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INTRODUCTION Les réactions biochimiques qui caractérisent la vie repo- sent sur des successions de transferts d’énergie qui tous obéissent aux deux grands principes de la thermodyna- mique tels qu’ils ont été définis par Sadi Carnot : la conservation de l’énergie dans l’Univers et l’évolution générale tendant vers le plus grand degré de désordre de la matière (ou entropie). Mais, en fait, la vie représente en quelque sorte une exception car l’objectif de tout pro- cessus biosynthétique vivant est d’augmenter le degré d’ordre de la matière qui le caractérise, que ce soit à l’échelon moléculaire, cellulaire ou d’organismes plus complexes. Cette notion d’une opposition fondamentale entre la « Vie » et le second principe de la thermodyna- mique a conduit à définir la notion de « négentropie » pour exprimer le concept de l’inverse de l’entropie caractéristique de tous les processus biosynthétiques et d’eux seuls ; comme l’a dit Schrödinger : « Ce qu’un organisme mange est de l’entropie négative… » (1, 2). Les processus biosynthétiques doivent transformer de l’énergie que les organismes vivants puisent dans le milieu extérieur : lumière et matière organique pour les plantes ou matière organique uniquement pour les Bioénergétique X. Leverve, E. Fontaine, F. Péronnet L’essentiel de la question • L’énergie est une propriété de la matière lui permettant de se transformer en générant un travail, ou à l’inverse de se transformer comme résultat d’un travail. • La réalisation des processus biosynthétiques repose sur le couplage énergétique : ce qu’un système perd, un autre le gagne, la somme algébrique de l’ensemble étant toujours négative. • Les réactions d’oxydoréduction, sources d’énergie prédominantes dans notre système biologique, sont des échanges d’électrons : une oxydation est une perte d’électron(s), une réduction, un gain d’électron(s), et ce transfert d’électrons s’accompagne d’une variation d’énergie libre. • Le métabolisme anaérobie impose d’éliminer dans le milieu extérieur les équivalents réduits produits (sous forme de lactate ou d’éthanol par exemple). • Dans les organismes aérobies, le lactate produit au cours de réactions anaérobies locales est recyclé et oxydé dans le cycle de Krebs. • Les cycles futiles représentent une dépense énergétique très difficile à évaluer. Au-delà du problème des varia- tions de rendement, ils représentent des nœuds de régulation extrêmement importants permettant de moduler la rapidité ou l’efficacité des voies métaboliques. • Le métabolisme de repos est de l’ordre de 40 kcal.m –2 .h –1 chez l’adulte. CHAPITRE 2 autres. Il apparaît ainsi que la vie est directement reliée avant tout aux capacités de transduction d’énergie, ce que l’on appelle plus simplement le métabolisme éner- gétique. ASPECTS CELLULAIRES Éléments généraux de thermodynamique L’énergie, du latin en (dans) et εργο (j’agis) : qui agit en dedans, est une propriété (force) de la matière lui per- mettant de se transformer en générant un travail, ou à l’inverse de se transformer comme résultat d’un travail. L’énergie existe sous de nombreuses formes : une gout- telette d’eau placée au sommet d’une montagne possède de l’énergie potentielle ; lorsqu’elle tombe au sein d’une chute d’eau, elle transforme cette énergie potentielle en énergie cinétique ; puis, quand elle s’écrase sur un rocher au bas de la cascade, cette énergie cinétique se transforme en entropie. Par contre, si on canalise la cascade vers une turbine, on peut transformer l’énergie cinétique en une forme utilisable : l’énergie électrique.

Bioénergétique

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Page 1: Bioénergétique

INTRODUCTIONLes réactions biochimiques qui caractérisent la vie repo-sent sur des successions de transferts d’énergie qui tousobéissent aux deux grands principes de la thermodyna-mique tels qu’ils ont été définis par Sadi Carnot : laconservation de l’énergie dans l’Univers et l’évolutiongénérale tendant vers le plus grand degré de désordre dela matière (ou entropie). Mais, en fait, la vie représenteen quelque sorte une exception car l’objectif de tout pro-cessus biosynthétique vivant est d’augmenter le degréd’ordre de la matière qui le caractérise, que ce soit àl’échelon moléculaire, cellulaire ou d’organismes pluscomplexes. Cette notion d’une opposition fondamentaleentre la « Vie » et le second principe de la thermodyna-mique a conduit à définir la notion de « négentropie »pour exprimer le concept de l’inverse de l’entropiecaractéristique de tous les processus biosynthétiques etd’eux seuls ; comme l’a dit Schrödinger : « Ce qu’unorganisme mange est de l’entropie négative… » (1, 2).Les processus biosynthétiques doivent transformer del’énergie que les organismes vivants puisent dans lemilieu extérieur : lumière et matière organique pour lesplantes ou matière organique uniquement pour les

BioénergétiqueX. Leverve, E. Fontaine, F. Péronnet

■L’essentiel de la question

• L’énergie est une propriété de la matière lui permettant de se transformer en générant un travail, ou àl’inverse de se transformer comme résultat d’un travail.

• La réalisation des processus biosynthétiques repose sur le couplage énergétique : ce qu’un système perd, unautre le gagne, la somme algébrique de l’ensemble étant toujours négative.

• Les réactions d’oxydoréduction, sources d’énergie prédominantes dans notre système biologique, sont deséchanges d’électrons : une oxydation est une perte d’électron(s), une réduction, un gain d’électron(s), et cetransfert d’électrons s’accompagne d’une variation d’énergie libre.

• Le métabolisme anaérobie impose d’éliminer dans le milieu extérieur les équivalents réduits produits (sousforme de lactate ou d’éthanol par exemple).

• Dans les organismes aérobies, le lactate produit au cours de réactions anaérobies locales est recyclé et oxydédans le cycle de Krebs.

• Les cycles futiles représentent une dépense énergétique très difficile à évaluer. Au-delà du problème des varia-tions de rendement, ils représentent des nœuds de régulation extrêmement importants permettant demoduler la rapidité ou l’efficacité des voies métaboliques.

• Le métabolisme de repos est de l’ordre de 40 kcal.m–2.h–1 chez l’adulte.

CHAPITRE 2

autres. Il apparaît ainsi que la vie est directement reliéeavant tout aux capacités de transduction d’énergie, ceque l’on appelle plus simplement le métabolisme éner-gétique.

ASPECTS CELLULAIRES

■ Éléments générauxde thermodynamique

L’énergie, du latin en (dans) et εργο (j’agis) : qui agit endedans, est une propriété (force) de la matière lui per-mettant de se transformer en générant un travail, ou àl’inverse de se transformer comme résultat d’un travail.L’énergie existe sous de nombreuses formes : une gout-telette d’eau placée au sommet d’une montagne possèdede l’énergie potentielle ; lorsqu’elle tombe au sein d’unechute d’eau, elle transforme cette énergie potentielle enénergie cinétique ; puis, quand elle s’écrase sur unrocher au bas de la cascade, cette énergie cinétique setransforme en entropie. Par contre, si on canalise lacascade vers une turbine, on peut transformer l’énergiecinétique en une forme utilisable : l’énergie électrique.

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■ Traité de nutrition artificielle de l’adulte

Dans le cas d’organismes vivants, l’énergie est essen-tiellement chimique, mécanique ou électrique. La cha-leur est une forme particulière d’énergie qui est distinctede la température : lorsque l’on chauffe un bloc de glace,la température augmente jusqu’à 0 °C, puis la glace setransforme en eau tandis que la température du mélangeeau/glace reste à 0 °C. Avec la fonte de la glace, la chaleurs’est transformée en une ultime forme d’énergie : le dés-ordre (entropie).

La thermodynamique repose sur deux principes,postulés par Carnot et qui n’ont été depuis ni démontrésni infirmés. Le premier principe stipule que l’énergietotale de l’Univers est constante, ni produite niconsommée, et qu’elle ne peut être que convertie d’uneforme en une autre. Le second principe donne le sensgénéral des réactions physicochimiques : le désordre del’Univers (l’entropie) est en augmentation constante.Tout système évolue spontanément vers le niveau d’é-nergie libre (« utilisable ») le plus bas possible. Ainsi,dans toute réaction biochimique spontanée, l’énergielibre diminue, le système tendant vers le niveau énergé-tique minimal. Certaines réactions sont spontanémenttrès lentes : la probabilité de transformation est faible carelle passe par une étape transitoire dont le niveau éner-gétique est supérieur à l’état initial. Pour accélérer leprocessus, il faut soit apporter de l’énergie à l’état initial,soit abaisser le seuil par un catalyseur (enzyme), ce quiaugmente la probabilité de la réaction.

La vie repose sur des réactions de biosynthèse qui,par définition, augmentent l’ordre de la matière ; elle vadonc à l’encontre du second principe de Carnot (voir ci-dessus le concept de « négentropie » de Schrödinger). Laréalisation de ces processus biosynthétiques repose sur lecouplage énergétique : ce qu’un système perd, un autrele gagne, la somme algébrique de l’ensemble étant tou-jours négative, en accord avec le second principe. Le ∆G°(qui exprime la variation d’énergie libre) de la synthèsede saccharose à partir de glucose et de fructose est de+ 5,5 kcal.mole–1 ; cette réaction ne peut donc se pro-duire spontanément puisque le système « consomme del’énergie » et diminue son entropie. Pour devenir pos-sible, elle doit être couplée à une autre réaction dont le∆G° est négatif et plus grand en valeur absolue. La réac-tion la plus couramment utilisée en biologie est l’hydro-

lyse d’ATP en ADP et phosphate inorganique (Pi) dontle ∆G° est de – 7,3 kcal.mole–1.L’énergie est réellement une propriété de la

matière ; elle peut se convertir en de nombreusesformes et elle peut générer un travail.

Il est très important de tenir compte du fait quel’énergie libérée dans une réaction dépend dumilieu. Ainsi, l’ATP, « monnaie énergétique » de lacellule, a un taux de change variable : la quantitéd’énergie fournie par son hydrolyse dépend desconcentrations d’ADP ou de Pi, produits de la réac-tion. Une même quantité d’ATP peut ainsi libérerplus ou moins d’énergie selon l’environnement !

Le potentiel d’oxydoréduction (redox) est la sourceinitiale unique d’énergie utilisée par les organismesaérobies (donc par l’Homme), tout comme l’énergielumineuse constitue la source initiale d’énergie de laphotosynthèse. Les réactions d’oxydoréduction sont deséchanges d’électrons : une oxydation est une perted’électron(s), une réduction, un gain d’électron(s). Cetransfert d’électrons s’accompagne d’une variationd’énergie libre. C’est cette énergie qui est transformée enpotentiel phosphate (ATP/ADP.Pi) grâce à l’oxydationphosphorylante mitochondriale.

■ Production d’ATP

Métabolisme intermédiaireL’énergie contenue dans la matière et donc dans lesnutriments (glucides, lipides ou protéines) correspond àl’ensemble des forces qui maintiennent la cohésion desdifférents constituants de la matière (« l’ordre ») : parti-cules, molécules, atomes, électrons, éléments du noyau.

Parmi toutes ces forces, la seule forme d’énergie quinous concerne est l’énergie d’oxydoréduction contenuedans les atomes d’hydrogène, c’est-à-dire l’énergiecontenue dans l’électron de l’atome d’hydrogène.

Le potentiel d’oxydoréduction peut être définicomme la probabilité que possède un corps decéder ou de capter un ou plusieurs électrons à uncomposé voisin.

Le catabolisme des nutriments permet de récupérerl’énergie redox qu’ils contiennent grâce à l’action suc-cessive de différentes déshydrogénases (fig. 1).

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Chapitre 2 : Bioénergétique

Un premier groupe de réactions permet de trans-former les aliments en nutriments utilisables par les cel-lules : protéines en acides aminés, polysaccharides englucides simples et lipides en acides gras et glycérol. Unsecond groupe de réactions (glycolyse, β-oxydation,catabolisme des acides aminés) permet de convertir cesnutriments en un intermédiaire commun : l’acétyl-CoA. Sauf dans la glycolyse, l’énergie libérée au cours deces réactions ne conduit pas à une synthèse d’ATP, maiselle est récupérée sous forme d’équivalents réduits(énergie redox). En l’absence d’un système capabled’utiliser cette forme d’énergie (la chaîne respiratoiredes mitochondries), il s’agit alors d’un déchet évacuésous forme de lactate (ou d’éthanol dans le monde deslevures).

Au cours d’une cascade de réactions enzymatiquesparticulières (qui se déroule dans les mitochondries aumême titre que la chaîne respiratoire), dans le cycle deKrebs, l’acétyl-CoA est totalement dégradé en CO2 ethydrogène. Le CO2 est la forme thermodynamiquementla plus stable du carbone (donc un déchet totalementinutilisable pour nous et éliminé, contrairement auxplantes qui peuvent l’incorporer dans la synthèse demolécules organiques). Toute l’énergie redox contenuedans l’acétyl-CoA est transférée sur des transporteursspécifiques : le NAD+ qui se réduit en NADH + H+ (notésimplement NADH), ou le FAD qui se réduit en FADH2.Plus les rapports NADH/NAD+ et FADH2/FAD sontélevés, plus le niveau de l’énergie redox transportée estimportant.

Oxydation phosphorylanteLes organismes aérobies peuvent utiliser l’énergie redoxcontenue dans leurs aliments grâce à l’équipement enzy-matique de la mitochondrie. En effet, le métabolismeénergétique de la cellule primitive se limitait à la pro-duction anaérobie d’ATP obtenue par fermentation dessucres (glycolyse). Ce n’est que secondairement que cettecellule primitive fut colonisée par une bactérie ances-trale, la mitochondrie, qui possédait la propriété detransformer l’énergie redox en potentiel phosphate enutilisant l’oxygène comme accepteur final d’électrons.Cette conjonction de compétences entre la cellule primi-tive rejetant le potentiel redox comme un déchet (sousforme de lactate) et la mitochondrie utilisant ce mêmedéchet pour en faire de l’ATP a permis de réaliser unesymbiose dont les effets bénéfiques se sont prolongésjusqu’à nos jours. Ceci eut lieu alors que l’oxygène

Fig. 1 - Utilisation des nutriments pour la production d’ATP.L’énergie contenue dans nos aliments est transformée en liai-sons phosphate (potentiel phosphate = ATP/ADP.Pi). Nos ali-ments sont tout d’abord transformés en nutriments,c’est-à-dire en substrats directement utilisables par lescellules : les glucides, les lipides et les acides aminés quiconvergent vers une voie finale commune : la fournitured’équivalents réduits (NADH ou FADH2). Il faut noter queseule la glycolyse est capable de fournir de l’ATP en l’absencede toute consommation d’oxygène. L’acétyl coenzyme A estun intermédiaire qui est commun aux 3 grandes voies méta-boliques (acides aminés, glycolyse et β oxydation), de sorteque ces différents substrats entrent en compétition pour lafourniture d’énergie. Ceci explique la nécessité d’étapes régu-latrices importantes (pyruvate déshydrogénase par exemple).Le cycle de Krebs est une voie métabolique particulière qui nesynthétise qu’un seul ATP ou GTP) mais qui permet l’oxyda-tion complète de l’acétyl coenzyme A. L’énergie libérée esttransférée sous forme de potentiel redox (NADH ou FADH2)qui va représenter le véritable carburant de la chaîne respira-toire. C’est dans la mitochondrie qu’a lieu la principale syn-thèse d’ATP cellulaire, l’oxygène qui représente le comburantn’intervient qu’au niveau de la fin de la cascade enzymatique(dernier complexe de la chaîne respiratoire : la cytochromeoxydase). Les produits de dégradation sont l’ammoniac, le gazcarbonique et l’eau.

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■ Traité de nutrition artificielle de l’adulte

apparaissait sur Terre, conséquence de la dégradation del’eau en hydrogène et oxygène sous l’effet de la lumière.L’agression intense qu’a représenté l’apparition de l’oxy-gène sur Terre, du fait de son pouvoir oxydant considé-rable, a été responsable de la disparition d’un grandnombre de formes vivantes, la présence d’organellesdouées de la capacité de réduire l’oxygène (mitochon-dries, peroxysomes) ayant vraisemblablement repré-senté un élément important de protection (3). Uncomplexe multi-enzymatique spécifique, la chaîne respi-ratoire, catalyse la réaction :

NADH + H+ + 1/2 O2 → H2O + NAD+ + énergie,

la plus grande partie de cette énergie étant utilisée pourla synthèse d’ATP : c’est l’oxydation phosphorylante.L’énergie libérée lors de la combustion de l’hydrogèneest utilisée par la chaîne respiratoire pour expulser desprotons de la matrice vers le cytosol, ce qui génère de

part et d’autre de la membrane un gradient de concen-tration en protons (fig. 2). De même que l’eau contenuedans un barrage constitue une forme d’énergie pouvantêtre transformée en électricité, ce gradient de concentra-tion représente un potentiel important qui est utilisépour la synthèse d’ATP grâce à un autre complexe enzy-matique, l’ATP synthétase.

La mitochondrie est le lieude déclenchement de la mort cellulaireParmi de très nombreuses propriétés, en rapport avecl’oxydation phosphorylante, la mitochondrie est liée demanière intime aux processus qui régulent le déclenche-ment de la mort cellulaire par apoptose. Ces processussont en rapport avec le déclenchement d’un phénomèneparticulier : la perméabilité transitionnelle de la mem-brane mitochondriale interne sous l’effet du calcium, dustress oxydant et de différents autres phénomènes.

Fig. 2 - Utilisation mitochondriale de l’oxygène dans la synthèse de l’ATP.Dans la mitochondrie, l’oxydation phosphorylante permet de transférer l’énergie contenue dans les atomes d’hydrogène de notrealimentation sous la forme de liaisons phosphate riches en énergie (ATP). Cette énergie transportée, forme de potentiel redox(∆E′h) est exprimée par le rapport NADH/NAD (I). La chaîne respiratoire (2) catalyse la réaction de d’oxydation du NADH avecl’oxygène produisant de l’eau, du NAD+ et de l’énergie. Cette énergie est alors utilisée pour pomper (1) des protons de l’intérieurvers l’extérieur de la mitochondrie. Le résultat de l’activité de la chaîne respiratoire et de l’imperméabilité de la membraneinterne est la constitution d’un gradient électrochimique de protons (II = ∆µh+). L’énergie contenue dans ce gradient de protonest libérée lors de la ré-entrée des protons à travers l’ATPsynthase (3) et est utilisée pour la synthèse d’ATP permettant de générerun potentiel phosphate (III = ∆Gp). L’imperméabilité membranaire aux protons n’est pas totale de sorte qu’une partie del’énergie est perdue sous forme de fuites membranaires (2).

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Chapitre 2 : Bioénergétique

La libération de l’espace intermembranaire vers le cyto-plasme de différentes protéines proapoptotiques,comme le cytochrome c, déclenche une cascade d’activa-tion de protéines particulières, les caspases, conduisant àla mise en route des phénomènes nucléaires caractéris-tiques de l’apoptose.

Rendement de la synthèse aérobie d’ATP :le rapport ATP/OLe rendement de l’oxydation phosphorylante peut êtreassimilé au rapport entre la quantité d’ATP produite etla quantité d’oxygène consommée (rapport ATP/O). Onconsidère classiquement que ce rapport est de 3 pour leNADH et de 2 pour le FADH2. Ceci tient à ce que lepotentiel redox du FADH2 est inférieur à celui duNADH. On voit bien sur la figure 2 que les électronsfournis par le FADH2 entrent au niveau du second com-plexe de la chaîne respiratoire et que, de ce fait, ils n’ontque deux sites de couplage au lieu de trois lorsque ledonneur d’électrons est le NADH.

relatives (syndrome de basse T3 au cours du jeûne pro-longé par exemple).

Par ailleurs, l’imperméabilité de la membrane mito-chondriale aux protons, base du couplage entre respira-tion et phosphorylation, n’est pas absolue. La ré-entréepassive de protons, c’est-à-dire en dehors de l’ATP syn-thase, ne conduit pas à la synthèse d’ATP : l’énergie estdissipée sous forme de chaleur (fig. 2). En fonction deson importance, ce phénomène, appelé découplage (ouleak), a pour conséquence de moduler le rapport ATP/O.La première démonstration physiologique de ce phéno-mène a été liée à la découverte du rôle de la graisse bruneet de la thermogénine (Uncoupling Protein – UCP).Depuis cette découverte, d’autres protéines décou-plantes (UCP2 et UCP3) ont contribué à renforcerencore l’intérêt porté à ce mécanisme. L’étude de cedomaine est en pleine expansion car, selon les tissusimpliqués (tissu adipeux blanc, muscle, macrophages,foie), différentes voies métaboliques ou de grandes fonc-tions physiologiques pourraient être régulées par ajuste-ment du rendement, comme le contrôle de l’obésité oula production de radicaux libres de l’oxygène parexemple (6-10). On a également montré que la perméa-bilité de la membrane mitochondriale pourrait varier enfonction de la teneur en acides gras poly-insaturés durégime (11, 12).

Enfin, le dernier mécanisme capable de modifier lerapport ATP/O est la variation du couplage des pompesmembranaires (chaîne respiratoire et ATP synthétase).Sans entrer dans le détail de mécanismes complexes (12,13), il faut mentionner que, in vitro, on a pu montrerque certains anesthésiques (halothane, chloroforme,bupivacaïne) et médicaments (almitrine) peuventmodifier le couplage des pompes membra-naires (15, 16).

Intérêt des modifications de rendementSi, au premier abord, il est clair que toute baisse du rap-port ATP/O représente une perte d’efficacité, car il fautdavantage d’oxygène et de substrats réduits pour lamême synthèse d’ATP, la possibilité de dissocier respira-tion (oxydation) et phosphorylation peut offrir diffé-rents avantages.

Le premier est la production de chaleur, comme celaa été bien mis en évidence dans le tissu adipeuxbrun (17). Initialement découvert chez les mammifèreshibernants, ce tissu a pour rôle, non pas de stocker deslipides, mais de les consommer in situ pour produire de

Selon que les substrats produisent une proportionplus ou moins grande de FADH2 par rapport auNADH (1/6 pour le glucose et 2/6 pour les acidesgras), le rendement de la synthèse d’ATP (rapportATP/O) varie.

La membrane mitochondriale est imperméable auxéquivalents réduits et le potentiel redox ne peut êtretransféré de l’autre côté de celle-ci que grâce à deux sys-tèmes échangeurs : la navette malate-aspartate ou lanavette glycérol-3-phosphate/dihydroxyacétone phos-phate (4). Ces deux navettes ne sont pas équivalentes : lapremière régénère du NADH dans la mitochondrie,tandis que la seconde fournit du FADH2. Puisque leNADH fournit à la chaîne respiratoire 50 % d’énergie deplus que le FADH2, l’utilisation de l’une ou l’autre de cesdeux navettes a pour conséquence d’influencer lerapport ATP/O. Il est important de signaler que laconcentration de l’enzyme clef de la navette glycérol-3-phosphate/dihydroxyacétone phosphate, la glycérol-3-phosphate déshydrogénase mitochondriale, estfortement influencée par les hormones thyroïdiennesqui jouent un rôle dans sa transcription (5). Ceciexplique, au moins en partie, l’augmentation du méta-bolisme de base dans les hyperthyroïdies, voire l’amélio-ration du rendement dans certaines hypothyroïdies

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■ Traité de nutrition artificielle de l’adulte

la chaleur. Les adipocytes qui le composent possèdentdes mitochondries spécialisées porteuses d’une protéineintramembranaire découplante, la thermogénine ouUCP qui est un canal à protons. Sous certaines condi-tions, celui-ci permet de dissiper le gradient de protons,de sorte que toute l’énergie libérée au niveau de la chaînerespiratoire se transforme en chaleur.

Pour les protéines, du fait de leurs compositions trèsvariables, on utilise une protéine standard[Kleiber (20)] :• C100 H159 O32 N26 S0,7 + 105,3 O2 → 87 CO2 + 53,5 H2O

+ 13 CO(NH2)2 + 0,7 SO3 + 10 619 kcal.mole–1

En supposant que les équivalents réduits fournissentune quantité d’ATP constante (3 ATP pour un NADH et2 ATP pour un FADH2) et en tenant compte de la pro-duction d’ATP par phosphorylation au niveau du sub-strat (glycolyse et cycle de Krebs), on peut calculer laquantité d’ATP formée lorsque chaque type de substratest oxydé. Les résultats de ces calculs sont rapportés dansle tableau I (21). On peut ainsi déterminer le rendementbioénergétique (quantité d’énergie libre récupérée sousforme d’ATP) : la combustion d’une mole de glucoselibère 697 kcal tandis que les 38 moles d’ATP générées(38 × 12 kcal) correspondent à 456 kcal, soit un rende-ment de 0,65.

Métabolisme énergétique anaérobieClassiquement, on admet qu’un sujet adulte utilise etresynthétise quotidiennement sa propre masse d’ATP.En supposant que celui-ci ne provienne que du glucose,on peut calculer que l’oxydation complète de 650 g deglucose permet la synthèse de 70 kg d’ATP. En l’absencede mitochondries, et donc d’oxydation phosphorylante,il faudrait utiliser environ 13 kg de glucose pour obtenirla même quantité d’ATP. On voit bien l’avantage consi-dérable de la production aérobie d’ATP, la présence demitochondries permettant une économie considérablede substrat. Si la production extramitochondrialed’ATP est quantitativement mineure (environ 5 %), ellejoue un rôle qualitatif important et de mieux en mieuxreconnu. En effet, du fait des phénomènes de comparti-mentation cellulaire, certaines fonctions dépendentplutôt de l’ATP glycolytique et d’autres de l’ATP mito-chondrial (voir plus loin). La formation extramito-chondriale d’ATP est classiquement qualifiéed’anaérobie, et on distingue la production anaérobielactique (glycolyse) et alactique (adénylate kinase etcréatine kinase).

Métabolisme énergétiqueanaérobie alactiqueLa première voie métabolique énergétique anaérobiealactique est la réaction :

• ADP + ADP ↔ ATP + AMP

Les membranes des mitochondries des mammi-fères diffèrent de celles des reptiles par leur imper-méabilité aux protons, moindre chez lesmammifères, et par leur richesse en acides graspoly-insaturés supérieure chez les mammi-fères (10). D’un côté, la différence de rendement,du fait de la plus grande imperméabilité est à l’a-vantage des reptiles, mais la production de chaleurplus importante chez les mammifères peut repré-senter un avantage certain, par exemple dans lemaintien de l’homéostasie thermique corporellequelle que soit la température de l’environnement.

Par ailleurs, la diminution du rapport ATP/O liée audécouplage peut présenter des effets anti-radicalaires. Eneffet, du fait de son grand pouvoir oxydant, l’oxygène est unsubstrat de choix pour la synthèse aérobie d’ATP.Cependant, un tel pouvoir oxydant peut devenir uninconvénient majeur en cas de réactions d’oxydationincontrôlées (excès de production de radicaux libres, voirchapitre 20). À côté de l’effet antioxydant de très nombreuxcomposés (vitamines E et C, sélénium, etc.) ou de systèmesenzymatiques spécifiques (superoxydes dismutases, glutha-tion peroxydase, catalase), le maintien d’une pression par-tielle d’oxygène cellulaire très basse (favorisée par le« découplage » des mitochondries) pourrait égalementjouer un rôle dans cette protection anti-radicalaire (18, 19).

Production aérobie d’ATPSans tenir compte des variations du rapport ATP/O quel’on vient de décrire, et dont l’amplitude physiologiquen’est d’ailleurs pas bien connue, on estime habituelle-ment la production d’ATP à partir de l’oxydation com-plète des différents nutriments à l’aide des équationsd’oxydation suivantes :• glucose C6 H12 O6 + 6 O2 → 6 CO2 + 6 H2O

+ 697 kcal.mole–1

• acide palmitique C16 H32 O2 + 23 O2 → 16 CO2

+ 16 H2O + 2 480 kcal.mole–1

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Chapitre 2 : Bioénergétique

couplages enzymatiques qui permettent d’augmenterl’efficacité du transport de l’ADP et de l’ATP à travers lamembrane mitochondriale externe et de « guider » lesflux d’énergie dans la cellule entre sites de production etsites de consommation (23, 24, 25).

Métabolisme énergétiqueanaérobie lactiqueLa glycolyse (glucose-pyruvate) est par définitionanaérobie. Lorsqu’on parle de glycolyse aérobie, on faitallusion au devenir du pyruvate…, ce qui n’est plus laglycolyse. La glycolyse ne libère environ que 7 % del’énergie contenue dans une molécule de glucose(47 kcal.mole–1), avec production de deux moléculesd’ATP par molécule de glucose, et ceci sans utiliserd’oxygène. Cette source d’énergie est la seule possiblepour les hématies qui sont dépourvues de mitochon-dries (fig. 3). D’un point de vue quantitatif, ce méta-bolisme n’est pas négligeable à l’échelle de l’organismedans son ensemble, si l’on considère que les hématiesreprésentent un « organe » anaérobie de 2,5 kgenviron. Les cellules transparentes de la cornée sontégalement dépourvues de mitochondries et dépendent

Catalysée par l’adénylate kinase (myokinase dans lemuscle), cette réaction est quantitativement mineurequant à l’ATP produit, mais son intérêt est surtout dediminuer la concentration d’ADP en cas de baisse d’ATP,ce qui permet de maintenir le potentiel phosphate(ATP/ADP.Pi), au prix d’une réduction de la sommeATP + ADP proportionnelle à la formation d’AMP.Quand la demande énergétique est élevée, l’AMP ainsiformé active certaines voies métaboliques énergétiquescomme la glycolyse (phosphofructokinase) (22).

À l’exception notable du foie, la plupart des tissuspossèdent un autre composé « riche en énergie » à côtéde l’ATP : la phosphocréatine (PCr). Il s’agit de la formephosphorylée de la créatine (Cr) selon la réaction :

• PCr + ADP ↔ Cr + ATP

Cette réaction, catalysée par la créatine kinase, esttrès proche de l’équilibre (rendement énergétique voisinde 100 %). La PCr est, d’une part, une réserve d’énergiepermettant d’amortir des variations importantes et bru-tales de la consommation d’ATP (par exemple au coursde l’initiation de l’effort). Mais, d’autre part, le couplePCr/Cr est impliqué dans différents mécanismes de

Tableau I - Consommation d’oxygène, production d’ATP et de déchets (et leurs équivalents énergétiques) pour chaque substrat.La protéine utilisée est une protéine standard (16). La production d’ATP a été calculée en admettant (i) que l’oxydation de1 NADH (qu’il soit d’origine mitochondriale ou cytosolique) fournit 3 ATP ; (ii) que l’oxydation de 1 FADH2 fournit 2 ATP ; etque (iii) le ATP formé au niveau du cycle de Krebs est équivalent à l’ATP.

Glucose Acide palmitique Protéine standard

Masse molaire (g) 180 256 2 257,4O2 consommé (L/g) 0,747 2,013 1,045CO2 produit (L/g) 0,747 1,4 0,864H2O produit (g/g) 0,6 1,125 0,427Urée produit (g/g) – – 0,346Azote produit (g/g) – – 0,161QR 1,00 0,70 0,83

Potentiel énergétique (kcal/g) 3,87 9,69 4,704Équivalent énergétique

de l’O2 (kcal/L) 5,19 4,81 4,50du CO2 (kcal/L) 5,19 6,92 5,44de l’eau (kcal/g) 6,45 8,61 11,03de l’urée (kcal/g) – – 13,61de l’azote (kcal/g) – – 29,17

ATP synthétiséen mol/mol 38 129 450en kcal/mol 456 1 548 5 400rendement 0,65 0,62 0,51

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de ce fait également d’un métabolisme strictementanaérobie. Enfin, certains tissus très peu vasculariséscomme les cellules de la médullaire rénale, transitoire-ment hypoxiques ou avec un déséquilibre entredemande et offre, comme le tissu musculaire à la phaseinitiale du mouvement et au cours des exercicesintenses, sont également très dépendants de la produc-tion anaérobie d’ATP. Mais, même dans les tissus« oxydatifs », la production d’ATP par la voie glycoly-tique est qualitativement importante. Différents résul-

tats expérimentaux sont très en faveur d’une compar-timentation cellulaire, l’ATP fourni par la glycolyse(extramitochondrial) et celui fourni par l’oxydationphosphorylante (mitochondrial) ne jouant pas lemême rôle. Dans le myocarde, on a pu montrer quel’énergie nécessaire à la contraction était préférentiel-lement fournie par l’ATP d’origine mitochondriale,tandis que l’énergie nécessaire à l’entretien du poten-tiel de membrane l’était plutôt par l’ATP d’origineglycolytique (fig. 4) (25). Au cours de diverses situa-

Fig. 3 - Recyclage de glucose : cycles de Cori et de Felig.La synthèse de glucose par le foie peut être séparée en synthèse de novo et recyclage. Le lactate et l’alanine sont les précurseursles plus importants. Le cycle de Cori (glucose/lactate) et celui de Felig (glucose/alanine) représentent un recyclage entre com-posés à 6 ou à 3 carbones. Il est intéressant de noter que ce cycle dissipe les deux tiers de l’énergie immédiatement sous formede chaleur puisque 6 ATP sont nécessaires pour la synthèse de glucose dans le foie tandis que 2 seulement sont libérés lors del’hydrolyse (hématies, muscle ou autre tissu) en composé à 3 carbones. En revanche, la source énergétique utilisée par le foie pro-vient principalement de l’oxydation des lipides, de sorte que l’ATP glycolytique, fourni obligatoirement dans l’hématie ou demanière facultative dans le muscle, provient en fait des lipides. Cet exemple illustre l’un des aspects régulateurs importants descycles futiles : un compromis entre un avantage qualitatif (les lipides sont bien davantage stockés que les glucides) et un inconvé-nient quantitatif (le rendement n’est que d’un tiers).

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Chapitre 2 : Bioénergétique

tions pathologiques, comme l’hypoxie chronique, ladéfaillance circulatoire, les modifications métabo-liques liées à une croissance tumorale ou auxagressions diverses (infectieuses, traumatiques,inflammatoires, etc.), la proportion entre productionglycolytique et mitochondriale d’ATP est modi-fiée (26-30). Récemment, il a été montré que l’éléva-tion de la production de lactate, au cours d’étatsseptiques ou d’agression, était surtout en rapport avecce mécanisme (31, 32).

Parallèlement à la synthèse d’ATP, la glycolyse libèredes équivalents réduits (NADH). La réduction du pyru-vate en lactate, bien que non directement liée à la pro-duction d’énergie, est indispensable pour que laglycolyse se poursuive (fig. 4) grâce à la régénération deNAD+, dont le pool est limité. Lorsque le lactate ne peutêtre éliminé (ischémie), le déficit de la phosphorylationoxydative a pour conséquence une diminution dupotentiel phosphate avec accumulation simultanéed’équivalents réduits.

Fig. 4 - Rôle central du pyruvate dans l’homéostasie énergétique cellulaire : complémentarité des diverses sources.Le contrôle de la production anaérobie d’ATP est effectué en partie au niveau de la phosphofructokinase (1), enzyme dépen-dante de nombreux paramètres et en particulier du pH (voir chapitre Équilibre acido-basique) ainsi que par le niveau énergé-tique cellulaire. Le pyruvate formé à trois devenirs possibles : l’oxydation mitochondriale (2) qui permet de régénérer leséquivalents réduits (NADH) en NAD ; la réduction en lactate permettant d’exporter les équivalents réduits inutilisables endehors de l’oxydation phosphorylante (3) et la transamination en alanine.

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■ Traité de nutrition artificielle de l’adulte

Les organismes strictement anaérobies éliminent dansle milieu extérieur les équivalents réduits produits par laglycolyse (via le lactate ou l’éthanol selon les organismes)qui sont pour eux des déchets. En revanche, dans les orga-nismes aérobies, comme l’Homme, le lactate n’est prati-quement jamais excrété comme un déchet mais est utilisécomme un métabolite (si l’on excepte les pertes urinairesou sudorales très faibles en regard de la production) vial’oxydation en pyruvate soit dans la gluconéogenèse, soitdans le cycle de Krebs. L’oxydation mitochondriale néces-site évidemment de l’oxygène. Quant à la gluconéogenèse,elle consomme 6 ATP par mole de glucose synthétisé, les-quels proviennent de l’oxydation phosphorylante (fig. 3).

réserves (300 g environ) impose en effet un parfait asser-vissement de la synthèse à l’utilisation. Dans cetteconception, la consommation d’ATP se traduit par uneréduction du potentiel phosphate, responsable d’une sti-mulation de la synthèse mitochondriale d’ATP : c’est ladiminution du potentiel phosphate qui stimule la respi-ration mais le corollaire est qu’il faut que le potentieldiminue pour stimuler la synthèse !

Cette conception classique ne reflète pas toute laréalité. Il est des situations où, à l’opposé, c’est l’utilisa-tion de l’ATP qui est influencée par sa synthèse : on neconsomme que ce qui est produit et tout ce qui est pro-duit. Ainsi, au cours de l’anoxie, la chute du potentielphosphate est beaucoup moins marquée que ne pour-raient le laisser prévoir le pool et le renouvellement del’ATP (34). Il existe donc une adaptation de l’utilisationde l’ATP aux capacités de production. De même, commele suggèrent certains travaux récents, un « excès » d’ATPpourrait stimuler son utilisation. Cette hypothèse a étéproposée pour expliquer la stimulation de la respirationcellulaire après addition d’acides gras (35).

UTILISATION DE L’ATP

■ Différents postes de dépenseIl existe trois grands postes de dépense énergétique cel-lulaire : les transports actifs, les phénomènes de synthèseet la contraction des fibres musculaires.

La vie, sous sa plus simple expression, commenceavec la constitution d’une membrane, délimitant unmilieu intérieur différent du milieu extérieur (3). Cettedifférence nécessite une activité de transport permettantde maintenir, en échange d’une consommation d’éner-gie, un gradient de concentration.

Dans le cas particulier de l’exercice intense et decourte durée, la consommation de glucose-6-phosphate par la glycolyse (qui peut dépasser500 mmol.min–1) excède largement la vitesse d’en-trée du glucose dans la cellule (environ5 mmol.min-1). Le substrat de la glycolyse provientalors de façon quasi exclusive des réserves de glyco-gène de la cellule musculaire. C’est là un avantageénergétique car l’activation d’un résidu glycosylprovenant du glycogène, en hexose diphosphate, neconsomme qu’un seul ATP, contre deux pour le glu-cose. Le bilan net est que, pour deux lactates pro-duits, la glycolyse libère trois ATP à partir duglycogène contre deux à partir du glucose.

Chez l’Homme, si dans une cellule ou un organe del’ATP peut être synthétisé de manière anaérobie,lorsque l’organisme est pris dans son ensemble ils’avère que tout l’ATP est produit par la voie oxyda-tive, soit directement, soit de manière différée : endehors de la situation aiguë d’accumulation de lac-tate, transitoire et réversible, le métabolisme éner-gétique est, en dernière analyse, strictementaérobie. « Le foie respire pour le globule rouge,lequel est dépourvu de mitochondries ! »

Contrôle réciproque de la synthèseet de l’utilisation de l’ATPClassiquement, on considère que la production d’ATPest sous la dépendance de son utilisation (33). La grandedisproportion entre renouvellement (70 kg.j–1) et

Chez l’Homme, au repos, l’ensemble des phéno-mènes de transport correspond à 30 à 40 % de l’éner-gie produite ce qui souligne bien leur importance.Ces transports, ATP dépendants, sont responsables :(i) du transport net de différentes molécules (co-transport des acides aminés par exemple) ; (ii) dumaintien des différents potentiels de membrane(phénomènes d’excitation, potentiels d’action) ; (iii) dela régulation de l’osmolarité et donc du volume et del’intégrité cellulaires ; et enfin (iv) de signaux intra-cellulaires (variations rapides de la concentrationintracellulaire de calcium par exemple).

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Chapitre 2 : Bioénergétique

La synthèse des différentes molécules utilisées par lescellules représente un coût énergétique important. Onconnaît la consommation théorique d’ATP nécessitéepar ces synthèses (36) : 6 ATP sont nécessaires pour syn-thétiser une molécule de glucose à partir de lactate,4 ATP pour une molécule d’urée à partir d’ammoniaqueet d’aspartate, 4 ATP par acide aminé incorporé dansune protéine, 1 ATP par élongation de deux carbones aucours de la lipogenèse, etc. En fait, il est beaucoup plusdifficile de connaître le coût réel en ATP de ces synthèsesin vivo. Ainsi, par exemple, la synthèse d’urée consommel’équivalent de 4 ATP, mais fournit aussi 1 NADH (régé-nération de l’aspartate) correspondant en théorie à lasynthèse de 3 ATP. La synthèse d’urée ne coûterait in finequ’un seul ATP. Inversement, le coût réel de la synthèsedes protéines est supérieur au chiffre de 4 ATP par acideaminé incorporé énoncé plus haut, car il faut égalementtenir compte du coût énergétique de toutes les étapes enamont, telle que la synthèse et le transport des ARN.Enfin, la dégradation de certains constituants intracellu-laires est un phénomène énergétiquement coûteux.L’exemple le plus connu est celui des protéines dont ladégradation est ATP dépendante quelle que soit la voie(voir chapitre 6). L’ATP est consommé lors du marquagedes protéines à dégrader par l’ubiquitine, de la confec-tion des membranes des vacuoles (autophagie), dumaintien de l’acidité des lysosomes et plus généralementdes phénomènes de dégradation des constituants intra-vacuolaires (21).

Le dernier poste de dépense d’ATP est la contractiondes myofibrilles.

■ Une même activité biologiquepeut avoir un coût variable en ATP

Nous avons vu que l’efficacité de l’oxydation phospho-rylante pouvait varier, ce qui modifie le coût énergétiqued’une production d’ATP donnée. De même, pour unposte de dépense donné, le coût en ATP peut varier. C’esttout le problème du coût de la régulation par les cyclesdits futiles.

Dans la gluconéogenèse à partir du lactate parexemple, l’équivalent de deux ATP est consommé lors dela conversion du pyruvate en phosphoénolpyruvate(PEP), lequel peut être un substrat pour la gluconéo-genèse ou pour la pyruvate kinase conduisant à un retourau pyruvate initial. Toutefois, cette dernière réaction nerégénère qu’un ATP : le cycle pyruvate-PEP-pyruvate estun cycle futile qui consomme un ATP à chaque tour. Plus

ce cycle est actif, plus la synthèse de glucose est coûteuse enapparence. Cependant, ce coût en ATP est le prix à payerpour la rapidité de la régulation de la gluconéogenèse :l’interruption brutale de ce cycle (inhibition de la pyru-vate kinase par le glucagon par exemple) permet d’aug-menter quasi instantanément la production de glucosesans avoir à stimuler au préalable une machinerie méta-bolique lourde (respiration, phosphorylation, transport,synthèse d’intermédiaires, etc.). De fait, le glucagon, quiinhibe la pyruvate kinase, stimule fortement la gluconéo-genèse avec une très faible augmentation de la respirationcellulaire (37). Cet exemple illustre le rôle essentiel jouépar les cycles futiles dans l’ajustement fin et rapide del’activité de nombreuses voies métaboliques (fig. 5).

Les cycles futiles occasionnent une dépense éner-gétique considérable, bien que l’on ne sache pasbien l’évaluer de façon précise. Selon les circons-tances et/ou les individus, la dépense pour uneactivité métabolique donnée peut varier demanière importante.

Dans le même ordre d’idée, le cycle de Cori (forma-tion de lactate à partir du glucose dans les tissus péri-phériques – resynthèse de glucose à partir du lactatedans le foie) est coûteux en énergie, mais présente desavantages métaboliques. Un glucose conduit à la forma-tion de deux ATP et de deux molécules de lactate, tandisque la synthèse d’un glucose à partir de deux moléculesde lactate coûte six ATP (fig. 3). Ainsi, pour délivrer deuxATP en périphérie, il en coûte six au niveau du foie. Enrevanche, si on raisonne sur le plan qualitatif et nonquantitatif, on constate l’intérêt d’une telle voie métabo-lique : l’ATP produit à la périphérie est d’origine glyco-lytique, tandis que l’énergie utilisée par le foie pour sonmétabolisme provient très majoritairement de l’oxyda-tion des acides gras. Ainsi, le cycle de Cori permet defournir, in fine, de l’énergie provenant des lipides à destissus incapables de les métaboliser directement(hématies par exemple) (38, 39).

■ Dépense énergétiqueLe métabolisme basal est difficile à déterminer demanière rigoureuse, et on lui préfère le métabolisme derepos qui est de l’ordre de 40 kcal.m–2.h–1 chez l’adulte(surface en cm2 = 71,84 × H0,725 × M0,425, H = taille encm et M = poids en kg).

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Pour comparer différents individus, il faut rapporterle métabolisme de repos à la masse totale, à la massemaigre, à la surface corporelle, ou encore à la masseélevée à la puissance 0,75. Chacune de ces expressionspeut faire l’objet de critiques et ceci limite les comparai-sons entre individus très différents. Ainsi, chez les sujets

très dénutris, la perte de masse corporelle, principa-lement aux dépens du tissu adipeux et de la massemusculaire – tissus à faible dépense énergétique derepos – a pour conséquence, de surreprésenter les tissusà haute dépense énergétique. On peut ainsi faussementconclure à un hypermétabolisme.

Fig. 5 - Représentation schématique de l’efficacité des cycles futiles dans la régulation métabolique.Si l’on considère un cycle métabolique avec deux activités en miroir : le flux résultant net est représenté par la différence entreles vitesses respectives [(A → B) – (B → A)]. Il est clair que ce flux net est indifférent à la vitesse réelle (110/100 versus 11/1donnent le même résultat de 10). En revanche, si l’on inhibe ou si l’on active l’une des deux voies, le résultat sur le flux sera lar-gement dépendant de la vitesse réelle du cycle. Ainsi, dans l’exemple ci-dessus, 10 % d’augmentation de l’activité enzymatiqueest responsable d’une activation de plus de 100 % dans un cas et de 10 % dans l’autre.

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Comme le montre le tableau II, le foie, le cœur, lesreins et le cerveau consomment environ 60 % de l’éner-gie totale, alors que leur masse n’est que de 5,5 %environ de la masse totale.

De très nombreux facteurs influencent la dépenseénergétique : l’âge (55 kcal.m2.h–1 chez le nourrisson en

phase de croissance et 35 kcal. m–2.h–1 chez le sujetâgé), le sexe (10 % supérieur chez l’homme), la massede tissu cellulaire actif, la température (10 % d’aug-mentation par °C), la prise alimentaire, l’état deveille, etc. (40) et, bien sûr, l’activité physique(tableau III).

Tableau II - Contribution des principaux organes à la consommation basale d’oxygène et au poids corporel.Ces valeurs sont approximatives, elles varient selon le sexe, l’âge et l’activité.

Consommation d’O2 (% du VO2 total) Poids (% du poids du corps)

Foie 20 2,5

Cerveau 20 2,0

Cœur 10 0,5

Reins 10 0,5

Muscles 20 40,0

Autres tissus 20 54,5

Tableau III - Dépense énergétique et puissance développée au repos et dans diverses situations physiologiques ou pathologiques.Les chiffres indiqués sont des valeurs moyennes approximatives normalisées pour un jeune adulte masculin de 70 kg (selon lerendement mécanique estimé entre 15 et 50 %).

Situation Dépense totale et durée Puissance Remarques

Métabolisme de base 1 600-1 800 kcal.j–1 75-85 W À jeun, environnementthermique neutre

Dépense quotidienne 2 300-2 500 kcal.j–1 110-120 W Sujet sédentaire

Exposition au froid 370 kcal.3 h–1 moyenne : 150 W 5 °C, vent de 1 m/s,pic : 350 W température rectale de 36,5 °C

Polytraumatisé 1 900-2 200 kcal.j–1 90-100 W

Infection grave 2 100-2 700 kcal.j–1 100-130 W

Grand brûlé 2 500-3 600 kcal.j–1 120-170 W

Haltérophilie 2 à 5 kcal en 0,88 s 8 000 à 25 000 W Arraché de 150 kg

100 m 12 kcal en 10 s 5 000 W

5 000 m 375 kcal en 13 min 2 000 W

Marathon 3 200 kcal en 2 h 10 1 700 W

Triathlon 10 000 kcal en 8 h 1 400 W

Tour de France 200 Mcal en 23 j 415 W 3 860 km

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■ Traité de nutrition artificielle de l’adulte

■ Coût énergétiquede l’activité physique

L’activité physique est le phénomène biologique respon-sable des dépenses énergétiques totales les plus élevéessur de longues périodes, ainsi que des puissances les plusgrandes pendant de courts instants (tableau III).L’énergie dépensée en sus de la dépense de repos cor-respond à trois besoins différents. Le premier est lebesoin en énergie du système contractile de la fibre mus-culaire striée : c’est le poste de dépense le plus impor-tant. Cependant, une partie de l’énergie est aussidépensée pour repomper dans le réticulum sarcoplas-mique le Ca2+ qui en est libéré lors de la dépolarisationde la membrane (1 ATP/2 Ca2+). Ce repompage repré-senterait environ 30 % du coût énergétique total de lacontraction musculaire (26). Enfin, une partie de l’éner-gie est dépensée pour la circulation (5 à 6 % dutotal) (41) et la respiration (5 à 15 % du total) (1). Ladépense énergétique des autres organes et tissus n’estque peu ou pas affectée par l’exercice (2 à 5 % de ladépense énergétique totale) (26).

Le lactate accumulé au cours de l’exercice est méta-bolisé pendant la récupération post-exercice et saconcentration redevient normale en 45 minutesenviron. Rappelons que le lactate est soit oxydé dansles mitochondries, soit converti en glucose.L’importance relative de ces deux voies métaboliquesreste cependant objet de controverses. Selon lesconceptions classiques, la majeure partie du lactateaccumulé serait converti en glucose dans le foie (36).Cette hypothèse est toutefois difficile à admettre si l’ontient compte du fait que la consommation d’oxygènehépatique (inférieure à 100 mL.min–1) est beaucouptrop faible pour convertir en glucose la quantité totalede lactate qui peut disparaître en 45 minutes (jusqu’à1 mole). Une fraction importante du lactate accumulépendant l’exercice serait plutôt oxydé pendant lapériode de récupération (42). Cependant, la sommedes quantités de lactate recyclé au niveau du foie(0,1 mole) et de lactate oxydé (0,33 mole) ne rend tou-jours pas compte de la mole de lactate qui disparaîtdurant la récupération. Il est donc probable qu’unepartie du lactate accumulé pendant l’exercice estconvertie en glucose directement dans les muscles

squelettiques eux-mêmes (43, 44). Toutefois, laphosphoénolcarboxykinase, qui est une enzyme clé dela gluconéogenèse hépatique, est très peu active dans lemuscle (36) ; les voies métaboliques transformant lelactate en glucose dans le muscle demeurent doncobscures (45).

CONCLUSIONLe métabolisme énergétique est un ensemble de voiesmétaboliques interconnectées dont la fonction est delibérer, de distribuer et d’utiliser l’énergie contenue dansles nutriments. C’est fort logiquement qu’une fonctionaussi capitale a été, et reste, largement étudiée, tant sur leplan fondamental qu’en pratique clinique. Mais, cetteétude est délicate conceptuellement et expérimentale-ment : les différents paramètres auxquels nous avonsaccès ne sont pas forcément reliés de manière univoque,et les outils couramment utilisés pour l’analyse dumétabolisme énergétique ont des limites intrinsèques.De fait, de nombreux problèmes restent encore sansréponse : on ne sait pas, in vivo, si le potentiel phosphateréel varie et à quelle amplitude, ni si le couplage de l’oxy-dation phosphorylante est effectivement modifié demanière significative, et dans quelles situations physio-logiques ou pathologiques, ni non plus quelle est l’im-portance réelle des cycles futiles…

Mais, en fait, au-delà des problèmes de quantifica-tion et d’interprétation, le véritable enjeu est de com-prendre quels sont les éléments qui sont à la base de lahiérarchisation des priorités dans le domaine énergé-tique : quels sont les signaux et les moyens qui per-mettent à la cellule de répartir ses ressources entredifférents besoins exprimés par des voies métaboliquesqui sont toutes en concurrence les unes avec les autres ?Comment l’organisme établit-il des priorités entre lesdifférents organes, dans la distribution de l’oxygène parexemple, et comment les modifie-t-il en cas d’agressionpathologique ? La description de « chemins cellulaires »de transport d’énergie est une première étape décisivedans cette direction qu’il est indispensable d’analyserpour comprendre les réactions d’un organisme agressépar exemple, et pour essayer d’interférer avec cetteréponse.

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