SEM GEG avance que le communiqueacute de presse litigieux ne consistait quagrave deacutementir les informations fausses ou deacuteloyales diffuseacutees par certains agents commerciaux mandateacutes par Poweo apregraves leacutechec dune deacutemarche amiable en forme de mise en demeure cinq j ours avant le premier des deux communiqueacutes de presse que le discreacutedit ne pouvait pas ecirctre qualifieacute de systeacutematique puisque la reacuteaction de la SEM GEG eacutetait ponctuelle et circonstancieacutee Poweo ne contestant pas que la pratique a cesseacute degraves le deacutebut de la proceacutedure judiciaire dindemnisation le 22 avril 2005 quenfin la SEM GEG conteste la confusion qui lui est reprocheacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees dans le secteur ouvert agrave la concurrence en sorte que le lien de causaliteacute entre la position dite dominante et le deacutenigrement nexiste pas et ne peut deacutegeacuteneacuterer en abus

Mais consideacuterant en premier lieu que lAutoriteacute de la concurrence a veilleacute agrave souligner que labus de position dominante ne se confond pas avec une pratique de concurrence deacuteloyale quen effet alors que laction en concurrence deacuteloyale protegravege les concurrents la sanction de labus de position dominante vise agrave proteacuteger lordre public eacuteconomique en sorte dailleurs que labsence de POWEO aux deacutebats devant la cour ne preacutesente strictement aucun inconveacutenient quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement aux assertions de la requeacuterante il faut rappeler quen matiegravere dabus de position dominante les comportements fautifs de lentreprise au regard des dispositions geacuteneacuterales de larticle 1382 du code civil constituent des abus de position dominante

Consideacuterant en deuxiegraveme lieu que le communiqueacute de presse litigieux contenait des mentions de deacutenigrement agrave leacutegard de Poweo nouvel entrant sur le marcheacute que ce communiqueacute faisait eacutetat de laquoconception de la qualiteacute de services tregraves relative raquo de l ( usage de meacutethodes peu scrupuleusesraquo et de la poursuite de laquo fins strictement financiegraveresraquo que certaines mentions eacutetaient en outre de nature agrave induire les clients eacuteligibles en erreur dans la mesure ougrave il eacutetait indiqueacute que laquocet opeacuterateur annonce agrave tort quil a conclu un partenariat

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 8egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

avec la SEM GEG raquo alors que Poweo avait effectivement conclu un contrat daccegraves au reacuteseau de distribution le 5 janvier 2005

Consideacuterant en troisiegraveme lieu sur le lien entre position dominante et deacutenigrement que plusieurs eacuteleacutements agrave juste titre releveacutes par la Deacutecision leacutetablissent

Que le communiqueacute de presse a constitueacute un argumentaire des agents commerciaux de la SEM GEG pour inciter des clients qui avaient souscrit un contrat avec Poweo agrave le reacutesilier et agrave renouer avec le seul autre opeacuterateur la SEM GEG que le communiqueacute litigieux a ainsi eacuteteacute non pas un acte isoleacute mais le point de deacutepart dune contre-offensive fondeacutee sur un deacutenigrement systeacutematique et destineacutee agrave affaiblir le concurrent et qui neacutetait concregravetement possible que pour un opeacuterateur en position dominante

Que ce faisant la SEM GEG a profiteacute du caractegravere tregraves reacutecent de louverture du marcheacute agrave la concurrence (la juillet 2004 soit agrave peine neufmois auparavant) et a pu user de la notorieacuteteacute et de limage encore preacutesentes aux esprits lieacutees agrave lactiviteacute de monopole geacuterant un service public

Que cette analyse est corroboreacutee par les chiffres reacuteunis en annexe au procegraves-verbal daudition du responsable de la SEM GEG devant le Rapporteur de lAutoriteacute qui fait apparaicirctre en tenant compte du temps-retard des souscriptions et des reacutesiliations que le nombre de contrats passeacutes par des clients avec Poweo a augmenteacute tregraves fortement en mars et avril 2005 mais na cesseacute de deacutecroicirctre ensuite comme il sera redit par la cour agrave propos des effets des pratiques en sorte que la SEM GEG a retrouveacute finalement sa position historique

Consideacuterant en quatriegraveme lieu que le deacutenigrement eacutetait dautant plus rechercheacute que les fOlmulations du communiqueacute de presse semblaient preacutesenter Poweo cornnle incapable dassumer la fonction de distributeur alors que cette socieacuteteacute na jamais preacutetendu agrave cette fonction et ne laurait leacutegalement pas pu que de mecircme et encore le communiqueacute nie tout partenariat entre la SEM GEG et Poweo alors quun contrat les liait depuis janvier 2005 comme il a eacuteteacute eacutenonceacute preacuteceacutedemment

Consideacuterant que du tout il reacutesulte que les communiqueacutes litigieux ont constitueacute en eux-mecircmes et par lusage ulteacuterieur qui en a eacuteteacute fait un deacutenigrement adosseacute agrave la position dominante de la SEM GEG et constitutif par conseacutequent dun abus de cette position

E - Sur les effets des pratiques

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie la pertinence de lanalyse juridique de lAutoriteacute selon laquelle les pratiques ont eu agrave la fois pour objet et pour effet dentraver le deacuteveloppement dun concurrent et de le deacutecider agrave mettre un terme agrave son action commerciale agrave Grenoble

Quen fait selon la socieacuteteacute GEG lAutoriteacute ne peut pas se contenter de mentionner le nombre de contrats signeacutes par Poweo resteacute stable (autour de 190)jusquenjanvier 2006 quagrave supposer que la progression se soit affaiblie agrave compter des publications du communiqueacute de presse dautres facteurs peuvent expliquer ce fait preacutetendu notamment (i) le communiqueacute de presse na eu quune porteacutee limiteacutee (caractegravere limiteacute dans le temps et caractegravere geacuteneacuteral contrairement au deacutemarchage cibleacute de POWEO) (ii) POWEO a modifieacute sa strateacutegie commerciale (arrecirct des deacutemarchages et prospections) (iii) les prix de gros de leacutelectriciteacute ont fortement augmenteacute et ont deacutepasseacute les tarifs reacuteglementeacutes rendant peu inteacuteressante la conclusion dun contrat avec un opeacuterateur alternatif ( ciseau tarifaire) (iv) POWEO a manifesteacute sa volonteacute de se deacutesengager de la fourniture (marcheacute aval) pour se concentrer sur la production deacutelectriciteacute (marcheacute amont)

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Quen outre la SEM GEG se fonde surle nombre de points de service alimenteacutes par Poweo cest~agrave-dire les sites de livraison aux clients eacuteligibles quelle estime ecirctre lindicateur le plus pertinent pour mesurer le poids respectif des diffeacuterents acteurs que ce nombre est passeacute trois mois apregraves la publication du communiqueacute de presse de 15 agrave 190 (tableau GEG parag222 p41) que par ailleurs la SEM GEG affirme que la pratique na pas pu avoir deffet deacuteviction car le message commercial na eacuteteacute diffuseacute quagrave deux reprises que le nombre de reacutesiliations eacutetabli agrave 27 sur 190 contrats signeacutes est faible et la preuve na pas eacuteteacute apporteacutee que les agents commerciaux de la SEM GEG auraient relayeacute sur le terrain les eacuteleacutements deacutenigrants du communiqueacute de presse que la SEM GEG en conclut quil nexiste donc aucun lien neacutecessaire entre la publication du communiqueacute de presse et la preacutetendue sortie du marcheacute de POWEO

Que sur leffet de forclusion la SEM GEG avance quil existe dautres fournisseurs alternatifs sur le marcheacute de Grenoble quainsi GDF est le premier fournisseur agrave Grenoble en offre de marcheacute

Quen somme comme en teacutemoigne la pratique deacutecisionnelle de lAutoriteacute il nest plus permis darticuler des preacutesomptions sur les effets des pratiques et en lespegravece aucune deacutemonstration nest faite par la Deacutecision

Mais consideacuterant quen droit lAutoriteacute avait bien pour mission de rechercher leffet anticoncurrentiel des pratiques de la SEM GEG au sens de larticle L 420-2 Ccom

Que la recherche de leffet anticoncurrentiel de la pratique poursuivie est preacutesenteacutee par la SEM GEG tantocirct comme le but poursuivi concregravetement par la SEM GEG auquel cas lanalyse se confond avec celle de labus meneacutee preacuteceacutedemment par la cour tantocirct comme le ressort essentiel du comportement (pratique anticoncurrentielle per se) auquel cas la conjonction OU queacutenonce la loi indique que leffet anticoncurrentiel suffit agrave consacrer le grief poursuivi

Consideacuterant quen fait lAutoriteacute a pu relever la concomitance entre la publication agrave deux reprises du communiqueacute de presse les 13 et 18 avril 2005 et la baisse du nombre de contrats signeacutes par Poweo quapregraves correction tenant au deacutecalage entre la date de souscription des contrats et celle de prise deffet des changements de fournisseur le nombre de contrats signeacutes a eacutevolueacute de la maniegravere suivante Ont eacuteteacute signeacutes par Poweo en feacutevrier 2005 un contrat en mars 14 en avril 107 puis en mai 68 en juin 0 et en juillet et au delagrave aucun contrat que du 17 avril au 17 mai 2005 la socieacuteteacute Poweo a reccedilu 36 lettres de reacutesiliation dont 27 eacutetaient comme la SEM GEG nen disconvient pas identiques en la forme et une envoyeacutee des locaux de la SEM GEG elle-mecircme quenfin la socieacuteteacute Poweo na conclu aucun nouveau contrat entre juin 2005 et juin 2008 quen somme elle na pu conserver une bonne part des contrats dorigine que par le jeu de lirreacuteversibiliteacute leacutegale deacutecrite preacuteceacutedemment

Consideacuterant que degraves lors lAutoriteacute a pu agrave bon droit relever les effets anticoncurrentiels des pratiques de la SEM GEG contrairement agrave ce que celle-ci soutient

F - Sur leacutevaluation de la sanction

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie que les pratiques incrimineacutees aient preacutesenteacute un degreacute significatif de graviteacute

Quelle estime aussi que les pratiques nont pas occasionneacute un quelconque dommage agrave leacuteconomie quelle indique plus en deacutetail que Gaz de France a reacuteussi agrave simplanter pendant la peacuteriode incrimineacutee et agrave devenir le premier fournisseur en offre de

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG ndeg 200909599 - 10egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

marcheacute agrave Grenoble que le surplus du consommateur na pas eacuteteacute significativement affecteacute par les pratiques litigieuses comme leacutenonce la Deacutecision elle-mecircme que le ciseau tarifaire eacutetait la seule question qui se posait reacuteellement et qui a conduit agrave la preacutetendue eacuteviction de Poweo

Quelle rappelle au titre de lindividualisation de la sanction quelle dispose dune faible surface financiegravere

Mais consideacuterant sur la graviteacute du comportement que celle-ci ne se confond pas avec la reacutealiteacute de labus de position dominante examineacutee preacuteceacutedemment mais doit proceacuteder dune anal yse des meacutethodes utiliseacutees par la S EM G EG pour parvenir agrave ses fins dune mesure des parts de marcheacute que deacutetient lentreprise poursuivie dun examen de la dureacutee du comportement anticoncurrentiel de leacutetendue ou la complexiteacute des processus anticoncurrentiels de laffectation directe des prix jusques et y compris les prix de deacutetail dune analyse des marcheacutes concerneacutes selon quil sagit de marcheacutes sensibles ou qui le sont moins de marcheacutes touchant directement le consommateur final ou pas de lidentification de clients personnes physiques ou petites entreprises ou de clients vulneacuterables (enfants personnes acircgeacutees malades ) ou dune clientegravele captive au sens eacuteconomique de la continuation du comportement anticoncurrentiel apregraves la saisine de lAutoriteacute ou encore du fait quil sagisse dun marcheacute public

Quen lespegravece lAutoriteacute a pu retenir tour agrave tour que la SEM GEG a opeacutereacute une confusion deacutelibeacutereacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees en concurrence (DeacutecO sect 70 suiv deacutejagrave examineacutes plus haut) que le discours deacutenigrant du communiqueacute de presse est particuliegraverement reacutepreacutehensible car il provient de lopeacuterateur historique (DeacutecO sect 91) que les pratiques nont pas eacuteteacute instantaneacutees puisquelles ont eacuteteacute preacuteceacutedeacutees de courriers (DeacutecO sect 94) et suivies de deacutemarchages aupregraves des anciens clients pour regagner leur confiance

Quil faut ajouter que les pratiques incrimineacutees ont eu pour but dentraver le deacuteveloppement dun concurrent sur le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles de Grenoble au moment crucial et symbolique de louverture agrave la concurrence

Que reacuteciproquement il ne peut ecirctre reprocheacute agrave lAutoriteacute de ne pas avoir tenu compte des facteurs habituels datteacutenuation qui eacutetaient eacutetrangers agrave lespegravece tels que lancienneteacute des faits - la saisine de lAutoriteacute ayant eacuteteacute immeacutediate - la cessation du comportement anticoncurrentiel agrave partir de la saisine de lAutoriteacute - labandon du marcheacute par Poweo ayant restaureacute la position de monopoleur de la SEM GEG - ou le pouvoir de marcheacute de Poweo - tout-agrave-fait modeste ainsi quil a eacuteteacute dit -

Que degraves lors il ne peut ecirctre fait aucun reproche agrave la Deacutecision ni en droit ni en fait dans lexamen de la graviteacute du comportement

Consideacuterant encore sur le dommage causeacute agrave leacuteconomie que lAutoriteacute a pu valablement caracteacuteriser une probabiliteacute raisonnable de dommage collectif

Que la proceacutedure a deacutemontreacute que la SEM GEG a empecirccheacute louverture du marcheacute agrave la concurrence en reacuteduisant le nombre des opeacuterateurs au point que cette entreprise a pu revenir agrave la situation qui eacutetait la sienne avant le 1 er juillet 2004 soit anteacuterieurement agrave louverture du marcheacute agrave la concurrence en restaurant sa position de monopoleur

Que cependant comme le reconnaicirct agrave juste titre la Deacutecision ce dommage a eacuteteacute limiteacute agrave la zone de desserte de Grenoble

Que lAutoriteacute a pris soin encore deacutecarter expresseacutement le facteur important dit daffectation significative du surplus du consommateur quen effet si la SEM GEG sest retrouveacutee en position de monopole de fait sur le marcheacute pertinent apregraves le retrait de Poweo elle neacutetait pas libre den profiter et de pratiquer tes prix de monopole car elle devait

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appliquer le tarif reacuteglementeacute fixeacute par la puissance publique que de plus au vu des conditions du marcheacute libre de leacutelectriciteacute linteacuterecirct de la clientegravele de masse sauf bouleversement des prix de marcheacute [eacutetait] de rester aux tarifs reacuteglementeacutes (DeacutecO sect 97 suiv) notamment en raison du ciseau tarifaire tel quil a eacuteteacute exposeacute preacuteceacutedemment

Que reacuteciproquement lAutoriteacute na tireacute aucun argument dautres facteurs significatifs du dommage agrave leacuteconomie na notamment pas exageacutereacute leacutetendue du marcheacute affecteacute par le comportement anticoncurrentiel ni les perturbations du marcheacute

Que lAutoriteacute admet eacutegalement les rapports dactiviteacute de la CRE depuis 2005 qui font eacutetat de la stagnation du rythme de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute pour les clients professionnels et ce sur lensemble du territoire national que lAutoriteacute nimpute pas labsence dopeacuterateurs alternatifs en tout cas jusquagrave larriveacutee de ODF sur le marcheacute aux pratiques de la SEM GEG

Quenfin lAutoriteacute na pas neacutegligeacute de tenir compte de ce que Poweo na pas deacuteposeacute plainte devant lAutoriteacute de la concurrence pour abus de position dominante le Rapporteur ayant meneacute son instruction sur la seule saisine de la CRE et de ce que Poweo ne sest pas non plus jointe agrave la proceacutedure par la suite quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement agrave un argument de la SEM GEO lAutoriteacute de la concurrence dans sa mission de protection des consommateurs na pas besoin de lappui ou de lassentiment des concurrents moyennant quoi la reacuteparation accordeacutee auxdits concurrents par les voies de droit commun na pas dinfluence sur la proceacutedure de reacutegulation punitive et preacuteventive fondeacutee sur lordre public eacuteconomique

Quen somme loin dexageacuterer le dommage agrave leacuteconomie occasionneacute par le comportement poursuivi et apregraves avoir reacutepondu point par point aux arguments de Poweo lAutoriteacute a fait de ce dommage une analyse tregraves pondeacutereacutee que la cour approuve

Consideacuterant enfin sagissant de lindividualisation de la sanction (sect 104 agrave 106) et que lAutoriteacute de la concurrence a preacuteciseacute que le chiffre daffaires consolideacute de la SEM OEG avait atteint en 2007 124645 millions deuros avec pour conseacutequence que le montant maximum de la sanction encourue seacutelegraveve agrave 12 500 000 euro que ces consideacuterations sont incontestables et incontesteacutees et quelles incluent neacutecessairement leacutevaluation de la capaciteacute contributive de la SEM GEG qui na pas traverseacute agrave leacutepoque des faits poursuivis ni posteacuterieurement des difficulteacutes particuliegraveres qui commanderaient une autre analyse

Quagrave titre superfeacutetatoire mais sans inexactitude il a eacuteteacute tenu compte par lAutoriteacute du fait que les ventes deacutelectriciteacute reacutealiseacutees par la SEM GEO nont cesseacute de progresser entre 2004 et 2007 pour atteindre 64 261 401 euros en 2007

Quenfin il ny a pas lieu de tenir compte de lindemnisation provisionnelle accordeacutee agrave Poweo par la juridiction commerciale pour les raisons susdites

Consideacuterant quayant ainsi proceacutedeacute sans erreur agrave lanalyse de la graviteacute de la pratique anticoncurrentielle ayant ensuite eacutevalueacute avec pondeacuteration le dommage agrave leacuteconomie et ayant preacuteciseacutement examineacute les facteurs dindividualisation de la sanction lAutoriteacute a exactement proportionneacute celle-ci agrave une hauteur dagrave peine trois pour mille du meilleur chiffre daffaires annuel de la peacuteriode consideacutereacutee que la demande de reacuteformation de la SEM GEG est manifestement infondeacutee

PAR CES MOTIFS

Rejette le recours

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Condamne la SEM GEG aux deacutepens

LE [REFFIER

Thierry FOSSIER

Cour dAppel de Paris ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 RG nO 200909599 - 13egraveme page

SEM GEG la diffusion dautres messages preacutetendument laquo deacutenigrants constater que ledit communiqueacute de presse a revecirctu une porteacutee tregraves limiteacutee et quil visait agrave reacutepondre de maniegravere circonstancieacutee aux pratiques commerciales commises en avril 2005 par des repreacutesentants commerciaux agissant pour le compte de Poweo qui avaient eacuteteacute jugeacutees critiquables par la SEM GEG sur le terrain de la concurrence deacuteloyale constater que la pratique reprocheacutee agrave la SEM GEG na eu aucun objet visant agrave laquo eacutevincerraquo Poweo du marcheacute en cause et que leffet anticoncurrentiel du communiqueacute de presse litigieux na pas eacuteteacute deacutemontreacute par lAutoriteacute constater quil nexiste aucun lien neacutecessaire entre la pratique limiteacutee reprocheacutee agrave la SEM GEG et la situation concurrentielle agrave Grenoble deacutecrite par lAutoriteacute constater que la pratique reprocheacutee agrave la SEM GEG ne pouvait ecirctre la cause de la preacutetendue eacuteviction de Poweo agrave Grenoble qui najamais eacuteteacute deacutemontreacutee par lAutoriteacute constater que la pratique reprocheacutee agrave la SEM GEG na pas davantage eu deffet de forclusion sur le marcheacute en cause en conseacutequence annuler la Deacutecision et ordonner le remboursement immeacutediat par le Treacutesor public de la somme de 320000 euros payeacutee par la SEM GEG en exeacutecution de la Deacutecision attaqueacutee assorti des inteacuterecircts au taux leacutegal agrave compter de larrecirct et avec application de larticle 1154 du Code civil A titre tregraves subsidiaire constater le caractegravere tregraves disproportionneacute des sanctions infligeacutees agrave la SEM GEG degraves lors que lAdlC na pas deacutemontreacute lexistence dun dommage agrave leacuteconomie ni mecircme la graviteacute des pratiques alleacutegueacutees reacuteformer la Deacutecision en conseacutequence Condamner la Ministre chargeacutee de leacuteconomie agrave payer la somme de 50000 euros pour frais irreacutepeacutetibles de proceacutedure et les entiers deacutepens

Vu les observations de lAutoriteacute de la concurrence en date du 5 novembre 2009

Vu les observations de Madame la Ministre chargeacutee de leacuteconomie en date du 20 novembre 2009

Vu le meacutemoire en reacuteplique de la SEM Gaz et Electriciteacute de Grenoble en date du 18 deacutecembre 2009 tendant aux mecircmes fins que le meacutemoire du 2 juin 2009

Vu les conclusions de Monsieur le Procureur Geacuteneacuteral en date du 26 janvier 2010

Ouiuml le conseil de la SEM Gaz et Electriciteacute de Grenoble et les repreacutesentants de lAutoriteacute de la concurrence et de Monsieur le Procureur Geacuteneacuteral agrave laudience du 2 feacutevrier 2010 la socieacuteteacute requeacuterante ayant pu reacutepliquer et eu la parole en dernier

SUR QUOI

A - Sur le respect de larticle 6 de la Convention ESDH et la dureacutee de la proceacutedure

Consideacuterant que la SEM GEG demande agrave la cour de dire et juger que le deacutelai de la proceacutedure devant lAutoriteacute na pas eacuteteacute raisonnable au sens de larticle 6 de la convention ESDH que la SEM GEG qualifie la dureacutee de la proceacutedure dexcessive au motifque linstruction a dureacute pregraves de quatre anneacutees (apregraves deux anneacutees eacutecouleacutees pour que le Rapporteur geacuteneacuteral deacutesigne deux Rapporteurs successifs) alors que laffaire eacutetait deacutenueacutee de toute complexiteacute autre que de pur droit et que les actes dinstruction nont pas eacuteteacute nombreux

Que ce deacutelai a porteacute atteinte aux droits de la SEM GEG car il a inducircment diffeacutereacute lexercice des droits de la deacutefense le deacutebat contradictoire ne pouvant exister quagrave compter de la notification de griefs et compte tenu du caractegravere essentiellement ponctuel et circonstancieacute de la pratique qui lui est reprocheacutee que concregravetement des collaborateurs ont quitteacute la SEM GEG pendant la longue peacuteriode denquecircte et ceci a rendu impossible la mise en place de la deacutefense de cette SEM devant l AdlC

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG ndeg 200909599 - 5egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Mais consideacuterant que le respect des droits de la deacutefense revecirctant une importance capitale dans les proceacutedures telles que celle en lespegravece il importe deacuteviter que ces droits puissent ecirctre irreacutemeacutediablement compromis notamment en raison dune dureacutee excessive de la phase denquecircte et que cette dureacutee soit susceptible de faire obstacle agrave leacutetablissement de preuves visant agrave reacutefuter lexistence de comportements de nature agrave engager la responsabiliteacute des entreprises concerneacutees que pour cette raison lexamen de leacuteventuelle entrave agrave lexercice des droits de la deacutefense ne doit pas ecirctre limiteacute agrave la phase mecircme dans laquelle ces droits produisent leur plein effet agrave savoir la seconde phase de la proceacutedure administrative que lappreacuteciation de la source de leacuteventuel affaiblissement de lefficaciteacute des droits de la deacutefense doit seacutetendre agrave lensemble de cette proceacutedure en se reacutefeacuterant agrave la dureacutee totale de celle-ci enquecircte comprise que pour autant la dureacutee excessive de la proceacutedure ne peut ecirctre deacutetermineacutee en soi de maniegravere abstraite

Quen lespegravece une dureacutee de trois ans et demi ne peut ecirctre consideacutereacutee comme excessive au sens de la Convention europeacuteenne de sauvegarde des droits de 1 homme si la socieacuteteacute requeacuterante ne deacutemontre pas en quoi in concreto elle aurait eacuteteacute priveacutee du droit de se deacutefendre

Quagrave ce sujet il peut ecirctre constateacute quapregraves une saisine intervenue le 12juillet 2005 agrave linitiative de la Commission de reacutegulation de leacutenergie le preacutesident de la SEM GEG a eacuteteacute entendu par le rapporteur le 10 juillet 2007 en lui donnant connaissance de la lettre de saisine que la SEM GEG a disposeacute eacutegalement des deacutelais preacutevus par larticle L 463-2 du code de commerce pour faire valoir ses observations quil ne reacutesulte daucune deacutemonstration et mecircme daucune assertion claire de la requeacuterante quelle nait pas pu preacuteparer de maniegravere satisfaisante sa deacutefense devant lAutoriteacute puis devant la cour quelle invoque mais ne prouve pas une impossibiliteacute de recueillir des teacutemoignages agrave deacutecharge notamment du fait des changements susceptibles dintervenir dans la composition des organes dirigeants des entreprises concerneacutees et des mouvements affectant les autres personnels de celles-ci quelle na pas agrave deacuteplorer non plus la perte des documents commerciaux ou internes des notes ou courriers-papier les courriels et comptes-rendus de conversations teacuteleacutephoniques dont la destruction aurait eacuteteacute deacutecideacutee apregraves un temps bref en quoi la SEM GEG napporte aucun eacuteleacutement seacuterieux preacutecis et concret dune violation de ses droits de la deacutefense

Que le moyen sera rejeteacute

B - Sur la deacutefinition du marcheacute pertinent

Consideacuterant que la SEM GEG relegraveve que le marcheacute de produits retenu par lAutoriteacute est celui de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels eacuteligibles que pourtant le marcheacute des clients professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute cest-agrave-dire le marcheacute ouvert agrave la concurrence le la juillet 2004 doit seul ecirctre pris en consideacuteration la clientegravele eacutetant cloisonneacutee selon le type doffre (tarif reacuteglementeacute ou prix du marcheacute) quelle a choisi et une faible part ayant choisi le marcheacute en raison dun effet de ciseau que la SEM GEG sappuie agrave ce titre sur la deacutecision n0 07-MC-Ol dans laquelle le Conseil de la concurrence a retenu que lirreacuteversibiliteacute du passage vers les offres de marcheacute eacutetait lun des principaux eacuteleacutements permettant de deacutefinir un marcheacute distinct de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute

Que sagissant du marcheacute geacuteographique si lAutoriteacute la deacutefini comme local la SEM GEG entend deacutemontrer que celui-ci est national car la reacuteglementation libeacuteralisant le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute est national et les conditions - et les opeacuterateurs (dont Poweo) - de commercialisation de leacutelectriciteacute sont les mecircmes sur lensemble du territoire

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG na 200909599 - 6egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Mais consideacuterant sur le marcheacute de produits que le marcheacute se deacutefinit comme le lieu sur lequel se rencontrent loffre et la demande pour un produit ou un service speacutecifique que sur un marcheacute donneacute les uniteacutes offertes sont parfaitement substituables pour les consommateurs qui peuvent ainsi arbitrer entre les offreurs lorsquil y en a plusieurs ce qui implique que chaque offreur est soumis agrave la concurrence par les prix des autres

Que le 1 er juillet 2004 les clients petits professionnels se sont vu reconnaicirctre le droit dacheter de leacutelectriciteacute aupregraves du fournisseur de leur choix tout en conservant la possibiliteacute de continuer agrave sapprovisionner aupregraves de leur fournisseur historique et de beacuteneacuteficier de la part de celui-ci des tarifs reacuteglementeacutes fixeacutes par lEtat que de feacutevrier agrave avril 2005 des clients de la SEM GEG ont quitteacute le fournisseur historique au profit du fournisseur alternatif ce qui deacutemontre quil existait agrave ce moment de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute agrave la concurrence une substituabiliteacute entre les services offerts par la SEM GEG et Poweo et quen conseacutequence ces deux entreprises intervenaient sur le mecircme marcheacute

Consideacuterant que du tout il seacutevince comme la affirmeacute la Deacutecision (parag 40 agrave 51) que le marcheacute pertinent est bien le marcheacute de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels et non le marcheacute des seuls professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute

Consideacuterant en outre sur le marcheacute geacuteographique que le marcheacute geacuteographique comprend le territoire sur lequel les entreprises concerneacutees sont engageacutees dans loffre des biens et services en cause sur lequel les conditions de concurrence sont suffisamment homogegravenes et qui peut ecirctre distingueacute de zones geacuteographiques voisines parce que en particulier les conditions de concurrence y diffegraverent de maniegravere appreacuteciable

Quen lespegravece les clients professionnels situeacutes dans la zone de desserte de la SEM GEG ne peuvent acheter de leacutelectriciteacute quaupregraves de la SEM GEG fournisseur exclusif deacutelectriciteacute au tarif reacuteglementeacute sur sa zone ou aupregraves de fournisseurs alternatifs deacutelectriciteacute au prix de marcheacute qui ont conclu un contrat daccegraves au reacuteseau de distribution geacutereacute en monopole par la SEM GEG pour acheminer leur eacutelectriciteacute jusquau client final quil en reacutesulte quils ne peuvent se procurer de leacutelectriciteacute quagrave linteacuterieur de la zone geacuteographique couverte par le distributeur non nationaliseacute

Consideacuterant quen conseacutequence le marcheacute pertinent est la zone desservie par le reacuteseau de distribution de leacutelectriciteacute de Grenoble que le moyen contraire de la SEM GEG sera rejeteacute

C - Sur lexistence dune position dominante

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie avoir occupeacute sur le marcheacute tel quelle la consideacutereacute une position dominante au moment des faits puisquelle gegravere et fournit 059 pl 00 en volume et 067 pl 00 des sites que sa position dopeacuterateur preacutetenducircment historique a de toute faccedilon eacuteteacute aneacuteantie par louverture du marcheacute agrave la concurrence eacutevolution sur laquelle la Deacutecision est demeureacutee taisante

Mais consideacuterant que comme il a eacuteteacute eacutenonceacute preacuteceacutedemment le marcheacute pertinent nest pas celui que preacutetend la SEM GEG en sorte que son raisonnement devant la cour est neacutecessairement vicieacute

Consideacuterant par ailleurs que le marcheacute de la fourniture deacutelectriciteacute nayant eacuteteacute ouvert agrave la concurrence que le 1er juillet 2004 et la SEM GEG deacutetenant jusquagrave cette date un monopole sur ce marcheacute la reacutepartition des parts de marcheacute navait pas sensiblement eacutevolueacute au moment des faits en avril 2005 puisque seule la socieacuteteacute POWEO avait pris des initiatives (cf Deacutecision parag 55)

ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 Cour dAppel de Paris

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Que lors dune audition dun responsable de la SEM GEGle 10 juillet 2007 il a eacuteteacute eacutetabli que la part de marcheacute de la SEM GEG seacutelevait agrave 80 quil neacutetait donc pas anormal pour lAdlC de consideacuterer que cette part ait eacuteteacute plus importante au moment des faits deux ans plus tocirct agrave un moment ougrave louverture du marcheacute eacutetait balbutiante

Consideacuterant quen conseacutequence lexistence dune position dominante de la SEM GEG sur le marcheacute local de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles est aveacutereacutee et que le moyen de la requeacuterante de ce chef sera rejeteacute

Consideacuterant pour reacutepondre complegravetement aux arguties de la requeacuterante et relativement agrave la perte juridique de position monopolistique de la SEM GEG que quand bien mecircme louverture agrave la concurrence dun monopole entraicircne neacutecessairement une perte de parts de marcheacute pour lopeacuterateur historique une analyse concregravete peut permettre de constater toutefois que lopeacuterateur historique conserve une position de monopole de fait ou de quasi-monopole du fait de sa notorieacuteteacute par exemple quen loccurrence lAutoriteacute eacutetait fondeacutee agrave relever que la position dominante de la SEM GEG ne pouvait quecirctre renforceacutee par sa notorieacuteteacute dopeacuterateur historique aux yeux des clients eacuteligibles et par son monopole sur les marcheacutes connexes de la distribution deacutelectriciteacute et de fourniture deacutelectriciteacute aux clients reacutesidentiels et sur lactiviteacute gaziegravere quen teacutemoigne le fait que degraves 2006 elle a pu restaurer sa position de monopoleur comme il sera dit plus loin

D - Sur la pratique de deacutenigrement constitutive de labus de position dominante

Consideacuterant que la SEM GEG affirme que les communiqueacutes de presse litigieux dailleurs tregraves peu nombreux nont eu aucun objet anticoncurrentiel ne relegraveveraient au pire que de laction en reacuteparation pour concurrence deacuteloyale mais nont mecircme pas eu de caractegravere de deacutenigrement que la cour en jugerait-elle autrement agrave linstar de lAdIC tout deacutenigrement dont une entreprise en position dominante serait lauteur nest pas neacutecessairement constitutif dun abus de position dominante quil est toujours neacutecessaire deacutetablir un lien entre la domination de lentreprise et la pratique de deacutenigrement que sous cet angle la SEM GEG avance que le communiqueacute de presse litigieux ne consistait quagrave deacutementir les informations fausses ou deacuteloyales diffuseacutees par certains agents commerciaux mandateacutes par Poweo apregraves leacutechec dune deacutemarche amiable en forme de mise en demeure cinq j ours avant le premier des deux communiqueacutes de presse que le discreacutedit ne pouvait pas ecirctre qualifieacute de systeacutematique puisque la reacuteaction de la SEM GEG eacutetait ponctuelle et circonstancieacutee Poweo ne contestant pas que la pratique a cesseacute degraves le deacutebut de la proceacutedure judiciaire dindemnisation le 22 avril 2005 quenfin la SEM GEG conteste la confusion qui lui est reprocheacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees dans le secteur ouvert agrave la concurrence en sorte que le lien de causaliteacute entre la position dite dominante et le deacutenigrement nexiste pas et ne peut deacutegeacuteneacuterer en abus

Mais consideacuterant en premier lieu que lAutoriteacute de la concurrence a veilleacute agrave souligner que labus de position dominante ne se confond pas avec une pratique de concurrence deacuteloyale quen effet alors que laction en concurrence deacuteloyale protegravege les concurrents la sanction de labus de position dominante vise agrave proteacuteger lordre public eacuteconomique en sorte dailleurs que labsence de POWEO aux deacutebats devant la cour ne preacutesente strictement aucun inconveacutenient quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement aux assertions de la requeacuterante il faut rappeler quen matiegravere dabus de position dominante les comportements fautifs de lentreprise au regard des dispositions geacuteneacuterales de larticle 1382 du code civil constituent des abus de position dominante

Consideacuterant en deuxiegraveme lieu que le communiqueacute de presse litigieux contenait des mentions de deacutenigrement agrave leacutegard de Poweo nouvel entrant sur le marcheacute que ce communiqueacute faisait eacutetat de laquoconception de la qualiteacute de services tregraves relative raquo de l ( usage de meacutethodes peu scrupuleusesraquo et de la poursuite de laquo fins strictement financiegraveresraquo que certaines mentions eacutetaient en outre de nature agrave induire les clients eacuteligibles en erreur dans la mesure ougrave il eacutetait indiqueacute que laquocet opeacuterateur annonce agrave tort quil a conclu un partenariat

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avec la SEM GEG raquo alors que Poweo avait effectivement conclu un contrat daccegraves au reacuteseau de distribution le 5 janvier 2005

Consideacuterant en troisiegraveme lieu sur le lien entre position dominante et deacutenigrement que plusieurs eacuteleacutements agrave juste titre releveacutes par la Deacutecision leacutetablissent

Que le communiqueacute de presse a constitueacute un argumentaire des agents commerciaux de la SEM GEG pour inciter des clients qui avaient souscrit un contrat avec Poweo agrave le reacutesilier et agrave renouer avec le seul autre opeacuterateur la SEM GEG que le communiqueacute litigieux a ainsi eacuteteacute non pas un acte isoleacute mais le point de deacutepart dune contre-offensive fondeacutee sur un deacutenigrement systeacutematique et destineacutee agrave affaiblir le concurrent et qui neacutetait concregravetement possible que pour un opeacuterateur en position dominante

Que ce faisant la SEM GEG a profiteacute du caractegravere tregraves reacutecent de louverture du marcheacute agrave la concurrence (la juillet 2004 soit agrave peine neufmois auparavant) et a pu user de la notorieacuteteacute et de limage encore preacutesentes aux esprits lieacutees agrave lactiviteacute de monopole geacuterant un service public

Que cette analyse est corroboreacutee par les chiffres reacuteunis en annexe au procegraves-verbal daudition du responsable de la SEM GEG devant le Rapporteur de lAutoriteacute qui fait apparaicirctre en tenant compte du temps-retard des souscriptions et des reacutesiliations que le nombre de contrats passeacutes par des clients avec Poweo a augmenteacute tregraves fortement en mars et avril 2005 mais na cesseacute de deacutecroicirctre ensuite comme il sera redit par la cour agrave propos des effets des pratiques en sorte que la SEM GEG a retrouveacute finalement sa position historique

Consideacuterant en quatriegraveme lieu que le deacutenigrement eacutetait dautant plus rechercheacute que les fOlmulations du communiqueacute de presse semblaient preacutesenter Poweo cornnle incapable dassumer la fonction de distributeur alors que cette socieacuteteacute na jamais preacutetendu agrave cette fonction et ne laurait leacutegalement pas pu que de mecircme et encore le communiqueacute nie tout partenariat entre la SEM GEG et Poweo alors quun contrat les liait depuis janvier 2005 comme il a eacuteteacute eacutenonceacute preacuteceacutedemment

Consideacuterant que du tout il reacutesulte que les communiqueacutes litigieux ont constitueacute en eux-mecircmes et par lusage ulteacuterieur qui en a eacuteteacute fait un deacutenigrement adosseacute agrave la position dominante de la SEM GEG et constitutif par conseacutequent dun abus de cette position

E - Sur les effets des pratiques

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie la pertinence de lanalyse juridique de lAutoriteacute selon laquelle les pratiques ont eu agrave la fois pour objet et pour effet dentraver le deacuteveloppement dun concurrent et de le deacutecider agrave mettre un terme agrave son action commerciale agrave Grenoble

Quen fait selon la socieacuteteacute GEG lAutoriteacute ne peut pas se contenter de mentionner le nombre de contrats signeacutes par Poweo resteacute stable (autour de 190)jusquenjanvier 2006 quagrave supposer que la progression se soit affaiblie agrave compter des publications du communiqueacute de presse dautres facteurs peuvent expliquer ce fait preacutetendu notamment (i) le communiqueacute de presse na eu quune porteacutee limiteacutee (caractegravere limiteacute dans le temps et caractegravere geacuteneacuteral contrairement au deacutemarchage cibleacute de POWEO) (ii) POWEO a modifieacute sa strateacutegie commerciale (arrecirct des deacutemarchages et prospections) (iii) les prix de gros de leacutelectriciteacute ont fortement augmenteacute et ont deacutepasseacute les tarifs reacuteglementeacutes rendant peu inteacuteressante la conclusion dun contrat avec un opeacuterateur alternatif ( ciseau tarifaire) (iv) POWEO a manifesteacute sa volonteacute de se deacutesengager de la fourniture (marcheacute aval) pour se concentrer sur la production deacutelectriciteacute (marcheacute amont)

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Quen outre la SEM GEG se fonde surle nombre de points de service alimenteacutes par Poweo cest~agrave-dire les sites de livraison aux clients eacuteligibles quelle estime ecirctre lindicateur le plus pertinent pour mesurer le poids respectif des diffeacuterents acteurs que ce nombre est passeacute trois mois apregraves la publication du communiqueacute de presse de 15 agrave 190 (tableau GEG parag222 p41) que par ailleurs la SEM GEG affirme que la pratique na pas pu avoir deffet deacuteviction car le message commercial na eacuteteacute diffuseacute quagrave deux reprises que le nombre de reacutesiliations eacutetabli agrave 27 sur 190 contrats signeacutes est faible et la preuve na pas eacuteteacute apporteacutee que les agents commerciaux de la SEM GEG auraient relayeacute sur le terrain les eacuteleacutements deacutenigrants du communiqueacute de presse que la SEM GEG en conclut quil nexiste donc aucun lien neacutecessaire entre la publication du communiqueacute de presse et la preacutetendue sortie du marcheacute de POWEO

Que sur leffet de forclusion la SEM GEG avance quil existe dautres fournisseurs alternatifs sur le marcheacute de Grenoble quainsi GDF est le premier fournisseur agrave Grenoble en offre de marcheacute

Quen somme comme en teacutemoigne la pratique deacutecisionnelle de lAutoriteacute il nest plus permis darticuler des preacutesomptions sur les effets des pratiques et en lespegravece aucune deacutemonstration nest faite par la Deacutecision

Mais consideacuterant quen droit lAutoriteacute avait bien pour mission de rechercher leffet anticoncurrentiel des pratiques de la SEM GEG au sens de larticle L 420-2 Ccom

Que la recherche de leffet anticoncurrentiel de la pratique poursuivie est preacutesenteacutee par la SEM GEG tantocirct comme le but poursuivi concregravetement par la SEM GEG auquel cas lanalyse se confond avec celle de labus meneacutee preacuteceacutedemment par la cour tantocirct comme le ressort essentiel du comportement (pratique anticoncurrentielle per se) auquel cas la conjonction OU queacutenonce la loi indique que leffet anticoncurrentiel suffit agrave consacrer le grief poursuivi

Consideacuterant quen fait lAutoriteacute a pu relever la concomitance entre la publication agrave deux reprises du communiqueacute de presse les 13 et 18 avril 2005 et la baisse du nombre de contrats signeacutes par Poweo quapregraves correction tenant au deacutecalage entre la date de souscription des contrats et celle de prise deffet des changements de fournisseur le nombre de contrats signeacutes a eacutevolueacute de la maniegravere suivante Ont eacuteteacute signeacutes par Poweo en feacutevrier 2005 un contrat en mars 14 en avril 107 puis en mai 68 en juin 0 et en juillet et au delagrave aucun contrat que du 17 avril au 17 mai 2005 la socieacuteteacute Poweo a reccedilu 36 lettres de reacutesiliation dont 27 eacutetaient comme la SEM GEG nen disconvient pas identiques en la forme et une envoyeacutee des locaux de la SEM GEG elle-mecircme quenfin la socieacuteteacute Poweo na conclu aucun nouveau contrat entre juin 2005 et juin 2008 quen somme elle na pu conserver une bonne part des contrats dorigine que par le jeu de lirreacuteversibiliteacute leacutegale deacutecrite preacuteceacutedemment

Consideacuterant que degraves lors lAutoriteacute a pu agrave bon droit relever les effets anticoncurrentiels des pratiques de la SEM GEG contrairement agrave ce que celle-ci soutient

F - Sur leacutevaluation de la sanction

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie que les pratiques incrimineacutees aient preacutesenteacute un degreacute significatif de graviteacute

Quelle estime aussi que les pratiques nont pas occasionneacute un quelconque dommage agrave leacuteconomie quelle indique plus en deacutetail que Gaz de France a reacuteussi agrave simplanter pendant la peacuteriode incrimineacutee et agrave devenir le premier fournisseur en offre de

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marcheacute agrave Grenoble que le surplus du consommateur na pas eacuteteacute significativement affecteacute par les pratiques litigieuses comme leacutenonce la Deacutecision elle-mecircme que le ciseau tarifaire eacutetait la seule question qui se posait reacuteellement et qui a conduit agrave la preacutetendue eacuteviction de Poweo

Quelle rappelle au titre de lindividualisation de la sanction quelle dispose dune faible surface financiegravere

Mais consideacuterant sur la graviteacute du comportement que celle-ci ne se confond pas avec la reacutealiteacute de labus de position dominante examineacutee preacuteceacutedemment mais doit proceacuteder dune anal yse des meacutethodes utiliseacutees par la S EM G EG pour parvenir agrave ses fins dune mesure des parts de marcheacute que deacutetient lentreprise poursuivie dun examen de la dureacutee du comportement anticoncurrentiel de leacutetendue ou la complexiteacute des processus anticoncurrentiels de laffectation directe des prix jusques et y compris les prix de deacutetail dune analyse des marcheacutes concerneacutes selon quil sagit de marcheacutes sensibles ou qui le sont moins de marcheacutes touchant directement le consommateur final ou pas de lidentification de clients personnes physiques ou petites entreprises ou de clients vulneacuterables (enfants personnes acircgeacutees malades ) ou dune clientegravele captive au sens eacuteconomique de la continuation du comportement anticoncurrentiel apregraves la saisine de lAutoriteacute ou encore du fait quil sagisse dun marcheacute public

Quen lespegravece lAutoriteacute a pu retenir tour agrave tour que la SEM GEG a opeacutereacute une confusion deacutelibeacutereacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees en concurrence (DeacutecO sect 70 suiv deacutejagrave examineacutes plus haut) que le discours deacutenigrant du communiqueacute de presse est particuliegraverement reacutepreacutehensible car il provient de lopeacuterateur historique (DeacutecO sect 91) que les pratiques nont pas eacuteteacute instantaneacutees puisquelles ont eacuteteacute preacuteceacutedeacutees de courriers (DeacutecO sect 94) et suivies de deacutemarchages aupregraves des anciens clients pour regagner leur confiance

Quil faut ajouter que les pratiques incrimineacutees ont eu pour but dentraver le deacuteveloppement dun concurrent sur le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles de Grenoble au moment crucial et symbolique de louverture agrave la concurrence

Que reacuteciproquement il ne peut ecirctre reprocheacute agrave lAutoriteacute de ne pas avoir tenu compte des facteurs habituels datteacutenuation qui eacutetaient eacutetrangers agrave lespegravece tels que lancienneteacute des faits - la saisine de lAutoriteacute ayant eacuteteacute immeacutediate - la cessation du comportement anticoncurrentiel agrave partir de la saisine de lAutoriteacute - labandon du marcheacute par Poweo ayant restaureacute la position de monopoleur de la SEM GEG - ou le pouvoir de marcheacute de Poweo - tout-agrave-fait modeste ainsi quil a eacuteteacute dit -

Que degraves lors il ne peut ecirctre fait aucun reproche agrave la Deacutecision ni en droit ni en fait dans lexamen de la graviteacute du comportement

Consideacuterant encore sur le dommage causeacute agrave leacuteconomie que lAutoriteacute a pu valablement caracteacuteriser une probabiliteacute raisonnable de dommage collectif

Que la proceacutedure a deacutemontreacute que la SEM GEG a empecirccheacute louverture du marcheacute agrave la concurrence en reacuteduisant le nombre des opeacuterateurs au point que cette entreprise a pu revenir agrave la situation qui eacutetait la sienne avant le 1 er juillet 2004 soit anteacuterieurement agrave louverture du marcheacute agrave la concurrence en restaurant sa position de monopoleur

Que cependant comme le reconnaicirct agrave juste titre la Deacutecision ce dommage a eacuteteacute limiteacute agrave la zone de desserte de Grenoble

Que lAutoriteacute a pris soin encore deacutecarter expresseacutement le facteur important dit daffectation significative du surplus du consommateur quen effet si la SEM GEG sest retrouveacutee en position de monopole de fait sur le marcheacute pertinent apregraves le retrait de Poweo elle neacutetait pas libre den profiter et de pratiquer tes prix de monopole car elle devait

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appliquer le tarif reacuteglementeacute fixeacute par la puissance publique que de plus au vu des conditions du marcheacute libre de leacutelectriciteacute linteacuterecirct de la clientegravele de masse sauf bouleversement des prix de marcheacute [eacutetait] de rester aux tarifs reacuteglementeacutes (DeacutecO sect 97 suiv) notamment en raison du ciseau tarifaire tel quil a eacuteteacute exposeacute preacuteceacutedemment

Que reacuteciproquement lAutoriteacute na tireacute aucun argument dautres facteurs significatifs du dommage agrave leacuteconomie na notamment pas exageacutereacute leacutetendue du marcheacute affecteacute par le comportement anticoncurrentiel ni les perturbations du marcheacute

Que lAutoriteacute admet eacutegalement les rapports dactiviteacute de la CRE depuis 2005 qui font eacutetat de la stagnation du rythme de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute pour les clients professionnels et ce sur lensemble du territoire national que lAutoriteacute nimpute pas labsence dopeacuterateurs alternatifs en tout cas jusquagrave larriveacutee de ODF sur le marcheacute aux pratiques de la SEM GEG

Quenfin lAutoriteacute na pas neacutegligeacute de tenir compte de ce que Poweo na pas deacuteposeacute plainte devant lAutoriteacute de la concurrence pour abus de position dominante le Rapporteur ayant meneacute son instruction sur la seule saisine de la CRE et de ce que Poweo ne sest pas non plus jointe agrave la proceacutedure par la suite quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement agrave un argument de la SEM GEO lAutoriteacute de la concurrence dans sa mission de protection des consommateurs na pas besoin de lappui ou de lassentiment des concurrents moyennant quoi la reacuteparation accordeacutee auxdits concurrents par les voies de droit commun na pas dinfluence sur la proceacutedure de reacutegulation punitive et preacuteventive fondeacutee sur lordre public eacuteconomique

Quen somme loin dexageacuterer le dommage agrave leacuteconomie occasionneacute par le comportement poursuivi et apregraves avoir reacutepondu point par point aux arguments de Poweo lAutoriteacute a fait de ce dommage une analyse tregraves pondeacutereacutee que la cour approuve

Consideacuterant enfin sagissant de lindividualisation de la sanction (sect 104 agrave 106) et que lAutoriteacute de la concurrence a preacuteciseacute que le chiffre daffaires consolideacute de la SEM OEG avait atteint en 2007 124645 millions deuros avec pour conseacutequence que le montant maximum de la sanction encourue seacutelegraveve agrave 12 500 000 euro que ces consideacuterations sont incontestables et incontesteacutees et quelles incluent neacutecessairement leacutevaluation de la capaciteacute contributive de la SEM GEG qui na pas traverseacute agrave leacutepoque des faits poursuivis ni posteacuterieurement des difficulteacutes particuliegraveres qui commanderaient une autre analyse

Quagrave titre superfeacutetatoire mais sans inexactitude il a eacuteteacute tenu compte par lAutoriteacute du fait que les ventes deacutelectriciteacute reacutealiseacutees par la SEM GEO nont cesseacute de progresser entre 2004 et 2007 pour atteindre 64 261 401 euros en 2007

Quenfin il ny a pas lieu de tenir compte de lindemnisation provisionnelle accordeacutee agrave Poweo par la juridiction commerciale pour les raisons susdites

Consideacuterant quayant ainsi proceacutedeacute sans erreur agrave lanalyse de la graviteacute de la pratique anticoncurrentielle ayant ensuite eacutevalueacute avec pondeacuteration le dommage agrave leacuteconomie et ayant preacuteciseacutement examineacute les facteurs dindividualisation de la sanction lAutoriteacute a exactement proportionneacute celle-ci agrave une hauteur dagrave peine trois pour mille du meilleur chiffre daffaires annuel de la peacuteriode consideacutereacutee que la demande de reacuteformation de la SEM GEG est manifestement infondeacutee

PAR CES MOTIFS

Rejette le recours

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Condamne la SEM GEG aux deacutepens

LE [REFFIER

Thierry FOSSIER

Cour dAppel de Paris ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 RG nO 200909599 - 13egraveme page

Mais consideacuterant que le respect des droits de la deacutefense revecirctant une importance capitale dans les proceacutedures telles que celle en lespegravece il importe deacuteviter que ces droits puissent ecirctre irreacutemeacutediablement compromis notamment en raison dune dureacutee excessive de la phase denquecircte et que cette dureacutee soit susceptible de faire obstacle agrave leacutetablissement de preuves visant agrave reacutefuter lexistence de comportements de nature agrave engager la responsabiliteacute des entreprises concerneacutees que pour cette raison lexamen de leacuteventuelle entrave agrave lexercice des droits de la deacutefense ne doit pas ecirctre limiteacute agrave la phase mecircme dans laquelle ces droits produisent leur plein effet agrave savoir la seconde phase de la proceacutedure administrative que lappreacuteciation de la source de leacuteventuel affaiblissement de lefficaciteacute des droits de la deacutefense doit seacutetendre agrave lensemble de cette proceacutedure en se reacutefeacuterant agrave la dureacutee totale de celle-ci enquecircte comprise que pour autant la dureacutee excessive de la proceacutedure ne peut ecirctre deacutetermineacutee en soi de maniegravere abstraite

Quen lespegravece une dureacutee de trois ans et demi ne peut ecirctre consideacutereacutee comme excessive au sens de la Convention europeacuteenne de sauvegarde des droits de 1 homme si la socieacuteteacute requeacuterante ne deacutemontre pas en quoi in concreto elle aurait eacuteteacute priveacutee du droit de se deacutefendre

Quagrave ce sujet il peut ecirctre constateacute quapregraves une saisine intervenue le 12juillet 2005 agrave linitiative de la Commission de reacutegulation de leacutenergie le preacutesident de la SEM GEG a eacuteteacute entendu par le rapporteur le 10 juillet 2007 en lui donnant connaissance de la lettre de saisine que la SEM GEG a disposeacute eacutegalement des deacutelais preacutevus par larticle L 463-2 du code de commerce pour faire valoir ses observations quil ne reacutesulte daucune deacutemonstration et mecircme daucune assertion claire de la requeacuterante quelle nait pas pu preacuteparer de maniegravere satisfaisante sa deacutefense devant lAutoriteacute puis devant la cour quelle invoque mais ne prouve pas une impossibiliteacute de recueillir des teacutemoignages agrave deacutecharge notamment du fait des changements susceptibles dintervenir dans la composition des organes dirigeants des entreprises concerneacutees et des mouvements affectant les autres personnels de celles-ci quelle na pas agrave deacuteplorer non plus la perte des documents commerciaux ou internes des notes ou courriers-papier les courriels et comptes-rendus de conversations teacuteleacutephoniques dont la destruction aurait eacuteteacute deacutecideacutee apregraves un temps bref en quoi la SEM GEG napporte aucun eacuteleacutement seacuterieux preacutecis et concret dune violation de ses droits de la deacutefense

Que le moyen sera rejeteacute

B - Sur la deacutefinition du marcheacute pertinent

Consideacuterant que la SEM GEG relegraveve que le marcheacute de produits retenu par lAutoriteacute est celui de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels eacuteligibles que pourtant le marcheacute des clients professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute cest-agrave-dire le marcheacute ouvert agrave la concurrence le la juillet 2004 doit seul ecirctre pris en consideacuteration la clientegravele eacutetant cloisonneacutee selon le type doffre (tarif reacuteglementeacute ou prix du marcheacute) quelle a choisi et une faible part ayant choisi le marcheacute en raison dun effet de ciseau que la SEM GEG sappuie agrave ce titre sur la deacutecision n0 07-MC-Ol dans laquelle le Conseil de la concurrence a retenu que lirreacuteversibiliteacute du passage vers les offres de marcheacute eacutetait lun des principaux eacuteleacutements permettant de deacutefinir un marcheacute distinct de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute

Que sagissant du marcheacute geacuteographique si lAutoriteacute la deacutefini comme local la SEM GEG entend deacutemontrer que celui-ci est national car la reacuteglementation libeacuteralisant le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute est national et les conditions - et les opeacuterateurs (dont Poweo) - de commercialisation de leacutelectriciteacute sont les mecircmes sur lensemble du territoire

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG na 200909599 - 6egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Mais consideacuterant sur le marcheacute de produits que le marcheacute se deacutefinit comme le lieu sur lequel se rencontrent loffre et la demande pour un produit ou un service speacutecifique que sur un marcheacute donneacute les uniteacutes offertes sont parfaitement substituables pour les consommateurs qui peuvent ainsi arbitrer entre les offreurs lorsquil y en a plusieurs ce qui implique que chaque offreur est soumis agrave la concurrence par les prix des autres

Que le 1 er juillet 2004 les clients petits professionnels se sont vu reconnaicirctre le droit dacheter de leacutelectriciteacute aupregraves du fournisseur de leur choix tout en conservant la possibiliteacute de continuer agrave sapprovisionner aupregraves de leur fournisseur historique et de beacuteneacuteficier de la part de celui-ci des tarifs reacuteglementeacutes fixeacutes par lEtat que de feacutevrier agrave avril 2005 des clients de la SEM GEG ont quitteacute le fournisseur historique au profit du fournisseur alternatif ce qui deacutemontre quil existait agrave ce moment de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute agrave la concurrence une substituabiliteacute entre les services offerts par la SEM GEG et Poweo et quen conseacutequence ces deux entreprises intervenaient sur le mecircme marcheacute

Consideacuterant que du tout il seacutevince comme la affirmeacute la Deacutecision (parag 40 agrave 51) que le marcheacute pertinent est bien le marcheacute de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels et non le marcheacute des seuls professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute

Consideacuterant en outre sur le marcheacute geacuteographique que le marcheacute geacuteographique comprend le territoire sur lequel les entreprises concerneacutees sont engageacutees dans loffre des biens et services en cause sur lequel les conditions de concurrence sont suffisamment homogegravenes et qui peut ecirctre distingueacute de zones geacuteographiques voisines parce que en particulier les conditions de concurrence y diffegraverent de maniegravere appreacuteciable

Quen lespegravece les clients professionnels situeacutes dans la zone de desserte de la SEM GEG ne peuvent acheter de leacutelectriciteacute quaupregraves de la SEM GEG fournisseur exclusif deacutelectriciteacute au tarif reacuteglementeacute sur sa zone ou aupregraves de fournisseurs alternatifs deacutelectriciteacute au prix de marcheacute qui ont conclu un contrat daccegraves au reacuteseau de distribution geacutereacute en monopole par la SEM GEG pour acheminer leur eacutelectriciteacute jusquau client final quil en reacutesulte quils ne peuvent se procurer de leacutelectriciteacute quagrave linteacuterieur de la zone geacuteographique couverte par le distributeur non nationaliseacute

Consideacuterant quen conseacutequence le marcheacute pertinent est la zone desservie par le reacuteseau de distribution de leacutelectriciteacute de Grenoble que le moyen contraire de la SEM GEG sera rejeteacute

C - Sur lexistence dune position dominante

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie avoir occupeacute sur le marcheacute tel quelle la consideacutereacute une position dominante au moment des faits puisquelle gegravere et fournit 059 pl 00 en volume et 067 pl 00 des sites que sa position dopeacuterateur preacutetenducircment historique a de toute faccedilon eacuteteacute aneacuteantie par louverture du marcheacute agrave la concurrence eacutevolution sur laquelle la Deacutecision est demeureacutee taisante

Mais consideacuterant que comme il a eacuteteacute eacutenonceacute preacuteceacutedemment le marcheacute pertinent nest pas celui que preacutetend la SEM GEG en sorte que son raisonnement devant la cour est neacutecessairement vicieacute

Consideacuterant par ailleurs que le marcheacute de la fourniture deacutelectriciteacute nayant eacuteteacute ouvert agrave la concurrence que le 1er juillet 2004 et la SEM GEG deacutetenant jusquagrave cette date un monopole sur ce marcheacute la reacutepartition des parts de marcheacute navait pas sensiblement eacutevolueacute au moment des faits en avril 2005 puisque seule la socieacuteteacute POWEO avait pris des initiatives (cf Deacutecision parag 55)

ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 Cour dAppel de Paris

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Que lors dune audition dun responsable de la SEM GEGle 10 juillet 2007 il a eacuteteacute eacutetabli que la part de marcheacute de la SEM GEG seacutelevait agrave 80 quil neacutetait donc pas anormal pour lAdlC de consideacuterer que cette part ait eacuteteacute plus importante au moment des faits deux ans plus tocirct agrave un moment ougrave louverture du marcheacute eacutetait balbutiante

Consideacuterant quen conseacutequence lexistence dune position dominante de la SEM GEG sur le marcheacute local de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles est aveacutereacutee et que le moyen de la requeacuterante de ce chef sera rejeteacute

Consideacuterant pour reacutepondre complegravetement aux arguties de la requeacuterante et relativement agrave la perte juridique de position monopolistique de la SEM GEG que quand bien mecircme louverture agrave la concurrence dun monopole entraicircne neacutecessairement une perte de parts de marcheacute pour lopeacuterateur historique une analyse concregravete peut permettre de constater toutefois que lopeacuterateur historique conserve une position de monopole de fait ou de quasi-monopole du fait de sa notorieacuteteacute par exemple quen loccurrence lAutoriteacute eacutetait fondeacutee agrave relever que la position dominante de la SEM GEG ne pouvait quecirctre renforceacutee par sa notorieacuteteacute dopeacuterateur historique aux yeux des clients eacuteligibles et par son monopole sur les marcheacutes connexes de la distribution deacutelectriciteacute et de fourniture deacutelectriciteacute aux clients reacutesidentiels et sur lactiviteacute gaziegravere quen teacutemoigne le fait que degraves 2006 elle a pu restaurer sa position de monopoleur comme il sera dit plus loin

D - Sur la pratique de deacutenigrement constitutive de labus de position dominante

Consideacuterant que la SEM GEG affirme que les communiqueacutes de presse litigieux dailleurs tregraves peu nombreux nont eu aucun objet anticoncurrentiel ne relegraveveraient au pire que de laction en reacuteparation pour concurrence deacuteloyale mais nont mecircme pas eu de caractegravere de deacutenigrement que la cour en jugerait-elle autrement agrave linstar de lAdIC tout deacutenigrement dont une entreprise en position dominante serait lauteur nest pas neacutecessairement constitutif dun abus de position dominante quil est toujours neacutecessaire deacutetablir un lien entre la domination de lentreprise et la pratique de deacutenigrement que sous cet angle la SEM GEG avance que le communiqueacute de presse litigieux ne consistait quagrave deacutementir les informations fausses ou deacuteloyales diffuseacutees par certains agents commerciaux mandateacutes par Poweo apregraves leacutechec dune deacutemarche amiable en forme de mise en demeure cinq j ours avant le premier des deux communiqueacutes de presse que le discreacutedit ne pouvait pas ecirctre qualifieacute de systeacutematique puisque la reacuteaction de la SEM GEG eacutetait ponctuelle et circonstancieacutee Poweo ne contestant pas que la pratique a cesseacute degraves le deacutebut de la proceacutedure judiciaire dindemnisation le 22 avril 2005 quenfin la SEM GEG conteste la confusion qui lui est reprocheacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees dans le secteur ouvert agrave la concurrence en sorte que le lien de causaliteacute entre la position dite dominante et le deacutenigrement nexiste pas et ne peut deacutegeacuteneacuterer en abus

Mais consideacuterant en premier lieu que lAutoriteacute de la concurrence a veilleacute agrave souligner que labus de position dominante ne se confond pas avec une pratique de concurrence deacuteloyale quen effet alors que laction en concurrence deacuteloyale protegravege les concurrents la sanction de labus de position dominante vise agrave proteacuteger lordre public eacuteconomique en sorte dailleurs que labsence de POWEO aux deacutebats devant la cour ne preacutesente strictement aucun inconveacutenient quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement aux assertions de la requeacuterante il faut rappeler quen matiegravere dabus de position dominante les comportements fautifs de lentreprise au regard des dispositions geacuteneacuterales de larticle 1382 du code civil constituent des abus de position dominante

Consideacuterant en deuxiegraveme lieu que le communiqueacute de presse litigieux contenait des mentions de deacutenigrement agrave leacutegard de Poweo nouvel entrant sur le marcheacute que ce communiqueacute faisait eacutetat de laquoconception de la qualiteacute de services tregraves relative raquo de l ( usage de meacutethodes peu scrupuleusesraquo et de la poursuite de laquo fins strictement financiegraveresraquo que certaines mentions eacutetaient en outre de nature agrave induire les clients eacuteligibles en erreur dans la mesure ougrave il eacutetait indiqueacute que laquocet opeacuterateur annonce agrave tort quil a conclu un partenariat

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avec la SEM GEG raquo alors que Poweo avait effectivement conclu un contrat daccegraves au reacuteseau de distribution le 5 janvier 2005

Consideacuterant en troisiegraveme lieu sur le lien entre position dominante et deacutenigrement que plusieurs eacuteleacutements agrave juste titre releveacutes par la Deacutecision leacutetablissent

Que le communiqueacute de presse a constitueacute un argumentaire des agents commerciaux de la SEM GEG pour inciter des clients qui avaient souscrit un contrat avec Poweo agrave le reacutesilier et agrave renouer avec le seul autre opeacuterateur la SEM GEG que le communiqueacute litigieux a ainsi eacuteteacute non pas un acte isoleacute mais le point de deacutepart dune contre-offensive fondeacutee sur un deacutenigrement systeacutematique et destineacutee agrave affaiblir le concurrent et qui neacutetait concregravetement possible que pour un opeacuterateur en position dominante

Que ce faisant la SEM GEG a profiteacute du caractegravere tregraves reacutecent de louverture du marcheacute agrave la concurrence (la juillet 2004 soit agrave peine neufmois auparavant) et a pu user de la notorieacuteteacute et de limage encore preacutesentes aux esprits lieacutees agrave lactiviteacute de monopole geacuterant un service public

Que cette analyse est corroboreacutee par les chiffres reacuteunis en annexe au procegraves-verbal daudition du responsable de la SEM GEG devant le Rapporteur de lAutoriteacute qui fait apparaicirctre en tenant compte du temps-retard des souscriptions et des reacutesiliations que le nombre de contrats passeacutes par des clients avec Poweo a augmenteacute tregraves fortement en mars et avril 2005 mais na cesseacute de deacutecroicirctre ensuite comme il sera redit par la cour agrave propos des effets des pratiques en sorte que la SEM GEG a retrouveacute finalement sa position historique

Consideacuterant en quatriegraveme lieu que le deacutenigrement eacutetait dautant plus rechercheacute que les fOlmulations du communiqueacute de presse semblaient preacutesenter Poweo cornnle incapable dassumer la fonction de distributeur alors que cette socieacuteteacute na jamais preacutetendu agrave cette fonction et ne laurait leacutegalement pas pu que de mecircme et encore le communiqueacute nie tout partenariat entre la SEM GEG et Poweo alors quun contrat les liait depuis janvier 2005 comme il a eacuteteacute eacutenonceacute preacuteceacutedemment

Consideacuterant que du tout il reacutesulte que les communiqueacutes litigieux ont constitueacute en eux-mecircmes et par lusage ulteacuterieur qui en a eacuteteacute fait un deacutenigrement adosseacute agrave la position dominante de la SEM GEG et constitutif par conseacutequent dun abus de cette position

E - Sur les effets des pratiques

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie la pertinence de lanalyse juridique de lAutoriteacute selon laquelle les pratiques ont eu agrave la fois pour objet et pour effet dentraver le deacuteveloppement dun concurrent et de le deacutecider agrave mettre un terme agrave son action commerciale agrave Grenoble

Quen fait selon la socieacuteteacute GEG lAutoriteacute ne peut pas se contenter de mentionner le nombre de contrats signeacutes par Poweo resteacute stable (autour de 190)jusquenjanvier 2006 quagrave supposer que la progression se soit affaiblie agrave compter des publications du communiqueacute de presse dautres facteurs peuvent expliquer ce fait preacutetendu notamment (i) le communiqueacute de presse na eu quune porteacutee limiteacutee (caractegravere limiteacute dans le temps et caractegravere geacuteneacuteral contrairement au deacutemarchage cibleacute de POWEO) (ii) POWEO a modifieacute sa strateacutegie commerciale (arrecirct des deacutemarchages et prospections) (iii) les prix de gros de leacutelectriciteacute ont fortement augmenteacute et ont deacutepasseacute les tarifs reacuteglementeacutes rendant peu inteacuteressante la conclusion dun contrat avec un opeacuterateur alternatif ( ciseau tarifaire) (iv) POWEO a manifesteacute sa volonteacute de se deacutesengager de la fourniture (marcheacute aval) pour se concentrer sur la production deacutelectriciteacute (marcheacute amont)

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Quen outre la SEM GEG se fonde surle nombre de points de service alimenteacutes par Poweo cest~agrave-dire les sites de livraison aux clients eacuteligibles quelle estime ecirctre lindicateur le plus pertinent pour mesurer le poids respectif des diffeacuterents acteurs que ce nombre est passeacute trois mois apregraves la publication du communiqueacute de presse de 15 agrave 190 (tableau GEG parag222 p41) que par ailleurs la SEM GEG affirme que la pratique na pas pu avoir deffet deacuteviction car le message commercial na eacuteteacute diffuseacute quagrave deux reprises que le nombre de reacutesiliations eacutetabli agrave 27 sur 190 contrats signeacutes est faible et la preuve na pas eacuteteacute apporteacutee que les agents commerciaux de la SEM GEG auraient relayeacute sur le terrain les eacuteleacutements deacutenigrants du communiqueacute de presse que la SEM GEG en conclut quil nexiste donc aucun lien neacutecessaire entre la publication du communiqueacute de presse et la preacutetendue sortie du marcheacute de POWEO

Que sur leffet de forclusion la SEM GEG avance quil existe dautres fournisseurs alternatifs sur le marcheacute de Grenoble quainsi GDF est le premier fournisseur agrave Grenoble en offre de marcheacute

Quen somme comme en teacutemoigne la pratique deacutecisionnelle de lAutoriteacute il nest plus permis darticuler des preacutesomptions sur les effets des pratiques et en lespegravece aucune deacutemonstration nest faite par la Deacutecision

Mais consideacuterant quen droit lAutoriteacute avait bien pour mission de rechercher leffet anticoncurrentiel des pratiques de la SEM GEG au sens de larticle L 420-2 Ccom

Que la recherche de leffet anticoncurrentiel de la pratique poursuivie est preacutesenteacutee par la SEM GEG tantocirct comme le but poursuivi concregravetement par la SEM GEG auquel cas lanalyse se confond avec celle de labus meneacutee preacuteceacutedemment par la cour tantocirct comme le ressort essentiel du comportement (pratique anticoncurrentielle per se) auquel cas la conjonction OU queacutenonce la loi indique que leffet anticoncurrentiel suffit agrave consacrer le grief poursuivi

Consideacuterant quen fait lAutoriteacute a pu relever la concomitance entre la publication agrave deux reprises du communiqueacute de presse les 13 et 18 avril 2005 et la baisse du nombre de contrats signeacutes par Poweo quapregraves correction tenant au deacutecalage entre la date de souscription des contrats et celle de prise deffet des changements de fournisseur le nombre de contrats signeacutes a eacutevolueacute de la maniegravere suivante Ont eacuteteacute signeacutes par Poweo en feacutevrier 2005 un contrat en mars 14 en avril 107 puis en mai 68 en juin 0 et en juillet et au delagrave aucun contrat que du 17 avril au 17 mai 2005 la socieacuteteacute Poweo a reccedilu 36 lettres de reacutesiliation dont 27 eacutetaient comme la SEM GEG nen disconvient pas identiques en la forme et une envoyeacutee des locaux de la SEM GEG elle-mecircme quenfin la socieacuteteacute Poweo na conclu aucun nouveau contrat entre juin 2005 et juin 2008 quen somme elle na pu conserver une bonne part des contrats dorigine que par le jeu de lirreacuteversibiliteacute leacutegale deacutecrite preacuteceacutedemment

Consideacuterant que degraves lors lAutoriteacute a pu agrave bon droit relever les effets anticoncurrentiels des pratiques de la SEM GEG contrairement agrave ce que celle-ci soutient

F - Sur leacutevaluation de la sanction

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie que les pratiques incrimineacutees aient preacutesenteacute un degreacute significatif de graviteacute

Quelle estime aussi que les pratiques nont pas occasionneacute un quelconque dommage agrave leacuteconomie quelle indique plus en deacutetail que Gaz de France a reacuteussi agrave simplanter pendant la peacuteriode incrimineacutee et agrave devenir le premier fournisseur en offre de

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marcheacute agrave Grenoble que le surplus du consommateur na pas eacuteteacute significativement affecteacute par les pratiques litigieuses comme leacutenonce la Deacutecision elle-mecircme que le ciseau tarifaire eacutetait la seule question qui se posait reacuteellement et qui a conduit agrave la preacutetendue eacuteviction de Poweo

Quelle rappelle au titre de lindividualisation de la sanction quelle dispose dune faible surface financiegravere

Mais consideacuterant sur la graviteacute du comportement que celle-ci ne se confond pas avec la reacutealiteacute de labus de position dominante examineacutee preacuteceacutedemment mais doit proceacuteder dune anal yse des meacutethodes utiliseacutees par la S EM G EG pour parvenir agrave ses fins dune mesure des parts de marcheacute que deacutetient lentreprise poursuivie dun examen de la dureacutee du comportement anticoncurrentiel de leacutetendue ou la complexiteacute des processus anticoncurrentiels de laffectation directe des prix jusques et y compris les prix de deacutetail dune analyse des marcheacutes concerneacutes selon quil sagit de marcheacutes sensibles ou qui le sont moins de marcheacutes touchant directement le consommateur final ou pas de lidentification de clients personnes physiques ou petites entreprises ou de clients vulneacuterables (enfants personnes acircgeacutees malades ) ou dune clientegravele captive au sens eacuteconomique de la continuation du comportement anticoncurrentiel apregraves la saisine de lAutoriteacute ou encore du fait quil sagisse dun marcheacute public

Quen lespegravece lAutoriteacute a pu retenir tour agrave tour que la SEM GEG a opeacutereacute une confusion deacutelibeacutereacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees en concurrence (DeacutecO sect 70 suiv deacutejagrave examineacutes plus haut) que le discours deacutenigrant du communiqueacute de presse est particuliegraverement reacutepreacutehensible car il provient de lopeacuterateur historique (DeacutecO sect 91) que les pratiques nont pas eacuteteacute instantaneacutees puisquelles ont eacuteteacute preacuteceacutedeacutees de courriers (DeacutecO sect 94) et suivies de deacutemarchages aupregraves des anciens clients pour regagner leur confiance

Quil faut ajouter que les pratiques incrimineacutees ont eu pour but dentraver le deacuteveloppement dun concurrent sur le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles de Grenoble au moment crucial et symbolique de louverture agrave la concurrence

Que reacuteciproquement il ne peut ecirctre reprocheacute agrave lAutoriteacute de ne pas avoir tenu compte des facteurs habituels datteacutenuation qui eacutetaient eacutetrangers agrave lespegravece tels que lancienneteacute des faits - la saisine de lAutoriteacute ayant eacuteteacute immeacutediate - la cessation du comportement anticoncurrentiel agrave partir de la saisine de lAutoriteacute - labandon du marcheacute par Poweo ayant restaureacute la position de monopoleur de la SEM GEG - ou le pouvoir de marcheacute de Poweo - tout-agrave-fait modeste ainsi quil a eacuteteacute dit -

Que degraves lors il ne peut ecirctre fait aucun reproche agrave la Deacutecision ni en droit ni en fait dans lexamen de la graviteacute du comportement

Consideacuterant encore sur le dommage causeacute agrave leacuteconomie que lAutoriteacute a pu valablement caracteacuteriser une probabiliteacute raisonnable de dommage collectif

Que la proceacutedure a deacutemontreacute que la SEM GEG a empecirccheacute louverture du marcheacute agrave la concurrence en reacuteduisant le nombre des opeacuterateurs au point que cette entreprise a pu revenir agrave la situation qui eacutetait la sienne avant le 1 er juillet 2004 soit anteacuterieurement agrave louverture du marcheacute agrave la concurrence en restaurant sa position de monopoleur

Que cependant comme le reconnaicirct agrave juste titre la Deacutecision ce dommage a eacuteteacute limiteacute agrave la zone de desserte de Grenoble

Que lAutoriteacute a pris soin encore deacutecarter expresseacutement le facteur important dit daffectation significative du surplus du consommateur quen effet si la SEM GEG sest retrouveacutee en position de monopole de fait sur le marcheacute pertinent apregraves le retrait de Poweo elle neacutetait pas libre den profiter et de pratiquer tes prix de monopole car elle devait

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appliquer le tarif reacuteglementeacute fixeacute par la puissance publique que de plus au vu des conditions du marcheacute libre de leacutelectriciteacute linteacuterecirct de la clientegravele de masse sauf bouleversement des prix de marcheacute [eacutetait] de rester aux tarifs reacuteglementeacutes (DeacutecO sect 97 suiv) notamment en raison du ciseau tarifaire tel quil a eacuteteacute exposeacute preacuteceacutedemment

Que reacuteciproquement lAutoriteacute na tireacute aucun argument dautres facteurs significatifs du dommage agrave leacuteconomie na notamment pas exageacutereacute leacutetendue du marcheacute affecteacute par le comportement anticoncurrentiel ni les perturbations du marcheacute

Que lAutoriteacute admet eacutegalement les rapports dactiviteacute de la CRE depuis 2005 qui font eacutetat de la stagnation du rythme de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute pour les clients professionnels et ce sur lensemble du territoire national que lAutoriteacute nimpute pas labsence dopeacuterateurs alternatifs en tout cas jusquagrave larriveacutee de ODF sur le marcheacute aux pratiques de la SEM GEG

Quenfin lAutoriteacute na pas neacutegligeacute de tenir compte de ce que Poweo na pas deacuteposeacute plainte devant lAutoriteacute de la concurrence pour abus de position dominante le Rapporteur ayant meneacute son instruction sur la seule saisine de la CRE et de ce que Poweo ne sest pas non plus jointe agrave la proceacutedure par la suite quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement agrave un argument de la SEM GEO lAutoriteacute de la concurrence dans sa mission de protection des consommateurs na pas besoin de lappui ou de lassentiment des concurrents moyennant quoi la reacuteparation accordeacutee auxdits concurrents par les voies de droit commun na pas dinfluence sur la proceacutedure de reacutegulation punitive et preacuteventive fondeacutee sur lordre public eacuteconomique

Quen somme loin dexageacuterer le dommage agrave leacuteconomie occasionneacute par le comportement poursuivi et apregraves avoir reacutepondu point par point aux arguments de Poweo lAutoriteacute a fait de ce dommage une analyse tregraves pondeacutereacutee que la cour approuve

Consideacuterant enfin sagissant de lindividualisation de la sanction (sect 104 agrave 106) et que lAutoriteacute de la concurrence a preacuteciseacute que le chiffre daffaires consolideacute de la SEM OEG avait atteint en 2007 124645 millions deuros avec pour conseacutequence que le montant maximum de la sanction encourue seacutelegraveve agrave 12 500 000 euro que ces consideacuterations sont incontestables et incontesteacutees et quelles incluent neacutecessairement leacutevaluation de la capaciteacute contributive de la SEM GEG qui na pas traverseacute agrave leacutepoque des faits poursuivis ni posteacuterieurement des difficulteacutes particuliegraveres qui commanderaient une autre analyse

Quagrave titre superfeacutetatoire mais sans inexactitude il a eacuteteacute tenu compte par lAutoriteacute du fait que les ventes deacutelectriciteacute reacutealiseacutees par la SEM GEO nont cesseacute de progresser entre 2004 et 2007 pour atteindre 64 261 401 euros en 2007

Quenfin il ny a pas lieu de tenir compte de lindemnisation provisionnelle accordeacutee agrave Poweo par la juridiction commerciale pour les raisons susdites

Consideacuterant quayant ainsi proceacutedeacute sans erreur agrave lanalyse de la graviteacute de la pratique anticoncurrentielle ayant ensuite eacutevalueacute avec pondeacuteration le dommage agrave leacuteconomie et ayant preacuteciseacutement examineacute les facteurs dindividualisation de la sanction lAutoriteacute a exactement proportionneacute celle-ci agrave une hauteur dagrave peine trois pour mille du meilleur chiffre daffaires annuel de la peacuteriode consideacutereacutee que la demande de reacuteformation de la SEM GEG est manifestement infondeacutee

PAR CES MOTIFS

Rejette le recours

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Condamne la SEM GEG aux deacutepens

LE [REFFIER

Thierry FOSSIER

Cour dAppel de Paris ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 RG nO 200909599 - 13egraveme page

Mais consideacuterant sur le marcheacute de produits que le marcheacute se deacutefinit comme le lieu sur lequel se rencontrent loffre et la demande pour un produit ou un service speacutecifique que sur un marcheacute donneacute les uniteacutes offertes sont parfaitement substituables pour les consommateurs qui peuvent ainsi arbitrer entre les offreurs lorsquil y en a plusieurs ce qui implique que chaque offreur est soumis agrave la concurrence par les prix des autres

Que le 1 er juillet 2004 les clients petits professionnels se sont vu reconnaicirctre le droit dacheter de leacutelectriciteacute aupregraves du fournisseur de leur choix tout en conservant la possibiliteacute de continuer agrave sapprovisionner aupregraves de leur fournisseur historique et de beacuteneacuteficier de la part de celui-ci des tarifs reacuteglementeacutes fixeacutes par lEtat que de feacutevrier agrave avril 2005 des clients de la SEM GEG ont quitteacute le fournisseur historique au profit du fournisseur alternatif ce qui deacutemontre quil existait agrave ce moment de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute agrave la concurrence une substituabiliteacute entre les services offerts par la SEM GEG et Poweo et quen conseacutequence ces deux entreprises intervenaient sur le mecircme marcheacute

Consideacuterant que du tout il seacutevince comme la affirmeacute la Deacutecision (parag 40 agrave 51) que le marcheacute pertinent est bien le marcheacute de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients petits professionnels et non le marcheacute des seuls professionnels ayant exerceacute leur eacuteligibiliteacute

Consideacuterant en outre sur le marcheacute geacuteographique que le marcheacute geacuteographique comprend le territoire sur lequel les entreprises concerneacutees sont engageacutees dans loffre des biens et services en cause sur lequel les conditions de concurrence sont suffisamment homogegravenes et qui peut ecirctre distingueacute de zones geacuteographiques voisines parce que en particulier les conditions de concurrence y diffegraverent de maniegravere appreacuteciable

Quen lespegravece les clients professionnels situeacutes dans la zone de desserte de la SEM GEG ne peuvent acheter de leacutelectriciteacute quaupregraves de la SEM GEG fournisseur exclusif deacutelectriciteacute au tarif reacuteglementeacute sur sa zone ou aupregraves de fournisseurs alternatifs deacutelectriciteacute au prix de marcheacute qui ont conclu un contrat daccegraves au reacuteseau de distribution geacutereacute en monopole par la SEM GEG pour acheminer leur eacutelectriciteacute jusquau client final quil en reacutesulte quils ne peuvent se procurer de leacutelectriciteacute quagrave linteacuterieur de la zone geacuteographique couverte par le distributeur non nationaliseacute

Consideacuterant quen conseacutequence le marcheacute pertinent est la zone desservie par le reacuteseau de distribution de leacutelectriciteacute de Grenoble que le moyen contraire de la SEM GEG sera rejeteacute

C - Sur lexistence dune position dominante

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie avoir occupeacute sur le marcheacute tel quelle la consideacutereacute une position dominante au moment des faits puisquelle gegravere et fournit 059 pl 00 en volume et 067 pl 00 des sites que sa position dopeacuterateur preacutetenducircment historique a de toute faccedilon eacuteteacute aneacuteantie par louverture du marcheacute agrave la concurrence eacutevolution sur laquelle la Deacutecision est demeureacutee taisante

Mais consideacuterant que comme il a eacuteteacute eacutenonceacute preacuteceacutedemment le marcheacute pertinent nest pas celui que preacutetend la SEM GEG en sorte que son raisonnement devant la cour est neacutecessairement vicieacute

Consideacuterant par ailleurs que le marcheacute de la fourniture deacutelectriciteacute nayant eacuteteacute ouvert agrave la concurrence que le 1er juillet 2004 et la SEM GEG deacutetenant jusquagrave cette date un monopole sur ce marcheacute la reacutepartition des parts de marcheacute navait pas sensiblement eacutevolueacute au moment des faits en avril 2005 puisque seule la socieacuteteacute POWEO avait pris des initiatives (cf Deacutecision parag 55)

ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 Cour dAppel de Paris

RG na 200909599 - 7egraveme page

Que lors dune audition dun responsable de la SEM GEGle 10 juillet 2007 il a eacuteteacute eacutetabli que la part de marcheacute de la SEM GEG seacutelevait agrave 80 quil neacutetait donc pas anormal pour lAdlC de consideacuterer que cette part ait eacuteteacute plus importante au moment des faits deux ans plus tocirct agrave un moment ougrave louverture du marcheacute eacutetait balbutiante

Consideacuterant quen conseacutequence lexistence dune position dominante de la SEM GEG sur le marcheacute local de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles est aveacutereacutee et que le moyen de la requeacuterante de ce chef sera rejeteacute

Consideacuterant pour reacutepondre complegravetement aux arguties de la requeacuterante et relativement agrave la perte juridique de position monopolistique de la SEM GEG que quand bien mecircme louverture agrave la concurrence dun monopole entraicircne neacutecessairement une perte de parts de marcheacute pour lopeacuterateur historique une analyse concregravete peut permettre de constater toutefois que lopeacuterateur historique conserve une position de monopole de fait ou de quasi-monopole du fait de sa notorieacuteteacute par exemple quen loccurrence lAutoriteacute eacutetait fondeacutee agrave relever que la position dominante de la SEM GEG ne pouvait quecirctre renforceacutee par sa notorieacuteteacute dopeacuterateur historique aux yeux des clients eacuteligibles et par son monopole sur les marcheacutes connexes de la distribution deacutelectriciteacute et de fourniture deacutelectriciteacute aux clients reacutesidentiels et sur lactiviteacute gaziegravere quen teacutemoigne le fait que degraves 2006 elle a pu restaurer sa position de monopoleur comme il sera dit plus loin

D - Sur la pratique de deacutenigrement constitutive de labus de position dominante

Consideacuterant que la SEM GEG affirme que les communiqueacutes de presse litigieux dailleurs tregraves peu nombreux nont eu aucun objet anticoncurrentiel ne relegraveveraient au pire que de laction en reacuteparation pour concurrence deacuteloyale mais nont mecircme pas eu de caractegravere de deacutenigrement que la cour en jugerait-elle autrement agrave linstar de lAdIC tout deacutenigrement dont une entreprise en position dominante serait lauteur nest pas neacutecessairement constitutif dun abus de position dominante quil est toujours neacutecessaire deacutetablir un lien entre la domination de lentreprise et la pratique de deacutenigrement que sous cet angle la SEM GEG avance que le communiqueacute de presse litigieux ne consistait quagrave deacutementir les informations fausses ou deacuteloyales diffuseacutees par certains agents commerciaux mandateacutes par Poweo apregraves leacutechec dune deacutemarche amiable en forme de mise en demeure cinq j ours avant le premier des deux communiqueacutes de presse que le discreacutedit ne pouvait pas ecirctre qualifieacute de systeacutematique puisque la reacuteaction de la SEM GEG eacutetait ponctuelle et circonstancieacutee Poweo ne contestant pas que la pratique a cesseacute degraves le deacutebut de la proceacutedure judiciaire dindemnisation le 22 avril 2005 quenfin la SEM GEG conteste la confusion qui lui est reprocheacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees dans le secteur ouvert agrave la concurrence en sorte que le lien de causaliteacute entre la position dite dominante et le deacutenigrement nexiste pas et ne peut deacutegeacuteneacuterer en abus

Mais consideacuterant en premier lieu que lAutoriteacute de la concurrence a veilleacute agrave souligner que labus de position dominante ne se confond pas avec une pratique de concurrence deacuteloyale quen effet alors que laction en concurrence deacuteloyale protegravege les concurrents la sanction de labus de position dominante vise agrave proteacuteger lordre public eacuteconomique en sorte dailleurs que labsence de POWEO aux deacutebats devant la cour ne preacutesente strictement aucun inconveacutenient quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement aux assertions de la requeacuterante il faut rappeler quen matiegravere dabus de position dominante les comportements fautifs de lentreprise au regard des dispositions geacuteneacuterales de larticle 1382 du code civil constituent des abus de position dominante

Consideacuterant en deuxiegraveme lieu que le communiqueacute de presse litigieux contenait des mentions de deacutenigrement agrave leacutegard de Poweo nouvel entrant sur le marcheacute que ce communiqueacute faisait eacutetat de laquoconception de la qualiteacute de services tregraves relative raquo de l ( usage de meacutethodes peu scrupuleusesraquo et de la poursuite de laquo fins strictement financiegraveresraquo que certaines mentions eacutetaient en outre de nature agrave induire les clients eacuteligibles en erreur dans la mesure ougrave il eacutetait indiqueacute que laquocet opeacuterateur annonce agrave tort quil a conclu un partenariat

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 8egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

avec la SEM GEG raquo alors que Poweo avait effectivement conclu un contrat daccegraves au reacuteseau de distribution le 5 janvier 2005

Consideacuterant en troisiegraveme lieu sur le lien entre position dominante et deacutenigrement que plusieurs eacuteleacutements agrave juste titre releveacutes par la Deacutecision leacutetablissent

Que le communiqueacute de presse a constitueacute un argumentaire des agents commerciaux de la SEM GEG pour inciter des clients qui avaient souscrit un contrat avec Poweo agrave le reacutesilier et agrave renouer avec le seul autre opeacuterateur la SEM GEG que le communiqueacute litigieux a ainsi eacuteteacute non pas un acte isoleacute mais le point de deacutepart dune contre-offensive fondeacutee sur un deacutenigrement systeacutematique et destineacutee agrave affaiblir le concurrent et qui neacutetait concregravetement possible que pour un opeacuterateur en position dominante

Que ce faisant la SEM GEG a profiteacute du caractegravere tregraves reacutecent de louverture du marcheacute agrave la concurrence (la juillet 2004 soit agrave peine neufmois auparavant) et a pu user de la notorieacuteteacute et de limage encore preacutesentes aux esprits lieacutees agrave lactiviteacute de monopole geacuterant un service public

Que cette analyse est corroboreacutee par les chiffres reacuteunis en annexe au procegraves-verbal daudition du responsable de la SEM GEG devant le Rapporteur de lAutoriteacute qui fait apparaicirctre en tenant compte du temps-retard des souscriptions et des reacutesiliations que le nombre de contrats passeacutes par des clients avec Poweo a augmenteacute tregraves fortement en mars et avril 2005 mais na cesseacute de deacutecroicirctre ensuite comme il sera redit par la cour agrave propos des effets des pratiques en sorte que la SEM GEG a retrouveacute finalement sa position historique

Consideacuterant en quatriegraveme lieu que le deacutenigrement eacutetait dautant plus rechercheacute que les fOlmulations du communiqueacute de presse semblaient preacutesenter Poweo cornnle incapable dassumer la fonction de distributeur alors que cette socieacuteteacute na jamais preacutetendu agrave cette fonction et ne laurait leacutegalement pas pu que de mecircme et encore le communiqueacute nie tout partenariat entre la SEM GEG et Poweo alors quun contrat les liait depuis janvier 2005 comme il a eacuteteacute eacutenonceacute preacuteceacutedemment

Consideacuterant que du tout il reacutesulte que les communiqueacutes litigieux ont constitueacute en eux-mecircmes et par lusage ulteacuterieur qui en a eacuteteacute fait un deacutenigrement adosseacute agrave la position dominante de la SEM GEG et constitutif par conseacutequent dun abus de cette position

E - Sur les effets des pratiques

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie la pertinence de lanalyse juridique de lAutoriteacute selon laquelle les pratiques ont eu agrave la fois pour objet et pour effet dentraver le deacuteveloppement dun concurrent et de le deacutecider agrave mettre un terme agrave son action commerciale agrave Grenoble

Quen fait selon la socieacuteteacute GEG lAutoriteacute ne peut pas se contenter de mentionner le nombre de contrats signeacutes par Poweo resteacute stable (autour de 190)jusquenjanvier 2006 quagrave supposer que la progression se soit affaiblie agrave compter des publications du communiqueacute de presse dautres facteurs peuvent expliquer ce fait preacutetendu notamment (i) le communiqueacute de presse na eu quune porteacutee limiteacutee (caractegravere limiteacute dans le temps et caractegravere geacuteneacuteral contrairement au deacutemarchage cibleacute de POWEO) (ii) POWEO a modifieacute sa strateacutegie commerciale (arrecirct des deacutemarchages et prospections) (iii) les prix de gros de leacutelectriciteacute ont fortement augmenteacute et ont deacutepasseacute les tarifs reacuteglementeacutes rendant peu inteacuteressante la conclusion dun contrat avec un opeacuterateur alternatif ( ciseau tarifaire) (iv) POWEO a manifesteacute sa volonteacute de se deacutesengager de la fourniture (marcheacute aval) pour se concentrer sur la production deacutelectriciteacute (marcheacute amont)

1 ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RG na 200909599 - 9egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Quen outre la SEM GEG se fonde surle nombre de points de service alimenteacutes par Poweo cest~agrave-dire les sites de livraison aux clients eacuteligibles quelle estime ecirctre lindicateur le plus pertinent pour mesurer le poids respectif des diffeacuterents acteurs que ce nombre est passeacute trois mois apregraves la publication du communiqueacute de presse de 15 agrave 190 (tableau GEG parag222 p41) que par ailleurs la SEM GEG affirme que la pratique na pas pu avoir deffet deacuteviction car le message commercial na eacuteteacute diffuseacute quagrave deux reprises que le nombre de reacutesiliations eacutetabli agrave 27 sur 190 contrats signeacutes est faible et la preuve na pas eacuteteacute apporteacutee que les agents commerciaux de la SEM GEG auraient relayeacute sur le terrain les eacuteleacutements deacutenigrants du communiqueacute de presse que la SEM GEG en conclut quil nexiste donc aucun lien neacutecessaire entre la publication du communiqueacute de presse et la preacutetendue sortie du marcheacute de POWEO

Que sur leffet de forclusion la SEM GEG avance quil existe dautres fournisseurs alternatifs sur le marcheacute de Grenoble quainsi GDF est le premier fournisseur agrave Grenoble en offre de marcheacute

Quen somme comme en teacutemoigne la pratique deacutecisionnelle de lAutoriteacute il nest plus permis darticuler des preacutesomptions sur les effets des pratiques et en lespegravece aucune deacutemonstration nest faite par la Deacutecision

Mais consideacuterant quen droit lAutoriteacute avait bien pour mission de rechercher leffet anticoncurrentiel des pratiques de la SEM GEG au sens de larticle L 420-2 Ccom

Que la recherche de leffet anticoncurrentiel de la pratique poursuivie est preacutesenteacutee par la SEM GEG tantocirct comme le but poursuivi concregravetement par la SEM GEG auquel cas lanalyse se confond avec celle de labus meneacutee preacuteceacutedemment par la cour tantocirct comme le ressort essentiel du comportement (pratique anticoncurrentielle per se) auquel cas la conjonction OU queacutenonce la loi indique que leffet anticoncurrentiel suffit agrave consacrer le grief poursuivi

Consideacuterant quen fait lAutoriteacute a pu relever la concomitance entre la publication agrave deux reprises du communiqueacute de presse les 13 et 18 avril 2005 et la baisse du nombre de contrats signeacutes par Poweo quapregraves correction tenant au deacutecalage entre la date de souscription des contrats et celle de prise deffet des changements de fournisseur le nombre de contrats signeacutes a eacutevolueacute de la maniegravere suivante Ont eacuteteacute signeacutes par Poweo en feacutevrier 2005 un contrat en mars 14 en avril 107 puis en mai 68 en juin 0 et en juillet et au delagrave aucun contrat que du 17 avril au 17 mai 2005 la socieacuteteacute Poweo a reccedilu 36 lettres de reacutesiliation dont 27 eacutetaient comme la SEM GEG nen disconvient pas identiques en la forme et une envoyeacutee des locaux de la SEM GEG elle-mecircme quenfin la socieacuteteacute Poweo na conclu aucun nouveau contrat entre juin 2005 et juin 2008 quen somme elle na pu conserver une bonne part des contrats dorigine que par le jeu de lirreacuteversibiliteacute leacutegale deacutecrite preacuteceacutedemment

Consideacuterant que degraves lors lAutoriteacute a pu agrave bon droit relever les effets anticoncurrentiels des pratiques de la SEM GEG contrairement agrave ce que celle-ci soutient

F - Sur leacutevaluation de la sanction

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie que les pratiques incrimineacutees aient preacutesenteacute un degreacute significatif de graviteacute

Quelle estime aussi que les pratiques nont pas occasionneacute un quelconque dommage agrave leacuteconomie quelle indique plus en deacutetail que Gaz de France a reacuteussi agrave simplanter pendant la peacuteriode incrimineacutee et agrave devenir le premier fournisseur en offre de

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG ndeg 200909599 - 10egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

marcheacute agrave Grenoble que le surplus du consommateur na pas eacuteteacute significativement affecteacute par les pratiques litigieuses comme leacutenonce la Deacutecision elle-mecircme que le ciseau tarifaire eacutetait la seule question qui se posait reacuteellement et qui a conduit agrave la preacutetendue eacuteviction de Poweo

Quelle rappelle au titre de lindividualisation de la sanction quelle dispose dune faible surface financiegravere

Mais consideacuterant sur la graviteacute du comportement que celle-ci ne se confond pas avec la reacutealiteacute de labus de position dominante examineacutee preacuteceacutedemment mais doit proceacuteder dune anal yse des meacutethodes utiliseacutees par la S EM G EG pour parvenir agrave ses fins dune mesure des parts de marcheacute que deacutetient lentreprise poursuivie dun examen de la dureacutee du comportement anticoncurrentiel de leacutetendue ou la complexiteacute des processus anticoncurrentiels de laffectation directe des prix jusques et y compris les prix de deacutetail dune analyse des marcheacutes concerneacutes selon quil sagit de marcheacutes sensibles ou qui le sont moins de marcheacutes touchant directement le consommateur final ou pas de lidentification de clients personnes physiques ou petites entreprises ou de clients vulneacuterables (enfants personnes acircgeacutees malades ) ou dune clientegravele captive au sens eacuteconomique de la continuation du comportement anticoncurrentiel apregraves la saisine de lAutoriteacute ou encore du fait quil sagisse dun marcheacute public

Quen lespegravece lAutoriteacute a pu retenir tour agrave tour que la SEM GEG a opeacutereacute une confusion deacutelibeacutereacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees en concurrence (DeacutecO sect 70 suiv deacutejagrave examineacutes plus haut) que le discours deacutenigrant du communiqueacute de presse est particuliegraverement reacutepreacutehensible car il provient de lopeacuterateur historique (DeacutecO sect 91) que les pratiques nont pas eacuteteacute instantaneacutees puisquelles ont eacuteteacute preacuteceacutedeacutees de courriers (DeacutecO sect 94) et suivies de deacutemarchages aupregraves des anciens clients pour regagner leur confiance

Quil faut ajouter que les pratiques incrimineacutees ont eu pour but dentraver le deacuteveloppement dun concurrent sur le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles de Grenoble au moment crucial et symbolique de louverture agrave la concurrence

Que reacuteciproquement il ne peut ecirctre reprocheacute agrave lAutoriteacute de ne pas avoir tenu compte des facteurs habituels datteacutenuation qui eacutetaient eacutetrangers agrave lespegravece tels que lancienneteacute des faits - la saisine de lAutoriteacute ayant eacuteteacute immeacutediate - la cessation du comportement anticoncurrentiel agrave partir de la saisine de lAutoriteacute - labandon du marcheacute par Poweo ayant restaureacute la position de monopoleur de la SEM GEG - ou le pouvoir de marcheacute de Poweo - tout-agrave-fait modeste ainsi quil a eacuteteacute dit -

Que degraves lors il ne peut ecirctre fait aucun reproche agrave la Deacutecision ni en droit ni en fait dans lexamen de la graviteacute du comportement

Consideacuterant encore sur le dommage causeacute agrave leacuteconomie que lAutoriteacute a pu valablement caracteacuteriser une probabiliteacute raisonnable de dommage collectif

Que la proceacutedure a deacutemontreacute que la SEM GEG a empecirccheacute louverture du marcheacute agrave la concurrence en reacuteduisant le nombre des opeacuterateurs au point que cette entreprise a pu revenir agrave la situation qui eacutetait la sienne avant le 1 er juillet 2004 soit anteacuterieurement agrave louverture du marcheacute agrave la concurrence en restaurant sa position de monopoleur

Que cependant comme le reconnaicirct agrave juste titre la Deacutecision ce dommage a eacuteteacute limiteacute agrave la zone de desserte de Grenoble

Que lAutoriteacute a pris soin encore deacutecarter expresseacutement le facteur important dit daffectation significative du surplus du consommateur quen effet si la SEM GEG sest retrouveacutee en position de monopole de fait sur le marcheacute pertinent apregraves le retrait de Poweo elle neacutetait pas libre den profiter et de pratiquer tes prix de monopole car elle devait

ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 11egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7 1

appliquer le tarif reacuteglementeacute fixeacute par la puissance publique que de plus au vu des conditions du marcheacute libre de leacutelectriciteacute linteacuterecirct de la clientegravele de masse sauf bouleversement des prix de marcheacute [eacutetait] de rester aux tarifs reacuteglementeacutes (DeacutecO sect 97 suiv) notamment en raison du ciseau tarifaire tel quil a eacuteteacute exposeacute preacuteceacutedemment

Que reacuteciproquement lAutoriteacute na tireacute aucun argument dautres facteurs significatifs du dommage agrave leacuteconomie na notamment pas exageacutereacute leacutetendue du marcheacute affecteacute par le comportement anticoncurrentiel ni les perturbations du marcheacute

Que lAutoriteacute admet eacutegalement les rapports dactiviteacute de la CRE depuis 2005 qui font eacutetat de la stagnation du rythme de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute pour les clients professionnels et ce sur lensemble du territoire national que lAutoriteacute nimpute pas labsence dopeacuterateurs alternatifs en tout cas jusquagrave larriveacutee de ODF sur le marcheacute aux pratiques de la SEM GEG

Quenfin lAutoriteacute na pas neacutegligeacute de tenir compte de ce que Poweo na pas deacuteposeacute plainte devant lAutoriteacute de la concurrence pour abus de position dominante le Rapporteur ayant meneacute son instruction sur la seule saisine de la CRE et de ce que Poweo ne sest pas non plus jointe agrave la proceacutedure par la suite quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement agrave un argument de la SEM GEO lAutoriteacute de la concurrence dans sa mission de protection des consommateurs na pas besoin de lappui ou de lassentiment des concurrents moyennant quoi la reacuteparation accordeacutee auxdits concurrents par les voies de droit commun na pas dinfluence sur la proceacutedure de reacutegulation punitive et preacuteventive fondeacutee sur lordre public eacuteconomique

Quen somme loin dexageacuterer le dommage agrave leacuteconomie occasionneacute par le comportement poursuivi et apregraves avoir reacutepondu point par point aux arguments de Poweo lAutoriteacute a fait de ce dommage une analyse tregraves pondeacutereacutee que la cour approuve

Consideacuterant enfin sagissant de lindividualisation de la sanction (sect 104 agrave 106) et que lAutoriteacute de la concurrence a preacuteciseacute que le chiffre daffaires consolideacute de la SEM OEG avait atteint en 2007 124645 millions deuros avec pour conseacutequence que le montant maximum de la sanction encourue seacutelegraveve agrave 12 500 000 euro que ces consideacuterations sont incontestables et incontesteacutees et quelles incluent neacutecessairement leacutevaluation de la capaciteacute contributive de la SEM GEG qui na pas traverseacute agrave leacutepoque des faits poursuivis ni posteacuterieurement des difficulteacutes particuliegraveres qui commanderaient une autre analyse

Quagrave titre superfeacutetatoire mais sans inexactitude il a eacuteteacute tenu compte par lAutoriteacute du fait que les ventes deacutelectriciteacute reacutealiseacutees par la SEM GEO nont cesseacute de progresser entre 2004 et 2007 pour atteindre 64 261 401 euros en 2007

Quenfin il ny a pas lieu de tenir compte de lindemnisation provisionnelle accordeacutee agrave Poweo par la juridiction commerciale pour les raisons susdites

Consideacuterant quayant ainsi proceacutedeacute sans erreur agrave lanalyse de la graviteacute de la pratique anticoncurrentielle ayant ensuite eacutevalueacute avec pondeacuteration le dommage agrave leacuteconomie et ayant preacuteciseacutement examineacute les facteurs dindividualisation de la sanction lAutoriteacute a exactement proportionneacute celle-ci agrave une hauteur dagrave peine trois pour mille du meilleur chiffre daffaires annuel de la peacuteriode consideacutereacutee que la demande de reacuteformation de la SEM GEG est manifestement infondeacutee

PAR CES MOTIFS

Rejette le recours

ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RO ndeg 200909599 - 12egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Condamne la SEM GEG aux deacutepens

LE [REFFIER

Thierry FOSSIER

Cour dAppel de Paris ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 RG nO 200909599 - 13egraveme page

Que lors dune audition dun responsable de la SEM GEGle 10 juillet 2007 il a eacuteteacute eacutetabli que la part de marcheacute de la SEM GEG seacutelevait agrave 80 quil neacutetait donc pas anormal pour lAdlC de consideacuterer que cette part ait eacuteteacute plus importante au moment des faits deux ans plus tocirct agrave un moment ougrave louverture du marcheacute eacutetait balbutiante

Consideacuterant quen conseacutequence lexistence dune position dominante de la SEM GEG sur le marcheacute local de la fourniture deacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles est aveacutereacutee et que le moyen de la requeacuterante de ce chef sera rejeteacute

Consideacuterant pour reacutepondre complegravetement aux arguties de la requeacuterante et relativement agrave la perte juridique de position monopolistique de la SEM GEG que quand bien mecircme louverture agrave la concurrence dun monopole entraicircne neacutecessairement une perte de parts de marcheacute pour lopeacuterateur historique une analyse concregravete peut permettre de constater toutefois que lopeacuterateur historique conserve une position de monopole de fait ou de quasi-monopole du fait de sa notorieacuteteacute par exemple quen loccurrence lAutoriteacute eacutetait fondeacutee agrave relever que la position dominante de la SEM GEG ne pouvait quecirctre renforceacutee par sa notorieacuteteacute dopeacuterateur historique aux yeux des clients eacuteligibles et par son monopole sur les marcheacutes connexes de la distribution deacutelectriciteacute et de fourniture deacutelectriciteacute aux clients reacutesidentiels et sur lactiviteacute gaziegravere quen teacutemoigne le fait que degraves 2006 elle a pu restaurer sa position de monopoleur comme il sera dit plus loin

D - Sur la pratique de deacutenigrement constitutive de labus de position dominante

Consideacuterant que la SEM GEG affirme que les communiqueacutes de presse litigieux dailleurs tregraves peu nombreux nont eu aucun objet anticoncurrentiel ne relegraveveraient au pire que de laction en reacuteparation pour concurrence deacuteloyale mais nont mecircme pas eu de caractegravere de deacutenigrement que la cour en jugerait-elle autrement agrave linstar de lAdIC tout deacutenigrement dont une entreprise en position dominante serait lauteur nest pas neacutecessairement constitutif dun abus de position dominante quil est toujours neacutecessaire deacutetablir un lien entre la domination de lentreprise et la pratique de deacutenigrement que sous cet angle la SEM GEG avance que le communiqueacute de presse litigieux ne consistait quagrave deacutementir les informations fausses ou deacuteloyales diffuseacutees par certains agents commerciaux mandateacutes par Poweo apregraves leacutechec dune deacutemarche amiable en forme de mise en demeure cinq j ours avant le premier des deux communiqueacutes de presse que le discreacutedit ne pouvait pas ecirctre qualifieacute de systeacutematique puisque la reacuteaction de la SEM GEG eacutetait ponctuelle et circonstancieacutee Poweo ne contestant pas que la pratique a cesseacute degraves le deacutebut de la proceacutedure judiciaire dindemnisation le 22 avril 2005 quenfin la SEM GEG conteste la confusion qui lui est reprocheacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees dans le secteur ouvert agrave la concurrence en sorte que le lien de causaliteacute entre la position dite dominante et le deacutenigrement nexiste pas et ne peut deacutegeacuteneacuterer en abus

Mais consideacuterant en premier lieu que lAutoriteacute de la concurrence a veilleacute agrave souligner que labus de position dominante ne se confond pas avec une pratique de concurrence deacuteloyale quen effet alors que laction en concurrence deacuteloyale protegravege les concurrents la sanction de labus de position dominante vise agrave proteacuteger lordre public eacuteconomique en sorte dailleurs que labsence de POWEO aux deacutebats devant la cour ne preacutesente strictement aucun inconveacutenient quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement aux assertions de la requeacuterante il faut rappeler quen matiegravere dabus de position dominante les comportements fautifs de lentreprise au regard des dispositions geacuteneacuterales de larticle 1382 du code civil constituent des abus de position dominante

Consideacuterant en deuxiegraveme lieu que le communiqueacute de presse litigieux contenait des mentions de deacutenigrement agrave leacutegard de Poweo nouvel entrant sur le marcheacute que ce communiqueacute faisait eacutetat de laquoconception de la qualiteacute de services tregraves relative raquo de l ( usage de meacutethodes peu scrupuleusesraquo et de la poursuite de laquo fins strictement financiegraveresraquo que certaines mentions eacutetaient en outre de nature agrave induire les clients eacuteligibles en erreur dans la mesure ougrave il eacutetait indiqueacute que laquocet opeacuterateur annonce agrave tort quil a conclu un partenariat

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 8egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

avec la SEM GEG raquo alors que Poweo avait effectivement conclu un contrat daccegraves au reacuteseau de distribution le 5 janvier 2005

Consideacuterant en troisiegraveme lieu sur le lien entre position dominante et deacutenigrement que plusieurs eacuteleacutements agrave juste titre releveacutes par la Deacutecision leacutetablissent

Que le communiqueacute de presse a constitueacute un argumentaire des agents commerciaux de la SEM GEG pour inciter des clients qui avaient souscrit un contrat avec Poweo agrave le reacutesilier et agrave renouer avec le seul autre opeacuterateur la SEM GEG que le communiqueacute litigieux a ainsi eacuteteacute non pas un acte isoleacute mais le point de deacutepart dune contre-offensive fondeacutee sur un deacutenigrement systeacutematique et destineacutee agrave affaiblir le concurrent et qui neacutetait concregravetement possible que pour un opeacuterateur en position dominante

Que ce faisant la SEM GEG a profiteacute du caractegravere tregraves reacutecent de louverture du marcheacute agrave la concurrence (la juillet 2004 soit agrave peine neufmois auparavant) et a pu user de la notorieacuteteacute et de limage encore preacutesentes aux esprits lieacutees agrave lactiviteacute de monopole geacuterant un service public

Que cette analyse est corroboreacutee par les chiffres reacuteunis en annexe au procegraves-verbal daudition du responsable de la SEM GEG devant le Rapporteur de lAutoriteacute qui fait apparaicirctre en tenant compte du temps-retard des souscriptions et des reacutesiliations que le nombre de contrats passeacutes par des clients avec Poweo a augmenteacute tregraves fortement en mars et avril 2005 mais na cesseacute de deacutecroicirctre ensuite comme il sera redit par la cour agrave propos des effets des pratiques en sorte que la SEM GEG a retrouveacute finalement sa position historique

Consideacuterant en quatriegraveme lieu que le deacutenigrement eacutetait dautant plus rechercheacute que les fOlmulations du communiqueacute de presse semblaient preacutesenter Poweo cornnle incapable dassumer la fonction de distributeur alors que cette socieacuteteacute na jamais preacutetendu agrave cette fonction et ne laurait leacutegalement pas pu que de mecircme et encore le communiqueacute nie tout partenariat entre la SEM GEG et Poweo alors quun contrat les liait depuis janvier 2005 comme il a eacuteteacute eacutenonceacute preacuteceacutedemment

Consideacuterant que du tout il reacutesulte que les communiqueacutes litigieux ont constitueacute en eux-mecircmes et par lusage ulteacuterieur qui en a eacuteteacute fait un deacutenigrement adosseacute agrave la position dominante de la SEM GEG et constitutif par conseacutequent dun abus de cette position

E - Sur les effets des pratiques

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie la pertinence de lanalyse juridique de lAutoriteacute selon laquelle les pratiques ont eu agrave la fois pour objet et pour effet dentraver le deacuteveloppement dun concurrent et de le deacutecider agrave mettre un terme agrave son action commerciale agrave Grenoble

Quen fait selon la socieacuteteacute GEG lAutoriteacute ne peut pas se contenter de mentionner le nombre de contrats signeacutes par Poweo resteacute stable (autour de 190)jusquenjanvier 2006 quagrave supposer que la progression se soit affaiblie agrave compter des publications du communiqueacute de presse dautres facteurs peuvent expliquer ce fait preacutetendu notamment (i) le communiqueacute de presse na eu quune porteacutee limiteacutee (caractegravere limiteacute dans le temps et caractegravere geacuteneacuteral contrairement au deacutemarchage cibleacute de POWEO) (ii) POWEO a modifieacute sa strateacutegie commerciale (arrecirct des deacutemarchages et prospections) (iii) les prix de gros de leacutelectriciteacute ont fortement augmenteacute et ont deacutepasseacute les tarifs reacuteglementeacutes rendant peu inteacuteressante la conclusion dun contrat avec un opeacuterateur alternatif ( ciseau tarifaire) (iv) POWEO a manifesteacute sa volonteacute de se deacutesengager de la fourniture (marcheacute aval) pour se concentrer sur la production deacutelectriciteacute (marcheacute amont)

1 ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RG na 200909599 - 9egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Quen outre la SEM GEG se fonde surle nombre de points de service alimenteacutes par Poweo cest~agrave-dire les sites de livraison aux clients eacuteligibles quelle estime ecirctre lindicateur le plus pertinent pour mesurer le poids respectif des diffeacuterents acteurs que ce nombre est passeacute trois mois apregraves la publication du communiqueacute de presse de 15 agrave 190 (tableau GEG parag222 p41) que par ailleurs la SEM GEG affirme que la pratique na pas pu avoir deffet deacuteviction car le message commercial na eacuteteacute diffuseacute quagrave deux reprises que le nombre de reacutesiliations eacutetabli agrave 27 sur 190 contrats signeacutes est faible et la preuve na pas eacuteteacute apporteacutee que les agents commerciaux de la SEM GEG auraient relayeacute sur le terrain les eacuteleacutements deacutenigrants du communiqueacute de presse que la SEM GEG en conclut quil nexiste donc aucun lien neacutecessaire entre la publication du communiqueacute de presse et la preacutetendue sortie du marcheacute de POWEO

Que sur leffet de forclusion la SEM GEG avance quil existe dautres fournisseurs alternatifs sur le marcheacute de Grenoble quainsi GDF est le premier fournisseur agrave Grenoble en offre de marcheacute

Quen somme comme en teacutemoigne la pratique deacutecisionnelle de lAutoriteacute il nest plus permis darticuler des preacutesomptions sur les effets des pratiques et en lespegravece aucune deacutemonstration nest faite par la Deacutecision

Mais consideacuterant quen droit lAutoriteacute avait bien pour mission de rechercher leffet anticoncurrentiel des pratiques de la SEM GEG au sens de larticle L 420-2 Ccom

Que la recherche de leffet anticoncurrentiel de la pratique poursuivie est preacutesenteacutee par la SEM GEG tantocirct comme le but poursuivi concregravetement par la SEM GEG auquel cas lanalyse se confond avec celle de labus meneacutee preacuteceacutedemment par la cour tantocirct comme le ressort essentiel du comportement (pratique anticoncurrentielle per se) auquel cas la conjonction OU queacutenonce la loi indique que leffet anticoncurrentiel suffit agrave consacrer le grief poursuivi

Consideacuterant quen fait lAutoriteacute a pu relever la concomitance entre la publication agrave deux reprises du communiqueacute de presse les 13 et 18 avril 2005 et la baisse du nombre de contrats signeacutes par Poweo quapregraves correction tenant au deacutecalage entre la date de souscription des contrats et celle de prise deffet des changements de fournisseur le nombre de contrats signeacutes a eacutevolueacute de la maniegravere suivante Ont eacuteteacute signeacutes par Poweo en feacutevrier 2005 un contrat en mars 14 en avril 107 puis en mai 68 en juin 0 et en juillet et au delagrave aucun contrat que du 17 avril au 17 mai 2005 la socieacuteteacute Poweo a reccedilu 36 lettres de reacutesiliation dont 27 eacutetaient comme la SEM GEG nen disconvient pas identiques en la forme et une envoyeacutee des locaux de la SEM GEG elle-mecircme quenfin la socieacuteteacute Poweo na conclu aucun nouveau contrat entre juin 2005 et juin 2008 quen somme elle na pu conserver une bonne part des contrats dorigine que par le jeu de lirreacuteversibiliteacute leacutegale deacutecrite preacuteceacutedemment

Consideacuterant que degraves lors lAutoriteacute a pu agrave bon droit relever les effets anticoncurrentiels des pratiques de la SEM GEG contrairement agrave ce que celle-ci soutient

F - Sur leacutevaluation de la sanction

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie que les pratiques incrimineacutees aient preacutesenteacute un degreacute significatif de graviteacute

Quelle estime aussi que les pratiques nont pas occasionneacute un quelconque dommage agrave leacuteconomie quelle indique plus en deacutetail que Gaz de France a reacuteussi agrave simplanter pendant la peacuteriode incrimineacutee et agrave devenir le premier fournisseur en offre de

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG ndeg 200909599 - 10egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

marcheacute agrave Grenoble que le surplus du consommateur na pas eacuteteacute significativement affecteacute par les pratiques litigieuses comme leacutenonce la Deacutecision elle-mecircme que le ciseau tarifaire eacutetait la seule question qui se posait reacuteellement et qui a conduit agrave la preacutetendue eacuteviction de Poweo

Quelle rappelle au titre de lindividualisation de la sanction quelle dispose dune faible surface financiegravere

Mais consideacuterant sur la graviteacute du comportement que celle-ci ne se confond pas avec la reacutealiteacute de labus de position dominante examineacutee preacuteceacutedemment mais doit proceacuteder dune anal yse des meacutethodes utiliseacutees par la S EM G EG pour parvenir agrave ses fins dune mesure des parts de marcheacute que deacutetient lentreprise poursuivie dun examen de la dureacutee du comportement anticoncurrentiel de leacutetendue ou la complexiteacute des processus anticoncurrentiels de laffectation directe des prix jusques et y compris les prix de deacutetail dune analyse des marcheacutes concerneacutes selon quil sagit de marcheacutes sensibles ou qui le sont moins de marcheacutes touchant directement le consommateur final ou pas de lidentification de clients personnes physiques ou petites entreprises ou de clients vulneacuterables (enfants personnes acircgeacutees malades ) ou dune clientegravele captive au sens eacuteconomique de la continuation du comportement anticoncurrentiel apregraves la saisine de lAutoriteacute ou encore du fait quil sagisse dun marcheacute public

Quen lespegravece lAutoriteacute a pu retenir tour agrave tour que la SEM GEG a opeacutereacute une confusion deacutelibeacutereacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees en concurrence (DeacutecO sect 70 suiv deacutejagrave examineacutes plus haut) que le discours deacutenigrant du communiqueacute de presse est particuliegraverement reacutepreacutehensible car il provient de lopeacuterateur historique (DeacutecO sect 91) que les pratiques nont pas eacuteteacute instantaneacutees puisquelles ont eacuteteacute preacuteceacutedeacutees de courriers (DeacutecO sect 94) et suivies de deacutemarchages aupregraves des anciens clients pour regagner leur confiance

Quil faut ajouter que les pratiques incrimineacutees ont eu pour but dentraver le deacuteveloppement dun concurrent sur le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles de Grenoble au moment crucial et symbolique de louverture agrave la concurrence

Que reacuteciproquement il ne peut ecirctre reprocheacute agrave lAutoriteacute de ne pas avoir tenu compte des facteurs habituels datteacutenuation qui eacutetaient eacutetrangers agrave lespegravece tels que lancienneteacute des faits - la saisine de lAutoriteacute ayant eacuteteacute immeacutediate - la cessation du comportement anticoncurrentiel agrave partir de la saisine de lAutoriteacute - labandon du marcheacute par Poweo ayant restaureacute la position de monopoleur de la SEM GEG - ou le pouvoir de marcheacute de Poweo - tout-agrave-fait modeste ainsi quil a eacuteteacute dit -

Que degraves lors il ne peut ecirctre fait aucun reproche agrave la Deacutecision ni en droit ni en fait dans lexamen de la graviteacute du comportement

Consideacuterant encore sur le dommage causeacute agrave leacuteconomie que lAutoriteacute a pu valablement caracteacuteriser une probabiliteacute raisonnable de dommage collectif

Que la proceacutedure a deacutemontreacute que la SEM GEG a empecirccheacute louverture du marcheacute agrave la concurrence en reacuteduisant le nombre des opeacuterateurs au point que cette entreprise a pu revenir agrave la situation qui eacutetait la sienne avant le 1 er juillet 2004 soit anteacuterieurement agrave louverture du marcheacute agrave la concurrence en restaurant sa position de monopoleur

Que cependant comme le reconnaicirct agrave juste titre la Deacutecision ce dommage a eacuteteacute limiteacute agrave la zone de desserte de Grenoble

Que lAutoriteacute a pris soin encore deacutecarter expresseacutement le facteur important dit daffectation significative du surplus du consommateur quen effet si la SEM GEG sest retrouveacutee en position de monopole de fait sur le marcheacute pertinent apregraves le retrait de Poweo elle neacutetait pas libre den profiter et de pratiquer tes prix de monopole car elle devait

ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 11egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7 1

appliquer le tarif reacuteglementeacute fixeacute par la puissance publique que de plus au vu des conditions du marcheacute libre de leacutelectriciteacute linteacuterecirct de la clientegravele de masse sauf bouleversement des prix de marcheacute [eacutetait] de rester aux tarifs reacuteglementeacutes (DeacutecO sect 97 suiv) notamment en raison du ciseau tarifaire tel quil a eacuteteacute exposeacute preacuteceacutedemment

Que reacuteciproquement lAutoriteacute na tireacute aucun argument dautres facteurs significatifs du dommage agrave leacuteconomie na notamment pas exageacutereacute leacutetendue du marcheacute affecteacute par le comportement anticoncurrentiel ni les perturbations du marcheacute

Que lAutoriteacute admet eacutegalement les rapports dactiviteacute de la CRE depuis 2005 qui font eacutetat de la stagnation du rythme de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute pour les clients professionnels et ce sur lensemble du territoire national que lAutoriteacute nimpute pas labsence dopeacuterateurs alternatifs en tout cas jusquagrave larriveacutee de ODF sur le marcheacute aux pratiques de la SEM GEG

Quenfin lAutoriteacute na pas neacutegligeacute de tenir compte de ce que Poweo na pas deacuteposeacute plainte devant lAutoriteacute de la concurrence pour abus de position dominante le Rapporteur ayant meneacute son instruction sur la seule saisine de la CRE et de ce que Poweo ne sest pas non plus jointe agrave la proceacutedure par la suite quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement agrave un argument de la SEM GEO lAutoriteacute de la concurrence dans sa mission de protection des consommateurs na pas besoin de lappui ou de lassentiment des concurrents moyennant quoi la reacuteparation accordeacutee auxdits concurrents par les voies de droit commun na pas dinfluence sur la proceacutedure de reacutegulation punitive et preacuteventive fondeacutee sur lordre public eacuteconomique

Quen somme loin dexageacuterer le dommage agrave leacuteconomie occasionneacute par le comportement poursuivi et apregraves avoir reacutepondu point par point aux arguments de Poweo lAutoriteacute a fait de ce dommage une analyse tregraves pondeacutereacutee que la cour approuve

Consideacuterant enfin sagissant de lindividualisation de la sanction (sect 104 agrave 106) et que lAutoriteacute de la concurrence a preacuteciseacute que le chiffre daffaires consolideacute de la SEM OEG avait atteint en 2007 124645 millions deuros avec pour conseacutequence que le montant maximum de la sanction encourue seacutelegraveve agrave 12 500 000 euro que ces consideacuterations sont incontestables et incontesteacutees et quelles incluent neacutecessairement leacutevaluation de la capaciteacute contributive de la SEM GEG qui na pas traverseacute agrave leacutepoque des faits poursuivis ni posteacuterieurement des difficulteacutes particuliegraveres qui commanderaient une autre analyse

Quagrave titre superfeacutetatoire mais sans inexactitude il a eacuteteacute tenu compte par lAutoriteacute du fait que les ventes deacutelectriciteacute reacutealiseacutees par la SEM GEO nont cesseacute de progresser entre 2004 et 2007 pour atteindre 64 261 401 euros en 2007

Quenfin il ny a pas lieu de tenir compte de lindemnisation provisionnelle accordeacutee agrave Poweo par la juridiction commerciale pour les raisons susdites

Consideacuterant quayant ainsi proceacutedeacute sans erreur agrave lanalyse de la graviteacute de la pratique anticoncurrentielle ayant ensuite eacutevalueacute avec pondeacuteration le dommage agrave leacuteconomie et ayant preacuteciseacutement examineacute les facteurs dindividualisation de la sanction lAutoriteacute a exactement proportionneacute celle-ci agrave une hauteur dagrave peine trois pour mille du meilleur chiffre daffaires annuel de la peacuteriode consideacutereacutee que la demande de reacuteformation de la SEM GEG est manifestement infondeacutee

PAR CES MOTIFS

Rejette le recours

ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RO ndeg 200909599 - 12egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Condamne la SEM GEG aux deacutepens

LE [REFFIER

Thierry FOSSIER

Cour dAppel de Paris ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 RG nO 200909599 - 13egraveme page

avec la SEM GEG raquo alors que Poweo avait effectivement conclu un contrat daccegraves au reacuteseau de distribution le 5 janvier 2005

Consideacuterant en troisiegraveme lieu sur le lien entre position dominante et deacutenigrement que plusieurs eacuteleacutements agrave juste titre releveacutes par la Deacutecision leacutetablissent

Que le communiqueacute de presse a constitueacute un argumentaire des agents commerciaux de la SEM GEG pour inciter des clients qui avaient souscrit un contrat avec Poweo agrave le reacutesilier et agrave renouer avec le seul autre opeacuterateur la SEM GEG que le communiqueacute litigieux a ainsi eacuteteacute non pas un acte isoleacute mais le point de deacutepart dune contre-offensive fondeacutee sur un deacutenigrement systeacutematique et destineacutee agrave affaiblir le concurrent et qui neacutetait concregravetement possible que pour un opeacuterateur en position dominante

Que ce faisant la SEM GEG a profiteacute du caractegravere tregraves reacutecent de louverture du marcheacute agrave la concurrence (la juillet 2004 soit agrave peine neufmois auparavant) et a pu user de la notorieacuteteacute et de limage encore preacutesentes aux esprits lieacutees agrave lactiviteacute de monopole geacuterant un service public

Que cette analyse est corroboreacutee par les chiffres reacuteunis en annexe au procegraves-verbal daudition du responsable de la SEM GEG devant le Rapporteur de lAutoriteacute qui fait apparaicirctre en tenant compte du temps-retard des souscriptions et des reacutesiliations que le nombre de contrats passeacutes par des clients avec Poweo a augmenteacute tregraves fortement en mars et avril 2005 mais na cesseacute de deacutecroicirctre ensuite comme il sera redit par la cour agrave propos des effets des pratiques en sorte que la SEM GEG a retrouveacute finalement sa position historique

Consideacuterant en quatriegraveme lieu que le deacutenigrement eacutetait dautant plus rechercheacute que les fOlmulations du communiqueacute de presse semblaient preacutesenter Poweo cornnle incapable dassumer la fonction de distributeur alors que cette socieacuteteacute na jamais preacutetendu agrave cette fonction et ne laurait leacutegalement pas pu que de mecircme et encore le communiqueacute nie tout partenariat entre la SEM GEG et Poweo alors quun contrat les liait depuis janvier 2005 comme il a eacuteteacute eacutenonceacute preacuteceacutedemment

Consideacuterant que du tout il reacutesulte que les communiqueacutes litigieux ont constitueacute en eux-mecircmes et par lusage ulteacuterieur qui en a eacuteteacute fait un deacutenigrement adosseacute agrave la position dominante de la SEM GEG et constitutif par conseacutequent dun abus de cette position

E - Sur les effets des pratiques

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie la pertinence de lanalyse juridique de lAutoriteacute selon laquelle les pratiques ont eu agrave la fois pour objet et pour effet dentraver le deacuteveloppement dun concurrent et de le deacutecider agrave mettre un terme agrave son action commerciale agrave Grenoble

Quen fait selon la socieacuteteacute GEG lAutoriteacute ne peut pas se contenter de mentionner le nombre de contrats signeacutes par Poweo resteacute stable (autour de 190)jusquenjanvier 2006 quagrave supposer que la progression se soit affaiblie agrave compter des publications du communiqueacute de presse dautres facteurs peuvent expliquer ce fait preacutetendu notamment (i) le communiqueacute de presse na eu quune porteacutee limiteacutee (caractegravere limiteacute dans le temps et caractegravere geacuteneacuteral contrairement au deacutemarchage cibleacute de POWEO) (ii) POWEO a modifieacute sa strateacutegie commerciale (arrecirct des deacutemarchages et prospections) (iii) les prix de gros de leacutelectriciteacute ont fortement augmenteacute et ont deacutepasseacute les tarifs reacuteglementeacutes rendant peu inteacuteressante la conclusion dun contrat avec un opeacuterateur alternatif ( ciseau tarifaire) (iv) POWEO a manifesteacute sa volonteacute de se deacutesengager de la fourniture (marcheacute aval) pour se concentrer sur la production deacutelectriciteacute (marcheacute amont)

1 ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RG na 200909599 - 9egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Quen outre la SEM GEG se fonde surle nombre de points de service alimenteacutes par Poweo cest~agrave-dire les sites de livraison aux clients eacuteligibles quelle estime ecirctre lindicateur le plus pertinent pour mesurer le poids respectif des diffeacuterents acteurs que ce nombre est passeacute trois mois apregraves la publication du communiqueacute de presse de 15 agrave 190 (tableau GEG parag222 p41) que par ailleurs la SEM GEG affirme que la pratique na pas pu avoir deffet deacuteviction car le message commercial na eacuteteacute diffuseacute quagrave deux reprises que le nombre de reacutesiliations eacutetabli agrave 27 sur 190 contrats signeacutes est faible et la preuve na pas eacuteteacute apporteacutee que les agents commerciaux de la SEM GEG auraient relayeacute sur le terrain les eacuteleacutements deacutenigrants du communiqueacute de presse que la SEM GEG en conclut quil nexiste donc aucun lien neacutecessaire entre la publication du communiqueacute de presse et la preacutetendue sortie du marcheacute de POWEO

Que sur leffet de forclusion la SEM GEG avance quil existe dautres fournisseurs alternatifs sur le marcheacute de Grenoble quainsi GDF est le premier fournisseur agrave Grenoble en offre de marcheacute

Quen somme comme en teacutemoigne la pratique deacutecisionnelle de lAutoriteacute il nest plus permis darticuler des preacutesomptions sur les effets des pratiques et en lespegravece aucune deacutemonstration nest faite par la Deacutecision

Mais consideacuterant quen droit lAutoriteacute avait bien pour mission de rechercher leffet anticoncurrentiel des pratiques de la SEM GEG au sens de larticle L 420-2 Ccom

Que la recherche de leffet anticoncurrentiel de la pratique poursuivie est preacutesenteacutee par la SEM GEG tantocirct comme le but poursuivi concregravetement par la SEM GEG auquel cas lanalyse se confond avec celle de labus meneacutee preacuteceacutedemment par la cour tantocirct comme le ressort essentiel du comportement (pratique anticoncurrentielle per se) auquel cas la conjonction OU queacutenonce la loi indique que leffet anticoncurrentiel suffit agrave consacrer le grief poursuivi

Consideacuterant quen fait lAutoriteacute a pu relever la concomitance entre la publication agrave deux reprises du communiqueacute de presse les 13 et 18 avril 2005 et la baisse du nombre de contrats signeacutes par Poweo quapregraves correction tenant au deacutecalage entre la date de souscription des contrats et celle de prise deffet des changements de fournisseur le nombre de contrats signeacutes a eacutevolueacute de la maniegravere suivante Ont eacuteteacute signeacutes par Poweo en feacutevrier 2005 un contrat en mars 14 en avril 107 puis en mai 68 en juin 0 et en juillet et au delagrave aucun contrat que du 17 avril au 17 mai 2005 la socieacuteteacute Poweo a reccedilu 36 lettres de reacutesiliation dont 27 eacutetaient comme la SEM GEG nen disconvient pas identiques en la forme et une envoyeacutee des locaux de la SEM GEG elle-mecircme quenfin la socieacuteteacute Poweo na conclu aucun nouveau contrat entre juin 2005 et juin 2008 quen somme elle na pu conserver une bonne part des contrats dorigine que par le jeu de lirreacuteversibiliteacute leacutegale deacutecrite preacuteceacutedemment

Consideacuterant que degraves lors lAutoriteacute a pu agrave bon droit relever les effets anticoncurrentiels des pratiques de la SEM GEG contrairement agrave ce que celle-ci soutient

F - Sur leacutevaluation de la sanction

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie que les pratiques incrimineacutees aient preacutesenteacute un degreacute significatif de graviteacute

Quelle estime aussi que les pratiques nont pas occasionneacute un quelconque dommage agrave leacuteconomie quelle indique plus en deacutetail que Gaz de France a reacuteussi agrave simplanter pendant la peacuteriode incrimineacutee et agrave devenir le premier fournisseur en offre de

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG ndeg 200909599 - 10egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

marcheacute agrave Grenoble que le surplus du consommateur na pas eacuteteacute significativement affecteacute par les pratiques litigieuses comme leacutenonce la Deacutecision elle-mecircme que le ciseau tarifaire eacutetait la seule question qui se posait reacuteellement et qui a conduit agrave la preacutetendue eacuteviction de Poweo

Quelle rappelle au titre de lindividualisation de la sanction quelle dispose dune faible surface financiegravere

Mais consideacuterant sur la graviteacute du comportement que celle-ci ne se confond pas avec la reacutealiteacute de labus de position dominante examineacutee preacuteceacutedemment mais doit proceacuteder dune anal yse des meacutethodes utiliseacutees par la S EM G EG pour parvenir agrave ses fins dune mesure des parts de marcheacute que deacutetient lentreprise poursuivie dun examen de la dureacutee du comportement anticoncurrentiel de leacutetendue ou la complexiteacute des processus anticoncurrentiels de laffectation directe des prix jusques et y compris les prix de deacutetail dune analyse des marcheacutes concerneacutes selon quil sagit de marcheacutes sensibles ou qui le sont moins de marcheacutes touchant directement le consommateur final ou pas de lidentification de clients personnes physiques ou petites entreprises ou de clients vulneacuterables (enfants personnes acircgeacutees malades ) ou dune clientegravele captive au sens eacuteconomique de la continuation du comportement anticoncurrentiel apregraves la saisine de lAutoriteacute ou encore du fait quil sagisse dun marcheacute public

Quen lespegravece lAutoriteacute a pu retenir tour agrave tour que la SEM GEG a opeacutereacute une confusion deacutelibeacutereacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees en concurrence (DeacutecO sect 70 suiv deacutejagrave examineacutes plus haut) que le discours deacutenigrant du communiqueacute de presse est particuliegraverement reacutepreacutehensible car il provient de lopeacuterateur historique (DeacutecO sect 91) que les pratiques nont pas eacuteteacute instantaneacutees puisquelles ont eacuteteacute preacuteceacutedeacutees de courriers (DeacutecO sect 94) et suivies de deacutemarchages aupregraves des anciens clients pour regagner leur confiance

Quil faut ajouter que les pratiques incrimineacutees ont eu pour but dentraver le deacuteveloppement dun concurrent sur le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles de Grenoble au moment crucial et symbolique de louverture agrave la concurrence

Que reacuteciproquement il ne peut ecirctre reprocheacute agrave lAutoriteacute de ne pas avoir tenu compte des facteurs habituels datteacutenuation qui eacutetaient eacutetrangers agrave lespegravece tels que lancienneteacute des faits - la saisine de lAutoriteacute ayant eacuteteacute immeacutediate - la cessation du comportement anticoncurrentiel agrave partir de la saisine de lAutoriteacute - labandon du marcheacute par Poweo ayant restaureacute la position de monopoleur de la SEM GEG - ou le pouvoir de marcheacute de Poweo - tout-agrave-fait modeste ainsi quil a eacuteteacute dit -

Que degraves lors il ne peut ecirctre fait aucun reproche agrave la Deacutecision ni en droit ni en fait dans lexamen de la graviteacute du comportement

Consideacuterant encore sur le dommage causeacute agrave leacuteconomie que lAutoriteacute a pu valablement caracteacuteriser une probabiliteacute raisonnable de dommage collectif

Que la proceacutedure a deacutemontreacute que la SEM GEG a empecirccheacute louverture du marcheacute agrave la concurrence en reacuteduisant le nombre des opeacuterateurs au point que cette entreprise a pu revenir agrave la situation qui eacutetait la sienne avant le 1 er juillet 2004 soit anteacuterieurement agrave louverture du marcheacute agrave la concurrence en restaurant sa position de monopoleur

Que cependant comme le reconnaicirct agrave juste titre la Deacutecision ce dommage a eacuteteacute limiteacute agrave la zone de desserte de Grenoble

Que lAutoriteacute a pris soin encore deacutecarter expresseacutement le facteur important dit daffectation significative du surplus du consommateur quen effet si la SEM GEG sest retrouveacutee en position de monopole de fait sur le marcheacute pertinent apregraves le retrait de Poweo elle neacutetait pas libre den profiter et de pratiquer tes prix de monopole car elle devait

ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 11egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7 1

appliquer le tarif reacuteglementeacute fixeacute par la puissance publique que de plus au vu des conditions du marcheacute libre de leacutelectriciteacute linteacuterecirct de la clientegravele de masse sauf bouleversement des prix de marcheacute [eacutetait] de rester aux tarifs reacuteglementeacutes (DeacutecO sect 97 suiv) notamment en raison du ciseau tarifaire tel quil a eacuteteacute exposeacute preacuteceacutedemment

Que reacuteciproquement lAutoriteacute na tireacute aucun argument dautres facteurs significatifs du dommage agrave leacuteconomie na notamment pas exageacutereacute leacutetendue du marcheacute affecteacute par le comportement anticoncurrentiel ni les perturbations du marcheacute

Que lAutoriteacute admet eacutegalement les rapports dactiviteacute de la CRE depuis 2005 qui font eacutetat de la stagnation du rythme de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute pour les clients professionnels et ce sur lensemble du territoire national que lAutoriteacute nimpute pas labsence dopeacuterateurs alternatifs en tout cas jusquagrave larriveacutee de ODF sur le marcheacute aux pratiques de la SEM GEG

Quenfin lAutoriteacute na pas neacutegligeacute de tenir compte de ce que Poweo na pas deacuteposeacute plainte devant lAutoriteacute de la concurrence pour abus de position dominante le Rapporteur ayant meneacute son instruction sur la seule saisine de la CRE et de ce que Poweo ne sest pas non plus jointe agrave la proceacutedure par la suite quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement agrave un argument de la SEM GEO lAutoriteacute de la concurrence dans sa mission de protection des consommateurs na pas besoin de lappui ou de lassentiment des concurrents moyennant quoi la reacuteparation accordeacutee auxdits concurrents par les voies de droit commun na pas dinfluence sur la proceacutedure de reacutegulation punitive et preacuteventive fondeacutee sur lordre public eacuteconomique

Quen somme loin dexageacuterer le dommage agrave leacuteconomie occasionneacute par le comportement poursuivi et apregraves avoir reacutepondu point par point aux arguments de Poweo lAutoriteacute a fait de ce dommage une analyse tregraves pondeacutereacutee que la cour approuve

Consideacuterant enfin sagissant de lindividualisation de la sanction (sect 104 agrave 106) et que lAutoriteacute de la concurrence a preacuteciseacute que le chiffre daffaires consolideacute de la SEM OEG avait atteint en 2007 124645 millions deuros avec pour conseacutequence que le montant maximum de la sanction encourue seacutelegraveve agrave 12 500 000 euro que ces consideacuterations sont incontestables et incontesteacutees et quelles incluent neacutecessairement leacutevaluation de la capaciteacute contributive de la SEM GEG qui na pas traverseacute agrave leacutepoque des faits poursuivis ni posteacuterieurement des difficulteacutes particuliegraveres qui commanderaient une autre analyse

Quagrave titre superfeacutetatoire mais sans inexactitude il a eacuteteacute tenu compte par lAutoriteacute du fait que les ventes deacutelectriciteacute reacutealiseacutees par la SEM GEO nont cesseacute de progresser entre 2004 et 2007 pour atteindre 64 261 401 euros en 2007

Quenfin il ny a pas lieu de tenir compte de lindemnisation provisionnelle accordeacutee agrave Poweo par la juridiction commerciale pour les raisons susdites

Consideacuterant quayant ainsi proceacutedeacute sans erreur agrave lanalyse de la graviteacute de la pratique anticoncurrentielle ayant ensuite eacutevalueacute avec pondeacuteration le dommage agrave leacuteconomie et ayant preacuteciseacutement examineacute les facteurs dindividualisation de la sanction lAutoriteacute a exactement proportionneacute celle-ci agrave une hauteur dagrave peine trois pour mille du meilleur chiffre daffaires annuel de la peacuteriode consideacutereacutee que la demande de reacuteformation de la SEM GEG est manifestement infondeacutee

PAR CES MOTIFS

Rejette le recours

ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RO ndeg 200909599 - 12egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Condamne la SEM GEG aux deacutepens

LE [REFFIER

Thierry FOSSIER

Cour dAppel de Paris ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 RG nO 200909599 - 13egraveme page

Quen outre la SEM GEG se fonde surle nombre de points de service alimenteacutes par Poweo cest~agrave-dire les sites de livraison aux clients eacuteligibles quelle estime ecirctre lindicateur le plus pertinent pour mesurer le poids respectif des diffeacuterents acteurs que ce nombre est passeacute trois mois apregraves la publication du communiqueacute de presse de 15 agrave 190 (tableau GEG parag222 p41) que par ailleurs la SEM GEG affirme que la pratique na pas pu avoir deffet deacuteviction car le message commercial na eacuteteacute diffuseacute quagrave deux reprises que le nombre de reacutesiliations eacutetabli agrave 27 sur 190 contrats signeacutes est faible et la preuve na pas eacuteteacute apporteacutee que les agents commerciaux de la SEM GEG auraient relayeacute sur le terrain les eacuteleacutements deacutenigrants du communiqueacute de presse que la SEM GEG en conclut quil nexiste donc aucun lien neacutecessaire entre la publication du communiqueacute de presse et la preacutetendue sortie du marcheacute de POWEO

Que sur leffet de forclusion la SEM GEG avance quil existe dautres fournisseurs alternatifs sur le marcheacute de Grenoble quainsi GDF est le premier fournisseur agrave Grenoble en offre de marcheacute

Quen somme comme en teacutemoigne la pratique deacutecisionnelle de lAutoriteacute il nest plus permis darticuler des preacutesomptions sur les effets des pratiques et en lespegravece aucune deacutemonstration nest faite par la Deacutecision

Mais consideacuterant quen droit lAutoriteacute avait bien pour mission de rechercher leffet anticoncurrentiel des pratiques de la SEM GEG au sens de larticle L 420-2 Ccom

Que la recherche de leffet anticoncurrentiel de la pratique poursuivie est preacutesenteacutee par la SEM GEG tantocirct comme le but poursuivi concregravetement par la SEM GEG auquel cas lanalyse se confond avec celle de labus meneacutee preacuteceacutedemment par la cour tantocirct comme le ressort essentiel du comportement (pratique anticoncurrentielle per se) auquel cas la conjonction OU queacutenonce la loi indique que leffet anticoncurrentiel suffit agrave consacrer le grief poursuivi

Consideacuterant quen fait lAutoriteacute a pu relever la concomitance entre la publication agrave deux reprises du communiqueacute de presse les 13 et 18 avril 2005 et la baisse du nombre de contrats signeacutes par Poweo quapregraves correction tenant au deacutecalage entre la date de souscription des contrats et celle de prise deffet des changements de fournisseur le nombre de contrats signeacutes a eacutevolueacute de la maniegravere suivante Ont eacuteteacute signeacutes par Poweo en feacutevrier 2005 un contrat en mars 14 en avril 107 puis en mai 68 en juin 0 et en juillet et au delagrave aucun contrat que du 17 avril au 17 mai 2005 la socieacuteteacute Poweo a reccedilu 36 lettres de reacutesiliation dont 27 eacutetaient comme la SEM GEG nen disconvient pas identiques en la forme et une envoyeacutee des locaux de la SEM GEG elle-mecircme quenfin la socieacuteteacute Poweo na conclu aucun nouveau contrat entre juin 2005 et juin 2008 quen somme elle na pu conserver une bonne part des contrats dorigine que par le jeu de lirreacuteversibiliteacute leacutegale deacutecrite preacuteceacutedemment

Consideacuterant que degraves lors lAutoriteacute a pu agrave bon droit relever les effets anticoncurrentiels des pratiques de la SEM GEG contrairement agrave ce que celle-ci soutient

F - Sur leacutevaluation de la sanction

Consideacuterant que la SEM GEG deacutenie que les pratiques incrimineacutees aient preacutesenteacute un degreacute significatif de graviteacute

Quelle estime aussi que les pratiques nont pas occasionneacute un quelconque dommage agrave leacuteconomie quelle indique plus en deacutetail que Gaz de France a reacuteussi agrave simplanter pendant la peacuteriode incrimineacutee et agrave devenir le premier fournisseur en offre de

1 ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG ndeg 200909599 - 10egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

marcheacute agrave Grenoble que le surplus du consommateur na pas eacuteteacute significativement affecteacute par les pratiques litigieuses comme leacutenonce la Deacutecision elle-mecircme que le ciseau tarifaire eacutetait la seule question qui se posait reacuteellement et qui a conduit agrave la preacutetendue eacuteviction de Poweo

Quelle rappelle au titre de lindividualisation de la sanction quelle dispose dune faible surface financiegravere

Mais consideacuterant sur la graviteacute du comportement que celle-ci ne se confond pas avec la reacutealiteacute de labus de position dominante examineacutee preacuteceacutedemment mais doit proceacuteder dune anal yse des meacutethodes utiliseacutees par la S EM G EG pour parvenir agrave ses fins dune mesure des parts de marcheacute que deacutetient lentreprise poursuivie dun examen de la dureacutee du comportement anticoncurrentiel de leacutetendue ou la complexiteacute des processus anticoncurrentiels de laffectation directe des prix jusques et y compris les prix de deacutetail dune analyse des marcheacutes concerneacutes selon quil sagit de marcheacutes sensibles ou qui le sont moins de marcheacutes touchant directement le consommateur final ou pas de lidentification de clients personnes physiques ou petites entreprises ou de clients vulneacuterables (enfants personnes acircgeacutees malades ) ou dune clientegravele captive au sens eacuteconomique de la continuation du comportement anticoncurrentiel apregraves la saisine de lAutoriteacute ou encore du fait quil sagisse dun marcheacute public

Quen lespegravece lAutoriteacute a pu retenir tour agrave tour que la SEM GEG a opeacutereacute une confusion deacutelibeacutereacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees en concurrence (DeacutecO sect 70 suiv deacutejagrave examineacutes plus haut) que le discours deacutenigrant du communiqueacute de presse est particuliegraverement reacutepreacutehensible car il provient de lopeacuterateur historique (DeacutecO sect 91) que les pratiques nont pas eacuteteacute instantaneacutees puisquelles ont eacuteteacute preacuteceacutedeacutees de courriers (DeacutecO sect 94) et suivies de deacutemarchages aupregraves des anciens clients pour regagner leur confiance

Quil faut ajouter que les pratiques incrimineacutees ont eu pour but dentraver le deacuteveloppement dun concurrent sur le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles de Grenoble au moment crucial et symbolique de louverture agrave la concurrence

Que reacuteciproquement il ne peut ecirctre reprocheacute agrave lAutoriteacute de ne pas avoir tenu compte des facteurs habituels datteacutenuation qui eacutetaient eacutetrangers agrave lespegravece tels que lancienneteacute des faits - la saisine de lAutoriteacute ayant eacuteteacute immeacutediate - la cessation du comportement anticoncurrentiel agrave partir de la saisine de lAutoriteacute - labandon du marcheacute par Poweo ayant restaureacute la position de monopoleur de la SEM GEG - ou le pouvoir de marcheacute de Poweo - tout-agrave-fait modeste ainsi quil a eacuteteacute dit -

Que degraves lors il ne peut ecirctre fait aucun reproche agrave la Deacutecision ni en droit ni en fait dans lexamen de la graviteacute du comportement

Consideacuterant encore sur le dommage causeacute agrave leacuteconomie que lAutoriteacute a pu valablement caracteacuteriser une probabiliteacute raisonnable de dommage collectif

Que la proceacutedure a deacutemontreacute que la SEM GEG a empecirccheacute louverture du marcheacute agrave la concurrence en reacuteduisant le nombre des opeacuterateurs au point que cette entreprise a pu revenir agrave la situation qui eacutetait la sienne avant le 1 er juillet 2004 soit anteacuterieurement agrave louverture du marcheacute agrave la concurrence en restaurant sa position de monopoleur

Que cependant comme le reconnaicirct agrave juste titre la Deacutecision ce dommage a eacuteteacute limiteacute agrave la zone de desserte de Grenoble

Que lAutoriteacute a pris soin encore deacutecarter expresseacutement le facteur important dit daffectation significative du surplus du consommateur quen effet si la SEM GEG sest retrouveacutee en position de monopole de fait sur le marcheacute pertinent apregraves le retrait de Poweo elle neacutetait pas libre den profiter et de pratiquer tes prix de monopole car elle devait

ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 11egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7 1

appliquer le tarif reacuteglementeacute fixeacute par la puissance publique que de plus au vu des conditions du marcheacute libre de leacutelectriciteacute linteacuterecirct de la clientegravele de masse sauf bouleversement des prix de marcheacute [eacutetait] de rester aux tarifs reacuteglementeacutes (DeacutecO sect 97 suiv) notamment en raison du ciseau tarifaire tel quil a eacuteteacute exposeacute preacuteceacutedemment

Que reacuteciproquement lAutoriteacute na tireacute aucun argument dautres facteurs significatifs du dommage agrave leacuteconomie na notamment pas exageacutereacute leacutetendue du marcheacute affecteacute par le comportement anticoncurrentiel ni les perturbations du marcheacute

Que lAutoriteacute admet eacutegalement les rapports dactiviteacute de la CRE depuis 2005 qui font eacutetat de la stagnation du rythme de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute pour les clients professionnels et ce sur lensemble du territoire national que lAutoriteacute nimpute pas labsence dopeacuterateurs alternatifs en tout cas jusquagrave larriveacutee de ODF sur le marcheacute aux pratiques de la SEM GEG

Quenfin lAutoriteacute na pas neacutegligeacute de tenir compte de ce que Poweo na pas deacuteposeacute plainte devant lAutoriteacute de la concurrence pour abus de position dominante le Rapporteur ayant meneacute son instruction sur la seule saisine de la CRE et de ce que Poweo ne sest pas non plus jointe agrave la proceacutedure par la suite quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement agrave un argument de la SEM GEO lAutoriteacute de la concurrence dans sa mission de protection des consommateurs na pas besoin de lappui ou de lassentiment des concurrents moyennant quoi la reacuteparation accordeacutee auxdits concurrents par les voies de droit commun na pas dinfluence sur la proceacutedure de reacutegulation punitive et preacuteventive fondeacutee sur lordre public eacuteconomique

Quen somme loin dexageacuterer le dommage agrave leacuteconomie occasionneacute par le comportement poursuivi et apregraves avoir reacutepondu point par point aux arguments de Poweo lAutoriteacute a fait de ce dommage une analyse tregraves pondeacutereacutee que la cour approuve

Consideacuterant enfin sagissant de lindividualisation de la sanction (sect 104 agrave 106) et que lAutoriteacute de la concurrence a preacuteciseacute que le chiffre daffaires consolideacute de la SEM OEG avait atteint en 2007 124645 millions deuros avec pour conseacutequence que le montant maximum de la sanction encourue seacutelegraveve agrave 12 500 000 euro que ces consideacuterations sont incontestables et incontesteacutees et quelles incluent neacutecessairement leacutevaluation de la capaciteacute contributive de la SEM GEG qui na pas traverseacute agrave leacutepoque des faits poursuivis ni posteacuterieurement des difficulteacutes particuliegraveres qui commanderaient une autre analyse

Quagrave titre superfeacutetatoire mais sans inexactitude il a eacuteteacute tenu compte par lAutoriteacute du fait que les ventes deacutelectriciteacute reacutealiseacutees par la SEM GEO nont cesseacute de progresser entre 2004 et 2007 pour atteindre 64 261 401 euros en 2007

Quenfin il ny a pas lieu de tenir compte de lindemnisation provisionnelle accordeacutee agrave Poweo par la juridiction commerciale pour les raisons susdites

Consideacuterant quayant ainsi proceacutedeacute sans erreur agrave lanalyse de la graviteacute de la pratique anticoncurrentielle ayant ensuite eacutevalueacute avec pondeacuteration le dommage agrave leacuteconomie et ayant preacuteciseacutement examineacute les facteurs dindividualisation de la sanction lAutoriteacute a exactement proportionneacute celle-ci agrave une hauteur dagrave peine trois pour mille du meilleur chiffre daffaires annuel de la peacuteriode consideacutereacutee que la demande de reacuteformation de la SEM GEG est manifestement infondeacutee

PAR CES MOTIFS

Rejette le recours

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Condamne la SEM GEG aux deacutepens

LE [REFFIER

Thierry FOSSIER

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marcheacute agrave Grenoble que le surplus du consommateur na pas eacuteteacute significativement affecteacute par les pratiques litigieuses comme leacutenonce la Deacutecision elle-mecircme que le ciseau tarifaire eacutetait la seule question qui se posait reacuteellement et qui a conduit agrave la preacutetendue eacuteviction de Poweo

Quelle rappelle au titre de lindividualisation de la sanction quelle dispose dune faible surface financiegravere

Mais consideacuterant sur la graviteacute du comportement que celle-ci ne se confond pas avec la reacutealiteacute de labus de position dominante examineacutee preacuteceacutedemment mais doit proceacuteder dune anal yse des meacutethodes utiliseacutees par la S EM G EG pour parvenir agrave ses fins dune mesure des parts de marcheacute que deacutetient lentreprise poursuivie dun examen de la dureacutee du comportement anticoncurrentiel de leacutetendue ou la complexiteacute des processus anticoncurrentiels de laffectation directe des prix jusques et y compris les prix de deacutetail dune analyse des marcheacutes concerneacutes selon quil sagit de marcheacutes sensibles ou qui le sont moins de marcheacutes touchant directement le consommateur final ou pas de lidentification de clients personnes physiques ou petites entreprises ou de clients vulneacuterables (enfants personnes acircgeacutees malades ) ou dune clientegravele captive au sens eacuteconomique de la continuation du comportement anticoncurrentiel apregraves la saisine de lAutoriteacute ou encore du fait quil sagisse dun marcheacute public

Quen lespegravece lAutoriteacute a pu retenir tour agrave tour que la SEM GEG a opeacutereacute une confusion deacutelibeacutereacutee entre ses missions de service public et les activiteacutes exerceacutees en concurrence (DeacutecO sect 70 suiv deacutejagrave examineacutes plus haut) que le discours deacutenigrant du communiqueacute de presse est particuliegraverement reacutepreacutehensible car il provient de lopeacuterateur historique (DeacutecO sect 91) que les pratiques nont pas eacuteteacute instantaneacutees puisquelles ont eacuteteacute preacuteceacutedeacutees de courriers (DeacutecO sect 94) et suivies de deacutemarchages aupregraves des anciens clients pour regagner leur confiance

Quil faut ajouter que les pratiques incrimineacutees ont eu pour but dentraver le deacuteveloppement dun concurrent sur le marcheacute de la fourniture de leacutelectriciteacute aux clients eacuteligibles de Grenoble au moment crucial et symbolique de louverture agrave la concurrence

Que reacuteciproquement il ne peut ecirctre reprocheacute agrave lAutoriteacute de ne pas avoir tenu compte des facteurs habituels datteacutenuation qui eacutetaient eacutetrangers agrave lespegravece tels que lancienneteacute des faits - la saisine de lAutoriteacute ayant eacuteteacute immeacutediate - la cessation du comportement anticoncurrentiel agrave partir de la saisine de lAutoriteacute - labandon du marcheacute par Poweo ayant restaureacute la position de monopoleur de la SEM GEG - ou le pouvoir de marcheacute de Poweo - tout-agrave-fait modeste ainsi quil a eacuteteacute dit -

Que degraves lors il ne peut ecirctre fait aucun reproche agrave la Deacutecision ni en droit ni en fait dans lexamen de la graviteacute du comportement

Consideacuterant encore sur le dommage causeacute agrave leacuteconomie que lAutoriteacute a pu valablement caracteacuteriser une probabiliteacute raisonnable de dommage collectif

Que la proceacutedure a deacutemontreacute que la SEM GEG a empecirccheacute louverture du marcheacute agrave la concurrence en reacuteduisant le nombre des opeacuterateurs au point que cette entreprise a pu revenir agrave la situation qui eacutetait la sienne avant le 1 er juillet 2004 soit anteacuterieurement agrave louverture du marcheacute agrave la concurrence en restaurant sa position de monopoleur

Que cependant comme le reconnaicirct agrave juste titre la Deacutecision ce dommage a eacuteteacute limiteacute agrave la zone de desserte de Grenoble

Que lAutoriteacute a pris soin encore deacutecarter expresseacutement le facteur important dit daffectation significative du surplus du consommateur quen effet si la SEM GEG sest retrouveacutee en position de monopole de fait sur le marcheacute pertinent apregraves le retrait de Poweo elle neacutetait pas libre den profiter et de pratiquer tes prix de monopole car elle devait

ARRET DU 23 MARS 2010Cour dAppel de Paris RG nO 200909599 - 11egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7 1

appliquer le tarif reacuteglementeacute fixeacute par la puissance publique que de plus au vu des conditions du marcheacute libre de leacutelectriciteacute linteacuterecirct de la clientegravele de masse sauf bouleversement des prix de marcheacute [eacutetait] de rester aux tarifs reacuteglementeacutes (DeacutecO sect 97 suiv) notamment en raison du ciseau tarifaire tel quil a eacuteteacute exposeacute preacuteceacutedemment

Que reacuteciproquement lAutoriteacute na tireacute aucun argument dautres facteurs significatifs du dommage agrave leacuteconomie na notamment pas exageacutereacute leacutetendue du marcheacute affecteacute par le comportement anticoncurrentiel ni les perturbations du marcheacute

Que lAutoriteacute admet eacutegalement les rapports dactiviteacute de la CRE depuis 2005 qui font eacutetat de la stagnation du rythme de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute pour les clients professionnels et ce sur lensemble du territoire national que lAutoriteacute nimpute pas labsence dopeacuterateurs alternatifs en tout cas jusquagrave larriveacutee de ODF sur le marcheacute aux pratiques de la SEM GEG

Quenfin lAutoriteacute na pas neacutegligeacute de tenir compte de ce que Poweo na pas deacuteposeacute plainte devant lAutoriteacute de la concurrence pour abus de position dominante le Rapporteur ayant meneacute son instruction sur la seule saisine de la CRE et de ce que Poweo ne sest pas non plus jointe agrave la proceacutedure par la suite quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement agrave un argument de la SEM GEO lAutoriteacute de la concurrence dans sa mission de protection des consommateurs na pas besoin de lappui ou de lassentiment des concurrents moyennant quoi la reacuteparation accordeacutee auxdits concurrents par les voies de droit commun na pas dinfluence sur la proceacutedure de reacutegulation punitive et preacuteventive fondeacutee sur lordre public eacuteconomique

Quen somme loin dexageacuterer le dommage agrave leacuteconomie occasionneacute par le comportement poursuivi et apregraves avoir reacutepondu point par point aux arguments de Poweo lAutoriteacute a fait de ce dommage une analyse tregraves pondeacutereacutee que la cour approuve

Consideacuterant enfin sagissant de lindividualisation de la sanction (sect 104 agrave 106) et que lAutoriteacute de la concurrence a preacuteciseacute que le chiffre daffaires consolideacute de la SEM OEG avait atteint en 2007 124645 millions deuros avec pour conseacutequence que le montant maximum de la sanction encourue seacutelegraveve agrave 12 500 000 euro que ces consideacuterations sont incontestables et incontesteacutees et quelles incluent neacutecessairement leacutevaluation de la capaciteacute contributive de la SEM GEG qui na pas traverseacute agrave leacutepoque des faits poursuivis ni posteacuterieurement des difficulteacutes particuliegraveres qui commanderaient une autre analyse

Quagrave titre superfeacutetatoire mais sans inexactitude il a eacuteteacute tenu compte par lAutoriteacute du fait que les ventes deacutelectriciteacute reacutealiseacutees par la SEM GEO nont cesseacute de progresser entre 2004 et 2007 pour atteindre 64 261 401 euros en 2007

Quenfin il ny a pas lieu de tenir compte de lindemnisation provisionnelle accordeacutee agrave Poweo par la juridiction commerciale pour les raisons susdites

Consideacuterant quayant ainsi proceacutedeacute sans erreur agrave lanalyse de la graviteacute de la pratique anticoncurrentielle ayant ensuite eacutevalueacute avec pondeacuteration le dommage agrave leacuteconomie et ayant preacuteciseacutement examineacute les facteurs dindividualisation de la sanction lAutoriteacute a exactement proportionneacute celle-ci agrave une hauteur dagrave peine trois pour mille du meilleur chiffre daffaires annuel de la peacuteriode consideacutereacutee que la demande de reacuteformation de la SEM GEG est manifestement infondeacutee

PAR CES MOTIFS

Rejette le recours

ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RO ndeg 200909599 - 12egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Condamne la SEM GEG aux deacutepens

LE [REFFIER

Thierry FOSSIER

Cour dAppel de Paris ARRET DU 23 MARS 2010 Pocircle 5 - Chambre 5-7 RG nO 200909599 - 13egraveme page

appliquer le tarif reacuteglementeacute fixeacute par la puissance publique que de plus au vu des conditions du marcheacute libre de leacutelectriciteacute linteacuterecirct de la clientegravele de masse sauf bouleversement des prix de marcheacute [eacutetait] de rester aux tarifs reacuteglementeacutes (DeacutecO sect 97 suiv) notamment en raison du ciseau tarifaire tel quil a eacuteteacute exposeacute preacuteceacutedemment

Que reacuteciproquement lAutoriteacute na tireacute aucun argument dautres facteurs significatifs du dommage agrave leacuteconomie na notamment pas exageacutereacute leacutetendue du marcheacute affecteacute par le comportement anticoncurrentiel ni les perturbations du marcheacute

Que lAutoriteacute admet eacutegalement les rapports dactiviteacute de la CRE depuis 2005 qui font eacutetat de la stagnation du rythme de louverture du marcheacute de leacutelectriciteacute pour les clients professionnels et ce sur lensemble du territoire national que lAutoriteacute nimpute pas labsence dopeacuterateurs alternatifs en tout cas jusquagrave larriveacutee de ODF sur le marcheacute aux pratiques de la SEM GEG

Quenfin lAutoriteacute na pas neacutegligeacute de tenir compte de ce que Poweo na pas deacuteposeacute plainte devant lAutoriteacute de la concurrence pour abus de position dominante le Rapporteur ayant meneacute son instruction sur la seule saisine de la CRE et de ce que Poweo ne sest pas non plus jointe agrave la proceacutedure par la suite quau demeurant et pour reacutepondre complegravetement agrave un argument de la SEM GEO lAutoriteacute de la concurrence dans sa mission de protection des consommateurs na pas besoin de lappui ou de lassentiment des concurrents moyennant quoi la reacuteparation accordeacutee auxdits concurrents par les voies de droit commun na pas dinfluence sur la proceacutedure de reacutegulation punitive et preacuteventive fondeacutee sur lordre public eacuteconomique

Quen somme loin dexageacuterer le dommage agrave leacuteconomie occasionneacute par le comportement poursuivi et apregraves avoir reacutepondu point par point aux arguments de Poweo lAutoriteacute a fait de ce dommage une analyse tregraves pondeacutereacutee que la cour approuve

Consideacuterant enfin sagissant de lindividualisation de la sanction (sect 104 agrave 106) et que lAutoriteacute de la concurrence a preacuteciseacute que le chiffre daffaires consolideacute de la SEM OEG avait atteint en 2007 124645 millions deuros avec pour conseacutequence que le montant maximum de la sanction encourue seacutelegraveve agrave 12 500 000 euro que ces consideacuterations sont incontestables et incontesteacutees et quelles incluent neacutecessairement leacutevaluation de la capaciteacute contributive de la SEM GEG qui na pas traverseacute agrave leacutepoque des faits poursuivis ni posteacuterieurement des difficulteacutes particuliegraveres qui commanderaient une autre analyse

Quagrave titre superfeacutetatoire mais sans inexactitude il a eacuteteacute tenu compte par lAutoriteacute du fait que les ventes deacutelectriciteacute reacutealiseacutees par la SEM GEO nont cesseacute de progresser entre 2004 et 2007 pour atteindre 64 261 401 euros en 2007

Quenfin il ny a pas lieu de tenir compte de lindemnisation provisionnelle accordeacutee agrave Poweo par la juridiction commerciale pour les raisons susdites

Consideacuterant quayant ainsi proceacutedeacute sans erreur agrave lanalyse de la graviteacute de la pratique anticoncurrentielle ayant ensuite eacutevalueacute avec pondeacuteration le dommage agrave leacuteconomie et ayant preacuteciseacutement examineacute les facteurs dindividualisation de la sanction lAutoriteacute a exactement proportionneacute celle-ci agrave une hauteur dagrave peine trois pour mille du meilleur chiffre daffaires annuel de la peacuteriode consideacutereacutee que la demande de reacuteformation de la SEM GEG est manifestement infondeacutee

PAR CES MOTIFS

Rejette le recours

ARRET DU 23 MARS 2010 Cour dAppel de Paris RO ndeg 200909599 - 12egraveme page Pocircle 5 - Chambre 5-7

Condamne la SEM GEG aux deacutepens

LE [REFFIER

Thierry FOSSIER

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Condamne la SEM GEG aux deacutepens

LE [REFFIER

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