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Avant propos - sciences-phy.pagesperso-orange.fr · Avant propos Début de l'été 1994. Les morceaux de la comète Shoemaker-Levy 9, brisée par les forces gravitationnelles de la

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Avant propos

Début de l'été 1994. Les morceaux de la comète Shoemaker-Levy 9, brisée par les forces gravitationnelles de la planète Jupiter, s'apprêtent à chuter vers la planète géante. Tous les observatoires astronomiques dans le monde sont mobilisés pour suivre en direct cet événement exceptionnel. Y compris depuis l'espace, où le télescope spatial Hubble qui a retrouvé une vue corrigée de son miroir principal quelques mois plus tôt, est programmé pour une série d'observations. C'est dans une atmosphère de ruche que j'arrive dans l'équipe planétologie de l'Institut d'astrophysique spatiale d'Orsay pour commencer une thèse de doctorat. Le sujet sur lequel je vais travailler porte sur l'étude des aurores polaires de Jupiter dans l'ultraviolet avec justement les images réalisées par le télescope Hubble. Pour la première fois, on pouvait enfin observer les planètes géantes avec une résolution inégalée et sans être limité dans le temps par le simple survol d'une sonde de passage. Les observations menées au cours de cet été plus quelques autres effectuées deux années plus tard ont permis aux équipes de recherche de renouveler la vision que l'on avait des aurores polaires joviennes, découvertes par les sondes Voyager quinze ans plus tôt. Mon travail m'a amené à m'intéresser naturellement aux autres planètes du Système solaire et la bibliographie spécialisée que j'ai consultée m'a appris que presque toutes présentaient des aurores, même si celles-ci montrent un aspect très différent de celles de la Terre. Car si le mécanisme des aurores est le même sur toutes les planètes, les conditions physiques dans lesquelles elles se produisent peuvent être très différentes d'une planète à l'autre. C'est ce que je vous propose de découvrir dans cet ouvrage où nous allons nous embarquer à bord d'une sonde spatiale imaginaire en partant des feux du Soleil pour survoler les planètes du Système solaire et observer leurs aurores polaires. Ce livre n'aurait pas été réalisable sans le concours de mes collègues de l'Observatoire de Paris-Meudon, Renée Prangé, Philippe Zarka, Laurent Lamy, Baptiste Cecconi et Jean-Matthias Griessmeier par les documents et informations qu'ils m'ont fournis tout au long de notre collaboration. Je n'oublie pas non plus mes collègues de l'Université Joseph Fourier de Grenoble, Jean Lilensten, Mathieu Bathélémy et Cyril Simon pour les photos de leur reconstitution de la « Terrela » de Birkeland et les clichés d'aurores réalisés au Spitzberg. Qu'ils en soient remerciés vivement. Toute ma gratitude également à Marie Auvinet, artiste peintre, pour les illustrations d'aurores d'exoplanètes qu'elle a bien voulu réaliser spécialement pour cet ouvrage.

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1. Petite histoire des aurores polaires

Les aurores polaires constituent probablement l'un des plus impressionnants spectacles du ciel. Ce phénomène lumineux coloré atmosphérique a longtemps suscité la crainte de ses observateurs et les questions des savants de toutes les époques. La rareté relative du phénomène aux latitudes moyennes de l'Europe a fait que les penseurs de l'Antiquité ont peu étudié les aurores polaires. Aristote, suivant en cela la séparation qu'il établit entre le monde sub-lunaire soumis au changement et le monde supra-lunaire siège d'astres parfaits et immortels, pense que les aurores sont un phénomène atmosphérique.L'essor scientifique qui renaît à partir du 17ème siècle voit apparaître le terme d'aurora borealis dû à Galilée. Le savant italien suggère que les aurores sont dues à l'illumination par le Soleil de l'air situé dans l'ombre de la Terre. Pierre Gassendi, en France, indique que les aurores doivent être situées à haute altitude car elles apparaissent au même endroit pour des observateurs situés en des lieux différents. René Descartes pense que les aurores polaires sont produites par la réflexion de la lumière solaire par des cristaux de glace dans la haute atmosphère. L'astronome anglais Edmond Halley, le « découvreur » de la célèbre comète qui porte depuis son nom, montre le lien entre la direction du champ magnétique terrestre et l'observation des aurores autour du pôle Nord.

Figure 1: tableau du peintre François Biard (1798-1882) représentant une vue de Magdalena bay au Nord du Spitzberg. Dans le ciel, se découpe une aurore polaire. Musée du Louvre, Paris. Photo Laurent Pallier.

L'étude systématique du champ magnétique terrestre dès le 17ème siècle montre que celui-ci est soumis à des variations en heure locale et

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en position géographique. Au milieu du 18ème siècle, le suédois Anders Celsius et son assistant Olef Hiorter montrent une corrélation entre l'activité aurorale et les perturbations du champ magnétique. En 1741, le navigateur anglais James Cook rapporte le premier l'observation d'aurores australes lors d'un voyage dans l'hémisphère Sud et son compatriote, Henry Cavendish, estime vers 1790 l'altitude des aurores entre 84 km et 115 km à l'aide d'une mesure par triangulation. Au début du 19ème siècle s'engage l'étude du champ magnétique terrestre à grande échelle sous l'impulsion du mathématicien et physicien allemand Carl F. Gauss à l'aide de magnétomètres répartis sur quelques stations du globe. Parallèlement, un cycle d'une durée d'environ 10 ans est mis en évidence dans l'activité du Soleil liée au nombre de taches observées à sa surface et une corrélation est établie avec les perturbations du champ magnétique terrestre.

Figure 2: Kristian Birkeland devant sa « Terrella », photo de son livre L'expédition norvégienne aurores polaire s1902-1903, sur les causes des orages magnétiques et l'origine du magnétisme terrestre, vol. 1 publié en 1913. Crédit NASA.

En 1878, Henri Becquerel, qui découvrira quelques années plus tard la radioactivité, suggère que le Soleil émet des particules chargées qui sont guidées par le champ magnétique terrestre vers les régions aurorales.Des campagnes d'observation des aurores sont organisées entre 1897 et 1903 par le physicien norvégien Kristian Birkeland. Ses mesures des perturbations du champ magnétique terrestre associées aux aurores lui permettent de conclure à l'existence de courants électriques le long des lignes de champ magnétique, courants qui portent aujourd'hui son nom.

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La fin du 19ème siècle est aussi marquée par de multiples expériences menées avec des tubes cathodiques dans lesquels des faisceaux d'électrons produisaient la luminescence du gaz qu'ils contenaient sous faible pression. Les collisions entre électrons et atomes du gaz conduisent à exciter ces derniers qui émettent une lumière caractéristique de la nature chimique de ces atomes.Birkeland a l'idée d'utiliser cet effet pour simuler expérimentalement les aurores polaires. Son dispositif, qu'il a baptisé « Terrella », consistait en une sphère métallique magnétisée, représentant la Terre, enfermée dans une boîte vitrée partiellement vidée de son air (figure 2). Une cathode placée latéralement éjectait un faisceau d'électrons en direction de la sphère. Les électrons, guidés par les lignes de champ magnétique dipolaire de la sphère, se concentraient aux pôles en produisant des luminescences. Des collègues du laboratoire de planétologie de Grenoble ont reconstitué récemment l'expérience de Birkeland. Leur dispositif, baptisé Planèterrella, comporte en plus de la sphère métallique représentant une planète une autre petite sphère qui simule la présence d'un satellite naturel (figure 3). Ils peuvent reproduire par exemple l'interaction magnétique entre Jupiter et son premier satellite galiléen Io (figures 4 et 5).

Figure 3: La Planèterrella de notre collègue Jean Lilensten du laboratoire de planétologie de Grenoble (LPG CNRS). A gauche, on peut voir le canon à électrons et à droite en arrière plan, la sphère métallique magnétisée modélisant la planète. Les luminescences observées dues à l'air raréfié excité par les électrons forment un ovale autour du pôle magnétique de la sphère. La petite sphère au premier plan simule un satellite de la grande sphère. Crédit Cyril Simon.

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L'invention de la radio au début du 20ème siècle va fournir aux physiciens un outil de sondage de la haute atmosphère terrestre. La transmission d'ondes radio transatlantiques suggère l'existence d'une couche supérieure conductrice de l'atmosphère qui sera baptisée ionosphère. L'utilisation dans les années 1920 de brèves impulsions radio envoyées vers le ciel permet d'ailleurs d'estimer son altitude à une centaine de kilomètres.

Figure 4: Le même dispositif lorsque la petite sphère est elle-même magnétisée. Des luminescences apparaissent à ses pôles. Crédit Cyril Simon.

Figure 5: « L'ovale auroral » autour de la grande sphère vu sous un autre angle. Crédit Cyril Simon.

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Parallèlement, l'utilisation de photographies de spectres des lumières aurorales (obtenus en décomposant ces lumières) permet l'identification des espèces chimiques de l'atmosphère qui en sont responsables.Dans les années 1930 et 1940, l'idée qu'un flux de particules chargées en provenance du Soleil entrant en interaction avec le champ magnétique terrestre s'impose dans les études des britanniques Sidney Chapman, Vincent Ferraro et d'autres. Ces auteurs suggèrent que l'arrivée au niveau de la Terre de « nuages » de ces particules provoquent des perturbations du champ magnétique terrestre. Le champ magnétique terrestre « creuse » une cavité dans le flux de particules lors de son passage autour de notre planète, anticipant sur ce que nous appelons aujourd'hui la magnétosphère. Une autre « preuve » de l'existence de ce flux de particules émises par le Soleil peut être apportée par l'observation de la queue des comètes: celle-ci est toujours orientée dans une direction opposée au Soleil. Ce fait montre que le flux de particules est émis de façon continue par le Soleil dans toutes les directions: on peut donc le nommer vent solaire. En 1951, le suédois Hannes Alfvén suggère que ce « vent solaire » est magnétisé.L'ère de l'espace débute en octobre 1957 avec la mise en orbite du premier satellite artificiel Spoutnik 1 dans le cadre de l'année géophysique internationale. Il a été suivi par le satellite US Explorer 1 en janvier 1958 qui emportait un compteur Geiger. Cet instrument a permis à l'équipe de James Van Allen, de confirmer l'existence d'une ceinture de particules chargées autour de la Terre.

Figure 6: Le satellite US Explorer I lancé en 1958. Crédit NASA.

En janvier 1959, la sonde soviétique Luna 1, en route pour la Lune, détecte pour la première fois le vent solaire.

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Satellites et fusées sondes vont alors se succéder pour étudier l'environnement magnétique terrestre à toutes altitudes et faire progresser considérablement l'étude des aurores. Si l'attention du public a été accaparée par les alunissages spectaculaires d'astronautes US sur notre satellite naturel à la fin des années 1960, il ne faut pas oublier que pendant la même période, des sondes ont été envoyées vers les autres planètes du Système solaire. Mariner 3 et 4 (USA) et Mars (URSS) survolent ou se mettent en orbite autour de la planète rouge dès 1964 et leurs consoeurs Vénéra (URSS) et Mariner 1 et 2 (USA) en font de même pour Vénus. Ces sondes ont montré que nos plus proches voisines ne possédaient pas de champ magnétique significatif et ne peuvent donc pas présenter d'aurores polaires. Jupiter et Saturne ainsi que leurs satellites ont été visités dès 1973 et 1979 par les sondes Pioneer 10 et 11 mesurant sur leur passage les champs magnétiques de ces deux planètes et étudiant les particules chargées qui peuplent leur environnement. Ces investigations seront poursuivies par les sondes Voyager 1 et 2 en 1979 et 1981 qui feront progresser nos connaissances sur ces planètes de façon spectaculaire. Voyager 2 poursuivra son périple vers Uranus, survolée en 1986 et Neptune en 1989 bouclant l'exploration du Système solaire externe hormis Pluton. Ces deux sondes nous ont révélé que les quatre planètes géantes présentaient toutes des aurores dans l'ultraviolet. Depuis, l'environnement magnétique de la Terre est étudié par de nombreux satellites, parmi lesquels on peut citer les quatre Cluster de l'Agence Spatiale Européenne (ESA) et les aurores sont observées depuis l'espace de façon continue avec les satellites Explorer de la NASA. On peut d'ailleurs voir de façon continue sur Internet les images réalisées par ces satellites. Des stations d'observations au sol aux latitudes polaires permettent également d'observer quotidiennement les aurores. La mise en service du télescope spatial Hubble au début des années 1990 marque une nouvelle impulsion pour l'étude des aurores des planètes géantes avec une résolution inégalée à ce jour. Les caméras à bord de Hubble, qui observent dans l'ultraviolet lointain, ont contribué de façon spectaculaire à la compréhension de la physique aurorale de Jupiter et Saturne, en complément des mesures réalisées sur place par les sondes Galileo et Cassini envoyées en orbite autour de ces deux planètes en 1995 et 2004. Dans les chapitres suivants, nous verrons comment se déploie dans l'espace le champ magnétique des planètes, le comportement des particules chargées qui peuplent leur environnement et qui sont à l'origine des émissions aurorales. Nous détaillerons ensuite pour les six planètes magnétisées les caractéristiques des aurores qu'on y observe.

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Figure 7: le télescope spatial Hubble. Crédit NASA.

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2. Lumières aurorales

2.1. Le spectre électromagnétique

De quels rayonnements sont composées les émissions aurorales? Elles couvrent une grande partie du spectre électromagnétique du fait de la diversité des mécanismes d'émissions. Une onde électromagnétique peut être caractérisée par sa longueur d'onde ou par sa fréquence. En faisant une analogie avec la houle sur l'océan, on peut dire que la longueur d'onde est la distance qui sépare deux vagues successives. La fréquence de l'onde est le nombre de fois par seconde qu'un bateau se soulèverait sur ces vagues. La longueur d'onde se mesure en mètre, la fréquence se mesure en hertz (symbole: Hz). Plus les vagues sont rapprochées, plus la longueur d'onde est courte. Plus le bateau « oscille » rapidement, plus la fréquence est grande. Ces deux grandeurs ne sont pas indépendantes: elles sont même proportionnelles pour une onde électromagnétique se propageant dans le vide. Le rapport de la longueur d'onde sur la fréquence est égal à la vitesse de l'onde et pour les ondes électromagnétiques, cette vitesse est égale à celle de la lumière dans le vide, soit 300 000 km par seconde.

Figure 1: Pour une onde mécanique (houle sur l'océan, corde vibrante, son...) ou électromagnétique (lumière visible, radio...), la longueur d'onde est la distance qui sépare deux points de même vibration. Un point M immobile qui « voit passer » l'onde oscille sur place verticalement. Le nombre d'oscillations par seconde du point M définit la fréquence de l'onde et s'exprime en hertz (Hz).

Nos yeux ne sont sensibles qu'à une très petite partie du spectre électromagnétique, le domaine justement nommé « visible ». Il s'étend de 400 nanomètres de longueur d'onde (1 nanomètre = un milliardième de mètre = 10-9 m) ce qui correspond à une lumière bleue-violette, à 800 nanomètres qui correspond au rouge. En deçà du bleu, on entre dans le domaine de l'ultraviolet puis dans celui des rayons X et enfin le domaine du rayonnement gamma. Au delà du rouge, on entre dans le domaine de l'infrarouge puis dans celui des ondes radio dont les longueurs d'onde

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s'échelonnent de quelques millimètres au kilomètre. La figure 2 montre en détail les différents domaines du spectre électromagnétique placés sur deux échelles de longueur d'onde et de fréquence, avec quelques sources artificielles de ces rayonnements. J'ai ajouté des images de la planète Jupiter vue dans différents domaines de longueur d'onde pour montrer que l'aspect des objets diffère suivant la longueur d'onde à laquelle on les observe. On remarque que les aurores polaires de Jupiter sont visibles en infrarouge, en ultraviolet et en rayons X montrant ainsi la grande diversité des mécanismes de rayonnement auroral.

Figure 2: Le spectre électromagnétique & Jupiter vu à différentes longueurs d'onde (de gauche à droite: en onde radio à 13 cm, en infrarouge à 4 µm, en visible à 0,5 µm, en U.V. à 130 nm et en rayons X à 10 nm). L'échelle du haut indique la longueur d'onde des rayonnements en mètre, celle du bas leur fréquence en hertz.

2.2. Mécanismes d'émission des rayonnements

Quelles sont les sources de ces rayonnements? Pour les domaines allant du proche infrarouge jusqu'aux rayons X en passant par le visible, ce sont les électrons des atomes. La physique quantique a montré que les électrons des atomes occupent des « niveaux d'énergie » caractérisés par une valeur d'énergie donnée. Sous l'effet d'une collision avec un autre atome ou une particule ou suite à l'absorption d'un rayonnement, un électron situé sur un niveau d'énergie E1 va « monter » sur un niveau

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d'énergie E2 supérieur à E1 (figure 3 haut). L'électron se trouve alors dans un état « excité ». Il ne restera sur ce niveau que pendant une durée limitée au bout de laquelle il va « redescendre » sur le niveau d'énergie E1. Cette « désexcitation » s'accompagne de la restitution par l'électron de la différence d'énergie E2 – E1 sous la forme d'un rayonnement de fréquence proportionnelle à cette différence. La valeur de cette fréquence, ou de la longueur d'onde qui lui est aussi proportionnelle, permet de situer le rayonnement émis sur le spectre électromagnétique.

Figure 3: Emission et absorption de photon par un atome & bandes d'émission de l'atome d'hydrogène.

Le bas de la figure 3 montre les quatre premiers niveaux d'énergie de l'atome le plus simple, l'hydrogène, et quelques transitions entre ces niveaux. La transition entre les niveaux E1 et E2 produit un rayonnement de longueur d'onde 121 nm situé dans l'ultraviolet lointain. L'hydrogène étant l'élément le plus répandu dans l'Univers, y compris dans le Système solaire, on retrouvera cette raie (appelée aussi raie Lyman alpha, car c'est la première de la série des raies dont le niveau inférieur

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est E1) dans le rayonnement auroral émis par les planètes dont l'atmosphère contient cet élément. La transition entre E3 et E2 conduit à l'émission d'un rayonnement visible de couleur rouge (raie Balmer alpha mais plus connue sous le nom H alpha) de longueur d'onde 655 nm et la transition entre E4 et E3 produit un rayonnement infrarouge non visible à l'oeil (Paschen alpha) de 1,09 µm de longueur d'onde (Figure 4). Il est important de noter que les rayonnements émis par les éléments chimiques sont la signature de ces éléments. Chaque élément chimique possède un spectre qui lui est propre. La spectroscopie, qui consiste à analyser les rayonnements émis par les objets, permet d'identifier les éléments chimiques qui composent ces objets et les conditions physiques dans lesquelles ils se trouvent.

Figure 4: Spectre de la lumière émise par l'atome hydrogène excité à toutes les longueurs d'onde, de l'ultraviolet à l'infrarouge. Chaque flèche de transition d'énergie de la figure 3 correspond à une raie d'émission du spectre. Seule les raies de la série Balmer nous apparaissent colorées car elles sont situées dans le domaine de la lumière visible.

Cette technique est donc essentielle dans l'étude à distance des corps célestes. Le rayonnement X est dû à des transitions d'électrons entre les niveaux d'énergie les plus bas (correspondants aux couches les plus internes) d'atomes de numéro atomique élevé et par « freinage » d'électrons au voisinage d'ions. Ce rayonnement est d'ailleurs appelé rayonnement de freinage (figure 5). Les ondes radio sont émises par des particules chargées accélérées, c'est à dire dont la vitesse varie. On distingue des émissions radio d'origine thermique, dues à l'agitation microscopique de ces particules, et des émissions non thermiques, dues aux particules chargées en mouvement le long de lignes de champ magnétique (figure 6). Ce sont ces dernières qui sont à l'origine des émissions radio aurorales. Au cours de leur mouvement en hélice autour des lignes de champ magnétique d'un planète, les électrons émettent des ondes radio dans un cône très ouvert à des fréquences entre 1 et 10 MHz. La mesure de leur fréquence permet d'accéder à la valeur du champ magnétique le long duquel elles sont produites.

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Figure 5: Emission X par « freinage » d'un électron au voisinage du noyau d'un atome.

L'observation des rayonnements émis par les planètes et leur environnement nous renseigne donc sur les mécanismes de leur émission et des conditions physiques locales. Une partie de ces rayonnements n'est pas observable depuis le sol, car il sont absorbés par l'atmosphère terrestre. Il faut se placer en orbite autour de la Terre pour les capter.

Figure 6: Emission radio par un électron en mouvement le long d'une ligne de champ magnétique.

Plus particulièrement, les domaines X, UV et le domaine radio jusqu'à 40 MHz ne sont observables que depuis l'espace. L'essor des techniques spatiales au début des années 1960 a permis l'accès à ces domaines du spectre électromagnétique qui ne parviennent pas au sol.

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2.3. Lumières aurorales Le phénomène lumineux que constitue les aurores polaires est donc produit par des atomes ou des molécules de la haute atmosphère terrestre dans les régions proches des pôles magnétiques. Nous verrons dans le chapitre suivant consacré à la magnétosphère dans quelles conditions elles se produisent. A quelle altitude se produisent les aurores sur Terre? La figure 6 montre une coupe verticale de l'atmosphère terrestre.

Figure 6: Coupe verticale de l'atmosphère terrestre avec indication de la pression (en millibar) et de la température (en degré Celsius) des différentes couches.

Celle-ci se découpe en couches caractérisées par des variations de température différentes de l'une à l'autre. La pression atmosphérique y décroît de façon exponentielle depuis le sol: sa valeur est divisée par environ 2,7 quand on s'élève de 8 km. La partie la plus basse est la troposphère dans laquelle se déroulent tous les phénomènes météorologiques. La température y décroît régulièrement avec l'altitude. La stratosphère, située au-dessus, est marquée par une remontée de la température. Dans la mésosphère, la température décroît de nouveau

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jusqu'à -90°C environ vers 100 km d'altitude. La dernière couche de l'atmosphère terrestre est la thermosphère dans laquelle la température remonte vers des valeurs positives mais la pression atmosphérique ne vaut plus qu'un millionième de sa valeur au sol (un millionième de bar). C'est dans cette couche ultime que se produisent les aurores polaires les plus basses. On peut alors observer toute une gamme de couleurs, bleu, vert, mauve, rouge, vert émeraude, émises par les espèces chimiques présentes (oxygène et azote atomique ou moléculaire), suivant l'énergie des particules excitatrices. L'intensité lumineuse produite par les aurores est très faible. Seule l'obscurité de la nuit, exempte des lumières urbaines, permet de les observer. Leur faible intensité permet d'ailleurs d'observer les étoiles les plus brillantes à travers (voir les deux photos d'illustration). L'hiver, avec ses longues nuits souvent dégagées, est la saison privilégiée pour l'observation des aurores polaires. Mais en Europe, il faut aller en Scandinavie ou en Russie, là où passe l'ovale auroral Nord, pour profiter du spectacle. Dans le silence froid de la nuit nordique, les draperies aurorales aux couleurs et aux formes changeantes ondulent lentement en quelques dizaines de minutes comme troublées par un vent hypothétique. Nous indiquons en fin d'ouvrage quelques liens Internet où le lecteur trouvera des galeries de photos et d'animations d'aurores réalisées par des amateurs du phénomène. On peut aussi observer exceptionnellement des aurores à des latitudes plus basses. Lors de chocs très violents avec le vent solaire, la magnétosphère terrestre se comprime fortement. Les ceintures de radiation, formées par les lignes de champ magnétique situées entre 2 et 4 rayons terrestres, voient leur population de particules chargées, habituellement piégées, être précipitées vers l'atmosphère. Des aurores polaires peuvent alors être observées en France, voire jusqu'en Afrique du Nord. La dynamique des aurores est très complexe, nous y reviendrons dans le chapitre consacré à la Terre. L'aspect en rideau peut s'expliquer par la précipitation des particules le long de lignes de champ magnétique formant des coquilles centrées sur les pôles magnétiques. Les particules précipitant en faisceaux ont des énergies cinétiques (liées à la vitesse) voisines. Elles vont perdre cette énergie par collision avec les espèces atmosphériques à la même altitude. Les émissions en lumière visible peuvent se produire à des altitudes très élevées comme on peut le voir sur la photo réalisée depuis la navette spatiale vers 400 km. L'espace est d'ailleurs le lieu privilégié pour observer les ovales auroraux terrestres dans leur totalité. On n'y est moins gêné par la courbure de la Terre comme depuis le sol.

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Figure 7: Localisation moyenne de l'ovale auroral nord (en vert) et les limites Nord et Sud de son extension maximale (lignes rouges). Crédit Geophysical Institute.

Figure 8: Aurores verte vue depuis l'archipel du Spitzberg. Crédit Cyril Simon.

Les aurores vues depuis le sol sont qualifiées de discrètes. Non pas à cause de leur faible luminosité, mais par opposition aux aurores diffuses. Ces dernières sont produites de façon continue, mais leur très faible luminosité par rapport au reste du ciel les rend indétectables depuis le sol. On doit alors les observer dans d'autres longueurs d'ondes où le contraste avec le fond du ciel est meilleur, généralement dans l'UV depuis l'espace (figure 8).

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Figure 9: Aurores vues depuis la navette spatiale en orbite autour de la Terre. Crédit NASA.

Figure 10: La Terre vue depuis l'espace dans l'ultraviolet, côté nuit (le Soleil est derrière la Terre). Les deux ovales auroraux sont visibles au dessus des pôles par la tranche. Les continents ont été rajoutés sur le disque sombre. Le fond brillant de l'image est dû au rayonnement UV solaire. Crédit NASA.

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Figure 11: Aurore « verte » vue depuis la station spatiale internationale en janvier 2003. Le cercle blanc en bas de l'image est le bord du cratère d'impact de météorite de Manicouagan au Québec. Crédit NASA.

Il en est de même pour les autres planètes. Le rayonnement auroral en lumière visible est trop faible comparé au réfléchi solaire. Et de la Terre, on ne peut observer que la partie de la planète éclairée par le Soleil (du moins pour les planètes « extérieures », celles qui orbitent au-delà de la Terre). Seules les sondes spatiales qui peuvent survoler l'hémisphère nocturne d'une planète ont la possibilité de « voir » les aurores en lumière visible.

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3. De la boussole à la magnétosphère

3.1. Un peu de magnétisme

On peut considérer, pour simplifier, que les champs magnétiques créés par les planètes qui en possèdent un est dipolaire. On entend par là que ce champ possède deux pôles magnétiques comme ceux d'un aimant droit: un pôle Nord et un pôle Sud. Lorsqu'on saupoudre de limaille de fer une plaque de verre posée sur un aimant droit, on constate que la limaille se répartit le long de courbes fermées sur les deux extrémités de l'aimant (figure 1). Ces courbes sont appelées lignes de champ. Elles sont symétriques par rapport à l'axe de l'aimant.

Figure 1: lignes de champ magnétique créées par un aimant droit.

Si on place une petite boussole sur une de ces lignes, son aiguille va s'aligner dans la direction de la ligne. Les physiciens ont construit une grandeur physique depuis le 19ème siècle, le champ magnétique (qu'ils notent B), dont la direction est donnée par la tangente en chaque point d'une ligne de champ (figure 1). Comment nommer les pôles magnétiques? On se rappellera que l'extrémité colorée en rouge de l'aiguille d'une boussole indique à peu près la direction du Nord géographique. Elle a donc été baptisée de ce nom. L'autre extrémité, généralement noire est nommée Sud. Mais nous avons tous remarqué

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que lorsqu'on approche deux aimants, ceux-ci se repoussent lorsqu'on approche les deux pôles de même nom et s'attirent lorsqu'on approche les deux pôles de nom contraire. Quelle est alors le nom du pôle magnétique de la Terre qui se trouve actuellement près du pôle Nord géographique? Il attire le pôle Nord de la boussole: il s'agit donc du pôle Sud. A l'opposé, le pôle magnétique près du pôle Sud géographique est un pôle Nord. La polarité du champ magnétique terrestre est « inversée » par rapport à l'orientation des pôles géographiques. Il en est de même pour Saturne. Pour Jupiter, polarités magnétiques et géographiques coïncident. La figure 2 montre l'orientation relative de l'axe polaire magnétique par rapport à l'axe de rotation de chaque planète magnétisée (à l'exception de Mercure).

Figure 2: Géométrie des champs magnétiques des planètes magnétisées du Système solaire (Mercure n'a pas été représentée). Les planètes ne sont pas à l'échelle entre elles. On remarque les angles importants que forment les axes des champs magnétiques d'Uranus et Neptune avec leur axe de rotation.

On observe que l'axe polaire magnétique et l'axe de rotation forment un angle qui peut être quasi nul dans le cas de Saturne à 57° pour Uranus. Cette particularité aura des conséquences importantes sur la répartition géographique des émissions aurorales et leurs variations temporelles. Pour la Terre, Jupiter et Saturne, l'axe magnétique fait un angle de moins de 11° avec l'axe de rotation et ce dernier est quasiment perpendiculaire

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à la direction du Soleil. Comment sont créés ces champs? Sans entrer dans les détails, forts complexes, des théories qui les modélisent, nous signalerons qu'elles mettent en jeu un effet dynamo engendré par la circulation de fluides conducteurs d'électricité dans certaines couches internes des planètes. Seules, Vénus et Mars ne possèdent pas de champ magnétique significatif. Dans le cas de la planète Mars, l'effet dynamo aurait cessé avec l'activité géologique de la planète ou il pourrait être en phase d'inversion comme cela s'est produit sur Terre dans le passé. Vénus semble par contre encore active géologiquement comme la Terre mais sa vitesse de rotation très lente (une journée sur Vénus dure 238 jours terrestres) ne permettrait pas l'entretien d'une dynamo, source de champ magnétique.

3.2. Le vent solaire

Le Soleil, comme les autres étoiles, émet depuis son atmosphère externe où il prend naissance, un flux de particules chargées (protons, électrons, noyaux d'hélium). Ce flux, appelé vent solaire, se propage radialement depuis le Soleil avec une vitesse comprise entre 400 et 1000 km/s. Sa densité varie entre 1 et 10 protons par centimètre cube au niveau de l'orbite de la Terre. Des phénomènes énergétiques se déroulent dans la couronne solaire tels que des protubérances qui peuvent conduire à l'éjection d'une partie de la matière de cette couronne (on parle d'éjection de masse coronale ou EMC) vers l'espace interplanétaire (figure 3). Cette matière se propage rapidement dans le vent solaire et elle peut venir heurter les planètes ou leur magnétosphère lors de son trajet.

Figure 3: Ejection de masse coronale par le Soleil, vue par le satellite Soho. Le disque rouge-brun est un cache placé devant la caméra pour masquer le Soleil trop lumineux. Le cercle blanc indique la taille du Soleil. Crédit NASA/ESA.

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Figure 4: Caractéristiques du vent solaire mesurées au niveau de l'orbite terrestre par le satellite ACE le 28 décembre 2005 sur une durée de 24 heures. De bas en haut: la température (en degrés kelvin), la vitesse (en km/s), la densité (en nombre de particules par cm3), l'angle entre le champ magnétique du vent solaire et la direction Terre-Soleil (en degré), Bt et Bz sont respectivement l'intensité du champ magnétique du vent solaire et sa composante perpendiculairement à la direction Terre-Soleil. Crédit NASA. 3.3. La magnétosphère

Si les champs magnétiques des planètes ne subissaient aucune influence extérieure, ils présenteraient approximativement la même forme que celle d'un aimant droit comme celui de la figure 1. Or le vent solaire qui est émis en permanence depuis le Soleil vers les planètes exerce une pression sur les lignes de champ dans la direction solaire. Le champ ne garde donc plus une symétrie de révolution suivant l'axe Nord-Sud. De plus, les lignes de champ près des pôles ne pouvant se refermer côté Soleil sont repoussées vers le côté opposé en formant une « queue » magnétique étirée. La figure 6 montre l'allure du champ magnétique terrestre sous l'effet du vent solaire. La « cavité » ainsi formée par le

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champ magnétique planétaire à l'intérieur du vent solaire s'appelle une magnétosphère, terme introduit par Thomas Gold en 1959. Ses dimensions dépendent de l'intensité du champ magnétique et de la pression exercée par le vent solaire. Pour la Terre, les dernières lignes de champ dans la direction solaire sont situées entre 5 et 7 rayons terrestres (32 000 km – 44800 km) alors que les lignes s'étendent à plus de 200 rayons terrestres côté nuit (1,28 millions de km), incluant l'orbite lunaire (384 000 km). On voit que du côté du Soleil, les satellites géostationnaires, à 36 000 km d'altitude, peuvent se retrouver en dehors du champ magnétique terrestre et être directement exposé au vent solaire. La magnétosphère de Jupiter est beaucoup plus grande encore: entre 50 et 70 rayons joviens côté Soleil (3,55 à 4,97 millions de km) ce qui englobe les orbites des quatre satellites galiléens jusqu'à quasiment l'orbite de Saturne côté nuit! Cette taille est due à l'intensité du champ jovien (le plus intense parmi les planètes) et à la faible pression exercée par le vent solaire au niveau de l'orbite de Jupiter. Les principales données sur les magnétosphères planétaires sont rassemblées dans le tableau en fin de chapitre.

3.4. Et les particules qui la peuplent...

La magnétosphère ne contient pas uniquement les lignes de champ magnétique planétaire. Les particules électriquement chargées, en provenance du vent solaire ou de l'atmosphère de la planète et de ses satellites éventuels circulent à l'intérieur: ce sont des électrons, des protons et des ions (atomes qui ont perdu un ou plusieurs électrons). Ces particules sont soumises à une force de la part du champ magnétique qui explique leur mouvement. La physique montre que ces particules vont décrire une hélice le long d'une ligne de champ comme on peut le voir sur la figure 5. Or, on montre que le rayon de cette hélice diminue lorsque que la particule s'approche des pôles magnétiques ainsi que son pas (le pas est la longueur parcourue après un tour d'hélice). Le pas diminue tellement qu'il peut s'annuler. Cette situation instable pour la particule lui permet de faire demi-tour vers l'autre pôle où le même phénomène se reproduit. La particule est ainsi « piégée » entre les deux points de rebroussement nommés « points miroirs ». La position de ces deux points sur la ligne de champ dépend de l'angle que fait la direction du vecteur vitesse de la particule et le champ à l'équateur magnétique. Plus cet angle est élevé, plus les points miroirs se rapprochent de la planète. Et s'ils se trouvent dans l'atmosphère de la planète, la particule va heurter les molécules et atomes atmosphériques en leur communiquant son énergie. Ces molécules et atomes vont alors émettent un rayonnement en se désexcitant: on observe alors une émission aurorale. Les particules vont également subir une « dérive » en longitude qui assure leur répartition le long des méridiens magnétiques.

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3.5. Voyage dans la magnétosphère

La magnétosphère terrestre et les différentes régions qui la composent sont représentées sur la figure 6. En arrivant du Soleil, le vent solaire, qui possède une vitesse supersonique par rapport à la Terre (400 à 800 km par seconde), rencontre l'obstacle que constitue pour lui la magnétosphère. Il se crée une onde de choc analogue à celle d'un avion supersonique dans l'air.

Figure 5: Mouvement d'une particule chargée dans le champ magnétique d'une planète. En tirets jaunes: une ligne de champ magnétique. En tirets verts: la trajectoire d'une particule chargée. Beq et veq représentent respectivement le champ magnétique et la vitesse de la particule à l'équateur.

Le vent solaire est alors ralenti et dévié autour de la magnétopause qui marque la frontière entre le champ magnétique transporté par le vent solaire et le champ planétaire. Cette frontière n'est pas totalement étanche et des particules du vent solaire peuvent la traverser pour rejoindre la queue de la magnétosphère. La physique montre que la magnétopause est le siège de courants électriques: à l'avant, un courant circule de l'Ouest vers l'Est (quand on regarde la Terre dos au Soleil) et dans la queue, un courant circule de l'Est vers l'Ouest dans le plan de l'équateur magnétique. La région de la

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magnétosphère qui contient le plan équatorial s'appelle le feuillet de plasma. Ce feuillet constitue un réservoir de particules et d'énergie pour les régions aurorales. Sous l'effet de courants électriques alignés sur les lignes de champ magnétiques, les particules chargées vont précipiter vers l'atmosphère. Les deux ovales auroraux terrestres se situent très près de la frontière entre les lignes de champ fermées côté jour et les lignes ouvertes qui enserrent le feuillet.On peut comparer les régions aurorales à un écran cathodique sur lequel se projettent les lignes de champ de la magnétosphère. Les émissions aurorales sont situées au pied des lignes de champ magnétique le long desquelles des particules énergétiques précipitent dans la haute atmosphère. L'observation des émissions permet donc de repérer à distance les régions actives de la magnétosphère d'où proviennent les particules précipitées.

Figure 6: Coupe d'une vue 3D de la magnétosphère terrestre.

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Tableau: Caractéristiques des champs magnétiques et magnétosphères planétaires.

Champ à l'équateur

(en gauss)

Inclinaison et sens

(en degrés)

Rayon typique de la magnétopause (en km et rayon planétaire)

Densité du vent solaire (protons par cm3)

Mercure 0,003 14 3700 (1,5) 35 - 80

Terre 0,31 12 64 000 (10) 8

Jupiter4,3 -9,6

4 300 000 (60) 0,3

Saturne0,21 0

1 200 000 (20) 0,1

Uranus 0,23 -58,6 470 000 (18) 0,02

Neptune 0,14 -46,9 570 000 (23) 0,008

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4. Aurores terrestres

4.1. Des aurores en permanence

Si nos yeux étaient sensibles à la lumière ultraviolette, nous pourrions voir des aurores polaires presque toutes les nuits. Les ovales auroraux sont présents de façon permanente au-dessus des régions polaires. Cependant, le spectacle serait décevant. Nous ne verrions que des émissions très peu lumineuses. C'est pourquoi ces aurores permanentes sont qualifiées de diffuses dans la nomenclature. Les particules chargées à l'origine de ces aurores diffuses sont peu énergétiques et leur précipitation dans la haute atmosphère conduit à des émissions lumineuses peu intenses. Quelle est l'origine de ces particules? Elle proviennent du feuillet de plasma, situé dans la queue de la magnétosphère, qui constitue un réservoir de particules chargées (voir le schéma de la magnétosphère terrestre du chapitre consacré aux magnétosphères planétaires). Il est alimenté de façon quasi permanente par le vent solaire mais on trouve aussi des ions arrachés à la haute atmosphère terrestre. Ce feuillet est entouré par des lignes de champ magnétique ouvertes dont le pied dans l'atmosphère terrestre forme deux ovales qui délimitent les calottes polaires. Les deux ovales auroraux sont très proches de ces régions. Les aurores spectaculaires que l'on voit la nuit depuis le sol sous forme d'arcs lumineux sont qualifiées de « discrètes ». L'adjectif peut prêter à confusion, mais il indique au contraire des aurores beaucoup plus lumineuses que les précédentes et visibles sous la forme d'arcs et de « rideaux » colorés sur plusieurs dizaines de kilomètres dans le ciel.

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Figures 1a et b: Activité des ovales auroraux terrestres Nord (a) et Sud (b) extrapolés à partir des mesures faites par un satellite de la National Oceanic & Atmospheric Administration (NOAA) le 14 mai 2007. Une échelle de couleur du bleu au rouge indique une intensité lumineuse croissante. La flèche rouge indique la direction du Soleil. Crédit NOAA.

Comment apparaissent ces aurores brillantes? Pour obtenir une grande intensité lumineuse, les particules qui précipitent dans l'atmosphère doivent avoir une énergie beaucoup plus grande (environ 10 fois plus) que celles qui produisent des aurores diffuses. Un processus d'accélération doit intervenir pour expliquer l'augmentation de cette énergie. Ce processus a lieu durant un sous-orage magnétique: de l'énergie accumulée dans la queue de la magnétosphère est libérée pour accélérer des particules chargées en direction de la Terre.

4.2. Sous-orages magnétiques

Les sous-orages à l'origine des aurores discrètes sont assez fréquents puisqu'on peut en comptabiliser jusqu'à plusieurs par jour et qu'on les observe durant toute l'année, avec une suractivité au printemps en raison de l'orientation favorable de l'axe magnétique de la Terre par rapport au Soleil. Jusqu'à récemment, deux scénario étaient en compétition pour expliquer leur déclenchement mais tout deux avaient en commun de situer l'origine du phénomène dans la queue de la magnétosphère. Dans le premier, une interruption se produit entre 8 et 10 rayons terrestres dans le courant électrique qui traverse la queue de la magnétosphère. Le courant interrompu est dévié vers la Terre par l'intermédiaire des lignes de champ magnétique, accélérant ainsi les

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particules vers la haute atmosphère qui vont produire les aurores. L'interruption de courant se propage alors dans la direction opposée à la Terre et les émissions aurorales se poursuivent en s'étendant vers le Nord, l'Est et l'Ouest. Le second scénario situe le déclenchement des sous-orages plus loin de la Terre que le premier. Vers 160 000 km de la Terre, soit 25 rayons terrestres, se produit une reconnexion entre le champ magnétique terrestre et celui du vent solaire (figure 2).

Figure 2: Reconnexion entre le champ magnétique du vent solaire (en jaune) et celui de la Terre (en vert). La reconnexion débute en 1 puis les lignes de champ sont entraînées côté nuit de 2 à 5. En 6, les lignes accumulées dans la queue de la magnétosphère se reconnectent entre-elles et reviennent vers la Terre de 7 à 9. Le plasma stocké en 7' est éjecté vers le côté nuit.

Lorsque les sens des lignes de champ du vent solaire et de la Terre sont opposés, les lignes se connectent entre elles, d'abord en avant de la Terre en arrivant du Soleil au niveau de la magnétopause puis les lignes du vent solaire se déplaçant vers le côté nuit de la Terre, entraînent avec elles les lignes de champ terrestre. Les lignes de champ ne pouvant s'accumuler à l'infini dans la queue de la magnétosphère, celles-ci se referment en se croisant puis reviennent en direction de la Terre. Lors de ce retour, le plasma contenu dans cette région est entraîné vers la Terre

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où il donnera lieu à des précipitations aurorales. Pour trancher entre ces deux explications, il fallait disposer non pas d'un seul, mais de plusieurs satellites répartis dans la queue de la magnétosphère pour observer le lieu de déclenchement des sous-orages. C'est ce qui a été fait récemment avec la flottille des cinq satellites de la mission Themis de la NASA. Lancés par une seule fusée en mai 2007, les satellites ont été placés sur des orbites autour de la Terre qui les amènent à être quasiment alignés avec la direction Soleil-Terre dans la queue de la magnétosphère tous les 4 jours (figure 3).

Figure 3: Positions relatives des cinq satellites Themis (P1 à P5) lors de l'observation d'un sous-orage en mai 2008 (figure de gauche) et variations temporelles du champ magnétique terrestre suivant la direction z (Bz) , de la vitesse du plasma vz et vx suivant les direction z et x et de l'intensité aurorale (graphes à droite). On observe successivement les étapes suivantes sur les graphes:En 1, une forte augmentation du champ magnétique suivant l'axe z du champ magnétique terrestre vu par le satellite P1.En 2, l'activité aurorale mesurée au sol augmente après 96 secondes. En 3, le champ magnétique terrestre suivant la direction z subit une perturbation au niveau du satellite P3. La vitesse vx du plasma en direction de la Terre augmente fortement jusqu'à 800 km/s. Crédit NASA/ESA.

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Figure 4: Séquence d'images UV de l'hémisphère Sud de la Terre réalisées par le satellite Dynamic Explorer entre 2h02 et 5h17 TU le 13 juin 1983. Le sous-orage commence par la première image en haut à gauche puis se déroule de gauche à droite. On remarque que la taille de la Terre augmente au long de la séquence d'images car le satellite se rapprochait de notre planète. La face éclairée de la Terre n'est pas visible hormis le fin croissant lumineux situé à droite sur chaque image. Crédit NASA.

En mai 2008, les quatre satellites étaient dans cette configuration lorsque s'est déclenché un sous-orage. Les satellites P1 et P2, les plus éloignés de la Terre, ont enregistré de brusques variations du champ magnétique terrestre ainsi qu'une augmentation de la vitesse du plasma dans la direction du champ. Ces variations ont été interprétées comme un phénomène de reconnexion. Moins d'une minute après, on note une augmentation de l'activité aurorale sur Terre et le satellite P3, situé à 10 rayons terrestres, enregistre un très brusque changement d'orientation du champ magnétique pendant que le plasma local accélère en direction de

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la Terre. Ces observations valident le deuxième scénario car le déclenchement est initié par un phénomène de reconnexion dans la magnétosphère lointaine de la Terre. Si l'enchaînement des étapes est maintenant connu grâce aux observations de ces satellites, il apparait une surprise. L'augmentation de l'activité aurorale se fait très rapidement après le déclenchement du sous-orage dans la queue de la magnétosphère. Des travaux sont en cours pour comprendre la rapidité de ce déclenchement.

4.3. Orages magnétiques

Contrairement à ce que pourrait suggérer leur dénomination, les orages magnétiques ne sont pas une variété plus intense des sous-orages. Historiquement, le terme d'orage magnétique apparaît en premier au milieu du 19ème siècle pour désigner une perturbation à grande échelle du champ magnétique à la surface de la Terre, associée à l'activité du Soleil. Comme les sous-orages, les orages magnétiques peuvent produire des aurores très brillantes qui ont la particularité d'être observables depuis des latitudes plus basses que celles de l'ovale auroral, celles de la France par exemple. Le déclenchement d'un orage magnétique se produit lors d'une inversion de la direction du champ magnétique transporté par le vent solaire sur une durée qui s'étend de 1 à 5 jours. Cette inversion peut être précédée d'un choc dans le vent solaire qui va perturber la magnétosphère terrestre en la comprimant fortement. Lors de l'orage magnétique survenu le 6 avril 2000, le « nez » de la magnétopause, situé habituellement vers 10 rayons terrestres en direction du Soleil, s'est rapproché de la Terre en-deçà de l'orbite géostationnaire à 6,6 rayons terrestres. Cette forte compression provoque l'injection de particules chargées dans la magnétosphère interne qui viennent peupler l'anneau de courant autour de la Terre. L'intensité de ce courant peut atteindre les 10 millions d'ampères. La physique montre que l'augmentation du courant de particules dans cet anneau affaiblit le champ magnétique terrestre dont l'effet est mesurable sur toute la surface de la Terre (figure 6).

Villes d'Europe Probabilité d'observation d'aurores polaires

Oslo 100 nuits par an

Dublin, Stockholm, Helsinki 10 nuits par an

Paris, Vienne, Moscou 1 nuit par an

Lisbonne, Istanbul 1 nuit tous les 10 ans

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Figure 6: Enregistrement des paramètres du vent solaire par le satellite ACE (Advanced Composition Explorer) et de l'indice Dst lors de l'orage magnétique des 6 et 7 avril 2000. Bz et Bt sont respectivement la composante Nord-Sud du champ magnétique interplanétaire et le champ total. Phi est l'angle entre Bt et la direction Soleil-Terre. Ni est le nombre de particules par centimètre cube. Vi la vitesse moyenne de ces particules. Dst est un indice qui rend compte de la composante horizontale du champ magnétique terrestre au sol. On remarque une brusque augmentation de la densité et de la vitesse du vent solaire vers 16h le 6 avril. Au même moment, l'indice Dst augmente légèrement. Peu avant 20h, la composante Bz du champ interplanétaire s'inverse brusquement et Dst diminue fortement pendant deux heures et se maintient à des valeurs négatives les heures suivantes. Dans la nuit, des aurores brillantes furent observées dans toute la moitié Nord de la France. Crédit NASA.

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Les particules chargées finissent par peupler les lignes de champ magnétique qui traversent l'anneau de courant et peuvent précipiter dans la haute atmosphère terrestre pour produire des aurores brillantes à basse latitude. Ce fût le cas dans la nuit du 6 au 7 avril 2000 où des aurores très brillantes ont été observées depuis la France. Les orages magnétiques intenses peuvent perturber les activités humaines. Dans l'espace, les satellites en orbite géostationnaire ne sont plus protégés par le champ magnétique terrestre lorsque la magnétosphère est fortement comprimée. Ils sont alors exposés directement aux perturbations du vent solaire qui peuvent affecter leur fonctionnement. Au sol, les variations du champ magnétique induisent des courants électriques qui peuvent endommager des installations électriques. Ce fût le cas au Québec en 1989 où 6 millions de personnes ont été privées d'électricité suite à la destruction d'un transformateur par les conséquences d'un orage magnétique. Les communications hertziennes et par câble sont aussi affectées durant les orages magnétiques intenses. Il se produit environ un orage magnétique par mois mais heureusement, les plus intenses, susceptibles de provoquer de fortes perturbations, sont assez rares. Pour le seul 20ème siècle on n'en dénombre que 4. Pour tenter de les prévenir, une « météorologie de l'espace » s'est développée ces dernières années par une observation continue du Soleil et du vent solaire au moyen de satellites en orbite terrestre. Pour le moment ces prévisions manquent de fiabilité.

Figure 7: Aurore australe au-dessus de l'Antarctique vue par le satellite IMAGE le 11 septembre 2005 quatre jours après une éjection de masse coronale du Soleil à l'origine d'un orage magnétique sur Terre (image composite UV-visible). Crédit NASA.

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5. Les aurores singulières de Mercure, Vénus et Mars

Nos deux plus proches voisines, Vénus et Mars, se singularisent de notre planète par l'absence de champ magnétique global à leur surface. Vénus, de taille comparable à la Terre semble être encore géologiquement active mais toutes les sondes qui l'ont visitée ont montré l'absence d'un champ magnétique global. Observons-nous actuellement une phase d'inversion du champ vénusien pendant laquelle il change de polarité en s'affaiblissant, comme la Terre en a connu dans le passé? La faible vitesse de rotation de la planète sur elle même en 239 jours serait-elle insuffisante pour entretenir un phénomène de dynamo du noyau liquide où se crée le champ? Le noyau de la planète est-il solide, contrairement à la Terre, empêchant la convection? Il n'est pas certain que les prochaines sondes envoyées vers Vénus puissent répondre à ces questions. On sait depuis les années 1960 que Mars ne possède pas non plus de champ magnétique. Cependant, la sonde Mars Global Surveyor lors de sa mise en orbite autour de la planète rouge en 1997 a observé la présence de régions magnétisées, localisées essentiellement dans l'hémisphère Sud. Les roches de ces régions auraient acquis leur magnétisme dans le passé sous l'influence d'un champ à l'échelle de la planète, aujourd'hui disparu.

Figure 1: Carte des 13 000 « évènements auroraux » UV (en bleu) observés par la sonde Mars Global Surveyor sur une durée de 6 années. Ils sont localisés essentiellement dans l'hémisphère Sud, là où se situent les régions magnétisées en surface. La croix rouge indique le lieu où la sonde Mars Express a détecté la première émission en 1994. Crédit NASA.

Le spectromètre UV de la sonde européenne Mars Express a détecté en 1994 un « flash » au-dessus d'une région magnétisée de l'hémisphère

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Sud. Cette émission a été interprétée comme étant due à l'excitation du dioxyde de carbone de l'atmosphère par des électrons du vent solaire précipités le long des lignes du champ magnétique local. Suite à cette découverte, les données du spectromètre à électrons de la sonde Mars Global Surveyor ont été ré-analysées et ce ne sont pas moins de 13 000 « éclairs » auroraux qui ont été identifiés au-dessus des régions magnétisées (figure 1).En 1974, la sonde US Mariner 10 a révélé l'existence d'un champ magnétique autour de Mercure. Il serait dû à la présence au centre de la planète d'un noyau solide riche en fer aimanté. On peut comparer le champ de Mercure à un gigantesque barreau aimanté figé au centre de la planète. Ce champ a toutefois une intensité 10 fois plus faible que celui de la Terre. Il en résulte une magnétosphère de petite taille comparée à celle de la planète (figure 2). En effet, le point subsolaire, où s'équilibrent les champs magnétiques du vent solaire et de la planète, se trouve à 1,4 rayon de Mercure contre 11 rayons terrestres pour la Terre. Hormis la taille, cette magnétosphère possède la même structure que celle de la Terre. Mariner 10 a même détecté la signature de courants électriques alignés sur les lignes de champ magnétique et des évènements de type sous-orage, comme ceux de la magnétosphère terrestre qui produisent une intensification de l'activité aurorale. La fermeture de ces courants alignés sur Mercure se pose car son ionosphère est extrêmement ténue.

Figure 2 : Coupe de la magnétosphère de Mercure.

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Composée essentiellement d'hydrogène, d'hélium et d'oxygène, la pression atmosphérique à la surface est d'un milliardième de celle de la Terre. C'est insuffisant pour qu'on observe des aurores comme sur Terre. Des observations au télescope depuis le sol terrestre dans les années 1989-1990 ont montré des émissions de lumière visible près des pôles dues à des atomes de sodium (figure 3). On pense que ces atomes seraient expulsés du sol de Mercure par le criblage des particules chargées du vent solaire guidées près des pôles par le champ magnétique de la planète. Excités par le rayonnement solaire de même longueur d'onde, ces atomes de sodium émettent alors de la lumière dans toutes les directions.

Figure 3: Emissions du sodium sur Mercure sur trois jours consécutifs en décembre 1990. Le cercle blanc représente le disque de Mercure et la partie hachurée est l'hémisphère nocturne de la planète. Crédit: NASA & Kitt Peak Observatory.

Trente trois ans après les photos de Mariner 10, l'exploration de Mercure reprend avec un premier survol effectué par la sonde Messenger en janvier 2008, puis deux autres en octobre 2008 et septembre 2009. Cette fois, 90% de la surface de la planète a été photographiée et les mesures de champ magnétique ont confirmé son aspect dipolaire, à l'image d'un barreau aimanté. Son intensité n'a d'ailleurs pas changé depuis les mesures effectuées par Mariner 10. Ces mesures sont cohérentes avec un modèle de production identique à celui de la Terre. L'environnement de Mercure a révélé aussi la présence d'autres espèces chimiques que le sodium. Du calcium et du magnésium ont été observés dans son atmosphère ténue. Comme le sodium, ces éléments sont bien expulsés de la surface par criblage et gagnent ensuite de l'altitude pour séjourner plus ou moins longtemps dans la haute atmosphère. Une « queue » de sodium variable a même été détectée côté nuit de la planète lors des deux derniers survol. Suivant l'intensité du vent solaire, le sodium, comme les autres éléments présents dans l'exosphère, sont entrainés dans la direction anti-solaire, donnant à l'environnement de la planète l'aspect d'une chevelure de comète (figure 4). La mission Bepi-Colombo conjointe entre les agences spatiales européenne et japonaise doit permettre la mise en orbite autour de Mercure de deux sondes vers

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2019. L'une sera consacrée à l'étude de la surface de la planète et l'autre à celle de sa magnétosphère.

Figure 4: « Queue » de sodium autour de Mercure vu par la sonde Messenger. Le cercle bleu représente le contour de la planète. Crédit NASA.

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5. Jupiter: des aurores polaires à la puissance 10

5.1. Premières observations

En 1955, quelques années avant l'envoi des premières sondes spatiales, des radioastronomes observèrent une intense émission radio à la fréquence de 22,2 MHz dans une région du ciel. Dans le champ d'observation: la planète Jupiter. La première émission radio naturelle en provenance d'une planète venait d'être découverte. Ces ondes radio, qualifiées de décamétriques (de longueur d'onde 13,5 m), sont produites par des électrons en mouvement dans un champ magnétique. Cette découverte fortuite a permis de prouver, pour la première fois, l'existence d'un champ magnétique autour d'une autre planète et d'évaluer son intensité. Des observations à plus hautes fréquences dans les années qui suivirent ont permis de montrer l'existence de ceintures de radiations autour de l'équateur jovien, analogues à celles qui ont été découvertes sur Terre en 1958 par le premier satellite US Explorer 1.

5.2. A l'ère spatiale

En 1973 et 1974 les deux sondes Pioneer 10 et 11 ont réalisé les premières mesures du champ magnétique de Jupiter grâce au magnétomètre qu'elles embarquaient. Ces mesures ont permis de créer des modèles de champ magnétique de la planète, indispensables pour établir une cartographie de la magnétosphère. Suite à cette mission, la NASA décide l'envoi en 1977 de deux nouvelles sondes afin d'explorer les planètes géantes du Système solaire en profitant de la position relative exceptionnelle de ces planètes dans les années 1970 et 1980. Lors du survol de Jupiter, l'effet de fronde gravitationnelle permettait une trajectoire d'interception de Saturne, Uranus et Neptune en 10 ans.Beaucoup mieux équipées en instruments que les sondes Pioneer, les deux Voyager, lors de leur survol de Jupiter, ont révolutionné de façon exceptionnelle les connaissances que nous avions de la planète et de son environnement. Les quatre satellites galiléens plus particulièrement, vus jusqu'alors sous forme de points lumineux même dans les télescopes les plus puissants de l'époque, se sont révélés totalement différents de ce que l'on pensait alors. Au lieu des mondes figés à l'image de notre Lune que l'on s'attendait à trouver, si loin du Soleil, on a découvert des corps très différents les uns des autres. Io et ses volcans actifs qui éjectent leur panache jusqu'à 400 km de hauteur (figure 1), Europe et sa surface entièrement recouverte d'une banquise... Les surprises furent spectaculaires. Les sondes embarquaient un spectromètre pour observer le

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rayonnement UV de la planète. C'est cet instrument qui a révélé l'émission UV aurorale dans l'hémisphère nord. Presque simultanément, le satellite International Ultraviolet Explorer (IUE) mis en orbite géostationnaire en 1978 a observé également cette émission. Le spectromètre à bord de Voyager comporte une fenêtre d'observation assez grande par rapport au disque de Jupiter, ce qui limite fortement la résolution de l'instrument.

Figure 1: Un volcan actif de Io éjectant un panache vu par la sonde Voyager. Crédit NASA.

Pour déterminer la position géographique des émissions UV aurorales, les opérateurs ont effectué un balayage en latitude de la planète. Cette astuce a permis d'obtenir les limites Nord et Sud des émissions UV aurorales à toutes les longitudes. Deux résultats essentiels sont ressortis de ces observations. Premièrement, les émissions se répartissent le long d'un ovale, comme sur Terre, mais contrairement à l'ovale auroral de notre planète, celui de Jupiter tourne avec elle, comme s'il était « fixé» sur la planète. Deuxièmement, l'ovale semblait se trouver au pied des lignes de champ magnétique interceptant l'équateur au niveau de l'orbite de Io, à une distance de 6 rayons joviens. Voyager a détecté dans l'environnement de Io un plasma issu des gaz émis par les volcans actifs. Ce plasma, qui forme un anneau ou tore le long de l'orbite du satellite, semblait être le réservoir des particules chargées qui précipitent dans l'ovale auroral observé. Lors du survol de Io, Voyager a mesuré des courants électriques intenses de plusieurs millions d'ampères, dirigés suivant les lignes de champ magnétique de Jupiter. On devait s'attendre à ce que les particules chargées (électrons et ions) accélérées par ces courants devaient produire une émission UV

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au pied des lignes de champ à la « surface » de Jupiter. Les sondes Voyager ont poursuivi leur trajet vers Saturne et seul le satellite IUE a permis de poursuivre les observations des aurores joviennes dans l'UV jusqu'en 1996, année de sa « mise à la retraite ». Il n'a pas apporté d'information supplémentaire par rapport à Voyager sur la localisation des ovales auroraux car la fenêtre d'observation de son spectrographe couvrait une partie non négligeable du disque jovien. Les observateurs se sont donc contentés de pointer l'instrument sur les régions polaires et de laisser Jupiter tourner devant le satellite. Des campagnes d'observations continues sur plusieurs jours ont montré que les émissions dépendaient de la longitude observée et que l'intensité globale rayonnée par les aurores était assez peu variable, d'un facteur 4 environ sur plusieurs jours, contrairement aux aurores terrestres dont l'intensité peut varier d'un facteur 10 sur quelques heures. Il a été montré aussi que l'activité aurorale était corrélée aux perturbations du champ magnétique dans le disque de courant équatorial, mesuré par la sonde Galileo, en orbite autour de Jupiter à partir de 1995. Une forte activité aurorale coïncidant avec une perturbation du champ.

5.3. La magnétosphère de Jupiter

Le champ magnétique de Jupiter est le plus intense de toutes les planètes du Système solaire (figure 2).

Figure 2: La magnétosphère de Jupiter vue dans un plan méridien midi-minuit. Le vent solaire arrive par la gauche. Elle présente la même structure globale que celle de la Terre, à l'exception du tore de plasma crée par le satellite Io.

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Il peut s'étendre à grande distance de la planète, aidé en cela par la faible densité du vent solaire au niveau de son orbite. En direction du Soleil, l'avant de la magnétosphère se situe en 70 et 100 rayons joviens soit entre 3,5 et 7 millions de km, suivant la pression exercée par le vent solaire. Elle peut s'étendre côté nuit jusqu'à l'orbite de Saturne. Les quatre satellites galiléens sont plongés dans le champ magnétique jovien. La magnétosphère de Jupiter, contrairement à celle de la Terre, est peuplée d'un plasma dont l'origine est essentiellement locale. Ce sont les volcans actifs de Io dont les éjectats alimentent en gaz et en poussières un anneau ou tore de plasma le long de la trajectoire du satellite à raison d'une tonne par seconde. Les forces d'inertie centrifuges entraînent ensuite ce plasma vers l'extérieur jusqu'à une trentaine de rayons joviens pour former un disque en rotation de plus en plus en retard par rapport à Jupiter. En effet, la planète ne peut plus transférer son énergie de rotation au plasma, via son champ magnétique au-delà d'une certaine distance. S'il est trop dense, le plasma peut être éjecté brusquement vers la queue de la magnétosphère.

5.4. Dans le miroir de Hubble

En 1991, le télescope spatial Hubble est enfin mis en orbite, après plusieurs années de report de son lancement. Les caméras et spectrographes installés au foyer de son miroir primaire de 2,4 m vont permettre de réaliser des images et des spectres UV des planètes avec une résolution inégalée. Le défaut optique du miroir ne permet pas de profiter des capacités des instruments dans un premier temps. Les premières images de Jupiter, réalisées avec la caméra à objet faible de l'ESA en 1992 et 1993, sont cependant très instructives. Elles montrent, pour la première fois, l'ovale auroral nord dans sa totalité. La localisation de l'ovale est une surprise: il est situé à plus haute latitude que les observations de Voyager. Les particules qui précipitent ne sont donc pas originaires du tore de plasma de Io, mais du disque de courant qui entoure Jupiter et situé au-delà de l'orbite de Io.Fin 1993, un dispositif optique est posé sur le télescope pour corriger le défaut du miroir et rendre aux images leur netteté. En juin et juillet 1994, les morceaux d'une comète, baptisée Shoemaker-Levy 9, chutent sur Jupiter. Tous les instruments astronomiques sur Terre et dans l'espace furent alors mobilisés pour observer ce phénomène exceptionnel. Cet événement a été l'occasion pour notre communauté scientifique d'obtenir du temps d'observation sur le télescope spatial. L'ajout de la caméra STIS à son bord en 1997, dont la sensibilité est meilleure que celle des instruments précédents, a permis d'obtenir des images de plus grande qualité des aurores joviennes. L'évolution de la qualité des images au gré des changements de caméras est perceptible sur les clichés de Saturne

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montrés dans le chapitre suivant.

Figure 3: Mosaïque visible - UV de Jupiter. L'image visible a été réalisée par la sonde Cassini lors de son survol de Jupiter en décembre-janvier 2001. Les images UV, superposées par transparence, ont été réalisées par la caméra STIS à bord du télescope spatial Hubble. Crédit des images visible et UV: NASA/ESA.

5.5. Les ovales auroraux

Il s'agit de la principale structure des aurores joviennes. Si l'ovale est de forme régulière dans l'hémisphère Sud, il présente une forme de haricot au Nord, due à la présence d'une anomalie du champ magnétique dans ce secteur de longitudes. Ils sont situés au pied de lignes de champ qui coupent le plan équatorial entre 20 et 30 rayons joviens, région de la magnétosphère située entre les orbites de Ganymède et de Callisto. A partir de 20 rayons joviens, la couche de plasma équatoriale, qui tournait jusque là de façon « rigide » avec la planète comme sur un manège, ne peut plus être entraînée à la même vitesse. Un circuit de courants électriques se met en place le long des lignes de champ magnétique entre la couche de plasma et l'ionosphère de Jupiter. Ces courants fournissent l'énergie aux particules chargées à l'origine des émissions aurorales (figure 4). On note en général une asymétrie de brillance entre le côté matin (à gauche du méridien central), généralement brillant et le côté soir (à droite du méridien central), peu souvent visible (figure 5 et 6). On pense que le côté soir de l'ovale s'intensifie après une phase d'expansion de la magnétosphère, lorsque le vent solaire exerce sur elle une pression moindre. Cette expansion favoriserait l'intensification des courants alignés le long des lignes de champ magnétique qui accélèrent les particules chargées vers la planète. La précipitation de ces particules produisent alors une augmentation de brillance de cette partie de l'ovale

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auroral.

Figure 4: Courants alignés dans la magnétosphère moyenne de Jupiter. Jupiter et les satellites galiléens ne sont pas à l'échelle mais la distance entre les corps sont à l'échelle indiquée en rayons joviens (1 Rj = 71 400 km). Lors de sa rotation avec la planète, le champ magnétique jovien (lignes de champ B en jaune) entraîne le disque de plasma équatorial. Des courants électriques (en vert, désignés par j) alignés sur les lignes de champ « ferment » le circuit électrique entre la haute atmosphère de Jupiter et le disque de plasma. Ce dernier est entraîné en rotation par une force jxB, perpendiculaire au plan de la figure et dirigé vers l'arrière de celle-ci.

Figure 5: Hémisphère Nord de Jupiter vu dans l'UV lointain (130 nm) par la caméra STIS à bord du télescope spatial. Une table de couleur a été utilisée pour

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faire ressortir les émissions aurorales. Une grille de coordonnées géographiques, avec méridiens et parallèles, a été représentée en pointillés blancs. L'axe des pôles géographiques de la planète est vertical. Les principales structures aurorales joviennes sont visibles sur l'image. 1: L'émission du pied des lignes de champ qui balayent le satellite Io; 2: morceau d'un ovale secondaire; 3: l'ovale auroral principal; 4 premier ovale interne à l'ovale principal qui marque la limite des dernières lignes de champ fermées; 5: l'émission du cornet polaire; 6: la calotte polaire délimitée par les premières lignes de champ ouvertes vers la queue de la magnétosphère.

5.6. Au « pied » des satellites

Sur les deux images des figures 5 et 6, on peut voir à plus basse latitude que l'ovale auroral une curieuse émission allongée en forme de comète. L'intensité du champ jovien au niveau de l'orbite des ses satellites et l'existence autour d'eux d'une ionosphère permettent d'expliquer cette structure originale non observée sur les autres planètes magnétisées. Le satellite Io possède une vitesse orbitale plus faible que celle des lignes de champ en rotation à la même vitesse que Jupiter. Io est donc balayé par des lignes de champ dans le même sens que son mouvement. Un système de courants électriques peut s'établir par fermeture des lignes de champ sur l'ionosphère du satellite. Ce système peut provoquer la précipitation de particules chargées le long des lignes de champ en direction de Jupiter. On observe alors de façon continue deux émissions brillantes sur Jupiter au pied des lignes de champ qui balayent le satellite.

Figure 6: Vue de Jupiter suivant le même méridien de l'image de la figure 6 mais à une date différente. L'ovale auroral principal est plus brillant côté matin (à gauche) que côté soir (à droite) contrairement à l'image de la figure 5. Les

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émissions à l'intérieur de l'ovale sont moins brillantes que sur la figure 5, résultent d'une moindre activité dans la magnétosphère lointaine au moment de la réalisation de l'image.

Figure 7: Couplage électrodynamique entre Jupiter et les satellites galiléens Io, Europe et Ganymède par ordre de distance croissante de Jupiter (sans souci d'échelle). Les lignes de champ magnétique de Jupiter (en vert) « balayent » les satellites lors de la rotation de la planète, de la gauche vers le droite sur l'avant de la figure. L'anneau sur l'orbite de Io représente le tore de plasma créé par le satellite et ses volcans.

On a montré aussi que des perturbations magnétiques créant des ondes dans le plasma local pouvaient aussi expliquer la précipitation de ces particules. L'effet ne se limite pas à une émission quasi-ponctuelle. On observe une traînée dans son sillage qui peut quelque fois faire le tour de la calotte polaire jovienne. On observe aussi les émissions dues à Europe et Ganymède à plus haute latitude que celle de Io (les lignes de champ plus distantes de Jupiter à l'équateur ont leur pied plus près des pôles sur la planète). Le « pied » de Callisto, dernier satellite galiléen, est observé en bordure intérieure de l'ovale auroral. Ces émissions de « pieds » ne s'observent pas seulement dans l'hémisphère Nord. Par raison de symétrie du champ magnétique, on voit également leur contrepartie dans l'hémisphère Sud. Pourquoi ce type d'émission n'est-il pas observable sur Terre avec la Lune? Pour deux raisons essentiellement. L'intensité du champ magnétique de la Terre n'est pas assez important au niveau de l'orbite de la Lune, située à 60 rayons terrestres, pour créer une interaction suffisamment énergétique.

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Enfin la Lune ne possède pas d'ionosphère significative pour « fermer » le système de courants électriques qui doivent circuler le long des lignes de champ.

Figure 8: Hémisphère Nord de Jupiter vu le 26 novembre 1998 par le télescope spatial Hubble montrant les émissions associées à trois satellites galiléens, Io (1), Europe (2) et Ganymède (3). Crédit NASA/ESA.

Figure 9 : Jupiter vu dans l'infrarouge proche par le VLT de l'Observatoire européen austral (ESO). Les régions polaires ont été traitées avec une table de couleurs pour augmenter le contraste des aurores par rapport aux régions polaires. Crédit ESO.

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Figure 10: Images des aurores joviennes en lumière visible, côté nuit, vues par la caméra SSI à bord de la sonde Galileo. En haut l'hémisphère Nord, en bas l'hémisphère Sud. Une grille de coordonnées a été ajoutée en pointillés bleus. Les images sont représentées en niveaux de gris. Crédit NASA/ESA.

5.6. Jupiter, « station » radio planétaire

Jupiter et sa magnétosphère sont le siège d'un véritable « zoo » d'émissions radio dont seule une petite partie est reçue sur Terre à cause du filtre que joue l'ionosphère terrestre pour les fréquences inférieures à 10 MHz. Ce sont les sondes spatiales qui ont révélé toute la richesse de ces émissions dans une large gamme de fréquences (figure 9). Certaines émissions radio permettent de déterminer la « vraie » période de rotation de Jupiter, c'est à dire celle des ses couches internes, où est créé le champ magnétique de la planète (figure 11). On n'est donc plus tributaire des nuages de l'atmosphère pour déterminer la durée de la journée jovienne. La majorité de ces émissions est d'origine aurorale, c'est à dire produites par des électrons qui précipitent le long des lignes de champs originaires des régions à haute latitude (figure 13). Les longueurs d'onde couvertes par ces émissions s'étendent du domaine décamétrique (DAM) au domaine kilométrique (KOM). Le domaine décamétrique comporte deux composantes, l'une proprement aurorale provenant de l'action du vent solaire sur la magnétopause (non Io A-DAM) et l'autre, due à l'interaction de Io avec le champ magnétique jovien (Io B-DAM) (figure 12). L'étude de ces ondes permet, comme pour les images dans l'UV, de faire un diagnostic des régions de la magnétosphère et des phénomènes énergétiques qui s'y déroulent, et de faire le lien avec l'activité aurorale.

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Figure 11 : Emissions radio de Jupiter entre 3,6 kHz et 16 MHz enregistrées par la sonde Cassini lors de son survol en décembre 2000. On remarque la répétition du même motif (entouré en rouge) toutes les 10h environ, durée correspondante à la période de rotation du champ magnétique de Jupiter, donc celle des couches internes de la planète. Crédit NASA/ESA.

Figure 12: Diagramme temps-fréquence (temps horizontalement, fréquence verticalement) qui montre les principales émissions radio de Jupiter, vues par la sonde Cassini le 18 septembre 2000 alors qu'elle approchait de la planète. La figure 13 montre les régions de la magnétosphère où sont produites ces ondes. Crédit NASA/ESA.

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Figure 13 : Les régions de la magnétosphère de Jupiter d'émission des ondes radio du diagramme de la figure 12. Les gammes d'ondes non Io-DAM, HOM et KOM sont d'origine aurorale, c'est à dire produites sur des lignes de champ dont le pied se situe à haute latitude (encadré en bas à droite). L'émission Io-DAM est due à l'interaction entre Io et le champ magnétique de Jupiter. Les ondes décimétriques DIM sont émises par les ceintures de radiation près de la planète. Les ondes QP, pour quasi-périodique, ont une origine probablement aurorale.

5.7. Missions futures

Des questions se posent encore sur les aurores de Jupiter et leur lien avec la magnétosphère. En particulier, les structures à haute latitude à l'intérieur de l'ovale auroral, l'interaction avec les satellites. Plus aucune sonde ne se trouve actuellement en orbite autour de Jupiter depuis la fin de la mission Galileo en 2003. La mission Juno, une sonde US, réalisée avec une collaboration européenne, doit décoller en 2011 pour se placer en orbite autour de Jupiter un an plus tard (figure 14). Ce satellite devrait explorer pour la première fois les régions polaires joviennes. Atmosphère, champ magnétique et aurores doivent être observés durant cette mission. Le télescope spatial Hubble poursuit ses observations de Jupiter dans l'UV avec la nouvelle caméra ACS mais son orbite, trop proche de la Terre, ne permet pas une observation continue des planètes. La communauté scientifique attend avec impatience son successeur dans la décennie 2010 qui sera placé sur une orbite plus distante de la Terre. Son miroir, plus grand que celui de du télescope Hubble permettra d'observer les régions polaires des planètes géantes avec un résolution inégalée.

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Figure 14: Vue d'artiste de la sonde Juno en approche de Jupiter. On note la présence de panneaux solaires autour de la sonde pour l'alimentation électrique. C'est une première pour une sonde s'aventurant dans le Système solaire externe. Jusqu'à présent, les sondes tiraient leur énergie électrique de générateurs fonctionnant grâce à la désintégration radioactive de radio-éléments. Crédit NASA.

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7. Les anneaux auroraux de Saturne

Saturne est sûrement la planète la plus photogénique du Système solaire. Elle est certes moins colorée que sa grande voisine Jupiter, mais son système d'anneau, le seul observable depuis la Terre en lumière visible parmi les planètes géantes, en fait un objet céleste captivant pour le regard. Les sondes spatiales qui ont survolé Saturne depuis la fin des années 1970 nous offrent des images encore plus spectaculaires par les jeux d'ombres portées sur les anneaux, comme en témoigne la photo de la figure 1. Le premier survol de Saturne s'est déroulé en septembre 1979 lorsque Pioneer 11, en provenance de Jupiter qu'elle avait survolée en décembre 1974, arrive enfin près de la planète aux anneaux.

Figure 1: Saturne vue par la sonde Cassini. Crédit NASA/ESA.

La sonde dévoile les premières images en haute résolution de la planète et de ses satellites, ainsi que l'existence d'un champ magnétique dont l'axe est quasiment dirigé suivant l'axe de rotation, configuration unique parmi les planètes magnétisées du Système solaire. Il faut attendre 1980 et 1981 et le passage des sondes Voyager 1 et 2 pour observer des aurores polaires sur Saturne. En suivant le même protocole d'observation que pour Jupiter, le spectromètre ultraviolet UVS à bord de la sonde a balayé la planète pour repérer la position des émissions UV aurorales dans les régions polaires de Saturne. Les observations ont montré que les aurores prennent la forme de deux ovales centrés sur les pôles, comme pour la Terre, mais situés à plus haute latitude (80° environ) que sur notre planète. Ces émissions semblaient animées d'un mouvement de rotation partiel avec la planète

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avec un maximum d'intensité vers 9h ou 10h locales, et non vers minuit comme sur Terre. Une dépendance de l'intensité des aurores en heure locale indique une influence du vent solaire sur le mécanisme de déclenchement des aurores. Rappelons que les sous-orages à l'origine des aurores terrestres brillantes se produisent dans la queue de la magnétosphère, à l'opposé de la direction du Soleil, donc au minuit local. La présence de ce maximum d'émission aurorale en matinée locale sur Saturne n'est pas expliquée de façon satisfaisante à l'heure actuelle. Des travaux suggèrent un effet de cisaillement dans cette région de la magnétosphère entre le vent solaire et le plasma lié à Saturne qui s'écoulent en sens inverse. Les « vagues » créées par ce cisaillement induiraient la précipitation de particules chargées vers les régions aurorales.

Figure 2 : Rayonnement radio de longueur d'onde kilométrique de Saturne ou SKR enregistré en cinq jours par la sonde Cassini début janvier 2006. On remarque la répétition des émissions toutes les 10 h environ.

Le récepteur d'ondes radio à bord de Voyager 1 a enregistré des émissions radio périodiques provenant de Saturne dont la longueur d'onde est de l'ordre du kilomètre. Ce rayonnement, baptisé en conséquence SKR (Saturn Kilometric Radiation), est modulé sur une période de 10,66 heures. Son analyse a montré qu'il fonctionne comme un clignotant. Lorsqu'une certaine gamme de longitudes passe devant le secteur matin de la planète entre 8h et 11h locales, la source radio « s'allume » et envoie une bouffée d'ondes radio. L'émission, modulée par la rotation de la planète, permet donc de connaître précisément la période de rotation de Saturne sur elle-même (figure 2). L'étude des spectres UV réalisés par Voyager 1 a montré que les particules précipitées dans les régions aurorales de Saturne sont relativement peu pénétrantes dans l'atmosphère et peu énergétiques comparées à celles de Jupiter. La valeur de cette énergie étant du même ordre de grandeur que celles des particules responsables des aurores terrestres. Des observations sur quelques mois ont montré aussi que les

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aurores de Saturne sont très variables sur des périodes de quelques heures seulement et que le rayonnement SKR est fortement corrélé avec la pression du vent solaire sur la magnétosphère de la planète. Lorsque la pression du vent solaire augmente sur la magnétosphère de Saturne, on observe une augmentation du flux radio auroral. Ces résultats indiquent que les processus auroraux sur Saturne sont en partie dominés par le vent solaire comme sur Terre, mais avec une influence « locale » du fait de la rotation partielle des émissions UV avec la planète.

Figure 3: L'une des premières images du pôle Nord de Saturne dans l'UV avec le télescope spatial Hubble en 1992. Une table de couleur a été ajoutée pour faire ressortir les émissions aurorales (en jaune-orangé) ainsi qu'une grille de coordonnées géographiques pour les localiser. Crédit NASA/ESA.

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Figure 4: Saturne vue dans l'UV par la caméra planétaire à grand champ (WFPC2) à bord du télescope spatial Hubble en 1994. L'image est représentée avec une table de couleur. L'ovale auroral est visible autour du pôle Nord. La pixellisation de l'image est due à la moins bonne résolution de la caméra, comparée à celle des images des figures 3 et 5. Crédit NASA/ESA.

Figure 5: Saturne vue dans l'UV par la caméra STIS à bord du télescope spatial Hubble en 2001 avec une table de couleur. On remarque la forme en spirale de l'ovale auroral Sud. L'amélioration de la qualité des images est visible lorsqu'on compare les figures précédentes. Le mouvement orbital de Saturne autour du Soleil (en 30 ans) et l'inclinaison de son axe de rotation a permis de passer d'une vue de l'hémisphère Nord à l'hémisphère Sud de 1992 à 2001. Crédit NASA/ESA.

Comme pour Jupiter, il faut attendre le début des années 1990 pour obtenir de nouvelles observations UV de Saturne avec le télescope spatial Hubble et, à partir de 2004, avec la sonde Cassini pour l'étude du rayonnement radio, inobservable depuis le sol terrestre. Les premières images sont réalisées avec la caméra à objets faibles (FOC) dès 1992 puis avec la caméra planétaire à grand champ (WFPC2) de 1994 à 1997 et enfin avec la caméra STIS jusqu'en 2004 qui conjugue haute résolution et excellente sensibilité. Elles révèlent un simple ovale très fin entourant chaque pôle situé entre 70° et 80° de latitude. Cette morphologie les fait plus ressembler aux aurores terrestres qu'aux aurores de Jupiter, beaucoup plus complexes. Si on remonte les lignes de champ magnétique en partant de l'ovale auroral jusque dans le plan

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équatorial, on aboutit à une distance d'une vingtaine de rayons de Saturne, où se situerait la source des particules précipitées à l'origine des émissions aurorales. C'est beaucoup plus loin que ce qu'on pensait dans les années 1980 où l'on suspectait les satellites de glace, situés entre 3 et 10 rayons de Saturne de la planète, d'être la source aurorale (voir figure 6).

Figure 6: Coupe de la magnétosphère de Saturne dans le plan méridien midi-minuit. Saturne et ses premiers gros satellites (Mimas, Encelade, Thétys, Dioné, Rhéa et Titan dans l'ordre en partant de Saturne) ne sont pas à la même échelle.

Titan, le plus grand satellite de Saturne, gravitant à une distance de 20 rayons saturniens, peut contribuer à alimenter la source de plasma par échappement d'une partie des espèces chimiques de son atmosphère dense. Mais on situe plutôt la source des particules aurorales à la limite des lignes de champ magnétique fermées en rotation avec Saturne et les lignes ouvertes sur le vent solaire. L'effet de cisaillement du plasma le long de cette limite que nous avons évoqué plus haut permet de prédire la précipitation d'électrons vers Saturne avec l'énergie suffisante pour produire l'émission aurorale observée sur les images UV, soit une puissance de 1011 watts par hémisphère. C'est du même ordre de grandeur que les aurores terrestres les plus brillantes, mais environ mille fois moins que les aurores de Jupiter. Ce mécanisme permet également

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d'expliquer que l'ovale soit plus brillant et plus étroit côté matin (partie gauche de l'ovale) que côté soir (partie droite). Dans la majorité des images UV obtenues jusqu'à présent, l'ovale adopte une forme assez régulière mais il peut aussi s'enrouler en forme de spirale comme on l'observe aussi quelquefois pour les ovales auroraux terrestres (voir figure 5). Ce sont les conditions du vent solaire au niveau de l'orbite de Saturne qui sont à l'origine de ces changements de forme. Ceux-ci peuvent devenir plus spectaculaires comme le montre la figure 7 où l'on voit évoluer l'ovale auroral Sud sur une sélection d'images réalisées à quelques jours d'intervalle en janvier 2004, lors de l'approche de la sonde Cassini.

Figure 7: Saturne vue dans l'UV par la caméra STIS sur plusieurs jours non consécutifs de janvier 2004 alors que la sonde Cassini était en approche de la

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planète. On remarque l'évolution spectaculaire de l'ovale auroral dû aux conditions variables du vent solaire pendant la même période. L'ovale disparaît même complètement sur l'avant dernière image pour faire place à une émission brillante de la calotte polaire. Crédit NASA/ESA.

A partir de mesures des paramètres du vent solaire faites par la sonde, des chercheurs ont montré qu'un choc s'est produit sur la magnétosphère de Saturne en fin de journée le 26 janvier 2004 avec une incertitude de quelques heures. En réponse à cette perturbation, on observe une contraction de l'ovale auroral et son affaiblissement en intensité tandis qu'une émission brillante apparaît à l'intérieur de la calotte polaire (avant dernière image de la figure 7). Quasi simultanément, le rayonnement radio kilométrique s'est intensifié d'un facteur 10. Deux jours après, l'ovale reprend son aspect normal après un retour aux conditions habituelles du vent solaire (dernière image de la figure 7). Par comparaison, la dynamique de l'ovale auroral de Saturne est quasi opposée à celui de la Terre dans des conditions sans doute similaires, car sur Terre, l'ovale s'étend à plus basse latitude lorsqu'il augmente en intensité.

Figure 8: Conséquence d'un orage magnétique sur Saturne. Image UV réalisée le 7 décembre 2000 par la caméra STIS à bord de Hubble. Un choc dans le vent solaire a perturbé la magnétosphère de Saturne engendrant un orage magnétique à l'origine de l'émission brillante observée à l'intérieur de l'ovale auoral. Crédit NASA/ESA.

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Ces perturbations peuvent aussi se produire sans changement notable de la forme de l'ovale auroral, comme nous l'avons observé sur deux images réalisées en décembre 2000. Comme aucune sonde spatiale n'était présente sur place au moment où les images ont été réalisées, il a fallu utiliser les mesures du vent solaire au niveau de l'orbite terrestre et un code numérique pour les « propager » jusqu'à l'orbite de Saturne. Le résultat de la simulation donne une arrivée sur Saturne entre le 1er et le 7 décembre 2000. L'arrivée de ce choc sur la magnétosphère de la planète a provoqué l'équivalent d'un orage magnétique comme sur Terre. En réponse à cette perturbation, on observe une émission brillante à l'intérieur de l'ovale auroral (figure 8). Contrairement à la Terre, cette émission n'apparaît pas au minuit local, c'est à dire sur le côté opposé à la face éclairée par le Soleil, mais plutôt un peu avant le midi local, sur la partie gauche de l'ovale pour l'observateur. Ces différences morphologiques et dynamiques des aurores sont une signature des conditions physiques dans la magnétosphère de Saturne différentes de celle de la Terre, conditions qui restent encore à préciser. Lors de l'étude de la propagation de ce choc dans le vent solaire, nous avons constaté qu'il fût à l'origine d'intenses émissions aurorales sur Terre, puis sur Jupiter avant d'arriver jusqu'à Saturne. L'étude de la magnétosphère de Saturne se poursuit pour plusieurs années encore avec la sonde Cassini en liaison avec le télescope spatial Hubble lors de campagnes d'observations.

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8. Uranus et Neptune: deux géantes aux aurores bien discrètes

8.1. La magnétosphère « exotique » d'Uranus

Uranus, avant-dernière planète gazeuse du Système solaire, présente une caractéristique insolite. Son axe de rotation est presque contenu dans le plan de son orbite autour du Soleil. Conséquence étonnante, un observateur situé près d'un de ses pôles ne verrait le Soleil que durant la moitié de la durée de révolution d'Uranus (figure 1). Cette dernière étant de 86 années terrestres, la nuit durerait donc 43 ans pour cet observateur!

Figure 1: Orbite d'Uranus autour du Soleil (Uranus et le Soleil ne sont pas à l'échelle). L'axe de rotation de la planète sur elle-même est représenté par la flèche jaune. Le point rouge représente un observateur imaginaire au pôle Nord. En 1, le Soleil se couche pour l'observateur, la nuit commence. En 2, la planète a parcouru un quart de son orbite, il est minuit pour l'observateur. En 3, le Soleil se lève, la nuit s'achève après une demi-orbite. La durée d'une orbite étant de 86 années terrestres, la nuit uranienne, ainsi que le jour, durent 43 ans chacun pour un observateur au pôle.

C'est la sonde Voyager 2 qui a révélé l'existence d'un champ magnétique autour d'Uranus lors du survol de la planète en janvier 1986. Si des prédictions avaient été faites sur l'intensité de ce champ, en revanche son orientation fut une surprise. En effet, l'axe du dipôle équivalent fait un angle important (59°) avec l'axe de rotation contrairement à la Terre, Jupiter et Saturne. Il est d'autre part fortement excentré par rapport au

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centre de la planète. Lorsque Uranus tourne sur elle-même, en 17,24 heures, l'axe de son champ magnétique décrit un cône qui, à l'époque du survol de Voyager 2 en janvier 1986, était ouvert en direction du Soleil.

Figure 2: Uranus, ses anneaux et quelques un de ses satellites vus par le télescope de 3,60 m de l'ESO (Observatoire Européen Austral) dans l'infrarouge (bande H à 1,6 µm) représentée avec une table de couleur pour augmenter le contraste. Crédit ESO.

La magnétosphère d'Uranus présente donc une configuration « exotique » par rapport aux autres planètes magnétisées (figure 3). On y retrouve les mêmes structures que dans la magnétosphère terrestre, à l'exception des ceintures de radiations. Conséquence de l'orientation du champ, la queue de la magnétosphère, formée par les lignes de champ ouvertes, effectue une rotation autour d'une direction proche de l'axe Soleil-Uranus. Les instruments de le sonde ont montré que cette magnétosphère était peu peuplée en plasma. Hormis la haute atmosphère d'Uranus, susceptible d'alimenter en atomes et ions la magnétosphère, il n'y a autour de la planète que de petits satellites de glace qui fournissent des particules par criblage de leur surface par les ions de la magnétosphère. Cette alimentation est d'ailleurs contrariée par la position de l'orbite de ces satellites qui n'est pas sur l'équateur magnétique (figure 3). La capture des ions par le champ est moins efficace que si les satellites orbitaient dans le plan de l'équateur magnétique. La configuration de la magnétosphère d'Uranus doit subir des variations saisonnières importantes car depuis l'époque du survol de Voyager 2, la planète a parcouru presque un quart de son orbite. En ce début de 21ème siècle, son axe de rotation est pratiquement perpendiculaire à la direction du Soleil. On retrouve alors une configuration plus proche de celle de la

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Terre, à l'exception du mouvement de précession du l'axe du champ magnétique.

Figure 3: La magnétosphère d'Uranus à l'époque du survol de Voyager 2 (janvier 1986). L'axe de rotation de la planète était presque dirigé vers le Soleil. L'axe du champ magnétique, dont l'axe est incliné de 59° par rapport à l'axe de rotation, décrit un cône lorsque que la planète tourne sur elle même, en 17,24 heures (rotation des couches internes). Les orbites des satellites (une seule a été représentée en jaune) sont dans un plan perpendiculaire à l'axe de rotation d'Uranus.

8.2. Les aurores uraniennes

Le spectroscope UV de Voyager a observé l'hémisphère nocturne d'Uranus pendant 32 heures alors qu'elle s'éloignait de la planète en direction de Neptune, son ultime étape. La fente d'entrée de l'instrument a balayé la planète suivant les méridiens pour enregistrer les émissions UV. La carte obtenue montre une absence d'ovales auroraux, au contraire de la Terre, Jupiter ou Saturne (figure 4). Les émissions observées sont cependant localisées près des pôles magnétiques. Au Nord, les structures aurorales rayonnent entre deux et quatre fois plus qu'au Sud du fait de la plus faible intensité du champ magnétique. En effet, le taux de précipitation des particules le long de lignes de champ asymétriques, comme c'est le cas avec le champ fortement excentré

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d'Uranus, est inversement proportionnel à l'intensité du champ. Des émissions radio de longueur d'onde kilométrique ont également été observées provenant des régions d'émission UV, particulièrement près du pôle Sud. Les particules chargées à l'origine des émissions aurorales UV semblent provenir de la magnétosphère proche, à quelques rayons uraniens. Il n'est pas exclu qu'elles proviennent de plus loin et qu'elles migrent plus près de la planète avant de précipiter. Le couplage entre le vent solaire et le champ de la planète doit aussi jouer un rôle non négligeable comme c'est la cas sur Terre. Des évènements de type « sous-orage », analogues à ceux dans la queue de la magnétosphère terrestre et producteurs d'aurores brillantes, ont été observés par Voyager 2. Depuis 1997, des images d'Uranus dans l'UV ont été réalisées par les caméras à bord du télescope spatial Hubble mais aucune émission aurorale n'y a été observée. Leur contraste avec l'émission UV du disque de la planète dû au rayonnement solaire réfléchi doit être trop faible pour une observation de l'hémisphère éclairé de la planète. Aucune mission spatiale de ré-exploration d'Uranus n'est programmée dans un avenir proche.

Figure 4: Carte géographique des émissions UV de l'hémisphère nocturne d'Uranus observées par la sonde Voyager 2. Les méridiens sont ceux du Système de Longitude d'Uranus (SLU). Les deux croix rouges indiquent les positions des deux pôles magnétiques Nord (60° de longitude et 5° de latitude) et Sud (230° de longitude et -30° de latitude) pour le modèle de champ déduit des mesures de la sonde. L'intensité des émissions est indiquée par une table de couleur, du noir (pas d'émissions) au blanc (émission intense). Les courbes blanches sont des courbes de niveau du rayonnement détecté. Avec l'autorisation de B.R. Sandel, F. Herbert et A.J. Dessler.

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8.3. La magnétosphère de Neptune et les geysers de Triton

Voyager 2 a survolé Neptune à la fin août 1989 avant de quitter définitivement le Système solaire. Les connaissances que nous avons actuellement de l'environnement magnétisé de cette planète sont dues à cette sonde, comme pour Uranus. Elle a révélé, entre autre, l'existence d'un champ magnétique, donc d'une magnétosphère, dont l'orientation est inhabituelle par rapport à l'axe de rotation de la planète. Si ce dernier présente une direction proche de la perpendiculaire au plan de sa trajectoire, comme la Terre, Jupiter ou Saturne, l'axe du dipôle magnétique équivalent fait un angle de 47° avec l'axe des pôles géographiques. Il est d'autre part fortement excentré, d'un quart de rayon planétaire, valeur la plus élevée des planètes magnétisées. Lorsque la planète tourne sur elle-même (en 16 heures), l'axe du champ magnétique peut être dirigé soit vers le Soleil, soit presque perpendiculairement à la direction de ce dernier (figures 5 a et b). C'est dans la première configuration que se trouvait le champ de Neptune lorsque Voyager 2 a franchi la magnétopause. La sonde est donc entrée dans la magnétosphère par le cornet polaire Sud.

Figure 5a: Vues en coupe de la magnétosphère de Neptune lorsque l'axe du champ est quasiment dans la direction du Soleil. Neptune et son satellite Triton ne sont pas à l'échelle. Les points bleus sur la trajectoire de Voyager 2 indiquent les positions de la sonde où la magnétosphère était en configuration a ou b.

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Figure 5b: Une demi-rotation plus tard (8 heures), l'axe du champ magnétique devient presque perpendiculaire à la direction solaire. La configuration de la magnétosphère de Neptune devient alors analogue à celles de la Terre, Jupiter et Saturne.

La magnétosphère de Neptune est la moins peuplée en particules chargées comparativement aux autres planètes. La sonde a identifié deux composantes dans le plasma magnétosphérique: des ions « légers », de numéro atomique inférieur à 5 (probablement, hydrogène et hélium en majorité) et des ions de numéro atomique plus élevé dont le constituant majoritaire semble être l'ion azote N+. Ce dernier est relâché par Triton qui possède une atmosphère et une ionosphère ténues entretenues par du cryovolcanisme, c'est à dire une éjection de gaz liquéfiés en provenance du sous-sol. Une sorte de geyser d'azote liquide a été observé par Voyager lors du survol du satellite. Les mesures montrent que Triton éjecterait de l'ordre de 200 g d'azote et d'hydrogène par seconde dans son ionosphère (figure 2). Une fois ionisé par le rayonnement solaire, ces éléments sont capturés par le champ magnétique de Neptune et alimentent le disque de plasma équatorial (figure 3). Ce dernier est toutefois le moins peuplé en ions de toutes les magnétosphères du Système solaire.

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8.4. Les émissions aurorales UV neptuniennes

Le spectromètre UV de Voyager a observé la face nocturne de Neptune alors que la sonde s'éloignait de la planète. Ses observations ont permis de dresser la carte des émissions UV sur la plus grande partie de l'hémisphère plongé dans la nuit (figure 8). Notons que cette carte ne représente qu'une vue « instantanée » des émissions UV à la date des observations de Voyager et ne constitue pas une description permanente. On distingue deux régions d'émissions sur cette carte. La première, centrée sur le méridien 30°, montre une répartition presque uniforme sur toutes les latitudes observées. On n'observe donc pas d'ovale auroral comme sur Terre, Jupiter ou Saturne.

Figure 6: Surface de Triton vue par Voyager 2 en 1989. Les taches sombres allongées pourraient être des dépôts de matière organique éjectés avec de l'azote liquide contenu dans le sous-sol du satellite. Crédit NASA.

D'après le modèle de champ magnétique réalisé à partir de mesures de Voyager et la géométrie d'observation, on voit que les lignes de champ magnétique qui partent de cette région ont leur autre extrémité sur le côté jour de Neptune (figure 5 A) . Des observateurs ont suggéré que des électrons produits par ionisation d'atomes de la haute atmosphère côté jour, capturés sur les lignes de champ, venaient précipiter à l'autre extrémité des lignes côté nuit pour produire ces émissions diffuses. La deuxième région, centrée sur méridien 240°, montre une émission plus

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intense localisée entre 20° et 55° de latitude Sud. La géométrie d'observation montre que les lignes de champ de la région observée ont majoritairement leurs deux extrémités côté nuit (figure 5 B). Les particules à l'origine des émissions UV ne peuvent être produites par le même mécanisme que précédemment. Des auteurs pensent qu'il s'agit là d'émissions aurorales produites par précipitation de particules de la magnétosphère. Cette interprétation s'appuie sur l'observation par la sonde de flux de protons et d'électrons ainsi que d'ondes radio associées à des précipitations aurorales lors de son survol de l'hémisphère Nord de la planète.

Figure 7: Les arcs de plasma de Neptune. L'orbite de Triton (ellipse verte) n'est pas dans le même plan que l'équateur magnétique de Neptune (ellipse jaune hachurée), où se situe le disque de plasma. Le plasma créé autour du satellite est capturé par l'équateur magnétique lorsque ce dernier intercepte Triton par le jeu de la rotation de Neptune. Il se forme alors deux arcs de plasma qui alimentent le disque équatorial en ions azote et hydrogène.

Pour être certain de la nature aurorale de cette émission, il aurait fallu observer sa contrepartie dans l'hémisphère Nord. Mais ce dernier était inobservable par la sonde pendant le balayage de la planète par le spectrographe. La puissance rayonnée par ces émissions aurorales UV a été estimée à 108 W environ soit un million de fois moins que les aurores de Jupiter. Elle est aussi une centaine de fois plus faible que la puissance reçue sur Neptune par le rayonnement solaire UV, ce qui rend

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l'observation télescopique depuis l'orbite terrestre très délicate. Les observations avec le télescope spatial Hubble n'ont rien montré à ce jour et l'exploration in-situ de Neptune par une sonde n'est pas programmée par les agences spatiales.

Figure 8: Carte 3D géographique des émissions UV nocturnes de Neptune vues par Voyager 2. Si toutes les longitudes sont couvertes, le balayage de l'hémisphère nocturne a été découpé en 3 secteurs qui vont de 55 degrés Sud à 50 degrés Nord. Pendant les observations, la planète a effectué un tour et un quart sur elle-même. La région de longitudes de 0° à 60° a donc été observée deux fois. Avec l'autorisation de B.R. Sandel, F. Herbert et A.J. Dessler.

Figures 9 A et B: Géométrie d'observation des émissions UV de Neptune par Voyager 2. La sonde a observé le côté nuit de la planète alors qu'elle s'éloignait d'elle par le Sud. En A, la longitude moyenne du méridien d'observation est 60°, l'axe du champ magnétique est alors presque dans la direction du Soleil (à gauche de la figure). En B, la longitude moyenne du méridien d'observation est de 240°, l'axe du champ est presque perpendiculaire à la direction solaire. En pointillés verts, l'équateur géographique.

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9. A la recherche des aurores exoplanétaires

La découverte astronomique majeure de la fin du 20ème siècle est sans doute la détection en 1995 de la première planète en orbite autour d'une autre étoile que le Soleil. L'existence de planètes autour d'autres étoiles a longtemps été source de spéculation et leur recherche s'est avérée très délicate et longtemps infructueuse. En lumière visible, une planète comme Jupiter rayonne un milliard de fois moins d'énergie que le Soleil. Pour « voir » une planète en orbite autour d'une étoile proche, il faut donc occulter la lumière de cette dernière. Cette technique est difficile à mettre en oeuvre du fait de la distance qui nous sépare des étoiles mêmes les plus proches. Aussi la détection des « exoplanètes » s'est faite jusqu'à présent presque essentiellement par des méthodes indirectes.

Figure 1: Flux du rayonnement radio reçu sur Terre (en jansky, 1 jansky = 10 -26

watt par mètre carré et par hertz. ) émis par les planètes du Système solaire

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(radio auroral) en fonction de la fréquence (en mégahertz) et quelques objets célestes émettant des ondes radio (fond du ciel, restes de supernova, quasar...). Les deux courbes en bas au centre montrent le rayonnement des sursauts radio de Jupiter multiplié par 1000 et 100 000 si on l'observait depuis une distance de 10 parsec (1 parsec = 3,26 années-lumière). Les courbes en lignes brisées (traits pleins ou tirets) représentent la limite de sensibilité pour la détection d'exoplanètes des radiotélescopes UTR2 (Ukraine), VLA (USA) et GMRT (Inde) actuellement en service, ainsi que LOFAR, le futur réseau européen métrique et décamétrique. Les rectangles gris indiquent approximativement le flux radio qu'émettraient quelques exoplanètes connues (τ Bootis, ρ Cancri et 70 Virginis) calculé à partir de lois d'échelle. La ligne verticale en tirets indique la fréquence coupure de l'ionosphère terrestre. Celle-ci réfléchit vers l'espace les ondes électromagnétiques de fréquence inférieure à 10 MHz et empêche leur réception au sol.

A d'autres longueurs d'onde, en radio par exemple, le contraste entre étoile et planètes est beaucoup plus favorable. Dans le domaine décamétrique (fréquence de l'ordre d'une centaine de mégahertz), le rayonnement radio auroral émis par les planètes est presque du même ordre de grandeur que celui émis par le Soleil (figure 1).

Figure 2: Puissance radio émise par les planètes du Système solaire en fonction de la puissance magnétique ou cinétique reçue (en watt) sur leur magnétosphère par impact du vent solaire. Les planètes sont indiquées par leurs initiales. Les lettres C, G et I désignent Callisto, Ganymède et Io, les satellites de Jupiter dont l'interaction électromagnétique avec le champ magnétique jovien produit des

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émissions radio. Les points du graphe sont ajustés par une droite (en tirets) qui permet d'extrapoler la puissance radio émise par les exoplanètes géantes dites « Jupiters chauds » en orbite très proche autour de leur étoile parente.

Pour les planètes du Système solaire, la puissance radio qu'elles émettent est proportionnelle à la puissance qu'elles reçoivent sur leur magnétosphère par l'impact du vent solaire (figure 2). En extrapolant cette loi d'échelle pour les exoplanètes géantes détectées jusqu'à présent, la réception du rayonnement radio auroral qu'elles émettent devient possible depuis la Terre à l'aide de radiotélescopes actuellement en service ou en cours de réalisation. Cette détection présente cependant quelques difficultés. Le première est liée à leur faible résolution angulaire. Celle-ci est au mieux de quelques degrés sur le ciel. Le champ stellaire vu par l'instrument comporte donc une grande quantité de corps célestes dont il faut éliminer la contribution. La deuxième est l'émission du fond du ciel. Alors qu'en lumière visible, le ciel nocturne est sombre, même lorsqu'on observe la Voie lactée, en radio, il est très brillant. Cet éclat s'explique par le rayonnement produit par les électrons qui spiralent sur les lignes du champ magnétique de notre Galaxie. Enfin, il faut aussi éliminer les parasites d'origine humaine (stations de radio, CB...) ou ceux de l'ionosphère terrestre. Dans ces deux derniers cas, on les minimise en observant la nuit.

Figure 3: Une partie du réseau décamétrique UTR2 près de Kharkov en Ukraine. Il comporte deux séries d'antennes disposées en forme de T dont les dimensions sont de 2 km sur 900 m. L'épaisseur des deux branches du T est de 50 m. Crédit Jean-Matthias Griessmeier.

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Les radiotélescopes actuellement en service, UTR2 en Ukraine (figure 3), et VLA (USA) sont capables de détecter les émissions de « Jupiters chauds » 100 000 fois plus puissants que notre Jupiter, à une distance de 36 années-lumière. Les premières observations réalisées n'ont pour le moment donné aucun résultat mais les recherches se poursuivent. Le projet néerlando-européen LOFAR (Low Frenquency Array) de réseau métrique et décamétrique de radiotélescopes en cours de construction au moment où nous rédigeons ces lignes, dont la sensibilité est meilleure que les instruments précédents, devrait accroître les chances de détection (figure 4).

Figure 4: Le réseau LOFAR est formé d'un réseau d'antennes disposées suivant trois branches en spirale. Ce réseau s'étend sur plusieurs pays d'Europe occidentale: Pays-bas, France, Belgique, Grande-Bretagne. Crédit ASTRON.

La détection d'émissions radio basse fréquence d'une exoplanète permet d'accéder à ses caractéristiques: existence d'un champ magnétique propre et son intensité, période de rotation. Elle permettrait aussi de comparer les conditions physiques de sa magnétosphère avec celle des planètes du Système solaire. Quant à l'imagerie directe des aurores exoplanétaires, elle n'est pas envisageable dans un avenir proche, aussi je laisse aux artistes le soin de puiser dans leur imagination pour mettre en images ces autres mondes et leurs aurores polaires.

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Aurores polaires sur une exoplanète avec un satellite et son étoile parente. Peinture de Marie Auvinet (2006).

Aurores polaires sur une exoplanète avec deux satellites, peinture de Marie Auvinet (2006).

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10. Lexique

Ceintures de radiations: Région de la magnétosphère proche où des particules chargées sont piégées sur des lignes de champ magnétiques fermées le long desquelles les particules ont un mouvement de rebond d'un pôle à l'autre. Courants alignés: Courants électriques qui s'établissent le long des lignes de champ magnétique d'une planète susceptibles d'accélérer les particules chargés vers les régions de précipitation aurorale. Ionosphère: La plus haute région de l'atmosphère d'une planète. Les atomes ou molécules qui la composent sont ionisiés sous l'action du rayonnement UV du Soleil. Sur Terre, l'ionosphère commence aux environ de 100 km d'altitude.I.R.: Infrarouge. Domaine des ondes électromagnétiques de longueur d'onde comprise entre 800 nm et 1 mm. Longueur d'onde: Périodicité spatiale d'une onde mécanique ou électromagnétique. Distance qui sépare deux points de même vibration d'une onde. Magnétopause: Région de la magnétosphère d'une planète qui marque la frontière entre son champ magnétique et celui transporté par le vent solaire.Magnétosphère: Région de l'espace autour d'une planète occupée par les lignes de son champ magnétique. Plasma: Gaz dans lequel les atomes ou molécules qui le composent sont ionisés, c'est à dire qu'ils ont perdu un ou plusieurs électrons. La quasi totalité de la matière dans l'Univers est sous forme de plasma. Points miroirs: Points de rebroussement d'une particule chargée en mouvement le long d'une ligne de champ magnétique. Point subsolaire:Point en amont d'une magnétosphère planétaire où s'équilibrent le champ magnétique de la planète et celui du vent solaire. Méridien central: Méridien situé dans la ligne de visée d'un observateur. Résolution angulaire: c'est le plus petit angle visible à travers un instrument d'observation. U.V.: Ultraviolet. Domaine des ondes électromagnétiques de longueur d'onde comprise entre 10 nm et 400 nm.

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Vent solaire: Flux de particules chargées, essentiellement des protons, des électrons et des noyaux d'hélium émis de façon permanente par le Soleil dans tout l'espace interplanétaire. Il transporte aussi un champ magnétique.

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11. Bibliographie et liens internet

Quelques ouvrages

Pour approfondir le sujet, les lecteurs pourront se tourner vers les ouvrages suivants plus spécialisés sur telle ou telle partie de l'interaction entre le Soleil et les planètes mais toujours accessibles avec une culture scientifique « moyenne ».

Le Système solaire, ouvrage collectif, EDP Sciences, CNRS Editions.

Le Soleil et ses relations avec la Terre, par K. S. Lang, Springer-Verlag, 1997.

Du Soleil à la Terre, J. Lilensten & P.L. Blelly, EDP Sciences, Grenoble sciences, 2000 Sous les feux du Soleil, J. Lilensten & J. Bornarel, EDP Sciences, Grenoble sciences, 2001.

Liens internet

Le réseau mondial regorge de sites consacrés aux aurores polaires dont certains sont richement illustrés de photos de passionnés du phénomène. Une large majorité d'entre eux est en langue anglaise mais cela n'empêche pas d'apprécier leurs photos spectaculaires d'aurores.

Des images en direct des aurores terrestres vues depuis l'espace: http://www-pi.physics.uiowa.edu/vis/

Une galerie francophone de photos d'aurores polaires:http://www.auroresboreales.com/

Observation d'aurores en direct sur le site AuroraMAX de l'Agence spatiale canadienne:http://www.asc-csa.gc.ca/fra/astronomie/auroramax/default.asp

Le site US de météo de l'espace qui héberge une très belle galerie d'images d'aurores terrestres depuis le sol. http://www.spaceweather.com/ Le site du télescope spatial Hubble présente quelques images d'aurores de Jupiter et Saturne dans la rubrique Système solaire:

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http://hubblesite.org/gallery/album/solar_system_collection/Nos pages sur le site de l'observatoire de Paris où l'on retrouve la majorité des images et illustrations de ce livre: http://www.lesia.obspm.fr/plasma/site_aurores_nouv/ Un site US grand public avec de belles photos d'aurores terrestres et des animations:http://www.exploratorium.edu/learning_studio/auroras/

Un film montrant la « danse » des aurores au dessus de Tromso en Norvège:http://vimeo.com/16917950

Le champ magnétique terrestre en animation est visible sur ce site de la NASA:http://geo.phys.spbu.ru/~tsyganenko/modeling.html

Deux animations sur les sous-orages terrestres: http://luth.obspm.fr/~luthier/mottez/intro_physique_spatiale/concepts/sous-orage/sous-orage-magnetique.html

http://science.nasa.gov/science-news/science-at-nasa/2010/27jul_spacequakes/

Activités aurorale et géomagnétique sont surveillées sur le site suivant qui donne également un classement des orages magnétiques terrestres et de leurs effets sur les activités humaines: http://www.mikezulu.com/solar.htm

Un orage magnétique de grande intensité observé en 1859:http://science.nasa.gov/headlines/y2008/06may_carringtonflare.htm

Des informations complémentaires sur les différentes missions et sondes spatiales citées dans ce livre sont disponibles sur le site de la Nasa:http://www.nasa.gov/missions/index.html

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Table des matières

Avant propos …..................................................................................p. 1

1. Petite histoire des aurores polaires …............................................p. 3

2. Lumières aurorales …....................................................................p. 11

3. De la boussole à la magnétosphère …..........................................p. 21

4. Aurores terrestres ..........................................................................p. 29

5. Les aurores singulières de Mercure, Vénus et Mars ….................p. 37

6. Jupiter: des aurores polaires à la puissance 10 …........................p. 41

7. Les anneaux auroraux de Saturne …............................................p. 55

8. Uranus et Neptune: deux géantes aux aurores bien discrètes......p. 63

9. A la recherche des aurores exoplanétaires …...............................p. 73

10. Lexique …....................................................................................p. 79

11. Bibliographie et liens internet …...................................................p. 81

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Rideaux de lumière dansante rouge, verte ou blanche dans le ciel noir, les aurores polaires, boréales et australes, forment un phénomène atmosphérique spectaculaire quasi quotidien sous les hautes latitudes de notre Terre. Les aurores ont inspiré bien des légendes aux peuples qui les ont observées mais c'est à la fin du 18ème siècle que commence leur étude scientifique avec la découverte du lien entre l'activité du Soleil et les aurores. L'âge de l'espace, avec l'envoi des premiers satellites artificiels autour de la Terre à la fin des années 1950, marquera les plus grand progrès dans le domaine en révélant l'interaction entre le vent solaire et le champ magnétique de la Terre, réservoir des particules chargées dont la précipitation vers l'atmosphère produit les aurores polaires. A la fin des années 1970, des sondes sont envoyées vers les planètes géantes du Système solaire et leurs observations ont permis de découvrir que toutes présentaient des aurores polaires. Ces découvertes ont suscité l'envoi d'orbiteurs autour de Jupiter et Saturne dès la fin des années 1980 pour étudier l'environnement de ces planètes. L'objectif de ce livre est de présenter un résumé pour le plus large public des découvertes récentes sur les aurores polaires. En partant de l'atmosphère brûlante du Soleil, j'invite le lecteur à parcourir le Système solaire à bord d'une sonde imaginaire qui nous fera découvrir les fascinantes lumières aurorales des planètes.

L'auteur, professeur de sciences physiques, a été doctorant à l'Institut d'astrophysique spatial à Orsay à la fin des années 1990 puis chercheur associé à l'Observatoire de Paris-Meudon. Il a collaboré avec les équipes nationales et internationales qui ont mené des observations des planètes Jupiter et Saturne avec le télescope spatial Hubble dans les décennies 1990-2000 en liaison avec les sondes Galileo et Cassini-Huygens mises en orbite autour de ces deux planètes.

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