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COMMUNICATION DES EXPERTS Caractéristiques évolutives des CIVD au cours de la grossesse, du sepsis, des traumatismes graves, et de l’insuffisance hépatique Y. Ozier* Service d’anesthésie-réanimation chirurgicale, hôpital Cochin, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, F-75679 Paris cedex 14, France Résumé Les caractéristiques évolutives des CIVD aiguës dépendent de la maladie causale. Celles du sepsis sont les mieux connues grâce à des modèles expérimentaux pertinents permettant d’étudier la genèse et la dynamique des anomalies de la coagulation et de la fibrinolyse, et aux études cliniques de qualité effectuées. En dehors des formes fulminantes, les complications hémorragiques ne sont pas au premier plan, et le désordre dominant est un déséquilibre de la balance coagulolytique caractérisé par une inhibition précoce de la fibrinolyse. De nombreux arguments concordent pour faire jouer à la CIVD un rôle déterminant dans la survenue de défaillances viscérales et l’évolution fatale. Moins bien étudiée, la CIVD observée au cours des traumatismes multiples présente de nombreuses analogies avec la CIVD du sepsis, notamment par l’existence d’une fibrinolyse inadaptée à l’activation de la coagulation. Formant un cadre hétérogène, les pathologies obstétricales s’accompagnent fréquemment d’une CIVD dont l’évolution, à l’exception de l’embolie amniotique, est habituellement spontanément et rapidement favorable après interruption de la grossesse et évacuation utérine. Son rôle dans les hémorragies du péripartum apparaît au second plan derrière les facteurs mécaniques d’hémorragie. Au cours de l’insuffisance hépatique, de multiples facteurs interviennent dans les altérations de l’hémostase et font écran au diagnostic de CIVD. S’il semble acquis que l’insuffisance hépatique grave s’accompagne d’une activation latente de la coagulation et de la fibrinolyse, elle n’apparaît pas être une composante majeure des désordres de la coagulation et il n’y a pas de preuve d’un rôle pronostique déterminant. © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS coagulation intravasculaire disséminée / choc septique / choc traumatique / insuffisance hépatique / grossesse compliquée Summary – Evolutive features of DIC during pregnancy, trauma and liver failure. The course of DIC varies according to the underlying disease in critically ill patients. Changes in coagulation and fibrinolysis have been extensively studied in sepsis. Experimental models and well-conducted clinical studies have provided valuable informations on the dynamic process of DIC. Except in fulminant forms, bleeding complications are unusual. The predominant finding is an imbalance between coagulation activation and reduced fibrinolysis. Numerous arguments favor the concept of an inappropriate fibrinolysis which is a likely determinant of intravascular fibrin deposition, organ failure and death. Available data indicate that this concept may be applied to post-trauma DIC. In obstetric complications, DIC is frequent but, as a general feature, the outcome depends on the successful management of the triggering mechanism rather than on the correction of coagulation disorders. In severe liver failure, multiple *Correspondance et tirés à part. Adresse e-mail : [email protected] (Y. Ozier). Réanimation 2002 ; 11 : 618-28 © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S1624069302003092/FLA

Caractéristiques évolutives des CIVD au cours de la grossesse, du sepsis, des traumatismes graves, et de linsuffisance hépatiqueEvolutive features of DIC during pregnancy, trauma

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COMMUNICATION DES EXPERTS

Caractéristiques évolutives des CIVD au coursde la grossesse, du sepsis, des traumatismes graves,et de l’insuffisance hépatique

Y. Ozier*Service d’anesthésie-réanimation chirurgicale, hôpital Cochin, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, F-75679 Pariscedex 14, France

RésuméLes caractéristiques évolutives des CIVD aiguës dépendent de la maladie causale. Celles du sepsis sont les mieuxconnues grâce à des modèles expérimentaux pertinents permettant d’étudier la genèse et la dynamique des anomaliesde la coagulation et de la fibrinolyse, et aux études cliniques de qualité effectuées. En dehors des formes fulminantes,les complications hémorragiques ne sont pas au premier plan, et le désordre dominant est un déséquilibre de la balancecoagulolytique caractérisé par une inhibition précoce de la fibrinolyse. De nombreux arguments concordent pour fairejouer à la CIVD un rôle déterminant dans la survenue de défaillances viscérales et l’évolution fatale.

Moins bien étudiée, la CIVD observée au cours des traumatismes multiples présente de nombreuses analogies avec laCIVD du sepsis, notamment par l’existence d’une fibrinolyse inadaptée à l’activation de la coagulation.

Formant un cadre hétérogène, les pathologies obstétricales s’accompagnent fréquemment d’une CIVD dont l’évolution,à l’exception de l’embolie amniotique, est habituellement spontanément et rapidement favorable après interruption de lagrossesse et évacuation utérine. Son rôle dans les hémorragies du péripartum apparaît au second plan derrière lesfacteurs mécaniques d’hémorragie.

Au cours de l’insuffisance hépatique, de multiples facteurs interviennent dans les altérations de l’hémostase et fontécran au diagnostic de CIVD. S’il semble acquis que l’insuffisance hépatique grave s’accompagne d’une activationlatente de la coagulation et de la fibrinolyse, elle n’apparaît pas être une composante majeure des désordres de lacoagulation et il n’y a pas de preuve d’un rôle pronostique déterminant. © 2002 Éditions scientifiques et médicalesElsevier SAS

coagulation intravasculaire disséminée / choc septique / choc traumatique / insuffisance hépatique / grossessecompliquée

Summary – Evolutive features of DIC during pregnancy, trauma and liver failure.The course of DIC varies according to the underlying disease in critically ill patients. Changes in coagulation andfibrinolysis have been extensively studied in sepsis. Experimental models and well-conducted clinical studies haveprovided valuable informations on the dynamic process of DIC. Except in fulminant forms, bleeding complications areunusual. The predominant finding is an imbalance between coagulation activation and reduced fibrinolysis. Numerousarguments favor the concept of an inappropriate fibrinolysis which is a likely determinant of intravascular fibrindeposition, organ failure and death. Available data indicate that this concept may be applied to post-trauma DIC. Inobstetric complications, DIC is frequent but, as a general feature, the outcome depends on the successful managementof the triggering mechanism rather than on the correction of coagulation disorders. In severe liver failure, multiple

*Correspondance et tirés à part.Adresse e-mail : [email protected] (Y. Ozier).

Réanimation 2002 ; 11 : 618-28© 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés

S1624069302003092/FLA

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coagulopathies make it difficult to identify defects related to DIC. Accelerated coagulation and fibrinolysis have beenrecognized, but there is no convincing evidence that DIC is a major component of coagulation disorders associated withliver failure and that it plays a leading role in outcome. © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS

disseminated intravascular coagulation / sepsis / traumatic shock / liver failure / pregnancy

INTRODUCTION

Les maladies traitées en milieu de réanimation et sus-ceptibles de s’accompagner d’une CIVD aiguë sontnombreuses, dominées par l’infection bactérienne grave,les traumatismes multiples, les pathologies obstétricaleset la défaillance hépatique. La grande hétérogénéitéd’expression clinique de la CIVD au cours de ces patho-logies conduit à s’interroger sur les caractéristiques évo-lutives propres de ce processus morbide secondaire [1].L’objet de cette contribution est de distinguer selonl’étiologie :– les facteurs déclenchant l’activation de la fibrinofor-mation et ceux participant à son extinction ;– l’expression clinique ;– la signification pronostique de la CIVD et son rôledans l’évolution de la maladie.

Le champ de la CIVD du sepsis a donné lieu à denombreuses investigations. Les connaissances acquisesdans ce domaine sont étendues et ont contribué à lacompréhension de la CIVD en général. Elle a faitl’objet de plusieurs revues générales et seules les carac-téristiques générales sont rappelées ici. C’est à la lumièredes informations disponibles sur la CIVD du sepsis queseront examinées les autres cas de figure.

LA CIVD DU SEPSIS

L’infection sévère est la cause principale des CIVDaiguës. Seules sont envisagées ici celles liées aux infec-tions bactériennes, bien que des infections virales, para-sitaires ou fungiques puissent en être compliquées.L’infection à bacille à Gram négatif est la cause la mieuxdocumentée, mais les infections liées à d’autres variétéssont connues pour induire des CIVD. D’une façongénérale, les manifestations hémorragiques sont consi-dérées comme peu fréquentes. Dans une étude japo-naise portant sur une cohorte de malades ayant uneCIVD, elles sont observées dans 15,4 % des cas d’infec-tion, alors qu’elles sont notées constamment en cas depathologie obstétricale, et une fois sur deux en casd’hémopathie maligne ou de défaillance hépatique [1].Le purpura fulminans des méningococcémies, avec sesmanifestations thrombotiques et hémorragiques, peutêtre considéré comme le paradigme de la CIVD.

L’incidence de la CIVD accompagnant les états infec-tieux varie selon la gravité de l’infection et les critères dedéfininition de la CIVD. Elle varie de 7,5 à 49 % dans

quelques grands essais cliniques de la dernière décennie.L’amplitude des anomalies de la coagulation est d’autantplus importante que l’infection s’accompagne d’unchoc, de dysfonctions d’organes et du décès [2, 3]. Uneétude prospective récente a comparé trois groupes depatients (sepsis, sepsis sévère et choc septique) quantaux tests conventionnels globaux de la coagulation (TQ,TCA), aux taux des différents facteurs de la coagula-tion, aux marqueurs biologiques d’activation de la coa-gulation (F1+2, FPA, complexes T-AT), à lanumération et aux marqueurs d’activation des plaquet-tes (�-TG, FP4). L’étude montre que les F1+2, FPA,complexes T-AT sont en moyenne anormalement éle-vés au stade de sepsis, l’élévation étant significativementplus importante en cas de sepsis sévère ou de chocseptique. La baisse des facteurs de coagulation (VIII etXI exceptés) et des plaquettes, et l’allongement des testsglobaux ne devient patente qu’au stade de choc septi-que. Ainsi, un tableau franc de CIVD n’est observé quedans les formes sévères, mais la coagulation est activéedès qu’il y a infection.

La dynamique précoce des altérations de la coagula-tion et de la fibrinolyse chez le malade septique a étédocumentée chez le sujet neutropénique [4]. De plus,un grand nombre d’informations sur leurs mécanismesphysiopathologiques et leurs relations avec le processusinflammatoire ont été apportées il y a une dizained’années par des situations expérimentales mimantl’infection clinique (études d’injection d’endotoxine oude médiateurs chez le volontaire sain, modèles expéri-mentaux de choc endotoxinique chez les primates). Cesétudes ont montré que les marqueurs biochimiquesd’une activation de la coagulation (F1+2, FPA, comple-xes T-AT) s’élèvent rapidement après une injectiond’endotoxine ou de TNF-alpha [5]. Le rôle clé de cemédiateur dans l’activation de la coagulation a étésouligné par des expériences montrant que la coagula-tion n’est pas activée par injection d’endotoxine si sasynthèse est inhibée chez le primate [6]. Par ailleurs, lerôle joué par le FT et la voie extrinsèque de la coagula-tion a également été mis en évidence. Le blocage decette voie par des anticorps monoclonaux dirigés contrele FVII activé ou le FT inhibe la génération de throm-bine dans des modèles de choc bactériémique ou endo-toxinique chez le primate [7, 8]. L’origine du FT estencore mal établie et n’est peut-être pas univoque.Rappelons qu’une activité très importante de FT estexprimée par les monocytes circulants d’enfants ayant

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une méningococcémie [9] et que, in vitro, le TNF-alpha induit cette expression [10]. Si des marqueurs del’activation du système contact tendent à être élevés, desarguments expérimentaux laissent penser que ce sys-tème n’est pas impliqué dans l’activation de la coagula-tion [11], même s’il l’est dans les manifestationscirculatoires du sepsis.

L’activité des inhibiteurs naturels de la coagulations’abaisse rapidement. Celle de l’antithrombine (AT)décline précocement [4]. Il est bien établi qu’au coursdes chocs septiques, le taux d’AT est un bon marqueurpronostique [4, 12]. L’activité de la protéine C (PC) estégalement diminuée [13, 14]. Une signification pro-nostique des valeurs initiales de PC a été trouvée danscertaines études [12], mais pas toutes [2]. En cas d’évo-lution favorable, l’activité de ces inhibiteurs se norma-lise de façon progressive, alors qu’elle reste basse en casd’évolution défavorable [12]. En revanche, l’activité duTFPI n’est pas diminuée en cas de sepsis ou de chocseptique et tend même à l’augmentation [4]. De nom-breux facteurs peuvent concourir à la baisse du taux desinhibiteurs ou à leur inefficacité.

Une caractéristique importante et bien établie de laCIVD du sepsis est la dynamique particulière des ano-malies de la fibrinolyse qui connaît successivement unebrève phase d’activation, puis une phase d’inhibition.Là encore, les données expérimentales obtenues chez levolontaire sain et chez les primates ont permis de lespréciser. L’injection d’endotoxine ou de E. coli entraîneune augmentation rapide et transitoire des concentra-tions de t-PA ainsi que des complexes P-AP, témoinsd’une génération de plasmine [5, 15]. Des argumentsexpérimentaux font penser que cette activation est direc-tement dépendante de médiateurs de l’inflammation,notamment le TNF-alpha et peut-être l’IL-1, et non dela thrombine qui a été générée. Les observations clini-ques concordent avec les données expérimentales : ellesmontrent l’existence de concentrations élevées de PDF,de complexes P-AP et, éventuellement, des concentra-tions basses de plasminogène et de alpha-2-antiplasmine, témoignant respectivement d’une actionde la plasmine sur la fibrine et le fibrinogène, de saneutralisation et d’une consommation de son précur-seur et de son inhibiteur naturel [16, 17]. Cette pro-duction de plasmine est éphémère et l’activitéfibrinolytique décroît rapidement, une à deux heuresaprès son essor dans les modèles expérimentaux. Ladiminution de l’activité fibrinolytique est en relationavec l’accroissement des concentrations de PAI-1. Cetteaugmentation est sous l’influence du TNF-alpha. Desconcentrations très élevées de PAI-1 ont été observéeschez les malades ayant une infection sévère. En revan-che, aucune activité t-PA n’est détectée, contrastantavec des concentrations antigéniques élevées. La signi-

fication pronostique péjorative de concentrations éle-vées de PAI-1 a été établie dans de nombreuses étudescliniques [16, 17]. La défaillance du systèmethrombomoduline-PC-PS concourt au maintien del’activité élevée du PAI-1. L’activité PAI-1 reste le plussouvent élevée en cas d’évolution fatale.

Dans les modèles expérimentaux, l’inhibition intenseet soutenue de la fibrinolyse est chronologiquementinstallée avant que l’activation de la coagulation soitmaximale. Au total, l’activation de la coagulation, lafaillite des systèmes anticoagulants naturels et l’inhibi-tion marquée de la lyse contribuent au déséquilibre dela balance coagulolytique vers la coagulation. Dansplusieurs études, ce déséquilibre a été quantifié par lerapport des complexes T-AT et P-AP [3, 18]. Uneétude a montré que le rapport T-AT/P-AP est plus élevéen cas d’évolution fatale [18].

De multiples arguments convergent pour faire jouer àla CIVD et à l’inhibition de la fibrinolyse un rôledéterminant vers les défaillances viscérales multiplesultérieurement fatales.

LA CIVD DES TRAUMATISMES GRAVES

Les traumatismes multiples représentent la deuxièmecause de CIVD aiguës. De nombreuses études de cohor-tes de traumatisés, notamment celles effectuées parGando et al., montrent que des stigmates biologiquesd’une activation importante de la coagulation et de lafibrinolyse sont détectés dès les premières heures sui-vant le traumatisme [19-22]. D’un point de vue téléo-logique, cette activation de la coagulation est perçuecomme une réaction protégeant l’organisme contre uneexsanguination. Les dimensions de cette activation sontvariables, parfois massives, justifiant le qualificatif deCIVD. Il existe un lien entre la survenue d’une CIVDet la gravité du traumatisme : un diagnostic de CIVD(selon le score établi par une commission officielle duministère japonais de la santé) est statistiquement asso-cié à un score APACHE [19, 22] et un score de sévéritédu traumatisme ISS [19] plus élevés, la nécessité plusfréquente d’administrer des catécholamines [19] et unemortalité plus élevée [19, 20, 22].

L’activation de la coagulation passe par la voie extrin-sèque, comme en témoigne la détection précoce de FTdans le sang circulant des traumatisés graves [22, 23].Dans ces études, le FT est mis en évidence par desméthodes immuno-chimique (ELISA) qui mesurent leFT sous plusieurs formes : active, inactive, et le FTcomplexé avec d’autres protéines. Le FT peut avoircomme origine :– une externalisation au niveau des zones traumati-sées ;

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– une expression par certaines cellules (monocytes ?)sous l’influence de cytokines ;– la conjonction des deux mécanismes précédents. Enfaveur de la première hypothèse milite la notion classi-que mais controversée [24] d’une fréquence plus impor-tante des CIVD en cas de contusion cérébrale.

Une élévation précoce des concentrations circulantesde TNF-alpha et d’IL-1-bêta a été mise en évidencechez des traumatisés [20, 25], élévation d’autant plusimportante que les malades ont des critères de CIVD[20].

La CIVD au cours des traumatismes graves pourraitavoir deux expressions morbides :– la contribution à un saignement microvasculaire dif-fus à la phase initiale ;– la contribution à des défaillances systémiques dansles jours suivants.

Contribution à un saignement « coagulopathique »

Les hémorragies incontrôlées constituent une causemajeure de décès précoce chez les polytraumatisés. À unsaignement « mécanique », chirurgicalement contrôla-ble peut s’associer un saignement « coagulopathique »dont la signification pronostique péjorative est connue.Ces saignements microvasculaires, s’inscrivant dans unenvironnement de transfusion massive, soulèvent leproblème difficile de leur étiopathogénie et de leur priseen charge thérapeutique. Les facteurs impliqués dansces désordres de l’hémostase sont multiples :– la stratégie transfusionnelle actuelle supposant lasubstitution initiale des pertes sanguines par des concen-trés érythrocytaires et des solutions dépourvues de ver-tus hémostatiques a pour conséquence attendue ladilution progressive des plaquettes et des facteurs decoagulation. Ce concept de coagulopathie de perte-dilution est présenté comme un mécanisme essentiel desaignement microvasculaire ;– les polytraumatisés sont particulièrement exposés àune déperdition thermique. Le réchauffement insuffi-sant des produits transfusés et des solutions d’expansionvolémique majore l’hypothermie. L’hypothermie indui-rait des anomalies de la fonction plaquettaire et ralen-tirait les réactions enzymatiques intervenant dans lacoagulation.

L’activation incontrôlée de la coagulation pourraitabreuver la défaillance hémostatique en raison d’uneconsommation conduisant à un déficit en divers élé-ments de la coagulation (thrombopénie, hypofibrino-génémie et déplétion en facteurs de la coagulation).L’importance du rôle joué par un processus de CIVDdans ces saignements coagulopathiques est difficile àétablir, bien que souvent évoquée [26]. L’existenced’une consommation de facteurs hémostatiques ressort

indirectement de l’incapacité d’un phénomène de perte-dilution à expliquer les variations des résultats des exa-mens biologiques. Le rôle aggravant de la défaillancehémostatique joué par la défaillance circulatoire estsuggéré par plusieurs études rétrospectives de cohorte[27, 28]. L’insuffisance circulatoire aggraverait la CIVDen induisant une dysfonction endothéliale, une souf-france tissulaire, et en réduisant la clairance hépatiquede facteurs activés de coagulation.

Au total, les saignements coagulopathiques observés àla phase initiale des traumatismes graves ont une patho-génie complexe, multifactorielle. La contribution dephénomènes de consommation peut être supposée, maisson importance est impossible à établir. Il n’y a pas depreuve que, hormis le traitement substitutif de la déplé-tion en facteurs hémostatiques, un traitement spécifi-que de l’activation de la coagulation ait un intérêt.

La contribution aux défaillances systémiques post-traumatiques

En cas de CIVD, les concentrations de FT restentélevées jusqu’au quatrième jour [22]. Simultanément,alors que les valeurs des concentrations de PAI-1 ten-dent à se normaliser chez les traumatisés n’ayant pas deCIVD, elles restent élevées chez ceux ayant une CIVDjusqu’au cinquième jour [20]. Le déséquilibre entrel’activité élevée du PAI-1 et celle, modérée du t-PAsuggère que la réaction fibrinolytique serait insuffisante,non proportionnée à l’activation soutenue de la coagu-lation. Les données concernant les systèmes inhibiteursnaturels de la coagulation sont en faveur d’une activitéinsuffisante en regard de l’activation de la coagulation.Une étude prospective d’une cohorte de traumatisés acomparé les concentrations circulantes de TF et deTFPI (mesurées en ELISA) entre les malades ayant uneCIVD et ceux n’en ayant pas. Alors que les concentra-tions de TF sont clairement plus élevées dans le groupeayant une CIVD (significativement de j+3 à j+4), lesconcentrations de TFPI ne s’élèvent que modérément,sont significativement différentes des valeurs observéeschez les malades n’ayant pas de CIVD à j+2 et j+4, maispas des valeurs de référence [22]. L’activité de l’AT estdiminuée en cas de traumatisme [29, 30]. Dans uneétude prospective d’une cohorte de traumatisés, le tauxd’AT est inférieur à 80 % chez 69 % des malades [29].Il existe peu d’informations accessibles sur le systèmethrombomoduline-PC-PS au cours des traumatismes,mais des données cliniques japonaises et des donnéesexpérimentales laissent penser qu’il est également défi-cient [26, 31].

Il existe un lien statistique entre un score de CIVD etl’existence d’un SIRS [23, 32], d’un SDRA [20, 33], etd’une défaillance multiviscérale [20, 32]. Les victimes

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de traumatisme qui développeront un SDRA post-traumatique ont initialement des concentrations de TFmesurées en ELISA plus élevées, une numération deplaquettes plus basse et un score de CIVD (selon lescritères adoptés au Japon) plus élevé que ceux qui n’endévelopperont pas [34]. La persistance d’une activitéthrombine élevée avec CIVD est en relation étroite avecun SIRS prolongé (> 3 j) [32].

Ces données peuvent être interprétées comme témoi-gnant d’une activation de la coagulation avec une fibri-nolyse déficiente conduisant au dépôt de microthrombidans les vaisseaux, à une réaction inflammatoire systé-mique et finalement à des défaillances viscérales [26].Les complications infectieuses étant très fréquentes encas de traumatisme multiples, elles peuvent jouer unrôle dans ce profil présentant des analogies avec celui dela CIVD du sepsis. Néanmoins, il n’existe pas actuelle-ment de preuve qu’un traitement spécifique précoce dela CIVD ait une influence favorable sur le pronostic despolytraumatisés. Une étude randomisée monocentri-que des concentrés d’AT ne montre pas de tendance ence sens, mais porte sur un très faible nombre de malades[35]. Il en est de même chez les brûlés [36].

LES CIVD AU COURS DE LA GROSSESSE

La grossesse s’accompagne de modifications physiolo-giques de l’hémostase allant dans le sens d’une hyper-coagulabilité et d’une réduction de la fibrinolyse.L’augmentation des facteurs VII, X, II ainsi que ducomplexe facteur VIII : C-von Willebrand est marquéeau cours du troisième trimestre. L’hypofibrinolyse appa-raît surtout liée à un accroissement de la concentrationdes inhibiteurs de l’activateur tissulaire du plasmino-gène [37]. Ces modifications sont perçues d’un pointde vue téléologique comme une adaptation pour limiterla spoliation sanguine au cours de l’accouchement. Enréalité, l’hémostase mécanique physiologique assuréepar la rétraction utérine est primordiale. Au niveau de lazone d’insertion du placenta, la contraction active desfibres du myomètre enserre les vaisseaux maternels réa-lisant un véritable garrot physiologique (« ligaturevivante de Pinard »). La compression des artères spira-lées limite l’hémorragie intra-utérine, et la compressiondes sinus veineux prévient l’intrusion de liquide amnio-tique, de débris tissulaires, d’air et de « substances pro-coagulantes » dans la circulation maternelle. Larétraction utérine n’est possible qu’après évacuationcomplète de l’utérus. Toutefois, les modifications phy-siologiques de l’hémostase constituent une prédisposi-tion au développement rapide d’une CIVD.

La CIVD est une composante fréquente d’un grandnombre de pathologies obstétricales [38]. On peut arbi-trairement distinguer les CIVD de bas grade, compen-

sées, survenant antepartum au cours des dysgravidies(toxémie gravidique, rétention d’œuf mort) et les CIVDaiguës survenant au cours du péripartum compliqué(hématome rétroplacentaire, embolie amniotique, ettoutes causes d’hémorragie du péripartum), bien qu’unecontinuité entre ces deux situations soit fréquente. LaCIVD pourrait avoir plusieurs conséquences en obsté-trique. La première, illustrée par la toxémie gravidique,est l’ischémie utéro-placentaire avec ses conséquencesdélétères pour la mère et le fœtus, notamment le décol-lement prématuré du placenta avec hématome rétropla-centaire (HRP), et le retard de croissance ou la mortfœtale in utero. La deuxième est un rôle aggravantd’une hémorragie maternelle par le biais d’une consom-mation de facteurs et d’une défibrination aiguë. Latroisième est la contribution à des défaillances systémi-ques maternelles en cas d’accident obstétrical. Les cau-ses de CIVD obstétricales étant multiples et la morbi-mortalité maternelle étant aujourd’hui faible dans lespays développés [39, 40], chaque centre ne voit chaqueannée qu’un nombre limité de formes graves. Il enrésulte une grande difficulté à conduire de larges étudesrandomisées permettant d’éclaircir le jugement sur letraitement de la CIVD obstétricale.

CIVD de la toxémie gravidique et de la stéatoseaiguë gravidique

Les études de la coagulation dans la toxémie gravidiquemontrent, au minimum, une exagération du déséquili-bre vers l’hypercoagulabilité observée en cas de gros-sesse normale [41]. Il a été montré, chez les femmesprééclamptiques, que le placenta présente une expres-sion anormalement élevée de FT, et que leur sérumcontient des auto-anticorps anti-récepteurs àl’angiotensine-1 induisant l’expression de FT par lescellules endothéliales [42]. Il existe une élévation desmarqueurs de génération de thrombine (FPA, comple-xes T-AT) d’autant plus significative que la toxémie estsévère [41, 43]. Les taux d’AT sont significativementplus bas, même si leur diminution est modérée, sesituant en moyenne vers 90 % [41, 44]. Les taux de PCsont réduits en cas de toxémie sévère [45]. Il existe uneaugmentation de l’activité du PAI-1 [41, 45, 46] alorsque les concentrations antigéniques du t-PA ne semblepas être accrues [45]. Les D-dimères augmentent modé-rément [41]. L’existence d’une coagulation intravascu-laire a été attestée en histologie par la mise en évidencede dépôts de fibrine dans les artères spiralées placentai-res, ainsi que dans les parois capillaires glomérulaires[47]. Il existe une diminution du débit sanguin utéro-placentaire, dont témoignent la fréquence accrue deszones d’infarctus placentaire et les retards de croissancefœtale [41]. Certains ont suggéré que des vasospasmes

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existeraient [48]. La chute du taux d’AT au cours de laprééclampsie est proportionnelle au degré de morbiditéfœto-maternelle, et corrélée à l’intensité des phénomè-nes ischémiques placentaires [49]. Une incidence signi-ficativement plus élevée de thrombophilies d’originegénétique (déficit en AT, résistance à la PC activée) a étéretrouvée chez des femmes ayant une grossesse compli-quée de prééclampsie sévère, de décollement placen-taire et de retard de croissance intra-utérin [50]. Ladiminution de la numération des plaquettes peut êtreprécoce ; elle est considérée comme l’examen le plussimple pour quantifier la gravité des anomalies de lacoagulation. Une étude montre que l’incidence d’unethrombopénie inférieure à 100 g.L–1 dans la prééclamp-sie est de 3 % dans les formes légères et de 30 % dans lesformes sévères [51]. Elle montre également que dessignes thrombo-élastographiques d’hypercoagulabilitéexistent en cas de prééclampsie quand la numérationplaquettaire est supérieure à 100 g.L–1, mais qu’unehypocoagulabilité apparaît en dessous de ce chiffre [51].Ces données concordent avec la notion que c’est endessous de ce seuil de 100 g.L–1 qu’un allongement duTQ, du TCA et une baisse relative de la fibrinogénémieapparaissent.

Le syndrome associant une hémolyse, une élévationdes enzymes hépatiques et une thrombopénie (HELLPsyndrome) affecte 5-10 % des patientes ayant une toxé-mie gravidique. Des dépôts de fibrine sont présentsdans les sinusoïdes hépatiques. La morbi-mortalitématernelle et fœtale en cas de HELLP syndrome estsupérieure à celle observée chez les autres patientesayant une toxémie gravidique. Le risque de complica-tions augmente notablement en cas de thrombopénieinférieure à 50 g.L–1. Un tableau de CIVD accompa-gnant le HELLP syndrome est rapportée dans uneproportion variable selon les critères de définition et lestests biologiques utilisés [52-55]. Une CIVD seraitconstante dès lors que l’anomalie de tests suffisammentsensibles est utilisée pour la définir [52, 56]. De fait, il aété montré que, s’il n’existe en général pas d’anomaliesdu TQ, du TCA et de la fibrinogénémie, il existe untaux d’AT et de PC nettement plus bas (respectivementà 66 et 57 % en moyenne) que dans une population departurientes hypertendues [56]. Au sein des patientesayant un HELLP syndrome, celles ayant une CIVD« patente » ont en moyenne une thrombopénie plusprofonde et des transaminases plus élevées [54]. Dansdeux séries rétrospectives distinctes de patientes ayantun HELLP syndrome, la majorité des CIVD sont asso-ciées à l’existence d’un HRP ou à une mort fœtale inutero [53, 54]. En l’absence d’HRP, l’existence d’uneCIVD franche est rare, inférieure à 5 % des cas [53,54]. Les patientes ayant un hématome intrahépatique,complication redoutée du HELLP syndrome, ont tou-

tes une CIVD franche [53]. Une CIVD est retrouvéeplus fréquemment en cas d’insuffisance rénale et, dansune étude, de manifestations pulmonaires [53]. Dansces études, le lien entre ces entités ne reçoit pas d’argu-mentation [53, 54].

Les formes graves de la toxémie gravidique consti-tuent la cause la plus fréquente d’admission d’une par-turiente en réanimation [39]. Il peut être imaginé qu’untraitement spécifique de l’activation excessive de la coa-gulation puisse limiter le développement des phénomè-nes d’ischémie utéro-placentaire : il n’existe à ce jouraucune étude permettant de l’affirmer. Les bénéficesattendus ne pourraient être estimés en termes de réduc-tion de la mortalité maternelle. En effet, celle du HELLPsyndrome est faible, inférieure à 1 % [53] et concernedes patientes prises en charge à un stade tardif de lamaladie. Une complication hémorragique (cérébrale,hépatique) est fréquemment à l’origine de l’évolutionfatale [57]. Si une CIVD est fréquente, voire constantedans les formes graves, son rôle dans l’évolution fatalen’apparaît pas clairement. En règle générale, cette micro-angiopathie évolue de façon satisfaisante à distance de ladélivrance sans intervention thérapeutique spécifiquesur la CIVD. Une étude rétrospective a confronté lesrésultats d’une série de patientes traitées par faiblesdoses d’héparine avec une série consécutive de patientestraitées par corticoïdes : La seconde connaît une régres-sion plus rapide des anomalies et un taux inférieur decomplications. Cette étude de bas niveau de preuven’est pas en faveur d’une héparinothérapie dans le trai-tement du HELLP [55].

À part, la stéatose aiguë gravidique est une affectionrare (0,01 % grossesses) survient le plus souvent autroisième trimestre. La pathogénie est mal connue et, sielle est une fois sur deux associée à des signes de toxémiegravidique, ses liens avec elle sont discutés. La CIVD estune composante constante du tableau et pourraitconcourir à en assombrir le pronostic [58, 59]. Elles’accompagne d’une insuffisance hépato-cellulairesévère, avec des taux d’AT effondrés, voire indétectables[58, 60]. L’extraction du fœtus est le traitement per-mettant d’enrayer l’aggravation mais la coagulopathiepersiste souvent plusieurs jours après la délivrance [58].Une étude a confronté un très petit collectif de patien-tes ayant reçu des concentrés d’AT à un autre n’en ayantpas reçu, sans qu’aucune conclusion ne soit possible surles bénéfices apportés [58].

CIVD aiguës de l’hématome rétroplacentaire etdes hémorragies du péripartum

Le HRP est une des causes obstétricales les plus fré-quentes de CIVD, et est souvent présenté comme unparadigme [38]. La CIVD est de gravité variable. Elle

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peut être mineure dans des décollements limités, et descas isolés de régression spontanée au deuxième trimes-tre ont même été décrits. Elle est majeure avec défibri-nation dans les formes sévères s’accompagnant d’unétat de choc. Dans une étude de cohorte déjà mention-née, la concentration des complexes P-AP est significa-tivement plus élevée que dans les CIVD du sepsis, et laproportion de malades considérés comme ayant unefibrinolyse « excessive » tend à être plus importante [1].L’objectif est la correction de l’état de choc par expan-sion volémique, et l’évacuation rapide du fœtus, vivantou mort, et du placenta. L’hémorragie complique uneatonie utérine, fréquente, ou une césarienne. Le traite-ment symptomatique habituel des désordres de la coa-gulation accompagnant ce tableau hémorragique est detype substitutif. L’aprotinine a souvent été utilisée encas de défibrination : Bien que de nombreux textesvantent son intérêt, il n’existe pas d’étude le démon-trant. L’héparinothérapie a fait l’objet de cas anecdoti-ques comportant des opinions discordantes. Une seuleétude randomisée multicentrique a comparé l’efficacitéde concentrés d’AT à celle du gabexate mesylate (uninhibiteur synthétique des serine-protéases) dans lesCIVD obstétricales, la majorité étant liée à un HRP (24sur les 39 patientes incluses) [61]. L’AT (50 UI/kg)apparaît plus efficace pour corriger les troubles del’hémostase. La mortalité est nulle dans les deux grou-pes de patientes incluses. Une PC issue du fractionne-ment du plasma a fait l’objet d’une étude japonaise dephase II rapportée dans une lettre [62]. L’administra-tion de cette PC à 16 patientes ayant un HRP modéréou sévère s’est accompagné d’une amélioration rapidedes signes biologiques de CIVD dès la 24e heure. Autotal, il est impossible de déterminer si, au traitement« mécanique » de l’hémorragie et à l’apport substitutiféventuel de facteurs sous forme de PFC et de plaquet-tes, l’adjonction d’un traitement spécifique de l’activa-tion de la coagulation et/ou de l’hyperfibrinolyseapporte un bénéfice allant au delà d’une correction plusrapide des anomalies biologiques.

Les hémorragies du péripartum sont l’une des causesles plus fréquentes d’admission en réanimation et unecause majeure de mortalité maternelle [39]. Toutes lescauses d’hémorragies graves du péripartum sont suscep-tibles d’être accompagnées d’une CIVD aiguë. Dans unétude, sur 61 hémorragies du péripartum réfractaires autraitement conservateur et ayant nécessité un gested’hémostase mécanique (hystérectomie, ligature ouembolisation artérielle), 41 patientes sont considéréescomme ayant une CIVD sur des critères imprécis [63].Les causes de saignement de ces 41 parturientes sontvariables (12 atonies utérines dont deux considéréescomme associées à un sepsis, dix lacérations de la filièregénitale, sept HRP, six placentas accreta ou praevia, et

cinq autres causes). Le bénéfice d’un traitement spéci-fique de la CIVD adjoint aux priorités thérapeutiquesque sont l’hémostase mécanique et la compensation despertes sanguine est inconnu.

CIVD de l’embolie amniotique

Entité rare de pathogénie inconnue, l’embolie amnio-tique s’accompagne en règle d’une CIVD, d’une détresserespiratoire et d’un état de choc. Dans une étude récente,l’ensemble des embolies amniotiques et fibrino-cruoriques représentent 2,2 % des admissions d’uneparturiente en réanimation [39]. La mortalité récem-ment rapportée est voisine de 26 % [64], les sériesantérieures faisant état d’une mortalité proche de 60 %.Le liquide amniotique a des propriétés procoagulantes,anciennement établies, liées à la présence de grandesquantités de FT, croissant avec l’âge de la gestation[65]. On peut imaginer que l’activation soudaine etmajeure de la coagulation joue un rôle de premier plandans les défaillances systémiques [65]. Que l’embolieamniotique soit suivie ou non de décès, la proportionde patientes ayant une CIVD est la même [64]. Toute-fois, les critères de CIVD ne sont pas connus et varientselon les cas. Un bénéfice a posteriori d’un traitementspécifique peut être supposé.

Au total, la CIVD est omniprésente dans les compli-cations obstétricales. La génération de thrombine estalimentée par la richesse en FT du placenta. Il n’y a pasde discordance évidente entre l’activation de la coagu-lation et celle de la fibrinolyse, comme dans les situa-tions précédentes. Exception faite de l’embolieamniotique, la caractéristique majeure de la plupart desCIVD obstétricales est leur régression spontanée quandla grossesse est terminée et l’évacuation du contenuutérin correctement et rapidement conduite, et quandle choc hypovolémique est prévenu.

DÉFAILLANCES HÉPATIQUES ET CIVD

Insuffisance hépatique (IH) sévère

L’IH s’accompagne d’anomalies biologiques très simi-laires à celles observées en cas de CIVD. Elles peuventrésulter simplement d’un défaut de synthèse des activa-teurs et des inhibiteurs naturels de la coagulation (ou,pour la thrombopénie, de l’hypertension portale), etrendent difficile l’appréciation d’une composante deCIVD dans la coagulopathie de l’IH. La présence d’uneCIVD a été supposée en raison de :– la diminution escomptée de la clairance de facteursactivés de la coagulation ;– la nécrose hépatocytaire et les lésions endothéliales ;

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– l’existence fréquente d’une endotoxinémie au coursde cette maladie ;– la réduction de la synthèse et du taux des inhibiteursnaturels de la coagulation.

Plusieurs études effectuées au cours de l’IH chronique(le plus souvent une cirrhose) ont alimenté cettehypothèse en mettant en évidence une élévation descomplexes T-AT [66-69]. Une étude limitée dans unepopulation mal documentée de cirrhoses évoluées mon-tre que l’administration de concentrés d’AT peut réduireles marqueurs biologiques de CIVD et d’hyperfibrino-lyse [70]. Cette thèse est controversée, et des anomaliessuggestives de CIVD n’ont pas été observées dansd’autres études [71, 72, 73]. Une étude récente au seind’une population stable, documentée, mais relative-ment peu sévère de cirrhoses ne met pas en évidenced’anomalie significative des complexes T-AT, desF1+2 et des D-dimères, bien qu’une tendance existe ence sens et que la fibrinolyse thromboélastographiquetende à être accélérée [72]. Ces discordances résultentvraisemblablement :– de différences dans la population d’IH chroniquesobservées, les anomalies pouvant dépendre de la naturede l’hépatopathie, de son degré de gravité (souvent nonprécisée), de l’existence récente ou non d’une compli-cation de la maladie (hémorragie, infection) ;– de définitions différentes du concept de CIVD. Cettelittérature suggère qu’une activation latente de la coa-gulation et de la fibrinolyse est fréquente en cas decirrhose, sans qu’une CIVD soit une composantemajeure de la coagulopathie d’une cirrhose non com-pliquée.

Toutefois, l’IH chronique est un terrain favorisant ledéveloppement rapide d’une CIVD en cas de compli-cation, notamment hémorragique ou infectieuse.

En cas d’IH aiguë fulminante, il existe une élévationdes complexes T-AT, en moyenne moins importanteen cas d’évolution spontanément favorable, et desD-dimères [74]. L’augmentation des complexes T-ATpourrait être freinée par les taux très bas d’AT, etamplifiée par l’administration de concentrés d’AT [75].Une étude note un déséquilibre entre une activitéretrouvée normale du t-PA et une élévation du PAI-1suggérant une limitation de la fibrinolyse [76]. L’hypo-thèse d’une aggravation des lésions hépatiques par laCIVD elle-même a conduit à imaginer un effet bénéfi-que des concentrés d’AT dans l’hépatite fulminante.Une étude randomisée a inclus 25 patients ayant uneencéphalopathie grade III-IV n’a pas montré d’influencede l’administration d’AT sur la survie, ni même sur lesmarqueurs biologiques de CIVD [77]. Un intérêt desconcentrés d’AT ressort, en revanche, d’une étuderandomisée montrant qu’ils permettent, en cas d’hémo-

dialyse, de réduire les doses d’héparine et la thrombo-pénie [78].

Transplantation hépatique (TH)

Des troubles peropératoires complexes de la coagula-tion résultent de l’intrication de mécanismes pathogé-niques multiples affectant l’hémostase primaire, lacoagulation et la fibrinolyse. Sur la toile de fond desanomalies préexistantes vont s’imprimer d’autres per-turbations, certaines constituant une originalité de laTH, d’autres n’étant guère spécifiques (dilution, hypo-thermie). Les désordres spécifiques sont fonction desdifférentes phases de l’intervention. La phase anhépati-que est caractérisée par un processus hyperfibrinolyti-que qui apparaît primaire, en relation avec undéséquilibre de la balance t-PA/PAI-1 [79]. L’absencede clairance hépatique du t-PA, synthétisé et libéré parl’endothelium, est le mécanisme essentiel conduisant àune élévation de son activité avec une réduction « enmiroir » de l’activité du PAI-1. L’hypothèse d’uneCIVD, liée à l’absence de clairance hépatique de fac-teurs activés et initiant une activation secondaire de lafibrinolyse, apparaît actuellement peu probable [79,80]. En effet, la réduction du taux des facteurs decoagulation est modérée, souvent explicable par unedilution. La responsabilité d’une CIVD dans les diathè-ses hémorragiques après reperfusion du greffon estl’objet de controverses [79, 81]. Une CIVD peut êtrefavorisée par le taux bas des inhibiteurs naturels de lacoagulation et les lésions endothéliales ischémiques dansles sinusoïdes du greffon [81]. Il a été montré expéri-mentalement une expression de FT par les cellules deKupffer et une diminution de l’expression de thrombo-moduline par les cellules endothéliales [82]. Toutefois,la dissociation complète existant entre l’activité t-PA etles taux de complexes T-AT, la baisse du PAI-1 militentcontre le rôle prédominant d’une CIVD [79]. Les dis-cordances observées tiennent peut-être à des différencesde technique chirurgicale ou de qualité de préservationdu greffon. Le rôle d’une CIVD a été évoqué pourexpliquer les cas anecdotiques d’embolies pulmonairesgraves peropératoires observées sous traitement antifi-brinolytique [83]. L’apport de concentrés d’AT visant àmaintenir son taux au-dessus de 70 % des valeurs nor-males est pratiqué dans certains centres. Toutefois,l’absence de corrélation entre ces taux et les pertessanguines, et surtout l’absence d’efficacité dans deuxétudes randomisées ayant inclus une vingtaine depatients [84], ne permettent pas de conclure à sonintérêt dans cette indication. Une atténuation deslésions d’ischémie-reperfusion du greffon et des lésionsde nécrose hépatocytaire par l’apport d’AT a été mon-

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trée sur un modèle de greffe de foie chez le rat [82], maisn’a pas reçu de confirmation clinique.

CONCLUSION

Les CIVD du sepsis, dont la dynamique a été bienétudiée, et les CIVD des traumatismes multiples pré-sentent des analogies. Elles sont caractérisées par uneinhibition précoce et soutenue de la fibrinolyse, généréepar le processus inflammatoire, qui peut jouer un rôledéterminant dans la survenue des défaillances viscéra-les. Cette caractéristique n’est habituellement pasretrouvée dans les pathologies obstétricales où la sup-pression de la cause met fin à l’évolution de la CIVD. Lerôle joué par une CIVD dans les insuffisances hépati-ques sévères est encore mal identifié.

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