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r e v u e n e u r o l o g i q u e 1 6 4 ( 2 0 0 8 ) 1 0 5 7 – 1 0 6 2
XIIe Journees des maladies du systeme nerveux peripherique
Axones et cellules de Schwann. . . si loin, si proches
Axon and Schwann cells. . . so far away, so close
P.-M. Martin a,b, C. Cifuentes-Diaz a,b, M. Garcia a,b, L. Goutebroze a,b, J.-A. Girault a,*,b
a Inserm UMR-S 839, institut du Fer-a-Moulin, 17, rue du Fer-a-Moulin, 75005 Paris, FrancebUniversite Pierre-et-Marie-Curie (UPMC Paris-6), Paris, France
i n f o a r t i c l e
Mots cles :
Axone
Cellule de Schwann
Myeline
Nœud de Ranvier
Paranœud
Juxtaparanœud
Keywords:
Axon
Schwann cell
Myelin
Node of Ranvier
Paranode
Juxtaparanode
r e s u m e
La myelinisation a represente une etape majeure dans l’evolution du systeme nerveux.
Apparue chez les vertebres avec les poissons a machoire, elle permet la propagation rapide
et sure du potentiel d’action pour un cout energetique limite et sans augmentation deme-
suree du diametre axonal. Dans le systeme nerveux peripherique des mammiferes, la
myelinisation resulte de l’etroite interaction entre la cellule de Schwann et l’axone qui
determine des domaines tres bien differencies a la surface de celui-ci. Les determinants
moleculaires de ces interactions commencent a etre bien identifies. Leur connaissance
fournit un cadre precis pour interpreter les perturbations rencontrees en pathologie. Cette
revue resume l’etat actuel des connaissances dans ce domaine.
# 2008 Publie par Elsevier Masson SAS.
a b s t r a c t
Myelination was a major step in the evolution of the nervous system. Appearing first in jaw
fish, myelination allows the fast and secure propagation of action potentials at a low
energetic cost, and without exaggerated increase in axonal diameter. In the peripheral
nervous system of mammals, myelination results from the tight interactions between
Schwann cells and axons, leading to the formation of highly differentiated domains along
the axon. The molecular determinants of these interactions are starting to be well identified.
Their understanding provides a precise framework to interpret the defects, which occur in
tances. This review summarizes the present state of knowledge
teractions in peripheral nerves.
pathological circums
concerning axoglial in
# 2008 Publie par Elsevier Masson SAS.
La myelinisation des fibres nerveuses peripheriques permet la
propagation rapide et sure du potentiel d’action pour un cout
energetique limite, sans augmentation demesuree du diame-
tre axonal. Elle concerne les fibres de differents diametres (de 1
a 20 mm en general). Les cellules de Schwann, alignees le long
* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (J.-A. Girault).
0035-3787/$ – see front matter # 2008 Publie par Elsevier Masson SAdoi:10.1016/j.neurol.2008.10.003
de l’axone, sont separees les unes des autres par les nœuds de
Ranvier, regions cles ou sont enrichis les canaux sodiques
(Fig. 1). Ces canaux sont les composants fonctionnellement
essentiels de l’axone, associes a des proteines transmembra-
naires et cytoplasmiques. Les regions nodales sont bordees par
S.
Fig. 1 – Representation schematique des domaines
axogliaux entourant les nœuds de Ranvier dans les fibres
peripheriques. L’emplacement des principaux types de
canaux Na+ et K+ est indique. Seules quelques boucles
paranodales sont dessinees. Les paranœuds sont
caracterises par la presence de bandes transversales
visibles en microscopie electronique.
Schematic representation of axoglial domains at nodes of
Ranvier in peripheral nerves. The location of the main types of
K+ and Na+ channels is indicated. Only a few paranodal loops
are drawn. These regions are characterized by transverse
bands, visualized by electron microscopy.
Fig. 2 – Principales proteines des regions nodales. Dans la
membrane axonale, les canaux sodiques dependants du
voltage (Nav) sont ancres a des proteines associees au
cytosquelette d’actine, l’ankyrine G et la spectrine b-IV.
Ces complexes sont associes a des molecules d’adherence
cellulaire la neurofascine de 186 kDa (NF186) et la neuron-
glia-related cell adhesion molecule (NrCAM). L’isoforme IQCJ–
SCHIP-1 de la proteine schwannomin-interacting protein 1
(SCHIP-1) est associee a l’ankyrine G et pourrait servir de
reserve locale de calmoduline (CaM). Les filaments d’actine
sont aussi enrichis dans les microvillosites de la cellule de
Schwann. Les proteines de la famille ezrine, radixine,
moesine (ERM) qui lui sont associees peuvent l’ancrer a
des molecules transmembranaires, comme des
proteoglycanes de la famille des syndecanes (syndecanes
3 et 4). La gliomedine est une proteine gliale qui s’associe a
la NF186 axonale et pourrait intervenir dans la formation
des nœuds de Ranvier.
The main proteins of nodal regions. In the axonal membrane,
voltage-gated sodium channels (Nav) are anchored to actin
cytoskeleton-associated proteins ankyrin G and b-IV spectrin.
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les paranœuds au niveau desquels le bord lateral de la cellule
de Schwann, enroule en une spirale reguliere autour de
l’axone, forme des boucles etroitement attachees a celui-ci par
la jonction paranodale. Entre les paranœuds est situe l’inter-
nœud, dont la region adjacente au paranœud, appelee
juxtaparanœud, se distingue du reste de l’internœud par
une concentration importante de certaines molecules comme
les canaux potassiques. Plusieurs revues detaillees ont ete
publiees sur ce sujet (Girault et Peles, 2002 ; Poliak et Peles,
2003 ; Salzer, 2003 ; Sherman et Brophy, 2005). L’objectif de
celle-ci est de resumer les principales observations et de servir
d’introduction au domaine.
These complexes are associated with cell adhesion molecules,
the 186 kDa neurofascin isoform (NF186) and neuron-glia-
related cell adhesion molecule (NrCAM). IQCJ–SCHIP-1 is
associated with ankyrin G and can store calmodulin (CaM).
Actin filaments are also enriched in Schwann cells microvilli.
Ezrin, radixin, moesin (ERM) proteins can anchor actin to
transmembrane proteins including proteoglycans of the
syndecan family (syndecans 3 and 4). Gliomedin is a glial
protein associated with axonal NF186, which could play a
critical role in the formation of nodes of Ranvier.
1. Les regions nodales
Les regions nodales sont caracterisees par la tres forte
concentration de canaux sodiques dependants du voltage.
Les canaux sodiques sont composes d’une sous-unite a
appartenant a la famille Nav dont deux representants
principaux sont trouves dans les nœuds du systeme nerveux
peripherique (SNP) : Nav1.2 et, plus tardivement au cours du
developpement, Nav1.6 (Yu et Catterall, 2003). La sous-unite a,
qui forme le canal, est associee a une sous-unite b qui est
apparentee aux proteines d’adherence cellulaire et module les
proprietes de conductance ionique du canal (McEwen et al.,
2004) (Fig. 2). En microscopie electronique, on peut visualiser
directement la tres forte densite (1200 par micrometre carre)
des particules intramembranaires correspondant aux canaux
sodiques (Rosenbluth, 1976). Certains canaux potassiques
dependants du voltage, de type KCNQ2, sont aussi presents
dans la region nodale (Devaux et al., 2004). Les canaux
sodiques font partie de complexes multimoleculaires dont
la stabilite et l’ancrage sont assures par deux tres grandes
proteines intracellulaires, l’ankyrine G et la spectrine b-IV
(Fig. 2). Ces deux proteines appartiennent a des familles de
proteines que l’on trouve dans la plupart des cellules,
associees au cytosquelette cortical, sous la membrane
plasmique. Ce cytosquelette cortical est essentiel pour
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maintenir la forme des cellules, comme cela a ete initialement
mis en evidence dans le globule rouge. Dans le cas des nœuds
de Ranvier, l’ankyrine G est associee aux canaux sodiques et
aux canaux KCNQ2, mais aussi a des proteines d’adherence
(Bennett et Chen, 2001 ; Lemaillet et al., 2003 ; Pan et al., 2006).
L’ankyrine G joue un role essentiel dans l’organisation des
nœuds de Ranvier qui ne peuvent pas se former en son
absence (Dzhashiashvili et al., 2007). Elle est associee a une
isoforme de spectrine, la spectrine b-IV (Berghs et al., 2000),
qui interagit avec les microfilaments d’actine (Lacas-Gervais et
al., 2004). Les consequences de l’absence de spectrine b-IV sont
moins severes que celles de l’ankyrine G (Yang et al., 2004 ;
Yang et al., 2007). Elles comprennent des anomalies morpho-
logiques et une diminution progressive de l’enrichissement
des autres proteines au cours du developpement, suggerant
que la spectrine b-IV est essentielle pour la maintenance des
complexes nodaux. Deux molecules d’adherence completent
ces complexes et permettent leur interaction avec la cellule
gliale (Davis et al., 1996) (Fig. 2). Il s’agit de la neuron-glia-related
cell adhesion molecule (NrCAM), un membre de la superfamille
des immunoglobulines, et l’isoforme de 186 kDa de la
neurofascine (NF186) qui joue un role essentiel dans la
formation des nœuds de Ranvier (Sherman et al., 2005 ;
Dzhashiashvili et al., 2007). Ces deux proteines ont un seul
segment transmembranaire, une tres grande region extracel-
lulaire glycosylee, comprenant plusieurs domaines de type
immunoglobuline et fibronectine de type 3, et une courte
extremite C-terminale cytoplasmique, interagissant avec
l’ankyrine G. Enfin, une proteine cytoplasmique enrichie dans
les nœuds de Ranvier a ete recemment identifiee dans notre
laboratoire. Il s’agit d’une isoforme de la proteine schwanno-
min-interacting protein 1 (SCHIP-1) appelee IQCJ–SCHIP-1, qui a
la particularite de lier la calmoduline en l’absence de Ca2+
(Martin et al., 2008). Cette proteine qui peut lier l’ankyrine G,
pourrait notamment participer a la signalisation calcique dans
la region nodale en servant de reserve de calmoduline.
L’ensemble des proteines que nous venons de decrire est
present dans les nœuds de Ranvier du SNP et aussi du systeme
nerveux central (SNC). On les trouve egalement dans les
segments initiaux des axones, lieu d’origine du potentiel
d’action. Dans les fibres peripheriques, l’axone nodal est
entoure des microvillosites des cellules de Schwann enrichies
en filaments d’actine et en proteines de la famille ERM (ezrine,
radixine, moesine) liees a l’actine (Melendez-Vasquez et al.,
2001). Les proteines de la membrane des cellules de Schwann
comprennent des proteoglycanes de la famille des syndecanes
(3 et 4) (Goutebroze et al., 2003) et la gliomedine, qui est capable
d’interagir avec la NF186 axonale (Eshed et al., 2005).
2. Les regions paranodales
De part et d’autre de la region nodale, le bord de la cellule de
Schwann, enroule en spirale, forme sur les coupes longitudi-
nales, une serie de boucles cytoplasmiques regulierement
disposees le long de l’axone (Fig. 1). Cette regularite est parfois
interrompue par des boucles qui, n’atteignant pas l’axone,
forment des structures en epi appelees bracelets epineux de
Nageotte. Les paranœuds sont le siege d’une interaction tres
etroite entre la membrane de la cellule de Schwann et celle de
l’axone (axolemme). Les deux membranes sont etroitement
accolees, l’espace intercellulaire est plus reduit qu’au niveau
de l’internœud (2–4 nm contre 15 nm) et occupe par des
structures intercellulaires denses aux electrons en micro-
scopie electronique, appelees bandes transversales. Ces
bandes forment des cloisons ou septa et la jonction para-
nodale est dite de type septe, rappelant les jonctions septees
des epithelia des invertebres (Banerjee et al., 2006). Les
jonctions paranodales sont les jonctions intercellulaires les
plus etendues de l’organisme. Elles jouent un role essentiel en
attachant la membrane gliale a l’axolemme, en limitant la
diffusion des proteines dans la membrane axonale, contri-
buant ainsi a creer des domaines axonaux distincts, et en
isolant l’espace periaxonal nodal de l’espace periaxonal
internodal. Ce dernier point est indispensable a la propagation
saltatoire du potentiel d’action qui necessite une forte
resistance electrique de la gaine de myeline. Toutefois,
l’isolement n’est pas total puisque des petites molecules,
par exemple des colorants, peuvent lentement diffuser du
nœud vers l’internœud en empruntant les longs canaux
spirales que menagent entre elles les bandes transversales
de la jonction paranodale.
Certains composants proteiques responsables de l’organisa-
tion des jonctions paranodales sont identifies. La membrane
axonale comprend un complexe de deux proteines d’adhe-
rence. L’une, appelee paranodine (Menegoz et al., 1997) ou
contactin-associated protein (caspr) (Peles et al., 1997), a un seul
segment transmembranaire, une courte queue C-terminale
cytoplasmique et une grande region extracellulaire glycosylee
comprenant plusieurs domaines proteiques bien definis
(Menegoz et al., 1997) (Fig. 3). L’autre, appelee contactine (ou
contactine-1 ou CNTN1 ou F3), est une molecule d’adherence de
la superfamille des immunoglobulines, qui ne traverse pas la
membrane, mais est attachee a un glycolipide membranaire, le
glycosylphosphatidylinositol (ou GPI, on parle de proteine
« glypiee ») (Boyle et al., 2001). L’association entre ces deux
proteines est indispensable pour l’adressage de la paranodine a
lamembrane(Faivre-Sarrailhetal., 2000 ; Bonnonetal., 2007). Le
complexe paranodine–contactine interagit avec l’isoforme de
155 kDa de la neurofascine (NF155), une proteine de la
membrane de la cellule de Schwann (Charles et al., 2002)
(Fig. 3). En l’absence de paranodine, de contactine ou de NF155,
les jonctions paranodales ne se forment pas correctement, les
boucles gliales sont mal attachees a l’axolemme et les bandes
transversales sont absentes (Bhat et al., 2001 ; Boyle et al., 2001 ;
Sherman etal., 2005). Les proteines normalement trouvees dans
la region juxtaparanodale viennent alors au contact des regions
nodales. Les complexes multimoleculaires des regions para-
nodales sont ancres au cytosquelette axonal par la proteine 4.1B
(Denisenko-Nehrbass et al., 2003) (Fig. 3). Cette proteine fait
partie d’une famille dont le premier membre fut decouvert dans
le globule rouge et nomme « bande 4.1 » du fait de sa migration
en electrophorese. Les proteines 4.1 sont associees a des
proteines transmembranaires par leur domaine four-point-one,
ezrin, radixin, moesin (FERM) et au cytosquelette d’actine et de
spectrine par leur region C-terminale. Ainsi, le domaine FERM
de 4.1B s’associe a un motif conserve de la queue cytoplasmique
de la paranodine. Une etude en cours au laboratoire montre
qu’en l’absence de proteine 4.1B, la morphologie des regions
paranodales est alteree, ce qui souligne son importance dans
Fig. 3 – Principales proteines des regions paranodales. Les
paranœuds sont caracterises par une etroite association
entre les membranes axonale et gliale. Des complexes
multimoleculaires intercellulaires ont ete identifies qui
comportent la paranodine (ou caspr), associee dans la
membrane axonale a la contactine, une proteine
extracellulaire attachee a la membrane par un
glycosylphosphatidylinositol (GPI). Ce complexe interagit
en trans avec l’isoforme de 155 kDa de la neurofascine
(NF155), enrichie dans la membrane de la boucle gliale
paranodale. La paranodine est liee au cytosquelette par
l’intermediaire de la proteine 4.1B. En l’absence de
paranodine, de contactine ou de NF155, la jonction
paranodale ne se forme pas, les bandes transversales sont
absentes et les boucles paranodales gliales sont en partie
detachees.
Main proteins of paranodal regions. Paranodes are
characterized by a tight association between axonal and glial
membranes. Multimolecular intercellular complexes have been
identified, which include paranodin (or caspr) associated in
axonal membrane with contactin-1, an extracellular protein
anchored to the membrane by a glycosylphosphatidylinositol
(GPI). This complex interacts with the 155 kDa isoform of
neurofascin (NF155), enriched in the glial paranodal loop
membrane. Paranodin is linked to the actin cytoskeleton by
protein 4.1B through its four-point-one, ezrin, radixin, moesin
(FERM) domain, which binds to a short motif in the
intracytoplasmic juxtamembranous region of paranodin. In
the absence of paranodin, contactin or NF155, the paranodal
junctions do not form, transverse bands are absent, and
paranodal loops are in part detached from the axon.
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l’organisation de cette region. En revanche, les jonctions de type
septe sont toujours presentes.
3. Les regions juxtaparanodales
La region de l’internœud proche du paranœud, appelee
juxtaparanœud, est caracterisee par l’enrichissement des
canaux potassiques sensibles au voltage Kv1.1 et Kv1.2 de
type shaker (par reference au membre de la famille exprime
chez la Drosophila) (Wang et al., 1993). La fonction de ces
canaux, separes des canaux sodiques par la jonction para-
nodale, n’est pas bien connue. Ils semblent jouer un role plus
important au cours du developpement ou en cas de demye-
linisation/remyelinisation que chez l’adulte normal. De
maniere remarquable, ces canaux sont associes a un
complexe proteique similaire a celui qui est present dans la
region paranodale (Fig. 4). Les complexes juxtaparanodaux
comprennent du cote axonal une proteine transmembranaire,
caspr2 (Poliak et al., 1999 ; Poliak et al., 2003), et une proteine
glypiee, transient axonal glycoprotein-1 (TAG-1 ou axonin-1 ou
contactine-2 ou CNTN2) (Traka et al., 2002). Ces deux proteines
sont, respectivement, homologues a la paranodine et a la
contactine. Le complexe caspr2–TAG-1 est ancre au cytosque-
lette par la proteine 4.1B qui s’associe a caspr2 (Denisenko-
Nehrbass et al., 2003) (Fig. 4). Du cote extracellulaire, le
complexe interagit par l’intermediaire de liaisons homophi-
liques en trans entre TAG-1 neuronale et une autre molecule de
TAG-1 ancree dans la cellule de Schwann (Traka et al., 2003)
(Fig. 4). La localisation juxtaparanodale de chacune des deux
proteines depend de l’autre (Poliak et al., 2003 ; Traka et al.,
2003). Les canaux potassiques qui sont vraisemblablement
associes au complexe caspr2–TAG-1 par une proteine encore
non identifiee, disparaissent presque completement des
regions juxtaparanodales en l’absence du complexe caspr2–
TAG-1. Nos resultats recents montrent que la proteine 4.1B
joue aussi un role essentiel dans l’organisation des complexes
multimoleculaires juxtaparanodaux, puisqu’en son absence,
tous les autres partenaires en disparaissent.
4. Formation des nœuds de Ranvierdans le SNP
Les cellules de Schwann sont issues de la crete neurale. Elles
interagissent avec les axones et s’allongent le long de ceux-ci.
Vraisemblablement en reponse a un signal neuronal, les
cellules de Schwann immatures situees au contact d’axones
de diametre suffisant commencent a exprimer des genes de
myelinisation et emettent de longs lamellipodesqui s’enroulent
autour de l’axone (Jessen et Mirsky, 2005). Ce mouvement
permet le tri radial des fibres myelinisees qui depend
notamment des integrines et de la proteine focal adhesion kinase
(FAK) (Grove et al., 2007). L’extremite du prolongement glial est
precocement enrichie en actine et en proteines ERM (Melendez-
Vasquez et al., 2001 ; Melendez-Vasquez et al., 2004). A son
contact, les canaux sodiques commencent a s’agreger par un
mecanisme faisant intervenir la rho-kinase (Melendez-Vasquez
et al., 2004). Cela pourrait etre du a des proteines des
prolongements de la cellule de Schwann, comme les synde-
canes 3 et 4 (Goutebroze et al., 2003) et/ou la gliomedine (Eshed
et al., 2005), qui rassembleraient les proteines des complexes
nodaux, notamment en interagissant avec la NF186. Ainsi se
forme un heminœud au contact des microvillosites schwan-
niennes. Simultanement, la myelinisation commence et
l’heminœud est repousse jusqu’a ce qu’il rencontre son voisin
immediat avec lequel il fusionne pour former un nœud complet.
Au fur et a mesure que la formation du nœud progresse, les
contacts paranodaux se mettent en place avec un enrichisse-
Fig. 4 – Principales proteines des regions juxtaparanodales.
Malgre l’absence de jonction intercellulaire visible en
microscopie electronique, les complexes intercellulaires
multiproteiques identifies dans ces regions sont proches
de ceux des regions paranodales. Ils comprennent la
proteine caspr2 associee en cis avec une proteine ancree
par un glycosylphosphatidylinositol (GPI), transient axonal
glycoprotein-1 (TAG-1). Cette derniere est associee en trans
a une autre molecule de TAG-1 dans la membrane gliale,
par une liaison homophilique. Caspr2 est attachee au
cytosquelette axonal par la proteine 4.1B. Elle interagit
aussi avec les canaux potassiques Kv1.1 et Kv1.2 par
l’intermediaire d’une proteine encore non identifiee.
Main proteins of juxtaparanodal regions. In spite of the lack of
recognizable axoglial junctions in juxtaparanodes by electron
microscopy, the multimolecular intercellular complexes found
in these regions are similar to those identified at paranodes.
They include caspr2 associated in cis with a
glycosylphosphatidylinositol- (GPI-) anchored protein,
transient axonal glycoprotein-1 (TAG-1 or contactin-2). Axonal
TAG-1 is associated in trans with another molecule of TAG-1
in the glial membrane through a homophilic interaction.
Caspr2 is attached to the cytoskeleton through protein 4.1B. It
interacts also with potassium channels Kv1.1 and Kv1.2
through a still unidentified protein.
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ment de paranodine, contactine et NF155, puis plus tardive-
ment la formation des bandes transversales (Einheber et al.,
1997 ; Dupree et al., 1999). Les proteines juxtaparanodales sont
les dernieres a se mettre en place au cours du developpement.
Tous ces processus sont tres finement regules par la mise en
œuvre de profils d’expression genique dans lesquels Krox-20
joue initialement un role cle (Topilko et al., 1994) et par de
multiples signaux echanges entre l’axone et la cellule de
Schwann. Ainsi, l’epaisseur de la gaine de myeline est controlee
par l’interaction entre la neureguline-1 (NRG1) axonale et son
recepteur, Erb-B, exprime par la cellule de Schwann, pour
atteindre une valeur definie du rapport diametre axone/
diametre fibre (G ratio) de 0,6 a 0,7 (Michailov et al., 2004). La
longueur des internœuds (environ 100 fois le diametre de
l’axone), qui depend du nombre de cellules de Schwann le long
de l’axone, est aussi precisement controlee. Les mecanismes de
cette regulation sont incompletement compris mais semblent
resulter d’un equilibre entre des facteurs de survie et des
signaux de mort, notamment medies par le recepteur p75 des
neurotrophines (Jessen et Mirsky, 2005). Enfin, nous avons vu
qu’au niveau des regions nodales, paranodales et juxtapara-
nodales, des interactions directes intercellulaires entre des
proteines de membrane jouent un role essentiel dans la
formation des domaines axonaux. Ces interactions pourraient
aussi transmettre des signaux entre les deux types de cellules,
mais cette signalisation hypothetique est encore inconnue.
5. Contacts axogliaux en pathologie
La fonction des fibres myelinisees depend avant tout des
canaux sodiques. Tout ce qui aboutit directement ou indirecte-
ment a leur perturbation, ou a celle de leur environnement
cellulaire et moleculaire, a des consequences deleteres. De
facon quelque peu surprenante, les proteines impliquees dans
l’organisation des regions nodales ou paranodales ne semblent
pas etre l’objet de mutations responsables de neuropathies
hereditaires chez l’homme. Les consequences tres severes des
mutations de ces proteines chez la souris, et le fait qu’elles
soient aussi importantes dans le SNC, suggerent que les
mutations soient peut-etre letales au cours du developpement.
En revanche, les mutations de certaines proteines, dont le role
fonctionnel est apparemment moins critique dans le SNP,
semblent avoir une grande importance dans d’autres contextes
pathologiques. Par exemple, la mutation de la proteine caspr2
est clairement un facteur de risque majeur pour l’autisme
(Stephan, 2008) et des donnees preliminaires suggerent que des
anomalies de SCHIP-1 pourraient jouer un role dans des
troubles du langage (Kwasnicka-Crawford et al., 2006). Ainsi,
la caracterisation moleculaire des interactions entre les axones
et les cellules de Schwann, deux types cellulaires tres differents
mais intimement lies, peut fournir des outils conceptuels et
experimentaux pour aborder les mecanismes physiopatholo-
giques, non seulement des neuropathies peripheriques mais
aussi d’autres affections du systeme nerveux.
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