Cette année, le far° seraailleurs · Observation des médias Analyse des médias Gestion de l'information Services linguistiques ARGUS der Presse AG Rüdigerstrasse 15, case postale,

Date: 01.07.2016

Le Temps

Le Temps1211 Genève 2022/ 888 58 58www.letemps.ch

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Cette année,le far° sera ailleurs

If you reside in a countryother than your countryof origin, have you

permission to return tothat country?

«BiRboards», Meriç Algün Ringborg.(ANNAGRANQVIST)

«Billboards» pointe des réalités

bureaucratiques vécues par l'artiste

en tant qu'émigrée de Turquie en Suède.

Reproduits en grand format et dispersés

dans l'espace public, des extraits

de formulaires pour l'obtention

d'un visa font surgir les notions d'identité,

de frontière et de nation.

La migration estau coeur de l'actualité?Le Festival des artsvivants basé à Nyonconsacresa 32e éditionà ce sujet brûlant.Présentation

Par Marie-Pierre Genecand

«Ailleurs». Premier constat: letitre 2016 du far° Festival des artsvivants basé à Nyon est moins inso-lite que les deux précédents, «Pa-rade» en 2014 et «Bataille» en 2015.Imagination à la baisse pour Véro-nique Ferrero Delacoste et de sadynamique équipe? «Non, sourit ladirectrice de ce rendez-vous estivaldepuis 2010. Si nous nous intéres-sons à l'«ailleurs», c'est parce quel'actualité s'est immiscée dans nosréflexions tout au long de la prépa-ration de l'édition 2016. Il nous estapparu incontournable de proposerune place différente pour aborderla question de la migration que cellequ'offrent les médias afin d'agir etde rencontrer cette réalité qu'il est

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urgent de considérer.»Le far° n'a du reste pas attendu le

mois d'août pour entamer des dé-marches. Depuis février, le festivalinvite chaque semaine des artistes

de talent comme Nicole Seiler, Mar-co Berrettini, La Ribot, Cindy VanAcker ou Perrine Valli à donner àNyon un atelier gratuit à ces réfugiésqui logent dans les abris PC et sontpeu occupés la journée. «C'est uneexpérience bouleversante», racontela directrice, qui participe elle aussià ces workshops avec ses collabora-teurs. «Migrants ou non, on est tousau même niveau d'inexpérience etde timidité quand il s'agit de s'expri-mer. Très vite, les barrières cultu-relles et géographiques tombentpour laisser place au corps.»

Se lancer. Eprouver. Questionnerle réel. Remonter le temps en quêted'une époque où les Suisses étaienteux-mêmes contraints à l'émigra-tion pour survivre. Cette année plusque jamais, le festival nyonnais pro-gramme des spectacles qui relaientla réalité et l'actualité. La mouvanceartistique ne date pas d'aujourd'hui.A l'image du théâtre documentairepratiqué depuis près de vingt anspar le Soleurois Stefan Kaegi ou plusrécemment par le Bernois Milo Rausur l'histoire de l'humanité, un largepan de la production scénique ac-

tuelle puise ses sujets dans la vraievie. A l'affiche de cette 32e édition dufar°, rares sont les projets qui n'ap-pliquent pas ce principe de réalité.

Dans Billboards, la Turque Me-riç Algün Ringborg exorcise parexemple son intégration compli-quée en Suède en transformanten oeuvres d'art les phrases admi-nistratives de plusieurs pays occi-dentaux détaillant les formalités àaccomplir pour obtenir un permis.«Cela va du plus absurde au plus ef-frayant», observe Véronique FerreroDelacoste, qui annonce des bande-roles partout à Nyon.

Restitution du réel aussi dansEspace (UN)connu. Les AllemandsJanina Janke et Maurice de Mar-tin ont interviewé des employés del'ONU engagés dans les sièges prin-cipaux - Vienne, New York, Nairobiet, cet été, Genève - pour évaluer lerôle que l'institution joue dans leurvie. «On constate souvent le côtéhors sol de ces travailleurs, leursrares connexions avec les habitantsde la région», reflète la directrice.Les spectateurs se rendront d'abordà Genève pour assister à une perfor-mance dans les murs de l'ONU, puisdécouvriront une installation de vi-déos et d'objets qui retrace le projetdans les quatre villes (ri et 12 août).

Réel encore, mais historiquecette fois et sans doute plus trans-

posé, avec les Italiens du collectifInvernomuto. Negus - Celebra-tion tourne autour du dernier roid'Ethiopie, Hailé Sélassié I", qui, enplus d'avoir subi l'assaut italien lorsde la colonisation de 1936, est aussidevenu une figure emblématiquedu mouvement rasta en Jamaïque.Humiliation d'un côté, sacralisa-tion de l'autre, récits multiples etpassionnants de toutes parts. Cettepratique, par exemple, adoptée parles soldats italiens lorsqu'ils retour-naient dans leur village de Vernasca,dans l'Italie du Nord: brûler des effi-gies de Sélassié pour dépasser leurspeurs. Des films, de la musique etdes sculptures recomposent ces dif-férents visages du négus (du 11 au 13août).

A la toute fin du festival, la Hol-landaise Marjolijn van Heemstrarevient elle aussi sur une expé-rience inédite en lien avec lesfrontières. Dans une ambiance demusic-hall, elle retrace le parcoursde Garry Davis, premier hommeà s'être autoproclamé citoyen dumonde en déchirant son passe-port américain au lendemain dela Seconde Guerre mondiale et envoyageant ensuite pour de bon avecses nouveaux et atypiques papiersd'identification (les 19 et 20 août).Aujourd'hui, la chose paraît sur-réaliste...

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«Negus - Celebration», Invernomuto.(INVERNOMUTO)

Entre l'Italie, l'Ethiopie et la Jamaïque, «Negus -

Celebration» fait converger l'histoire, tes mythes

et la magie autour de la figure de Hailé Sélassié 1,,

le dernier roi (ou négus) d'Ethiopie.

«Espace (UN)connu, Unknown Spaces».(UNKNOWNSPACES)

Avant d'investir le Palais des Nations à Genève,

«Unknown Spaces» s'est rendu dans les principaux

sites de l'ONU à travers le monde. Semblable

à deux enquêteurs, le duo cherche à mettre

en évidence la créativité d'individus qui, dans un

système complexe, favorisent ou entravent le

caractère humain des structures organisationnelles.

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«La Danse du Tutuguri»,Perrine Va i. (ANNE-LAURE LECHAT)

Inspirée par les écrits d'Antonin Artaud à

l'époque de sa quête mystique auprès des

Indiens Tarahumaras, Perrine Valli propose

une danse guidée par les questions du vital,

du rythme, du langage corporel

et de l'énergie solaire.

«Garry Davis», Marjolijn van Heemstra.(LÉO VAN VELZEN)

En suivant les traces de l'activiste pour la paix Garry

Davis, Marjo[ijn van Heemstra se lance dans Le récit

croisé de sa propre expérience et de celle de cet

homme révolté, interrogeant avec détermination

et poésie ce qui peut encore relier les individus

dans un monde chaotique.

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FESTIVAL

Sans frontièresDu 10 au 28 août

Dire encore que plusieurs ré-fugiés qui participent aux ateliersdu jeudi évoqués plus haut vont seretrouver sur la scène du festival,cet été. Le Kurde irakien Jutyar Alidansera sous la direction de Mic-kaël Phelippeau, chorégraphe fran-çais transporté par «son énergie etsa manière d'inviter les autres par-ticipants dans la danse» (les et iiaoût). Tandis que Sharif Saidi et Na-jib Mohammadi, de jeunes Afghans,seront partie prenante dans la créa-tion de Laurent Pichaud, frappé parle rapprochement entre leur par-cours à travers l'Iran, la Turquie etles Balkans pour arriver en Suisse et

celui que Nicolas Bouvier a consignédans L'Usage du monde. Les deuxvoyages seront placés en résonancevisuelle et chorégraphique (les 18,19et 20 août).

Du côté des artistes romands,on retrouvera les Extra Time, troispremiers projets élaborés sous leregard averti et bienveillant d'uncurateur. Cette année, c'est YanDuyvendak qui accompagne cesartistes émergents, parmi lesquelsfigure la très captivante Rébecca Ba-lestra (les 15 et 16 août). On retrouve-ra aussi avec plaisir Perrine Valli, quisuit les traces mexicaines d'AntoninArtaud dans La Danse du Tutuguri(les 16 et 17 août). Stefan Kaegi deRimini Protokoll, toujours soucieuxde déplacer le théâtre hors les murs,s'invitera dans les foyers des par-ticuliers pour proposer une soiréejeu de société autour de l'Europe.Seule condition, avoir une table, deschaises, des amis et un four pour

cuire un gâteau! (Du 11 au 20 août.)Quant à la jeune génération, AdinaSecretan et Audrey Cavelius propo-seront toutes deux des projets mé-ta-théâtraux qui interagiront avec lefonctionnement et les composantesdu festival.

Le far°, c'est beaucoup d'audace,de curiosité et d'enthousiasme. Cesont aussi des chiffres, ceux du bud-get, notamment. En 2016, il s'élève à95o 000 francs pour n jours de fes-tival, du au 20 août, dont 25o 000francs proviennent de la Ville deNyon, 150 000 francs du canton deVaud et 90 000 francs du Conseil ré-gional du district de Nyon. Les 48%restants sont issus de fonds privés.

far° Festival des arts vivants.Nyon. Du 10 au 20 août.

(Rens. 022 365 15 50,

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