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N. DUPONT-PAVLOVSKY et al.: PropriCtks Blectroniques de I’oxyde de zinc 615 phys. stat. sol. (a) 35, 615 (1976) Subject classification: 10.2 and 13.4; 14.3; 18; 22.4 Laboratoire de Chimie Physique A , Universitk de Bordeaux I , Talencel) (a) et Centre de Recherches Paul Pascal, C.N.R.S., Talence2) (6) CaractBrisation chimique et Btude des propri6tBs Blectroniques de I’oxyde de zinc non stoechiomBtrique Nature et repartition des defauts Par N. DUPONT-PAVLOVSKY (a), F. CARALP (a), P. DELHAES (b) et J. AMIELL (b) Une mkthode de preparation de I’oxyde de zinc pulvkrulent a ktk mise au point, qui per- met d’obtenir de fapon reproductible des kchantillons non stoechiomktriques stables, dont I’kcart B la stoechiomktrie, determink par un dosage chimique, varie entre 0 et 90 ppm en poids de zinc exckdentaire, essentiellement localisk en surface. La conductivite klectrique de ces poudres, mesurke en ondes hyperfrkquentes, augmente trhs brutalement quand la concentration en dkfauts atteint environ 80 ppm. La variation de la susceptibilite paramag- nktique avec la temperature conduit it conclure que celle-ci est associke B des centres loca- lisks. Un modele de solide inhomoghe dont les dkfauts seraient repartis suivant des couches concentriques de concentration en zinc exckdentaire constante permet d‘approcher la realit6 physique. A reproducible method of preparing powdered zinc oxide is investigated, which enables stable samples to be obtained. The excess zinc content, in the range 0 to 90 ppm by weight, as determined by chemical titration, is mostly localized at the surface. High-frequency measurements of the electrical conductivity show a very rapid increase when the defect concentration reached approximately 80 ppm. From the analysis of the temperature depend- ence of the paramagnetic susceptibility, it is concluded that x is due to localized magnetic moments. An inhomogeneous model is described, with concentric regions of constant excess zinc concentrations, which gives good concordance with experimental results. 1. Introduction L’oxyde de zinc est un semi-conducteur B large bande interdite don‘t la con- ductiviti: extrinskque, de type n, est associhe B un excbs de zinc par rapport B la stoechiometrie [l], qui a BtB dosi: chimiquement [2, 31, et peut se presenter sous deux formes: soit des atomes de ce metal en position interstitielle dans le reseau cristallin, soit des lacunes d’oxyghe [4]. Ces deux types de dhfauts sont susceptibles de s’ioniser suivant les schemas respectifs : Znp -+ Zn: + e- , VL --f Vl, + e- , Zn: -+ Zn:+ + e- , V’, -+ Vl,+ + e- . (1.1) (1.2) (1.3) (1.4) L’Btude des proprihths electriques et optiques de cet oxyde a permis de prhciser les energies d’activation de ces reactions. La seconde ionisation, aussi 1) Address: 351, Cours de la Libhration, 33405 Talence, France. 2) Address : Domaine Universitaire, 33 405 Talence, France.

Caractérisation chimique et étude des propriétés électroniques de l'oxyde de zinc non stoechiométrique. Nature et répartition des défauts

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N. DUPONT-PAVLOVSKY et al.: PropriCtks Blectroniques de I’oxyde de zinc 615

phys. stat. sol. (a) 35, 615 (1976)

Subject classification: 10.2 and 13.4; 14.3; 18; 22.4

Laboratoire de Chimie Physique A , Universitk de Bordeaux I , Talencel) (a) et Centre de Recherches Paul Pascal, C.N.R.S., Talence2) ( 6 )

CaractBrisation chimique et Btude des propri6tBs Blectroniques de I’oxyde de zinc non stoechiomBtrique

Nature et repartition des defauts Par

N. DUPONT-PAVLOVSKY (a), F. CARALP (a), P. DELHAES (b) e t J. AMIELL (b)

Une mkthode de preparation de I’oxyde de zinc pulvkrulent a k t k mise au point, qui per- met d’obtenir de fapon reproductible des kchantillons non stoechiomktriques stables, dont I’kcart B la stoechiomktrie, determink par un dosage chimique, varie entre 0 et 90 ppm en poids de zinc exckdentaire, essentiellement localisk en surface. La conductivite klectrique de ces poudres, mesurke en ondes hyperfrkquentes, augmente trhs brutalement quand la concentration en dkfauts atteint environ 80 ppm. La variation de la susceptibilite paramag- nktique avec la temperature conduit it conclure que celle-ci est associke B des centres loca- lisks. Un modele de solide inhomoghe dont les dkfauts seraient repartis suivant des couches concentriques de concentration en zinc exckdentaire constante permet d‘approcher la realit6 physique.

A reproducible method of preparing powdered zinc oxide is investigated, which enables stable samples to be obtained. The excess zinc content, in the range 0 to 90 ppm by weight, as determined by chemical titration, is mostly localized a t the surface. High-frequency measurements of the electrical conductivity show a very rapid increase when the defect concentration reached approximately 80 ppm. From the analysis of the temperature depend- ence of the paramagnetic susceptibility, it is concluded that x is due to localized magnetic moments. An inhomogeneous model is described, with concentric regions of constant excess zinc concentrations, which gives good concordance with experimental results.

1. Introduction L’oxyde de zinc est un semi-conducteur B large bande interdite don‘t la con-

ductiviti: extrinskque, de type n, est associhe B un excbs de zinc par rapport B la stoechiometrie [l], qui a BtB dosi: chimiquement [2, 31, e t peut se presenter sous deux formes: soit des atomes de ce metal en position interstitielle dans le reseau cristallin, soit des lacunes d’oxyghe [4]. Ces deux types de dhfauts sont susceptibles de s’ioniser suivant les schemas respectifs :

Znp -+ Zn: + e- , VL --f Vl, + e- ,

Zn: -+ Zn:+ + e- , V’, -+ Vl,+ + e- .

(1.1) (1.2)

(1.3) (1.4)

L’Btude des proprihths electriques et optiques de cet oxyde a permis de prhciser les energies d’activation de ces reactions. La seconde ionisation, aussi

1) Address: 351, Cours de la Libhration, 33405 Talence, France. 2) Address : Domaine Universitaire, 33 405 Talence, France.

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bien du zinc que des lacunes d’oxygene, nBcessite une Bnergie trop importante ( E = 0’5 eV) pour intervenir de fapon notable dans nos conditions expkrimen- tales (T 5 300 K). La valeur gBnBralement admise pour les reactions (1.1) et (1.2) est la mQme soit E = 0’05 eV [5]. I1 faut toutefois souligner les mesures d’effet Hall de Hutson indiquant que cette dernihre valeur dBcroit lorsque le nombre de defauts augmente, jusqu’ b s’annuler pour une concentration critique n, = 6 x lo1* ~ m - ~ [el. Ce resultat est B rapprocher d’une transition semi- conducteur-mBtal du type prBm par Mott [7] qui se produirait, si l’on s’en refhre b la thBorie de cet auteur, pour une concentration en dBfauts ni = 2 x x lo1* ~ m - ~ .

De nombreuses recherches entreprises au cours de la derniere dBcade, et faisant appel b la RPE, s’accordent pour associer B 1’6cart B la stoechiomBtrie de cet oxyde une raie de resonance situBe b g = 1’96. Par contre les opinions divergent quant B l’attribution de cette raie. L’Btude de l’influence du pre- traitement des Bchantillons sur sa forme et son intensitB, et de son Bvolution au cours de l’adsorption ou de la photosorption de divers gaz a conduit B de multiples rBsultats et la complexit6 du problhme apparait dans les conclusions contradictoires des diffBrents auteurs.

Une premiere Bcole attribue la raie de resonance g = 1’96 b des Blectrons de conduction lib6rBs par ionisation des defauts [8 B 131. D’autres auteurs pensent au contraire que le signal observ6 est produit par des Blectrons localis& sur des dBfauts ionisBs (Vt; ou Zn;) [14 b 161. D’autres enfin admettent la presence de bandes de niveaux donneurs peu profondes [17 b 191. Ces divergences subsistent malgre les renseignements complBmentaires apportBs par 1’Btude de la variation thermique de la susceptibilitB paramagnetique [17 b 221, des signaux ayant B t B observes jusqu’b 4’2 K.

Le dBsaccord entre certains rBsultats exphrimentaux peut Qtre attribue aux diffhrences d’origine et de traitement de l’oxyde de zinc, qui determinent ses propriBtBs, et en particulier 1’Bcart L la stoechiomBtrie, souvent ma1 dkfini. C’est pourquoi nous avons repris ce type de travail en mettant au point une mBthode de prBparation, de traitement et de dosage des Bchantillons qui nous permet de modifier de fapon connue et contr61Be 1’6cart b la stoechiomBtrie de ces derniers dans un domaine relativement Btendu.

2. PrBparation, caracthisation texturale et chimique des Bchantillons

2.1 Prhparation et caracthrisation texturaie

L’oxyde de zinc est obtenu par dbcomposition du carbonate sous courant d’oxygdne, le carbonate de zinc Btant lui-m6me prepare B partir de carbonate d’ammonium et de nitrate de zinc. Les propriBtBs de cet oxyde “de base” sont ensuite modifiBes par un traitement thermique de cinq heures sous pression rBduite d’oxyghe (P = 4 Torr), et ceci temperature d’autant plus &levee que 1’Bcart b la stoechiomBtrie desire est plus important [23].

Nous exposons les rBsultats concernant quatre Bchantillons reprhsentatifs de la gamme de non stoechiomBtrie dont nous disposons. Les valeurs respectives de leur surface sphcifique, d6terminBes par adsorption de krypton B 77 K, sont portees dans le Tableau 1. MalgrB une diminution prbvisible de celle-ci avec la temperature de traitement, elle reste relativement importante pour une poudre de ce type: 7 m2 8-l aprhs traitement B 780 “C.

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PropriBtBs Blectroniques de I'oxyde de zinc non stoechiomBtrique

preparation de 1'6chantillon

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dosage global 1 dosage en profondeur: surface sp6ci- fique Znen 1 dezinc

~ % de I'excbs total de zinc en fonc-

(m2 g-l) excbs (10l8 cm-3) ~ 0,25 I 0,50 1 0,75 1 1

PPm de 1 nb dYatomes tion de la fraction dissoute

Tab leau 1 Caract6risation texturale et chimique des Bchantillons

ZnO n o 3 ' 10 trait6 it 700 "C

ZnO n o 4 7 trait6 iL 780 O C ,

62 2,50 61% 80,9%

I ' 3,72 55,7% 73,3y0 93 I

ZnO n o 1 non trait6 aprhs d6composition a 300 "C

ZnO n o 2 1 15 ~ 20 trait6 iL 430 "C i 98,10,& I 100%

89,4y0 100%

99% j 100%

2.2 Caracf6risation chimique

La concentration en zinc excedentaire est determinee par un dosage propose par Norman [2] et faisant appel B une reaction d'oxydo-reduction : 1'6chantillon est attaque par une solution acide de Cr,O,K,; une partie du CrV1 de cette solution est reduite en CrIII par le zinc en exc8s. Le Cr"I n'ayant pas reagi est complex6 par la diphhyl-carbazide et dose par spectrophotometrie B la longueur d'onde de 5200 A. Les resultats figurent dans le Tableau 1. Les concentrations en Zn excedentaire y sont exprimees en ppm et en nombre d'atomes/cm3. Nontons que les deux types de defauts envisages (atomes de zinc interstitiels ou lacunes d'oxygbne) ont un comportement equivalent vis-b-vis de ce dosage.

Afin de pr6ciser la caracterisation de nos kchantillons, nous avons Bgalement Btudie la repartition du zinc en exc8s dans ces derniers. La reaction d'oxydo- reduction mise en oeuvre est celle du dosage global. Selon la quantiti! d'acide utilisee Iors de la dissolution, on peut attaquer les cristaux B differentes profon-

Fig. 1. RBpartition du zinc interstitiel dans les 6chantillons d'oxyde de zinc. ZnO: n o 1 0, n " 2 ----, n " 3 +, n " 4 - , repartition uniforme du zinc en exchs - -

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deurs [24]. Les conditions experimentales choisies permettent de mettre en solution 25%, 50%, 75% ou 100% de la poudre. Le pourcentage de la concen- tration totale en zinc excedentaire est port6 en fonction de la fraction pon- dBrale dosBe sur la Fig. 1 a. Les courbes experimentales sont nettement distinctes de la droite en pointillit, correspondant B une distribution uniforme du zinc, e t s’en Bloignent d’autant plus que la temperature de preparation des Bchantillons est plus faible. La repartition des defauts dans les grains d’oxyde, supposBs sphBriques, est sch6matisBe sur la Fig. l b o i ~ l’on a indiquB le pourcentage moyen de zinc en exces present dans chacune des quatre fractions volumiques dBterminBes par les attaques b differentes profondeurs. Cette representation met en Bvidence la localisation essentiellement superficielle du zinc excBdentaire. Ainsi en ce qui concerne l’echantillon n o 4, 55% de la quantitB totale de zinc en exces sont contenus dans la plus faible partie dissoute, soit le quart de la masse totale, ce qui correspond approximativement au dixieme du rayon des grains. Dans cette zone restreinte, la concentration rBelle moyenne est donc deux fois plus BlevBe que la concentration globale, oe qui Btend largement la gamme de non stoechiometrie de nos oxydes.

On peut penser que la preparation et le traitement des Bchantillons procedant pour une grande part de reactions solide-gaz, la repartition des dBfauts est rBgie par les processus de diffusion qui interviennent alors. Ces resultats sont A rapprocher de ceux de Allsopp [3] qui prBvoit Bgalement une forte concen- tration superficielle du zinc excedentaire sur des poudres d’oxyde traitBes B tempbrature BlevBe sous atmosphere d’oxygkne.

Nous prBparons donc de fapon reproductible des oxydes de zinc dont 1’6cart b la stoechiometrie, dBfini avec prBcision, peut varier dans une domaine relative- ment Btendu, soit 0 b 90 ppm de zinc excedentaire essentiellement localis6 b la surface des poudres. Une caracterisation physique de ces memes Bchantillons tant par des mesures de RPE que de conductivitb permettra de mieux comprendre la nature des defauts lies B la non stoechiomBtrie que nous mettons en Bvidence.

3. Propri6tBs physiques de l’oxyde de zinc

3.1 Paramaynztisme

Les mesures sont effectuees B l’aide d’un spectrometre Varian 4502 fonc- tionnant en bande X, et &quip6 d’une double caviti: de resonance et d’un dispositif de variation thermique (4,3 K < T < 500 K).

3.1.1 Susceptibilite‘ paramgne‘tique c i tempe‘rature ambiante L’ensemble des resultats est resume sur le Tableau 2. Tous nos Bchantillons

prBsentent une raie de resonance dont la position, determinee par reference au DPPH, correspond B g = 1,96 ce qui est en accord avec les travaux precbdents, dejb cites. La largeur de raie entre points d’inflexions, A H , exprimhe en G est d‘autant plus importante que la temperature de traitement de I’Bchantillon est plus Blevee. Enfin une Btude systematique de la forme de la raie montre qu’elle n’est pas lorentzienne. Nous avons done calculi: l’aire sous la courbe d’absorption par integration numhrique, afin d’en dBduire, toujours par compa- raison avec un Btalon de DPPH, la susceptibilith paramagnetique de nos oxydes. Le paramagnetisme observ6 augmente avec 1’Bcart B la stoechiomBtrie determine par le dosage chimique.

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PropriBtBs klectroniques de l‘oxyde de zinc non stoechiombtrique 619

T a b l e a u 2 CaractBrisation physique des kchantillons

ZnO no 1 0,27 0 ZnO n o 2 34 ZnO no 3 4 ZnO n o 4 38 I

3,4 12 9 4

3,9 399 6 3 9,05

3.1.2 Variation thermique de la susceptibilitd pararnagne‘tique

La nature des centres paramagnetiques determinant la loi de variation de la susceptibilitb en fonction de la temperature, nous avons Btudie 1’6volution de cette grandeur entre 300 et 6 K afin de preciser les resultats obtenus B tempera. ture ambiante, et d’etudier l’influence de la concentration en Zn sur les pro- prietes de ZnO. La variation de xp en fonction de l’inverse de la temperature (Fig. 2), peut 6tre representhe par une equation de la forme xp = xo + (C /T) , oh xo est un paramagnetisme independant de la temperature e t C la constante de Curie. Leurs valeurs respectives sont indiquees sur le Tableau 2 . L’ordonnee L l’origine xo, quasi nulle dans le cas de 1’Bchantillon a plus faible teneur en zinc exchdentaire, croit en m6me temps que 1’6cart b la stoechiometrie des oxydes. La pente C decroit lorsque la temperature de traitement augmente, exception faite pour l’t5chantillon n o 1 dbcompose B 300 “C.

3.2 Conductivite’ Qleclrique

La mesure de la conductivite Blectrique de ZnO pulverulent par les methodes classiques est peu fiable du fait des mauvais contacts entre grains. Par ailleurs on ne peut envisager d’effectuer ces experiences en compressant les Bchantillons sous forme de pastilles, car une compacite et une soliditb suffisantes ne sont obtenues qu’en frittant l’oxyde par un traitement Q temperature blevbe gui modifie complAtement l’hcart B la stoechiometrie.

Afin de nous affranchir de ce type de problAme, nous avons eu recours une methode qui permet de mesurer cette grandeur en ondes hyperfrbquentes

t 300 -. a 5 2Lfl

5 .+ mll

-- $-

Fig. 2. Variation de la susceptibilitB paramagnkti- que Blectronique de l’oxyde de zinc avec la tem-

pbrature. ZnO: n o 1 A , n o 2 +, n o 3 0 , no 4 x 0 25 50 75

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(343 GHz).3) Le principe de l’appareil de mesure, decrit par ailleurs [25, 261, repose sur 1’6tude du coefficient de reflexion complexe de l’oxyde de zinc B l’aide d’un interferometre millim8trique. Les mesures effectuhes A temperature am- biante traduisent une augmentation trks rapide de la conductivitB Q avec 1’6cart B la stoechiometrie (Tableau 2 ) . La variation de la conductivit6 de 1’6chantillon n o 1 avec la temperature entre 300 et 150 K permet de dBduire une Bnergie d’activation E = 0’08 eV (Fig. 3).

4. Interpretation des resultats La caractbrisation chimique de nos Bchantillons nous a permis d’en prCciser

1’6cart B la stoechiomBtrie et la repartition des defauts qui lui sont associBs, alors que les mesures physiques, et plus particulierement 1’6tude de la RPE, nous apportent des indications quant B la nature de ces derniers. Les hypotheses que nous allons formuler pour tenter d’expliquer les proprietes de l’oxyde de zinc auront donc pour point de depart les resultats des experiences de RPE, tout en &ant orientees et BtayBes par les renseignements obtenus B l’aide des autres techniques mises en oeuvre.

Nous avons observe gue la variation de la susceptibilite paramagnhtique de nos Bchantillons avec la temperature peut &re reprbsentee par une Bquation du type

C x p = xo +r * (4.1)

Comme dans d’autres cas [27] nous admettons que cette expression est le resultat de deux contributions additives produites respectivement par deux types de centres paramagnetiques : d’une part des centres localises, responsables de la contribution C / T , et d’autre part des electrons celibataires dont la suscep- tibilite parait independante de la temperature.

4.1 Attribution de la composante de Curie

La valeur de la susceptibilite paramagnetique correspondant B ce terme est dhfinie B temperature ambiante par xp - xo. Elle est faible quel que soit 1’6chan- tillon consider6 (Tableau 2 ) . Elle represente la quasi-totalit6 du paramagnetisme de l’oxyde proche de la stoechiomhtrie alors qu’elle n’en est qu’une tr&s faible fraction dans le cas des Bchantillons comportant des teneurs en zinc exchdentaire importantes. Elle traduit l’existence de centres localises dont le nombre est

3, Les mesures de conductivith on 6tB effectuhes par J. L. Miane, au Laboratoire de Phy- sique Experimentale de l’Universit6 de Bordeaux I.

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Propriet6s Alectroniques de l’oxyde de zinc non stoechiometrique 621

independant de la temperature, ce qui con- duit done B envisager la pr6sence de dbfauts (Znr ouV6) restant ionises jusqu’8 6 K, m6me Iorsque leur teneur est faible, a,Iors que la valeur de 1’6nergie d’ionisation la plus couramment admise est de l’ordre de 0,05 eV. I1 est tres probable gue ce type de para- magnetisme soit dil B des centres donneurs dont I’ionisation permanente est produite par l’oxyghne adsorb6 au cours de la pr6- paration ou du traitement des oxydes. La couche superficielle chargee ainsi formbe, Bquilibre les charges de la couche adsorbee.

Afin d’6tayer cette hypothkse, nous ad- mettons gue le nombre de mol6culesd’oxy- gene fixees est 6gal au nombre de donneurs ionises et nous calculons les taux de recou- vrement correspondants, une monocouche d’ oxygkne comportant 6 x 1018molbcuIes [28], soit

N est le nombre de spins par gramme, deter- mine B partir de la valeur de C pente de la droite experimentale (Fig. 2)’ et 8 surface spkcifique de 1’Bchantillon.

Les taux de recouaement correspondant aux 6chantiIlons n o 2, 3, 4 (Tableau3) sont tres voisins, environ 0,06%, ce qui est de I’ordre de grandeur des taux obtenus Iors de differentes etudes d’adsorption [28, 291. La plus faible valeur, observee dans le cas de 1’6chantillon no 1, s’explique fort bien en rappelant que celui-ci associe une relative- ment grande surface spbcifique B une tres faible teneur en d6fauts. I1 ne peut done fixer une quantite d’oxyghne sup6rieure B celle correspondant au pi6geage de tous les 6lectrons disponibles, et par consequent atteindre le taux de recouaement maxi- mal.

4.2 Attribution de la composante indzpendante de la temp6rature

Differentes hypotheses peuvent 6tre formulees pour rendre compte de cette composante.

x“

.- + d B

8 + c

cd

m a -

00 or- w 0- 6 c.l a-

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Une premiere possibilite consiste B admettre que le nombre de centres para- magnhtiques produisant cet effet est independant de la tempbrature, pour un Bchantillon donne. On serait ainsi en presence de porteurs de charges libres dont la susceptibilite paramagnetique suit la loi de Pauli. Une telle situation est envisageable si les defauts de l’oxyde de zinc peuvent donner lieu B une transi- tion semi-conducteur-metal du type ditcrit par Hutson [6] ou par Mott [7], et si la concentration en defauts est telle que les oxydes aient un comportement metallique. Or les mesures de conductivite traduisent une variation de cette derniere avec la teneur en defauts qui est en bon accord avec les theories de Hutson et de Mott (Fig. 4), mais font Bgalement apparaftre que seul 1’Bchan- tillon n o 4 comporte suffisamment de zinc excedentaire pour se trouver dans la region metallique. Les trois autres Bchantillons se trouvent dans la region semi-conductrice. Dans ce cas l’ionisation des dbfauts necessite une Qnergie d’activation non nulle, e t par consequent le nombre de porteurs libres doit croitre avec la temperature, au moins pour les plus faibles valeurs de celle-ci ce qui est en contradiction avec les hypotheses de depart. L’attribution de la composante independante de la temperature B un paramagnetisme de type Pauli dans le cadre d’un modkle de bandes classique est donc B rejeter.

On peut au contraire supposer que le nombre d’electrons cklibataires augmente avec la temperature, ces electrons Atant localises. I1 y aurait alors concurrence de deux effets opposes (diminution de la susceptibilite paramagnetique avec la temperature de par la loi de Curie, et augmentation du nombre de centres paramagnetiques avec la temperature de par l’ionisation des defauts), dont la superposition donnerait lieu Q un phenomkne global quasi independant de la temperature dont nous Btablissons l’expression.

En admettant qu’il y a un seul type de donneurs, qu’il n’y a pas d’accepteur, et que le niveau de Permi se trouve largement en-dessous de la bande de conduction, la statistique quantique appliquee aux semi-conducteurs [30] permet d’exprimer la concentration en porteurs sous la forme

oh ED est 1’8nergie d’ionisation associee au niveau donneur, k la constante de Boltzmann, no le nombre de niveaux donneurs par om3, Bgal B la concentration en zinc excedentaire, determinee par le dosage chimique, n, la densite d’etats dans la bande de conduction, soit

Fig. 4. Variation de la conductiviti: avec la concentra- tion en dhfauts; nc concentration critique correspondant iL la transition de Mott [7]; n i / 3 a ~ = 0,2 avec aH =

effective des porteurs) = 0,27rn; n; concentration critique = h2c/m*e2; E (constante dihlectrique) = 8,5; m* (masse

0 50 700 150 correspondant iL la transition de Hutson [6] zinc en excedppm] -

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Propri6tes Blectroniques de l’oxyde de zinc non stoechiom6trique 623

m* masse effective des Blectrons, soit 0,27m d’apres Hutson [ 6 ] . L’expression de n, solution de 1’6quation du second degre, est reportee dans l’bquation repre- sentant la variation de la susceptibilite avec la temperature suivant la loi de Curie. soit

(4.3)

oh pg est le magneton de Bohr. Nous obtenons donc une expression de x qui depend de no (la concentration

en zinc exchdentaire caracterisant chaque Bchantillon), de T et de E D (bnergie d’ionisation des ditfauts). A no fix6, nous pouvons determiner par essais successifs s’il existe une valeur de ED telle que le paramagnetisme ainsi calcul6 soit quasi independant de la temperature.

Les resultats concernent les echantillons n o 2, 3 et 4 puisque 1’8chantillon n ” 1 comporte tres peu de dhfauts et nous avons vu que ceux-ci sont tous engages dans les Bchanges superficiels que nous avons d6jB Btudies. Dans le cas de l’echantillon no 2, la concentration en defaut impliques dans des Bchanges avec de l’oxygene chimisorbi: n’8tant pas negligeable par rapport B leur concen- tration totale, nous avons soustrait de no le nombre de spins correspondant. Nous avons pu selectionner, pour chaque Bchantillon, une valeur de ED con- duisant B une variation peu importante pour les temperatures superieures B 77 K. Par contre lorsque la temperature est infhrieure B 77 K on observe une decroissance exponentielle du paramagnetisme avec cette derniere. Les valeurs ainsi determinees sont d’autant plus faibles que la concentration en zinc excedentaire est importante, ceci en accord avec les travaux de Hutson [6], Schneider et al. [17, 181 et Hagemark et al. [31, 321.

Cette remarque nous conduit B affiner notre analyse en tenant compte de l’inhomogAn6iti: dans la repartition du zinc excedentaire que nous avons mise en evidence par le dosage chimique en profondeur. En effet, si B chaque valeur de la concentration en defauts correspond une valeur de ED, B la repartition du zinc en exces est associhe une repartition des valeurs de 1’8nergie d’ionisation dont nous admettons en premiere approximation qu’elle est gaussienne. Les centres ionisables d’un Bchantillon presentent donc une distribution d’energies d’ionisation P ( E ) autour d’une valeur moyenne E M , soit

[P(E) =- ’- e--(E--EM)’/2Ua , CT /27r

cr est 1’6cart type, n = /(no, E, T) a B t B determine prhcedemment ((4.2)).

comprise entre Ei e t Ei + dE est Le nombre de centres ionishs ni correspondant B une Bnergie d’ionisation

ni = f(no, Ei, T) AP(E,-) dE )

oh A est un facteur de normalisation, soit

n = z n i . i

L’expression de x se deduit immediatement de celle de n ((4.3)). 41 physica (a) 35/2

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Les valeurs moyennes de I’energie, E,, sont les valeurs Qtablies B partir du modele homogene (Tableau 3). Les limites de ED sont d’une part 0 et d’autre part la valeur la plus importante admise pour 1’6nergie d’ionisation : les resultats des mesures de variation thermique de la conductivite effectuees sur 1’6chantillon le plus stoechiometrique nous amenent Q choisir 0,08 eV (Fig. 3).

Pour chacun des Bchantillons n o 2 ’ 3 et 4, nous avons determine par essais successifs les ha r t s types qui permettent de tracer une courbe x = f (T) cal- culee aussi proche que possible de la valeur obtenue experimentalement.

Les resultats sont port& sur le Tableau 3 et la Fig. 5. En ce qui concerne les temperatures superieures ou egales B 77 K, ce sont pratiquement les m6mes que ceux obtenus dans le cas du modele homogene. Par contre B tres basse temperature, cette analyse est beaucoup plus satisfaisante : les valeurs de x ainsi calculees sont tres superieures B celles obtenues dans le cas du modele homogene (jusqu’ B 12 ordres de grandeur). Ainsi la courbe x = f (T) est beau- coup plus proche de la valeur experimentale dans tout le domaine de tempera- ture Btudie. On peut d’autre part remarquer que ce modde ne tient pas compte de la compensation apportee par la presence Bventuelle de niveaux accepteurs. Cette approximation pourrait &re B l’origine de la decroissance de la suscepti- bilite calculee lorsque la temperature tend vers 0.

Le modde qui semble le mieux approcher la realit6 physique est done celui d’un solide inhomogene dont les regions oh la concentration en defauts est constante sont des couches concentriques semblables B des pelures d’oignon, 1’6cart B la stoechiometrie &ant proportionnel B un gradient radial lie aux processus de diffusion intervenant au cours de la preparation. De plus, la presence de zinc excedentaire dans l’oxyde de zinc parait bien produire une transition du type decrit par Hutson et Mott pour les solides homogenes, les 6chantillons que nous avons prepares correspondant B la region semi-conductrice de I’oxyde.

Enfin, les deux composantes de la susceptibilite paramagnetique associee B 1’6cart B la stoechiometrie sont attribuables B des centres localises. Une con- firmation de cette hypothese est donnee par la comparaison entre le nombre

Fig. 5. Variation de la susceptibiliti! calculee avec la tem- perature: cas d’une repartition inhomogene

a) (1) u = 0,006 eV, (2) u = 0,008 eV, (3) u = 0,010 eV, no = 3,7 x 1018cm-* ;

b) (1) u = 0,006 eV, (2) u = 0,008 eV, (3) u = 0,010 eV, no = 2,5 x l0ls cm-s;

c) (1) u = 0,020 eV, (2) u = 0,025 eV, (3) u = 0,030 eV, 0 700 200 300 no = 0,7 x 10l8 cm-s

VK) -

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PropriBtBs Blectroniques de l’oxyde de zinc non stoechiomBtrique 625

d’atomes de zinc excedentaire par gramme d’oxyde, dose par voie chimique, et le nombre de spins calcule B partir de l’intensit6 de la raie de resonance paramagnbtique situee B g = 1,96 pour les m6mes Bchantillons. On observe un tres bon accord entre les deux types de valeurs obtenues par des m6thodes dont les principes respectifs sont totalement differents (Tableau 3).

Les oxydes ainsi prepar6s correspondent B une gamme de concentration en zinc excedentaire &endue, surtout dans la region superficielle, particulierement importante pour l’etude des reactions de contact et d’echange Blectronique solide-gaz.

Remerciements

Les auteurs remercient le Prof. M. Destriau pour le constant inter& qu’il a port6 B ce travail, et le referee pour ses remarques judicieuses sur le manuscrit original.

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(Received January 30, 1976)

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