Artificialisation des sols et dégradation des paysages

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Synthèse d'articles tirés de mon blog @Geographedumond

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Artificialisation des sols et dgradation des paysages

22 octobre 2006. Bretagne. Le Monde du 21 octobre relaye une grande nouvelle : le groupe Vinci commercialise un goudron glouton qui absorbe la pollution. Il sagit non de la dcouverte dun produit miraculeux, mais de linauguration dun nouveau revtement dans des rues dune petite ville du nord de la Bretagne. La journaliste Isabelle Rey-Lefebvre laisse le soin au directeur de recherche du groupe dexpliquer le procd :"Ce coulis de quelques centimtres d'paisseur recouvre le revtement classique de la route, [] Le ciment contient du dioxyde de titane, qui ragit au rayonnement du soleil ou la lumire artificielle d'un parking par exemple. Cette raction, dite de photocatalyse, pige les molcules de dioxyde d'azote et les transforme en nitrates rejets doses infinitsimales. Ces rejets se font des concentrations trs en de des seuils considrs comme polluants."Elle complte ce commentaire par un bilan lchelle nationale d'une pollution loxyde dazote, lment prsent comme nocif : un million de tonnes libres dans latmosphre chaque anne. Isabelle Rey-Lefebvre note cependant que prs de la moiti proviennent directement des pots dchappement (46 %), et que les tests donnent des rsultats disparates. Mais la foi sauve, sous-entend-elle : les bnfices escompts dpassent lentendement, et touchent lamlioration de la sant publique. Il faudra en tout cas de solides arguments pour convaincre les collectivits locales : ce revtement cote entre 10 et 15 euros le mtre carr, soit le double d'un revtement classique. Ce qui entrane un surcot de 20 % 30 % pour l'ensemble d'une route. En attendant un recours systmatique (?) au NOxer (c'est son nom), il faudra shabituer voir cohabiter pendant longtemps deux catgories de routes. Livrons-nous un calcul pour Dinan. Un habitant prend sa voiture pour venir faire des coursesdans la cit de Du Guesclin ; il roule dix kilomtres. Imaginons-le trs soucieux de lenvironnement : il parcourt donc les 2 500 m de rues nouvellement enrobes, cest--dire un quart de son trajet. Si lon te la part irrmdiablement renvoye dans latmosphre, le NOxer a donc permis de capter un quart du restant : trs exactement 13,5 % de loxyde dazote produit loccasion de ce trajet effectu Dinan par lautomobiliste ici tudi.Mais lironie est facile. Je prfre mappesantir sur une question dlaisse par la journaliste, qui concerne le ruissellement des eaux provoqu par le goudronnage. Car 100 % de leau de pluie cesse de pntrer dans les sols. Une fois collecte la statistique sur la pluviomtrie moyenne de Dinan (renseignement ici) 462 mm par an, cest--dire 462 litres par m on peut calculer que 2500 m de routes vont entraner le rejet de 462 x 2500 : plus de mille (1155 exactement) mtres cubes deau. En cas dorage important, vingt millimtres reprsentent pour cette mme surface 50 mtres cubes deau dverss dans les canalisations, que la station dpuration de Dinan doit en thorie prendre en charge.Les chiffres mtourdissent et jai bien peur en continuant dtaler mes insuffisances. Il me semble toutefois que le goudron, mme rvolutionnaire, renvoie surtout la question de la gestion de leau. Il est logique que le premier groupe mondial de travaux publics vante les mrites de lun de ses produits. Il revient en revanche aux observateurs de rappeler lordre des priorits : lextension des surfaces goudronnes en France pose dabord la question de la gestion des eaux de ruissellement, du gonflement ponctuel des cours deau et des inondations qui en rsultent. En attendant, l'environnement fait vendre !*14 mai 2009. Littoral mditerranen. Intitul Surproduction immobilire et crise du logement, l'article de Charlotte Worms se suffit presque lui-mme. Il s'appuie sur des sources diversifies et visiblement bien exploites. Pour les besoins de ma dmonstration, je livrerai quand mme les grandes lignes de la premire partie, avant de commenter quelques ides tires de la seconde. L'historienne asseoit sa rflexion sur une ide directrice, la rvolution paysagre espagnole entame il y a quatre dcennies. La fin de l're franquiste et l'installation de la dmocratie espagnole ont concid avec une croissance conomique intense, trs manifeste dans les grandes villes. Charlotte Worms tait en revanche l'impact de l'intgration de l'Espagne dans la CEE en 1986, et le dveloppement qui s'ensuit, dans l'agriculture subventionne par exemple.Quoi qu'il en soit, le pays ressemble en ce dbut de XXIme sicle une rplique des Etats-Unis transpose au sud de l'Europe. La littoralisation des activits imite celle de la Floride [Mme si Mary veut s'y installer tous prix] et l'talement de la mtropole madrilne quivaut celui de Los Angeles [Utopie en tche], toutes proportions gardes : pour l'une, sur les plateaux battus par les vents du centre de l'Espagne [Ne pas confondre casser une banque et construire une maison ], et pour l'autre sur une vaste plaine situe au sud de la Californie... L'auteur constate froidement cette transformation sans verser une larme la fois facile et prvisible sur le temps qui passe et dtruit tout. Miracle ou mirage ? Elle prend soin de ne pas trancher. Au fond, les villes surgissent de terre, partir d'une gare de l'AVE (le TGV espagnol) Ciudad Real, ou au bout d'une ligne de mtro madrilne Valdecarros. Ce n'est plus simplement de l'urbanisme oprationnel, c'est un spectacle quotidien.L'expression folie immobilire employe par Charlotte Worms indique non seulement le rythme effrn des constructions, mais galement le dfi la raison. Les prix moyens des logements ont trs fortement augment, de plus d'un tiers entre le dbut de 2003 et la fin de 2004, lors du maximum de la spirale inflationniste. Les promoteurs et industriels ont livr jusqu' 700.000 nouveaux logements au cours de la seule anne 2006. L'historienne parle de bulle spculative, mais dclare toutefois se dsintresser des causes de son retournement. Sa premire partie se termine par cette accroche : Je voudrais rendre compte ici de quatre lments spcifiques au cas espagnol, qui ont converg vers une certaine forme de surproduction immobilire : une tendance historique lhypertrophie de limmobilier en priode dexpansion, la structure particulire du march du logement espagnol, la drgulation foncire et urbanistique depuis le milieu des annes 1990 et la dcentralisation des comptences en matire durbanisme. Les caractristiques de la droute conomique espagnole suivent. J'y porterai quelques contradictions. On observe, dans lhistoire de ce pays, la rptition de priodes o limmobilier prend un poids trs important dans lconomie nationale. Ce poids se reflte dans la passion sociale pour les questions immobilires et, depuis les politiques franquistes daccession la proprit, pour le fait de devenir propritaire dun logement. Entendons-nous quand mme. Franco a gr un pays que ses armes ont en partie ravag entre 1936 et 1939 : Madrid transforme en champs de ruines, Tolde, les villes de la valle de l'Ebre, de Catalogne ou de l'ancienne poche cantabrique (Saint-Sbastien, Santander, ou encore Oviedo). Par la suite, rien de ce qui est de nature gommer la guerre civile n'est nglig... Les Espagnols devenant majoritairement propritaires, le rgime escompte sans doute les rendre reconnaissants, dfaut de les convaincre. Sur la ncessaire modernisation d'une Espagne en retard, Franco reprend un slogan aussi vieux que Joseph Bonaparte...Mais dans l'aprs-guerre, quel pays europen n'a pas connu les mmes volutions que l'Espagne ? Dans le cas de l'Allemagne, de l'Angleterre ou d'une partie de l'Europe centrale et orientale, les destructions de la Seconde guerre mondiale ont provoqu des dgts si importants que la dcennie 1950 n'a pas suffi pour achever la reconstruction des villes dtruites. Dans le cas de la France, globalement moins endommage que ses voisins, le retard pris durant la guerre et les consquences du baby-boom ont conduit une sorte de frnsie de constructions aprs 1945. Dans une Europe pige par une trs forte inflation, les loyers deviennent vite insupportables alors que les emprunts immobiliers se remboursent presque tout seul. Les politiques dextension planifie des villes (ensanche) du dernier tiers du XIXe sicle, qui dlimitent de nouveaux territoires urbains, entranrent une flambe des prix du sol, alimente par des transactions caractre spculatif. Historiens et gographes ont montr comment les bourgeoisies urbaines, notamment Madrid, se construisaient en accumulant le patrimoine foncier. Plus tard, dans la priode dite de desarrollismo, de la fin des annes 1950 au dbut des annes 1970, caractrise par louverture aux capitaux trangers, le dveloppement de lconomie espagnole sappuie sur le btiment et le tourisme et lconomie du tourisme est aussi fonde sur le btiment. Je souscris pleinement cette chronologie, en incorporant l'ide que la France ou l'Italie - pour ne citer que deux pays voisins - ont peu ou prou connu le mme sovitisme mou : cration de la DATAR, dveloppement des villes nouvelles, largissement du rseau autoroutier, etc.Alors Charlotte Worms insiste sur l'expansion qu'elle juge spcifique (?) de l'conomie espagnole au cours des trois derniers cycles de 1969-1974, de 1986-1991 et de 1998-2006. Puisque j'ai rapproch un peu plus haut l'Espagne et les Etats-Unis, j'abonderai en partie dans son sens en parlant de changement d'poque dj perceptible la veille de la mort de Franco. A partir des annes 1970, le gouvernement espagnol s'est entich d'un nouveau modle conomique, sans transition et de faon plus marque que dans le reste de la Communaut Economique Europenne. Le plein emploi et la croissance l'Amricaine passent alors par un gonflement du secteur des services... Il est videmment tentant de grossir le poids du tourisme dans le cas spcifique de l'Espagne, pour s'apitoyer des hectares btonns de la cte mditerranenne. Mais de quelles alternatives disposaient les Majorquins ou les Andalous ? Au demeurant, le fort taux de chmage - suprieur 20 % dans les annes 1980 - a laiss aux autorits une faible marge de manuvre.Le besoin insatiable de terrains constructibles a conduit les promoteurs se fournir chez les propritaires fonciers, d'autant plus aisment que l'autorit centrale retirait son droit de regard sur la viabilisation de nouvelles parcelles, en autorisant les municipalits statuer sans autorisation pralable. Le propritaire foncier, le promoteur, les villes recevant de nouveaux impts et mme l'acheteur vite convaincu de retirer une plus-value en cas de revente ultrieure ! [Pense reprise], tous y ont trouv leur intrt. L'historienne dplore le retrcissement de l'espace agricole espagnol [Les villes boulimiques se nourrissent des campagnes anorexiques]. Il convient cependant de rappeler que la surface agricole rellement utilise s'est accrue grce aux grands amnagements hydrauliques lancs ds l'poque de Primo de Rivera (1923-1930). En outre, les pturages semi-arides de la Meseta ne sont pas comparables de riches terres cralires du bassin parisien. Le paradoxe apparat dans les statistiques : malgr l'empavillonnement forcen de son territoire, l'Espagne est dvenue un pays exportateur de matires premires agricoles, grce l'irrigation, l'intensification... Et aux petites mains maghrbines payes au lance-pierre.Les besoins de logements ont cr rapidement parce que [l]a taille moyenne des mnages a diminu. Encore une fois, ceci vaut ailleurs ! A juste titre, Charlotte Worms complte son argument. Cette ralit ne suffit toutefois pas expliquer le volume de la construction dans ce dernier cycle. Entre 1997 et 2006, plus de 5,5 millions de logements neufs ont t mis en chantier, alors que ne se craient sur la mme priode que 3,5 millions de nouveaux mnages Les trangers acquirent en grand nombre des rsidences secondaires en Espagne, mais on entend l'argument dans le Sud-Ouest franais, en Toscane, ou mme Paris.Autant l'historienne se rpand contre la dcentralisation en matire d'urbanisme qu'elle appelle tort drgulation [1], autant elle se montre laconique sur l'impact des politiques publiques. Des dductions fiscales hauteur de 15 % sont prvues pour les mnages qui acquirent un logement ainsi que pour les titulaires dun plan dpargne pour lachat dun logement, condition de se porter effectivement acheteur dans les quatre ans. Dans le mme temps, les autorits ont littralement fossilis le parc locatif (gel des loyers, alourdissement des baux et durcissement des conditions d'expulsion). Cette politique fiscale assortie d'une politique montaire focalise sur des taux d'intrt trs bas a produit un appel d'air quivalent celui occasionn par un bris de vitre dans une cabine pressurise. Contrairement la France, le gouvernement espagnol n'a pas contrebalanc son dispositif par des aides aux logements anciens, dans une optique patrimoniale, par exemple. Le parc historique, souvent en centre-ville a d'autant plus perdu de son attractivit.Les promoteurs cupides [2] et les mairies avides de nouvelles ressources financires entrent dans la catgorie des grands responsables, en boucs missaires commodes. A propos de ces dernires, Charlotte Worms recense deux impts directs, sur les biens immeubles et sur les plus-values, mais aussi plusieurs impts indirects. De surcrot, [l]es rglements durbanisme rservent galement une part du foncier nouvellement urbanis au patrimoine municipal (outre celle destine la voirie et aux quipements). Celle-ci est dfinie par les Communauts autonomes dans le cadre du plafond de 10 % fix par la loi de 1998 (modifie en 2007). Il sagit en principe de permettre la constitution de rserves foncires et la mise en uvre dune politique de logement social et dquipement urbain. En fait, les municipalits ont souvent utilis la vente aux enchres de leur patrimoine foncier comme mode de financement ordinaire. [Par l'opration du Pont-Saint-Esprit]Pourquoi le cacher, la conclusion optimiste de l'auteur ne me ravit pas. De Franco Zapatero, les dirigeants politiques se succdent, mais les ides la mode sduisent toujours autant. Le tournant voqu par le chef de gouvernement socialiste ne me fait pas oublier ce qui a prcd. Je n'idalise pas la planification, ft-elle au nom du dveloppement durable. Vendus au nom de gains hypothtiques, combien de grands travaux se sont finalement avrs destructeurs, coteux et sous-utiliss ! Charlotte Worms se rend-elle compte qu'elle sous-entend un regret vis--vis de l'amnagement du territoire tel qu'imagin l'poque de Franco ? En glissant ceci au dtour d'un paragraphe, elle me touche bien davantage : il ne peut sagir que dune politique courte vue, puisque lurbanisation anarchique, discontinue et de faible densit quelle a permise est terme trs coteuse pour la collectivit. Le court-termisme tmoigne aujourd'hui de ses cueils.Je n'oublie pas ce qu'il a pu porter de positif... Ni tout ce qu'il a fallu supporter sans broncher ; que les sceptiques combattaient en vain la modernit en marche ; que la dette rcompensait l'audacieux et que le ringard payait comptant (la dette immobilire des mnages, en Espagne, est passe d'un quart du PIB en 1998 aux deux tiers en 2007 / Chiffres C.W.) ; qu'il fallait construire parce que l'on manquait de logements. etc. Alors le gouvernement espagnol devra relever un dfi majeur, soutenir ou non le march immobilier. L'administration Obama a plutt opt pour la premire, en paulant les banques dfaillantes et en secourant les mnages endetts. En mai 2009, le rythme de saisies immobilires ne ralentit cependant pas [3].Il faut s'attendre une augmentation du stock de logements vides, et une glissade des prix. Que deviendront alors les milliers de mtres-carrs vides ? Je gage que le contribuable paiera la reconversion d'espaces rendus l'agriculture ou la nature sauvage, un peu comme dans le lit majeur de la Durance. Le Monde y consacre rien moins que son ditorial du 13 mai 2009. Dans la Crau, la Caisse des Dpts se propose de rendre la nature 357 hectares de valle caillouteuse pour l'instant occups par des vergers l'abandon : cot estim pour l'hectare de cailloux... 35.000 ! Combien paiera-t-on la reconversion de l'hectare btonn ? De Franco la Crau.[1] Depuis la premire loi du sol de 1956, qui tablit le cadre contemporain de lintervention publique dans la gestion foncire, la lgislation foncire et urbanistique espagnole postule un lien de cause effet simple entre laugmentation du volume foncier et la baisse des prix des logements. Cest sur cette ide que sappuie la loi du sol de 1998 (en vigueur jusqu ladoption dune nouvelle loi du sol en 2007) visant libraliser loffre foncire. Alors que la loi de 1975 distinguait, parmi le sol non encore urbanis, le sol non-urbanisable (protg), le sol urbanisable et le sol urbanisable non programm, la loi de 1998 supprime cette dernire catgorie, retirant aux pouvoirs publics un outil fondamental de la planification. Dsormais, tout le territoire national peut tre qualifi pour lurbanisation, moins dtre expressment protg. Larticle 10 de la loi tablit ainsi 'la prsomption gnrale favorable la transformation urbanistique du sol, cest--dire sa classification comme urbanisable'. Les pouvoirs publics doivent motiver la protection dun terrain et non sa qualification pour lurbanisation. Par ailleurs, cette loi tablit officiellement lunique rfrence au march pour lvaluation du prix du sol au moment de sa qualification pour lurbanisation, donc avant son changement dusage ; elle va ainsi contre un sicle de rflexion sur les moyens dune rpartition quitable des bnfices du changement dusage du sol. Dans tous les cas (y compris celui de lexpropriation par la puissance publique), il nexiste quun seul prix du sol, calcul sur la base de la valeur attendue de lexploitation maximale du terrain en fonction de sa catgorie juridique ; celui-ci est appliqu avant la prparation effective du sol pour lurbanisation. / La Vie des Ides / Surproduction immobilire et crise du logement / Charlotte Worms[2] Aujourdhui, le grand vacarme des grues sest tu, les promoteurs bradent leurs produits. On a vu certains proposer deux appartements pour le prix dun, dautres offrir la voiture avec la maison. Les journalistes font des reportages sur des villes fantmes. Ainsi le Residencial Francisco Hernando, construit dans la petite commune toldane de Sesea (12 000 habitants), 35 km de Madrid par la route, ne compte aujourdhui que 750 habitants dans ses 2 536 logements dj livrs. N de la mgalomanie dun promoteur immobilier multimillionnaire et de la corruption dlus locaux, le Manhattan de Sesea, comme lavaient baptis les mdias, aurait d terme compter 13 500 logements. Projet sans infrastructures ni quipements, sans la garantie de ressources en eau suffisantes pour assurer la consommation des habitants, cet ensemble est un cas particulirement frappant des mauvaises pratiques (ici de surcrot frauduleuses) auxquelles a donn lieu lemballement de lconomie immobilire. Aujourdhui, aprs avoir vu ses projets ralentis par le nouveau maire communiste qui a obtenu sa mise en examen, le promoteur est finalement emport par la crise : cette fois-ci, Paco el Pocero (lgoutier), comme lont surnomm les Espagnols en rfrence son premier mtier, a perdu sa mise. Les grandes socits immobilires dposent le bilan les unes aprs les autres et leurs directeurs, hros des success stories depuis les annes 1960, appellent laide les pouvoirs publics au nom de lintrt gnral. En juin 2008, une tude du ministre chiffrait 500 000 le stock de logements neufs (construits depuis 2005) non vendus. / La Vie des Ides / Surproduction immobilire et crise du logement / Charlotte Worms.[3] Record des saisies immobilires aux USA. Les procdures de saisie immobilire aux Etats-Unis ont atteint un nouveau record en avril, a indiqu jeudi le cabinet RealtyTrac. Au total, plus de 342 000 biens immobiliers ont fait l'objet d'une procdure au cours du mois pass. Qu'il s'agisse de simples notifications de retard aux propritaires, d'annonces de ventes aux enchres ou d'expulsions des occupants par les cranciers. Toutefois, la hausse des procdures a fortement ralenti, pour atteindre 1 % sur un mois et 32 % sur un an en avril, aprs un bond de 17 % et 46 % respectivement en mars. Selon RealtyTrac, la progression de ces derniers mois est imputable la leve du moratoire sur les saisies, arriv chance en fvrier. Les Etats les plus touchs par ce phnomne restent la Californie, l'Arizona, le Nevada et la Floride. A eux quatre, ils ont reprsent 56,6 % des procdures en cours en avril, indique RealtyTrack. / Le Monde / Supplment abonns - 12:15 / 13 mai 2009.*10 fvrier 2010. Dans le Tlrama n3135 sorti aujourd'hui, Xavier de Jarcy et Vincent Rmy ont livr les fruits de leur enqute sur la dtrioration des paysages en priphrie des villes et villages franais. Le sous-titre choque sciemment Comment la France est devenue moche sans point d'interrogation, avec une faute de syntaxe, et prcd d'un titre passe-partout. L'urbanisme la franaise offre une vision large et consensuelle. Cela tant, l'article gratigne une profession sans prciser en quoi elle a accompagn le mouvement, plus que lutt contre lui. Les journalistes s'affligent de paysages abms mais ne bousculent personne. David Mangin (La ville franchise 2003) brosse un historique de l'talement urbain mais vite de se mettre dos ses confrres. Un architecte-conseil de l'Etat en Haute-Vienne dplore que dans un rayon de 40 kilomtres autour de Limoges, tous les villages ont construit dix, quinze, vingt maisons pour des habitants qui ne se rendent jamais dans le centre-bourg, puisqu'ils travaillent tous... Limoges : histoire dj entendue (A Lindry, personne ny pense, mais tout le monde rit). Mais, lui, quels conseils donne-t-il en Limousin ? Sont-ils suivis des faits ?Les journalistes citent Jean-Paul Chari, dput UMP du Loiret et auteur en mars 2009 d'un rapport sur l'urbanisme commercial, mais celui-ci est dcd en novembre. Jean-Pierre Sueur, snateur socialiste du mme dpartement, abonde dans le mme sens : C'est partout le mme alignement de cubes et de paralllpipdes en tle ondule, le mme pulullement de pancartes et d'enseignes. Mais J.-P. Sueur n'attaque pas les maires qui dlivrent les permis de construire. Un philosophe, diteur de la revue Urbanisme ne tourne pas autour du pot, en parlant du tournant de 1983. Librs de la tutelle des prfets, les maires signent tout-va les permis de construire. Or, la plupart des lus sont totalement incomptents en matire d'urbanisme, et de plus ont un got excrable. Thierry Paquot fait toutefois figure d'exception au milieu de l'enqute de Tlrama. L'ensemble tourne au procs sans accuss.L'un ressort quand mme, puisqu'il s'agit de la grande distribution. Celle-ci subit tant d'opprobre qu'elle ne souffrira gure de cette dernire attaque. Les arguments se mlangent, avec plus ou moins de bonheur. Xavier de Jarcy et Vincent Rmy oublient malheureusement leur sujet, l'enlaidissement des paysages par les zones commerciales. Les journalistes mettent en cause successivement l'automobile reine, les enseignes championnes de la mondialisation et ouvrant des magasins en Chine, ou encore les patrons richissimes copinant avec les maires. Tout cela obscurcit la ligne directrice de l'article, sans mme prononcer le mot de la fin. Dans une colonne latrale, on peut lire en effet la progression du nombre du nombre d'hypermarchs : 2 en 1960, 115 en 1970, 407 en 1980 et 1.400 en 2010. Au nom de la dfense des petits commerants, le lgislateur a forc les grands noms de la distribution agrandir sans cesse leurs magasins...Le procs met en avant une victime expiatoire. Le pauvre agriculteur n'apparat en effet, ni comme maire, ni comme propritaire de terrains constructibles. Le Jean-Marc du Finistre du dbut de l'article a 48 ans, install quelque part dans la grande priphrie de Brest. A ct de son exploitation, la premire grande surface arrive en 1968, quatre ans avant la cration de la zone d'amnagement concert de Kergaradec. Les trois cents hectares longent aujourd'hui la quatre-voies, voisinant des quartiers pavillonnaires. Les parents de Jean-Marc sont en partie expropris, puis ils s'adaptent tant bien que mal, confectionnent des produits laitiers pour le centre Leclerc, avant de se reconvertir : la jolie ferme est aujourd'hui une des salles de rception les plus courues de Bretagne. Maintenant, Jean-Marc explique aux journalistes de Tlrama qu'il trouve la zone commerciale moche. Comme c'est triste. Dans le dernier tiers de l'article, on retombe sur les agriculteurs, mais sans nom ni lieu. Les maires de petites communes ont en effet courageusement lutt contre la fermeture de l'cole et favoris l'installation de jeunes couples avec jeunes enfants (En pays briochin, les merveilles nexistent pas) C'est la fuite en avant. Le mitage du paysage est renforc par la spculation foncire. Difficile pour le maire d'une petite commune de refuser des voisins agriculteurs la constructibilit sachant que le prix du terrain lotir est alors multipli par dix ou vingt. L j'inonde mon mouchoir, tant l'motion m'envahit. On savait pas, on pouvait pas faire autrement... S'enrichir dans le commerce, c'est vulgaire. Et en vendant des terres ? C'est la faute la spculation ! Des historiens ont avanc l'ide que la France des paysans a disparu sur le champ de bataille de Verdun. Il ne faut sans doute pas confondre l'me et le corps...Mais je ne vais pas dmolir compltement cet article. Car sa lecture apprendra beaucoup, en esprant que les bobos n'y trouveront pas motif brocarder leurs contemporains des priphries... Qu'ils mditent en instant sur cet cart rappel entre la distance parcourue moyenne du domicile au lieu de travail par les cadres (18 kilomtres) en comparaison de celles parcourues par un ouvrier (40 kilomtres). Je retiens donc pour finir des donnes chiffres dj en partie voques (sans leurs sources, il faut le regretter). Le nombre de voitures en France 31 millions en 2010 fait prsager le passage d'un cap symbolique, celui d'un vhicule pour deux habitants. Je n'oublie pas les 30.000 ronds-points franais (pour 60.000 dans le monde), les 100.000 hectares de bonnes terres agricoles englouties chaque anne dans la dcennie 1990 (deux fois plus en moyenne que dans la dcennie prcdente), ou les 200.000 maisons individuelles construites dans la seule anne 2007.En m'appuyant sur cette date ultime, je relativise la conclusion de Xavier de Jarcy et de Vincent Rmy. Le ct tout va de plus en plus mal, sauf en Europe du Nord me dplat souverainement. Je ne vois pas pourquoi je devrais souscrire cette admiration sans borne pour les habitants des littoraux de la Baltique, alors que ceux-l mme ne jurent que par les bords de la Mditerrane quand ils partent en vacances ! Le discours sur le dveloppement durable maill de mort au carbone, et de sus aux grandes surfaces me laisse de marbre. En tout cas, les recommandations conclues par un trop tard ? me poussent rtorquer 1916 face au millsime 2007. Cette anne-l, il y a prs de quatre-vingt-quatorze ans, commena la plus meurtrire bataille de l'histoire. A une quinzaine de kilomtres de Verdun (carte), le haut-commandement allemand lana une offensive fin fvrier 1916. Une fois la progression interrompue vers la prfecture de la Meuse, il s'entta cependant envoyer au feu des milliers de soldats, misant dans un second temps sur la supriorit dmographique des Allemands face une France vieillissante (archive Ina).Entre le 21 fvrier et la fin dcembre 1916, 700.000 soldats franais et allemands moururent sur le champ de bataille. Des dizaines de kilomtres carrs surplombant la rive droite de la Meuse (Wovre) se mtamorphosrent en un vaste paysage martien, terre et chairs mles. Alors je rejette la phrase de Xavier de Jarcy et de Vincent Rmy. Le Moyen ge a eu ses villes fortifies et ses cathdrales, le XIXme sicle ses boulevards et ses lyces. Nous avons nos hangars commerciaux et nos lotissements. Tout cela n'est pas plus irrmdiable que l'artillerie de campagne tirant des dizaines de millions d'obus sur la campagne de Meuse en 1916. Que l'on parcourt les images de la Meuse vue du ciel pour constater qu'il ne reste rien de dcelable de l'enfer boueux de Douaumont ou du Mort-Homme. La fort sert de linceul sur une bonne partie du primtre de la bataille. Des villages ont tout simplement disparu, comme Beaumont, Bezonvaux, Louvemont. De grce, ne crions pas la nuit sans fin. La France n'est devenue moche ni sous le canon, ni par la btonneuse. Ce qui est, passera. Quant aux coordonnateurs du dsastre paysager, ils n'ont pas de morts sur la conscience, mais beaucoup d'argent gaspill en pure perte. Le jour o l'on nommera un ministre des paysages, je promets de demander un dtachement. A moins qu'un ministre ne prenne sous sa coupe un secrtariat d'Etat : pourquoi pas l'Equipement (feu) ou l'Agriculture ?!*17 juin 2011. Nice Les instances fdrales du football franais ont donc rendu leur verdict. Il fallait neuf stades pour accueillir la comptition de l'euro 2016, et il y avait onze mairies candidates. Les dossiers de Toulouse et de Saint-Etienne ont t retirs de la liste la fin du mois de mai. Outre les deux stades franciliens (Stade de France et Parc des Princes), le Conseil Fdral a retenu les stades de Marseille, Nancy, Bordeaux, Nice, Lyon, Lille et Lens. Ce choix ne fait pas l'unanimit chez les amateurs (source). Les Stphanois hants par les exploits des Verts ont visiblement trouv en Michel Platini un avocat pour inflchir la dcision finale. Un dixime stade sera brusquement ncessaire pour la bonne marche de la comptition : celui de Saint-Etienne justement (source). Dans la liste considre comme finale, le nom de Nice a toutefois retenu mon attention.La dimension financire du projet suscite videmment mon agacement. Pourquoi faudrait-il consacrer prs de 250 millions d'euros un quipement de prestige, ne servant qu' une infime minorit de la population dpartementale ? A titre de comparaison les 17.000 places du stade actuel reprsentent l'quivalent de 1,5 % de la population du dpartement des Alpes maritimes, qui compte un peu moins d'1,1 million d'habitants. Un nouvel quipement attirera de nouveaux spectateurs ? A ce compte-l, la municipalit peut aussi inscrire Nice sur la liste des villes candidates aux JO en tablant sur la future frquentation d'installations sportives par une population toujours jeune et dynamique. J'exagre peine : Nice figurait parmi les concurrents d'Annecy pour des Jeux d'hiver futurs. Il est vrai que les dfenseurs du projet tablent sur l'organisation de manifestations culturelles et sportives en dehors des matchs de football.Des conseillers municipaux ont ouvertement exprim leur hostilit. L'une explique que la redevance annuelle verse par la ville - outre la subvention de dpart (1) - partir de 2014 atteindra 10,8 millions d'euros (dernire chance en novembre 2040), c'est--dire un total suprieur de 2 millions celui annonc par Christian Estrosi. Ce dernier dfalque par avance le loyer verser par le club de football la mairie. Mais la prvision ne vaut que si l'OGC reste en premire division (L1) et si la frquentation progresse, ou au moins reste stable. Or dans un pass rcent, les footballeurs niois ont volu plusieurs reprises en deuxime division (L2). Un autre conseiller calcule que la moyenne des spectateurs par match lors de la saison 2009-2010 (8.714 / chiffres LNF) ne correspondrait pas celle requise pour couvrir honorablement le contrat entre la mairie et le groupe Vinci. Faute de dtenir toutes les clefs du dossier, je me contenterai de rapporter la moyenne ci-dessus avec la contenance du futur stade (35.000 places) pour prsumer un foss coteux (source).Le journal Nice Matin ne tourne nanmoins pas autour du pot. Il roule en faveur du projet " 'a fait quatre ans que je suis revenu Nice. Il ne manque quune vritable structure avec un stade et un camp dentranement et des moyens. Peut-tre quun actionnaire sera intress le jour o il y aura le Grand Stade.' Fin mars, Lionel Ltizi, le gardien de but emblmatique form au club rouge et noir, rencontrait nos lecteurs. Et dmontrait, sil en tait encore besoin, combien le projet du Grand Stade dans la plaine du Var est vital pour lenvol footballistique (enfin!) des aiglons. Mais pas seulement. "S'ensuit une litanie de bnfices hypothtiques. Lnine a dit un jour que le communisme c'tait les Soviets plus l'lectricit. Avec le futur stade, ce sera le sport plus l'conomie et l'cologie. Les hotels - restaurants ravis de voir dbarquer une clientle de supporters naturellement si adapte aux standards touristiques de la Cte d'Azur attendent avec impatience les cinq matchs de l'Euro. La mairie a prpar le terrain du point de vue de la scurit des abords ['Aux Niois qui mal y pensent']. Le groupe Vinci si souvent maltrait par la majorit gouvernementale, qui a remport l'appel d'offres, s'est engag s'appuyer sur la sous-traitance locale ( hauteur d'un tiers environ des emplois) ; soixante personnes au mieux pendant trois ans, voil qui fera reculer le chmage en pays niois ! S'y ajouteront les emplois des galeries marchandes prvues sur 29.000 m aux abords du futur stade (source).Dans la future Eco-Valle (source), le Grand Stade Eco-durable va donc surgir : vido. Les travaux sur le site devraient commencer cet t sur le site de Saint-Isidore (source). Les maquettes pralables incitent rver. On contemplera dans trois ans un btiment ar, environn de verdure, mais dont on ne voit pas comment on il pourra accueillir des milliers de voitures (faute de parkings souterrains ?). Admettons en tout cas le projet, puisqu'il va dsormais se raliser. Ma critique principale intervient l'chelle du risque et non de la viabilit financire. Car la basse valle du Var cumule les handicaps. Les terrains plats non construits se concentrent l et pas ailleurs ; compte tenu de la pression immobilire qui rgne sur la Cte d'Azur, il y a l quelque chose qui devrait faire rflchir. Seuls des grands amnagements sont implants dans cette zone : prfecture, aroport, zone commerciale, etc. Le lit mineur du fleuve est en efffet extrmement dangereux. D'abord parce qu'il se situe dans un dpartement trs expos aux risques de sismes et de submersion par un raz de mare ['Salade nioise, sauce citron'].Mais c'est surtout au risque d'inondation que je pense en voquant les catastrophes naturelles. Les plans de l'Eco-Valle nioise montrent bien que les urbanistes ont considr le chenal d'coulement actuel comme une norme dfinitive. Ils ont compltement gomm la capacit d'expansion du fleuve au-del de ses berges artificiellement dessines, lors d'pisodes de prcipitations exceptionnelles (carte). Les cartes ne tiennent videmment pas compte de l'histoire de l'endiguement du fleuve ; celui-ci a commenc aprs 1840 et s'est acclr aprs 1870 : une fois le Comt de Nice rattach la France. A l'poque, il faut largir le primtre agricole en crant des parcelles gagnes sur le fleuve. Des seuils permettent de limiter l'enfoncement du fleuve dans son lit.Dbut novembre 1994, 350 millimtres d'eau sont tombs en quelques heures. Le 5 novembre, des flots boueux ont ensuite tout emport sur leur passage. Plusieurs seuils ont disparu, pour certains doubls de turbines destines la production lectrique. Alors que le dbit estival du fleuve peine dpasser 10 mtres-cubes par seconde, il dpasse ce jour-l le maximum de capacit (800 mtres-cubes par s.) des capteurs installs sous le pont Napolon III. Le bassin-versant du Var s'tend certes sur une surface infrieure celle du dpartement des Alpes maritimes, avec trois affluents notables : l'Estron, la Vsubie et la Tine. Les lignes de crtes culminent nanmoins 3.000 mtres d'altitude ; cette altitude, neiges et glaces s'accumulent en hiver et fondent au printemps, provoquant un premier pic d'coulement saisonnier (nival). A la fin de l't et l'automne, les orages mditerranens gonflent dates rgulires le fleuve : comme en 2010 dans le dpartement voisin ['Guigne Draguignan']Je conclus en citant Philippe Gourbesville, dont l'tude apporte des cartes et photos trs clairantes ('Le bassin-versant du Var et la crue de 1994'). "Si, par chance, la crue n'a pas provoqu de victime ou de bless, l'ampleur du phnomne a surpris la population locale qui se pensait l'abri de ses digues. De nombreuses infrastructures ont t endommages et en particulier des chausses - routes nationales et dpartementales - des ouvrages d'art et de nombreux btiments. L'estimation des dommages directs lis cet vnement s'lve 23 millions d'euros. L'aroport a t contraint d'interrompre ses oprations pendant une semaine. De manire anecdotique, le centre de gestion administratif des crues tait implant dans les sous-sols de la cit administrative situe en bordure du fleuve. Cette dernire fut l'un des premiers btiments inonds..." A partir de 2014, grce l'amnagement de l'Eco-valle, les crues du Var apparatront comme naturelles. Sans doute pas indolores. On peut facilement ironiser sur les reconversions possibles du stade de football en cas de crues : Jean Dujardin - Brice de Nice penche pour le surf...1.Parmi les partenaires publics : l'Etat (20 millions d'euros), le dpartement (20 millions), la ville de Nice (16 millions d'euros), la communaut urbaine (6 millions d'euros), la rgion (7 millions).*10 dcembre 2014. Concernant les zones commerciales (et leurs usagers), j'en tais rest ce post. Pour poursuivre la rflexion, on trouvera un dossier patant dans La Croix sur la zone commerciale de Waves, prs de Metz (lien). Cet espace affubl du qualificatif de "haut-de-gamme" atterrit sur un territoire dj satur, au sud-ouest de l'agglomration mosellane (carte). Il faut un temps minimum de rflexion pour comprendre le concept de "haut de gamme" dans un dpartement dj bien quip mais en difficult conomique (rappel).La journaliste de La Croix (Elise Descamps) peut tre fire de ce qu'elle a obtenu de ses contacts Metz : des aveux de toute puissance, sans remords apparents. Interrogs sur la zone de Waves, les lus locaux se montrent assez maladroits. L'adjointe l'urbanisme parat tout simplement nier l'impact sur les commerces du centre-ville. Le maire de Metz va mme plus loin dans le cynisme : "Le commerce, ce n'est pas mon mtier". [Mais alors, pourquoi s'intresse t-il l'amnagement d'une zone commerciale ?]Le centre meurt et les commerces ferms font le jeu du FN ? "D'autres rues gagnent en attractivit, une ville bouge sans arrt" Le maire conclut "Je ne suis pas charg de savoir si ces espaces marchent ou pas. Une ville doit mesurer son attractivit sa capacit attirer de l'argent non public, et nous devons aller de l'avant si nous voulons rsister Amazon. En plus, Waves, c'est 380 emplois". Etale t-il son inculture ou a t-il rpondu trop vite ?De fait, le maire PS organise sans mme s'en cacher la concurrence entre territoires l'intrieur de la mme aire urbaine, comme si l'automobile ne permettait pas d'aller d'un bout l'autre de l'agglomration. Il utilise cette fin l'argent public pour construire les infrastructures (voirie, clairage, transports en commun) tout en plaidant en faveur de l'initiative prive. Avec la satisfaction du devoir accompli.Le maire officialise en outre une quasi sparation physique entre clients : d'un ct les prolos qui font chauffer la carte de crdit Waves, de l'autre, les plus aiss circulent dans un centre-ville profil pour leurs revenus. Quel prambule pour visionner le 'Grand Soir' !Le plus grand film de l'histoire des zones commerciales (et des punks chiens) est encore disponible deux jours sur Arte. Malheureusement, la performance d'acteurs de B.Poelvoorde et d'A.Dupontel fait oublier que le personnage principal est la zone commerciale ! Ce non-lieu se situe en Gironde mais pourrait tre en Bourgogne ou en Provence. Il apparat ds le dpart, comme dispos l'extrieur des limites de la ville.Les vitrines du centre sont d'ailleurs fermes quand le punk Not la quitte. Les voitures irriguent ce grand corps fonctionnant comme un train fantme diurne pour adultes consentants. La nuit, une cabane de jardin abrite certes le locataire d'un soir. La force du personnage principal - la zone commerciale - tient son ambivalence : les acteurs de ce thtre sont en mme temps les dindons d'une farce grotesque.Delpine et Kervern ne savaient certes pas comment terminer le feu d'artifice. Mais bravo pour le spectacle ! Dupontel, vendeur de matelas " mmoire de forme", obsd par les normes n'est-il pas inoubliable ? La zone commerciale est dfinie merveilleusement par 'Dead', ex-vendeur congdi pour tre "toujours en retard" et frre de Not : "Des milliers de gens qui viennent ici. Pas seulement parce que c'est moins cher. Mais parce qu'y-a-d'la vie ! Du froid l't de la chaleur l'hiver, la scurit toute l'anne... O tu peux te balader dans des magasins aux normes, et des gens aux normes"."Et ta connerie, elle est pas aux normes, peut-tre ?" rpond Not, qui le lendemain vient s'installer dans la zone, en avouant qu'il n'a envie d'tre le seul idiot rester dans le centre-ville. Sur Arte, le Replay fonctionne encore quelques heures...Une rentabilit en question. La fdration pour l'urbanisme et le commerce spcialis ne pensait peut-tre pas susciter autant de ractions avec son tude. Elles n'ont pas tard, virulentes tant sur le fond que sur la forme (lien). L'unanimit des professionnels outrs incite toutefois penser que l'analyse premire tait fonde. Peu importe finalement quel niveau se situent les taux de vacance et de rentabilit des commerces.L'tude constate une dgradation des zones commerciales en fonction de cinq critres : la taille (trop petites et non rhabilites), la localisation (en particulier celles situes en centre-ville), la vitalit insuffisante de la ville (moyenne), l'ampleur dmesure des extensions rcentes ou la dgradation conomique de l'environnement priurbain.A l'issue d'une volution entame depuis l'Entre-deux-guerres (1,2 millions de commerces en France en 1920), la concentration des zones commerciales se poursuit, avec de nombreux dommages collatraux. Le nombre de vitrines diminue, les surfaces connaissant quant elles une volution inverse : "Sur la priode 1992 2009, [le parc commercial] a progress de + 3,5 % par an, passant de 48 millions 77 millions de mtres-carrs " Le pouvoir d'achat ne progresse pas au mme rythme...Le Conseil d'Etat examine un recours contre un projet de zone commerciale. D'aprs Sud-Ouest, le rapporteur public ne s'oppose pas au projet de construction d'une zone Saint-Geours de Maremne. Atlantisud parachvera toutefois la victoire d'une commune hier rurale, dpourvue des atouts propres la prfecture toute proche, Dax. Dans les Landes, l'Etat s'apprte donc couronner dfinitivement Saint-Geours, situe vingt kilomtres plus l'ouest. La construction d'une quatre voies, transforme rcemment en autoroute (itinraire europen, reliant l'Espagne l'Europe du Nord, via Bordeaux et Paris) a prpar le terrain (carte).Au mme moment, prs de Lisieux, une zone commerciale (ZAC des Hauts de Glos) surgit dans la douleur (carte). Le journal local - le Pays d'Auge - dresse un premier bilan, alors que les deux tiers des 60 hectares restent amnager. L'intercommunalit a dpens six millions d'euros, et doit se contenter pour l'heure de recettes trs infrieures. L'lu interrog ce sujet assure nanmoins que tout rentrera dans l'ordre si des enseignes et/ou des entreprises s'installent sur les lots vides. Avec des si, on mettrait Paris en bouteille...L'emploi, la zone commerciale et la dmagogie. Dans une rgion prouve par le chmage et la prcarit, la mairie de Fourmies souhaite crer des emplois cote que cote : quoi de plus normal ? La faon de procder tonne cependant autant que le type d'entreprise vise; si l'on en croit La Voix du Nord. Aider l'installation d'un drive en face d'une grande surface (carte), c'est mettre en concurrence des emplois peu qualifis avec d'autres emplois peu qualifis : d'un ct des caissires et employs au contact avec la clientle, de l'autre de simples manutentionnaires remplissant des caddies pour la clientle en voiture.On peut lgitimement s'interroger sur le rle d'une collectivit locale. Devrait-elle participer une telle course l'chalote ? Bcler un sondage sur Internet, avec pour seules questions, l'usage du service et les gains en retirer pour l'utilisateur, c'est en tout cas vouloir faire passer le projet en force. On imagine que les membres du conseil municipal ont discut de la pertinence de l'extension de la zone commerciale; sans certitude absolue. En attendant, les salaris de la grande surface, l'annonce de l'ouverture du drive, craignent tout simplement de perdre leur emploi.L'inscurit en zone commerciale. Alors que dans le Puy-de-Dme, les sangliers envahissent les abords de Cournon, banlieue de Clermont-Ferrand (source), la question de la scurisation des zones commerciales se pose en grande couronne francilienne. Romilly se trouve certes en Champagne, en amont de Nogent sur Seine, mais dans la proximit immdiate de l'le de France (carte).En dbut de semaine, le magasin Carrefour de Romilly a subi un vol main arm avec prise d'otages. D'autres dlits ont t signals au cours des derniers mois : vols et vitrines fractures. L'accumulation pse lourd. La journaliste de l'Est-Eclair signale que gendarmes et policiers municipaux organisent pourtant des rondes. Cela signifie en ralit que ni les uns ni les autres ne peuvent stationner sur place, faute de moyens lgaux et/ou d'effectifs. Ce qui vaut dans la Vienne s'applique dans l'Aube (Les shrifs de Chauvigny).Restent les lampadaires dsormais allums la nuit et les camras de surveillance. Ni les premiers ni les secondes n'ont protg les commerants de Romilly, parce qu'en dehors de la ville (densit et contrle social), ce n'est plus la ville. Le risque est dsormais que les victimes organisent elles-mmes la dfense de la zone commerciale : au ton utilis par l'une personnes interroges, il ne fait gure de doute que l'ide fait son chemin. Avec des consquences aussi prvisibles que regrettables.Lorsque cette zone commerciale a t cre (carte) - combien d'autres rentrent dans la mme catgorie - les bnfices court terme ont simplement fait oublier les cots moyen et long terme. Vue l'emprise croissante de cet urbanisme en France, le problme ne va manquer d'apparatre...*2 juin 2015. Littoral mditerranen (retour) Depuis 2013, peu de choses ont chang. Tout va bien dans le meilleur des mondes.Ce reportage donne envie de se rendre dans le Gard, prs de Nmes... Finie l'poque durant laquelle on subventionnait une agriculture irrigue, puis celle durant laquelle poussait du pavillon priurbain (subventionn) : aujourd'hui vient le temps des inondations. Il n'a en ralit ni dbut et ni fin, puisque le Vistre a dbord 37 fois en un sicle ! Le cours d'eau originel a disparu au passage, avec ses mandres et ses zones d'expansion dans ses parties basses. A la place, le Vistre canalis s'est mtamorphos en gout-cloaque.Qu'est-ce qui explique alors la rsurrection de 4 kilomtres sur les 23 viss ? Des normes europennes sur les eaux courantes et le retraitement des eaux uses produites par l'agglomration de Nmes. L'Etat ne peut gure tre crdit de telles avances, qui a au contraire entrin les folies communales... Alors, faut-il parler de miracle ? Devant la conclusion d'Emmanuelle Rju (non mise en ligne), on mesure le chemin parcourir :"On est encore loin de l'objectif de 23 km que s'est fix l'Agence de l'eau. Il faudra cette fois racheter la terre aux riverains. 'Nous essayons aussi de ngocier avec les agriculteurs des changes de parcelles', explique Brigitte Aguila [prsidente de l'Etablissement Public Territorial de Bassin] du Vistre. Reste enfin convaincre les communes de participer financirement l'opration. 'Les lus sont sensibles l'argument concernant la lutte contre les inondations', reconnat le directeur de l'Agence de l'eau Rhne-Mditerrane et Corse."Au jour de l'inondation, qui cessera de traner les pieds, et vers qui se porteront les dolances ?Chacun soupire d'aise Lattes (18.000 habitants c'est--dire 100 fois plus qu'il y a un sicle), commune priurbaine de l'Hrault situe entre Montpellier et la Mditerrane, au sud de l'autoroute Barcelone - Marseille, et le long du Lez inondable. Si l'on en croit l'article de La Croix, le risque de voir l'eau envahir le pavillon-de-plain-pied est dsormais repouss. En tout cas, pour l'eau continentale ! Ysis Percq ne souffle mot de la submersion marine...Curieusement, la prsentation de l'infrastructure (canal + digues) ne donne aucune prcision sur les volumes vacuer. Quelles ont t les crues de rfrence slectionnes ?On trouve bien la rfrence une crue-type (laquelle ?) de 900 mtres-cubes/seconde. Le maire explique que l'infrastructure prend en compte un coulement de 1.200 mtres-cubes/seconde [source]. Mais a t-on pris en compte l'artificialisation complte du bassin-versant du Lez ? En moins d'une gnration, l'agglomration montpellirenne a totalement 'envahi' son espace.Dans le registre financier, la journaliste ne fait pas plus le rapport entre la dpense ralise et ceux qui paient la note. Dans un premier temps, des milliers de personnes ont fait le choix de la plaine inondable. Dans un second temps, la collectivit (l'Etat 13 millions, l'agglomration 13 millions, la rgion et le dpartement) prend en charge 48 millions d'euros de travaux de mise "hors-d'eau" [source : Batiweb]Dans le Midi-Libre, il y a des traces visibles de vives discussions ! "C'est justement sur le dbit suppos des crues que Bernard Banuls (groupe non inscrits) intervient. L'lu conteste le dbit prvu par les services de l'tat sur la Lironde (30 m3/s) qu'il estime sous-estim (150 m3/s selon lui)." S'ensuivra un dbat muscl sur l'historique de l'hydraulique lattois. Hauteurs des crues centennales ou exceptionnelles, nombre d'experts prsents en 2006, rle de Philippe Quvremont commissaire central dsign pat Nelly Olin, ministre de l'cologie et du dveloppement durable de l'poque [source].Reste dterminer pourquoi un an plus tard, lors du vote du PPRI, la possibilit de construire un tage pour les habitants est carte [source] Depuis le printemps 2015, un viaduc enjambe la fois le Lez et la Lironde, dans le cadre des travaux de ddoublement de l'autoroute A9... Pour aller plus loin sur le rapport de Lattes au risque d'inondation, on pourra se reporter cet article.La confusion de deux menaces naturelles diffrentes dans cet article de la Nouvelle Rpublique pourra agacer, mme si une comparaison finit au total par s'imposer. L'acclration du rchauffement climatique impacte en effet mcaniquement la hauteur des mers et ocans du globe (avec des consquences directes sur les littoraux), alors que les consquences pluviomtriques restent plus diffuses : surtout si l'on retient comme zone gographique les bassins versants les plus vastes.Le fait est l, cependant. Un centre de recherche Villeurbanne a mis au point une machinerie qui reproduit l'chelle 1/100me le mcanisme de crue (2cm = 2m). Cumule des engins d'investigation (radars et appareils photo de prcision), elle autorise les rpliques d'inondation et ouvre ainsi la voie une prparation minutieuse des autorits; en thorie. [Vido]L'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA) a cibl 122 cites prioritaires : confluences, amnagements humains, volution lit mineur/lit majeur et encombrement du chenal d'coulement, rupture de barrages ou de digues. Selon les estimations, entre 5 et 10 millions de Franais vivent sous la menace des eaux. De fait l'ampleur de la tche paralyse les pouvoirs publics, tents par la politique de l'autruche...A/ Cela tant dit, l'urbanisation des valles de la Seine (et affluents), de la Loire (Nantes, Orlans, Tours), du Rhne (Lyon) ou de la Garonne (Toulouse, Bordeaux) doit autant l'histoire agricole (sols alluvionnaires naturellement irrigus favorables aux marachages) qu' la gographie (mtropolisation). "On" construit en zone inondable parce qu'"on" a besoin de terrains constructibles, le phnomne s'aggravant avec la flambe des prix immobiliers.B/ Le boom dmographique des communes littorales s'inscrit quant lui dans un timing et une logique socio-conomique diffrents : dveloppement touristique et vieillissement de la population franaise sont des phnomnes plus rcents. Des milliers de personnes ges vivent dsormais l'anne en bord de mer, prolongeant les effets de la frquentation estivale.Qu'il s'agisse de ncessit ou d'agrment, le rsultat est le mme : une urgence apparat ! Les mairies doivent tirer profit d'une amlioration de la connaissance scientifique pour alerter leurs administrs. Le feront-elles au prix de l'impopularit ?