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Ann. Microbiol. (Inst. Pasteur) 1983, 134 A, 399-409 I~TUDE DE L'HOMOGI~NI~ITI~ D'UNE POPULATION DE LEVURES ISOLEES PARTIR DE FROMAGES DE CAMEMBERT par J. L. Schmidt (1) et J. J. Daudin (0 Avec la collaboration technique de Mieh~le SCHMIDT (') Laboratoire de Recherches de la Chaire de Technologic, INRA, Paris-Grignon, 78850 Thivernal-Grignon (France), el (0 Chaire de Malhdmatique-In]ormalique, INRA, Paris-Grignon, 75231 Paris Cedex 05 SUMMARY STUDY ON THE ttEMOGENEITY OF A POPULATION OF YEASTS ISOLATED FROM CAMEMBERT CHEESES Yeasts are found to a large extent in cheeses, more particulary in soft cheeses such as Camembert. The proximity between two species previously identified by standard methods was studied using a factorial discriminant analysis on 326 strains. Twenty-three fermentation and assimilation tests (discriminant varia- bles) gave a fairly good discrimination between species. This treatment has allowed us to confirm the present tendencies noti- ced in yeast classification and has also enabled us to group some of the species. KEY-WORDS: Yeast, Cheese; Carbohydrates, Species, Factorial dis- criminant analysis. INTRODUCTION Les levures sont tr~s largement distribu6es dans la nature. On les rencontre notamment dans l'eau, l'air, le sol et les v6g6taux. I1 parait donc normal de les retrouver dans le lait et les fromages. Une ~tude portant sur l'6volution et l'identit6 des esp~ces de levu- res pr~sentes ~ la surface et ~ l'int6rieur de fromages de Camembert Manuscrit re~u le 9 aoflt 1982, accept6 le 27 janvier 1983.

Ãtude de l'homogénéité d'une population de levures isolées à partir de fromages de camembert

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Ann. Microbiol. (Inst. Pasteur) 1983, 134 A, 399-409

I~TUDE D E L'HOMOGI~NI~ITI~

D ' U N E P O P U L A T I O N D E L E V U R E S I S O L E E S

PARTIR DE FROMAGES DE CAMEMBERT

par J. L. Schmidt (1) et J. J. Daudin (0

Avec la collaboration technique de Mieh~le SCHMIDT

(') Laboratoire de Recherches de la Chaire de Technologic, INRA, Paris-Grignon, 78850 Thivernal-Grignon (France), el

(0 Chaire de Malhdmatique-In]ormalique, INRA, Paris-Grignon, 75231 Paris Cedex 05

SUMMARY

S T U D Y ON T H E t t E M O G E N E I T Y OF A P O P U L A T I O N

OF Y E A S T S I S O L A T E D FROM C A M E M B E R T C H E E S E S

Yeasts are found to a large extent in cheeses, more particulary in soft cheeses such as Camembert.

The proximity between two species previously identified by standard methods was studied using a factorial discriminant analysis on 326 strains.

Twenty-three fermentat ion and assimilation tests (discriminant varia- bles) gave a fairly good discrimination between species.

This t rea tment has allowed us to confirm the present tendencies noti- ced in yeast classification and has also enabled us to group some of the species.

KEY-WORDS: Yeast, Cheese; Carbohydrates, Species, Factorial dis- criminant analysis.

INTRODUCTION

Les levures sont tr~s largement distribu6es dans la nature. On les rencontre no tamment dans l'eau, l'air, le sol et les v6g6taux. I1 parait donc normal de les retrouver dans le lait et les fromages.

Une ~tude por tant sur l'6volution et l 'identit6 des esp~ces de levu- res pr~sentes ~ la surface et ~ l 'int6rieur de fromages de Camembert

Manuscr i t re~u le 9 aoflt 1982, accept6 le 27 janvier 1983.

400 J . L . SCHMIDT ET J. J. DAUD1N

pr6par6s ~ partir de lait cru, a 6t~ r6cemment effectu6e sur des fabri- cations industrielles de la r~gion d'Isigny-sur-Mer et du Pays d 'Auge choisies sur la base de la qualit6 et de la r6gularit6 de leur produc- tion [15, 17].

I1 a 6t6 constat6 que les levures sont pr6sentes en surface, au nombre de 4 x 10 ~ ~ 2 x 10s/g de pate, au d6but de l'affinage ; elles se d~velop- pent jusqu 'aux environs du 18 e jour et, ~ ce stade, leur nombre oscille entre 5 x 10 ~ et 3 x 10 9. Par la suite, ce peuplement diminue plus ou moins rapidement et il at teint , en fin de maturat ion, un niveau variable selon les fabrications.

An sein de cette population, certaines esp~ces sont dominantes ; ce sont celles qui ont 6t6 les plus f r6quemment rencontr6es sur d 'autres types de pates fromag~res : Le Roquefort [8], le Saint-Nectaire [7, 19], le Saint-Paulin [9], le Cantal [12]. Les levures du Camembert paraissent ainsi etre constitu6es r d 'une flore de fond ,~ form6e d'esp6ces du genre Kluyveromyces et de leurs formes anascosporog~nes. A c6t6 de cette flore non toujours dominante, il apparait des ,( touches particuli6res ,) appor- t6es par l ' importance relative du groupe Debaryomyces-Saccharomyces et, parfois, par la pr6sence d 'une ou plusieurs autres esp~ees [17].

Disposant d 'une collection de quelque 482 souehes, isol6es d 'un type de fromage et identifi~es selon les proc~d6s classiques [11, 1, 2] en 11 esp6ces, il nous a paru utile d 'en contr61er l'homog6n6it6 par une analyse de leurs r6ponses ~ un certain nombre de tests de fermentat ion et d'assimilation des hydrates de carbone. Ainsi il devrait ~tre, en particu- lier, possible de v6rifier si les souches d 'une m6me esp$ce ont des r6ponses similaires permet tan t de les classer sans ambiguit6 et si les diff6rentes esp~ces ont des eoinportements proches ou, au contraire, bien contrast6s. Par ailleurs, eette analyse devrait permettre d'6tablir quelles sont les 6preuves qui discriminent le mieux les diff~rentes esp6ces.

Dans un premier temps, nous avons 6tudi6 nos diff6rentes esp~ces par analyse factorielle discriminante qui est l 'outil statistique adapt6 ~ notre objectif et ~ la nature des donn6es dont nous disposions. Cette m6thode permet, en effet, d 'analyser des groupes (les esp6ces) d ' individus (les sou- ches) et d'en d6crire les proximit6s par une repr6sentation graphique dans un rep6re adapt6. Elle permet 6galement de hi6rarchiser les variables (les r6ponses des 6preuves d'assimilation et de fermentat ion des sucres) selon leur pouvoir discriminant. Enfin, elle permet de proc6der ~ des tests statistiques por tant sur l 'existence de diff6rences entre les esp~ces selon les 6preuves d'assimilation et de fermentat ion consid6r6es.

Cette approehe, qui est 6galement celle aff6rente aux 6tudes de taxo- nomic num~rique, a d6j~ 6t6 appliqu6e ~ des collections de levures. A t i tre d'exemples, on peut citer les analyses r6alis6es sur les genres Kluyveromyces [13, 3], Pichia [14], Saccharomyces [4, 5], Debaryomyces et Pichia [4], Candida et Torulopsis [6]. Mais, darts la plupart des cas, le

F ~ v a l e u r F du t e s t de F i s c h e r .

P O P U L A T I O N DE LEVURES ISOLI~ES DE FROMAGES 401

t r a i t e m e n t m a t h ~ m a t i q u e a por t~ sur des souches de col lect ion ou des souches isol~es fi p a r t i r de diff~rents subs t r a t s , donc sur des ensembles qui ne c o r r e s p o n d e n t pas fi un b io tope donn6, c o m m e dans le cas pr6sent .

M A T t ~ R I E L E T M t ~ T H O D E S

1) Prdsenlalion des variables et des espdces analysdes.

Le nombre d'esp6ces est de 11, ce hombre correspondant aux esp6ces de levures le plus frdquemment rencontrdes darts les fromages de Camembert.

Les effectifs de chaque esp6ce figurent dans le tableau I. Les 482 souches ont 6t6 soumises aux tests de fermentation des sucres sui-

vants : glucose, galactose, saccharose, lactose, maltose, raffinose et tr6halose. Elles ont 6galement dt6 soumises aux tests d'assimilation de diffdrentes sources de carbone : glucose, galactose, saccharose, lactose, maltose, cellobiose, trdhalose, raffinose, m616zitose, drythritol, arabinose, m61ibiose, mannitol, xylose, inuline et rhamnose. Les rdponses enregistrdes pour le test d'assimilation du nitrate de potassium, malgr6 l 'inoculation d 'un deuxi~me et m~me d'un troisi6me tube de fa$on r6aliser une purge h part ir du premier, ont 6td dlimindes car jug6es trop souvent douteuses.

Au total, il y a donc 23 caract~res selon lesquels peuvent se diffdrencier les 11 esp6ces consid6rdes.

Sur les 482 souches identifides selon les crit6res morphologiques, culturaux, biochimiques et physiologiques classiques, 326 ont 6t6 soumises ~ l 'ensemble des tests pr6citds et ont dtd finalement retenues pour le t rai tement mathdmatique.

Les r6ponses aux diffdrents tests ont 6t6 coddes de la fa~on suivante :

- - caract6re net tement n6gatif -- note 1 ; - - caract6re ndgatif = note 2 ; - - e a r a c t 6 r e variable (selon la description de Barnet t et Pankhurst [1])-=

note 3 ; - - caract6re positif = note 4; - - caract6re net tement positif = note 5.

2) Prdsenlalion succincle de l'analyse discriminante.

La prdcision relative des calculs adopt6e pour les diff6rents trai tements lors de la raise en oeuvre de l 'analyse est de 0 , 1 % .

L'analyse discriminante est trait~e darts les manuels de statistique (( multi- variate )). On pourra se reporter h l 'onvrage de Lachenbruch [10] pour un expos6 ddtaill6 de la m6thode.

L'analyse discriminante permet de savoir quelles sont les esp6ces le mieux sdpardes et quelles sont celles qui sont peu diffdrenci@s par les tests d'assimi- lation et de fermentation. Cette information est donnde par les distances de Mahalanobis entre les groupes. On peut tester la signification statistique de chaque distance ~ l 'aide du T, de Hotelling et repr6senter les groupes sur un graphique.

Un procdd~ de sdlection ascendante, pas ~ pas, des variables discriminantes selon le crit6re du test de Fischer (F) a permis de sdlectionner 17 tests d'assi- milation et de fermentation, par ordre ddcroissant de pouvoir discriminant. Cer- taines variables, poss6dant isol6ment un pouvoir discriminant, peuvent se rdv61er inutiles car redondantes avec d 'autres variables ddjh introduites dans la discrimi- nation. Elles sont alors 61imin6es de l 'analyse.

Le programme utilis~ est le BMDP7M de la sdrie (( Biomedical computers programs )), version 1975, de l 'Universitd de Californie (USA).

Ann. Microbiol. (Inst. Pasteur), 134 A, n ~ 3 , 1 9 8 3 . 2 7

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I

J. L. SCHMIDT ET J. J. D A U D I N

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POPULATION DE LEVURES ISOLI~ES DE FROMAGES 403

RI~SULTATS

1) Variables introduites dans la discriminante : interprdtation des axes.

Le tableau II donne la liste des 17 variables retenues dans la dis- crimination ainsi que l'ordre de leur entr6e (tableau II, premiere colonne).

TABLEAU II. - - Importance des tests utilis6s pour la discrimination.

I II I I I

F e r m e n t a t i o n du lactose 639,91 639,91 13 F e rmen t a t i on du saccharose 55,95 109,55 5,7 Ass imi la t ion du m~l~zitose 23,68 31,16 9,3 Ass imi la t ion du xylose 21,83 39,58 26 Ass imi la t ion de l ' a rabinose 19,60 24,19 6 Ass imi la t ion du mal tose 9,97 22,71 100 Ass imi la t ion du mann i t o l 8,87 50,79 27 Ass imi la t ion du saccharose 8,61 61,27 36 Ass imi la t ion du raffinose 8,14 33,15 27 F e r m e n t a t i o n du mal tose 6,49 65,03 8,1 Ass imi la t ion du cellobiose 6,18 37,93 76 Ass imi la t ion de l ' inul ine 5,80 20,13 6,1 Ass imi la t ion du lactose 5,24 187,01 37 F e r m e n t a t i o n du raflinose 4,94 47,67 6,4 Ass imi la t ion de l '~rythr i to l 4,74 4,17 64 Ass imi la t ion du m~libiose 4,62 4,01 32 Ass imi la t ion du t r6halose 4,41 17,12 5,2 F e r m e n t a t i o n du tr~halose < 4 19,17 < 0,01 Ass imi la t ion du r h a m n o s e < 4 5,31 4 Ass imi la t ion du glucose < 4 3,45 0 F e r m e n t a t i o n du galactose < 4 2,64 1,7 Ass imi la t ion du galactose < 4 2,56 18 F e r m e n t a t i o n du glucose < 4 0,97 45

I : Valeur du F d 'en t r~e de la var iable dans la d i sc r imina t ion c o m p t e t enu des var iables d~jh incluses.

II : F de l ' ana lyse de var iance univar iab le h 10 et 315 degr~s de libertd.

I I I : T a u x d 'ut i l i t~ du tes t calculd en p r e n a n t i 'assi~0ilation du mal tose c o m m e r~f~rence (ba se=100 ) selon Ba rne t t et P a ~ k h u r s t [1], p. 19 et 20.

On remarque que cinq tests ont un pouvoir discriminant tr~s important; il s'agit des tests d'assimilation de l'arabinose, du xylosc, du m61~zitose, et des tests de fermentation du saccharose et surtout du lactose, les autres variables jouant un r61e relativement mineur. Ces r~sultats sont fi comparer aux valeurs F de l'analyse de variance univariable qui sont donn6s daBs la deuxi~me colonne du tableau I1. I1 faut noter, en parti- culier, que les tests d'assimilation du lactose et de fermentation du sac- charose qui ont des F ~lev~s en deuxi~me colonne ont des F plus faibles en premiere colonne, ce qui correspond au fair que leur pouvoir discri- minant est tr~s lid au test fermentation du lactose et qu'une lois ce dernier introduit dans la discriminante le test d'assimilation du lactose n'apporte aucune information suppl~mentairc ; cela correspond dgalement

404 J. L. SCHMIDT ET J. J. DAUDIN

au fair que l ' information apport~e par le tes t de fermentat ion du saccha- rose est re lat ivement faible, m~me si elle est non n6gligeable. Par contre, les tests d'assimilation du xylose et du m61~zitose ont visiblement des pouvoirs discriminants distincts du test de fermentat ion du lactose et appor tent une information suppl6mentaire int~ressante.

Nous avons choisi d'~liminer de l 'analyse les variables poss~dant un F d'entr6e inf~rieur h 4; seule les 17 premieres variables sont donc uti- lis~es dans la suite de l 'analyse discriminante.

Es t 6galement mentionn~e, dans le tableau II, dans la troisi~me colonne, la note de validit~ des tests donn6e par Barne t t et Pankhurs t [1].

Les trois combinaisons lin6aires des 17 variables introduites, qui sont les plus discriminantes, sont indiqu6es dans le tableau III. I1 eonvient de remarquer que le premier axe oppose les esp~ces ayant des valeurs 61ev~es aux tests de fermentat ion et d'assimilati0n du lactose et du saccharose aux esp~ces ayant des valeurs faibles concernant ees tests.

TABLEAU III. - - Coefficients des trois premieres fonctions discriminantes.

F o n c t i o n d i s e r i m i n a n t e

V a r i a b l e s 1 2 3

F e r m e n t a t i o n d u s a c e h a r o s e 0 , 1 7 0 , 5 8 - 0 , 5 7 ,, d u l a c t o s e 1 , 8 4 -- 0 , 9 6 -- 0 , 1 2 ,~ d u r a f f m o s e 0 , 1 3 0 , 1 2 -- 0 , 3 4 , d u m a l t o s e - - 0 , 2 1 -- 0 , 3 0 -- 0 , 5 0

A s s i m i l a t i o n d u s a c c h a r o s e 0 , 2 2 0 , 3 2 0 , 1 1 ~, d u l a c t o s e 0 , 4 5 -- 0 , 2 6 0 , 1 5 , d u m a l t o s e - - 0 , 2 0 -- 0 , 0 6 0 , 2 2 ,, d u c e l l o b i o s e -- 0 , 0 9 0 , 2 6 0 ,21 ,) d u t r 6 h a l o s e 0 0 ,11 -- 0 , 0 3 ~, d u r a f f m o s e 0 , 1 0 0 , 1 3 - - 0 , 4 4 ,, d u m 6 1 d z i t o s e 0 , 0 5 0 , 2 9 0 , 2 7 ~) d e l ' 6 r y t h r i t o l - - 0 , 2 0 -- 0 , 4 6 0 , 3 2 ), d e l ' a r a b i n o s e 0 , 0 2 0 , 1 4 - 0 , 0 3 ~) d u m 6 1 i h i o s e - 0 , 1 8 0 , 1 0 0 , 2 4 , d u m a r m i t o l 0 , 1 9 0 , 1 4 0 , 2 9 ,) d u x y l o s e 0 , 2 3 0 , 1 6 0 ,21 ,~ d e l ' i n u l l n e -- 0 ,01 -- 0 , 2 5 0 , 1 5

Le deuxi~me axe reflbte une opposition assimilation du laetose, fer- menta t ion du lactose/assimilation du saccharose, fermentat ion du saeeha- rose, et le troisibme axe reflbte une opposition entre fermentat ion et assimilation des sucres.

Dans les trois axes succinetement d6erits ci-dessus, les espbces se t rouven t ne t tement s6par~es (fig. 1) no tamment sur le premier axe.

2) Distance entre les esp~ces.

Les distances de Mahalanobis entre esp~ces figurent dans le tableau I. Les diff6rences significatives sont not6es aux seuils de 1 et 5 %. Ces

POPULATION DE LEVURES ISOLt~ES DE FROMAGES 405

differences apparaissent plus ou moins importantes selon les esp~ces ou les genres (fig. 1).

AXE 2

SI Is 8]

r I ~ T M [ t O ] / / ' / l Z I~ Le.. ] / /

- _ . --j~t /

L _ _ , ' _ ' - k ' _ _ _ _ ,_ '_ " _ L. . . . . . . . . . . . . . , "

AXE 3

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, 2@'] ~L.L~J J

.KBC~ a,c,~T , /~b~ ~ L ,-J I.- AXE1

Fro. 1. - - ReprEsentation graphique des distances entre les esp~ces.

Ent re c roche ts : hombre de souches de chaque esp~ce analys~es.

Ainsi elles sont nulles entre, par exemple, K. lactis et T. sphaerica, tr+s faibles entre K. bulgaricus et K. marxianus, moyennes entre D. han- senii et S. cerevisiae d'une part, et S. cerevisiae et S. ilalicus d'autre part. En revanche, les distances enregistr6es s'av~rent importantes entre, par exemple, K. laclis et D. hansenii ou S. cerevisiae.

3) Validitd de la mdlhode convenlionnelle de classement des souches ou espdces.

L'analyse discriminante permet de r~affecter les souches a posteriori, en tenant compte de la position de celles-ci vis-a-vis des centres de gravit6 des esp~ces. Cette classification n'est pas n6cessairement meilleure que celle utilis6e originellement. Mais lorsqu'il n 'y a pas concordance entre les deux, cela signifie qu'il existe un risque de confusion entre deux esp~ces d6finies par la m6thode classique. Par exemple, certaines souches appartenant ~ une esp~ce donn~e A (au sens de Barnett et Pankhurst) sont plus proches du centre de gravit~ d'une autre esp~ce B que de celui de l'esp~ce A. L'analyse discriminante classe ces souches dans l'esp~ce B. Le tableau IV dresse la liste des groupements obtenus par l'analyse discriminante pour chacune des esp~ces d~finies selon la m~thode conventionnelle.

406 J. L. SCHMIDT ET J. J. DAUDIN

TABLEAU IV. - - Table de classement des souches.

1 2 1 2

- - K . lactis : 29 K . lactis - - S. cerevisiae : 23 S. cerevisiae (35 souches) 6 K . m a r x i a n u s (24 souches) 1 non identifiable

- - K . m a r x i a n u s : 34 K . r ear , Janus - - S. i tal icus : 47 S. i lal icus (36 souches) 2 K . lac t~ (58 souchcs) 7 Z. roux i i

4 non identif iables

- - T. sphaer ica : 65 T. sphaer ica - - Z. roux i i : 7 Z. roux i i (74 souches) 6 K . m a r x i a n u s (8 souches) 1 S. i lalicus

1 D. hansen i i 2 K . bulgaricus - T. mogi i 9 T. mogi i

(10 souches) 1 S. i lalicus

- - C. pseudolropical is : 16 C. pseudolropicalis (20 souches) 4 K . bulgaricus

- - K . bulgaricus 11 K . bulgaricus (13 souches) 1 T. sphaerica

1 S. cerevisiae

- - D. hansen i i : 31 D. hansenii (39 souches) 4 S. cerevisae

4 Z. roux i i

- - T. versatilis : 2 T. versatilis (9 souches) 2 S. cerevisiae

4 S. i tal icus 1 K . lactis

1 : Identif ication convent ie l le condui te selon les descriptions des esp6ces-types (d'apr~s Barnet t et Pankhurs t ) [1].

2 : Rec lassement obtenu par l 'analyse d iscr iminante (chaque souche est affectde au groupe dont elle est le plus proche du centre de gravit6).

DISCUSSION

Les resultats de cette analyse nous ont permis de donner une descrip- tion precise du comportement des especes, de mettre en evidence le fair que les tests les plus importants pour l'identification de la flore des levures du Camembert ne sont pas ceux releves par Barnett et Pankhurst [1] et enfin de discuter de la validite de l'identification permettant de cons- tituer les especes : en effet, les epreuves d'assimilation et de fermen- tat ion employees darts notre experience ne permettent pas de distinguer certaines esp~ces entre elles.

Les ensembles analyses sont relativement homogenes; aussi a-t-il ete possible de calculer leurs barycentres et de determiner les distances entre les especes etudies (tableau I) ainsi que de les positionner clans un espace /~ trois dimensions (fig. 1). I1 faut noter que cette representation est excellente car elle porte 91,9 % de l'information, le premier axe en representant 8 1 % ~ lui seul.

Dans le tableau II off figure l' importance des tests utilises pour la discrimination, une comparaison a ete effectuee avec les valeurs men- tionnees par Barnett et Pankhurst [1] sur l'ensemble des especes alors decrites. Une certaine distorsion se revile, mais celle-ci n'est gu~re eton-

POPULATION DE LEVURES ISOLt~ES DE FROMAGES 407

nante; en effet, lorsque ces auteurs ont 6tabli la validit6 des differents tests d'assimilation ou de fermentat ion usuellement employes en taxo- nomie, ils se sont bases sur les reponses enregistrees pour toutes les souches types decrites comme elements de reference et provenant de sources variees.

A t i t re d'exemple, on peut noter que sur notre population de levures le test de fermentat ion du lactose vient, selon le classement, en tete, avec une valeur de F d'environ 640, alors que la validite de ce test n'est que moyenne pour l 'ensemble des esp~ces de levures. Inversement, l 'epreuve de la fermentation du glucose, non discriminante pour les levures d'origine fromag~re (F = 0,97), s'av~re particuli~rement interessante pour la distinction des esp~ces relevant de collections tr~s diversifiees.

Darts le tableau IV on peut constater, par exemple, qu'il existe une certaine confusion entre K. lactis et K. marxianus. Or, depuis la derni~re classification propos@ par Barnet t et coll. [2], il n'existe plus de tests permet tan t de faire le diagnostic entre ces deux esp~ces ni celui de K. bulgaricus.

En ce qui concerne T. sphaerica, il faut rappeler qu'il s'agit de la forme anascosporog~ne de K. lactis. Comme le caract~re presence ou absence de spores n'a pas ete pris en consideration darts l 'analyse dis- criminante, il est normal que les deux esp~ces ne soient pas differenciees.

Ce tableau IV a et6 realise /~ partir des resultats enregistres par Barnet t et Pankhurs t en 1974. Le m~me t ra i tement mathemat ique a et6 effectue ~ partir de la nouvelle grille de Barnet t et coll. [2]. Seules quel- ques differences mineures apparaissent malgre le fait que certaines reponses soient codees dif feremment; par exemple, chez l'esp~ce-type K. laclis, la note concernant l'assimilation du lactose passe de 5 ~ 3, alors que celle concernant l'assimilation du L-arabinose passe de 1 ~ 3.

Le cas particulier de T. versatilis parait lie au fair que le test d'assi- milation du nitrate de potassium n'a pas ete retenu lots de l 'analyse puisqu'il n'a pas ete applique ~ l 'ensemble des souches et que la validite des reponses obtenues est apparue souvent douteuse.

Par ailleurs, il est interessant de souligner le rapprochement s'effec- tuant sur cette base avec celui que nous avions precedemment fait lots d 'une etude preliminaire des aptitudes biochimiques de ces souches [16, 181. En effet, nous avions mis en evidence une analogie certaine entre les profils enzymatiques de D. hansenii, S. cerevisiae et S. italicus ; cette analogie concretise le fair que les trois especes peuvent essentiellement ~tre distinguees sur la base d 'un examen en microscopie electronique, les spores etant spheriques et verruqueuses chez D. hansenii, lisses chez S. cerevisiae et S. italicus.

Ces deux derni~res esp~ces ne presentent, par ailleurs, que des diffe- rences mineures au niveau de leur potentiel d'assimilation des glucides. En fait, les classifications actuelles assimilent les deux esp~ces en les incorporant dans le groupe S. cerevisiae [21. L 'e tude statistique confirme ainsi la parente de trois esp@es raise en evidence lots de l 'etude de leur equipement enzymatique.

408 J. L. SCHMIDT ET J. J. DAUDIN

Une m~me parent6 s 'applique aux trois esp~ces du genre Kluyvero- myces et fi leurs formes anascosporog~nes, rant au plan du profit bio- chimique qu'h celui de l'homog6n~it6 des populations.

Finalement, il apparai t clairement que les levures du fromage de Camembert appart iennent h deux grands groupes distincts : d 'une part, le groupe Kluyveromyces y compris les formes anascosporog~nes; de l 'autre, l 'ensemble Saccharomyces-Debaryomyces.

RESUME

Les levures sont rencontr~es en nombre impor tant dans les fromages, no tamment ceux h pate molle de type Camembert . Un t ra i tement math6- mat ique par analyse factorielle discriminante a vis~, sur 326 souches de levures pr~alablement identifi6es selon les m6thodes classiques, ~ analyser les proximit6s entre esp~ces. I1 est apparn que la plupar t des esp~ces 6taLent ne t tement diff6renci~es par les 23 tests de fermentat ion et d'assi- milation d 'hydra tes de carbone utilis6s. Ce t ra i tement a permis 6galement de confirmer les tendances actuelles observ6es dans la classification des levures avec le regroupement de certaines esp~ces.

MOTS-CLI~S : Levure, Fromage ; Glucides, Esp~ces, Analyse factorielle discriminante.

BIBLIOGRAPHIE

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