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Calcul des fondations de refends au séisme
En bureau d'études, la prise en considération de l'action sismique sur une structure
se base généralement sur l'obtention de forces statiques équivalentes associées à
chaque étage et issues de méthodes facilement applicables telles que l'analyse
modale spectrale. De cette façon, le dimensionnement sismique d'un bâtiment
revient à assurer la résistance de ses éléments de contreventement sous l'action de
forces statiques équivalentes. Cependant, cette approche n'assure pas la meilleure
représentation du comportement réel de la structure face à un tremblement de terre.
En effet, lors de tels évènements, celle-ci subit des déformations plastiques qui
permettent de dissiper l'énergie transmise par le séisme et réduire, par conséquent,
l'intensité des forces auxquelles elle doit résister. Le coefficient de comportement
employé dans les normes parasismiques nationales permet de prendre en compte la
ductilité de la structure tout en réalisant les calculs dans le domaine élastique et
linéaire. Ce coefficient de comportement dépend de la typologie de l'ouvrage et du
respect d'un certain nombre de détails constructifs. Pour plus de détails sur la
dynamique des structures, je vous recommande de consulter des livres
comme Calcul dynamique des structures en zone sismique de A. Capra et V.
Davidovici, Dynamics of Structures de A.K. Chopra, Dynamics of Structures de R.
Clough ou La construction en zone sismique de V. Davidovici.
Dans le cas d'un bâtiment contreventé par des refends fondés sur des fondations
superficielles, l'ancienne norme parasismique française PS92, tout comme
l'Eurocode 8, donnent une méthode de dimensionnement des murs facilement
applicable. Néanmoins, la question se complique lorsque l'on souhaite traiter les
fondations de ces voiles qui, de mon point de vue, correspond à un calcul très
important souvent négligé (volontairement ou pas?) par un certain nombre de
bureaux d'études. A défaut de considérer l'ensemble des fondations comme un seul
et unique élément lors du dimensionnement (justification globale), la méthode
employée ci-après vérifie la stabilité de la fondation sous chaque refend ainsi que
la transmission correcte des efforts induits par le séisme jusqu'au sol de fondation
(justification locale). Dans les lignes qui suivent, j'expliquerai la démarche que j'ai
l'habitude de suivre pour justifier ce type de fondation. Il s'agit d'une technique que
m'a enseignée Laurent GUISSET, ingénieur et compagnon de travail, au tout début
de ma carrière professionnelle et qui a ensuite évolué en fonction de l'expérience
acquise. Ce dimensionnement est réalisée en trois étapes à partir des efforts réduits
en pied de voile (torseur sismique ou, dans le même raisonnement, torseur associé à
l'action du vent).
1 - Stabilité de la fondation :
La fondation à considérer lors du calcul de la stabilité dépend du type de voile qu'elle
supporte: refend plein ou refend avec ouvertures. Dans le cas des refends pleins, la
répartition des contraintes de sol (figures 63 et 64) assurant la stabilité de la semelle
s'obtient à partir de la position de l'effort normal en pied de voile par rapport au noyau
central de la surface d'appui de la fondation: e ≤ l/6 ou e > l/6? Il est également
possible de considérer une répartition uniforme des contraintes de sol en utilisant la
méthode de Meyerhof.
Dans certains cas où le moment sismique est trop important, il est impossible
d'assurer la stabilité de la fondation de manière indépendante. Cependant, étant
donné que les murs d'un bâtiment sont solidaires les uns par rapport aux autres, on
peut envisager leur stabilité d'une façon plus globale en mobilisant les voiles
perpendiculaires attenants à ceux instables (figure 65 et 66). Évidemment, les
charges servant à stabiliser ce refend ne pourront être prises en compte qu'une
seule fois dans tout le processus de vérification de la stabilité des fondations.
Dans le cas de refends avec ouvertures, l'ouvrage Formulaire de béton armé de V.
Davidovici est très utile car il donne une méthode de calcul qui dépend de la
dimension des ouvertures par rapport aux voiles (tome 2, chap. 2, pp. 71-72). Dans
tous les cas, il est très important de considérer l'effort tranchant qui se développe
dans la semelle au droit de l'ouverture afin d'assurer la bonne transmission des
efforts sismiques.
Une fois la répartition des contrainte de sol obtenues, il faut vérifier qu'on ne dépasse
pas la capacité portante du sol. Par exemple, selon le DTU13.12 et la norme
parasismique française PS92, la contrainte moyenne du sol sous la semelle dans le
cas d'une répartition trapézoïdale ou triangulaire doit respecter la limitation suivante :
σmoyen = ¾ σmax + ¼ σmin ≤ σlim(séisme)
où l'on peut démontrer que σlim(séisme) = 2.σlim(ELS). Dans le cas contraire, il
faudra modifier les dimensions de la fondation pour respecter les limitations de
contraintes de sol.
2 - Calcul du ferraillage transversal de la semelle :
Une fois la géométrie des fondations fixée, celles-ci sont le plus souvent armées
transversalement. Pour cela, on applique la méthode des bielles de Pierre Lebelle
(1934) reprise dans diverses normes nationales : la charge appliquée à la fondation
par le mur est transmise au sol par des bielles obliques jusqu'à la base des semelles.
Ces bielles se décomposent alors en efforts horizontaux de traction devant être
équilibrés par des armatures, et en efforts verticaux opposés aux réactions du sol
verticales et uniformes.
Dans le cas de la France, le DTU13.12 donne une méthode d'application simple et
rapide qui permet de calculer la traction que doivent équilibrer les armatures (ou
tirants) à la base de la semelle. L'ingénieur doit vérifier également une condition de
rigidité des fondations puisqu'on suppose une distribution linéaire des réactions du
sol, ainsi qu'une condition supplémentaire de débord afin de ne pas procéder à des
vérifications concernant l'effort tranchant et la contrainte de compression des bielles.
3 - Calcul du ferraillage longitudinal de la semelle :
Le calcul de l'armature longitudinale de flexion est fait en supposant que la fondation
se comporte comme une poutre soumise à la résultante des efforts sismiques en
pied de voile et à la réaction du sol. Habituellement, je considère une répartition
trapézoïdale ou triangulaire de la réaction du sol (mais une répartition type Meyerhof
est parfaitement envisageable), ainsi que le diagramme rectangulaire simplifié de la
contrainte-déformation du béton en pied de voile :
Tout d'abord, on procède à la vérification de la résistance à l'effort tranchant, en
considérant une rupture de type poutre sur toute la largeur de la semelle. Pour cela,
on se place au niveau de la section S1, où la section résistante est minimale.
Personnellement, j'ai l'habitude de prendre en compte la totalité de l'effort tranchant
au niveau de cette section, même si certaines normes permettent de négliger une
partie des charges situées à une distance spécifiée du nu du voile (hauteur utile d ou
mi-hauteur de la semelle h/2). Selon la situation, soit la section de béton est
suffisante pour résister à l'effort tranchant soit il est nécessaire de placer des cadres
ou des étriers.
D'autre part, la section S2 correspond à la section où le moment de flexion qui tend
la fibre inférieure de la fondation est maximum. C'est un calcul classique de section
de béton armé dans le cadre d'une action accidentelle (séisme). Habituellement, la
hauteur de la section que je considère lors de ce calcul correspond uniquement à la
hauteur utile de la semelle mais si les quantités d'aciers sont trop élevées, je prends
en compte également la hauteur du vide sanitaire ou du rez-de-chaussée s'il n'y a
pas de vide sanitaire. De la même manière, s'il apparaît un moment qui tend la fibre
supérieure de la fondation, on réalisera le calcul en considérant une section dont la
hauteur correspondra à celle de la semelle et du vide sanitaire.
En cas d’ouverture dans la hauteur du vide sanitaire ou du rez-de-chaussée, il faut
reprendre les efforts (souvent importants) sur la semelle seule (hauteur de la semelle
et non du vide sanitaire) sur toute la longueur de l’ouverture. Par expérience, ces
ferraillages sont très souvent élevés. De plus, il faut bien évidemment vérifier la
résistance à l'effort tranchant. Le calcul doit être mené de manière identique en cas
de semelle unique sous plusieurs voiles.
Conclusion et questions :
La justification des fondations de refends sous l'action sismique assure d'une
certaine manière la résistance et la stabilité du système « mur en partie basse +
semelle ». C'est une étape qui paraît indispensable lors de la vérification de la
stabilité des voiles et qui amène des aciers longitudinaux parfois importants dans les
fondations. Ce n'est donc pas un calcul neutre, et je ne cacherai pas que je suis
toujours en doute sur plusieurs points:
- validité de la méthode, notamment pour le calcul des aciers longitudinaux de
flexion, étant donné qu'il existe très peu de documentation technique sur ce sujet ?
- pour le calcul dans la section S2, est-il rigoureux de prendre en compte plusieurs
niveaux, étant donné la spécificité de ce type de calcul qui concerne la liaison voile-
semelle ?
- compte tenu de la reprise de bétonnage semelle-mur, il faut appliquer la règle des
coutures dans cette section ce qui donne un ferraillage vertical (attentes semelle-
mur). Ce ferraillage vient-il en supplément de celui provenant du calcul du mur
proprement dit (aciers de non glissement et/ou cisaillement) ou bien prend-on le
maximum entre les deux calculs ?
Bibliographie :
- AFNOR. DTU13.12, Règles pour le calcul des fondations superficielles. DTU P11-
711. Paris: AFNOR, 1988.
- AFNOR. Règles de construction parasismique. Règles PS applicables aux
bâtiments dites Règles PS92.
NF P06-013. Paris: AFNOR, 1995.
- DAVIDOVICI, V. Formulaire du béton armé. Paris: Le Moniteur, 1995.
- LE BEC, A. (2009). Effet du basculement des fondations superficielles sur le
comportement sismique des murs de refend en béton armé. Thèse doctorale lue à
l'Ecole Polytechnique de Montréal.
- LEBELLE, P. Semelles de béton armé. Compte-rendu des annales de l'ITBTP,
décembre 1934 et Mémoires de l'Association Internationale des Ponts et
Charpentes, 1935.