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Chapitre 1 Section 1 : Ontologie du marketing : Technologie managériale ou processus social Auteur : Jamel-Eddine Gharbi Introduction La problématique de l'ontologie du marketing est reliée aux questions suivantes. Le marketing comme concept, quelle est son contenu ? Quelle est l'identité (ou l'essence) du marketing ? Cette essence varie-t-elle en fonction du contexte historique ? Quels sont les contours et les frontières du champ du marketing ? Comment ce champ théorique et de savoir est-il structuré ? Dans quelle mesure est-il possible de construire une théorie générale du marketing ? L'évolution du marketing montre que ce dernier est passé de la description à l'analyse des phénomènes commerciaux reliant l'offre à la demande. De simple activité technique, il est devenu un processus économique (création et échange d'utilités, harmonisation de l'offre et de la demande), puis un processus social (interaction et responsabilité sociale). Ainsi, comme nous le développons ci-dessous, le concept marketing est passé (1) d'une technologie managériale, (2) à un processus d'échange transactionnel, (3) à un processus d'échange social, et enfin (4) à un processus d'échange relationnel. 1. Le concept marketing Le marketing, au cours de son évolution, s'est confronté à une double logique : une logique de spécialisation et d'élargissement (extension de son champ d'application) et une logique d'intégration et d'unification (développement d'une théorie générale du marketing). En effet, les efforts de plus en plus importants d'approfondissement de la discipline créent un risque de dispersion, posent le problème de frontières de son champ d'étude, de l'intrusion dans d'autres disciplines et rendent nécessaire la définition d'une théorie du marketing. 1.1. Le marketing : une technologie managériale Depuis sa genèse, le marketing a été défini comme l'ensemble des opérations (publicité, crédit, vente) que le promoteur d'un produit doit effectuer dans son travail de vendeur. La mission du marketing était de faire face à un marché qui a perdu son caractère concurrentiel, de développer de nouvelles relations entre l'entreprise et ses clients, et ce, à travers la description et la compréhension de l'activité de distribution et de commerce de produit. 1

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Chapitre 1 Section 1 :Ontologie du marketing :

Technologie managériale ou processus socialAuteur : Jamel-Eddine Gharbi

Introduction

La problématique de l'ontologie du marketing est reliée aux questions suivantes. Le marketing comme concept, quelle est son contenu ? Quelle est l'identité (ou l'essence) du marketing ? Cette essence varie-t-elle en fonction du contexte historique ? Quels sont les contours et les frontières du champ du marketing ? Comment ce champ théorique et de savoir est-il structuré ? Dans quelle mesure est-il possible de construire une théorie générale du marketing ?

L'évolution du marketing montre que ce dernier est passé de la description à l'analyse des phénomènes commerciaux reliant l'offre à la demande. De simple activité technique, il est devenu un processus économique (création et échange d'utilités, harmonisation de l'offre et de la demande), puis un processus social (interaction et responsabilité sociale). Ainsi, comme nous le développons ci-dessous, le concept marketing est passé (1) d'une technologie managériale, (2) à un processus d'échange transactionnel, (3) à un processus d'échange social, et enfin (4) à un processus d'échange relationnel.

1. Le concept marketing

Le marketing, au cours de son évolution, s'est confronté à une double logique : une logique de spécialisation et d'élargissement (extension de son champ d'application) et une logique d'intégration et d'unification (développement d'une théorie générale du marketing). En effet, les efforts de plus en plus importants d'approfondissement de la discipline créent un risque de dispersion, posent le problème de frontières de son champ d'étude, de l'intrusion dans d'autres disciplines et rendent nécessaire la définition d'une théorie du marketing.

1.1. Le marketing : une technologie managériale

Depuis sa genèse, le marketing a été défini comme l'ensemble des opérations (publicité, crédit, vente) que le promoteur d'un produit doit effectuer dans son travail de vendeur. La mission du marketing était de faire face à un marché qui a perdu son caractère concurrentiel, de développer de nouvelles relations entre l'entreprise et ses clients, et ce, à travers la description et la compréhension de l'activité de distribution et de commerce de produit.

Le marketing a donc été compris comme assurant une fonction d'intermédiation ayant pour objet la satisfaction du client. L'essentiel de la littérature du marketing était centré sur le mécanisme d'adaptation entre offreurs et demandeurs, selon la vision microéconomique classique, enrichie légèrement par la prise en considération de la psychologie du consommateur. C'est au sein de cette vision adaptative du marketing que le marketing management était développé. Il est défini comme un mécanisme adaptatif : adaptation du producteur aux consommateurs générant un "consommateur roi", le but des entreprises étant théoriquement d'accroître sa satisfaction.

Morgan (1996) distingue entre les définitions pratiques du concept marketing et les celles théoriques qu'il qualifie d'ésotériques. Les définitions pratiques et même récentes du concept marketing considèrent encore ce dernier comme une technologie managériale, un ensemble de techniques à la disposition des praticiens pour analyser et agir sur leur marché. Le marketing management se base sur cette conception technique du marketing. Les composantes fondamentales de ce marketing management technique sont la segmentation, le positionnement et le mix marketing.

Parmi ces definitions pratiques du marketing, Raymond et Barksdale (1989) avancent: " the marketing concept provides a single prescription for running a business successfully. The consumer must be recognized and accepted as the focal point for all business activities, and knowledge of customer needs and wants should be

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the starting point for all major business decisions." Dans le même sens, McGee et Spiro (1988) stipulent: "the marketing concept involved the specific techniques by which one seeks to identify and satisfy consumer needs. The concept involves what is commonly referred to as the marketing mix, the marketing tools a manager combines in a specific way to deal with a specific marketing situation." Cette conception instrumentale du marketing, axée sur la composition commerciale et la satisfaction des clients, est finalement formalisée par l'American Marketing Association. La définition qu'elle adopte est la suivante: "Marketing is the process of planning and exacting the conception, pricing, promotion and distribution of ideas, goods and services to create exchange and satisfy organizational objectives." (A.M.A., 1986)

Morgan (1996) avance que les définitions précédentes du concept marketing sont critiquées sur les plans suivants. D'une part, le marketing a été présenté, d'une façon exagérée, comme étant la perspective managériale la plus importante dans la gestion de la firme. Toutefois, plusieurs exemples de mauvaises applications du marketing abondent indiquant un divorce entre la rhétorique du marketing et la réalité de ses pratiques. D'autre part, cette conception du marketing ne reconnaît pas suffisamment la responsabilité du marketing et de l'organisation vis-à-vis de la société, du consommateur et du personnel de la firme. Enfin, l'importance exagérée accordée au marketing dans les organisations était au dépend de l'amélioration de la productivité et le développement de leur capacité d'innovation.

Les années 1940 étaient marquées par la critique du marketing. Son évolution, son autonomie et ses niveaux d'abstraction et de formalisation ont été jugés insuffisants. Alderson et Cox (1948) soulignent que le marketing est uniquement descriptif, fondé sur un raisonnement inductif et tout juste capable d'observer, de rapporter et de décrire, sans référence à des hypothèses implicites. Selon Alderson et Cox (1948), il n'est qu'un marketing de l'économie appliquée, utilitaire et professionnel.

À partir de là, plusieurs chercheurs ont agit pour que le marketing ne soit plus considéré comme un ensemble de techniques, pour qu'il soit conçu en tant que discipline. Les efforts ont été alloués pour que le marketing atteigne un niveau plus élevé d'abstraction et de formalisation. Ainsi, les opérations commerciales et les structures institutionnelles sont décrites en insistant sur l'identification et la définition de classes de phénomènes. Au niveau pratique, la relation entre l'organisation et l'environnement est formalisée. Cette relation est désormais considérée l'objet d'intérêt fondamental du marketing.

Ainsi, le marketing était l'objet : D'un perfectionnement et d'un approfondissement technique par la décomposition de ses notions

opérationnelles, telles que vente, achat, transport et stockage. D'une prise en considération des aspects institutionnels de la commercialisation par l'analyse de la

structure et des fonctions des intermédiaires de la distribution. D'une identification des types d'utilités créées par la fonction commerciale : utilité temporelle et spatiale et

utilité de possession comme résultat de l'échange. D'un débat sur ses principes. D'une recherche sur le perfectionnement des définitions de ses concepts. D'une identification des hypothèses implicites. D'une reconnaissance des rôles du marketing dans la société. D'une approche holistique qui met l'accent sur les interrelations entre les éléments du mix marketing et sur

les interactions des institutions sous l'influence des forces du marché et de l'État. D'une importance stratégique de la fonction commerciale.

1.2. Le marketing : processus d'échange économique

Selon Micallef (1998), dans les années 1950-1970, le marketing ne sera plus conçu simplement comme un groupe de fonctions internes, ni comme une fonction de production économique envisagée du point de vue de l'entreprise et du consommateur, mais comme un processus d'échange et de transfert de produits. C'est par ces processus d'échange que le marketing est créateur d'utilités. C'est suite à cette évolution et cette conception du marketing comme processus d'échange qu'il s'est doté d'une théorie générale. La première, proposée par Alderson (1957), était fonctionnaliste. Elle amalgame institutions,

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fonctions et productions commerciales et attribut à l'information le rôle majeur de l'adaptation des biens aux finalités de la consommation. Arndt (1985) affirme: "La plus grande contribution à la construction d'une théorie générale du marketing a été la conceptualisation du marketing comme échange tel que cela était évident dans les écrits d'Alderson (1957)."

La seconde théorie générale du marketing, développé par Revzan (1968), est une théorie institutionnelle selon laquelle le système commercial doit faire partie de l'ordre économique total. En effet, les produits, les marchés et les prix sont inséparables des structures et des institutions du système économique global.

Ces deux théories ont été critiquées par le fait d'être trop dépendantes de la théorie économique et d'être incapable de concevoir le marketing comme processus social. Ces théories proposent une conception d'un échange purement économique et rationnel, excluant toute analyse de rapport de pouvoir. La notion d'échange est appréhendée de façon instrumentale comme ponctuelle, réciproque, mue par l'intérêt immédiat des partenaires. Ces critiques ont amené à la conception du marketing en tant que processus d'échange social.

1.3. Le marketing : processus d'échange social

Pour affirmer que le concept d'échange ne peut se réduire à la transaction économique et pour montrer les aspects sociaux engagés dans les processus d'échange, certains auteurs ont souligné l'importance d'intégrer dans l'analyse des processus d'échange les concepts de pouvoir et d'influence et les considérations d'ordre éthique et sociétale.

En effet, Kotler (1972) définit le marketing comme logique d'influence tout en reconnaissant que l'échange est le concept central du marketing. Toutefois, il se pose la question suivante : "Isn't generic marketing really using influence as the core concept rather than exchange?" Bagozzi (1975) réintroduit les notions de pouvoir, d'influence et de coercition dans sa théorie du marketing centrée sur l'"échange volontaire". Bonoma et Johnston (1978), Day et Wensley (1983), Dwyer, Schurr et Oh (1987) réintroduisent dans leur théorie interactionniste du marketing les concepts de pouvoir, de conflit et de négociation comme fondement du marketing. Dubois et Lafrance (1995) définissent le marketing comme étant l'ensemble des processus de mise en œuvre par une organisation pour comprendre et influencer dans le sens de ses objectifs les conditions de l'échange avec d'autres entités, individus ou organisations. En somme, on ne peut définir le marketing sans prendre en considération son cadre général, à la fois, économique et politique. C'est dans ce sens qu’Arndt (1985) propose le paradigme de l'économie politique comme fondement de la théorie marketing.

Ainsi, une nouvelle théorie générale du marketing, centrée sur le concept d'échange social, a été proposée par Kotler et Levy (1969). Ces derniers élargissent le champ de cette discipline pour intégrer toutes les formes, privées ou publiques, de fonctionnement de la société. Ils insistent aussi sur la responsabilité sociétale et éthique du marketing. Ainsi, Kotler et Levy (1969) définissent le marketing comme étant la science du comportement appliquée aux niveaux des processus d'achat et de vente, de la transaction, de l'activité de toute organisation face à ses publics.

À son tour, Bartels (1988) avance que le marketing est un processus par lequel la société, pour satisfaire aux besoins de consommation, développe des systèmes distributifs créateurs de transactions ou de flux. Ceux-ci sont censés résoudre les séparations du marché et se concrétisent en échange et consommation. Cette théorie du marketing a été critiquée par le fait qu'elle est une formalisation partielle et une collection de théories et qu'elle manque de généralisation.

Pandya (1987) propose d'analyser le comportement du marché en faisant recourt à des fondements macro et interdisciplinaires. Le modèle d'économie politique constitue pour l'auteur une alternative pour analyser les échanges marketing, car il nous permet de mener une analyse comparative entre les systèmes marketing dans des économies de marché et des économies non marchande. De même, ce modèle permet de traiter les problèmes de pouvoir et d'échange social. Enfin, il dépasse l'approche fonctionnaliste classique par une vision basée sur les processus.

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El Ansary (1979) propose une théorie générale qui possède l'avantage de faire recours à des théories logiquement articulées expliquant le phénomène du marketing. Entre autres, ces théories sont les théories microéconomiques sur les prix, la promotion, la distribution, théories macroéconomiques sur les aspects sociaux du marketing, sur les technologies et l'activité de la puissance publique, théories sur le comportement du consommateur et des membres du réseau de distribution. La synthèse et l'intégration de celles-ci sont réalisées par une théorie de l'évolution des institutions du canal de distribution et du développement des systèmes marketing verticaux.

Dans la même veine, Micallef (1992) propose le système de distribution comme théorie centrale du marketing. Il définie le marketing comme un processus social et gestionnaire grâce auquel les acteurs économiques obtiennent ce qu'ils désirent par un acte d'échange. Il est donc créateur de valeur. Ainsi, le marketing apparaît comme facteur d'intermédiation des échanges, instrument de création et de résolution de relation d'échange, de l'allocation des ressources productives jusqu'à l'utilisation des revenus distribués. Le marketing intervient donc dans le système organisationnel (formation de l'offre) et dans le système social (formation de la demande). Cette définition conduit à faire du système de distribution la théorie centrale du marketing. Celle-ci a été développée par Dixon et Wilkinson (1986).

Selon cette théorie, puisque l'échange social apparaît seul capable de justifier le marketing dans sa fonction d'intermédiation, il apparaît nécessaire d'analyser les transactions, sanctions de l'échange. Ces transactions sont interpersonnelles, intergroupes ou inter organisationnelles. Leur nature et leur structure dépendent de la relation entre les gains de l'échange et les coûts résultant de la coordination des activités entre spécialistes. Selon Micallef (1998), cette théorie n'est pas partielle et exclusivement applicable aux canaux de distribution. Elle représente plutôt une synthèse de tous les éléments qui viendront simplement expliciter les choix de spécialisation, l'appel à l'organisation (internalisation) ou au marché (externalisation), le comportement intégré du consommateur-acheteur (marketing relationnel). Le schéma 1 suivant représente l'architecture simplifiée d'une théorie générale du marketing centrée sur le système de distribution.

La prise en considération des dimensions sociales de l'échange était limitée aux aspects politiques et influencée encore par un cadre économique. Le recours était fait à certaines théories de l'économie politique ou de l'organisation industrielle, telles que l'économie des coûts de transaction, la théorie de l'agence ou la théorie des jeux. La conception ci-dessous présentée du marketing comme processus d'échange relationnel est proposée afin de prendre plus en considération les aspects sociaux de l'échange et de se démarquer clairement de la transaction purement économique et conflictuelle.

1.4. Le marketing : processus d'échange relationnel

La décennie 1990 a été témoin d'un changement directionnel majeur, à la fois, dans la théorie et dans la pratique marketing. Considérée par Webster (1992) comme une "réorganisation fondamentale du domaine" et par Kotler (1991) comme un "véritable changement paradigmatique", cette mutation s'opère en faveur d'une perspective qui tend à réinscrire les épisodes d'échange - compris jusqu'alors dans leur sens restreint de

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Théoriesmicro-méso-macro marketing

Théorie du comportement du

consommateur acheteur

Théorie du marketing stratégiqueModèles descriptifs-normatifs

Théories des micro-macro organisations

Théorie du système de distributionLe marketing comme intermédiation des

échanges (information, régulation, allocation des ressources transactionnelles)

Schéma 1 : Architecture simplifiée d'une théorie générale du marketing (Micallef, 1998)

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transactions - dans un cadre relationnel avec pour objectif de se focaliser dans la gestion des partenaires stratégiques et le positionnement de l'entreprise entre ses fournisseurs et ses clients dans la chaîne de valeurs afin de délivrer une valeur supérieure aux clients. Ainsi, on assiste à un passage d'un management transactionnel à un management relationnel des échanges marketing, d'un marketing orienté produits à un marketing orienté clients.

Berry définit le marketing relationnel comme la création, le développement et le maintien d'une relation individualisée avec le client. Dans le cadre du marketing one to one, Peppers et Rogers (1995) avancent que le producteur, le commerçant ou le vendeur tâche de développer un relationnel par des face-à-face multiples avec le client et il essaie d'ajuster ses offres de produits ou de services aux besoins constamment en évolution de ses clients, en accordant une attention particulière aux clients les plus rentables.

Les facteurs qui ont favorisé le développement du marketing relationnel sont, entre autres, la monté en puissance des activités de services, l'émergence de réseaux complexes, le développement d'alliances et de relations de partenariat entre les firmes et l'évolution rapide des nouvelles technologies d'information et de communication.

Dans cette nouvelle lignée, l'échange peut être conçu comme des instances de transaction ou comme un engagement relationnel. En effet, le marketing a été défini comme l'ensemble des activités destinées à gérer les échanges. C'est en créant et en régulant les échanges que le marketing génère de la valeur. Dans les processus d'échange, la transaction représente le processus de base le plus élémentaire. Depuy et Thoeing (1991) stipule : " Qui dit transaction évoque aussitôt une relation dont le contenu et les modalités peuvent être compris indépendamment de toutes les autres transactions. Le marché se déroule comme une somme de rencontres, comme une suite de face-à-face disjoints." Plusieurs chercheurs, tels que Sheth, Gardner et Garrett (1988), Grönroos (1990, 1994), Christopher, Payne et Ballantyne (1991) et Webster (1992) ont critiqué la limitation de l'échange aux transactions économiques. Ils ont montré que l'économie néoclassique, avec son insistance sur l'optimisation discrète, est d'une utilité limitée lorsqu'on essaie de développer les relations à long terme, où les parties doivent souvent être disposées à faire des concessions au cours du temps pour rechercher les bénéfices de la coopération à plus long terme.

MacNeil (1980) définit l'échange relationnel en le comparant avec l'échange transactionnel qui lui sert de référence. Cette comparaison est faite par rapport à douze dimensions. Gundlach et Murphy (1993) considèrent qu'il s'agit d'un continuum opposant l'échange transactionnel à l'échange relationnel et dans lequel l'échange contractuel constitue une position médiane. Le tableau suivant présente les spécificités de chacun des trois types d'échange.

Les deux dimensions fondamentales qui distinguent l'échange relationnel sont la dimension sociale et la dimension temporelle. En effet, l'échange relationnel s'objective dans un double rapport économique et social entre coéchangistes. Le rapport social a été clairement mis en évidence dans le modèle dyadique que propose Bagozzi (1978). Dans ce modèle, les acteurs maximisent une fonction d'utilité jointe au lieu de maximiser de façon jointe des fonctions d'utilité individuelles. Sur la base de ce modèle, de nombreux chercheurs ont utilisé le concept de dyade comme unité d'analyse, car il permet de prendre en compte globalement les effets des interactions entre les acteurs (Moorman, Zaltman et Deshpande, 1992; Anderson, Hakansson et Johanson, 1994) et de déterminer les contours pertinents pour étudier les multiples forces externes qui pèsent sur la relation (Achrol, Reve et Stern, 1983).

Par ailleurs, Varadarajan et Rajaratnam (1986) et Dwyer, Schurr et Oh (1987) affirment que la dimension temporelle ne se réduit à la durée de réalisation plus ou moins longue de l'échange. C'est du temps "à venir" dont il s'agit et non du temps écoulé. L'échange relationnel structure la relation dans la mesure où les attitudes et les comportements des acteurs se déterminent dans une perspective qui ne comporte aucun terme prévu a priori et peuvent s'interpréter comme une volonté de "continuité relationnelle".

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Tableau 1 : Les différents types d'échange (adapté de Gundlach et Murphy (1993))Caractéristiques de

l'échangeÉchange

transactionnelÉchange contractuel Échange relationnel

Dimensions temporelles

Horizon tempsNature de l'échange

Réalisation instantanéeTransactions distinctes

Durée déterminéeTransactions liées

Durée indéterminéeTransactions fusionnées

Caractéristiques situationnelles et

stratégiquesInvestissement

Coûts de changementPerspective de l'échange

Dimension stratégique

FaibleBas

Économique

Faible

MoyenMoyen

Économique et sociale, initiatives de plus long

termeModérée

MoyenMoyen

Économique et sociale, initiatives de plus long

termeImportante

RésultatsComplexité

Répartition des bénéfices et des charges

Offre simple - acceptation

Distincte et nette

Complexité croissante

Compromis

Réseau complexe et interdépendances

opérationnelle et socialeFloue car les buts

convergent

La différenciation conceptuelle entre l'échange transactionnel et l'échange relationnel conduit à deux orientations pratiques du marketing, à savoir le marketing de la transaction et le marketing de la relation. Le tableau 2 suivant résume leurs distinctions.

Tableau 2 : La distinction entre le marketing transactionnel et celui relationnel(Adapté de Payne, Christopher, Clark et Peck, 1996)

Marketing de la transaction Marketing de la relation Orientation à court terme Intérêt pour la vente isolée Contact avec la clientèle discontinu Mise en avant des caractéristiques du produit Peu d'importance accordée au service à la

clientèle Engagement limité à satisfaire la clientèle Contact avec la clientèle modéré La qualité est d'abord le souci de la

production

Orientation à long terme Intérêt pour la rétention de la clientèle Contact avec la clientèle continu Mise en avant de la valeur du produit pour le

client Forte importance accordée au service clientèle Fort engagement pour satisfaire la clientèle Fort contact avec la clientèle La qualité est le souci de tout le personnel de

l'entreprise

Il est à noter que pour certains auteurs le marketing de la relation se veut une autre manière d'appréhender le marketing qui coexiste avec le marketing de la transaction ou le marketing management traditionnel. À l'inverse, d'autres militent pour que l'optique transactionnelle et conflictuelle du marketing classique soit remplacée par une approche relationnelle plus interactive, fondée sur le long terme et davantage axée sur le service.

Christopher, Payne et Ballantyne (1991) opposent le marketing transactionnel, qui était concentré sur le client, au marketing relationnel, qui adopte une perspective plus large. Ils avancent que ce dernier se fonde sur le principe que l'entreprise est en relation non pas avec un seul et unique ensemble composé de clients potentiels mais bien avec un ensemble de réseaux recouvrant différents sous-ensembles constitués de clients, d'interlocuteurs de référence, de fournisseurs, de collaborateurs externes, de réseaux d'influence et du personnel de l'entreprise. Le marketing relationnel substitue à la seule analyse d'un marché de consommateurs

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(par la segmentation, le positionnement et le mix) différentes méthodes de concertation et de partenariats avec l'ensemble des réseaux d'acteurs ayant une influence directe ou indirecte sur la demande.

2. La conception critique et radicale du marketing

Bien que la conception du marketing en tant que processus d'échange relationnel se veut un approfondissement de l'intégration des dimensions sociales de l'échange, elle demeure encore concentrée sur les aspects micro et managériaux du marketing. Elle s'élargie pour intégrer les membres de ses réseaux, de sa filières et de son environnement méso. Toutefois, elle n'intègre pas les aspects macro, sociétaux et éthiques du marketing. En outre, les critiques ont été adressées à la prétention universaliste du marketing et son indépendance du contexte social et culturel dans lequel il est développé ou il s'applique. Ces critiques se sont aussi présentées pour infirmer la capacité du marketing de se doter d'une théorie générale. Nous présentons dans ce qui suit ces critiques et les propositions avancées afin de concevoir pleinement le marketing comme un processus d'échange social, afin de le rendre plus responsable, plus holistique et plus humaniste et de l'adapter aux nouveaux défis.

2.1. Un marketing humaniste et holistique

Firat, Dholakia et Bagozzi (1987) appellent à l'adoption de nouveaux modes de pensée radicaux dans la compréhension et l'interprétation du phénomène marketing. Ces modes de pensée nouveaux constituent une alternative à l'empirisme logique qui a dominé la pensée marketing. Ils appellent aussi à l'intégration d'une tradition critique face aux pratiques et à la pensée marketing. Historiquement, le développement du savoir marketing avait servi l'intérêt des praticiens du marketing dans les organisations. À l'inverse, ils proposent que le marketing devrait servir la société d'une façon globale et non pas uniquement les profits des entreprises.

La vision préconisée par Firat, Dholakia et Bagozzi (1987) est qualifiée d'humaniste, qui s'oppose à la vision managériale traditionnelle, et holistique, qui s'oppose à la vision micro et séparatrice. Les auteurs invitent à une déconstruction du savoir marketing, un retour aux sources pour connaître la raison d'être originale du marketing et pour comprendre les fondements de nos constructions (conceptions) de base en marketing. Ceci permettra de rendre explicite ce qui est considéré comme "donnée" et "naturel", bien qu'il a été construit arbitrairement et culturellement. Le processus de déconstruction amène à s'interroger sur la nature du contexte historique dans lequel les connaissances ont été développées.

Kotler (1987) propose une nouvelle direction qu'il nomme marketing humaniste. Ce dernier implique que les entreprises ne devraient pas se limiter à la satisfaction des besoins spécifiques et à court terme des consommateurs. Il devrait réaliser aussi leurs besoins à long terme et prendre en considération les intérêts globaux de la société. Ainsi, l'objet fondamental du marketing humaniste est la mise en relation permanente entre le marketing, la société et l'individu. Les valeurs que le marketing humaniste tâche de développer sont la liberté, le progrès et la communauté.

Kilbourne (1987) critique le marketing dans son abstraction du produit au-delà du contexte de la vie humaine et sa contribution à la pénétration massive de l'échange marchand dans tous les aspects de vie humaine. Il affirme que notre aliénation provoquée par le marketing n'est pas uniquement reliée à la quantité de consommation, mais fondamentalement à la qualité de la relation que nous entretenons avec ce processus.

Karlinsky (1987) critique le caractère asymétrique du marketing. Ce dernier a trop mis l'emphase sur la perspective managériale Au sein même de cette perspective, les firmes sont traitées d'une façon asymétrique et non équitable. Conséquemment à ce caractère asymétrique du marketing, les décideurs en marketing sont plus éclairés que les consommateurs, car ils ont plus d'accès aux informations et aux ressources. Pour redresser cette asymétrie, l'auteur propose d'inverser la logique du marketing en menant une pensée du bas (consommateurs) vers le haut (firmes) et de mettre les technologies de l'information à la disposition du consommateur moyen.

Les critiques qu'adresse Holbrook (1987) au marketing l'amènent à promouvoir la valeur de "l'humanisme conceptuel". Ce dernier est fondamentalement pertinent dans la compréhension et l'interprétation du

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comportement du consommateur. Cet humanisme conceptuel implique l'utilisation intensive de données subjectives, personnelles et introspectives pour revenir aux racines authentiques de la consommation. De même, il propose que l'agenda de la recherche en marketing doive être révisé. En effet, l'effort académique devrait être concentré sur la consommation plutôt que l'acte d'achat, sur l'expérience plutôt que la décision, sur l'usage de produits plutôt que le choix entre les marques, sur les services intangibles et les idées plutôt que les produits tangibles, sur les dépenses en termes de temps, d'effort et d'habileté plutôt que d'argent, sur l'émotion plutôt que l'affect, sur le non comportement du consommateur en plus de ses comportements, sur l'interdépendance entre les parties et le tout plutôt que la "compartementalisation" (parcellisation) et, finalement, sur la consommation en soi plutôt que son étude afin d'orienter les pratiques managériales.

Belk (1987) appelle au divorce et à la séparation entre la recherche sur les comportements des consommateurs et le marketing. C'est cette autonomie et cette libération qui permettra l'étude de la consommation indépendamment des intérêts managériaux et ce en la localisant dans le contexte de "l'expérience vécue". Il affirme que le comportement du consommateur ne peut se restreindre au comportement de l'acheteur. Son étude ne devrait pas être considérée comme une sous-discipline du marketing. Contrairement à la tradition positiviste du marketing, Belk (1987) appelle à l'utilisation des techniques humanistes et qualitatives. Face à la dominance de l'approche managériale micro, il privilégie une perspective macro et holistique.

Dholakia, Firat et Bagozzi (1987) insistent sur l'exigence d'apporter un changement radical du marketing. Un changement incrémental leur apparaît insuffisant. Ils proposent six moyens pour restructurer et mettre en oeuvre ce changement radical du marketing : (1) insérer des valeurs humanistes, (2) encourager les pratiques commerciales averties, éclairées et responsables, (3) adopter des perspectives macros systémiques, (4) utiliser des modèles causaux compréhensifs, (5) développer des structures conceptuelles holistiques et intégratives et (6) approfondir les bases historiques du marketing.

2.2. Un marketing éthique et responsable

Dans sa définition de l'essence du marketing, Hunt (1992) a largement insisté sur les responsabilités éthiques, morales et déontologiques des chercheurs et des praticiens du marketing. Il a sévèrement critiqué la conception du marketing comme une "discipline appliquée" au servie des praticiens du marketing dans les entreprises. Dans une publication ultérieure, Hunt (1994) a démontré que le fait de considérer le marketing comme une discipline appliquée a limité son développement et son rayonnement. En effet, cette conception a sensiblement contribué au manque de collaboration des chercheurs en marketing au dialogue de la stratégie.

En outre, le concept de "discipline appliquée" contribue à se focaliser sur le dysfonctionnement et l'échec plutôt que sur le fonctionnement et la réussite. Par ailleurs, Hunt (1992) critique ce que certains déduisent du fait de considérer le marketing comme une discipline appliquée ou professionnelle et ce en limitant l'effort des chercheurs en marketing à l'application des connaissances issus de certains disciplines académiques, telles que l'économie, la psychologie, la sociologie, l'anthropologie, les mathématiques ou les statistiques. Cette application se fait afin de servir les intérêts des praticiens en marketing. La critique qu'adresse Hunt (1992) à cette déduction, basée sur l'analogie faite entre le marketing et le droit, la médecine ou l'ingéniorat comme disciplines professionnelles, est sur deux plans. Premièrement, plusieurs recherches fondamentales (donc non appliquées) faites en marketing, qui n'affichaient pas un intérêt immédiat aux praticiens, se sont révélées très pertinentes ultérieurement. Deuxièmement, deux ironies sont sous-jacentes à cette analogie. D'une part, il est erroné que les chercheurs dans les disciplines professionnelles (droit, médicine et ingéniorat) se limitent à l'application des connaissances provenant des disciplines académiques. D'autre part, il est erroné que les efforts de recherche dans les disciplines appliquées sont guidés et concentrés sur/pour les intérêts spécifiques de leurs praticiens respectifs.

Hunt (1992) conclu ce débat sur l'essence du marketing en affirmant que : "Le marketing est une discipline académique qui aspire d'être une discipline professionnelle. Conséquemment, le marketing a plusieurs responsabilités :a) Vis-à-vis de la société, de fournie une connaissance objective et des diplômés techniquement compétents,

socialement responsables et libéralement éduqués ;

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b) Vis-à-vis des étudiants, d'offrir une éducation qui leur permet de participer à la vie sociale et économique et les préparer à assumer leur rôle de citoyens et de praticiens du marketing compétents et responsables ;

c) Vis-à-vis de pratique marketing, de fournir une offre continue de nouveaux entrants, compétents et responsables, dans la profession marketing et d'offrir de nouvelles connaissances sur les dimensions micro et macro du marketing ;

d) Vis-à-vis du domaine académique, de maintenir la mission fondamentale de l'université, à savoir la distribution, la conservation et la production de connaissance, de respecter son contrat avec la société, de fournir un savoir objectif en contre partie d'une liberté académique et de réaliser les valeurs fondamentales universitaires qui sont la raison, l'évidence, l'ouverture et la civilité."

Dans la même veine, Mokwa (1987) insiste sur l'importance de la conscience éthique des chercheurs et des praticiens en marketing. Son argumentation est centrée sur une conception large du produit. Ce dernier est considéré par l'auteur comme étant notre création humaine commune à travers laquelle nous interconnectons nos idées, nos efforts, nos ressources et nos technologies. Les produits constituent une concrétisation de nos idées et de nos relations qui sont fondées sur notre conscience éthique. Les produits ne sont que des métaphores de cette conscience éthique, de nos concepts et styles de vie et de nos qualités. Ainsi, les chercheurs et les praticiens en marketing ne devraient plus se limiter aux attributs concrets et aux dimensions utilitaires du produit. Il devrait comprendre et prendre en considération les interactions entre l'usage des produits et les aspects éthiques du vécu individuel et collectif.

Moorman (1987) critique la signification simpliste accordée au terme technique qui la réduit à une simple technologie. Elle accepte le fait de concevoir le marketing comme une technique. Toutefois, elle définie celle-ci comme étant l'épistémologie, le développement et l'utilisation de méthodes qui guident le comportement humain. Elle souligne que la technique a le potentiel d'éliminer les valeurs humaines. Ainsi, la technique marketing qui ignore le pluralisme culturel et les considérations éthiques peut être efficace et productive d'un point de vue économique. Toutefois, les externalités, les ramifications et les conséquences sociales seront négatives. C'est ce genre de danger que les chercheurs et les praticiens du marketing devraient analyser et prendre en considération.

2.3. Un marketing contextuel et historique

Fullerton (1987) critique la tendance dominante en marketing en quête de lois sur l'action humaine généralisables à toute sorte de collectivité, de culture et de contexte historique. Il considère que ce processus est insensé, car le marketing est un phénomène historique qui varie selon les lieux et le temps. Il propose d'adopter une perspective historique du marketing dont les idées de base sont : l'historicisme, la complexité, la réalité empirique, l'étude des liens de causalité et la distinction entre les sciences sociales et les sciences naturelles. Dans la même, veine, Erdogan et Kumen (1987) affirment qu'un modèle historique permet de décrire la liaison entre la formation et la transformation des systèmes marketing avec leurs origines historiques. Ce modèle rattache le système marketing à son contexte culturel et politique et trace leur lien avec les relations de production d'une société. L'important dans l'approche historique est de déterminer les systèmes qui dominent et qui ont plus de pouvoir et comment cette structure de domination façonne et transforme l'activité marketing.

Sherry (1987) critique le caractère ethnocentrique des recherches en marketing. Il considère que le fait d'imposer les idées et les pratiques développées en occident aux pays du tiers monde est problématique. Il propose un marketing social et culturel qui s'adapte à la spécificité de chaque contexte d'application. 2.4. Un marketing postmoderne

Le postmodernisme a émergé comme une critique du modernisme et de la croyance en la toute-puissance de la science. Les critiques qu'il adresse au modernisme sont :1. Ce que nous voyons autour de nous n'est pas que le produit de la science ou de la technologie mais le

résultat de la présence culturelle qui inclut l'esthétique, le langage, le discours et les pratiques. Le postmodernisme rejette notre conception de la production et de la consommation comme variables

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séparées. Le modernisme est incapable de prendre en considération la richesse de l'expérience humaine, regarde l'ordre social comme étant transparent et traite de réalités superficielles et solutions simples.

2. Le modernisme a échoué dans quête pour un ordre social éthiquement ordonné, rationnellement construit, technologiquement orienté, se voulant progressif. Le projet moderniste a rendu le consommateur comme un être sans relief émotionnel, symbolique ou spirituel. Le postmodernisme veut "ré-enchanter la vie humaine" et libérer le consommateur du schéma technologique et rationnel répressif.

3. Le modernisme réduit le monde en dichotomies simples : entre autres sujet/objet, mâle/femelle, producteur/consommateur, culture/nature et signifiant/signifié. Chaque paire représente une différence et le premier terme possède un statut supérieur au second. Pour le postmodernisme, ces dichotomies sont des essais historiques ratés pour légitimer des vérités partielles. Il propose de reconfigurer cette "philosophie de la différence".

4. Le modernisme est paradoxal. Il n'y a pas connexion entre l'idéal et le réel. Il est inconsistant. Par exemple, sa vision du consommateur repose sur trois discours différents :

Il détruit la valeur créée par le producteur. La consommation est un acte profane et destructeur. Il est considéré comme une marchandise, comme un objet. Il est souverain, il est "roi".Ces perspectives paradoxales simultanément diminuent et glorifient le consommateur. Pour le postmodernisme, ces contradictions sont exposées et la consommation est mise au même rang que la production comme activité produisant la valeur.

5. Le modernisme est répressif par l'accent qu'il met sur le rationalisme, le fonctionnalisme et l'universalisme. Le postmodernisme est plus proche des formes expressives et des représentations symboliques. Il prône une liberté d'expression et de représentation.

6. Le féminisme attaque la vision moderne et cartésienne centrée sur l'homme. La critique féministe dénonce la construction moderne du consommateur fondée sur le dualisme (esprit séparable du corps, l'individuel séparable du social, le sujet humain exerçant un contrôle sur les objets de sa création). Le féminisme va à l'encontre de la dichotomie sujet/objet. Son projet est la libération de toute structure contraignante.

Les critiques présentées ci-dessus montrent que l'évolution de la définition du concept marketing et de son objet fondamental s'est arrêtée à le concevoir comme un processus d'échange social. Toutefois, il manque une théorie générale du marketing qui intègre l'ensemble des aspects sociaux de ce processus qui sont à la fois, micro et macro, managériaux et éthiques, individuels et collectifs, généralisables et historiques, conflictuels et relationnels, locaux et holistiques. Le défi de taille est de développer pour le marketing une théorie qui mettra en relation l'ensemble de ces dimensions.

L'absence de telle théorie a conduit certains à abandonner totalement ce genre de projet de construction d'une théorie générale intégrative. Day et Montgomery (1999) considèrent qu'il est suffisant de s'accorder sur un ensemble de thèmes traités en marketing pour unifier son champ d'investigation. Ces thèmes sont reliés aux questions suivantes :

(1) Comment le consommateur se comporte-t-il ?(2) Comment la firme établit ses relations avec son marché ?(3) Comment les marchés évoluent et fonctionnent ?(4) Quelle est la contribution du marketing pour l'organisation et la société ?

Depuis l'apparition du modèle tri dichotomique de Hunt (1976, 1991), l'incapacité du marketing était en évidence d'avoir une théorie générale qui intègre les dimensions micro et macro, positif et normatif, profit et non profit du champ du marketing. Ainsi, une solution de commodité qui converge avec notre époque postmoderne sera de chercher l'unité dans les questions posées qui sont en principe des sources de divergence et non de convergence.

Au lieu de s'accuser sois-mêmes, les chercheurs en marketing accusent les critères trop exigeants qu'une théorie générale devrait respecter. La tendance est donc de relativiser ces critères pour finir par les abandonner et les substituer. De même, il est admis actuellement qu'un domaine de recherche peut être scientifique sans qu'il possède une théorie générale expliquant son objet d'étude. Le débat ci-dessous décrit ce processus de relativisation progressif.

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3. Les exigences d'une théorie générale du marketing

En donnant une définition universelle de la science, Buzzell (1963) ôtait toute crédibilité aux théories marketing. Tout au plus admettait-il que celles-ci servent à l'identification des variables et de leurs relations ; dans de telles relations se trouvait la clé de l'explication, de la prédiction et du contrôle des phénomènes commerciaux, objectifs de toute théorie.

Buzzell (1963) affirme que, pour devenir une science, il faut que le marketing soit :1. un corps de connaissance classé et systématique,2. composé d'une ou de plusieurs théories centrales et d'un certains nombre de principes généraux,3. normalement exprimé en termes quantitatifs,4. un ensemble de connaissances permettant la prédiction dans certaines circonstances et le contrôle

d'événements futurs.

Les théories générales du marketing ne répondent pas à ces critères. Il n'y a pas de théorie centrale, il y a peu de principes généralement admis et l'aptitude à prédire est limitée. Le marketing ne peut prétendre être une science, il ne serait donc qu'une simple technologie managériale.

Puisque les critères de Buzzell (1963) étaient trop sévères, il est nécessaire de chercher d'autres critères moins exigeants. Rudner (1966) affirme qu'une théorie doit se constituer en un ensemble systématiquement relié et empiriquement testable de propositions et quasi-généralisations ou quasi-lois. Le but de la théorie est d'accroître la compréhension scientifique à travers une structure systématisée capable à la fois d'expliquer et de prédire les phénomènes.

De nouveau, l'écart entre les exigences de la définition donnée par Rudner (1966) et la nature des théories du marketing est facile à vérifier. Il y a bien des structures de propositions systématiquement reliées, mais elles sont presque exclusivement composées de schémas de définition ou de simple classification, telle qu celle proposée par Hunt (1991). De même, il est difficile de distinguer entre généralisations accidentelles et non accidentelles, entre régularités empiriques et quasi-lois, entre hypothèses de recherche et hypothèses guidées. En bref, il est difficile de distinguer entre les éléments d'une véritable morphologie scientifique des théories et ceux d'une discipline plus descriptive qu'analytique ou prédictive.

L'impossibilité avouée de retrouver dans les théories marketing la rigueur préconisée par Buzzell (1963) et Rudner (1966) va amener à relativiser les trois critères exigés, à savoir des relations systématiques, des généralisations ou quasi-lois et des tests empiriques. Hunt (1989) propose : à défaut de formalisation complète, on se contente d'une formalisation partielle des théories ; à défaut de lois ou même de généralisations ou quasi-lois, on se contente de lois de tendance ou de simple

hypothèses ponctuelles de classifications ou de définitions ; à défaut d'une vérification empirique, on se contente d'hypothèses prédictives à référents empiriques

confrontables à la réalité.

Ainsi, le débat sur la scientificité du marketing s'est déplacé à une question sur l'unicité de la méthode. Y a-t-il une seule méthode scientifique, des méthodes différentes selon les sciences ou plusieurs méthodes différentes applicables à une seule science ? Deux thèses sont généralement avancées : celles des méthodes scientifiques multiples et celle de la méthode scientifique unique.

D'après Zaltman et Burger (1975), la méthode scientifique est un ensemble de procédures permettant d'établir et de relier entre elles des lois générales sur les événements jusque-là non connus. Les cinq critères de la méthode scientifique sont : (1) l'objectivité (minimisation des biais culturel et de mesure), (2) pertinence (ou degré suffisant de confirmation), (3) cohérence (les items de connaissance sont à regrouper selon un mode logique ; ainsi, des concepts reliés devraient former des hypothèses, des hypothèses reliées à des théories ou des modèles), (4) compréhension (élargissement maximum du champ couvert par la théorie) et (5) précision (formulation nette des concepts).

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Hunt (1991) soutien la thèse d'unicité de la méthode scientifique et structure son argumentation, d'une part, sur la distinction entre la méthodologie d'une discipline et ses techniques. D'une part, il affirme que la méthode scientifique est unique dans le contexte de la justification ou de la validation. Toutefois, les méthodes de recherche peuvent être multiples dans le contexte de la découverte ou l'exploration. Enfin, il montre que l'induction et la déduction sont complémentaires et en interaction et que l'induction ou la déduction pure est impossible. Hunt (1991) stipule : "La question de la certitude des empiristes logiques et des rationalistes est sans espoir. Le mieux que la science puisse faire est de produire de la connaissance falsifiable qui est hautement vraisemblable ou très probable. Il n'y a aucune logique unique de découverte. Les méthodes inductives et hypothético-déductives peuvent être fructueuses pour développer des hypothèses, des généralisations et des théories scientifiques."

Dans cette lignée de dégradation des critères exigés d'une théorie scientifique, Barnes(1995) soutien qu'on ne peut fonder une théorie scientifique ni sur l'évidence de ses principes (axiomatique, rationalisme logique) ni sur la seule conformité aux faits qui peut être toujours circonstancielle (empirisme, pragmatisme, généralisations empiriques). Une théorie se caractérise généralement par sa simplicité, sa généralité et par sa fécondité.

La vision postmoderne adopte une position relativiste. Ceci apparaît dans les propos de Firat et Venkatesh (1995) qui stipulent: "Le postmodernisme ne défend pas l'abandon des procédures scientifiques. Il défend simplement l'idée que la connaissance scientifique n'est pas la seule connaissance et que la science ne devrait pas prétendre sans cesse à la connaissance universelle. Traduite dans le champ du comportement du consommateur, cette idée signifie que nous devons opter pour de multiples théories du comportement du consommateur plutôt que pour une seule théorie qui annihile les autres." Les auteurs estiment que l'on devrait plutôt rechercher comment les théories peuvent répondre à diverses sortes de conjoncture plutôt que rester enfermées dans la recherche d'une théorie correspondant à la vérité. L'absence d'une théorie générale du marketing et la divergence sur les critères que devrait respecter une telle théorie ont conduit à voir le champ du marketing comme un domaine de connaissance dans lequel plusieurs théories partielles sont en compétition ou en alternance. Ces théories se concentrent sur quelques aspects particuliers du marketing sans prétendre apporter une explication complète et holistique.

4. Les différentes théories partielles du marketing

Carman (1980) donne six principales "vues du monde" en marketing : le paradigme microéconomique (étude de l'allocation des ressources sur un marché abstrait de pure concurrence), le paradigme de changement d'attitude/persuasion (information et persuasion du partenaire : entreprise ou consommateur), le paradigme de résolution de conflit, le paradigme de systèmes généraux (relations entre les institutions d'un système), le paradigme fonctionnaliste et le paradigme de l'échange social. Ce dernier comprend les éléments suivants : les buts du système, l'environnement et ses contraintes, les mécanismes de contrôle, les acteurs, les biens échangés et leur valeur, les coûts de transaction, le niveau d'information et les règles de fonctionnement de l'échange. Cette conception du marketing possède l'avantage de ne pas être trop centrée sur l'offre commerciale (combinaison des quatre p) et sur le consommateur.

Sheth, Gardner et Garrett (1988) présentent une liste exhaustive et mutuellement exclusive de douze écoles de pensée en marketing. Ces écoles sont classées par rapport à deux dimensions. La première oppose les écoles interactives et celles non interactives. La seconde distingue les écoles économiques de celles non économiques. L'école est considérée non interactive si l'accent est mis sur le point de vue des offreurs sans considérer les acheteurs. À l'inverse les écoles interactives mettent l'accent sur les relations d'interdépendance entre les vendeurs et les acheteurs. La classification des écoles en économiques et non économiques dépend du fait qu'elles soient basées sur des concepts économiques ou socio psychologiques. Chacune des écoles est évaluée par rapport aux critères métathéoriques, soient la structure, la spécification, la testabilité, le soutien empirique, la richesse et la simplicité.

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Schéma 2 : Classification des écoles de pensée en marketing (Sheth, Gardner et Garrett, 1988)

1. l'école de produit : Elle met l'accent sur la classification des produits, telle que celle proposée par Copland en produits de convenance, produit de magasinage et produits spécialisés.

2. L'école fonctionnelle : Elle met l'accent sur la conception et l'exécution des tâches nécessaires pour compléter une transaction, telles que l'assemblage, le stockage, l'assortiment, la mise en magasin, le partage de risque, l'arrangement, la vente et le transport. Les adhérents à cette école ont présenté plusieurs types de fonctions du marketing.

3. L'école régionale : Cette école se concentre sur le traitement de la séparation physique entre les vendeurs et les acheteurs. Les modèles mathématiques sont largement utilisés dans cette école afin d'analyser les marchés de détail et de déterminer les espaces à couvrir.

4. L'école institutionnelle : L'accent est mis dans cette école sur les organisations (telles que les intermédiaires) qui réalisent les fonctions marketing, sur les analyses économiques des changements et de l'évolution de ces organisations et de leur relation (telle que l'émergence des systèmes marketing verticaux).

5. L'école fonctionnaliste : L'accent est mis sur les travaux d'Alderson et de ceux qui ont intégré l'école fonctionnaliste en marketing.

6. L'école managériale : Cette école comprend les approches qui ont essayé d'intégrer la théorie économique dans la pratique marketing. L'accent est mis sur l'émergence et l'application des concepts managériaux, tels que le marketing mix, la segmentation de marché, le cycle de vie de produit et la stratégie de prix. Cette école est concentrée sur les concepts pertinents à la planification et la mise en œuvre de stratégies marketing.

7. L'école du comportement de l'acheteur : Cette école utilise les théories psychologiques et sociologiques pour décrire et comprendre les comportements des acheteurs. Ces derniers sont les consommateurs finaux. Les acheteurs industriels sont traités dans le cadre des relations inter organisationnelles.

8. L'école activiste : Elle est intéressée par les mouvements reliés à la protection des consommateurs, au contrôle des pratiques commerciales illicites et au développement de la satisfaction du consommateur.

9. L'école macro marketing : Cette école considère le marketing comme une institution sociale et elle se concentre sur l'interaction entre le marketing et la société.

10. L'école des dynamiques organisationnelles : Elle comprend les études sur les canaux de distribution en utilisant des concepts psychologiques et sociologiques, tels que le pouvoir, la coopération et le conflit.

11. L'école des systèmes : Elle fait référence aux recherches qui considèrent le marketing comme un sous-système de la société et définit les problèmes traités en marketing à travers les concepts et la structure de la théorie des systèmes.

12. L'école de l'échange social : Elle regroupe les théories qui essayent de structurer et d'expliquer le fonctionnement du marketing dans les termes de la théorie de l'échange social.

Conclusion

Cette recherche sur l'ontologie du marketing s'est concentrée sur l'identification des différentes perspectives de définition du concept marketing, de son objet d'étude fondamental et sur la problématique de la construction

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InteractiveNon interactive

Économique

Non économique

L'école du comportement de l'acheteur

L'école activiste L'école macro marketing

L'école de produit L'école fonctionnelle L'école régionale

L'école institutionnelle L'école fonctionnaliste L'école managériale

L'école des dynamiques organisationnelles

L'école des systèmes L'école de l'échange social

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d'une (ou de plusieurs) théorie(s) générale(s) du marketing expliquant d'une façon intégrée et globale son objet d'investigation.

Le concept marketing et son objet d'étude était définit comme étant :1. Une technologie managériale : Le marketing est un ensemble de techniques (segmentation,

positionnement, marketing mix) utilisées par les praticiens du marketing afin d'atteindre leur objectif et satisfaire leurs clients.

2. Un processus d'échange transactionnel : Le marketing gère (recherche, planifie et met en oeuvre) les épisodes de rencontres instantanées et à caractère économique entre vendeurs et acheteurs.

3. Un processus d'échange social : Le marketing est l'ensemble des processus de relations que développe la firme avec les différentes institutions du marché, telles que les fournisseurs, les intermédiaires, les concurrents pour ne citer que celles-ci. L'aspect social des processus d'échange est limité aux relations politiques de conflit, de pouvoir et de relations dyadiques entre la firme et les dites institutions. Ces relations prennent une perspective de long terme.

4. Un processus d'échange relationnel : Le marketing se charge de la relation individualisée, profonde, permanente dans le temps, de nature fondamentalement sociale et partiellement économique avec chacun des membres des réseaux d'échanges. L'échange couvre le partage d'informations, de ressources, de produits, de services ou d'expertises.

Chacune des définitions présentées possède une ou plusieurs théorie(s) générale(s) qui expliquent le phénomène marketing comme il a été définit. Toutefois, ces définitions ainsi que leurs théories ne sont pas capables de couvrir tous les aspects du marketing qui sont à la fois macro et micro, managériaux et sociétaux, générales et spécifiques. Ce manque a soulevé plusieurs critiques qui tâchent de montrer les défaillances de telles conceptions du marketing aux niveaux humain, holistique, éthique, historique et contextuel. Ces critiques se sont aussi adressées à la capacité des théories formulées de respecter les critères exigés d'une théorie scientifique. Enfin, le domaine du marketing a été décrit par le dénombrement des questions fondamentales généralement traitées et par les différentes théories ou approches partielles qui ont existées.

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