Cahiers de La Finiance islamique

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    N 7

    Les Cahiers de la Finance Islamique

    2014

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    Directeurs de rdaction

    Michel Storck, Professeur des Universits, UMR 7354, DRES-droit des affaires,Coresponsable de leMBA de Finance Islamique de lUniversit de Strasbourg, Responsabledu Master 2 recherche sciences et droit des religions , option Finance islamique de

    lUniversit de Strasbourg.

    Laurent Weill, Professeur des Universits, Directeur du laboratoire de recherche LARGE,Coresponsable de leMBA de Finance Islamique de lUniversit de Strasbourg.

    Smi Hazoug, Charg denseignement, Coresponsable de leMBA de Finance Islamique delUniversit de Strasbourg.

    Comit de rdaction

    Amr Abou Zeid, Ph.D, Head of Trade Center,BNP Parisbas, Egypt.

    Mehmet Asutay, Lecturer, Universit de Durham, Royaume-Uni.

    Abderrazak Belabes, Chercheur lInstitut d'conomie islamique, Universit du RoiAbdulaziz, Djeddah, Arabie saoudite.

    Elisabeth Forget, Docteur en droit. Juriste,Loyens & Loeff LuxembourgS. r.l.

    Rifki Ismal, Ph.D., University of Durham and Bank of Indonsia, Royaume-Uni et Indonsie

    Jrme Lasserre-Capdeville, Matre de Confrences, Universit de Strasbourg.Isabelle Riassetto, Professeur des Universits, Universit du Luxembourg.

    Ibrahim Ward, Professeur associ, Fletcher School of Law and Diplomacy, TuftsUniversity, Medfor, Massachusetts, tats-Unis dAmrique.

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    ditorial

    lOuest du nouveau : lessukuksouverains

    Un sujet trs la mode ces temps-ci en finance islamique est lmission de

    sukukpar des tats hors du monde arabo-musulman.

    Rappelons que les sukuk sont la version islamique des obligations: plutt que

    demprunter une banque qui sert dintermdiaire avec les agents qui ont des

    capacits de financement, lide en est de directement emprunter auprs de ces

    agents en mettant obligations ou sukuk. Les sukuk peuvent tre mis par des

    entreprises aussi bien que par des tats. Les sukuk souverains sont ainsi les

    sukukmis par les tats qui veulent faire face leurs besoins de financement. Ils

    existent depuis plusieurs annes dans le monde arabo-musulman.

    Ce qui est nouveau est leur utilisation par des pays non issus du monde

    arabo-musulman. Singapour avait dj mis un saksouverain en 2009, mais ce

    pays est gographiquement au cur de ce monde.

    Tout dabord le Royaume-Uni a annonc lmission dun sak souverain en

    octobre 2013. Ensuite Hong Kong vient tout rcemment dmettre un sak

    souverain pour un milliard de dollars la (curieuse) date du 11 septembre 2014.

    Enfin le Luxembourg vient dadopter un projet de loi qui permet ltat

    dmettre des sukuk pour se financer. La commercialisation du premier saksouverain luxembourgeois est en cours.

    Comme souvent avec de nouveaux dveloppements en finance islamique, on

    peut voir moult observateurs senflammer analysant ceux-ci comme une

    nouvelle preuve de la formidable expansion ou des vertus conomiques des

    produits financiers islamiques.

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    Afin davoir un bref premier regard sur ces dveloppements, posons-nous juste

    la question de savoir pourquoi ces tats mettent ou prvoient dmettre des

    sukuksouverains.

    Premire explication : ils prfrent les sukuk aux obligations car ils ont pris

    conscience des vertus de ces instruments diffrents. En effet, comme les sukuk

    sont des produits financiers islamiques, ils se distinguent des obligations en

    pouvant permettre soit dviter le paiement dintrts et donc de partager pertes

    et profits, soit davoir simplement accs un cot de financement plus faible.

    Mais il faut nuancer cette explication en analysant le type dinstrument utilis

    par les tats. Est-ce un instrument fond sur le partage des pertes et des profits

    comme la mudarabaet la musharaka? Non. Les trois cas qui nous intressent

    reposent sur lijara, qui est un instrument de dette, certes en accord avec les

    principes de la finance islamique mais sans avoir de diffrences fondamentales

    sur un plan financier jinsiste sur ce terme avec un titre de detteconventionnelle classique.

    Un bon exemple est le saksouverain britannique dont le profit annuel est de

    2,036%. Il est connu lavance et est fix au mme taux que lobligation

    quivalente sur 5 ans du Royaume-Uni Ni diffrence majeure en termes de

    partage des pertes et des profits, ni diffrence en termes de cot du

    financement

    Une seconde explication est que les sukuk intressent ces tats non pas en

    raison des caractristiques intrinsques de ces titres de financement, mais en

    raison de leurs souscripteurs diffrents.

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    En effet, les sukuksouverains sont souscrits par dautres classes dinvestisseurs,

    ce qui peut permettre daccder dautres financeurs pour les tats. Par ailleurs,

    il existe une trs forte demande pour ces produits qui permet de trouver

    facilement preneur. La raison de cette forte demande provient notamment desbesoins des banques islamiques pour avoir des titres souverains dans leur

    portefeuille (moins risqus et plus liquides que les prts) alors que les sukuk

    souverains restent relativement limits. Pour le sak mis par Hong Kong, la

    demande tait 5 fois suprieure au montant propos, pour celui britannique

    10 fois. Il peut ainsi tre intressant pour un tat dmettre des sukuksouverains

    pour garantir la capacit emprunter de largent, comme une crise de dettesouveraine est toujours possible.

    Cette explication peut tre pertinente mais la marge comme le montre le point

    suivant.

    La troisime explication, la plus probante, est que lmission de sukuksouverains nest quune opration de communication pour attirer des activits de

    finance islamique pour les entreprises sur son sol. Le sak souverain serait une

    sorte de produit dappel pour montrer que le pays est Islamic finance

    friendly. tudions concrtement ces missions et les dclarations des

    dirigeants.

    Dans le cas britannique, lmission de sakest pour un montant de 200 millions

    de livres.

    Connaissez-vous le montant de la dette publique britannique ? 1300 milliards de

    livres. Ainsi le sak britannique correspond moins de 0,02% de la dette

    publique britannique. Connaissez-vous les besoins de financement du

    Royaume-Uni pour lanne 2013 ? 120 milliards de livres. Dit diffremment

    lmission dusakreprsente 0,1% des besoins de financement du Royaume-Uni

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    au cours de lanne 2013. Bref une goutte deau dans le financement souverain

    britannique

    Dans le cas du Luxembourg, force est de constater que ce pays ne souffre pas

    proprement parler de difficults emprunter de largent. Son ratio de dette

    publique par rapport au PIB est de 23% en 2013 comparer avec 93% en

    moyenne dans la zone euro, soit le plus faible de toute lEurope Occidentale...

    De mme le Luxembourg emprunte Alors pourquoi avoir recours un sak

    souverain sil ny a pas dinquitude sur sa capacit trouver des financeurs?

    Les exemples britannique et luxembourgeois mettent ainsi en doute lide queles tats occidentaux seraient motivs par une logique de diversification et

    daccs une nouvelle classe dinvestisseurs pour leur financement. En tout cas

    pour linstant.

    Les dirigeants de Hong Kong assument pleinement cet argument de

    communication. Le secrtaire financier de Hong Kong, John Tsang, a dit quil

    esprait que lmission catalyserait la croissance future du march des sukuk Hong Kong en encourageant plus dmetteurs et dinvestisseurs participer

    au march financier du territoire.

    Lun des dirigeants de lAutorit Montaire de Hong Kong, Peter Pang,

    confirmait ce point en indiquant que lobjectif majeur dmettre un sak

    souverain tait douvrir la voie des leveurs de fonds locaux et

    internationaux, peu importe du secteur priv ou public pour quils en fassent

    autant.

    Et les dirigeants britanniques aussi dailleurs : George Osborne, Chancelier de

    lchiquier, a indiqu jespre que le succs de cette mission

    gouvernementale va encourager davantage dmissions de sukuk privs au

    Royaume-Uni . Tout est dit.

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    Lmission de sukuk souverains hors du monde arabo-musulman apparat ainsi

    pour une place financire tre un moyen dattirer des clients souhaitant faire des

    activits de finance islamique.

    Noublions jamais que la finance islamique est de la finance.

    Bonne lecture tous1de ce dixime numro des cahiers.

    Laurent Weill.

    1Les colonnes des cahiers sont ouvertes, aprs validation, aux contributions de recherche fondamentale ouapplique, de toutes les disciplines concernes par la finance islamique. Une attention particulire est porte loriginalit du travail qui devra ncessairement comporter lindication des sources. Les propositions (Times newroman 12, interligne simple) sont envoyer cette adresse en fichier word :[email protected] Tous les numros sont consultables gratuitement sous ces deux liens http://sfc.unistra.fr/finance-islamiqueet http://www.ifso-asso.com/documents/

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    FINANCEMENT BANCAIRE ISLAMIQUE DANS LE CONTEXTE DE LA CRISEFINANCIRE

    ParYomna DAOUDetAda KAMMOUN

    REPENSER LE CONTRLE CHARIATIQUE DES OPRATIONS BANCAIRES ETFINANCIRES ISLAMIQUES

    ParAnfel BOUDJELAL

    LA RGLE DE LA RCUPRATION ET SES FONDEMENTSJURISPRUDENTIELS

    ParMohamed Talal LAHLOU

    PERSPECTIVES DINVESTISSEMENTS ISLAMIQUES : ANALYSE DESMARCHS FINANCIERS EN 2013

    ParMoud BOUTAOUR-KANDIL

    LES SUKUKOPTIONNELS SUKUK REMBOURSEMENT ANTICIP,CONVERTIBLES ET CHANGEABLES

    ParPaul-Olivier KLEIN

    CONFORMIT AU DROIT MUSULMAN ET AU DROIT FRANAIS, QUESTION(S)DARTICULATION(S) : LEXEMPLE DE LA CLAUSE BNFICIAIREParEzzedine GHLAMALLAH

    LE TRAITEMENT FISCAL DE LASSURANCE-VIE ISLAMIQUE

    ParFlorian BURNAT

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    FINANCEMENT BANCAIRE ISLAMIQUE DANS LECONTEXTE DE LA CRISE FINANCIRE

    Yomna DAOUD2et Ada KAMMOUN3

    Rsum :

    Depuis 2008, lavnement de la crise financire a fragilis le systme financier jusqu' crer

    une crise conomique mondiale. Le monde a dcouvert un dysfonctionnement conomique etfinancier grave. Par ailleurs, les banques islamiques ont t moins touches par cette crise.Prsente ainsi comme une alternative au systme financier mondial frapp par une crisedthique , la finance islamique (en tant que finance thique) tente dapporter une autrevision du commerce et de linvestissement en se basant principalement sur le principe departage des pertes et des profits, la prohibition de lintrt et ladossement de tout financement des actifs rels. Ceci pourrait permettre daugmenter la discipline financire et dintroduireplus de stabilit dans le systme. Cest dans ce cadre quelle peut apporter des lments derflexion pour une rvision thique du systme conomique et financier en crise.

    Lobjectif de larticle est de donner un aperu sur la finance islamique dans son contextehistorique, social et conomique et dtudier les facteurs favorisant la rsistance des banquesislamiques la crise. Concernant les effets de la crise financire, les pays arabes ont trelativement moins impacts parce que leurs systmes bancaire et financier sont moinsouverts sur linternational, avec des pratiques et des produits moins innovants. Aux cts despays ptroliers, un deuxime ple tend merger, profitant de son appartenance au mondearabe, mais aussi de sa proximit de lEurope: les pays du pourtour de la Mditerrane. LaBanque islamique de dveloppement et la Banque europenne d'investissement ont sign unprotocole daccord afin de renforcer leur coopration dans ces pays. Dans ce cadre, notrearticle sinterroge sur la place de lactivit bancaire islamique dans cette rgion.

    Mots-cls: finance islamique,crise financire, principes thiques, partage de pertes et profits.

    2Doctorante la FSEG, Universit de Sfax, Tunisie, Unit de recherche, conomie Applique(URECA).

    [email protected] et HDR (Finance), Institut Suprieur dAdministration des Affaires de Sfax, Universit de Sfax,Tunisie. [email protected]

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    Abstract: Islamic banking financing in the context of the financial crisis:

    Since 2008, the beginning of the financial crisis has weakened the financial system to create aglobal economic crisis. The world has discovered a serious economic and financialdysfunction. "Islamic banks" were less affected by the crisis. However, as an alternative to theglobal financial system hit by a crisis of ethics, Islamic finance (as ethical finance) attempts toprovide another view of trade and investment based primarily on the principle of sharing ofprofits and losses, the prohibition of interest and the backing of any financing to real assets.This increases the financial discipline and introduces more stability into the system. In thiscontext, it can provide bring elements of reflection for an ethical review of the economicand financial system in crisis. The objective of the article is to give a glimpse on Islamicfinance in its historical, social and economic context and to explore factors related to theresistance of Islamic banks to the crisis. On the effects of the financial crisis , Arab countries

    have been relatively less affected because their banking and financial system is less open tointernational , with more conservative practices and supervision especially with lessinnovative products. Alongside the oil-producing countries, a second pole tends to emerge,taking advantage of its membership in the Arab world, but also its proximity to Europe:countries bordering the Mediterranean. The Islamic Development Bank and the EuropeanInvestment Bank join forces for the Mediterranean countries. They signed a Memorandum ofUnderstanding to strengthen their cooperation in these countries. In this context, our paperexamines the place of Islamic banking in this region.

    Keywords: Islamic finance, financial crisis, ethical principles, profits and losses sharing.

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    INTRODUCTION

    Depuis ses dbuts, la finance islamique cherche dvelopper des services bancaires et des

    produits financiers qui respectent les dispositions de la Charia. La finance islamique estamene jouer un rle social en investissant dans les pays en voie de dveloppement, dans ledveloppement durable et des projets utilit publique. Par ailleurs, la finance islamiqueconstitue une source de financement importante dans un environnement o les liquidits sesont rarfies. Le dveloppement connu par la finance islamique est ainsi d notamment auxliquidits actuellement prsentes dans un certain nombre de pays musulmans, et la fortedemande pour des produits compatibles avec la Charia.

    Les banques islamiques ont t moins affectes par la crise que les banques conventionnelles,ceci pourrait tre expliqu dune part par le fait que la plupart des instruments financiers

    lorigine de la crise des subprimes (les crances hypothcaires de mauvaise qualit et leursdrivs dvelopps par les oprations de titrisation) sont interdites en finance islamique. Eneffet, un composant essentiel et commun tous ces produits tant lintrt, prohib en islam.Par consquent, les banques islamiques ne portent leur bilan aucune des classes dactifs quiont favoris la crise. Dautre part, les banques islamiques ne souffrent pas du manque desliquidits puisquelles sont alimentes par des rgions riches en liquidit telles que les pays duGolf.

    La finance islamique ne sadresse pas uniquement aux musulmans. Ses principes, recueillis

    des valeurs de lIslam, peuvent en effet avoir une vocation universelle. La finance islamiquese base en effet sur cinq piliers : trois interdictions et deux injonctions. Les interdictionsconcernent:

    - L'intrt et l'usure (riba)- les comportements spculatifs et incertains (ghararet mayssir)- certains secteurs conomiques rputs impurs (les boissons alcoolises, les jeux

    d'argent et l'exploitation de la viande de porc,)

    Par ailleurs, les injonctions (ou les obligations) se prsentent comme suit :

    - Le partager des pertes et profits entre toutes les parties conomiques- Ladossement de toute transaction financire un actif tangible

    Le respect de ces rgles et principes issus de la Charia est la raison d'tre dune institutionfinancire islamique. Selon Kahf (2002)4, la premire initiative dintroduction dun organe desupervision de conformit la charia au sein de la profession bancaire islamique a t parFaisal Islamic Bank of Egypt en 1976 et la Banque islamique de Jordanie en 1978.

    4M. Kahf (2002), Strategic Trends in the Islamic Banking and Financing Movement, in Proceedings of theFifth Harvard University Forum on Islamic Finance, Cambridge, Massachusetts, USA, 2002.

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    Actuellement, la confirmation du caractre islamique dun produit financier ou dunetransaction financire est le rle dun conseil de charia (form de jurisconsultes musulmansreconnus)5. En effet, selonIslamic Financial Services Board(IFSB) (2009)6, la confirmationdu caractre islamique dun produit financier ou dune transaction financire dune institutionoffrant des services financiers islamiques est le rle dun conseil de charia7. La terminologieanglaise retient le terme de Shariah Board pour dsigner lentit charge de veiller laconformit religieuse. Le terme est traduit en franais par comit Charia (Forget (2014)).

    D'autres normes de lIFSBcomme celles sur la gestion des risques, l'adquation du capital et

    processus de contrle prudentiel contiennent aussi des exigences et des recommandationsvisant faire en sorte qu'un systme de gouvernance de la charia appropri soit mis est enplace8.

    Cette tude prsente un recueil des avis des gestionnaires bancaires et des spcialistes enfinance islamique dans le contexte de la crise financire.

    La premire section est consacre la crise financire mondiale, ses origines et sesconsquences sur le plan mondial. La deuxime section sintresse au rle de la financeislamique comme moyen de rgulation de la crise actuelle en examinant ses principes ainsique ses modes de financement. La troisime section est consacre ltude de lactivitbancaire islamique dans le contexte de la crise et la place quelle occupe dans la rgion duMaghreb. Enfin, nous examinerons les dfis permettant lexpansion de la finance islamique.

    1- La crise financire : causes et consquences

    Avant davancer les causes de la crise, il convient dintroduire une dfinition de la crisefinancire et de la crise conomique. Le terme crise financire s'emploie pour dsigner ladstabilisation du systme bancaire et financier d'une ou de nombreuses conomies. Une crisefinancire est une dgradation brusque de la valeur des actifs financiers tel est le cas parexemple de la crise des subprimes. Elle peut stendre par contagion et devenir internationale.

    5A. Hassoune, Tour dhorizon de la finance islamique : La finance islamique, un compartiment thique du

    march de l'argent , tlchargeable :http://www.lacademie.info/content/download/7702/119509/version/1/file/Anouar+Hassoune.pdf6 IFSB-10 : Guiding Principles On Shari`Ah Governance Systems For Institutions Offering Islamic FinancialServices: December 2009: p 7-p167 En anglais Shariah Boards, selon le standard IFSB-10 Shariah boards are usually comprised of a panel ofShariah scholars acting as special advisers to the institutions, and may alternatively be called a ShariahCommittee or Shariah Supervisory Board (SSB). The Shariah board or Shariah advisory firm that carries out theShariah compliance review/audit shall produce reports, indicating whether the IIFS has complied with Sharahrequirements throughout the financial year.http://www.ifsb.org/standard/IFSB-10%20Shariah%20Governance.pdf8Par exemple, les Principes directeurs sur la gestion des risques, connus sous le nom IFSB-1 (2005) affirmentquune IIFS doit tablir une politique approprie afin de grer les risques juridiques et risque de lanon-conformit la charia, indiquant ainsi implicitement la ncessit d'un systme de gouvernance de la charia

    robuste et fiable pour grer les risques de non-conformit la charia. La norme sur le processus de surveillanceprudentielle, connu sous le nom IFSB-5 (2007), recommande que les autorits de contrle devraient s'assurer quedes systmes appropris sont mis en place, parmi lesquels les conseils de la charia.

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    Elle peut avoir pour consquence de ralentir l'conomie mondiale et engendrer une criseconomique9.

    Une crise conomique est une dgradation brutale de la situation conomique d'un pays oud'une zone conomique, consquence d'un dcalage entre la production et

    la consommation10. Quand on parle de crise conomique, on se rfre au caractre fluctuantet cyclique de lactivit conomique. Elle se traduit par une forte augmentation du chmage,par une baisse du PIB (Produit Intrieur Brut), un accroissement du nombre de faillites et unebaisse du pouvoir d'achat.

    La crise des subprimes aux tats-Unis :

    Parmi les lments qui ont particip dune manire ou dune autre lmergence de cette crise

    on cite: la sous-estimation des risques, les pratiques doctroi de crdits, le manque detransparence et le rle des agences de notation.

    Selon Saraogi (2007), les normes de prt du gouvernement des tats-Unis ont t assoupliesen 2000, au point que beaucoup de gens ont pu acheter des maisons qu'ils ne pouvaient pas sepermettre. La Banque centrale amricaine (FED) qui a encourag le crdit facile afin derelancer l'conomie, a permis des millions de foyers modestes de devenir propritaires,moyennant des prts surprime dits subprimes (des prts hypothcaires risque). Encontrepartie, ils mettent leur bien immobilier en garantie, si un dbiteur ne parvient pas payer, son bien sera vendu pour honorer le remboursement de sa dette. Si un grand nombre de

    mnages narrivent pas rembourser leurs dettes, la vente de leurs biens immobiliers entranel'effondrement de la valeur de ces biens immobiliers. Face laugmentation considrable deces crdits, la FEDa augment ses taux dintrt de 2 % 5,25 % en juin 2006 en mettantplus de pression sur les crdits subprimes taux variable, ce qui a acclr les faillites desmnages amricains devenus insolvables. Les mnages n'ayant plus les moyens de rembourserles instituts de crdit, leur dfaillance a provoqu la faillite des tablissements prteurs quimme en saisissant la maison, trouvent celle-ci a une valeur infrieure celle de dpart.

    Par ailleurs, la titrisation a jou un rle essentiel dans lapprofondissement de la crise

    financire mondiale : les banques ont titris certains de leurs prts afin de les vendre dautres investisseurs avant chance. Les banques nont pas investi le temps et les ressourcesncessaires pour effectuer une analyse approfondie du crdit et des garanties11. Lorsque lesbnficiaires de ces prts se sont retrouvs dans lincapacit de les rembourser, ces produitstitriss ont vu leur valeur seffondrer, alors quils avaient t trs bien classs par les agencesde notation. Selon certains analystes, les agences de notation ont une part de responsabilitdans la crise. Elles n'ont pas suffisamment anticip l'augmentation du risque de dfaut de

    9http://www.trader-finance.fr/lexique-finance/definition-lettre-C/Crise-financiere.htmlEt http://www.investopedia.com/terms/f/financial-crisis.asp10

    http://www.toupie.org/Dictionnaire/Crise.htm11 I.Bari etB.Radi, (2011), Au-del de la crise. La finance islamique est-elle un moyen de rgulation ? ,thique publique[En ligne], vol. 13, no2, http://ethiquepublique.revues.org/871

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    paiement et ont brutalement abaiss leur note en 2008. Selon lAMF (Autorit des marchsfinanciers de France) : les agences de notation ont chou, dune part, refltersuffisamment tt la dgradation des conditions de march dans leurs notations de crdit et,dautre part, adapter temps leurs notations de crdit alors que la crise sur le marchstait aggrave 12.

    Dans le sillage de la crise, Les banquiers, les rgulateurs financiers et les acteurs de march,touchs par la crise financire, sont la recherche de mesures qui permettraient dune part unemeilleure stabilit du systme financier et dautre part plus dthique (Bari et Radi (2011)).De nombreux tmoignages viennent conforter cet avis sur la ncessit dun souci dthique etune plus grande conscience des responsabilits pour que les gouvernants des institutionsfinancires puissent tous la fois moraliser et scuriser leurs activits.

    Ren RICOL (2008) indique, dans un rapport sur la crise financire13, que tous les acteurs

    du march doivent sengager des pratiques saines. Celles-ci, dans de nombreux secteurs del'industrie financire, ont videmment t oublies pendant les prmices de la crise."L'thique" doit revenir sur le devant de la scne, tre mieux contrle et mieux gre. Lacomptence doit galement redevenir une priorit, tant pour dcider que pour conduire desoprations saines et garantir dans tous les cas des ractions appropries de la part dumanagement et des conseils dadministration .David WEITZNER et James DARROCH (2009) estiment que la leon tirer de la crise estque la rglementation ne sera jamais assez suffisante sans une rforme thique (cit parBelabes (2013)).Le Comit de Ble sur le contrle bancaire a ritr le rle cl que joue une bonne disciplinede march pour favoriser un systme bancaire sr et solide. Cette autorit de contrle doitsassurer que les banques disposent de politiques et procdures appropries, notamment decritres stricts de vigilance lgard de la clientle, garantissant un haut degr dthique et deprofessionnalisme dans le secteur financier14.

    2- La finance islamique constitue-t-elle un remde aux crises financires

    la fin des annes 1950 les professionnels, les conomistes ainsi que des universitaires

    musulmans thorisent la possibilit de crer un systme financier alternatif la financetraditionnelle et conforme aux enseignements du Coran. Le premier essai dinstaurationdinstitution financire islamique tait par la cration du Pilgrims Administration and Fund(Tabung Haji) en Malaisie (1956), tentatives qui chourent lpoque. Au dbut des annes1960, en gypte et en Malaisie, il y a eu cration d'institutions financires conformes auxprincipes conomiques islamiques. Aprs avoir ralis des performances relativement faibles,

    12Rapport 2009 de lAMFsur les agences de notation13 R. Ricol, (2008), Rapport sur la crise financire au Prsident de la Rpublique, Septembre, p .7

    http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/084000587/0000.pdf14 Banque des Rglements Internationaux (2012): Principes fondamentaux pour un contrle bancaireefficace , Comit de Ble sur le contrle bancaire, Septembre 2012

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    la finance islamique a commenc se dvelopper au dbut des annes 1970 avec la monte delattachement religieux des populations du monde musulman et la flambe du prix du ptrole.

    Les modes de financement islamique

    En contraste avec la finance conventionnelle, la finance islamique offre une large gammedinstruments financiers non spculatifs et exemptes dintrts reconnus comme tant les

    principales causes des crises quendure le systme financier international (Elmeziane(2013)).

    Les principaux modes de financement islamique bass sur le principe de Partage des Perteset Profits sont: la (partenariat passif) et la Musharaka (partenariat actif). En vertu desdispositions du premier mode,Mudaraba, le profit est distribu entre la banque (rabb-al mal)

    et un entrepreneur (mudarib) selon un ratio quil convient de dterminer au moment de lasignature du contrat. Les pertes financires sont supportes exclusivement par le prteur.L'emprunteur ne perd que le temps et les efforts investis dans l'entreprise. Cet arrangement,par consquent, met efficacement le capital humain au pair avec le capital financier. En

    Musharaka, sil y a plusieurs apporteurs de fonds, et ces parties investissent dans desproportions variables, alors les profits (ou pertes) sont partags strictement en fonction de leurapport en capital respectif.

    Une forme particulire qui est souvent utilise pour remplacer le crdit hypothcaire15est laMusharakadgressive : Cest un contrat entre la banque (partenaire financier) et le client parlequel les deux parties conviennent dentrer en partenariat pour lacquisition dun bien mais la condition que le financier se dsiste progressivement en vendant sa part au bnficiaire unprix convenu et selon un chancier dtermin. Avec cette mthode, les droits de propritsde la banque vont progressivement diminuer et le client deviendra la fin du contrat lepropritaire final du projet.

    La Musharaka permet la titrisation par un sak obligation islamique puisque le titrereprsente un actif rel (pour la version dgressive, un bien immobilier rel). Si le projet napas commenc et il ny a que de largent, les certificats ne peuvent tre vendus, car on ne peut

    vendre de largent pour de largent et avoir une augmentation (riba).Traditionnellement, le mode de financement Mudarabaa t employ dans linvestissementdes projets avec des priodes courtes, alors que la Musharaka est utilis dans des projetsdinvestissement long terme. Les certificats de Mudaraba et Musharaka reprsentent un

    15Un crdit hypothcaire est un crdit accord sous la condition de mise en hypothque d'un ou plusieurs biens

    immobiliers constituant le patrimoine de l'emprunteur. L'hypothque peut tre effectue sur le bien immobilierpour l'achat duquel un crdit est demand, mais aussi sur un bien immobilier indpendant de la demande decrdit. En cas de non-remboursement du crdit, la banque a la possibilit de saisir et vendre le bien immobilierhypothqu.

    http://pret-hypothecaire.comprendrechoisir.com/comprendre/credit-hypothecaire-definition

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    actif rel et rien de plus. Il est interdit de rajouter de lopacit en faisant une deuximetitrisation ou en y rajoutant des produits drivs pour lui donner un profil rendement-risqueplus attrayant. On voit donc que par limplmentation du principe de partage des pertes et desprofits, les produits financiers islamiques vitent de crer une conomie financire dcouplede lconomie relle (Chapra (2008)).

    Il existe dautres modes de financement bass sur le principe du cot plus marge, il sagitprincipalement de laMurabahaet de lIjara. Sagissant de laMurabaha, la banque islamiqueachte un bien et le revend ensuite son client un prix augment dune marge fixe. Ce prixde vente est payable terme. La murabaha ne peut jamais faire lobjet dune titrisation car ilsagirait dun titre qui ne reprsente pas un actif rel, mais bien un paiement en argent futur.Un tel titre serait lquivalent dun dpt terme ou dune obligation avec intrt etconstituerait donc de la riba.

    Pour la validit du contratMurabaha, les conditions suivantes sont requises: lobjet du contratdoit tre licite et il doit appartenir au vendeur au moment de la vente. Le bien doit avoir unevaleur relle et non montaire, il doit tre clairement prsent lacheteur. La vente doit treimmdiate ; si la vente est conditionne par un vnement futur, le contrat nest pas valable.Le prix de revient, la marge bnficiaire de lorganisme financier et les dlais de paiementdoivent tre pralablement connus, fixs et accepts par les deux parties contractantes. Dansla Murabaha, la banque, ou plus gnralement le bailleur de fonds, devient propritaire dubien. En outre, elle ne peut pas se dcharger de sa responsabilit par la titrisation : Ceci a uneffet disciplinant trs fort.

    Sagissant de lIjara, cest un contrat de location aux termes duquel la banque achte un bienauprs dun fournisseur et le loue lentrepreneur en contrepartie d'un loyer priodiqueprdtermin contractuellement. Quant lIjaraWa-Iktina, cest une forme d'Ijaraqui permet lentrepreneur, l'expiration de la priode de location, dacqurir automatiquement laproprit de l'actif. La seule diffrence avec le contrat crdit-bail classique rside dans le faitque la banque ne peut pas se permettre de facturer des intrts au cas o lentrepreneurnhonore pas ces engagements dans les dlais prvus.

    La finance islamique et lthique

    La finance thique consiste intgrer des critres extra-financiers (thiques, solidaires,environnementaux et de gouvernance) dans les dcisions de placements et la gestion de

    portefeuilles16.Ces critres sont de plus en plus pris en compte par les investisseurs.La finance islamique a pour finalit damliorer la condition de lhomme, dtablir lquitsociale et de prvenir linjustice dans les changes commerciaux. Cest dailleurs l lorigine

    16http://www.novethic.fr/novethic/upload/etudes/Synthese_Marche_ISR_2010.pdf

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    de linterdiction de lintrt et de son remplacement par un systme de partage des profits etdes risques (Novethic (2009)17).

    La finance islamique est proche de la finance thique. En effet, plusieurs interdictionsdistinguent la finance islamique de la finance classique :

    - Prohibition du Riba : lintrt est prohib, que ce soit riba augmentation oulchange de mme biens dans diffrentes quantits (par exemple une bote de dattespour deux botes de dattes de moindre qualit) et ceci pour viter toute formedinjustice. Dans ce cadre, largent est considr comme un simple moyen dchangeet largent non corrl lapport dun effort humain nest pas jug mme de crer lamoindre valeur, do lillgalit de tout intrt pay sur la mise disposition dunesomme dargent.

    - Interdiction du Gharar : Dfinissons dabord le terme de Gharar. Selon ABOUHAMDAN Malek (2013), le Gharar interviendrait de deux manires principales : (1) si lon ignore la survenance ou non de lobjet de la vente ou de son terme (on

    parle alors d ignorance de la survenance : al-Jahlu bil Husul) ; et/ou (2) si lonignore les caractristiques et les attributs de lobjet, voire les conditions de lchange(on parle alors dignorance , Jahalah, ou dobjet inconnu : Majhul). A partir del, et linstar dIbn Taymiyyah, Dharir (1995) dfinit le Gharar comme tant :

    Majhul al-`Aqibah ou ce dont les consquences sont inconnues (ou caches, ouencore : incertaines) ou ce dont on ignore lissue (ou le destin).

    Il ressort ainsi que ce terme dsigne toute vente caractre alatoire ou possdant unlment indfini, ambigu, cach ou dpendant dautre vnement qui peut tre relatifau prix, au dlai de livraison ou lobjet de la vente. La vente dobjets dont lexistenceet les caractristiques ne sont pas certains, tels que la vente du poisson dans la mer,sont considrs comme injustes et donc interdits. Un contrat, dont lobjet estlincertitude, est rput ainsi nul.

    - Interdiction du Mayssir : les jeux du hasard et par extension toute spculation sontinterdites. Cette doctrine interdit donc tout investisseur laccs au march des

    produits drivs (options, forwards, futures, swaps,). ce titre, Klein (2014) avanceque pour loption, qui est un contrat juridiquement indpendant commerant undroit sur un actif, en raison du paiement dune prime pour ce droit, du diffr de

    payement du prix et du transfert de proprit de lactif, et de la prsence importantede gharar et de maysir, les options financires prsenteraient de nombreusescaractristiques contraires au fiqh. En outre leur tolrance en raison dun principe dencessit semble disproportionne. Ainsi, pour pertinente que soit lutilisation desoptions financires, la finance islamique, si elle cherche respecter les canons du

    fiqh, peut difficilement accepter cet outil financier. Il lui faut pourtant sorienter vers

    17 NOVETHIC (2009), Finance Islamique et ISR : convergence possible ? , rapport2009, http://www.novethic.fr/fileadmin/user_upload/pages_statiques/Note_finance_islamique.pdf

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    des instruments prsentant des caractristiques optionnelles si elle souhaite gagner enefficience et grer les risques auxquelles elle est expose.

    - Principe des 3 P : partage des pertes et profits : lconomie islamique considreinjuste des contrats o une partie peroit des profits sans risque ; qui veut avoir unprofit doit galement risquer une perte. Il est par exemple interdit de raliser un profitfinancier tel quune pnalit de retard sur un dbiteur en dfaut de paiement.

    - L Asset-Backing tangibilit de lactif : les contrats doivent porter sur des actifslicites pour rpondre des critres thiques.

    La pense financire islamique est donc oriente de manire crer une culture o les agentsconomiques dpensent et redistribuent seulement les fonds dont ils disposent vraiment. Cesprincipes fondent la base thique de la finance islamique comme une thique daffaires, avec

    une orientation vers le bien-tre de la socit en gnral, le partage des risques, lintgrit etlquit. Un autre principe de la finance islamique est la Zakat, selon lequel lentrepreneurou linstitution financire18 doit redistribuer une partie de son profit (2.5%) annuellementparmi les personnes les plus pauvres, vise adoucir les ingalits dans la socit. Cest uneobligation de partage qui sapplique sur les gains raliss.

    Le systme financier, pour tre en mesure de promouvoir la justice, en plus d'tre solide etstable, doit rpondre au moins deux conditions fondes sur des valeurs morales : le partagede risques (afin de ne pas dplacer la totalit de la charge des pertes l'entrepreneur)et lamobilisation dune part quitable des ressources financires par les institutions financires( qui devrait tre disponible aux pauvres pour aider liminer la pauvret, dvelopperl'emploi et l'auto-emploi, aidant ainsi rduire les ingalits de revenu et de richesse)(Chapra (2009)).

    Les institutions financires islamiques doivent respecter ces principes dans laccomplissementde ces activits financires et cest aux conseils de conformit la charia ( Sharia Compliant

    Board) quincombe la responsabilit de contrle des activits de ces institutions. Ceci permetde renforcer la confiance aux banques, qui reprsente un lment cl dans la financeislamique.

    Ainsi que lexplicite Gueranger (2009), La finance islamique peut, en effet, tre considrecomme un compartiment de la finance thique car elle se caractrise, avant tout, par unedimension morale et socialement responsable. Elle peut alors rpondre un besoin qui vaau-del du financement.

    18Selon lavis de lautorit judiciaire de la zakat, , (2009) La Zakat sur les socits paractions en tant que personne morale est due dans les cas suivants :- La dlivrance d'un texte juridique imposant le paiement de lazakat- Le systme de base comprend ceci.- La dcision de l'assemble gnrale de la socit de le faire.-Le contentement des Actionnaires personnellement (c'est dire, une procuration des actionnaires pour que la

    socit pays la zakat) source :[ (2009) / 55 1430 -2009 ], http://www.zakathouse.org.kw/Publication/CORRECTIONS%202011.pdf

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    Pour les plus convaincus, les prouesses enregistres par la finance islamique au quotidien et saforte rsilience face la crise financire svre qui secoue le capitalisme financier annonceraitune tendance lourde de changement paradigmatique en faveur d'une finance plus responsablecar plus thique (Elmeziane (2013)).

    3- Lactivit bancaire islamique dans le contexte de la crise et sa placedans la rgion du Maghreb

    Les consquences de la crise sur le dveloppement de la finance islamique

    Jouini et Pastr (2009) citent trois facteurs qui ont influenc le dveloppement de la finance

    islamique: la manne ptrolire, une communaut attache aux valeurs de lIslam et unevolont politique dans les pays musulmans o les responsables ont travaill pour ledveloppement de cette discipline sous le contrle de ltat. Selon Rodney WILSON (2009),la crise financire des subprimes et la rcession conomique qui a suivi ont encourag lesconomistes mondiaux envisager des solutions financires alternatives. Lattention sestporte sur la finance islamique comme un modle alternatif. Ridha SAADALLAH (2012)avance que Lactuelle crise financire a renforc lattractivit de la finance islamique, enoffrant beaucoup, et notamment en Occident, loccasion de se rendre compte du fort

    potentiel de stabilit que renferme la finance islamique. Ce pouvoir stabilisateur attribu la

    finance islamique donne cette dernire un attrait particulier en matire de politique dedveloppement. Ltude de Kammoun et Abidi (2013) a montr queles banques islamiquesont trouv dans la crise une occasion pour gagner des parts de march relatifs notamment auxproduits de financement participatifs. Ltude de Weill (2013) montre des diffrences entermes de stabilit financire lorsque les petites et les grandes banques (dfinies par rapport un seuil de 1 milliard de dollars dactifs totaux) sont considres sparment. Les petitesbanques islamiques ont des z-scores suprieurs aux petites banques conventionnelles. Commeune plus grande mesure du z-score est associe une plus grande distance de linsolvabilit,les petites banques islamiques bnficieraient donc dune plus grande stabilit financire.

    Mais dans le mme temps, les grandes banques islamiques ont des z-scores plus faibles que

    les grandes banques conventionnelles, ce qui suggre quelles ont une moins grande stabilitfinancire. Ainsi lenseignement principal de cette tude est que la relation entre secteurbancaire islamique et stabilit financire dpendrait de la taille des banques islamiques.

    Il apparat que la finance islamique prsente un grand enjeu autant pour les conomiesmodernes que pour les pays en dveloppement. Les facteurs qui ont caus ou contribu audveloppement et la propagation de la crise ne sont pas autoriss en vertu des rgles et desdirectives de la charia. De ce point de vue, la crise financire mondiale actuelle peut treperue comme un vritable test de la rsistance de l'industrie des services financiersislamiques et sa capacit se prsenter comme une alternative plus fiable au systmefinancier classique (Kabiret KAYED (2011)). Toutefois, Belabbes (2014) relve que ltude

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    des principes de la finance islamique ne permet pas, elle seule, de rsoudre la question dela relation entre finance islamique et stabilit financire sans prendre en compte lesconditions de possibilit. D'o la ncessit de la complter par des tudes empiriques pouranalyser la variabilit de la pertinence des principes dans des contextes varis.

    Beck, Demirg-kunt et Merrouche (2010) apportent un complment dexplication quant larsistance des banques islamiques la crise. Selon eux, il ny a pas eu de grandes diffrencesentre les banques conventionnelles et celles islamiques. Cependant, le fait que ces derniresont accru leurs liquidits lapproche de et pendant la crise explique pourquoi elles se sontmieux comportes.

    Plusieurs banques islamiques ont chapp aux crises financires graves et la croissance deleurs actifs durant 2008-2009 est plus leve que celle des banques conventionnelles, ce quicontribue la stabilit conomique et financire (Hasan et Dridi, (2010)).

    Le groupe Al Baraka Bank a prserv sa rentabilit financire dans une conjonctureconomique et politique difficile marque par la crise conomique et financire mondiale19.Ce groupe a une prsence gographique tendue dans quinze pays, qui leur tour fournissentleurs services travers plus de 425 agences. Al Baraka est prsente en Jordanie, Bahren,Soudan, le Pakistan, l'Afrique du Sud, le Liban, l'Irak, l'Arabie saoudite, l'Indonsie et en6 pays arabes mditerranens : la Tunisie, la Turquie, l'gypte, l'Algrie, la Syrie et laLibye20.

    19

    Les communiqus de presse du groupeABG en ligne :(http://www.albaraka.com/default.asp?action=category&id=91 ) et le Rapport annuel (2009) dABG20www.albaraka.cometRapport annuel (2012) dABG

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    Fig.1 : Lvolution de la situation financire de la banque entre 2008 et 2012

    Source : Rapport annuel (2012) dABG

    Ces graphiques (figure1) et les rapports annuels du groupeABGmontrent que :

    - Malgr que 2009 tait l'une des annes les plus difficiles pour les banques et institutionsfinancires partout dans le monde en raison des rpercussions de la crise financiremondiale, le groupe bancaire islamique, bas au Bahren, Al BarakaBanking Group

    BSC (ABG), a annonc qu'il a ralis une bonne croissance de ses bnficesd'exploitation totaux de 8% et de 4% de son bnfice net avant impts et provisions.Cette croissance reflte les amliorations significatives, dans toutes les sources derevenu l'arrire de la croissance soutenue de l'actif de 21%, croissance des dpts etcomptes de placement de 24%, hausse du financement et des investissements de 17%,hausse des actifs liquides de 21%, ainsi qu'une hausse du total des fonds propres de12%, selon ses rsultats financiers pour l'anne 2009. Cheikh Salah ABDALLAHKAMEL, affirme que ce rsultat vient tmoigner de la grande capacit du groupebancaire prserver sa rentabilit financire dans une conjoncture conomique et

    politique difficile marque par la crise conomique et financire mondiale21

    - la fin de 2010, le groupe tait un stade avanc dans la cration d'un bureau dereprsentation en Libye eu gard limportance de ce march, et ceci reprsentel'un de ses objectifs en vertu de sa stratgie d'expansion moyen terme. Le groupe a

    21http://www.lemaghrebdz.com/?page=detail_actualite&rubrique=Nation&id=29848

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    2008 2009 2010 2011 2012

    Total Actifs(US $ Millions)

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    Total Dpots Clients(US $ Millions)

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    2008 2009 2010 2011 2012

    Total financement etinvestissement

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    2008 2009 2010 2011 2012

    Bnfice net d'exploitation(US $ Millions)

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    pour objectif de participer au dveloppement et la prosprit du peuple libyen aprs larvolution de 201122. Dans la presse, le chef du groupe Al Baraka base Bahrendclare que le groupe tudie la cration d'une banque islamique part entire en

    Libye en 2013 qui propose un pack de varit de services bancaires avec un capitalinitial de 100 millions dollar23.

    Place de lactivit bancaire islamique dans la rgion du Maghreb :

    Les pays du Maghreb et lgypte taient faiblement intgrs aux marchs financiersinternationaux, ce qui a permis de limiter considrablement la transmission financire de lacrise (EL MOUHOUB MOUHOUD (2012)).

    Fig.2 : Actifs bancaires islamiques dans le monde

    Source: Ernst &Young: World Islamic Banking Competitiveness Report 201314

    Figure 2 montre le dveloppement des actifs bancaires islamiques en Malaisie, dans les paysdu golfe (GCC : Gulf Cooperation Council (Conseil de coopration du Golfe) compos del'Arabie Saoudite, de Bahren, de Oman, du Qatar, des mirats Arabes Unis et du Koweit)

    ainsi que dans le reste du monde. Elle montre que le dveloppement des banques islamiques aconnu des diffrences sensibles selon les pays. Les pays du Golfe, ainsi que la Malaisie, sontconsidrs comme les prcurseurs de la finance islamique.

    Malgr le dveloppement important dans le reste du monde, la finance islamique a connu unfaible dveloppement dans les pays du Maghreb mais les modifications lgislatives etrglementaires peuvent crer un environnement appropri pour son volution24. Cela peutparatre surprenant si on sait que la population est trs sensible l'argument religieux en

    22http://www.albaraka.com/default.asp?action=article&id=406 23

    http://ara.reuters.com/article/idARAL5N0CW23W20130409 24Standard & Poor's (2014), Islamic Finance Could Make Inroads Into North Africa, RatingsDirect(www.standardandpoors.com/ ratingsdirect)

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    matire d'pargne et de financement. Ceci pourrait en revanche tre expliqu par lasous-bancarisation de leurs populations. Pierre JACQUET (2008) avance en effet que lespopulations de ces pays restent sous-bancarises. C'est pourquoi nous pouvons imaginer quecertaines banques islamiques du Golfe pourraient envisager une diversification gographiqueet ainsi pntrer le march bancaire islamique au Maghreb l'avenir, d'autant plus que leschangements politiques rcents en Afrique du nord pourraient acclrer un tel dveloppement.A. Demirguc-kunt, L. Klapper, D. Randall, et J. Sonnenschein, (2013) ont effectu uneenqute sur lavenir des banques islamiques en Afrique du nord, et ont mesur, via une tudestatistique, le taux de prfrence pour cette classe de services bancaires, dans cinq pays de largion savoir, le Maroc, lAlgrie, la Tunisie, lgypte plus le Ymen au moyen orient.Cette tude montre que 54% des marocains prsentent une nette prfrence pour les servicesbancaires islamiques, qui sont appels au Maroc les services bancaires alternatifs. Et49% des algriens prfrent les services bancaires islamiques, alors que seuls 31% destunisiens vont dans cette tendance.

    Cette tude avance que les populations des 5 pays, sujets de cette enqute, nont quune faibleconnaissance des dtails des services bancaires islamiques.Les auteurs ne mentionnent pas les raisons lorigine de la stagnation de la finance islamiquedans la rgion. Cependant, un relvement du taux de bancarisation peut contribuer, selon lesauteurs, augmenter la demande aussi bien pour la finance islamique que conventionnelle. Lafamiliarisation des clients potentiels avec les services de la finance islamique pourrait aussiaugmenter la demande pour les produits islamiques.

    En Algrie, la jeune exprience du banking islamique a dmontr la viabilit et le bien fonddu modle bancaire charia compatible oprant dans un milieu totalement conventionnel. Et lesraisons de ce succs, certes tout relatif mais certain, est la sagesse et la perspicacit despromoteurs de ce projet dune part et la bienveillance et louverture desprit des autorits desupervision dautre part (Hideur (2013)).

    Selon Abdelilah NGHAIZI (2013) parmi les atouts du Maroc permettant le dveloppementdes activits financires islamiques : Sa situation gostratgique, lui confrant le statut deplate-forme entre lEurope et lAfrique, un dynamisme conomique qui, jusqu prsent, nat affect que lgrement par la crise financire et son faible taux de bancarisation de la

    population offrant aux banques dinvestissement islamiques des opportunits considrables decollecte de lpargne.

    En Tunisie, la participation des banques islamiques dans lconomie Tunisienne est toujourstrs limite. Les actifs de deux banques islamiques (Al Baraka et Zitouna) ne dpassent pasles 1400 millions de dinars, soit 2,5% du total des actifs du secteur. En effet, dun point devue rglementaire, les gouvernements doivent autoriser les nouveaux entrants (et leursproduits) tout en prservant la stabilit du systme bancaire. Ainsi, louverture de ce marchpourrait conduire les banques (acteurs traditionnels et nouveaux entrants) prendre plus derisques pour conqurir des parts de march (Chaabouni et Ghanoudi (2013)).

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    Tout ceci nous laisse penser quil faut runir diffrents facteurs (conomiques, politiques,rglementaires et thiques) pour le dveloppement de la finance islamique dans la rgion duMaghreb.

    4- Les dfis de la finance islamique

    Plusieurs travaux de recherche ont montr la faisabilit et la viabilit du systme financierislamique [Shamshad AKHTAR (2008), Andrew SHENG et Ajit SINGH (2012), MansoorKHAN et Ishaq BHATTI (2008)]. Nanmoins, la finance islamique est appele relever uncertain nombre de dfis.

    En fait, la finance islamique est encore ses dbuts et le total de ses actifs correspond moins

    de 1% du total des actifs financiers mondiaux25. En outre, il ne reflte pas vritablement laphilosophie des enseignements islamiques. Le respect de l'quit et lutilisation des modes departage de profit et risque sont encore trs faibles, tandis que le mode d'endettement estprpondrant. En outre, mme dans le cas des modes dendettement, toutes les conditionsfixes par la charia ne sont pas fidlement observe causes de l'utilisation dastuces

    juridiques (hiyal). Ceci est en partie d un manque de comprhension des objectifs ultimesde la finance islamique, ainsi que la non-disponibilit de personnel qualifi (Chapra (2009)).En outre, Lahlou (2014) dnonce dans son papier les pratiques dans certains pays, notammentla Malaisie qui laissent penser que le systme financier islamique, qui est encore en

    gestation, risque de sorienter vers cette tendance dterminer le rendement du capital apriori. En effet, la transaction la plus commune, commodity murabaha transaction, ou encorele Tawarruq organis, est une transaction qui a surtout pour rle de promouvoir la liquiditdans un march assez rticent revendre les actifs issus du march primaire. Ainsi le risquede liquidit, tant trs important au niveau des IFI, ces dernires ont tendance lancer des

    produits relativement assimilables certains produits conventionnels dans le but de financerla liquidit. Ceci se traduit par la fixation, communment admise, de taux de profits ciblesqui ressemblent normment des taux dintrt pour les financements au jour le jour et lesautres financements court terme. Donc, le systme nest pas tout fait prt, prsent,

    jouer un rle important pour assurer la stabilit du systme financier international. On sattend

    cependant ce que le systme va progressivement prendre de l'ampleur avec le du temps et decomplter les efforts actuellement dploys l'chelle internationale.

    25A. Demirguc-Kunt, L. Klapper, D. Randall, and J. Sonnenschein, (2013) op.cit. et Anouar Hassoune, Tourdhorizon de la finance islamique : La finance islamique, un compartiment thique du march de l'argent

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    Adel AHMED (2010) estime que l'adoption de certains des lments du systme islamique,qui sont aussi une partie du patrimoine occidental, est indispensable pour assurer la sant et lastabilit de l'conomie mondiale. En effet, il faut sassurer gnralement que :

    - Toutes les institutions financires, et pas seulement les banques commerciales, sont

    correctement rglementes et surveilles afin qu'elles restent en bonne sant et nedeviennent pas une source de risque systmique.

    - L'effet de levier doit tre contrl afin de s'assurer que le crdit ne dpasse pas lacapacit de l'emprunteur rembourser.

    - Le besoin de crdit doit se limiter principalement des transactions qui sont lies ausecteur rel de manire veiller ce que l'expansion du crdit se dveloppe enparallle avec la croissance de l'conomie relle et ne favorise pas la spculationdstabilisatrice et le jeu de hasard.

    Selon Kabir et Kayed (2011), les gestionnaires et les conseils de surveillance des institutionsfinancires islamiques doivent d'abord duquer et informer leurs employs, clients et toutesles parties prenantes sur les vertus et les principes de la finance islamique. Par ailleurs, ilsaffirment que la finance islamique ne doit pas cibler la population musulmane exclusivement,elle doit saffirmer sur le terrain en attirant des clients non-musulmans.

    CONCLUSION

    La crise conomique mondiale, parat lie des crises financires engendres par des produitsfinanciers utilisant des taux dintrts et qui sont prohibs par la Charia. Les alternatives quele systme financier islamique propose, qui sont principalement ladossement des actifsrels et le principe de partage des pertes et des profits, pourraient permettre dintroduire plusde stabilit dans le systme financier.

    Ce document ne peut pas prtendre que la finance islamique pourrait tre la solution parfaite la crise financire mondiale. En revanche, nous pensons que la finance islamique constitueune alternative qui a fait la preuve de sa rsilience, de sa capacit de croissance et de samaturit. Il se peut que la mise en uvre d'une honnte thorie de la finance islamique est

    potentiellement capable dviter de telle crise vu que beaucoup de facteurs qui ont caus oucontribu au dveloppement et la propagation de la crise ne sont pas autoriss en vertu desrgles et des directives de la charia islamique.

    Lintroduction des produits islamiques ne va pas en elle-mme corriger le systme financierinternational. Toutefois, la finance islamique pourrait se positionner comme un systmealternatif pour la finance mondiale.

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    REPENSER LE CONTRLE CHARIATIQUE DESOPRATIONS BANCAIRES ET FINANCIRES ISLAMIQUES

    Anfel BOUDJELAL26

    INTRODUCTION:

    La finance est lconomie ce que le sang est au corps humain. Par finance *, il fautcomprendre les flux dargent qui circulent via des canaux et des circuits, formels ou

    informels, dans une conomie donne. La performance de tout systme financier se mesurepar sa capacit mobiliser les excdents de financement en vue de les canaliser vers lescircuits formels de lconomie pour pouvoir financer le dveloppement et la croissance dunpays. Lavnement de la finance islamique vient justement renforcer la performance dusystme financier en permettant des agents conomiques, excdent ou dficit definancement, qui boudent le systme en place cause de lintrt prohib, daccder auxcircuits formels de lconomie une fois cres les institutions qui rpondent leur convictionsreligieuses. La finance islamique vient en fait embellir le monde de la finance dune maniregnrale en proposant des produits nouveaux et innovants par rapport aux produits

    conventionnels. Les agents conomiques, publics ou privs, particuliers ou entreprises, sontlibres de choisir les produits qui rpondent au mieux leurs attentes27. La finance islamiquefait dsormais partie du patrimoine intellectuel de lhumanit et elle est prsente dans plus de75 pays du monde. En outre, elle est enseigne de par le monde dans de prestigieusesuniversits. Ayant compris cette ralit, pourtant si simple, Londres sattelle devenir le

    26Doctorante en Banque- Finance -AssuranceUniversit Ferhat Abbas Stif, Algrie.*Le mot finance vient du latin finare qui veut dire fixer une indemnit ou une amende (du saxon finequi veut dire amende). Mais en termes conomiques, le mot finance dsigne ce qui se rapporte largent.Avec le dveloppement des systmes modernes de financement, on distingue dsormais deux types de finance :

    la finance directe ou finance de march (bourse des valeurs mobilires)- et la finance indirecte - celle desintermdiaires financiers (banques et autres tablissements financiers). Mais dans le jargon financier actuel, lafinance fait rfrence au terme appliqu l'achat ou la vente de titres juridiques donnant leurs dtenteurs desdroits spcifiques sur un ensemble de flux montaires futurs. Ces titres sont appels actifs financiers ou valeursmobilires, et comprennent principalement les obligations, les actions et les prts effectus par les tablissementsfinanciers. La finance islamiquene sort pas de ce contexte mais elle dsigne un mode dinvestissement et definancement fond sur les principes de la charia, qui proscrit notamment les prts intrt, la spculation dcouvert et certaines formes de titrisation des crances, dont les produits drivs.27Il est noter que la finance islamique nest pas une finance communautaire c..d. destine exclusivement auxpersonnes de confession musulmane. Lexprience des banques islamiques montre que parmi leur clientle, ellescomptent bien des clients non musulmans. On ne citera que 2 exemples : 1. En faisant appel aux capitauxislamiques lors de son mandat de Prsidente des Philippines (1986-92), Mme Corazon Aquino, a justifi sadcision en invoquant un vieil adage :peu importe la couleur du chat, pourvu quil attrape la souris.2. Antoine

    Decitre, directeur gnral de Velcan Energy, producteur indpendant dhydrolectricit cot paris a dcid definancer la construction dun barrage en Inde par lmission de Sukuk islamiques. Interrog, il rpond : lislamest bien adapt notre mtier. Cf. LExpansion, no736, dcembre 2008, p. 92.

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    centre mondial de la finance islamique, alors que certains pays arabo-musulmans tergiversentencore lui rserver la place quelle mrite.

    Hormis les produits nouveaux proposs par lindustrie des services financiers islamiques, lafinance islamique porte en elle les germes de la stabilit et de la bonne gouvernance, tant

    prne par les acteurs de la finance conventionnelle, mais pas toujours russies, au vu descrises rcurrentes et de la dbcle financire actuelle qui continue de dfier les thoriciens, lesautorits de rgulation et les professionnels de lindustrie. La mise en place dun contrlechariatique, en sus des audits internes et externes traditionnels, constitue un lment nouveauqui renforce la tendance actuelle la recherche dune bonne gouvernance.

    2. Fragilit du systme financier classique :

    Le systme financier actuel, bas sur la pratique de lintrt, sest dvelopp dans un contextede drfrenciarisation 28. La question de l'interdiction de la pratique de lintrt alongtemps attir l'attention de philosophes clairs dAristote trois (03) sicles avantJsus-Christ Michel Tibon-Cornillot au 21e sicle, en passant par Proudhon29 et autrespenseurs occidentaux ; elle concerne galement les trois religions monothistes lexceptiontoutefois de lancien testament qui, curieusement, autorise le prt intrt avec un non juif.Vous ne prterez usure votre frre, ni de largent, ni du grain, ni quelque autre choseque ce soit, mais seulement aux trangers (Deutronome, XXIII, 19-20). Cette exception,

    authentifie ou non, est devenue une pratique gnralise avec lavnement de la rvolutionindustrielle en Europe partir du XVIIIesicle*.Le Coran a fait allusion cette pratique en lacondamnant vivement30.

    La pratique de lintrt nest pas le seul obstacle. Il existe bien dautres pratiquesincompatibles avec les rgles de la Charia telles que la spculation dcouvertgnratricede bulles financires dvastatrices pour les conomies modernes, la vente termede devisesou la titrisation des crances, une nouvelle pratique gnratrice dune nouvelle instabilit

    28Propos du philosophe franais Michel Tibon-Cornillotloccasion d'une confrence sur la finance islamiquedonne Paris le 11 Novembre 2010 l'IIIT-France. La drfrenciarisation est un mot qui nexiste pas dansle dictionnaire. Cest un nologisme propos par le Professeur M. T-Cornillot pour dmontrer que la pratique delintrt est dnue de toute rfrence philosophique, religieuse, morale ou mme intellectuelle. En dautrestermes, la rfrence est la non pratique de lintrt.29Proudhon soulve le problme de l'galit dans l'change entre les ouvriers et les patrons, les acheteurset les vendeurs, les emprunteurs et les prteurs. Pour mettre en application ses ides, Proudhon a fond en 1849sa banque d'change qui prte sans percevoir d'intrt proprement dit. Cf. Henri Denis, Histoire de la penseconomique, PUF, p. 382, 5edition, 1977.*Bravant l'interdiction du prt intrt, une caste de fortuns s'est constitue en moneylenders, conformment autexte de l'ancien testament (Deutronome, XXIII, 19-20).30

    Cest cause des iniquits de ceux qui professent le judasme que Nous avons rendu illicites les bonnesnourritures qui leur taient licites, et aussi pour avoir dtourn trop de gens de la voie de Dieu, (et aussi) parcequils pratiquent illicitement lusure qui leur tait pourtant interdite . (Sourate IV; verset 160-161).

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    financire vulgarise sous lappellation marchs de produits drivs 31. La crise dessubprimes a dmontr les limites, voire les dangers de telles innovations financires quiont pris ensuite lappellation de produits financiers toxiques parce qu'ils sont gnralementcomptabiliss hors bilan, dissimulant ainsi les risques collatraux associs aux transactionsfinancires de produits drivs, non adosss des actifs rels.

    3. Le dficit de gouvernance du systme financier conventionnel

    Un autre problme, et non pas des moindres, qui caractrise le systme financierconventionnel est labsence dun organe de supervision et de contrle des oprationsfinancires lchelle plantaire. Ce problme a t accentu par lacclration du phnomne

    de globalisation financire qui a fait du facteur capital un instrument qui chappe toutesles lois et rglementations de contrle de change en raison de ce qui est aujourdhui connusous lappellation des 5D, savoir : la Dsintermdiation, la Drglementation, leDcloisonnement des marchs, la Dmatrialisation des marchs et le Dsengagement deltat.

    Les autorits de rgulation dans le systme conventionnel peinent juguler la puissance desfinanciers qui mnent le monde. Des penseurs occidentaux clairs connaissent bien cetteralit mais restent impuissants devant un tel phnomne. Ils reconnaissent toutefois que lecapitalisme est malade de sa finance32. Lors dun sminaire organis par la Banque centrale de

    San Francisco en 1985 sous le thme : The search for stability: the past 50 years, le

    banquier amricain Robert Holland a dit : Je ne crois pas que l'instabilit financire soit ned'une mauvaise gestion ou dune mauvaise rglementation. Elle est inhrente la naturemme dusystme financierque nous avons mis en place et semblons aimer33.

    4. Lapport de la finance islamique : les Sharia Boards

    Un des apports originaux de la finance islamique est le renforcement de la gouvernance desmarchs et des institutions financires islamiques en instituant des comits de la charia

    31Pour avoir une ide sur lampleur de ce march qui est compltement dconnect de la ralit conomique despays industrialiss, la capitalisation boursire des produits drivs slevait la fin de 2008 600.000 milliardsde dollars, alors que le PIB mondial peinait atteindre les 50.000 milliards $EU, soit une bulle de 12 contre 1,c..d. que pour 1$ de production relle, on compte 12$ de produits drivs un bel exemple dune conomie-fiction.32Cf. par exemple louvrage de Jean-Luc Grau, Le capitalisme malade de sa finance, Gallimard, 1998.33Robert C. Holland, 1985. The Problem of Financial Stability, in The Search for financial Stability: the Past

    50 years (ed.), Federal Reserve Bank of San Francisco, p. 1, o on peut lire "I do not believe that financialinstability is born of bad management or lousy regulation. It is inherent in the kind of financial systemwe havebuilt up and seem to like"

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    (Charia Boards) qui contrlent, ex-ante, la conformit de toutes les oprations et transactionspar rapport aux injonctions de la charia. En effet, lire les acquis de cette nouvelle industrie,le contrle chariatique reprsente un atout considrable puisquil a permis aux banques etinstitutions financires islamiques de se prmunir contre les risques occasionns par les actifstoxiques comptabiliss en hors bilan au niveau des banques et institutions financiresconventionnelles. Le bien-fond de ces Charia Boards a t renforc au lendemain de lagrande crise de 2008 o les banques et institutions financires islamiques ont bien rsist auxsoubresauts quont connus les banques capitalistes de par le monde cause notamment deleurs portefeuilles en produits toxiques. Les banques et institutions financires islamiquesdoivent leur salut aux Charia Boards qui leur interdisent la constitution dactifs financiers nonadosss des actifs rels. Alors que les divers plans de sauvetage des banques et institutionsfinancires conventionnelles, y compris les socits dassurance comme le gant amricain

    AIG, ont cot trs cher au contribuable, leurs consurs islamiques nont rien pomp dutrsor public, cause notamment de la qualit des actifs quelles dtiennent et qui sont

    gnralement conformes aux rgles de la charia. Cet acquis est comptabiliser lactif ducontrle chariatique exerc par les Charia Boards.

    5.Dfinition et limites du contrle chariatique

    Le contrle chariatique est un processus qui garantit la conformit d'un produit bancaire oufinancier par rapport aux prceptes de la charia ou loi islamique. Son domaine d'interventions'tale de la conception d'un produit bancaire ou financier, au lancement et la vulgarisationde ce produit. Des contrles d'appoint ou audit sont donc ncessaires et qui peuvent prendre laforme de visites inopines, de vrification de documents, de consultations ou de contrle desdiffrents services de la banque ou de l'institution financire.

    Cependant, le contrle chariatique est un instrument ncessaire mais pas suffisant pour assurerla stabilit financire et limiter les effets pervers des bulles financires. Un contrle rigoureuxde la part des autorits montaires est ncessaire pour cadrer les drives spculatives. Pourpreuve, le contrle chariatique n'a nanmoins pas prserv ces banques de lexplosion de la

    bulle immobilire au golfe.

    6. Gense du contrle chariatique dans les banques et institutionsfinancires islamiques

    La charia islamique est un ensemble de principes, de rgles et de dispositions dduits desdeux sources authentiques de lIslam, le Coran et la Sunna. Ces principes et rgles ne sont pascodifis pour tre directement accessibles aux juristes et aux tribunaux. Ils reprsentent, en

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    fait, une matire premire noble, sacre, quil va falloir codifier sous un langage simple etactualis par rapport aux exigences du monde moderne. Les premires tentatives dans ce sensremontent la moiti du 19e sicle lorsque ltat Ottoman a eu lide originale de publier,pour la premire fois dans lhistoire du monde musulman, un code juridique connu sous lenom de Majallat al-Ahkam al-Adliya (

    ) qui, se rfrant au ritehanafite, constituait la loi qui rgissait tous les territoires de lempire Ottoman, y compris lamajorit des pays arabes dOrient.

    Il sen est suivi dans les annes soixante et soixante-dix du 20 e sicle une tentativedlaboration dune loi civile commune pour les pays arabes puise dans la charia islamiqueet tenant compte de tous les rites islamiques sans discrimination aucune. Mais cette tentativena pas russi car la mission sest avre quasi impossible dans un contexte caractris par lesdivergences politiques des pays arabes au lendemain de lindpendance de bons nombresdentre eux, et mme ceux qui n'ont pas connu la colonisation tels les pays du Golfe.

    Toutefois, lespoir renait du secteur financier avec la cration, partir des annessoixante-dix, des premires banques islamiques. La mise en place de ces banques ncessite lerecours aux experts de la charia pour valider la conformit de leurs oprations aux injonctionsde la charia. La majorit des banques islamiques se sont dotes dorganes de contrle connussous le nom de Charia Boards (al-Hayt al-Chariya ). Ce contrle chariatique apris des formes diverses. Nous essaierons, dans les paragraphes qui suivent, de retracercertaines expriences de banques islamiques cres dans certains pays arabes, et de prsenterensuite les cas du Soudan et de la Malaisie o les autorits montaires sont activementimpliques dans la promotion et le contrles des oprations bancaires islamiques. Mais avant

    de traiter ces cas, il est opportun de mettre en exergue certaines remarques lies au contrlechariatique la lumire de trois dcennies de pratiques bancaires islamiques.

    1. La diversit des pratiques bancaires et financires islamiques a donn lieu descontrles chariatiques qui ont pris trois formes:

    -faire appel aux services d'un conseiller en matire chariatique, ou bien

    -cration d'une structure appele Comit Charia (Sharia Board).

    -cration d'une structure centrale au niveau de la banque centrale qui se charge de la miseen place et du suivi de toutes les oprations de contrle chariatique

    2. Une diffrence existe quant l'organe charg de dsigner les membres du comitcharia: soit le Conseil d'administration, soit l'assemble gnrale. Cela a, selon le cas, desimplications sur le degr d'impartialit du contrle chariatique. Un comit charia choisipar l'assemble gnrale a plus d'autonomie par rapport celui dsign par le conseild'administration.

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    3. La diffrence des opinions chariatiques sur la mme opration ou transaction a donnlieu une diversit des fatwas, d'o la difficult d'harmonisation des produits et montagesfinanciers.

    4. Certains chercheurs soulvent le problme d'appartenance d'un mme membre

    plusieurs comits charia. Ces membres ont-ils rellement le temps de contrler lesoprations de l'ensemble des banques et institutions financires dans lesquelles ils sontmembres du comit charia34.

    5. Certains chercheurs soulvent le problme des membres du comit charia qui sont enmme temps actionnaires dans l'institution o ils sont appels exercer le contrlechariatique35.

    Tous ces problmes ont fait que l'Acadmie internationale du Fiqh islamique s'intresse deplus en plus la question du contrle chariatique dans l'espoir d'arriver une harmonisationdu contrle chariatique de manire rtrcir le champ des divergences et rapprocher lespoints de vue et les pratiques du contrle chariatique.

    Dsormais, chaque banque a son comit charia (Charia Board) qui lui fournit lassistance enmatire de formulation des contrats de financement conformment aux prceptes de la charia,assists par des juristes pour assurer la conformit au droit national du pays dans lequel oprel'institution financire islamique. Le nombre de membres de ces organes consultatifs variedun expert sept, voire parfois plus. Les membres des comits charia peuvent tre rmunrs

    par les banques elles-mmes suite une proposition faite par le conseil dadministration etavalise par lassemble gnrale des actionnaires.

    7. tude de certains cas pratiques de contrle chariatique

    Il y a lieu de prciser que nous nous intressons l'exercice du contrle chariatique danscertains pays arabo-musulmans. La pratique du contrle chariatique dans certains payseuropens a fait l'objet de travaux publis dans des revues spcialises, en France plusparticulirement36.

    34 Cf. par exemple: Ahmad al-Islambouli, Rle des comits charia dans la rgulation des oprations desinstitutions financires islamiques, papier prsent spcialement aux travaux de la 19 runion de l'Acadmie

    internationale du Fiqh islamique, mirats Arabes Unis, 26/04/2009.35Ibid.36Cf. les articles d'lisabeth Forget dans les Cahiers de la Finance Islamique nos5 (2013) et 6 (2014),

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    7.1- La BanqueFaisal Islamiqued'gypte

    La loi (28) de 1977 portant cration de la Banque Faisal Islamiqued'gypte (BFIE) a trait de

    la question de la mise en place d'un organe de contrle chariatique o elle a laiss la voie libre l'exercice du contrle chariatique, pourvu qu'il soit rappel dans les statuts de la banque.L'article (3) de la dite loi nonce que: il sera cr au niveau de la banque un organe decontrle chariatique qui s'assurera de la conformit des oprations de la banque aux rgles etinjonctions de la loi islamique. Le statut gnral de la banque dterminera la composition decet organe, ses modalits opratoires et son domaine de comptence. En outre, l'article (40)de la dite loi prvoit la cration d'un organe de contrle qui se compose d'un nombremaximum de cinq (05) membres choisis parmi les oulmas et les spcialistes en droitcompar, nomms par l'assemble gnrale pour une dure de trois (03) ans. Leurrmunration sera dtermine sur proposition du Conseil d'Administration". Ledit article

    prvoit que le conseil d'administration peut convier ses runions un reprsentant du comitcharia mais qui n'aura pas droit au vote.

    Par ailleurs, l'article (42) prvoit que la rmunration des membres du comit charia se situeentre 5% et 10% des bnfices nets raliss.

    On comprend ainsi, travers la loi (28) de 1977, que toute banque islamique doit dsigner uncomit charia qui, comme tout organe de conseil, joue un rle consultatif. Se conformant ladite loi, la BFIE a mis en place un organe de contrle chariatique compos de cinq (05)membres37qui n'est pas soumis la direction de la banque et qui produit chaque anne un

    rapport destin aux membres de l'assemble gnrale. Son rle est double: fournir du conseilen matire chariatique et procder la rvision des oprations de la banque pour s'assurer deleur conformit aux rgles de la charia.

    Le point faible de ladite loi est le systme de rmunration des membres du comitchariatique se situant entre 5% et 10% des bnfices raliss. Ce systme semble inappropricar les prestations de conseil ne doivent pas se confondre avec le mode de financementmoudharabao la rtribution du moudharibest fonction des bnfices raliss. Est-il normalde ne pas rmunrer les membres du comit charia en cas de non ralisation de bnfices? De

    mme, est-il judicieux de distribuer de grosses sommes aux membres du comit charia en casde ralisation de gros bnfices? Pour certains chercheurs, l'idal serait que l'assemblegnrale, en concertation peut-tre avec la direction, dtermine l'avance une fourchetted'honoraires aux membres du comit chariatique pour les services de conseil et de suivisollicits38.

    37Site de la BFIE: http://www.faisalbank.com.eg38Ahmed Islambouli, op.cit. p.7.

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    Cependant, des zones d'ombre persistent dans cette loi, en dpit de la volont affiche par lesautorits en vue d'instituer un contrle chariatique efficace et rigoureux. A titre d'exemple, laloi ne prvoit pas de sanctions spcifiques en cas de non-respect des recommandations/fatwasmanant de l'OSCCBIF. De mme, elle ne dtermine pas la responsabilit des membres del'OSCCBIFen cas de dfaillance dans l'exercice de leurs fonctions.

    7.3 La banque d'investissementAl-Rajhi(Arabie Saoudite)

    Cre en 1957, la Banque al-Rajhiest de loin la plus grande banque islamique au monde l'heure actuelle, avec un actif total de plus de 124 milliards de Riyals Saoudiens (33milliards $). Al-Rajhi Bank est la premire banque islamique s'implanter en Malaisie en

    2006, avec 19 agences rparties travers le territoire malaysien, au Kowet et en Jordanie.

    l'origine, al-Rajhitait une banque conventionnelle*, ce n'est qu'en 1987 que les fondateurs