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BIODIVERSITÉ VÉGÉTALE ET GESTION DURABLE DE LA FORÊT LANDAISE DE PIN MARITIME : BILAN ET ÉVOLUTION J. TIMBAL - Ch. MAIZERET Dans les Landes de Gascogne, quand on étudie la biodiversité et surtout quand on veut mesurer l’impact des changements climatiques et de l’intensification sylvicole sur celle-ci, quelle doit être la référence, l’état de comparaison ? Ce “témoin”, cet “avant” ? : Est-ce la pinède landaise d’avant l’intensification sylvicole, c’est-à-dire, grosso modo, d’avant la dernière guerre mondiale, quand la régénération se faisait par semis en plein et que la résine était la principale production ? — Est-ce la lande qui l’a précédée et qui était déjà une création artificielle humaine, reflet d’une économie rurale essentiellement pastorale, en équilibre avec le pâturage ovin et l’incendie ? — Est-ce la forêt (climacique ?) qui a elle-même précédé la lande et dans laquelle les chênes dominaient ? En fait, nous n’avons pas à choisir, nous devons étudier ces trois cas car ils s’imposent à nous du fait de l’existence de formations relictuelles de forêts feuillues et de landes non ou peu boisées, constituant donc des zones de référence, de biodiversité différentes, fournissant autant de termes de comparaison avec l’actuelle forêt cultivée de pins maritimes. Ce bilan de biodiversité végétale, nous devons le faire à deux échelles spatiales : d’une part, d’une manière globale, à l’échelle de tout le massif forestier landais, même si les évolutions constatées ne sont pas toutes liées à la culture du Pin maritime ; d’autre part, à l’échelle locale, celle de la par- celle, où les pratiques sylvicoles sont alors plus directement en cause. Dans ce dernier cas, il nous faudra tenir compte de la variabilité naturelle des conditions climatiques et du substrat. À ces deux échelles spatiales, nous devons aussi “croiser” deux niveaux d’intégration biologique : celui des espèces d’une part et celui des biocénoses et des écosystèmes d’autre part, et voir, dans chaque cas, les évolutions passées et prévisibles. Nous ne traiterons pas de la diversité génétique intraspécifique, qui fait pourtant partie intégrante de cette problématique, mais qui n’est pas de notre domaine de compétence. 403 Rev. For. Fr. L - 5-1998

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BIODIVERSITÉ VÉGÉTALEET GESTION DURABLE

DE LA FORÊT LANDAISEDE PIN MARITIME :

BILAN ET ÉVOLUTION

J. TIMBAL - Ch. MAIZERET

Dans les Landes de Gascogne, quand on étudie la biodiversité et surtout quand on veut mesurerl’impact des changements climatiques et de l’intensification sylvicole sur celle-ci, quelle doit êtrela référence, l’état de comparaison ? Ce “témoin”, cet “avant” ? :

— Est-ce la pinède landaise d’avant l’intensification sylvicole, c’est-à-dire, grosso modo,d’avant la dernière guerre mondiale, quand la régénération se faisait par semis en plein et que larésine était la principale production ?

— Est-ce la lande qui l’a précédée et qui était déjà une création artificielle humaine, reflet d’uneéconomie rurale essentiellement pastorale, en équilibre avec le pâturage ovin et l’incendie ?

— Est-ce la forêt (climacique ?) qui a elle-même précédé la lande et dans laquelle les chênesdominaient ?

En fait, nous n’avons pas à choisir, nous devons étudier ces trois cas car ils s’imposent à nous dufait de l’existence de formations relictuelles de forêts feuillues et de landes non ou peu boisées,constituant donc des zones de référence, de biodiversité différentes, fournissant autant de termesde comparaison avec l’actuelle forêt cultivée de pins maritimes.

Ce bilan de biodiversité végétale, nous devons le faire à deux échelles spatiales : d’une part, d’unemanière globale, à l’échelle de tout le massif forestier landais, même si les évolutions constatées nesont pas toutes liées à la culture du Pin maritime ; d’autre part, à l’échelle locale, celle de la par-celle, où les pratiques sylvicoles sont alors plus directement en cause. Dans ce dernier cas, il nousfaudra tenir compte de la variabilité naturelle des conditions climatiques et du substrat.

À ces deux échelles spatiales, nous devons aussi “croiser” deux niveaux d’intégration biologique :celui des espèces d’une part et celui des biocénoses et des écosystèmes d’autre part, et voir, danschaque cas, les évolutions passées et prévisibles.

Nous ne traiterons pas de la diversité génétique intraspécifique, qui fait pourtant partie intégrantede cette problématique, mais qui n’est pas de notre domaine de compétence.

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Précisons que cette analyseconcerne, d’une part et sur-tout, la forêt du “plateau lan-dais”, essentiellement privée,mais aussi d’autre part, lazone des dunes littorales, d’oùtout est parti, qui est, aucontraire, surtout publique.

Il faut souligner que, dansune analyse patrimoniale dece type, il est souvent biendifficile, voire impossible, depouvoir attribuer à la seulesylviculture certaines évolu-tions constatées. En effet,partout, les activités hu-maines exercent une pres-sion, directe ou indirecte,plus ou moins forte, qui va le

plus souvent dans le sens d’un appauvrissement biologique par diminution de la taille des popula-tions et surtout par disparition et/ou transformation des habitats. Quand cela est possible, il fautdonc faire la part des choses.

ÉVOLUTIONS GLOBALES À L’ÉCHELLE DU MASSIF LANDAIS

Évolution des écosystèmes

• Connaissance des phytocénoses

Une connaissance globale, mais limitée, de la végétation des Landes de Gascogne nous est donnéepar la Carte de la Végétation de la France au 1/200 000e dressée par le CNRS. Le massif landaisest concerné par plusieurs feuilles de cette carte : n° 50 (Angoulême) par P. Rey (1974) pour le Nord-Médoc, n° 56 (Bordeaux) par M. Izard et al. (1963) et n° 63 (Mont-de-Marsan) par G. Lascombes etC. Leredde (1955).

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SOULAC

BORDEAUX

ARCACHON

MONT-DE-MARSAN

DAX

LANDESDE

CERNÈSPAYSDE

BUCH

GRANDELANDE

LANDES ORIENTALES

Eyre

Garonne

Dordogne

Adour

LANDES DE

ROQUEFORT

LANDES DE

DAX

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LANDES DE

MONT-DE-MARSAN

POINTE DU

MÉDOC

LES PAYS DE LA FORÊTLANDAISE ET LES DIFFÉRENTSTYPES DE LANDESD’après Louis Papy, 1977

Dunes littorales

Lande sèche et lande mésophile

Lande humide

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En plus de l’aspect proprement cartographique, ces cartes apportent, par leur légende, des connais-sances sur la structuration de cette végétation et, en particulier, sur les aspects dynamiques (sériesde végétation).

Ces connaissances sont précisées par un certain nombre de publications de cette même époque :Jovet (1951), Rey (1951), Barry et al. (1952).

Sur le plan phytosociologique, c’est, de loin, la zone littorale qui est la mieux connue. Les pinèdesà Chêne vert ou à Chêne-liège ont été étudiées par Vanden-Berghen (1970), Gehu et Gehu-Franck (1974). Les landes internes ont fait l’objet d’études et de synthèses par Gehu et Gehu-Franck (1975). Les groupements de dunes (dunes blanches et dunes grises) ont aussi été très bienétudiés, notamment par J.-M. Gehu. Ce dernier a d’ailleurs récemment (1996) souligné la phyto-diversité et l’intérêt patrimonial de la végétation de ces dunes littorales. Enfin, J. Timbal (1988) aétudié les chênaies en tant que groupements climaciques ou paraclimaciques.

Il faut aussi signaler les travaux de typologie forestière existants. Ceux-ci, dont la finalité est laconnaissance de la variabilité écologique spatiale du milieu forestier à des fins d’aménagement etde gestion, ont souvent été réalisés, à l’initiative d’organismes de recherche, de développement oude gestion forestière, dans le cadre de stages étudiants ou par des “chargés d’étude” et ont faitl’objet de publications à diffusion limitée. Citons les études de Saint-Didier (1976) sur le secteurpilote de Pissos, de Boutonnet (1991) pour le “plateau” landais et celles de Savoie (1990) et deDelcayrou (1995) pour le littoral.

• Disparition de biotopes

Il est évident que l’enrésinement à grande échelle des Landes de Gascogne au XIXe siècle avec lePin maritime a provoqué la disparition, ou du moins la raréfaction, d’un certain nombre de biotopes.Ceux qui ont le plus souffert de ces boisements sont ceux qui étaient au départ les moins fréquents,à savoir les zones les plus sèches d’une part et, à l’opposé, les landes les plus humides, voire tour-beuses, et les lagunes.

Parce qu’elles étaient difficilement boisables, les formations de landes très humides (à Ulex minor,Erica tetralix, Erica ciliaris, Schoenus nigricans, Genista anglica…) et/ou tourbeuses ont certainementmoins souffert, du moins directement, de l’enrésinement proprement dit. En revanche, le drainagegénéralisé les a fait régresser et évoluer dans le sens de la “mésophilie”.

Actuellement, les seules landes relictuelles qui existent encore sont celles incluses dans les campsmilitaires landais (camp de Souge près de Bordeaux et camp du “Poteau” aux confins de la Girondeet des Landes). Ce sont essentiellement des landes humides. Ces camps militaires constituent, defait, des zones de protection assez efficaces.

Dans les Landes de Gascogne, on appelle “lagunes” les étangs, de surface très variable mais rare-ment supérieure à 1 hectare, parsemant les zones d’interfluves les plus plates. Le sort de ceslagunes, lieux de forte biodiversité, aussi bien animale que végétale, a été beaucoup plus drama-tique. Du fait du drainage et de la baisse consécutive du niveau de la nappe, leur nombre a forte-ment diminué. Certaines de ces lagunes ont même disparu par comblement, par défrichement auprofit de l’agriculture, voire par leur transformation en décharge. Un bureau d’étude aquitain, leGEREA, a réalisé, à la demande du Conseil général du Département de la Gironde, une étudedétaillée sur les lagunes présentes à l’intérieur du périmètre du Parc régional des Landes deGascogne, et a mis en évidence une forte régression de celles-ci.

Sur le plan végétal, l’intérêt des lagunes est multiple. En effet, il y a d’abord la flore et la végétationaquatique proprement dite, il y a aussi la flore et la végétation des bords de la lagune et en parti-culier de la zone de battement du niveau d’eau : inondée une grande partie de l’année mais sècheen été, elle est le biotope de certaines espèces rares ; il y a enfin les zones de bois marécageux

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bordant parfois les lagunes possédant une flore et une végétation particulières. Ces différenteszones d’intérêt s’organisant d’une manière très classique en ceintures concentriques.

Rappelons que certaines de ces lagunes abritent plusieurs espèces végétales rarissimes et pour celaprotégées au niveau national voire au niveau européen : Anagallis crassifolia, Caropsis verticillati-nundata, Elatine brochoni, Lycopodiella inundata, Pilularia globulifera, Littorella uniflora… Ellesconstituent aussi des zones de forte biodiversité animale (amphibiens, libellules…).

Des initiatives commencent à être prises pour protéger ces lagunes. En particulier, le Conseil généralde la Gironde a déjà acquis quelques sites remarquables au titre des “Espaces naturels sensibles”(lagunes des sources du Gat mort et palus de Molua) pour les protéger et les restaurer. De même,la Fédération départementale des Chasseurs des Landes a acheté les lagunes de l’“Anguille”(commune de Sabres) et de La Tapy (commune de Labrit) sur lesquelles elle a entrepris d’importantstravaux de remise en eau. La commune de Mées, près de Dax, a demandé que la tourbière-lagunesituée dans sa forêt communale, reconnue d’un intérêt biologique majeur, soit proposée pour leRéseau Natura 2000. Avec l’aide de l’Office national des Forêts (ONF) et du Conseil général desLandes, un aménagement pédagogique y a été installé.

D’une manière plus générale, il serait nécessaire, par un ou plusieurs projets pilotes, d’étudiercomment concilier la préservation de ces lagunes et la gestion forestière des peuplements qui lesentourent.

On pourrait dire à peu près la même chose des rivières, ruisseaux, lacs, étangs et marais, en par-ticulier le long des cours d’eau (basse vallée de l’Eyre en particulier) dans la zone d’arrière-dunes,à la différence que beaucoup de ces zones, d’intérêt biologique majeur, sont encore mal connues.

Signalons cependant que les quelques réserves naturelles existant en Aquitaine concernent cestypes de milieux humides. Citons, dans le Marensin, le courant (1) d’Huchet et l’Étang noir, dans lepays de Born (Mimizan) la récente réserve biologique domaniale de la Malloueyre et, en Médoc,l’étang du Cousseau.

Dans le massif landais, les forêts-galeries situées le long des réseaux hydrographiques de la Leyre,de la Midouze et des divers courants landais, constituent les principales zones de feuillus et deszones de forte diversité biologique, aussi bien animale que végétale. Ces forêts-galeries subissentune certaine érosion de leurs bordures du fait de l’avancée progressive du Pin maritime. Dans lessecteurs où la topographie ne s’oppose pas à la pratique d’une sylviculture mécanisée, on observeune régression lente mais continue des peuplements feuillus. D’autre part, quand les vallées sontassez larges pour que des zones alluviales plates aient pu se développer, les aulnaies ou aulnaies-frênaies qui les occupaient ont souvent laissé la place à des cultures ou à des prairies, maintenantplus ou moins abandonnées et disparues ou, plus récemment, à des peupleraies.

Pour ces forêts-galeries, il faut signaler une autre initiative de la Fédération départementale desChasseurs des Landes qui a proposé, et obtenu, la réalisation d’un projet européen pilote (LIFE)pour l’élaboration de règles de gestion sur le site des forêts-galeries du réseau hydrographique dela Midouze (Estampon et Estrigon) qui a été retenu dans les propositions pour le RéseauNatura 2000.

Les landes et les pelouses sèches constituaient des milieux à forte diversité biologique et, en par-ticulier, floristique (surtout en thérophytes). Leur boisement, par les travaux du sol qui les accom-pagnent et la réduction de l’éclairement au sol, a certainement provoqué une forte réduction de leurbiodiversité. L’examen de flores anciennes sur ce sujet (Clavaud, 1881 et Jeanjean, 1961, pour laGironde ; Lapeyrère, 1892, pour les Landes…) est édifiant.

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(1) Dans les Landes de Gascogne, on appelle “courant” les petites rivières, voire les ruisseaux, qui font communiquer les étangs oumarais d’arrière-dune avec la mer.

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Signalons que ces zones de forêts feuillues et de landes sèches sont souvent associées topogra-phiquement à des forêts-galeries, formant des successions végétales dont le déterminisme est liéau rabattement de la nappe provoqué par l’encaissement des ruisseaux.

Dans la zone dunaire, les “lettes”, c’est-à-dire les dépressions d’arrière-dune littorale et les “dunesgrises” qui les jouxtent, qui constituent des zones de très forte biodiversité (Gehu et Gehu-Franck,1974, 1975 ; Bournerias, 1993 ; Delcayrou, 1995 ; Gehu, 1996) car au contact de la végétation pion-nière des dunes vives et des végétations forestières pionnières (ourlets), postpionnières (manteaux)et climaciques, ont subi une double évolution. D’une part, la fixation (2) par l’homme, à partir de lafin du XVIIIe siècle, des dunes côtières a permis le développement de ces formations à forte biodi-versité ; d’autre part, ensuite, la pression touristique et, dans certains secteurs, un certain acharne-ment “enrésinatoire” de la part des gestionnaires forestiers, ont entraîné un recul et/ou unedégradation de ces milieux si intéressants. Heureusement, cette période semble être bien révolue ;la politique de l’Office national des Forêts (DIRLAM) étant, depuis quelques années, de mettre enœuvre une gestion favorable au maintien, voire à la restauration, de la biodiversité, et excluant doncdésormais tout boisement sur les dunes grises actuelles.

On entend par milieux paraforestiers, les habitats, souvent linéaires et toujours de surface faible,qui ne sont pas des habitats forestiers proprement dits mais qui sont inféodés à la forêt. Ce sontles lisières, les clairières, les coupes. Il faut leur ajouter certains stades évolutifs, qui, dans ladynamique végétale, précèdent la forêt (fourrés, taillis...) ou lui succèdent par dégradation (landes,pré-bois…). Parce que ce sont des “écotones”, c’est-à-dire des habitats de transition, toutes cesformations végétales, et surtout celles des lisières, clairières et coupes, sont généralement deszones de forte diversité biologique, aussi bien végétale qu’animale. Dans certaines régions, les haiesjouent un rôle analogue. La forêt usagère de La Teste, avec ses peuplements irréguliers et ses nom-breuses clairières, permet de se faire une idée de l’intérêt de ces milieux paraforestiers pour la bio-diversité.

Il est évident que, dans les scénarios actuels de sylviculture du Pin maritime, ces habitats n’ont mal-heureusement plus de place. D’une part parce que les lisières sont réduites au minimum (surtoutdans le cas des plantations), d’autre part et surtout à cause du travail du sol qui est effectué et descourtes révolutions pratiquées qui ne permettent pas l’installation et le développement de la végé-tation particulière à ces biotopes. Des clairières se créent pour des causes diverses (chablis, dépé-rissements localisés…) mais elles n’ont pas une durée d’existence suffisante pour que s’y développeune végétation spécifique et, de plus, elles ne sont pas épargnées par les débroussailleuses.

Dans les Landes de Gascogne, les “airials” sont des plantations à grand écartement de chênes, quiétaient réalisées autour des habitations pour procurer de l’ombre et des glands pour les porcs. Ilsconstituent de ce fait un élément important du paysage rural landais. Depuis la dernière guerre, denombreuses fermes ont été abandonnées (ou brûlées lors des incendies) et les Chênes (pédon-culés, tauzins, lièges) ont été coupés pour laisser la place au Pin maritime. La régression de cesbouquets de chênes continue au rythme de la rotation des parcelles de pins sur lesquelles ceux-làsont situés.

• Création de nouveaux biotopes

Face aux disparitions et aux fortes régressions évoquées, la création involontaire par l’homme decertains biotopes favorables au maintien, ou même au développement, de populations de certainesespèces plus ou moins rares (notion de biotopes-refuges), ne pèse pas beaucoup dans la balance.Il faut cependant les citer.

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(2) En fait, il ne s’agissait pas d’une fixation proprement dite, mais plutôt d’une “domestication”, d’un contrôle de la dynamiquedunaire, en faisant en sorte que le sable soit stocké au plus près de sa source.

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Lagune de Saint-Magne(Gironde) : une des plusbelles lagunes girondines,d’un très fort intérêtpatrimonial.

Lande sèche à Lucmau(Landes) : exempletypique de lande sèche.

Vieux pins gemmés en forêt usagèrede La Teste (Gironde) :exemple type d’une forêt“ancienne” où une structurenon régulière favorisela biodiversité.

Photos J. TIMBAL

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Les bords en pente douce de certains fossés de drainage, inondés en hiver mais ne s’asséchant queprogressivement en été, constituent des milieux favorables aux Rossolis (Drosera intermedia,D. rotundifolia, espèces protégées), à la Grassette du Portugal (Pinguicula lusitanica), aux Pédi-culaires (Pedicularis sylvatica), à Anagallis tenella, Samolus valerandi… Ce sont sur les bords defossés que se localisent aussi habituellement les Bruyères hygro-acidophiles (Erica ciliaris, Ericatetralix), le Genêt d’Angleterre (Genista anglica), le Choin ferrugineux (Schoenus nigricans), l’Ail desbruyères (Allium ericetorum)… Dans certains secteurs de lande très humide et de marécages du lit-toral (zone de Biscarosse), les bords de fossés, de “crastes” et de canaux ont constitué des milieuxrefuges pour la rare (et protégée) Bruyère du Portugal (Erica lusitanica).

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Erica lusitanica au bord dela “craste” de Nezer

à La Teste (Gironde) :dans ce secteur, les bords

de fossés de drainageconstituent un biotope de

refuge pour cette rare(et protégée) Bruyère.

Photo J. TIMBAL

Les pare-feu, surtout s’ils sont travaillés (sol ameubli et aéré), sont favorables au développement dubeau Narcisse-trompette (Narcissus bulbocodium) dont les individus sont ainsi libérés de la concur-rence des autres espèces. En lande très humide, le décapage au défonceur d’une faible épaisseurde sol pour créer des pare-feu (cela est bien visible au Camp de Souge) a entraîné, sur ces sols,désormais inondés en hiver, le développement d’une riche flore de terrains tourbeux (Drosera inter-media, Drosera rotundifolia, Pinguicula lusitanica, Pedicularis sylvatica, Pedicularis palustris,Schoenus nigricans, Eriophorum angustifolium, Baldellia ranunculoides…).

Les coupes à blanc, surtout après leur labour, voient éclore et se développer de nombreuses thé-rophytes dont les graines subsistaient dans l’humus. Elles constituent aussi, de toute évidence, unmilieu très favorable au développement d’une remarquable espèce exotique le Phytolacca decandra.

Les bords de piste sont parfois, en lande sèche, des refuges pour certaines espèces peu fréquentes(Armeria arenaria, Anacamptis pyramidalis…) mais, le plus souvent, ils sont aussi travaillés et/oucolonisés par des espèces plus ou moins banales (Agrostis capillaris, Danthonia decumbens, Lobeliaurens, Hypochaeris radicata, Achillea millefolium, Rumex acetosella, Jasione montana...) ou adven-tices comme le Sporolobus tenacissimus et Conyza canadensis.

Évolution des espèces

• Connaissance de la flore

La flore des Landes de Gascogne est bien connue, et ce depuis assez longtemps. Les travaux d’uncertain nombre de botanistes amateurs qui se sont succédé depuis le début du XIXe siècle se sontsouvent concrétisés par la rédaction de flores régionales ou départementales. On peut ainsi citer les

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ouvrages de Thore, de Léon (1876), de Chantelat (1844), de Laterrade, de Clavaud (1881), deLapeyrère (1892) et, plus récemment, de Jeanjean (1961). Depuis ce dernier ouvrage, il faut signa-ler les travaux des botanistes de la Société linnéenne de Bordeaux (Dauphin, Dupain, Dussausois,Aniotsbehre), de l’Université de Bordeaux (Pariaud, Laporte-Cru…) ou d’autres amateurscomme Vivant.

Signalons encore, pour la zone littorale, l’ouvrage de Bournerias et al. (1988) qui traite aussi du patri-moine zoologique et géologique.

Par ces divers travaux, échelonnés depuis le début du XIXe siècle, nous pouvons nous faire une idéede l’évolution floristique, régressive comme dans toute la France, survenue sur ce territoire.

Parmi les espèces végétales bénéficiant d’un statut de protection légale et se trouvant en Aquitaine,la plupart concernent les lieux humides, voire très humides ou aquatiques (Danton et Baffray, 1995 ;Le Duc et Raffin, 1986). Seules deux bruyères [Erica carnea ssp. occidentalis (= E. mediterranea= E. erigena) et E. lusitanica], Lithodora prostrata, Iris sibirica (landes) et Carex pseudobrizoides sont desespèces forestières ou de landes. Il y avait aussi le Saule des sables (Salix repens ssp. arenaria) deslettes humides, mais il a été récemment déclassé.

Cependant, certaines espèces protégées des milieux aquatiques ou très humides sont tellementliées à la forêt qu’il faut aussi les prendre en compte. Ce sont d’abord un certain nombre d’espècesinféodées aux lagunes ou aux étangs [Anagallis crassifolia, Caropsis verticillatinundata, Elatine bro-choni, Isoetes borryana, Isoetes histrix, Lobelia dortmanna, Aldrovanda vesiculosa (sans douteéteint), Marsilea quadrifolia…], ensuite des espèces liées aux zones humides plus ou moins tour-beuses (Lycopodiella inundata, Iris sibirica, Drosera sp., Ophioglossum azoricum…), enfin aux coursd’eau (Hibiscus palustris, Luronium natans...).

À cette liste nationale viendra prochainement s’ajouter une liste régionale comme il en existe déjàdans nombre de régions administratives françaises. Sans préjuger de ce que contiendra cette liste,il est vraisemblable que les espèces suivantes des milieux forestiers et paraforestiers y figureront :Daphne cneorum, Corema album, Erica vagans, Genista pilosa, Armeria arenaria, Halimium umbella-tum, Narthecium ossifragum, Parnassia palustris, Eriophorum sp.

• Les arbres

Les espèces indigènes

Le massif forestier landais a une image très ancrée de monospécificité. Cependant, si la dominancedu Pin maritime y est très forte, voire absolue par endroits, les feuillus y tiennent une certaine place,avec une localisation préférentielle sur le littoral (Chêne vert et Chêne-liège essentiellement), prèsdes villages et des habitations (Chêne pédonculé et Chêne tauzin) et en bordure des zones humides(Chêne pédonculé, Aulne glutineux, Saules). Le dernier inventaire forestier mené dans le massiflandais (1987 à 1989) permet d’avoir une bonne estimation des surfaces couvertes : 2,5 % defeuillus purs (dont 0,2 % de feuillus de zones humides) et 7,1 % de mélange pins + feuillus(tableau I, p. 411).

La culture en futaie régulière des pins contrarie fortement la dynamique naturelle de la végétationallant dans le sens d’une progression des chênes en général : Chêne pédonculé partout, Chênetauzin sur les sols secs, Chêne vert sur les dunes littorales du Médoc et Chêne-liège sur le littoralsud-aquitain (à partir d’Arcachon) et à l’intérieur du massif (surtout à l’est) dans des limites malai-sées à préciser. Sauf dans le Marensin (et encore !), les chênes ayant poussé ou subsisté en sous-étage ou en sous-bois des pins sont généralement éliminés lors de la coupe à blanc finale des pins.De plus, il peut arriver que des parcelles feuillues soient coupées pour faire place à des pins.

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On trouve aussi des Chênes-lièges, à l’état disséminé, dans tout le massif landais, mais il est diffi-cile de dire s’il s’agit des restes d’introductions plus ou moins anciennes ou s’il s’agit de reliquesd’un climax de chênaie dont le Chêne-liège ferait partie comme cela se passe dans la partie orien-tale (Lot-et-Garonne) du massif landais et sur toutes les terrasses de la rive gauche de la Garonnejusque et y compris les environs de Toulouse.

Les espèces ligneuses secondaires de la chênaie primitive qui, comme les chênes, auraient ten-dance à se réinstaller dans les sous-bois, sont également éliminées par les pratiques sylvicoles. Cesont les Bouleaux (Betula pendula et dans une moindre mesure Betula pubescens), le Noisetier(Corylus avellana), le Poirier sauvage atlantique (Pirus cordata), le Néflier (Mespilus germanica), lesSaules (Salix acuminata, Salix caprea), le Houx (Ilex aquifolium), le Cormier (Sorbus domestica)…

Dans un contexte de changement climatique global allant dans le sens d’un réchauffement et d’uneréduction des précipitations, on peut penser que les chênes thermoxérophiles que sont Quercus ilex,Quercus suber et Quercus pyrenaica seraient favorisés aux dépens du Chêne pédonculé (Quercusrobur). On peut aussi penser que certaines autres espèces méditerranéo-atlantiques, actuellementcantonnées dans les lisières et les sous-bois des forêts littorales, comme l’Arbousier (Arbutusunedo), le Ciste à feuilles de Sauge (Cistus salviaefolius) et le Filaire à feuilles étroites (Phillyreamedia ssp. angustifolia), le Garou (Daphne gnidium)…, auront tendance à se répandre dans leslandes plus internes.

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Dunes littorales Plateau landais Total %et Marensin et Bazadais sur le total

Futaie de Pin maritime pur . . . . . 79 305 593 274 672 579 75,9

Boisement morceléde Pin maritime pur . . . . . . . . . . 3 264 121 805 125 069 14,1

Boisements lâchesde Pin maritime . . . . . . . . . . . . . 90 2 072 2 162 0,2

Total Pin maritime pur . . . . . . . 82 659 717 151 799 810 90,3

Boisements morcelésà Pin maritime et feuillus . . . . . . 399 57 567 57 966 6,5

Mélange futaie de Pin maritimeet taillis feuillu . . . . . . . . . . . . . . 426 4 694 5 120 0,5

Total mélange Pin maritimeet feuillus . . . . . . . . . . . . . . . . . 825 62 261 63 086 7,0

Futaie de Chênes . . . . . . . . . . . 21 223 244 0,02

Mélange futaie et taillisde feuillus . . . . . . . . . . . . . . . . . 0 2 779 2 779 0,3

Taillis simples . . . . . . . . . . . . . . 0 88 88 0

Boisements morcelésde feuillus purs . . . . . . . . . . . . . 374 15 344 15 718 1,8

Boisements morcelésde rives marécageuses . . . . . . . 265 3 771 4 036 0,4

Total feuillus purs . . . . . . . . . . 660 22 205 22 865 2,5

Tous types de peuplement . . . . 84 144 801 617 885 761 100

Tableau I Types de peuplement dans le Massif landaisd’après les données de l’IFN (2e cycle)

(surfaces en ha)

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Les introductions (accidentelles ou volontaires)

Sur le plan des arbres, les introductions en Aquitaine sont souvent très anciennes et donc indé-pendantes de la sylviculture du Pin maritime. Citons le Châtaignier (Castanea sativa), sans doutedepuis l’Antiquité, le Robinier (Robinia pseudoacacia), étroitement lié à la viticulture, le Pin pignon(Pinus pinea) pour sa fonction ornementale et son utilisation en confiserie et, plus récemment, leChêne rouge d’Amérique (Quercus rubra), pour l’ornementation et le bois, et le Cerisier tardif (Prunusserotina) pour faire des couverts à gibier.

Un grand nombre d’essais d’introduction d’espèces exotiques ont été réalisés dans le massiflandais, dans un but de diversification sylvicole et non pas de diversification biologique. En parti-culier, dans certains secteurs, des feuillus ont été introduits pour constituer des pare-feu. La plupartde ces introductions n’ont pas donné de résultats économiquement satisfaisants. En effet, dans lecontexte pédo-climatique landais, très contraignant, les rares espèces qui ont poussé aussi bien,voire mieux, que le Pin maritime, ont été d’autres pins : le Pin à encens (Pinus taeda) originaire duSud-Est des États-Unis, le Pin de Monterey (Pinus radiata) de Basse Californie ; le Cyprès à grosfruits, dit aussi Cyprès de Lambert (Cupressus macrocarpa) également de Basse Californie, ces deuxdernières espèces surtout introduites dans la zone littorale, et certains Eucalyptus (Eucalyptusgunnii, Eucalyptus dalrympleana…). Malheureusement, ces espèces se sont révélées inadaptées auxhivers rigoureux qui surviennent à intervalles plus ou moins réguliers en Aquitaine. Pour les feuillus,nettement moins essayés que les résineux, les moins mauvais résultats ont été obtenus avec leChêne rouge (Quercus rubra) déjà cité et le Liquidambar (Liquidambar styraciflua), tous deux d’ori-gine nord-américaine. Mais d’autres essais de feuillus mériteraient d’être réalisés, en particulier aveccertains chênes nord-américains réputés être résistants à la sécheresse dans leur aire d’origine.

• Espèces du sous-bois

L’ensemencement en pins de parcelles de landes et les travaux sylvicoles qui suivent réduisent ladiversité floristique de ces landes en éliminant les espèces à faible pouvoir disséminateur et en favo-risant, au contraire, les espèces sociales à multiplication végétative et/ou à fort pouvoir de dissé-mination de semences (Molinie, Avoine de Thore, Callune, Ajoncs, Bruyère à balais, Bruyèrecendrée…). C’est ainsi qu’un certain nombre d’espèces de lande se sont raréfiées. Citons le Genêt

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Halimium umbellatum etH. alyssoides (Lucmau - Landes) :deux espèces typiques de la lande sèche ; la première rare et disséminée.

Photo J. TIMBAL

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d’Angleterre (Genista anglica), le Camélée (Daphne cneorum), la Bruyère vagabonde (Erica vagans),Halimium umbellatum, Allium ericetorum, Schoenus nigricans, Lithodora prostrata, Romulea bulbo-codium, Gentiana pneumonanthe… La richesse floristique des landes relictuelles à Bruyère méditer-ranéenne (Erica carnea ssp. occidentalis) de Saint-Sauveur (dans le Médoc) est là pour nous montrerle fort degré d’appauvrissement et la banalisation floristique de la grande majorité des autres.

Il faut remarquer qu’il est parfois difficile de dire si une espèce s’est raréfiée du fait de l’activité syl-vicole ou si elle était déjà rare (par marginalité écologique et/ou chorologique) avant la création dela forêt landaise de Pin maritime. Ce pourrait être le cas avec Erica vagans, Lithodora prostrata etDaphne cneorum. Dans ces cas, l’examen des vieilles flores peut donner des indications, mais pasde preuve.

Cependant, dans la grande majorité des cas, l’appauvrissement floristique du massif landais est liéà la disparition de certains types d’habitats et, en particulier, des milieux humides.

On sait que les cervidés consomment préférentiellement, selon les saisons, certaines espèces her-bacées ou ligneuses. Dans une forêt, dans un secteur donné, si les populations de cervidés sontimportantes, ce prélèvement sélectif peut aboutir à une modification sensible de la végétation avecune régression, voire la quasi-disparition, de certaines espèces et, au contraire, le développementimportant de certaines autres non consommées. Dans le massif landais où l’on assiste, depuis unedizaine d’années, à une augmentation importante des populations de cervidés, il est probable que,du moins sur certains secteurs, un tel phénomène a lieu. Malheureusement, il n’y a pas eu d’étudesprécises sur ce point et, si on connaît à peu près les espèces consommées préférentiellement dansle contexte de la végétation landaise, on ignore l’impact que peuvent avoir ces prélèvements sur ladynamique des espèces concernées.

Un certain nombre d’espèces exotiques herbacées, maintenant plus ou moins naturalisées, sontvenues aussi enrichir le patrimoine floristique landais. Leur introduction, plus ou moins ancienne, aété soit voulue, soit, le plus souvent, accidentelle. Dans ce dernier cas, et sauf pour Phytolacca ame-ricana déjà cité, il est difficile de dire dans quelle mesure cette introduction est liée, même indirec-tement, aux pratiques sylvicoles. Citons Senecio inaequidens et Sporolobus indicus, liés aux bordsde route ; Oenothera biennis aux fossés, Baccharis halimifolia aux zones marécageuses et/ou sau-mâtres littorales où il constitue une véritable peste végétale, Ludwigia grandiflora, Lagarosiphonmajor aux cours d’eau et Conyza canadensis un peu partout…

Signalons aussi que, dans certains lieux, échappées de parcs, certaines espèces ornementalesarbustives envahissent la lande. C’est le cas, en Gironde, avec Aronia arbutifolia et Rhododendronponticum, cette dernière espèce ne présentant cependant pas le caractère néfaste qu’elle peut avoiren certains secteurs d’Angleterre ou d’Irlande.

ÉVOLUTIONS À L’ÉCHELLE LOCALE (NIVEAU DE LA PARCELLE) DE LA VÉGÉTATIONFORESTIÈRE

En général, effet des pratiques sylvicoles

On a déjà évoqué comment le drainage avait fait régresser les landes humides au profit des landesmésophiles et des landes mésophiles sèches ; nous n’y reviendrons pas. Mais d’autres pratiquessylvicoles ont un effet sur la composition et la dynamique de la végétation.

Le premier effet de l’installation d’un nouveau peuplement de pins, par semis ou plantation, sur lavégétation préexistante est une forte diminution de l’éclairement arrivant au sol qui se manifesteau fur et à mesure de la croissance des pins. Il semble que cet effet soit maximum vers unevingtaine d’années. Bien que le couvert d’un peuplement de pins soit toujours plus clair que celui

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d’autres conifères ou de feuillus, la réduction de l’éclairement provoque la régression, voire la dis-parition, d’un certain nombre d’espèces, celles-là mêmes qui ont besoin de la pleine lumière pourfleurir et se reproduire. En revanche, les espèces sociales de la lande (Erica sp., Ulex sp., Callunavulgaris, Pteridium aquilinum, Molinia caerulea, Pseudarrhenatherum longifolium,...) peuvent subsis-ter longtemps en sous-bois et sont donc favorisées.

Si le boisement en pins se fait à la suite d’un boisé de feuillus, la modification de la végétation estplus importante avec la disparition des espèces fleurissant tôt, avant le débourrement des chênes.Ainsi, un certain nombre d’espèces végétales de la chênaie ne se rencontrent plus, ou presque plus,sous la pinède : Hedera helix, Asphodelus albus, Arenaria montana, Potentilla montana, Deschampsiaflexuosa, Lonicera periclymenum, Teucrium scorodonia, Carex pilulifera, Solidago virga-aurea,Stachys officinalis…

Il est aussi probable que le passage d’un humus de type moder à un mor peut jouer un certain rôledans ces évolutions.

Comme il a été évoqué, l’âge des peuplements a également une influence directe sur la diversitéfloristique du sous-bois : les peuplements adultes, et surtout ceux âgés (en fin de révolution), ontun sous-bois floristiquement plus diversifié que les jeunes peuplements. Le facteur lumière inter-vient comme il a été rappelé mais il faut également faire intervenir le facteur temps, la durée néces-saire à une recolonisation de l’espace, surtout si on part “de zéro” dans le cas d’un labour en pleindu sol préalable à l’installation du peuplement.

En fait, ce travail du sol favorise certaines espèces sociales qui sont ainsi multipliées de manièrevégétative : fragmentation des rhizomes de Fougère aigle, éclatement des touffes de Molinie etd’Avoine de Thore en multiples “éclats”… Il favorise également les espèces pionnières (et parmi ellesbeaucoup d’annuelles : Senecio, Pseudognaphalium, Aira,...) et les autres géophytes qui pourrontalors se développer tant que l’éclairement sera suffisant. Très récemment, de Bazelaire (1997), étu-diant un certain nombre de dispositifs de désherbage chimique de l’AFOCEL en lande humide, amontré que trois ans après le passage de la charrue rotative, si la Molinie et la Bourdaine étaientdéfavorisées (par rapport aux témoins), en revanche, ce travail du sol favorisait l’Ajonc nain, laRonce et surtout les Éricacées (Bruyères, Callune). Mais cet avantage aux Éricacées est certaine-ment très temporaire ; cette même étude montrant que la Molinie reprend le dessus au bout de 8 à10 ans. De plus, il apparaît bien que ce travail du sol à la charrue rotative provoque, trois ans après,une légère augmentation du nombre total des espèces, sans doute en favorisant la germination decertaines d’entre elles. Mais là aussi, ce léger gain de biodiversité végétale, correspondant à unereprise de la dynamique végétale, est sans doute fugace.

La fertilisation du sol provoque également des changements dans la composition floristique dusous-bois. L’étude détaillée de plusieurs dispositifs de fertilisation a montré que les apports dephosphore favorisaient le développement des ajoncs (Ulex europaeus) aux dépens des autresespèces (Trichet, 1996, communication personnelle). Des modifications floristiques plus importantesapparaissent si l’azote est aussi apporté. Ainsi, Trichet et Gelpe (1992) ont montré que, sur un dis-positif de fertilisation de Pin laricio installé en forêt Barade (Dordogne), il y avait substitution de laFougère aigle (Pteridium aquilinum) à la Molinie (Molinia caerulea).

De telles substitutions de flore ont été observées, il y a déjà longtemps (Dreyfus, 1984), dans leNord-Est de la France après utilisation de phytocides (remplacement des Agrostis et des Joncs parde la Molinie et de la Canche cespiteuse) et plus récemment en forêt d’Orléans par le CEMAGREF(1996) avec un remplacement de la Molinie par la Callune. On peut légitimement penser qu’il enserait de même dans le massif landais si l’utilisation des phytocides se généralisait. Cependant,l’étude très récente de de Bazelaire, déjà citée, semble montrer qu’en lande humide, au bout d’unedizaine d’années, la Molinie retrouve le recouvrement qui était le sien au départ.

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Le débroussaillage mécanique et régulier des parcelles de pins avec le “rouleau landais” ou le giro-broyeur provoque des modifications floristiques analogues, la période de l’année au cours delaquelle ces engins sont passés et la périodicité de ces passages n’étant pas indifférentes. Nousavons ainsi pu constater à de nombreuses reprises, qu’en lande humide à Molinie et Avoine deThore, le débroussaillage régulier avec le girobroyeur favorisait l’avoine de Thore aux dépens de laMolinie. Ce phénomène est probablement dû au décalage phénologique existant entre ces deuxespèces de graminées cespiteuses qui poussent souvent en mélange intime.

Signalons aussi que, dans le système sylvicole actuel de semis ou de plantations en lignes, ledébroussaillement n’affecte que l’interligne. Il se crée donc une hétérogénéité de végétation entreles interlignes et les lignes ; ces dernières étant donc plus diversifiées que les premières, hétérogé-néité qui ne dure que la vie du peuplement. Cependant, à une échelle locale et régionale, cephénomène est certainement positif pour le maintien de la biodiversité.

On sait que le feu est un facteur écologique majeur et que les formations végétales de landes nesont en équilibre qu’avec le feu, le pâturage ovin extensif ou le débroussaillage mécanique. Cedernier, mis en œuvre par le sylviculteur, est donc aussi un succédané au feu si redouté et contri-bue donc au maintien d’une végétation de lande.

Comme il a déjà été précisé, il est évident que la coupe rase, pratiquée en fin de révolution desparcelles de pins, constitue une opération biologiquement très perturbatrice, puisque les arbres etarbustes d’autres espèces qui avaient pu se développer à l’ombre des pins sont alors coupés enmême temps. De plus, le nouveau biotope ensoleillé ainsi créé, et qui serait favorable au dévelop-pement d’une végétation particulière, ne dure pas du fait du travail du sol et de l’installation d’unnouveau peuplement qui interviennent ensuite très vite.

Cependant, le comportement des propriétaires forestiers et des entrepreneurs de travaux forestiers,vis-à-vis de la présence de feuillus dans les parcelles de pins ou en bordure de ces parcelles,semble évoluer. On observe en effet de plus en plus d’initiatives de préservation des arbres qui neconstituent pas un obstacle à la réalisation des semis ou des plantations. Parfois même des bos-quets de feuillus sont conservés et des alignements de chênes en bordure des parcelles sont éclair-cis et élagués à l’occasion du passage des bûcherons.

Plus généralement, on peut penser que, par un aménagement forestier prévoyant, grâce à de légerstravaux de génie écologique, la création, sur des surfaces minimes, de biotopes artificiels favorablesau maintien d’espèces rares ou menacées, la biodiversité pourrait être préservée voire augmentée.

La plupart de ces observations sont empiriques. Bien qu’elle soit simple à concevoir et à installer,parce qu’elle suppose un suivi durant de nombreuses années, aucune expérimentation n’a été miseen place qui permettrait d’apporter des données objectives en la matière.

Signalons cependant que les trois placettes de Pin maritime du Réseau national RENECOFORd’Aquitaine devraient permettre, si elles sont suivies assez longtemps, de mettre en évidenced’éventuels changements à long terme dans la composition floristique des Landes de Gascogne.L’une est située en forêt dunaire, près de Saint-Girons-Plage, les deux autres, proches l’une del’autre, se situent dans la partie orientale du massif landais, en forêts communales de Losse et deArx. Pour bien faire, il aurait été nécessaire d’installer plusieurs autres placettes du même type dansd’autres secteurs du massif landais et, en particulier, en lande sèche. Rappelons que, dans desforêts feuillues du Nord-Est de la France, des comparaisons d’inventaires floristiques réalisés à unevingtaine d’années d’intervalle sur les mêmes placettes ont permis (Thimonier et al., 1992) de mettreen évidence une évolution de la composition floristique traduisant une eutrophisation des sols àmettre sans doute en relation avec la pollution atmosphérique (dépôts minéraux secs). Il n’y aaucune raison de penser que des phénomènes semblables ne se produisent pas en Aquitaine où onsait par ailleurs que des quantités non négligeables de composés azotés (NOx) sont libérés dans

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l’atmosphère à la suite des processus de dénitrification des engrais azotés apportés dans leschamps de maïs (Jambert et al., 1994 ; Chassin et al., 1995). Il paraît indispensable, pour la connais-sance des cycles biogéochimiques en forêt landaise, de pouvoir quantifier ces dépôts secs et dedéterminer aussi la part qu’il leur revient dans l’augmentation de productivité de la forêt landaiseconstatée par l’Inventaire forestier national au cours des vingt dernières années.

• Champignons

D’une manière générale, dans la forêt de pins maritimes des Landes de Gascogne, à l’échelle locale,le degré de biodiversité mycologique est lié au pourcentage de feuillus et à la biodiversité de laflore dendrologique. Cela est dû, pour les champignons mycorhiziens (le plus souvent des basi-diomycètes), à l’augmentation des hôtes possibles. Ainsi, selon Guinberteau (communication per-sonnelle, 1997), les forêts-galeries (feuillues) ou les pinèdes littorales à Chêne vert (Guinberteau,1996) sont des écosystèmes beaucoup plus riches en espèces de champignons que les pinèdesenvironnantes. De ce fait, le remplacement d’une forêt de feuillus par une pinède ou la suppressiondes feuillus au sein d’une parcelle de résineux entraîne donc une diminution de la diversité mycolo-gique.

Pour les mêmes raisons, l’introduction d’espèces ligneuses ectomycorhiziennes exotiques permetgénéralement l’expression de champignons mycorhiziens spécifiques. Ainsi, toujours selonGuinberteau, dans le parc départemental d’Hostens (Gironde), l’introduction, à des fins ornemen-tales, de mélèzes et de pins sylvestres a permis l’apparition d’espèces de champignons mycorhi-ziens spécifiques (du genre Suillus) qui, jusqu’alors, n’étaient pas connus dans le massif landais. Dela même manière, les plantations de robiniers, comme dans le Bazadais et le Cernès, par la trans-formation de la qualité de l’humus qu’elles ont provoquée, ont permis le développement d’une richeflore myco-saprophytique, en particulier de la famille des Gastéromycètes Phallaceae (genresAnthurus, Clathrus, Geastrum) et des Agaricales (Microlepiota, Echinoderma, Cystolepiota,Melanophyllum, Leucoagaricus), avec des espèces souvent très rares ou du moins inconnues dansla région.

Toutes les interventions sylvicoles qui ont des répercussions sur la matière organique du sol ont,de ce fait, aussi, des répercussions sur la flore mycologique.

Ainsi, la coupe à blanc et le labour qui suit peu après provoquent-ils une sorte de “mise à zéro”des populations de champignons et le redémarrage d’une dynamique où on peut mettre en évi-dence un certain nombre de groupes successifs :

— d’abord un groupe d’espèces pionnières, mycorhiziennes, des genres Laccaria, Hebeloma,Thelephora, Sclerodendron, Pisolithus, Rhizopogon… ;

— puis le groupe des Suillus (Cèpes de pins), des Lactaires et des Gomphides ;

— puis celui des Tricholomes, Inocybes et Russules ;

— enfin, pour les peuplements adultes, le groupe des Ammanites, des Russules et desCortinaires. Pour les champignons saprophytes, les successions sont moins nettes : au départ, surles bois morts des coupes à blanc, on a des lignicoles (Pholiotus, Gymnopilus…) ou des saprophytes(Hygrophoropsis), puis des Mycena et Collibia.

L’enfouissement, lors des labours et du nettoyage des parcelles par le “rouleau landais”, de lastrate herbacée et subligneuse favorise la fructification de la flore fongique en certaines espèces debasidiomycètes (Boletus, Ammanita…) et, quelques années après, son développement (Vivant, com-munication personnelle).

Les tassements du sol, en particulier liés aux engins de débardage, sont défavorables aux champi-gnons mycorhiziens dont les mycéliums, généralement très superficiels, sont lésés.

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On sait depuis longtemps que la fertilisation favorise le développement et la fructification de cer-taines espèces de champignons. Ainsi, en 1978, Garbaye et al. ont montré que, sur une hêtraie aci-dophile (à Luzula luzuloides et/ou Deschampsia flexuosa) des Basses Vosges gréseuses, unefertilisation complète additionnée d’un apport calcique provoquait un développement très importantde pieds bleus (Rhodopaxillus nudus). Ces auteurs ont retrouvé des résultats analogues en Bretagne,toujours sous hêtraie, et dans le Massif Central sous plantation d’épicéas.

De même, l’apport d’une fumure organique permet le développement d’une flore de champignonssaprophytes. On peut le constater dans les forêts soumises à un pâturage important ou, ponctuel-lement, à l’emplacement d’anciens parcs à bestiaux.

Dans la forêt de pins maritimes des Landes de Gascogne, de semblables observations n’ont pasencore été rapportées mais pourraient facilement être faites, en particulier sur les divers dispositifsde fertilisation existants.

Bien que cela ne soit pas une pratique sylvicole, signalons aussi que l’irrigation de parcelles fores-tières sur sol acide favorise la fructification de certains champignons et en particulier des bolets etdes girolles. Mais il s’agit là d’une technique délicate à mettre en œuvre car on risque ainsi de favo-riser des espèces plus hygrophiles et économiquement moins ou peu intéressantes.

On peut donc supposer que l’irrigation en forêt avec des eaux usées de station d’épuration ou d’éta-blissements industriels, telle qu’elle est envisagée en un certain nombre de communes landaises,entraînerait des modifications importantes de la flore fongique.

L’influence de certaines pratiques sylvicoles de débroussaillement sur la propagation de certainschampignons pathogènes (armillaire en particulier) est par ailleurs connue depuis longtemps (Jactelet al., 1995).

En dunes littorales

Il y a un cas où la création de la forêt de pins maritimes n’a pas entravé la dynamique des feuillusmais où elle l’a, au contraire, favorisée : c’est celui de la forêt dunaire littorale. En effet, parce qu’ellea fixé les dunes, la forêt de pins, par la création d’une première couche d’humus et d’un couvertarboré, a permis la colonisation végétale d’un milieu jusqu’alors presque purement minéral. Cette

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“Vieille” dune envahiepar le Chêne vert

à Hourtin (Gironde) :dans ce secteur

des dunes médocaines,Quercus ilex

est très envahissant.Après avoir combattu son

extension, l’ONF préfèremaintenant constituer des

peuplements mélangés.

Photo J. TIMBAL

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colonisation s’est faite à partir d’îlots forestiers préexistants, ceux occupant les restes de vieillesdunes (Timbal et Savoie, 1991), le plus souvent grâce à l’avifaune et aux petits mammifères. Sur ceplan, les espèces les plus dynamiques se révèlent être les Chênes (surtout Quercus ilex) etl’Arbousier (Arbutus unedo) ; les voies de colonisation privilégiées étant les chemins forestiers et lesversants des dunes exposés au nord, et à l’est, plus frais, faisant l’objet de la part des forestiersd’une gestion extensive en raison de leur trop forte pente. Un certain nombre d’études, le plussouvent commandées par l’Office national des Forêts, montrent bien ce phénomène (Despeyroux,1982).

Dans le Médoc, la colonisation des pinèdes littorales par le Chêne vert a été telle que, en certainsendroits, les forestiers ont longtemps lutté contre ce Chêne vert, qui rejette vigoureusement desouche, pour laisser la première place au Pin maritime. Cependant, depuis peu, la politique de l’ONFest de laisser faire le Chêne vert ou de constituer des mélanges Pins-Chênes (constitution d’unsous-étage de Chênes).

Ce problème ne semble pas se poser dans les forêts littorales du sud de l’Aquitaine où le Chêne-liège, qui y remplace le Chêne vert, est moins dynamique (fructification plus irrégulière et rejets desouche moins vigoureux).

LE BILAN ET LES BIOINDICATEURS DE GESTION DURABLE

Trois grandes évolutions peuvent donc être mises en évidence qui vont malheureusement dans lesens d’une réduction de la biodiversité.

La première, la plus importante, est la réduction des zones humides et plus particulièrement des“lagunes”. Cette réduction est étroitement liée au drainage ; drainage généralisé pour permettrel’installation de la forêt mais aussi aggravé pour permettre celle de la maïsiculture et qui se pour-suit toujours.

La deuxième de ces évolutions est la réduction continuelle de la proportion des feuillus soit pardéfrichement et enrésinement de parcelles de feuillus (chênes), soit par élimination directe ou indi-recte des feuillus des parcelles de pins.

Enfin, les différentes pratiques sylvicoles mises en œuvre dans les scénarios de culture intensive duPin maritime aboutissent progressivement à une homogénéisation de la végétation allant dans lesens d’une augmentation de la fréquence des espèces sociales déjà banales et, à l’inverse, d’unediminution rapide de la fréquence des autres espèces.

Ces tendances régressives étant bien mises en évidence, on peut en déduire les indicateurs cor-respondants :

— pour les zones humides, le niveau moyen de la nappe à l’étiage, mesuré sur un grand nombrede sites, peut constituer un bon indicateur. Le nombre de lagunes existantes (dénombrées sur pho-tographies aériennes par exemple) ou leur surface cumulée peuvent également constituer un bonindicateur, bien évidemment corrélé au précédent ;

— pour la proportion de feuillus, on peut se référer tous les dix ans aux chiffres publiés parl’IFN, mais on peut aussi, plus régulièrement, mesurer ce taux, par exemple sur un échantillon dephotographies aériennes ;

— enfin, pour l’homogénéisation de la végétation, on peut penser au suivi régulier, dans chaquetype de lande, et sans doute pour plusieurs âges de la vie d’un peuplement, sur un échantillon repré-sentatif, du nombre moyen d’espèces sur une surface homogène de lande donnée et/ou de la fré-quence d’un certain nombre d’espèces peu abondantes, champignons y compris.

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Bien entendu, la pertinence de ces indicateurs devrait être testée sur quelques années avant qu’ilsne soient définitivement adoptés.

On peut aussi penser que la mise en œuvre de tels indicateurs de gestion durable, et d’autres rele-vant d’autres disciplines, pourrait être du ressort d’un “Observatoire permanent de la forêt landaise”,lui aussi à mettre en place.

CONCLUSIONS

La création, au XIXe siècle, du massif landais de pins maritimes par boisement généralisé des landesa provoqué un appauvrissement important de la biodiversité. C’est surtout, au départ, le boisementdes landes, d’une part les plus humides et tourbeuses (par drainage préalable) et, d’autre part lesplus sèches, qui a été le plus préjudiciable à la biodiversité végétale. D’abord parce que c’étaientdes milieux peu fréquents et ensuite parce que ces milieux écologiquement marginaux renfermaientdes espèces rares. Ce sont aussi des milieux économiquement marginaux qui recouvrent des sur-faces relativement limitées et où le Pin maritime ne trouve pas les conditions d’une croissance inté-ressante. Raison de plus pour les exclure des zones vouées à la sylviculture intensive. Ilappartiendrait alors aux collectivités locales (communes, départements, région…) ou à des conser-vatoires de sites, de les racheter progressivement en usant, quand ils en disposent, du droit de pré-emption, de les prendre en charge, et d’en assurer une gestion conservatoire compatible avec lesusages traditionnels non forestiers (chasse, pêche, loisirs…).

Il est clair que la sylviculture intensive du Pin maritime, surtout par le travail du sol qui est pratiquélors de l’installation des nouveaux peuplements, les courtes révolutions pratiquées et les débrous-saillages réguliers qui sont ensuite effectués, conduit à une uniformisation et une banalisation de lavégétation accompagnatrice.

Il apparaît donc difficile de proposer un ou des indicateurs opérationnels de gestion durable pour laflore et la végétation. Pour la flore, on pourrait peut-être proposer un indice de diversité végétalequi serait, pour chaque type de lande, le nombre d’espèces par unité (à définir) de surface ; indicequi devrait être déduit d’un grand échantillon et/ou le taux de feuillus mesuré sur un échantillon dephotographies aériennes.

Cependant, une sylviculture intensive n’est pas incompatible avec le maintien d’un certain niveau debiodiversité qui est par ailleurs nécessaire à cette même sylviculture en permettant un certaincontrôle des insectes ravageurs comme sont en train de le montrer les expérimentations menées parJactel à l’INRA. Ce maintien d’un certain niveau de biodiversité, on peut l’obtenir en dédiant unetrès faible portion du territoire à cet objet : en gardant des peuplements âgés, en conservant ou encréant des zones feuillues, soit sous forme d’îlots, soit sous forme de bandes le long des routes oule long des ruisseaux, voire en bordure de parcelles ; cette dernière disposition ayant l’avantage decréer les “corridors” nécessaires au maintien de populations animales et végétales suffisammentgrandes pour pouvoir évoluer. On pourrait même réfléchir à inclure dans l’Aménagement forestierdes opérations ponctuelles de génie écologique destinées à créer des biotopes favorables à cer-taines espèces, végétales ou animales, rares et/ou à fort intérêt patrimonial.

Pour les lagunes, il faudrait réfléchir, d’une manière urgente, à un mode de gestion conservatoirequi pourrait être appliqué aux peuplements environnants. Une étude pilote serait sans doute néces-saire pour cela. Il en est de même pour les peuplements riches en chênes-lièges pour lesquels sepose également un problème de conservation des ressources génétiques.

La préservation des patrimoines biologiques passe, dans le massif landais comme ailleurs, par lamise en réserve des quelques zones les plus riches à ce point de vue, zones le plus souvent à éco-

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logie contrastée et d’un intérêt économique très réduit voire nul. Cependant s’en tenir là serait illu-soire : que deviendraient quelques sanctuaires s’ils étaient entourés d’une forêt monospécifique sevidant de toute vie sauvage ? Il est nécessaire aussi de garantir sur l’ensemble des zones productivesun niveau minimum de biodiversité ; niveau minimum qui est d’ailleurs nécessaire au bon fonctionne-ment de l’ensemble. C’est bien pour cela qu’il est retenu comme un des critères d’une gestion durable.

J. TIMBAL - Ch. MAIZERET

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Gorges du Ciron (Gironde) : hêtraie-charmaie ripicole relictuelle :un des joyaux du patrimoine naturel de la Gironde.

Réserve naturelle de l’Étang noir (Seignosse - Landes) :la création de cette réserve naturelle a permis la sauvegarde d’un ensemble

exceptionnel de milieux humides.

Photos J. TIMBAL

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Sur l’exemple de la biodiversité végétale, nous avons voulu montrer que, moyennant des investis-sements et des réductions de surfaces productives tout à fait minimes, on pourra concilier, mêmeen forêt privée, le maintien d’un bon niveau de biodiversité et une sylviculture intensive et perfor-mante du Pin maritime.

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J. TIMBALÉquipe d’Écophysiologie et Nutrition

Station de Recherches forestières

INRA

PIERROTON

F-33610 CESTAS

Ch. MAIZERETGroupe de Recherche et d’Étude

pour la Gestion de l’Environnement

(GREGE)

Les Bayles

F-33720 BUDOS

Remerciements

Nous remercions bien vivement Messieurs J. Favennec de l’ONF, J. Guinberteau de l’Unité INRA de recherchessur les champignons, J. Laporte-Cru de l’Université de Bordeaux I, Ph. Richard, directeur du Jardin botanique deBordeaux et J. Vivant, d’Orthez, pour les renseignements qu’ils nous ont fournis.

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BIODIVERSITÉ VÉGÉTALE ET GESTION DURABLE DE LA FORÊT LANDAISE DE PIN MARITIME : BILAN ETÉVOLUTION (Résumé)

Dans les Landes de Gascogne, la flore et surtout la végétation ont subi deux grandes évolutions depuis l’époque histo-rique : le défrichement de la forêt primitive à base de chênes au profit de la lande puis, au XIXe siècle, le reboisementmassif en pins maritimes. L’intensification sylvicole qui y est maintenant pratiquée pose le problème du caractère durableou non de cette gestion forestière, en particulier dans l’hypothèse des changements climatiques annoncés.

À ce point de vue, la conséquence majeure de la création de la forêt landaise a été la disparition ou la raréfaction d’uncertain nombre de biotopes (écosystèmes) et de la flore plus ou moins spécialisée qui s’y trouvait. Sur le plan patrimo-nial et de la biodiversité, le phénomène le plus dommageable a été la disparition des zones hydriquement contrastées :d’une part les zones de forêt et de landes sèches, d’autre part les zones les plus humides à végétation aquatique etpalustre. Ces disparitions de biotopes ne sont malheureusement pas compensées par la création de biotopes artificielsliés à la mise en valeur sylvicole, où certaines espèces rares peuvent parfois trouver refuge. Ces questions sont succes-sivement abordées pour les arbres puis pour les autres espèces, ligneuses ou herbacées, du sous-bois et des milieuxassociés à la forêt.

À l’échelle locale, celle de la parcelle, est examiné l’impact des différentes pratiques sylvicoles sur la végétation ; ildécoule notamment de la réduction de l’éclairement et du travail du sol réalisé au moment de l’installation des nouveauxpeuplements. Les forêts littorales dunaires, où une dynamique locale de feuillus peut parfois s’observer, font l’objet d’unexamen particulier.

Pour terminer, on essaie de dégager quelques indicateurs biologiques végétaux de gestion durable dont la pertinencereste à tester.

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PLANT BIODIVERSITY AND SUSTAINABLE MANAGEMENT OF THE MARITIME PINE FORESTS OF THE LANDES -AN ASSESSMENT AND OUTLOOK (Abstract)

In the Gascony Landes, the flora, particularly the vegetation, have undergone two major developments in the historicperiod : the primary, essentially oak, forest was cleared leaving moorland, followed by massive reforestation with mari-time pine trees in the 19th century. The intensive sylviculture now practiced raises the issue of the sustainability of thisforest management scheme, in particular if expected global climate changes actually occur.

In this respect, the major consequence of the creation of the forests of the Landes has been the disappearance or rare-faction of a number of biotopes (ecosystems) and of their sometimes specific flora. In terms of the natural heritage andbiodiversity, the most damaging phenomenon has been the disappearance of areas with contrasting water regimenswhere dry forest and moorland areas alternated with more humid areas accommodating aquatic and marshland commu-nities. Unfortunately the disappearance of these biotopes has not been compensated by artificial biotopes associatedwith forest management where rare species sometimes find shelter. These issues are dealt with first in relation to treesand then in relation to other species, both woody and herbaceous, in the undergrowth and other environments associa-ted with forests.

The impact of various forestry practices is examined on the local scale, i.e. that of a plot, as a result of reduced lightexposure and of tillage when new stands are planted. Special attention has been given to the coastline dune forests,where the dynamics of broad-leaved species can be found to be at work locally.

Finally, a number of plant bioindicators are suggested for the purposes of sustainable management. Their relevanceremains to be tested.

J. TIMBAL - Ch. MAIZERET

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