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C 1.2 & C 2.3 CONTEXTUALISER & CONSTRUIRE UNE ARGUMENTATION En juin 1789, alors qu’un bras de fer s’est engagé entre le Roi et l’Assemblée nationale à Versailles, Louis XVI fait stationner des troupes à proximité de Paris. Les députés et les Parisiens craignent de ce fait une tentative de renversement de la révolution. « ‘’Citoyens, dis-je alors, vous savez que la nation avait demandé que Necker 1 lui fût conservé, qu’on lui élevât un monument : et on l’a chassé ! Peut-on vous braver plus insolemment ? Après ce coup, ils vont tout oser, et pour cette nuit, ils méditent, ils disposent peut-être une Saint-Barthélemy pour les patriotes 2 .’’ J’étouffais d’une multitude d’idées qui m’assiégeaient; je parlais sans ordre. ‘’Aux armes ! Ai-je dit, aux armes !’’ […] ’’C’est moi, qui appelle mes frères à la liberté.’’ Et levant un pistolet : ‘’Du moins ils ne me prendront pas en vie, et je saurai mourir glorieusement ; il ne peut plus m’arriver qu’un malheur, c’est celui de voir la France devenir esclave 3 .’’ Alors je descendis ; on m’embrassait […]. Avec quelle rapidité gagna l’incendie ! […] La fureur s’allume. Alors, il n’y a plus qu’un cri dans Paris : Aux armes ! […] On enfonce les boutiques d’armuriers. […] La multitude et les plus hardis se portent aux Invalides 4 […] A peine a-t-on des armes, qu’on va à la Bastille 5 . [La Bastille prise, un garde], poursuit M. de Launay 6 , le prend par les cheveux et le fait prisonnier. On l’emmène à l’Hôtel -de-Ville, on l’assomme sur le chemin. Il était expirant des coups reçus, on l’achève à la Grève et un boucher lui coupe la tête. On la porte au bout d’une pique; […]. [Un autre] ne put se défendre ; le peuple l’arracha de son siège et l’entraîna hors de la salle; et à peine a-t-il descendu l’escalier de l’Hôtel-de-Ville, qu’un jeune homme lui appuie son pistolet et lui brûle la cervelle ; on crie: Brao. On lui coupe la tête qu’on met sur-une pique, et j’ai vu de même sur une pique son cœur, qu’on a promené dans tout Paris ; l’après-midi, on pendit le reste de la garnison pris les armes à la main ; on les accrochait au réverbère de la Grève. On cria grâce pour quelques-uns. Il y eut aussi quatre ou cinq voleurs pris sur le fait et pendus sur la minute. ». Lettre de Camille Desmoulins à son père, 16 juillet 1789. Questions Expliquez les raisons de la prise de la Bastille. Montrez que la violence populaire, d’abord défensive, devient ensuite punitive. Pourquoi cette évolution d’après-vous ? Préparez une rapide présentation orale pour présenter votre document et vos analyses. Durant cette dernière, vous pouvez faire participer vos camarades. Groupe n° 1 - La nation ou le peuple en armes. 1 Jacques Necker est un ministre d’Etat très apprécié dans l’opinion publique – notamment pour avoir obtenu la réunion des Etats-Généraux et le doublement du nombre des députés représentants du Tiers-Etat mais, renvoyé par Louis XVI le 11 juillet 1789. 2 Il s’agit d’une référence au massacre des protestants par les catholiques dans la nuit du 24 août 1572. 3 Camille Desmoulins évoque la rumeur d’un complot circulant à Paris selon lequel, les ordres privilégiés prépareraient le renversement de l’Assemblée nationale proclamée par le Tiers-Etat et la réduction en esclavage de la population. 4 Les Invalides constituaient une réserve d’armes pour les troupes royales. Le 13 juillet, les habitants de Paris y récupèrent plus de 30 000 fusils et une vingtaine de canons. 5 La Bastille était une prison royale qui abritait une réserve importante de poudre. Le 14 juillet, les habitants de Paris prennent l’édifice par la force. 6 Il s’agit du gouverneur de la Bastille qui a refusé de livrer les armes aux habitants de la ville et ordonné aux soldats d’ouvrir le feu sur ces derniers. C 1.2 & C 2.3 CONTEXTUALISER & CONSTRUIRE UNE ARGUMENTATION Groupe n° 2 - La nation ou le peuple en armes. « Les Prussiens qui avaient envahi la France se moquaient de ces volontaires mal armés, mal vêtus, mal chaussés. Mais à Valmy, ces va-nu-pieds marchèrent sur les Prussiens en criant : « Vive la Nation ! » Les prussiens eurent peur, et ils reculèrent. » BERNARD et REDON. Notre premier livre d’histoire. Cours élémentaire, Nathan, 1950. Questions Qui est appelé à combattre en 1792 ? Pourquoi d’après-vous ? Montrez que la guerre, d’abord défensive, devient ensuite offensive. 3° Sur quoi la légende de la bataille de Valmy insiste-t-elle en 1950 ? Préparez une rapide présentation orale pour présenter votre document et vos analyses. En 1792, alors que la France entre en guerre contre les Monarchies européennes, un officier français, Rouget de Lisle, compose le « Chant de guerre pour l’armée du Rhin ». Repris par les soldats Marseillais qui arrivent à Paris en 1792, il est ensuite appelé « La Marseillaise ». « Aux armes, citoyens ! Formez vos bataillons ! Marchons, marchons ! Qu'un sang impur... Abreuve nos sillons ! […] Que veut cette horde d'esclaves, de traîtres, de rois conjurés ? Pour qui ces ignobles entraves, Ces fers dès longtemps préparés ? Français ! Pour nous, ah ! Quel outrage ! […] C'est nous qu'on ose méditer de rendre à l'antique esclavage ! […] Tremblez, tyrans ! Et vous, perfides […] Tout est soldat pour vous combattre, S'ils tombent, nos jeunes héros, la terre en produit de nouveaux contre vous tous prêts à se battre ».

C 1.2 C 2.3 CONTEXTUALISER CONSTRUIRE UNE ARGUMENTATION · 5 C 1.2 & C 2.3 CONTEXTUALISER & CONSTRUIRE UNE ARGUMENTATION En juin 1789, alors qu’un bras de fer s’est engagé entre

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  • C 1.2 & C 2.3 CONTEXTUALISER & CONSTRUIRE UNE ARGUMENTATION

    La nation en armes En juin 1789, alors qu’un bras de fer s’est engagé entre le Roi et l’Assemblée nationale à Versailles, Louis XVI fait stationner des troupes à proximité de Paris.

    Les députés et les Parisiens craignent de ce fait une tentative de renversement de

    la révolution.

    « ‘’Citoyens, dis-je alors, vous savez que la nation avait demandé que Necker1 lui

    fût conservé, qu’on lui élevât un monument : et on l’a chassé ! Peut-on vous

    braver plus insolemment ? Après ce coup, ils vont tout oser, et pour cette nuit, ils

    méditent, ils disposent peut-être une Saint-Barthélemy pour les patriotes2.’’

    J’étouffais d’une multitude d’idées qui m’assiégeaient; je parlais sans ordre. ‘’Aux

    armes ! Ai-je dit, aux armes !’’ […] ’’C’est moi, qui appelle mes frères à la liberté.’’

    Et levant un pistolet : ‘’Du moins ils ne me prendront pas en vie, et je saurai mourir

    glorieusement ; il ne peut plus m’arriver qu’un malheur, c’est celui de voir la

    France devenir esclave3.’’ Alors je descendis ; on m’embrassait […]. Avec quelle

    rapidité gagna l’incendie ! […] La fureur s’allume. Alors, il n’y a plus qu’un cri dans

    Paris : Aux armes ! […] On enfonce les boutiques d’armuriers. […] La multitude et

    les plus hardis se portent aux Invalides4 […] A peine a-t-on des armes, qu’on va à la

    Bastille5. [La Bastille prise, un garde], poursuit M. de Launay

    6, le prend par les

    cheveux et le fait prisonnier. On l’emmène à l’Hôtel-de-Ville, on l’assomme sur le

    chemin. Il était expirant des coups reçus, on l’achève à la Grève et un boucher lui

    coupe la tête. On la porte au bout d’une pique; […]. [Un autre] ne put se défendre ;

    le peuple l’arracha de son siège et l’entraîna hors de la salle; et à peine a-t-il

    descendu l’escalier de l’Hôtel-de-Ville, qu’un jeune homme lui appuie son pistolet

    et lui brûle la cervelle ; on crie: Brao. On lui coupe la tête qu’on met sur-une pique,

    et j’ai vu de même sur une pique son cœur, qu’on a promené dans tout Paris ;

    l’après-midi, on pendit le reste de la garnison pris les armes à la main ; on les

    accrochait au réverbère de la Grève. On cria grâce pour quelques-uns. Il y eut aussi

    quatre ou cinq voleurs pris sur le fait et pendus sur la minute. ».

    Lettre de Camille Desmoulins à son père, 16 juillet 1789.

    Questions

    1° Expliquez les raisons de la prise de la Bastille.

    2° Montrez que la violence populaire, d’abord

    défensive, devient ensuite punitive. Pourquoi cette

    évolution d’après-vous ?

    Préparez une rapide présentation orale pour présenter votre document et vos analyses. Durant cette dernière, vous pouvez faire participer vos camarades.

    Groupe n° 1 - La nation ou le peuple en armes. 1 Jacques Necker est un ministre d’Etat très apprécié dans

    l’opinion publique – notamment pour avoir obtenu la réunion

    des Etats-Généraux et le doublement du nombre des députés

    représentants du Tiers-Etat – mais, renvoyé par Louis XVI le 11

    juillet 1789. 2 Il s’agit d’une référence au massacre des protestants par les

    catholiques dans la nuit du 24 août 1572. 3 Camille Desmoulins évoque la rumeur d’un complot circulant

    à Paris selon lequel, les ordres privilégiés prépareraient le

    renversement de l’Assemblée nationale proclamée par le

    Tiers-Etat et la réduction en esclavage de la population. 4 Les Invalides constituaient une réserve d’armes pour les

    troupes royales. Le 13 juillet, les habitants de Paris y

    récupèrent plus de 30 000 fusils et une vingtaine de canons. 5 La Bastille était une prison royale qui abritait une réserve

    importante de poudre. Le 14 juillet, les habitants de Paris

    prennent l’édifice par la force. 6 Il s’agit du gouverneur de la Bastille qui a refusé de livrer les

    armes aux habitants de la ville et ordonné aux soldats d’ouvrir

    le feu sur ces derniers.

    C 1.2 & C 2.3 CONTEXTUALISER & CONSTRUIRE UNE ARGUMENTATION

    Groupe n° 2 - La nation ou le peuple en armes.

    « Les Prussiens qui avaient envahi la France se

    moquaient de ces volontaires mal armés, mal

    vêtus, mal chaussés. Mais à Valmy, ces va-nu-pieds

    marchèrent sur les Prussiens en criant : « Vive la

    Nation ! » Les prussiens eurent peur, et ils

    reculèrent. »

    BERNARD et REDON. Notre premier livre

    d’histoire. Cours élémentaire, Nathan, 1950.

    Questions 1° Qui est appelé à combattre en 1792 ? Pourquoi d’après-vous ?

    2° Montrez que la guerre, d’abord défensive, devient ensuite offensive.

    3° Sur quoi la légende de la bataille de Valmy insiste-t-elle en 1950 ?

    Préparez une rapide présentation orale pour présenter votre document et vos analyses.

    En 1792, alors que la France entre en guerre

    contre les Monarchies européennes, un officier

    français, Rouget de Lisle, compose le « Chant de

    guerre pour l’armée du Rhin ». Repris par les

    soldats Marseillais qui arrivent à Paris en 1792, il

    est ensuite appelé « La Marseillaise ».

    « Aux armes, citoyens ! Formez vos bataillons !

    Marchons, marchons ! Qu'un sang impur... Abreuve

    nos sillons ! […] Que veut cette horde d'esclaves,

    de traîtres, de rois conjurés ? Pour qui ces ignobles

    entraves, Ces fers dès longtemps préparés ?

    Français ! Pour nous, ah ! Quel outrage ! […] C'est

    nous qu'on ose méditer de rendre à l'antique

    esclavage ! […] Tremblez, tyrans ! Et vous, perfides

    […] Tout est soldat pour vous combattre, S'ils

    tombent, nos jeunes héros, la terre en produit de

    nouveaux contre vous tous prêts à se battre ».

  • Estampe anonyme, sans date, Musée Carnavalet,

    Paris. Le 31 mai 1793, des sans-culottes réclament à

    l’Assemblée nationale l’exclusion de plusieurs

    députés – proches de Manon Roland et appelés

    Girondins. Le 2 juin, ils encerclent la Convention et la

    menace avec des canons, obligeant celle-ci à voter

    leur arrestation.

    « Un peuple qui a conquis sa liberté après dix siècle d’esclavage a

    besoin de la guerre : il faut la guerre pour la consolider. Il faut la

    guerre pour purger […] [les] restes du despotisme ; il faut la guerre

    pour faire disparaître au milieu de nous les hommes qui pourraient la

    corrompre. »

    Discours de Jacques-Pierre Brissot au club des Jacobins, 1791,

    Archives nationales, Paris.

    « […] une guerre civile n’est plus un malheur, elle nous régénère ou nous anéantit, et, comme la liberté est perdue sans elle,

    nous n’avons plus à la craindre ou à l’éviter. »

    Lettres de Manon Roland à Jacques-Pierre Brissot, 1791, Archives nationales, Paris.

    Questions

    1° Que pensent Manon Roland et Jacques-Pierre Brissot de la guerre –

    notamment civile – en 1791?

    2° Utilisez le schéma et réalisez quelques recherches pour expliquer

    comment la guerre civile oppose les Français en 1793.

    Préparez une rapide présentation orale pour présenter vos documents et vos analyses. Durant cette dernière, vous pouvez faire participer vos camarades.

    C 1.2 & C 2.3 CONTEXTUALISER & CONSTRUIRE UNE ARGUMENTATION

    Groupe n° 3 - La nation ou le peuple en armes.

    POINT DE PASSAGE ET D’OUVERTURE : Mme ROLAND

    C 1.2 & C 2.3 CONTEXTUALISER & CONSTRUIRE UNE ARGUMENTATION

    Groupe n° 4 - La nation ou le peuple en armes.

    « […] La plupart des épurations parlementaires

    intervinrent lors de crises, lorsque l’Assemblée était

    confrontée à un mécontentement croissant qui

    s’exprimait dans la presse, dans la rue, ou pire

    encore, lors d’insurrections populaires. [En les

    acceptant, l’Assemblée] cherchait à se refaire une

    réputation en tant que représentation nationale. »

    Mette Harder, « « Elle n’a pas même épargné ses

    membres ! » Les épurations de la Convention

    nationale entre 1793 et 1795 », Annales historiques

    de la Révolution française, n° 381, 2015.

    POINT DE PASSAGE ET D’OUVERTURE : Mme ROLAND

    Question 1° Quelle(s) relations le peuple en armes entretient-il avec ses députés ?

    Préparez une rapide présentation orale pour présenter vos documents et vos analyses. Durant cette dernière, vous pouvez faire participer vos camarades.

  • Pour tenter de reprendre la main et d’encadrer la violence

    populaire, les députés décident, en 1793, de mettre en

    place un gouvernement d’exception. Les libertés sont

    suspendues et les opposants politiques, considérés comme

    des « ennemis nationaux » sont traqués, sommairement

    jugés par des tribunaux révolutionnaires puis exécutés.

    Manon Roland fait parti des condamnés, voici son acte

    d’accusation :

    « 1° Il a existé une conspiration horrible contre l’unité, l’indivisibilité de la

    République, la liberté et la sûreté du peuple français.

    2° Marie-Jeanne Phlipon, femme de Jean-Marie Roland, est l’auteur ou [la]

    complice de cette conspiration »

    C 1.2 & C 2.3 CONTEXTUALISER & CONSTRUIRE UNE ARGUMENTATION

    Groupe n° 5 - La nation ou le peuple en armes.

    « Puisqu’on a osé dans cette assemblée rappeler les journées sanglantes sur

    lesquelles tout bon citoyen a gémi1 je dirai, moi, que si un tribunal

    révolutionnaire eût existé le peuple auquel on a si souvent, si cruellement

    reproché ces journées ne les aurait pas ensanglantées. Faisons ce que n’a pas

    fait l’Assemblée législative, soyons terribles pour éviter au peuple de l’être et

    organisons un tribunal non pas bien, c’est impossible, mais le moins mal qui se

    pourra, afin que le peuple sache que le glaive de la liberté pèse sur la tête de

    tous ses ennemis. »

    Discours de Georges-Jacques Danton devant l’Assemblée nationale, le 10 mars

    1793.

    1 Georges-Jacques Danton évoque les violences populaires, récurrentes depuis le 14 juillet

    1789.

    En 1794, les députés mettent fin au gouvernement

    exceptionnel et instaurent un nouveau régime : le

    Directoire.

    « [Le Directoire] débute par un coup parlementaire

    et non par une insurrection populaire. Il ne doit pas

    son existence à une violence qu'il aurait été obligé

    d'assumer comme légitimante, comme acte de

    souveraineté, ainsi que cela avait été le cas

    jusqu'alors depuis le 14 juillet. »

    Colin Lucas « Les thermidoriens et les violences de

    l'an II » dans 1795, Pour une République sans

    Révolution, PUF, 1996.

    Questions

    1° Que propose Danton pour mettre fin aux

    violences populaires en 1793 ? Que font les

    députés la même année ?

    2° Pourquoi Manon Roland est-elle jugée en 1793 ?

    3° Avec quel(s) aspect(s) de la Révolution les

    députés veulent-ils rompre en instaurant le

    Directoire ?

    Préparez une rapide présentation orale pour présenter vos documents et vos analyses. Durant cette dernière, vous pouvez faire participer vos camarades.

    POINT DE PASSAGE ET D’OUVERTURE : Mme ROLAND