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Correction du bac blanc : poésie et rencontre amoureuse I - Plan du commentaire de Baudelaire Paratexte : - Poète précurseur, influencé par le romantisme et père du symbolisme et de la poésie moderne (prose). - Poète « torturé » (spleen et idéal). - Œuvre condamnée pour atteinte à la morale : thèmes sensuels, morbides... - Titre du recueil (métaphore et oxymore) / section ajoutée « Tableaux parisiens » : modernité des scènes (milieu urbain). - Titre du poème : hommage ; rencontre fugitive ; femme inconnue (mystère ?). Problématiques : Quel effet produit la rencontre amoureuse sur le poète ? / En quoi cette rencontre amoureuse est-elle violente et douloureuse ? I – Le récit d’une rencontre amoureuse : Les étapes sont indiquées : - Le cadre : « la rue assourdissante, hurlait» : termes violents, personnification du lieu (lieu peu propice, cadre « anti-romantique »). - L’apparition progressive : silhouette (« longue, mince ») ; les détails main, œil »). - La réaction fascinée du poète : « Moi, je buvais ... ». - La disparition brutale : « un éclair ... puis la nuit ». La « mise en scène » et l’art du récit : - Les temps : passé simple / imparfait (mouvement de la femme / immobilité du poète : une femme passa / moi je buvais »). - Le rythme qui suit la marche de la passante : balancement de la marche 1 er tercet (V2 s’allonge) + enjambement/rejet V3-4 + les sonorités en S (froissement, glissement de la robe). Le blason de la femme : description physique élogieuse - Finesse du corps : « longue, mince, jambe de statue (métaphore élogieuse)» : beauté rare, sorte de divinisation. - Agilité, souplesse : « balançant, agile ». - Noblesse, élégance : « majestueuse, fastueuse, noble » + vêtements riches « grand deuil, feston ». - Sonorités agréables en S et douceur du rythme + rythme majeur V2. Le poète amoureux : - La transcription du « coup de foudre » : métaphore « éclair » + suspension + exclamation (V9) + termes indiquant le sentiment amoureux « plaisir, aimé ». - Invocation pour rendre hommage : « O toi » (en anaphore) + tutoiement (rapprochement, intimité).

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Correction du bac blanc : poésie et rencontre amoureuse

I - Plan du commentaire de BaudelaireParatexte :

- Poète précurseur, influencé par le romantisme et père du symbolisme et de la poésie moderne (prose).- Poète « torturé » (spleen et idéal).- Œuvre condamnée pour atteinte à la morale : thèmes sensuels, morbides...- Titre du recueil (métaphore et oxymore) / section ajoutée « Tableaux parisiens » : modernité des scènes

(milieu urbain).- Titre du poème : hommage ; rencontre fugitive ; femme inconnue (mystère ?).

Problématiques : Quel effet produit la rencontre amoureuse sur le poète ? / En quoi cette rencontre amoureuse est-elle violente et douloureuse ?

I – Le récit d’une rencontre amoureuse   : Les étapes sont indiquées :

- Le cadre : « la rue assourdissante, hurlait» : termes violents, personnification du lieu (lieu peu propice, cadre « anti-romantique »).

- L’apparition progressive : silhouette (« longue, mince ») ; les détails (« main, œil »). - La réaction fascinée du poète : « Moi, je buvais ... ».- La disparition brutale : « un éclair ... puis la nuit ».

La « mise en scène » et l’art du récit :- Les temps : passé simple / imparfait (mouvement de la femme / immobilité du poète : une femme passa / moi

je buvais »).- Le rythme qui suit la marche de la passante : balancement de la marche 1er tercet (V2 s’allonge) +

enjambement/rejet V3-4 + les sonorités en S (froissement, glissement de la robe).Le blason de la femme : description physique élogieuse 

- Finesse du corps : « longue, mince, jambe de statue (métaphore élogieuse)» : beauté rare, sorte de divinisation.- Agilité, souplesse : « balançant, agile ».- Noblesse, élégance : « majestueuse, fastueuse, noble » + vêtements riches « grand deuil, feston ».- Sonorités agréables en S et douceur du rythme + rythme majeur V2.

Le poète amoureux :- La transcription du « coup de foudre » : métaphore « éclair » + suspension + exclamation (V9) + termes

indiquant le sentiment amoureux « plaisir, aimé ».- Invocation pour rendre hommage : « O toi » (en anaphore) + tutoiement (rapprochement, intimité).- La violence de l’émotion : comparaison « crispé comme un extravagant » (attitude grotesque + allitération

désagréable en [K]).- L’aspect vital de cette rencontre : «je buvais, m’a fait renaître ».

Ce poème décrit de façon précise la rencontre et le coup de foudre ; il rend hommage à cette femme inconnue qui a provoqué ce sentiment en lui.

Mais la rencontre s’accompagne de la douleur liée à l’amour impossible.

II – Les réactions du poète   ; un amour impossible   : L’angoisse du poète :

- Question rhétorique pour interroger le futur : « Ne te verrai-je plus ? ».- Rythme saccadé (V 12) + gradation « ailleurs, loin, trop tard » + italique « jamais » + exclamations répétitives

et plaintives (dernier tercet).- Le lieu violent et oppressant : personnification « rue hurlait » + enfermement « autour de moi » + sonorités

brutales (allitération en [R]).

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La rencontre éphémère et donc sans lendemain, sans espoir :- Termes indiquant la brièveté de ce face à face : titre « une passante » + « passa, un éclair, fugitive beauté, soudainement, tu fuis » + antithèse : « un éclair # puis la nuit » (avant # après la rencontre ; le néant suit cette rencontre).- Notion d’incertitude, ils ne savent rien l’un de l’autre : « j’ignore, tu ne sais » (hémistiches). La femme inaccessible, voire dangereuse :

- La femme tentatrice et cruelle : « balançant le feston » (elle le séduit) ; « toi qui le savais » (elle joue avec lui) + « son oeil, ciel livide ... ouragan » métaphore annonçant les problèmes).

- L’amour source de vie mais aussi de mort : « je buvais, renaître # ouragan, tue » + antithèse : « douceur qui fascine et plaisir qui tue » (ambiguïté de la relation amoureuse).

- Le bonheur impossible, un couple improbable : V 12 (gradation) ; V 13 (chiasme à l’hémistiche : « je-tu # tu-je » (rencontre et séparation) ; « j’eusse aimé » (subjonctif donc irréel du passé).

Le poème décrit de façon originale une rencontre amoureuse éphémère, dans un monde moderne et qui semble froid. L’amour est voué à l’échec et conduit à la douleur.

Ouverture : autres poèmes du corpus.

II - Plan de la dissertation

Sujet : Voyez-vous dans la poésie un simple jeu de langage ou considérez-vous qu’elle permet d’approcher la vérité ?

La poésie est un genre difficile à définir, tant ses formes et ses sujets sont variés. Elle est caractérisée par un travail sur le langage, et souvent considérée comme un art noble, presque « sacré », qui a pour mission de sublimer tout ce dont il parle. Une question se pose alors : est-elle avant tout un jeu avec le langage, ou permet-elle d’approcher la vérité ? Nous allons voir qu’elle entretient en effet un rapport particulier et parfois ludique avec la langue, mais qu’elle porte aussi un regard vrai sur le monde.

Tout d’abord, la poésie peut ne paraître que jeu, tant elle aime moduler le langage. En effet, si l’on observe d’abord sa forme, nous remarquons que le genre poétique ne se présente pas comme les autres genres de l’écrit car il a une disposition particulière sur la page, avec les strophes et les vers. La poésie a toujours joué de cela et s’est inventé des codes, comme le sonnet, apparu au XVIème siècle et beaucoup utilisé par les écrivains de La Pléiade, mais repris également par Rimbaud par exemple, dans ses poèmes les plus célèbres, comme « Ma Bohème » ou « Le dormeur du val ». Les poètes ont ensuite joué à varier les formes, Baudelaire innovant avec la prose et les poètes du XXème inventant le vers libre, à l’image de Vian ou de Réda. Un poète comme Apollinaire a également popularisé le calligramme, s’amusant à écrire sous forme de dessin, comme on peut le voir dans « La colombe poignardée ». Ces différentes formes d’écriture prouvent que la poésie s’attache à briser les codes de l’écrit. Par ailleurs, le lexique poétique est toujours riche et l’on voit que les poètes explorent toutes ses capacités. Rimbaud en est un bon exemple, lui qui n’hésite pas à mélanger le langage familier avec le langage plus soutenu, comme dans « Au cabaret-Vert » où il parle de « tétons » mais aussi de « rayon de soleil arriéré », ou « Ma Bohème » qui mélange la « culotte » et la « Muse ». Il invente des mots également, avec « robinsonne » dans « Roman », sans parler des images assez étranges du poème « Le bateau ivre ». Les poètes aiment détourner la langue, proposer des associations sémantiques nouvelles, comme les surréalistes qui ont proposé une vision originale du monde, à l’image d’Eluard qui dit « La terre est bleue comme une orange ».

Egalement, le langage poétique se joue des rythmes, des sons, de toute la musique de la langue. Pour évoquer la mélancolie ou la tristesse amoureuse, Verlaine ou Apollinaire proposent des poèmes lents, avec beaucoup d’enjambements qui traduisent cette sensation de mal-être, comme « Il pleure dans mon cœur / comme il pleut sur la ville ... » ou encore « Sous le pont Mirabeau coule la Seine / Et nos amours ... ». Les effets d’anaphores employés par Du Bellay dans son poème « Si c’est aimer, Madame », qui répète sans cesse cette question à la femme

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qui le fuit, provoquent aussi un rythme lancinant. Tout poème joue avec la musique de la langue pour faire passer ses messages.

Enfin, certains vont jusqu’à proposer des poèmes complètement ludiques, des sortes d’expérimentations ayant pour seul but de se divertir. Rimbaud l’a fait avec ses amis dans les poèmes zutiques, proposant des textes écrits à plusieurs, avec seulement un mot par vers, et une volonté de futilité ou de provocation. Les surréalistes ont également expérimenté les « cadavres-exquis », poèmes rédigés en écrivant chacun un vers et cachant celui des autres. Les poètes de l’Oulipo ont inventé des jeux à contraintes, comme le lipogramme, à l’exemple de Perec réécrivant le poème « Recueillement » de Baudelaire sans la lettre E. Nous le voyons ici, les poètes aiment les associations et prennent le langage comme un outil magique, avec lequel on peut tout faire.

Le genre poétique entretient donc un rapport particulier avec le langage, qu’on pourrait parfois penser « gratuit ». Mais tout ceci est souvent au service d’un regard sur le monde et sa « vérité ».

La poésie peut effectivement nous parler de nous et de notre monde, nous rapprocher d’une certaine réalité. En effet, la poésie lyrique, la plus ancienne forme poétique, évoque les sentiments humains, explore la psychologie de l’homme et ses expériences, sa vie. Tout le monde peut s’y reconnaître, s’identifier au poète car elle représente alors nos émotions et ce qu’elles ont d’universel. En cela, elle explore la vérité du cœur humain. Certains poètes parlent de moments traumatisants de leur vie, comme la perte d’un être cher. Hugo consacre un poème à sa fille, « Demain dès l’aube ». L’amour, sentiment humain s’il en est, est aussi très présent et les poètes évoquent la rencontre amoureuse, comme Rimbaud dans « Roman » ou « A la musique », racontant les premières tentatives de séduction d’un jeune homme à la fois maladroit et hardi ; d’autres, comme Louise Labé, dépeignent les tourments et plaisirs de la passion qui tour à tour lui provoquent « chaud et froidure, ennui et joie ». C’est la condition humaine qui est ici représentée dans sa profondeur et sa vérité.

Par ailleurs, la poésie s’engage aussi dans des combats politiques ou sociaux, ce qui l’amène à prendre ses sujets dans l’actualité du poète ou dans l’histoire. Son but est alors de faire réfléchir, d’ouvrir les yeux et les consciences sur la dure réalité, en espérant un avenir meilleur. Elle ne cache rien des vérités du monde et essaie de nous les montrer. Au XIXème, Hugo, Baudelaire ou Rimbaud ont écrit pour défendre la cause des enfants : le premier dénonçant leur exploitation au travail dans « Mélancholia », le second décrivant la différence des classes sociales dans « Le joujou du pauvre », et le dernier faisant le tableau pathétique des orphelins de la misère, assis dans la neige et le froid, le « museau » collé au grillage du fournil pour se réchauffer dans « Les Effarés ». La guerre qui a ravagé des générations, toutes époques confondues, a aussi été dénoncée avec force par Vian dans son poème « A tous les enfants », qui élève un « monument » aux jeunes hommes tombés au combat pendant que les responsables politiques prennent les décisions et s’enrichissent, « au chaud sous leur bureau ». La poésie est donc le reflet des cruelles réalités du monde.

Enfin, il existe également une poésie qui prend directement son inspiration dans le réel le plus immédiat, qui évoque notre environnement, les gens et les choses qui nous entourent, même les plus simples ou triviales. Cette poésie est vraie car elle est réelle et ne cherche pas uniquement à sublimer ni embellir les choses. Rimbaud a rédigé des poèmes très réalistes, racontant ses expériences comme un journal de bord ; nous en avons un exemple très parlant dans « Au Cabaret-Vert », poème original qui décrit l’intérieur de la taverne avec des détails précis, comme la couleur « verte » des tables, la cuisson « tiède » du jambon ou encore les « énormes tétons » de la serveuse. D’autres auteurs prennent comme sujet poétique des objets ou aliments, comme Ponge avec « Le Pain » par exemple, ou Réda dans « La bicyclette », et encore le chanteur Bénabar énumérant le contenu d’un « Sac à main ». L’ensemble du monde réel peut donc se retrouver dans la poésie.

Le genre poétique a donc pour particularité d’être capable de jouer avec le langage, d’être parfois fantaisiste et léger, mais aussi d’approcher au plus près ce qui fait la vérité et la réalité du monde, avec ses douleurs, ses cruautés. La poésie partage d’ailleurs cette capacité avec d’autres genres, qu’ils soient littéraires ou picturaux : quand Beaumarchais écrit sa comédie Le mariage de Figaro, il propose une comédie amusante et divertissante, mais il dénonce l’injustice sociale ; quand Picasso peint la guerre d’Espagne dans Guernica, il joue avec les codes de la peinture et invente un « nouveau langage » esthétique, mais il montre aussi l’horreur de la guerre

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III - Sujet d’invention   : le dialogue argumentatif

Lors de la remise d’un prix littéraire, un poète est récompensé pour son recueil lyrique. Alors qu’il célèbre sa nouvelle gloire avec quelques admirateurs, un jeune homme s’approche de lui et l’interpelle.

- Cher maître, car je dois bien vous appeler comme cela, maintenant que vous voilà auréolé de lauriers, je souhaiterais vous exprimer mon désaccord quant à votre conception de la poésie, art puissant que vous résumez au lyrisme.

- Mais faites, jeune homme, je ne demande qu’à vous convaincre !- A vous l’honneur, puisque vous êtes le « héros » de cette journée ...- Soit. Avez-vous oublié que la poésie est un art et, comme tel, se doit de rester absolument

« gratuite » et libre ? L’engagement la ternit, la rabaisse, et comme le dit Gautier, « il n’y a de vraiment beau que ce qui ne peut servir à rien » !

- Je ne partage pas votre point de vue, et ne suis pas le seul. Savez-vous que depuis que les poètes existent, ils s’engagent dans les luttes de leur époque ? Avez-vous lu Victor Hugo et notamment son poème « Melancholia » ? Ne s’indigne-t-il pas contre le travail imposé aux enfants ? « Travail qui produit la richesse en créant la misère » ! Et n’avez-vous pas lu le célèbre sonnet de Rimbaud « Le Dormeur du val », qui en dépeignant un jeune homme apparemment assoupi dans une nature idyllique, nous fait frémir d’effroi à la lecture de sa chute : « Il a deux trous rouges au côté droit » ! Quelle dénonciation frappante de la guerre ! De tout temps, les poètes ont crié contre les injustices !

- Mais ne savez-vous pas qu’un poète est un être marginal, exclu de la société et n’entretenant pas de rapports avec elle. Dans ce cas, pensez-vous qu’il soit le mieux placé pour s’engager dans des luttes qui ne le concernent pas ? Croyez-vous que Baudelaire, dans Les Fleurs du mal, ait attaché de l’importance à son époque, brûlé comme il l’était par sa solitude et son mal être ? Dans L’Albatros, il montre bien qu’il est différent et donc indifférent au monde qui le rejette.

- Vous parlez de Baudelaire, grand poète il est vrai, et témoignant dans son œuvre du pouvoir des mots. C’est pourquoi la poésie a la responsabilité de s’engager car elle en possède toutes les armes grâce à cette force du langage qu’elle déploie au service des idées. Ne voyez-vous pas que le poète choisit le lexique le plus percutant, l’image la plus fulgurante pour que le lecteur soit saisi et transporté ? Comme le dit Celaya, il est un « ouvrier du vers » et sa « technique » doit être mise au service d’une cause juste ! Quand Rimbaud veut dénoncer la violence des armes dans Le Mal, il utilise une personnification particulièrement adaptée ; écoutez cette trouvaille : « Tandis que les crachats rouges de la mitraille »! Seule cette image pouvait restituer au lecteur la barbarie et le mépris de la vie que véhicule toute guerre ! Je pourrais également vous citer les effets sonores, comme les allitérations en « K » de René Char dans « Fragment 128 », qui montrent si bien la violence des nazis à l’égard des plus faibles, bref les conséquences de la guerre ! Je pourrais vous parler des heures de cette arme qu’est la poésie ...

- Mais vous ne pouvez réduire la poésie à son engagement ! Son pouvoir sur les mots est grand, c’est pourquoi il peut exprimer les émotions humaines. Rappelez-vous que l’origine, peut-être même l’essence de la poésie est d’être lyrique ! N’avez-vous pas été touché par ces auteurs qui célèbrent la personne aimée, comme Ronsard dans son sonnet à Hélène, voire Hugo dans ce poème très touchant qu’il a écrit à la mort de sa fille Léopoldine, « Demain, dès l’aube… ». Apollinaire a même utilisé des calligrammes et des acrostiches pour mieux louer son amour de Lou ! C’est cette poésie des émotions, de la nature, de la nostalgie, qui m’a fait aimer la poésie, pas celle qui nous ramène aux horreurs du monde ...

- Je comprends votre point de vue, mais avouez que de grands auteurs ont employé leur art au service des causes justes ! En fait, je dirais que c’est la force de la poésie que de savoir traiter tous les thèmes, des plus esthétiques aux plus triviaux, des plus sublimes aux plus terre à terre. Qu’importe le sujet dont elle s’empare, elle a le don de le sublimer !

- Vous avez parfaitement raison ! Mais allons continuer cette discussion en buvant un café !

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+ Dissertation:La poésie sert-elle uniquement l’expression des sentiments et expériences personnels du poète ?

Introduction   : Le père de la poésie, Orphée, est un personnage mythologique qui a donné son nom à la poésie lyrique et lui a également conféré sa tonalité personnelle et intime. En effet, si l’on ouvre une anthologie poétique, on remarque que les poèmes consacrés à l’amour ont une place prédominante. Ce genre semble donc essentiellement destiné à exprimer les sentiments des poètes, leurs états d’âme, leurs expériences. Mais serait-ce la seule vocation de la poésie ? Peut-on la réduire à la poésie personnelle et autobiographique ? Certes, l’expression des sentiments et la « vie privée » du poète occupent une part importante, mais ce genre peut remplir d’autres fonctions, comme celle de l’engagement ou encore de l’exploration d’autres formes de langages.

I- La poésie est l’instrument privilégié de l’expression des sentiments   et expériences du poète : - Origine de la poésie : le mythe d’Orphée et sa lyre : il enchante avec sa musique et l’expression de son amour

perdu pour sa femme, Eurydice. - Le poète, un être souffrant, tiraillé et ressentant avec intensité les émotions (Baudelaire, « L’Albatros »).- Le lyrisme, registre dominant de la poésie, permettant de parler de l’expérience personnelle en la rendant forte

et touchante (l’expressivité du langage poétique et les thèmes liées aux émotions comme l’amour ; voir corpus sur la poésie amoureuse : Ronsard, Labé, Baudelaire, Apollinaire, ...).

- La variété des thèmes liés aux sentiments dans la poésie : l’amour ; la perte d’un être cher (Hugo, « Demain dès l’aube ») ; la fuite du temps (le thème du Carpe Diem, Ronsard, « Mignonne allons voir si la rose ») ; le spleen (Baudelaire) etc.

- Le caractère autobiographique de beaucoup de poème (Rimbaud et son recueil Poésies évoquant ses fugues, « Ma Bohème », sa ville natale, « A la musique », son enfance et ses relations avec sa mère « Les poètes de sept ans » ...

II- La poésie peut aussi explorer d’autres domaines, d’autres thèmes   : - L’engagement politique (La Fontaine et ses Fables dénonçant la cour de Louis XIV ; Hugo, Les Châtiments

contre Napoléon III ; Rimbaud contre la guerre et l’église dans « Le Mal » ; Vian contre les conséquences de la guerre et les responsables dans « A tous les enfants » ; Senghor contre le colonialisme dans « Perceur de Tam Tam »).

- Engagement social contre les injustices (Hugo et l’exploitation des enfants, Mélancholia ; Rimbaud contre la guerre la misère des enfants, « Les Effarés »).

- La mise en valeur du quotidien, de ce qui nous entoure, des objets simples (Rimbaud, « Le Buffet », Ponge Le parti pris des choses).

- La célébration du monde, dans tous ses aspects (Eluard, « Tout dire »).

III- La poésie comme travail et exploration des ressources du langage, comme activité créatrice   : - La variété et l’invention des formes poétiques (le sonnet, le vers libre, la prose, le calligramme…), la recherche des images, les sonorités etc.

- L’exploration des capacités du langage et du subconscient (Rimbaud voulant se faire  « Voyant » ; les mouvements d’exploration du XX siècle : dadaïsme, surréalisme, Oulipo). - Le poète se considérant comme un « prophète », un guide conduisant les hommes vers un monde plus beau, plus « haut », plus vrai (Hugo, Baudelaire ...).

Conclusion   : Le genre poétique paraît donc le plus apte à exprimer et faire partager les états d’âme du poète. Mais il est riche de bien d’autres thèmes et bien d’autres missions. En fait, quels que soient les sujets que la poésie aborde, c’est plus la façon dont elle aborde ce thème que celui qu’elle choisit qui est signifiant, car la poésie possède la capacité de tout transcender, de rendre les sujets à la fois intimes et universels, et c’est ce qui fait qu’elle nous enchante et nous ouvre les yeux.