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6 actualités Actualités pharmaceutiques n° 504 Mars 2011 Un nouveau bras de fer s’est engagé entre les supermarchés Leclerc et les pharmaciens d’officine. C’est sur l’argument phare de Michel Édouard- Leclerc, le prix, que ces derniers ont riposté tout en rappelant que, sans pharmacien, la sécurité sanitaire ne peut être assurée. D epuis 2008, le patron de la célèbre ensei- gne de supermar- chés Leclerc tente par tous les moyens de démontrer l’opportunité de permettre à la grande distribution de vendre des médicaments accessibles sans ordonnance. Le princi- pal argument est financier : il assure qu’une telle orientation contribuera à en faire baisser les prix. Afin de convaincre l’opinion publique d’épouser sa position, il n’a pas hésité à lancer une vaste campa- gne de publicité, présentant une vision plutôt caricaturale des pharmaciens d’officine. Ces derniers sont parvenus, en première instance, à faire interdire cette opération, mais un jugement en appel les a finalement déboutés de leur demande. Aujourd’hui, l’examen du pourvoi en cassa tion est toujours en cours. Aussi, Michel Édouard- Leclerc, patron des super- marchés éponymes, a-t-il lancé une nouvelle campa- gne, martelant toujours que la grande distribution garan- tit une meilleure défense du pouvoir d’achat des familles que les officines. Pétition et études à l’appui Ces dernières n’ont cepen- dant pas tardé à riposter avec, en figure de proue de ce combat, le groupement Univers Pharmacie. Son action comporte deux volets. D’une part, une pétition est proposée dans de nombreu- ses pharmacies afin d’inciter les patients à dire « non à la vente de médicaments par la grande distribution ». Le pré- sident du groupement, Daniel Buchinger, espère atteindre les 500 000 signatures grâce à la participation de 6 000 phar- macies pendant deux mois. Par ailleurs, le site internet semoquerdumonde.com propose un nouvel éclairage sur les arguments si souvent répétés par Michel Édouard- Leclerc. Il met notamment en avant deux études com- paratives réalisées sous contrôle d’huissier en 2009 et en 2011 qui se sont atte- lées à examiner les prix des produits de parapharmacie vendus, d’une part, dans les enseignes Leclerc et, d’autre part, dans les officines d’Uni- vers Pharmacie. Le verdict est sans appel : il existe entre les parapharmacies Leclerc des écarts de prix pouvant aller jusqu’à 69,57 %, tandis que ces dernières se révèlent le plus souvent plus chères que le réseau Univers Pharma- cie. Le surcoût constaté chez Leclerc a été estimé entre 0,50 % et 18,32 %. Sécurité sanitaire, le compte n’y est pas Le réseau Univers Pharmacie ne se contente pas d’atta- quer Leclerc sur son argu- ment phare. Il s’intéresse également à un enjeu cen- tral : la sécurité sanitaire. Si le patron des supermarchés dont il porte le nom assure que « 25 % des pharmaciens Leclerc ont été titulaires d’of- ficine, 63 % ont été adjoints d’officine, 11 % sont issus de l’industrie pharmaceutique et 1 % ont été pharmaciens dans des établissements de santé », Daniel Buchinger juge ces données bien insuffisan- tes pour satisfaire les exigen- ces qui s’imposent quant à la vente de médicaments. Il interroge : « Pourquoi croyez- vous que la spécialité officine existe ? Entre nous, vous feriez-vous opérer des yeux par un ophtalmologiste qui n’a travaillé que dans l’industrie ? (...). Les docteurs en pharma- cie d’officine sont obligés de suivre une formation continue agréée (...). En revanche, les docteurs en pharmacie dans vos parapharmacies, eux, non ». Il est également rappelé que, pour répondre à l’obliga- tion d’une présence perma- nente d’un pharmacien dans toute officine, le réseau Leclerc devrait compter 310 docteurs en pharmacie. Or, pour l’heure, ses para- pharmacies n’emploient que 210 praticiens. Aurélie Haroche © jim.fr Concurrence Ça tombe bien, les pharmacies sont déjà moins chères que les supermarchés Leclerc

Ça tombe bien, les pharmacies sont déjà moins chères que les supermarchés Leclerc

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Actualités pharmaceutiques n° 504 Mars 2011

Un nouveau bras de fer

s’est engagé entre les

supermarchés Leclerc

et les pharmaciens

d’officine. C’est sur

l’argument phare

de Michel Édouard-

Leclerc, le prix, que

ces derniers ont riposté

tout en rappelant que,

sans pharmacien,

la sécurité sanitaire

ne peut être assurée.

Depuis 2008, le patron de la célèbre ensei-gne de supermar-

chés Leclerc tente par tous les moyens de démontrer l’oppor tunité de permettre à la grande distribution de vendre des médicaments accessibles sans ordonnance. Le princi-pal argument est financier : il assure qu’une telle orientation contribuera à en faire baisser les prix. Afin de convaincre l’opinion publique d’épouser sa position, il n’a pas hésité à lancer une vaste campa-gne de publicité, présentant une vision plutôt caricaturale des pharmaciens d’officine. Ces derniers sont parvenus, en première instance, à faire interdire cette opération, mais un jugement en appel les a finalement déboutés de leur demande. Aujourd’hui, l ’examen du pourvoi en cassa tion est toujours en cours. Aussi, Michel Édouard-Leclerc, patron des super-marchés éponymes, a-t-il

lancé une nouvelle campa-gne, martelant toujours que la grande distribution garan-tit une meilleure défense du pouvoir d’achat des familles que les officines.

Pétition et études à l’appuiCes dernières n’ont cepen-dant pas tardé à riposter avec, en figure de proue de ce combat, le groupement Univers Pharmacie . Son action comporte deux volets. D’une part, une pétition est proposée dans de nombreu-ses pharmacies afin d’inciter les patients à dire « non à la vente de médicaments par la grande distribution ». Le pré-sident du groupement, Daniel Buchinger, espère atteindre les 500 000 signatures grâce à la participation de 6 000 phar-macies pendant deux mois.

Par ailleurs, le site internet semoquerdumonde.com propose un nouvel éclairage sur les arguments si souvent répétés par Michel Édouard-Leclerc. Il met notamment en avant deux études com-paratives réalisées sous contrôle d’huissier en 2009 et en 2011 qui se sont atte-lées à exami ner les prix des produits de parapharmacie vendus, d’une part, dans les enseignes Leclerc et, d’autre part, dans les officines d’Uni-vers Pharmacie . Le verdict est sans appel : il existe entre les parapharmacies Leclerc des écarts de prix pouvant aller jusqu’à 69,57 %, tandis que ces derniè res se révèlent le plus souvent plus chères que le réseau Univers Pharma-cie. Le surcoût constaté chez Leclerc a été estimé entre 0,50 % et 18,32 %.

Sécurité sanitaire, le compte n’y est pasLe réseau Univers Pharmacie ne se contente pas d’atta-quer Leclerc sur son argu-ment phare. Il s’intéresse également à un enjeu cen-tral : la sécurité sanitaire. Si le patron des supermarchés dont il porte le nom assure que « 25 % des pharmaciens Leclerc ont été titulaires d’of-ficine, 63 % ont été adjoints d’officine, 11 % sont issus de l’industrie pharmaceutique et 1 % ont été pharmaciens dans des établissements de santé », Daniel Buchinger juge ces données bien insuffisan-tes pour satisfaire les exigen-ces qui s’impo sent quant à la vente de médicaments. Il interroge : « Pourquoi croyez-vous que la spécialité officine existe ? Entre nous, vous feriez-vous opérer des yeux par un ophtalmologiste qui n’a travaillé que dans l’industrie ? (...). Les docteurs en pharma-cie d’officine sont obligés de suivre une formation continue agréée (...). En revanche, les docteurs en pharmacie dans vos parapharmacies, eux, non ». Il est également rappelé que, pour répondre à l’obliga-tion d’une présence perma-nen te d’un pharmacien dans toute off icine, le réseau Leclerc devrait compter 310 docteurs en pharmacie. Or, pour l’heure, ses para-pharmacies n’emploient que 210 praticiens. �

Aurélie Haroche

© jim.fr

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Ça tombe bien, les pharmacies sont déjà moins chères que les supermarchés Leclerc