BIOLOGIE VEGETALE

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BIOLOGIE VEGETALE

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  • Francis-Andr WOLLMANPrsident

    Steven Ball

    Hlne Barbier-Brygoo

    Stphane Blanc

    lisabeth Blee

    Alain Borgel

    Catherine Boyen

    Jean-Franois Briat

    velyne Coppin

    Dominique de Vienne

    Serge Delrot

    Christian Dumas

    Vronique Gomord

    Anne-Marie Justin

    Thierry Langin

    Yves Meyer

    Jacques Millet

    Jean-Philippe Reichheld

    Dominique Roby

    Nicole Schwebel

    Marylin Vantard

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    BIOLOGIE VGTALE

    Lobjectif de cette contribution est de prsenter, aussi brivement que possible, les principales facettes des recherches conduites dans le domaine de la biologie vgtale, en situant ses principaux enjeux pour le CNRS et la communaut scientifique franaise dans son ensemble. Une prsentation plus dtaille des travaux poursuivis dans ce domaine en France est disponible sur demande. On se reportera galement aux excellents documents produits rcemment sur le sujet : Images de la Recherche Franaise en biologie vg-tale , 1996, ditions du CNRS ; Le monde vgtal : du gnome la plante entire . 2000, Publication de lAcadmie des Sciences, ditions TEC&DOC.

    Nous souhaitons insister ici sur certaines spcificits des recherches dvolues aux orga-nismes vgtaux, qui ont la vertu de fournir un complment de connaissances dintrt gnral pour les Sciences du Vivant.

    Organismes fixs, donc dpourvus de capacits de mobilit mme de les protger dagressions extrieures, les vgtaux :

    1. ont mis en place une grande diversit de stratgies mtaboliques et dvelop pementales en rponse aux stress abiotiques : lintgration du mtabolisme et du dveloppement est donc dun intrt majeur dans le champ des recher-ches en biologie vgtale ;

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    2. ont intgr lenvironnement microbien :

    (i) dans des relations de dfense mobi-lisant des transductions de signaux particuli-rement sophistiques,

    (ii) dans des symbioses uniques en leur genre (par exemple pour permettre la fixation de lazote).

    Organismes photosynthtiques, les vgtaux sont un modle de choix dans les domaines de :

    1. la bionergtique puisquils permettent dtudier lintgration mtabolique de la respi-ration et de la photosynthse ;

    2. la photobiologie, tout particulirement pour une comprhension du rle de la lumire dans le dveloppement du vivant, quil sagisse par exemple de photosynthse ou de photo-morphognse.

    Organismes dots de proprits gnti-ques remarquables, les plantes sont une source privilgie dans ltude :

    1. de la totipotence cellulaire (la capacit dune cellule diffrencie de se ddiffrencier et de rgnrer un organisme entier) ;

    2. des phnomnes dextinction gnique qui se sont manifests de faon spectaculaire loccasion des approches de transgnse vgtale. Ces processus se sont rvls fonda-mentaux dans la rgulation de lexpression gntique chez les eucaryotes et sont lorigine du mcanisme dinterfrence ARN ;

    3. de lintgration de lexpression gn-tique cellulaire, puisquune cellule vgtale comporte trois gnomes distincts : nuclaire, chloroplastique et mitochondrial. On peut ainsi tudier lintervention du noyau dans lexpression gntique des organites comme les rtroactions des organites sur lexpression gntique nuclaire ;

    4. de la reconnaissance du soi et du non soi, travers la capacit de certaines espces de distinguer autopollinisation et allopollinisation. Ajoutons que le dterminisme du sexe chez les vgtaux et les phases prcoces de la repro-duction constituent un champ dtude original,

    complmentaire et irrductible aux modles animaux et microbiens ;

    5. des cycles de vie complexes qui comprennent plusieurs phnomnes originaux comme lalternance entre phase sporophytique et gamtophytique, des variations de plodie et des effets dimprinting.

    Organismes qui reprsentent une trs grande diversit phylogntique, les euca-ryotes photosynthtiques reprsentent divers groupes, chacun trs anciens, dun point de vue volutif. Il y a, par exemple, trois groupes parmi les organismes photosynthtiques qui ont volu vers une organisation multicellu-laire de faon indpendante : les streptophytes comprenant les plantes terrestres, les rhodo-phytes correspondant aux algues rouges et la ligne des htrokontes correspondant aux algues brunes.

    On trouvera ci-dessous une prsen-tation des problmatiques dveloppes dans six aspects de notre discipline qui nous paraissent devoir retenir lattention en termes stratgiques pour le bon dveloppement de la recherche vgtale au CNRS. Deux des thmes sont abso-lument transversaux en biologie. Le premier concerne les systmes modles et leurs usages, question particulirement prgnante lheure des choix oprs dans les grands programmes de squenage et du traitement haut dbit des donnes quils gnrent. Le second sint-resse une question renouvele par les limites des approches de gntique inverse, savoir la part des dterminismes gntique et pig-ntique dans la construction dun phnotype. Les quatre autres thmes sur lesquels nous souhaitons insister recoupent les spcificits vgtales dintrt gnral dans les sciences du vivant : Mtabolisme, Transport et signa-lisation, Interactions Plantes-Microorganismes, Reproduction et Dveloppement.

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    1 LES SYSTMES MODLES ET LEURS USAGES

    Lutilisation de systmes biolo giques modles est incontournable pour faire progresser la connaissance, en particulier pour accder la biologie dun organisme dans son ensemble. La place de plus en plus grande faite la gntique a conduit un recentrage progressif sur des organismes prsentant un cycle de reproduction court, facile grer en laboratoire et accessible toutes les mthodo-logies de gntique classique et molculaire. La rapidit avec laquelle les mthodologies ont t et sont dveloppes est gnralement fonction de la taille de la communaut scien-tifique travaillant sur lorganisme, car une certaine masse critique est ncessaire pour dvelopper un systme modle et en assurer la prennit.

    tant donn lnorme investissement et la masse dinformations acquises sur les modles traditionnels comme la drosophile, Arabidopsis thaliana ou la levure Saccharomyces cerevi-siae, tudis depuis des dcennies par une large communaut scientifique, il est impen-sable de ne pas maintenir une recherche sur ces modles. Par contre, limiter les recherches quelques systmes modles ne parat pas un choix judicieux. Une telle restriction ne pren-drait en compte ni la diversit biologique et son intgration dans une vision volutive, ni lexistence de problmes biologiques particu-liers dont ltude savre plus aise, voire plus finalise, chez des organismes modles moins classiques. Sans rivaliser avec les modles tradi-tionnels, ils peuvent les seconder et dynamiser la recherche dans certains champs thmatiques, comme lillustre la varit des modles biolo-giques vgtaux travaills dans les laboratoires de la section 27.

    La brassicace Arabidopsis thaliana a t initialement choisie pour la petitesse de son gnome, le premier de plante entirement squenc (fin 2001), et le dveloppement explosif des connaissances qui sen est suivi irrigue actuellement toute la biologie vgtale.

    On peut prvoir quArabidopsis restera sans aucun doute lorganisme vgtal le plus tudi pendant les prochaines annes, et la commu-naut scientifique franaise occupe une place de choix dans les secteurs de la gnomique et de la gntique fonctionnelle de cet orga-nisme. Cependant, mme si lintrt de ce modle reste entier, il ne peut pas couvrir la totalit des questionnements importants, tant sur les plans fondamentaux quconomiques. Deux exemples parmi beaucoup dautres sont fournis par ltude de la photosynthse et de la fixation symbiotique de lazote.

    Chez les plantes et les microorganismes photosynthtiques, il existe une homologie struc-turale et fonctionnelle au niveau des complexes membranaires qui constituent les photosystmes responsables de la conversion de lnergie lumi-neuse en nergie chimique. La recherche sest, juste, titre focalise sur les cyanobactries (surtout Synechocystis sp. PCC6803 et dans une moindre mesure Anabaena), les bactries pourpres (Rhodobacter et le modle mergent Rubrivivax gelatinosus), les diatomes comme Phaeodactylum tricornutum ainsi que sur lalgue verte unicel lulaire Chlamydomonas reinhardtii. Cest dans le domaine de la rgu-lation de lexpres sion des gnes plastidiaux et de lassemblage des composantes photo-synthtiques que Chlamydomonas montre une relle supriorit sur les autres modles vg-taux. La recherche franaise dans le domaine de la biognse des chloroplastes et de la synthse des polysac charides chez Chlamydomonas se dveloppe bien. Dans cette perspective, il nous parat important de rappeler que la squence complte du gnome de Chlamydomonas reinhardtii est maintenant disponible.

    La fixation symbiotique de lazote est propre aux lgumineuses. Consciente des limites imposes par Arabidopsis en la matire, la communaut scientifique travaillant sur les interactions Rhizobium-plante sest attache promouvoir le modle Medicago truncatula, une fabace qui prsente, comme Arabidopsis, une grande facilit de culture et un petit gnome. Le faible niveau de microsyntnie observ entre les lgumineuses et Arabidopsis a motiv le dveloppement de projets de

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    squenage du gnome de M. truncatula. La France est aussi particulirement bien place pour la mise en place de la gnomique de cette lgumineuse.

    ct des plantes suprieures et des micro-algues, les champignons filamenteux non pathognes et les bryophytes reprsentent des modles pour des crneaux thmatiques origi-naux qui gnrent des connaissances de porte gnrale concernant linactivation de transgnes, la recombinaison motique, la rgulation de lexpression gnique, le dveloppement sexu ou lhrdit non conventionnelle. Plusieurs espces de champignons filamenteux non pathognes du groupe des Euascomyctes sont utiliss comme systmes modles. Neurospora crassa, modle non travaill en France, reste la rfrence dans le domaine, ct dAspergillus nidulans, mais il existe galement des modles de tradition franaise issus de la grande cole de gntique, en particulier Podospora anserina. Les laboratoires franais ont un grand potentiel dans ce domaine quil sagit de maintenir. La recombinaison homologue haute frquence dont fait preuve la bryophyte Physcomitrella patens, linverse dArabidopsis, en fait un nouveau modle vgtal multicellulaire de choix. En effet, la recombinaison homologue permet linterruption cible de nimporte quelle squence, de mme que sa substitution par nim-porte quelle autre squence homologue mute. Trs (trop) peu dquipes franaises travaillent actuellement le modle Physcomitrella. Des algues multicellulaires appartenant des lignes volutives distinctes des Streptophytes, les algues brunes et rouges fournissent aujourdhui des modles mergents. Notamment la petite algue brune filamenteuse Ectocarpus siliculosus qui savre un modle de gntique dans la ligne des htrokontes, mme de contribuer la comprhension du contrle du dveloppement de lorganisme entier.

    Enfin, les plantes cultives sont des objets dtude incontournables, mais ne reprsentent pas des modles de culture aise sans infras-tructure lourde. Ces systmes ont pourtant de nombreuses reprises servi de modle pour le dveloppement de nos connaissances non seulement en biologie vgtale mais aussi en

    gntique au mme titre que la drosophile ou la souris. Le degr de sophistication atteint par la gntique du mas na rien envier celle dArabidopsis ou de la drosophile. Le riz dont le gnome est peine 3 4 fois plus gros que celui dArabidopsis constitue la premire monocotyldone et la deuxime plante dont la squence du gnome vient dtre acheve, et sur laquelle la gnomique fonctionnelle se met dsormais en place. nouveau, la France semble bien positionne dans ce secteur.

    Sur le plan fondamental, la recherche chez Arabidopsis thaliana et Medicago trunca-tula est bien reprsente en France la fois quantitativement et qualitativement, mais les tudes portant sur les microalgues et la mousse Physcomitrella restent le fait dun assez petit nombre de groupes. Il semble important, au-del de la recherche chez les plantes suprieures, de dvelopper au moins un organisme modle par grand groupe dorganismes photosynthtiques appartenant des lignes distinctes, notam-ment des modles dorganismes unicellulaires comme la cyanobactrie Synechocystis, lalgue verte Chlamydomonas reinhardtii, la diatome Phaeodactylum tricornutum car limportance cologique des diatomes est considrable (de lordre de 25 % de la fixation du carbone la surface du globe) et des modles multicellulaires comme la mousse Physcomitrella patens ou des macro-algues rouges et brunes. Les comptences dmontres par les quipes tudiant le picophyto-plancton ont conduit lisolement dOstreococcus taurii une nouvelle levure verte qui permet daborder laprs gnome travers un modle photosynthtique simplifi dont la complexit gntique est infrieure celle qui caractrise Saccharomyces cerevisiae. La squence complte de ce gnome est actuellement ralise par un consortium dquipes franaises et sera rapidem-ment disponible. La gnomique comparative des 4 gnomes vgtaux disponibles (Ostreococcus, Chlamydomonas, Arabidopsis et le riz) devrait savrer particulirement clairante dans le court et moyen terme.

    Quel que soit le modle considr, le passage de lacquisition des donnes gnomi-ques (acheve ou en cours pour la plupart des modles cits) leur exploitation pour gnrer

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    des donnes fonctionnelles reste ltape limi-tante. Il est bien sr ncessaire de maintenir leffort danalyse gnomique sur fonds publics, mais en mme temps crucial de renforcer les capacits danalyse post-gnomique qui dboucheront sur la biologie et la physiologie intgre des organismes. La gnration de ressources (banques de donnes gnomiques et de squences transcrites, banques de mutants et de lignes recombinantes) et leur mise disposition auprs de la communaut scien-tifique sont des tapes clefs dans lesquelles le CNRS doit sinvestir en concertation troite avec dautres organismes de recherche comme lINRA ou le CIRAD, en particulier pour les modles dintrt agronomique.

    2 GNOTYPEET PHNOTYPE

    Comment slabore un phnotype partir dun gnotype ? Quelle est la part de variabilit phnotypique dorigine gntique ? Quelle est limportance, et quelles sont les bases gn-tiques des interactions gnotype-milieu ? Ces questions anciennes, centrales en biologie, et qui sous-tendent les pratiques de lamlio-ration des plantes et de lagronomie, peuvent aujourdhui bnficier de la connaissance de la squence complte du gnome de plantes modles, et des outils associs de gnomique fonctionnelle et de gntique quantitative.

    Nous avons vu que, lexception notable de Physcomitrella patens, les gnomes nuclaires des vgtaux ne se prtent pas une inactivation gntique cible, faute de mthodes de recombinaison homologue ; celles-ci reprsentent donc un enjeu de recherche majeur. Toutefois des collections de mutants dinsertion ont t dveloppes ; elles permettent lisolement de mutants par criblage par amplification PCR. Pour certaines de ces collections, les bordures des lments insrs ont t systmatiquement squences, si bien

    que la caractrisation dun mutant peut tre obtenue par simple comparaison de squences. La France occupe une bonne position dans ce secteur, grce aux efforts conjoints de lINRA et du CNRS, dans le cadre de GDR successifs, puis de Gnoplante. Mais il serait important de penser la suite de ce dispositif, pour que les efforts consentis depuis plus de 10 ans conti-nuent de porter leurs fruits, en particulier face des initiatives de limportance du programme Arabidopsis 2010, coordonn par la NSF aux tats-Unis.

    Ces collections taient censes permettre dtablir rapidement la fonction de la majorit des gnes dArabidopsis. Mais ds les premires tudes, il est apparu que le principal obstacle cette dmarche tait la caractrisation du phnotype. Les analyses de descendance et de complmentation montrent que linsertion dun ADN-T dans un gne ninduit une altra-tion dtectable que dans environ 5 % des cas, la moiti correspondant des embryons ltaux. Trois hypothses peuvent rendre compte dune telle absence apparente de phnotype :

    1. le gne intervient dans une fonction non indispensable dans les conditions du laboratoire ;

    2. la fonction est essentielle, mais il y a redondance de gnes pour cette fonction (de nombreuses familles multigniques existent chez les plantes, avec un nombre de membres souvent plus lev que chez les autres orga-nismes modles) ;

    3. la fonction peut tre assure par des voies alternatives grce aux nombreuses inter-connexions du mtabolisme.

    cette difficult dassocier sommairement une modification phnotypique dordre physio-logique une simple modification gntique sajoute la contribution de phnomnes dits pigntiques qui contrlent lexpression des gnes de faon stable au cours des divisions sans modifier leur squence nuclotidique. Les tudes pionnires ralises chez les plantes et les cham-pignons filamenteux ont largement contribu illustrer la diversit des mcanismes mis en jeu au niveau transcriptionnel, post-transcriptionnel

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    et au niveau de la protine. Il est admis que les phnommes dinactivation pigntiques des gnes, rvls par la transgnse, reposent sur des processus de dfense dvelopps par les organismes pour maintenir lintgrit de leur gnome face la prsence de squences dADN mobiles et pour combattre les patho-gnes viraux. La comprhension des bases gntiques et molculaires de linactivation des gnes et plus gnralement de lensemble des mcanismes pigntiques a un intrt fondamental vident qui est renforc par le fait que certains de ces mcanismes, comme linterfrence ARN, se sont rvls tre des outils performants pour teindre des gnes dintrt. Des quipes franaises travaillant sur les modles vgtaux ou les champignons sont en bonne place dans la comptition inter-nationale dans ce domaine de recherche.

    On comprend donc que pour lavenir, il faut dpasser le cadre conceptuel trop simpliste un gne une fonction/un mutant un phnotype. Deux grandes orientations non exclusives peuvent tre proposes, qui impliquent une modification des contours de la communaut rassemble dans la section 27. Tout dabord, lanalyse des phnotypes devrait bnficier dune interaction, quasi inexistante actuellement, avec la section 30. Les outils et concepts dvelopps dans certains laboratoires de cette section seraient trs utiles pour aider raisonner le choix de caractres phno-typiques pertinents, en prenant en compte le cas chant les phnomnes de compti-tion, et les effets de slection sur plusieurs gnrations. Dautre part, les tudes dex-pression massives (transcriptome, protome, mtabolome) vont permettre une description intgre et prcise des rseaux gniques et mtaboliques affects par le polymorphisme dun gne donn, ou par la variation dun facteur de milieu donn. La modlisation est ici indispensable pour comprendre la dynamique de ces systmes, en identifier les proprits mergentes, et donc apprhender les aspects molculaires et bio chimiques de la construction des phnotypes. Dans le cadre de linterdisciplinarit, les programmes

    rassemblant mathmaticiens et informati-ciens dune part, biologistes dautre part, autour de ce type dapproche, doivent tre encourags.

    3 MTABOLISME ET PHYSIOLOGIE DE

    LORGANISME

    Les plantes sont constamment soumises toutes sortes de stress environnementaux dorigine biotique (agressions par des agents pathognes) ou abiotique (excs ou dfaut de lumire, fluctuations brutales de tempra-ture, hypoxie, stress hydrique, salinit, etc.). Incapables de se mouvoir, elles ont donc dvelopp, au cours de lvolution, des stra-tgies varies pour se dfendre et sadapter leur environnement changeant, en dclenchant des spectres parfois trs complexes de rponses molculaires, mtaboliques et morphognti-ques. Sur le plan du mtabolisme, cette adap-tation propre aux vgtaux terrestres mais aussi aux organismes aquatiques fixs, met en jeu la synthse de mtabolites dits secon-daires trs diversifis et souvent de structures complexes, qui sont une vritable mine pour la pharmacope, la parfumerie, les industries des colorants ou celle des bio pesticides. Les vgtaux marins et en parti culier les algues des lignes brunes et rouges sont ce titre sous-reprsentes dans la communaut scien-tifique internationale. La connaissance accrue de lensemble des mtabolites forms (ou mtabolome), des gnes correspondants et des facteurs de transcription contrlant leur expression devrait permettre denvisager un contrle raisonn de lusine chimique vgtale dans une optique utile lhomme. La squence complte du gnome dArabidopsis, et rcem-ment celle du riz, les banques dESTs chez de nombreuses espces cultives, les analyses de transcriptome et de protomes, les collections dcotypes, etc., permettent dapprocher actuel-

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    lement la fonctionnalit du gnome. Mais le premier degr dintgration bio chimique est celui des systmes mtaboliques, et bien des caractres macroscopiques sont directement relis des flux ou des pools mtaboliques pas toujours aiss quantifier. De plus, le taux de mtabolites prsents dans des voies appa-remment indpendantes peut tre altr par des effets pliotropiques. Pour comprendre de tels effets, une tude dtaille de lidentit et de la quantit des mtabolites de la plante impli-que est indispensable. On dispose aujourdhui doutils techniques performants pour mesurer ou calculer ces quantits in planta : la proto-mique quantitative donne accs aux concentra-tions denzymes, lanalyse du mtabolome par GC/MS ou RMN (technique non destructrice) permet de dterminer les teneurs en mtabolites et cofacteurs, enfin les mesures par RMN des enrichissements en 13C des mtabolites dun systme permettent de calculer des valeurs de flux. Ainsi souvrent des perspectives danalyse et de modlisation des systmes fondes sur des valeurs de paramtres et de variables ayant une pertinence bio logique, et donc des possibi-lits de prdiction prcieuses pour lingnierie mtabolique.

    Les comptences et quipements en France sur le mtabolisme vgtal se situent dans un contexte qui, au cours des dernires dcennies, a surtout privilgi la biologie molculaire sensu stricto au dtriment de la biologie vgtale. Les forces sur lanalyse du mtabolisme secondaire sont trs insuffisantes et la France souffre dune carence doutils technologiques/analytiques appropris et performants, librement acces-sibles aux porteurs de projets novateurs. Un soutien cohrent des organismes de recherche publique aux plate-formes actuellement en mergence devrait remdier cette carence. Lexploitation des donnes du mtabolisme demandant, par exemple, plus de puissance de calcul que dans le cas du transcriptome, linterprtation et lanalyse des rsultats requi-rent en fait les comptences de biologistes mais aussi dinformaticiens, de physiciens et de mathmaticiens. La synergie natra dexp-riences communes auxquelles chacun apportera un clairage personnel. La russite dune telle

    opration dpendra de notre capacit tablir une vraie interdisciplinarit qui pourrait tre initie au sein de groupements de recherche (GDRs auxquels seraient allous de rels moyens financiers et personnels) et devrait spanouir dans des structures en rseaux plus vastes associant, par exemple, nos collgues europens.

    4 SYSTMES DE TRANSPORTS MEMBRANAIRES

    ET LEURS RLES DANSLA SIGNALISATION

    Les protines membranaires jouent un rle majeur dans le transport et la signalisation cellulaire, et dans le transport longue distance entre organes. Elles participent donc plusieurs aspects majeurs de la physiologie de la plante : nutrition, morphogense, dtoxication, rponses lenvironnement et rsistance aux stress. Limportance du domaine au plan international, et les progrs rapides qui y sont accomplis, sont illustrs par le volume spcial que lui a consacr la revue Biochimica Biophysica Acta en 2000, ou les nombreux articles de synthse publis rgulirement dans Trends in Plant Sciences. Le transport et la signalisation mobilisent une partie importante des efforts de recherche dans le domaine vgtal en France et constituent lun de ses points forts.

    En particulier, la caractrisation fonc-tionnelle de transporteurs et de canaux est bien dveloppe, par des complmentarits dapproches dexpression dans des systmes htrologues, dlectrophysiologie, de gn-tique rverse, et de localisation des territoires dexpression in planta. Ce champ constitue lactivit principale de plusieurs quipes de recherche franaises dont la notorit inter-nationale est solidement tablie. Un problme essentiel non rsolu de ce champ concerne

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    la compr hension du rle physiologique de chacune des protines tudies, en termes de transport et de signalisation courte (cellule) et longue (organes) distance, en rponse des signaux de dveloppement ou des contraintes biotiques ou abiotiques. Cette compr hension se heurte au caractre multi-gnique des familles de protines impliques, et aux approches essentiel lement cellulaires dvelop pes jusqualors. Le squenage et lanalyse du gnome dArabidopsis doivent imprativement saccompagner de la caract-risation fonctionnelle des transporteurs, dont nombre sont encore orphelins. Les transporteurs les mieux connus sont les transporteurs dinflux de la membrane plasmique, pour lesquels des tests fonctionnels existent. Les transporteurs des endomembranes et les transporteurs defflux ne bnficient pas encore de ces approches. De ce point de vue, la ralisation de protomes hydro-phobes sub-cellulaires constituera un lment de dveloppement important. La localisation subcellulaire de ces protines membranaires par diverses approches de biologie cellulaire (tiquetage de protines, immunolocalisation, etc.) constitue aussi un enjeu fondamental insuffisamment dvelopp pour linstant. Dautre part, loriginalit de certains de ces systmes mriterait quils soient utiliss dans des tudes de structure/fonction impliquant de facto des biologistes structuraux.

    Dans le domaine des aspects membra-naires de la signalisation, des quipes franaises sont reconnues au niveau international pour la caractrisation de rcepteurs, impliqus en particulier dans les rponses aux pathognes et les ractions de compatibilit/incompatibilit pollen/stigmate. La caractrisation de ligands et llucidation du mode dactivation de ces rcep-teurs constituent des enjeux importants pour le futur. Toutefois, au-del de ces aspects classi-ques de ltude du rle de certaines protines membranaires dans la perception de signaux, il conviendrait daborder les rles biologiques que certains canaux et transporteurs pourraient jouer dans des processus signaltiques de rponses aux stress biotiques et abiotiques dune part, et des programmes de dveloppement dautre part. Cela ncessiterait lintgration des tudes

    fonctionnelles actuelles chez des modles biologiques appropris, et le dveloppement dapproches gntiques focalises pour replacer ces activits de transport dans le contexte de la signalisation. La structuration dans un cadre plus formel (GDR) de la communaut natio-nale implique dans ces recherches favorise-rait cette dmarche. Ces futures orientations permettraient, en particulier, une meilleure intgration des tudes entre transport et signalisation longue distance , couplage la base de nombreuses rponses adaptatives et de dveloppement chez les plantes.

    5 INTERACTIONS ENTRE PLANTES

    ET MICROORGANISMES PATHOGNES OU

    SYMBIOTES : DCODAGE DUN DIALOGUE

    MOLCULAIRE COMPLEXE

    Dans la nature, les plantes tablissent des interactions plus ou moins troites, pathognes ou symbiotiques, avec une large varit de microorganismes procaryotes et eucaryotes. Tenter de comprendre les mcanismes complexes qui sous-tendent ltablissement de ces interactions ncessite didentifier les changes molculaires entre les deux partenaires. Parmi ceux-ci, ceux qui dterminent lissue de linteraction (dtermi-nants du pouvoir pathogne, rcepteurs de lhte, lments des voies de transduction) ont un intrt primordial. Au cours des dernires annes, des perces significatives ont t ralises sur ces questions.

    En ce qui concerne le partenaire micro-bien pathogne, les nombreux outils issus de la gntique molculaire et la mise au point de pathosystmes modles, ont permis de faire progresser les connaissances des mcanismes

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    de pathogense. Le pouvoir pathogne des bactries dpend notamment de leur capa-cit injecter des protines effectrices dans la cellule vgtale. Ces protines interfrent avec les processus mtaboliques de lhte et en particulier avec ses systmes de dfense. Le squenage du gnome complet de Ralstonia solanacearum ralis en France ainsi que le squenage en cours dautres espces phyto-pathognes a rvl un nombre important (50-100) de ces effecteurs pour chaque souche. Les recherches venir sorientent donc trs fortement vers la recherche des cibles mol-culaires vgtales des effecteurs clefs et sur le dcryptage de leur mode daction. De par leur diversit (mode de vie, stratgies dinfec-tion) et leur complexit, les recherches sur les champignons pathognes ont progress moins rapidement ; cependant les approches de muta-gense insertionnelle dveloppes rcemment sur quelques modles, commencent apporter des donnes sur le pouvoir pathogne de ces organismes. Aucune squence complte dun gnome de champignon pathogne nest lheure actuelle disponible, seules des donnes partielles (ESTs, extrmits de BACs) sont accessibles. Le squenage probable du gnome de Botrytis cinerea en France, et des initiatives quivalentes en cours ltranger sur dautres gnomes favoriseront le dvelop-pement dapproches globales de type transcrip-tome, et donc la connaissance des fonctions de pathognie.

    Les dernires annes ont t trs fcondes dans lidentification des acteurs cls de la rponse de la plante aux agressions patho-gnes, tant en ce qui concerne la perception de lagent pathogne (clonage de nombreux gnes de rsistance), la transduction des signaux issus de cette tape de reconnais-sance, que les rponses de dfense de la plante. Au-del de lidentification de gnes de rsistance spcifiques et dominants appartenant un nombre de famille de protines restreint, des gnes de rsistance rcessifs codant des protines de structure originale ont rcemment t caractriss. Leffort a galement port sur le dcryptage des voies de signalisation, aboutissant par des approches gntiques

    lidentification de composants cls dfinissant diffrentes voies fonctionnant en parallle, en synergie ou en opposition. La mise disposition de la communaut scientifique, de la squence du gnome dArabidopsis thaliana (et bientt de celle du riz), permet ds prsent de dve-lopper des approches globales danalyse des changements transcriptionnels au cours de linteraction, donnant non seulement accs de nouveaux gnes, mais galement un moyen supplmentaire danalyse des voies complexes de signalisation. En ce qui concerne les mca-nismes de dfense de la plante, la Rponse dHypersensibilit (HR), lune des manifesta-tions les plus spectaculaires de la rsistance, fait lobjet de travaux de plus en plus nombreux, cette rponse tant un exemple de mort cellu-laire programme, processus encore largement inconnu chez les vgtaux. Enfin, ltude des mcanismes de sensibilit chez la plante visant lidentification de cibles vgtales de facteurs de virulence de lagent microbien, est en cours dmergence, en particulier dans le contexte dinteraction avec des nmatodes. Il est clair que ce domaine de recherche sur la rponse des plantes aux bioagresseurs, extrmement comp-titif au plan international, bnficie de moyens humains rduits en France, les recherches stant traditionnellement concentres sur le partenaire microbien jusqu ces dernires annes.

    Dans le cas particulier des virus phyto-pathognes, ltude de fonctions tout fait spcifiques telles, la rplication, les transports intra-cellulaires, le mouvement de cellule--cellule au travers des plasmodesmes, le mouve-ment systmique via le systme vas culaire ou la transmission inter-htes par vecteur, sont des domaines trs actifs, et ce malgr des effectifs rduits en France et en particulier au CNRS. Cependant, si les dterminants viraux impliqus dans ces fonctions sont bien tudis, les partenaires cellulaires restent peu connus et reprsentent lun des aspects porteurs de cette discipline. Quelques jeunes quipes du CNRS se sont engages avec dynamisme dans cette voie et il conviendrait de leur apporter rapidement un soutien spcifique. Un domaine en mergence et trs comptitif est reprsent par ltude des phnomnes de

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    Post-Transcriptional Gene Silencing (PTGS) qui gouverne la destruction totale dARNm cibls. Le PTGS agit comme un systme antiviral chez les plantes et est similaire sinon identique l interference ARN dcrit chez les animaux. Quelques aspects spcifiques du PTGS chez les plantes, comme par exemple sa signalisation systmique sous forme de petites molcules dARN, en font un domaine hautement inno-vant et extrmement comptitif dans lequel le CNRS doit se positionner trs rapidement. Lvolution des virus, champ de recherche plus intgratif et mergent, est un aspect beaucoup trop faiblement reprsent dans le secteur vgtal en France.

    Enfin, lassociation symbiotique Rh izo-bium/lgumineuse, en plus dtre un modle dtude de lorganogense vgtale (le nodule fixateur dazote) fournit un exemple unique dun dialogue molculaire spcifique et rci-proque aboutissant la reconnaissance des deux partenaires et linfection contrle des tissus vgtaux. Aprs lidentification des signaux (facteurs Nod) provenant de Rhizobium, les efforts se sont concentrs sur leur perception et ltude des voies de trans-duction de ces signaux. Plusieurs mutants vgtaux impliqus dans la signalisation Nod ont t caractriss, et le clonage des gnes correspondants est en cours. Medicago trunca-tula, nouveau modle vgtal dvelopp grce la combinaison des efforts europens et amricains, permet dj le dveloppement doutils gnomiques, essentiels la compr-hension de ces interactions. Ct microbe, le gnome de Rhizobium meliloti, partenaire de M. runcatula a t entirement squenc. Par ailleurs, la symbiose mycorhizienne, qui reprsente lassociation plante-champignon la plus rpandue et la plus ancienne du monde vgtal, bnficie depuis peu dun intrt crois-sant, des outils molculaires et gnomiques tant en cours de dveloppement. Les algues marines fournissent galement des exemples dinteractions qui apportent un clairage vo-lutif sur les mcanismes dimmunit inne des eucaryotes. Au-del des aspects mtaboliques, les bases gntiques de ces interactions doivent tre mieux comprises et leur lucidation pourra

    sappuyer sur les dveloppements rcents de la gnomique sur ces modles.

    6 REPRODUCTIONET DVELOPPEMENT

    La reproduction sexue des plantes fleurs qui permet la transformation de lovule en graine et de lovaire en fruit et la repro duction asexue par multiplication vgtative ou clonage revtent une importance conomique considrable et mettent en jeu des mcanismes originaux. Par exemple, dans le cas des plantes prsentant une auto-incompatibilit pollinique, la pollinisation fonctionne en sens inverse du systme immun des animaux. En effet, elle permet une reconnaissance et un rejet du soi (lautopollen), en privilgiant lacceptation du non soi (lallopollen). La famille multignique S a jou un rle clef dans lvolution des plantes fleurs, comme le complexe majeur dhisto-compatibilit a pu le faire chez les mammifres. Par ailleurs, la reproduction sexue implique chez les plantes une double fcondation, dont lanalyse cellulaire et molculaire a bnfici de la mise au point de modles in vitro capables de mimer la fcondation in planta. Enfin, la totipotence des cellules vgtales, qui permet le bouturage, illustre une autre diffrence fondamentale par rapport aux animaux.

    Le dveloppement vgtal se fait partir de cellules caractre embryonnaire, ou cellules mristmatiques, qui constituent un peu lanalogue des cellules-souches des animaux. Reproduction et dveloppement sont contrls par des signaux agissant sur les divi-sions cellulaires, les changements de forme des cellules et leur snescence. Les analyses gnti-ques ralises depuis le dbut des annes 1990 chez diverses espces, notamment Arabidopsis, ont conduit un modle multifactoriel impli-quant des gnes constitutifs et des gnes induc-tibles par des facteurs physiques externes, ou des signaux internes comme le saccharose

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    et certaines phytohormones. Ce domaine de recherches est largement sous-dvelopp en France malgr les enjeux conomiques et scien-tifiques quil sous-tend.

    Ltude de mutants affects dans la fcondation et les tout premiers stades de lembryogense ont permis dlucider quelques aspects importants, notamment lacquisition de la polarit de lembryon principal et des axes apico-basal et dorso-ventral, et la mise en place des mristmes apical ou racinaire. Ltude fonctionnelle des mristmes responsables de larchitecture des plantes constitue un autre enjeu important. Les travaux remarquables sur la mise en place des organes latraux et des feuilles ont conduit la mise en vidence de nouveaux gnes, certains homobote, dautres de type facteurs de transcription. On peut aussi mentionner les travaux portant sur la mise en place des vaisseaux, support physique la circulation des sves, et ceux qui ont trait la dissmination de graines partir des sili-ques, des pollens partir des anthres, etc. Le champ dinvestigation est trs large et les exemples rapports ici ne constituent quun petit chantillon des travaux raliss ou en cours. La ncessit de pousser les quipes fran-aises, trop peu nombreuses dans ce domaine par rapport aux pays comparables, orienter leurs recherches en biologie et physiologie du dveloppement commence seulement tre prise en compte par les tutelles avec la cration dune Action concerte incitative (ACI).

    Des approches spcifiques la biologie cellulaire et la physiologie vgtale compl-tent la dimension trs intgrative des recherches en cours. Une dimension importante recouvre la perception des signaux externes et les changes de signaux internes, qui induisent des cascades de signalisation ayant des rper-cussions profondes sur le dveloppement. La comprhension de la perception des tempra-tures basses qui sont souvent ncessaires la floraison et/ou la germination na pas notable-ment progress au cours des dernires annes. Au contraire, ltude de nombreux mutants morphogntiques a permis de progresser dans la connaissance des mcanismes de perception et de transduction du signal lumineux dont

    les plantes peroivent lintensit, le spectre, la qualit, la priodicit et lorientation. Au niveau des signaux internes, ltude de la perception et la transduction des signaux hormonaux est la plus avance. De nombreux acteurs des voies de transduction ont t identifis comme les protines G trimriques, les varia-tions de concentration cyto solique et nuclaire en calcium et de nombreuses phosphatases et kinases. Cet aspect de la signalisation cellu-laire, en pleine expansion, bnficie aussi des donnes issues de la gntique, via lobtention de mutants spcifiques et de la gnomique. Le dfi essentiel, dans ce domaine, au-del de lidentification des molcules impliques dans une voie de signalisation, concerne la squence des vnements et leur spcificit, vis--vis dun signal donn et dune rponse prcise. Enfin, lidentification des facteurs de transcription concerns dans lexpression des gnes-cibles est ncessaire pour accder lensemble des vnements induits par une phytohormone. Les mcanismes dintgration des fonctions nutritives au niveau de la plante entire, et le transport longue distance (xylme, phlome) ou courte distance (plasmodesmes) de macro-molcules informationnelles sont des domaines encore peu tudis et compris.

    7 EN CONCLUSION

    Dans le rapport de conjoncture prc-dent, la section 27 avait insist sur les dvelop-pements rapides et remarquables de lapproche gntique dans les recherches en biologie vgtale. Ces dveloppements ont produit une profonde restructuration de la commu-naut scientifique concerne au cours des 15 dernires annes, gnrant de nouveaux champs de recherche et suscitant lutilisation massive de la plante modle Arabidopsis. Dans la priode la plus rcente, notre communaut a t confronte, comme toute les autres communauts de recherche en biologie, la transition Gntique-Gnomique. Celle-ci sest

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    passe dans de bonnes conditions du fait de la forte implication de quelques quipes fran-aises dans les programmes internationaux dinvestigations du gnome dArabidopsis.

    Le dcrochement de leffort europen vis--vis de leffort amricain dans ce domaine grverait court terme linvestissement consenti par les quipes franaises. Le cur de cet effort doit donc tre maintenu, non seulement chez Arabidopsis mais chez le Riz, premier gnome de monocotyldone tre squenc, et chez Medicago truncatula, modle dtude des inter-actions symbiotiques.

    Mais une exploitation optimale de la connaissance brute dpose dans les banques de donnes et des outils dana-lyse systmatique (transcriptome, protome, mtabolome) requiert un affinement de nos critres danalyse des phnotypes lchelle de la plante entire. La gnomique fonctionnelle

    est particulirement approprie pour ltude de la transduction de signaux, mais elle doit rester fortement ancre dans des approches gntiques pour forger les outils dune compr-hension des interactions entre la plante et son environnement, incluant les ractions aux stress biotiques et abiotiques. ce titre, le dvelop-pement naturel des recherches conduites par les quipes dpendant de la section 27 les rapproche de celles ancres dans lcologie vgtale et la microbiologie, en particulier la microbiologie du sol. Sagissant dune redfini-tion des contours des sections, il serait souhai-table que le dveloppement de la gnomique fonctionnelle favorise un regroupement de certaines quipes actuel lement disperses entre les sections 23, 24, 27 et 30 dans une nouvelle section qui incarne les tudes gn-tiques et physiologiques intgres des plantes et microorganismes associs.

    ANNEXE

    LA BIOLOGIE VGTALE ENTRE DLGITIMISATION POLITIQUE

    ET CARENCE DE FORMATION SCOLAIRE ET UNIVERSITAIRE

    La recherche en biologie vgtale ne constitue pas une activit scientifique part, et de ce fait est soumise aux mmes relations avec la socit que toutes les autres sciences. Toutefois certaines spcificits mritent dtre soulignes et devraient tre prise en compte dans la gestion de ces relations.

    Tout dabord la taille de la communaut scientifique implique dans les recherches de cette discipline est modeste par rapport ce que lon observe dans dautres grands pays industrialiss comme lAllemagne, le Japon et les tats Unis. Une telle taille gnre une certaine fragilit. De

    plus, cette communaut a la particularit dtre intgre dans un partenariat fort entre le CNRS, lINRA, le CIRAD, lIRD et certains tablissements denseignement suprieurs. La synergie logique-ment attendue de telles associations pourrait tre encore plus importante si lon renforait la concer-tation entre les diffrents partenaires, dont chacun devrait affirmer limportance de la conduite de recherches gnriques en biologie vgtale.

    la base de la chane alimentaire de len-semble du monde animal, les organismes chloro-phylliens ont une importance agro-conomique considrable. Sur le plan cologique, les multi-ples relations quils entretiennent avec les autres espces en font llment central de la biodiver-sit. Les plantes gntiquement modifies sont un exemple emblmatique des enjeux majeurs qui psent sur la biologie vgtale, et qui soulvent des interrogations du point de vue culturel, en raison de leur utilisation dans lalimentation et de leur incidence ventuelle sur lenvironnement. Ces questions brouillent la perception sociale de lactivit scientifique proprement dite. Lexistence

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    dun dbat citoyen sur lutilisation des OGM dans lagriculture et lalimentation est lgitime mais force est de constater que ce dbat a pour consquence indirecte de crer la confusion entre les sciences vgtales, les biotechnologies et les plantes transgniques usage agronomique qui nen sont quune application particulire.

    Ces particularits nous conduisent suggrer plusieurs types dactions pour que lactivit scientifique en gnral, et les recherches en biologie vgtale en particulier, fassent lobjet dune connaissance, voire dune re-connaissance, de la part de la socit. Le premier niveau est politique. Les parlementaires de notre pays sont coups de la ralit du monde scientifique et ceci est inquitant dans une dmocratie. Les liens entre les scientifiques et les lus devraient tre renforcs, un niveau moins institutionnel, plus oprationnel, quaujourdhui. Par exemple une runion entre la Confrence des Prsidents du Comit National et les parlementaires de lOffice des Choix Scientifiques et Techniques pourrait dboucher sur la participation de certains parle-mentaires des runions dinformation avec les sections du Comit National.

    Cette rconciliation des lus avec le milieu scientifique ne doit pas occulter la responsabilit des scientifiques dans le rle quils ont jouer dans la diffusion de linformation scientifique. Dans le domaine des biotechnologies, toutes les initiatives des chercheurs travers des supports comme les cole de lADN ou les ateliers et les conf-rences-dbats des Centres de Culture Scientifique Technique et Industrielle sont encourager et soutenir. Sur le long terme cette information ne saurait remplacer une relle formation, par lcole, la mthode scientifique, applique aux sciences biologiques en particulier. En ce qui concerne la Biologie Vgtale, il nous semble important de mettre laccent sur le problme que pose, terme, la disparition progressive de ltude des vgtaux dans lenseignement, du collge jusqu luniver-sit. En biologie, lenseignement est largement domin par les modles animaux, ce qui pose un problme important pour la socit, en particulier pour lducation du citoyen appel tre acteur dans des dcisions portant sur les consquences des recherches dans le domaine vgtal. Dans ce contexte, il serait essentiel de :

    (i) repenser la formation initiale et continue de lensemble des enseignants. La plupart des enseignants du primaire nont pas reu, aujourdhui, la formation minimale concer-nant le monde vgtal et lenseignement dispens ne rpond pas aux attentes de formation des futurs citoyens. Pour les enseignants du secondaire, beaucoup sont rests avec les connaissances acquises lors de leur recrutement, modules par quelques ajustements lis de nouvelles publi-cations de programmes ou quelques stages, rares, de formation continue. Lenseignement de la Biologie Vgtale reste souvent trs descriptif, le plus souvent bas sur des manuels anciens et partiellement obsoltes ;

    (ii) repenser la formation initiale des chercheurs. Les tudiants qui arrivent dans nos laboratoires possdent le plus souvent une forma-tion trop spcialise. Un dsquilibre excessif existe en faveur de la biologie et de la gntique molculaire, au dtriment de la biochimie, de la biologie cellulaire et de la physiologie (sans parler de la chimie ou de la biophysique), alors que la biologie cellulaire vgtale moderne ncessite une vision intgre des diffrentes disciplines ;

    (iii) rflchir la mise sur pied de moda-lits plus attractives pour raliser des thses ou des sjours post-doctoraux dans ce champ disci-plinaire. La rduction progressive de lintrt des jeunes, lie la place faite la biologie vgtale dans les programmes dune part, la sur-mdia-tisation des OGMs et une prsentation trs ngative des recherches en gnomique vgtale dautre part, provoque une rduction des flux dtudiants dans les laboratoires. Ce phnomne dj sensible dans les pays de lUnion Europenne se traduit par la difficult de plus en plus grande recruter des jeunes de qualit. Il faudrait sans nul doute revaloriser les rmunrations et raccourcir la dure des thses en salignant sur les pays les plus performants de lUnion europenne ;

    (iv) repenser le dcoupage des sections au CNRS, par exemple en fdrant tudes des micro-organismes et des plantes et en regroupant les approches molculaires de la section 27 et celles plus globales des cophy-siologistes et des gnticiens des populations de la section 30.

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