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Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Références [1] Oriot P, Danse E, Thys F. Appendagite, une entité à connaître avant d’aborder un patient souffrant d’un abdomen aigu. Louv Med 2007; 126:91-4. [2] Ozdemir S, Gulpinar K, Leventoglu S, Yahya Uslu H, Turkoz E, Ozcay N et al. Torsion of the primary epiploic appendagitis: a case series and review of the literature. Am J Surg 2010;199:453-8. [3] Subramaniam R. Acute appendagitis: emergency presentation and computed tomographic appearances. Emerg Med J 2006;23:e53. [4] De Brito P, Gomez MA, Besson M, Scotto B, Huten N, Alison D. Fréquence et épidémiologie descriptive de l’appendicite épiploïque primitive par l’exploration tomodensitométrique des douleurs abdominales. J Radiol 2008;89:235-43. [5] Kianmanesh R, Abdullah B, Scaringi S, Leroy C, Octernaud S, Chabanne S et al. Appendagite epiploique primitive : un diagnostic non chirurgical souvent me ´ connu. Press Med 2007;36(2 Pt 1):247-50. [6] Leclercq P, Dorthu L. Epiploic appendagitis. CMAJ 2010;939. [7] Bastidas JG, Danzy LE, Blackwell L, Bostick PJ, Hayden R. Epiploic appendagites in a 24-year-old woman. Am J Emerg Med 2008;26:838. [8] Singh A, Gervais D, Han P. CT appearance of acute appendagitis. AJR 2004;183:1303-7. [9] Ammar H, Looney SC, Malani A. Epiploic appendagitis. Lancet 2009; 373:2054. Étienne Kras, Alain Brun, Benoit Bertrand, Stephane Luigi Centre hospitalier de Martigues, SMUR, service d’accueil des urgences, 13500 Martigues, France Correspondance : Étienne Kras, Centre hospitalier de Martigues, SMUR, service d’accueil des urgences, 3, boulevard des Rayettes, 13500 Martigues, France. [email protected] Reçu le 24 mars 2012 Accepté le 23 avril 2012 Disponible sur internet le 14 juin 2012 ß 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2012.04.015 Cause inhabituelle de thrombose veineuse profonde unilatérale d’origine urologique Unusual cause of unilateral deep vein thrombosis from urinary bladder L’obstruction veineuse iliaque associée simultanément à une distension vésicale est un phénomène peu courant. Cependant, la responsabilité de cette rétention urinaire dans le développe- ment d’une thrombose veineuse du membre inférieur est encore plus rare. Observation Un homme de 58 ans a été admis pour un oedème du membre inférieur droit apparu lors de la marche évoquant par son aspect un premier épisode de thrombose veineuse profonde (TVP). Il a décrit un épisode similaire spontanément résolutif trois semaines plus tôt. Il était actif physiquement, sans obésité. Hormis un éthylisme sevré, il n’avait aucun antécédent de maladie thromboembolique veineuse, néoplasique ou autre, ni personnel ni familial. À l’examen, un oedème douloureux du pied à la hanche affectait effectivement le membre inférieur droit. La jambe était oedémateuse, plutôt tiède. Il n’y avait ni érythème, ni cordon induré, ni souffrance cutanée. On n’a pas noté de perte du ballant du mollet et le test de Homans était négatif. Aucune anomalie évidente n’a été découverte au cours de l’examen abdominal initial et le toucher rectal n’identifiait aucune hypertrophie de prostate. Le patient ne s’est plaint ni de signe fonctionnel urinaire ni de douleur abdominale. L’écho- graphie Doppler veineuse a révélé une thrombose de la veine poplitée droite étendue jusqu’à la veine fémorale commune confirmée à la tomodensitométrie (TDM) ainsi qu’un important globe vésical. Sur le plan biologique, les tests de laboratoire de routine sont revenus normaux, hormis une augmentation de l’urée et de la créatinine (clairance Cockcroft = 47 mL/min, la créatinine = 149 mmol/L) qui ont continué à croître malgré une hydratation abondante. Le taux sérique d’antigène spécifique de la prostate était normal (1,69 ng/mL, normale < 4 ng/mL). Quant à la TDM abdominopelvienne, elle a révélé une impor- tante urétéro-hydronéphrose bilatérale, plus marquée à droite, (figures 13) et une distension marquée de la vessie respon- sable d’une compression de la veine iliaque droite et la veine cave inférieure (figures 46). 360 Figure 1 Urétéro-hydronéphrose bilatérale Lettres a ` la re ´daction tome 42 > n83 > mars 2013

Cause inhabituelle de thrombose veineuse profonde unilatérale d’origine urologique

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360

Lettres a la redaction

Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflitsd’intérêts en relation avec cet article.

Références[1] Oriot P, Danse E, Thys F. Appendagite, une entité à connaître avant

d’aborder un patient souffrant d’un abdomen aigu. Louv Med 2007;126:91-4.

[2] Ozdemir S, Gulpinar K, Leventoglu S, Yahya Uslu H, Turkoz E, Ozcay Net al. Torsion of the primary epiploic appendagitis: a case series andreview of the literature. Am J Surg 2010;199:453-8.

[3] Subramaniam R. Acute appendagitis: emergency presentation andcomputed tomographic appearances. Emerg Med J 2006;23:e53.

[4] De Brito P, Gomez MA, Besson M, Scotto B, Huten N, Alison D. Fréquenceet épidémiologie descriptive de l’appendicite épiploïque primitive parl’exploration tomodensitométrique des douleurs abdominales. J Radiol2008;89:235-43.

[5] Kianmanesh R, Abdullah B, Scaringi S, Leroy C, Octernaud S, Chabanne Set al. Appendagite epiploique primitive : un diagnostic non chirurgicalsouvent meconnu. Press Med 2007;36(2 Pt 1):247-50.

[6] Leclercq P, Dorthu L. Epiploic appendagitis. CMAJ 2010;939.[7] Bastidas JG, Danzy LE, Blackwell L, Bostick PJ, Hayden R. Epiploic

appendagites in a 24-year-old woman. Am J Emerg Med 2008;26:838.[8] Singh A, Gervais D, Han P. CT appearance of acute appendagitis. AJR

2004;183:1303-7.[9] Ammar H, Looney SC, Malani A. Epiploic appendagitis. Lancet 2009;

373:2054.

Étienne Kras, Alain Brun, Benoit Bertrand, Stephane Luigi

Centre hospitalier de Martigues, SMUR, service d’accueil desurgences, 13500 Martigues, France

Correspondance : Étienne Kras, Centre hospitalier de Martigues,SMUR, service d’accueil des urgences, 3, boulevard des

Rayettes, 13500 Martigues, [email protected]

Reçu le 24 mars 2012Accepté le 23 avril 2012

Disponible sur internet le 14 juin 2012

� 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservéshttp://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2012.04.015

Cause inhabituelle de thromboseveineuse profonde unilatéraled’origine urologiqueUnusual cause of unilateral deep veinthrombosis from urinary bladder

Figure 1

Urétéro-hydronéphrose bilatérale

L’obstruction veineuse iliaque associée simultanément à unedistension vésicale est un phénomène peu courant. Cependant,la responsabilité de cette rétention urinaire dans le développe-ment d’une thrombose veineuse du membre inférieur estencore plus rare.

Observation

Un homme de 58 ans a été admis pour un oedème du membreinférieur droit apparu lors de la marche évoquant par son aspectun premier épisode de thrombose veineuse profonde (TVP). Il adécrit un épisode similaire spontanément résolutif troissemaines plus tôt. Il était actif physiquement, sans obésité.Hormis un éthylisme sevré, il n’avait aucun antécédent demaladie thromboembolique veineuse, néoplasique ou autre,ni personnel ni familial. À l’examen, un oedème douloureux dupied à la hanche affectait effectivement le membre inférieurdroit. La jambe était oedémateuse, plutôt tiède. Il n’y avait niérythème, ni cordon induré, ni souffrance cutanée. On n’a pasnoté de perte du ballant du mollet et le test de Homans étaitnégatif. Aucune anomalie évidente n’a été découverte au coursde l’examen abdominal initial et le toucher rectal n’identifiaitaucune hypertrophie de prostate. Le patient ne s’est plaint ni designe fonctionnel urinaire ni de douleur abdominale. L’écho-graphie Doppler veineuse a révélé une thrombose de la veinepoplitée droite étendue jusqu’à la veine fémorale communeconfirmée à la tomodensitométrie (TDM) ainsi qu’un importantglobe vésical. Sur le plan biologique, les tests de laboratoire deroutine sont revenus normaux, hormis une augmentation del’urée et de la créatinine (clairance Cockcroft = 47 mL/min, lacréatinine = 149 mmol/L) qui ont continué à croître malgré unehydratation abondante. Le taux sérique d’antigène spécifiquede la prostate était normal (1,69 ng/mL, normale < 4 ng/mL).Quant à la TDM abdominopelvienne, elle a révélé une impor-tante urétéro-hydronéphrose bilatérale, plus marquée à droite,(figures 1–3) et une distension marquée de la vessie respon-sable d’une compression de la veine iliaque droite et la veinecave inférieure (figures 4–6).

tome 42 > n83 > mars 2013

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Figure 2

L’urétéro-hydronéphrose bilatérale est aussi visible sur cettetomodensitométrie

Figure 4

Compression de la veine iliaque droite par le globe vésical(thrombus visible)

Le lobe médian de la prostate semblait être légèrement élargi,suffisant pour représenter un obstacle et une cause à cettedistension urinaire. Comme nous n’étions pas totalementconvaincus que la vessie distendue soit une explication suffi-sante pour la TVP, nous avons fait une recherche de thrombo-philie. Aucune anomalie prothrombotique n’a été établie en

Figure 3

Urétéro-hydronéphrose bilatérale majorée a droite

tome 42 > n83 > mars 2013

dehors d’une légère hyperhomocystéinémie 24 mmol/L(normale < 16) probablement due à un déficit en vitamineB9 (vitamine B12 normale). L’urologue a également effectuéune cystoscopie qui a affirmé l’hypertrophie de la prostate eta éliminé toute anomalie vésicale ou jonctionnelle. La biopsien’a mis aucun aspect malin en avant. Un traitement parhéparine a été débuté et le drainage vésical a abouti à uneévolution rapidement favorable de l’oedème du membre in-férieur droit en moins d’une semaine et à l’amélioration dela fonction rénale. Nous avons également conseillé à notrepatient de porter des bas de contention.

361

Figure 5

Thrombus visible dans la veine cave inférieure

362

Figure 6

Compression de la veine cave inférieure

Lettres a la redaction

Discussion

La revue de la littérature apporte seulement dix cas similairesà cette cause inhabituelle d’oedème des membres inférieurs.Le premier article, de 1960 traitait d’une obstruction veineuseiliaque causée par une distension vésicale survenue chez unnourrisson ayant une anomalie de l’urètre postérieur [1]. Unautre cas était chez une patiente souffrant de diabète,entraînant une vessie neurogène. Les cinq autres cas ont étédécrits chez des patients ayant une distension vésicale causéepar une hypertrophie prostatique [2]. Toutefois, la compressionisolée de la veine iliaque de façon unilatérale est rare [3]. Lastase veineuse est généralement considérée comme un critèreévocateur de TVP, évoqué d’ailleurs par Virchow en 1865 [4]. Ilest donc remarquable que seuls quatre cas aient été signalésdepuis 1993 dans lesquels une vessie distendue était associéeà une TVP d’un membre inférieur, sachant que ces deuxsituations sont assez communes chez les hommes âgés, defaçon isolée [5]. Dans la littérature, trois de ces cas étaient deshommes âgés, mais malheureusement, aucune information n’aété donnée sur la présence ou non de facteurs de risquethrombotiques [6,7]. L’un d’eux avait aussi une hydronéphrosegéante, jugée responsable de la TVP [8]. Le quatrième était unhomme de 76 ans ayant un déficit en protéine S associé a cetableau mixte [9]. En se fondant sur les quelques cas publiésdans la littérature, une vessie distendue ne semble donc pasêtre un facteur de risque réel. Néanmoins, il reste surprenant deconstater que cet épisode survienne chez un patient si jeune etdépourvu d’antécédents particuliers, aucun autre cas n’ayant étédécrit jusqu’alors. Bien qu’il existe une hyperhomocystéinémie

qui est un facteur thrombogène [10], cette TVP semble ce-pendant concomitante d’une compression mécanique induitepar une urétéro-hydronéphrose et une distension vésicalemajeures, anomalies jusqu’alors asymptomatiques chez cepatient et d’ancienneté inconnue. La responsabilité uniquede l’hypertrophie du lobe médian prostatique reste probable-ment discutable. Il existe pourtant une importante discordanceentre les images tomodensitométriques et l’examen cliniquedu patient. Ainsi, quand l’examen clinique, notamment abdo-minal, reste peu contributif dans la recherche étiologiqued’un processus thrombotique, ce cas nous rappelle qu’ il estimportant d’effectuer un interrogatoire minutieux pour nepas omettre la présence de troubles urinaires ou douleursabdominales qui évoquent une distension vésicale, face à uneTVP unilatérale sans facteur de risque chez un patient jeune (bienqu’aucune plainte n’ait été émise par notre patient).

Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflitsd’intérêts en relation avec cet article.

Références[1] Carlsson E, Garsten P. Compression of the common iliac vessels by

dilation of the bladder. Acta Radiol 1960;53:449-54.[2] Kopesky K, Schwartz R, Silver D. Lower extremity edema from bladder

compression of the iliac veins. J Vasc Surg 1988;7(6):778-80.[3] Ducharme SE, Herring D, Tripp HF. Unilateral iliac vein occlusion, caused

by bladder enlargement, simulating deep venous thrombosis. J VascSurg 1999;29:724-6.

[4] Virchow R. Phlogose and Thrombose im Gefässystem. In: GesammelteAbhandlungen zur Wissenschaftlichen Medizin. Frankfurt: Staatsdruck-erei, 1856.

[5] Dyer JR, Molton M, Civil M, Davis TME. An unusual cause of deep venousthrombosis. Med J Aust 1993;158:648.

[6] Adrew WK. An unusual cause of deep venous thrombosis of the lowerlimb. S Afr Med J 2000;90:42.

[7] Sousa Escandon MA, Alejandro M. Thrombo-embolie pulmonaire à lasuite d’une rétention vésicale chronique. Prog Urol 2001;11:323-6.

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[9] Meinardi JR, Kremer J, Van der Meer J. Deep vein thrombosis anddistension of bladder. Neth J Med 2004;4:137-8.

[10] Jacob N, Cacoub P, Hausfater P, Tazi Z, Hamidou S, Godeau P et al.Hyperhomocysteinemie et thromboses arterielles ou veineuses : etuderetrospective de 75 observations. La Presse Med 2000;29:287-93.

Florence Minetti, Solene Coeuret, Sophie Jouaux, Onur Mutlu,Helinoro Andriamaneo, Joseph Vickola, Minh Dung Ngo,

Jean-Philippe Lafay

Centre hospitalier Jacques-Monod, 61104 Flers cedex, France

Correspondance : Florence Minetti,université de Caen, 11, Promenade-du-Fort, 14000 Caen,

[email protected]

Reçu le 4 janvier 2012Accepté le 15 mars 2012

Disponible sur internet le 13 mai 2012

� 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservéshttp://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2012.03.013

tome 42 > n83 > mars 2013