PDF Kant 1 Assise Ontologie Critique Chenet

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Filosofía

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  • E R.

    FRANOIS-XAVIER CHENET

    LASSISE DE LONTOLOGIE CRITIQUE

    Essais et Recherches

  • Ce texte est la republication dun ouvrage paru aux

    Presses Universitaires de Lille

    http://www.septentrion.com

    Les textes publis sont protgs par le droit dauteur. Toute reproduc-

    tion intgrale ou partielle faite sans le consentement de lauteur ou de

    ses ayants droit ou ayants cause est illicite.

    Chenet - Philopsis 2008

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  • E R.

    Lassise de lontologie critique

    CHAPITRE PREMIER

    PROLGOMNES

    Cest une opinion foncirement errone que la dduction trans-cendantale des concepts purs de lentendement constitue "la partie la plus prcieuse de la Critique de la raison", comme si les autres parties, lEsthtique transcendantale en particulier, avaient moins de valeur et taient en fin de compte superflues []. Lexprience fonder, au sens o la prend Kant, est la connaissance ncessaire et universelle des phnom-nes : elle prsuppose par consquent lexistence des phnomnes. LEsthtique transcendantale enseigne comment ces phnomnes naissent : elle constitue donc le fondement ncessaire et indispensable de lAna-lytique transcendantale et une partie galement prcieuse de la Critique . Kuno FISCHER, Kant und seine Lehre, 547.

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  • I. LEsthtique, assise de lontologie critique Sil est vrai que lEsthtique transcendantale de la Critique de

    la raison pure ne contribue pas directement la solution du pro-blme de lobjectivit 1 et que lon aurait certainement une autre ide de la connaissance si lAnalytique transcendantale avait t, daventure, perdue, elle nen est pas moins le lieu thorique auquel Kant renvoie invariablement chaque fois quil entend dfinir son concept doctrinal quil rduit la thse de phnomnalit 2. Linsistance de Kant lui-mme dfinir son Lehrbegriff par la dis-tinction du phnomne davec la chose en soi, lidalit de lespace et du temps et des phnomnes en eux, dment la thse que le phnomnisme nest pas laffaire essentielle du systme kantien 3, sur laquelle se fonde une certaine indiffrence exgtique lendroit de lEsthtique.

    Cest toute la Logique transcendantale qui repose sur lEsthtique. LAnalytique repose sur lacquis de lEsthtique 4, elle nest pas un nouveau commencement de la Critique de la raison pure, une science des rgles de lentendement en gnral se trou-vant faire suite celle des rgles de la sensibilit en gnral , la-quelle dterminerait les limites de lusage objectif des concepts, tout

    1. Cf. VLEESCHAUWER, Dduction, I, 77 ; HINDERCKS, Gegenstandesbegriffe, 58.

    2. Cf. KdrV, A 369 ; Ak.IV, 232 ; TP, 299 et A 490-491 / B 518-519 ; Ak.III, 338 ; TP, 372. ERDMANN, Kritiz., 63 sq, Prolegomena, XLIV et Kants Reflexionen, II, XXVI, XLV ; prcisons que si, pour Erdmann, le concept de lidalisme transcendantal renvoie exclusivement lEsthtique, il ne se confond aucunement avec celui du criticisme qui renvoie exclusivement lAnalytique. Kant utilise, depuis 1772, le terme de concept doc-trinal pour dsigner la thse de phnomnalit (cf. lettre Herz du 21 fvrier 1772, Ak.X, 129) et de fin 1773 (Ak.X, 143) ; ce nest toutefois pas le cas dans les RR 4953 (Ak.XVIII, 40) et 5037 (Ak.XVIII, 69 in Duisbourg, 156).

    3. Le phnomnisme, ou, comme on lappelle ordinairement, lidalisme, nest pas laffaire essentielle du systme kantien ; il ne constitue que la condition restrictive sous laquelle une connaissance dobjet est possible a priori . RIEHL, Kritiz., I, 1e d., 286. De mme, PAULSEN, Versuch, 147 sq ; ERDMANN, Prolegomena, LXVII.

    4. Cf. notamment HEIDEGGER, Chose, 156-157.

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  • comme lEsthtique dterminait celles de la forme pure de lintuition sensible 5, science par laquelle Kant aurait d, ou pu commencer, lAnalytique ne dpendant en rien de lEsthtique. La dduction transcendantale a pour principe la phnomnalit de lobjet de la connaissance : cest parce que les phnomnes ne sont pas des choses en soi, mais le simple jeu de nos reprsentations qui, en dfi-nitive, aboutissent aux dterminations du sens interne 6, ou, ce qui revient au mme, cest parce que les phnomnes ne sont que des consciences empiriques, que peut tre rsolue lnigme de la possibilit dune dtermination catgoriale a priori des objets. LEsthtique transcendantale ne constitue donc pas seulement la premire tape de la rvolution copernicienne en donnant com-prendre comment et pourquoi les objets peuvent se rgler sur lintuition 7, la seconde tape de cette rvolution nest possible que sur la base de la premire : les objets ne peuvent se rgler sur nos concepts, notre entendement ne peut tre le lgislateur de la nature que parce que les objets auxquels il a affaire ne sont pas les choses en soi, mais les objets de lintuition sensible, de simples reprsentations de la sensibilit. Lidalisme transcendantal est comme le souligne Vleeschauwer le commencement et la fin de la dduction 8.

    LEsthtique transcendantale a ceci de prcieux pour Kant quelle a ce rsultat, essentiel pour la mtaphysique, que les repr-sentations de la sensibilit nexpriment pas lobjet affectant et quelles ne font rien connatre des choses telles quelles sont en soi ou quespace et temps ne concernent pas ltre en soi, mais rien que la sensibilit humaine. Cest lanalyse mme de la sensibilit qui en-seigne prendre lobjet en deux sens et qui fonde, pour lessentiel, la distinction et labme entre le phnomne et la chose en soi. LEsthtique invalide lide que lobjet de la sensibilit soit lobjet en

    5. Est fallacieuse la prsentation par Kant lui-mme, certes , de lEsthtique et de la Logique transcendantales, comme sil sagissait de parties parallles et indpendantes (cf. A 52 / B 76 ; Ak.III, 75 ; TP, 77 et B 148 ; Ak.III, 118 ; TP, 124-125).

    6. KdrV, A 98 ; Ak.IV, 77 ; TP, 111.

    7. Cf. KdrV, B XVII ; Ak.III, 12 ; TP, 18-21.

    8. VLEESCHAUWER, Dduction, II, 384.

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  • gnral, lobjet comme tel. Il faut donc opposer lobjet de la sen-sibilit lide de lobjet tel quil peut tre en dehors de notre sen-sibilit et de toute sensibilit. Cette distinction a pour effet douvrir un champ, non certes la connaissance spculative, mais la mta-physique. LEsthtique a pour contenu le principe de son auto-limitation : elle exclut formellement que ses principes stendent tout, ce qui transformerait toute chose en simple phnomne. LEsthtique slve principiellement contre les prtentions abusives de la sensibilit porter sur ltre comme tel. Si la science de la sen-sibilit est bien, un certain gard du point de vue de lobjectivit , une apologie de la sensibilit, elle est la doctrine prcieuse de son in-validation, de sa disqualification mtaphysique : son objet ne se confond pas avec lobjet, son objet ne peut prtendre tre la chose mme.

    Pour navoir assurment voulu chercher et trouver ses preuves que dans lexplication de la connaissance synthtique a priori, lidalisme transcendantal a eu, pour une large partie, pour mobile essentiel un souci mtaphysico-thologique et thique, celui de sau-vegarder Dieu et la libert humaine 9.

    De multiples dclarations de Kant attestent de son souci thologique.

    Sil fallait considrer lespace et le temps comme des conditions de

    lexistence du monde en soi, si le monde noumnal ntait pas distinct du

    monde phnomnal, alors la causalit divine par rapport au monde serait aussi

    dtermine dans le temps, Dieu appartiendrait par consquent au monde. Sa

    causalit appartiendrait, de par le temps, une srie de causes et deffets ; Dieu

    donc comme tout ce qui forme un tout avec le monde, devrait tre contingent .

    [a]

    Les choses dans lespace sont toutes lies a priori la condition de lespace.

    Si celui-ci tait quelque chose en soi, il serait aussi ncessaire et Dieu aussi y

    serait li en ce qui concerne son existence . [b]

    Si jadmets que lespace est un tre en soi, le spinozisme est alors irrfutable, cest--dire que les parties du monde sont des parties de la divinit. Lespace est

    la divinit, il est unique, omniprsent, rien ne peut tre pens en dehors de lui,

    tout est en lui . [c]

    9. Ainsi Kant peut-il faire totalement limpasse sur lAnalytique transcendantale dans les Progrs.

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  • On ne peut penser un espace, un temps, sans penser simultanment un espace

    et un temps bien plus grands encore, et la reprsentation slve ainsi un uni-

    que objet, laquelle ne peut tre fonde que dans lintuition. Oui, si lespace et le

    temps taient des qualits des choses en soi, ils devraient aussi tre des propri-

    ts de Dieu. Car lespace est illimit, la dure dans le temps est galement sans

    limites. Lespace et le temps sont uns ; tous deux sont ncessaires par rapport

    lexistence de toutes choses. Ils sont des englobants universels lgard des ob-

    jets quils contiennent tous ensemble en eux. Ils sont ternels. Par consquent,

    comme la ralit des choses a Dieu pour fondement, ils devraient aussi pouvoir

    tre attribus Dieu et lhypothse du spinozisme consistait vritablement

    avoir pris lespace et le temps pour des choses en soi et pour des proprits de

    Dieu . [d]

    Si le temps tait la manire dtre des choses en elles-mmes, la causalit de

    la cause du monde serait aussi une causalit du commencement du monde dans

    le temps et il nexisterait donc pas de cause premire et ncessaire . [e] Si lespace tait la forme de rapports externes existant en soi, alors il pourrait

    exister plusieurs entia realissima . [f]

    Les antinomies et spcialement la quatrime imposent de dterminer pr-

    cisment la possibilit, ltendue et les limites de notre pouvoir de connaissance

    spculatif, afin que la philosophie picurienne ne sempare pas de tout le champ

    de la raison et quelle ne conduise pas leur ruine morale et religion [damit sich

    nicht epicurische Philosophie Moral und Religion zu Grunde richte]. [] De plus, espace et temps sont des dterminations a priori de lexistence des choses

    si ncessaires que sils taient des dterminations des choses en soi, il faudrait

    en faire, avec toutes les consquences qui sensuivent, non seulement des con-

    ditions de lexistence de ltre divin, mais, en raison de leur infinit, de leur n-

    cessit absolue, des proprits de ltre divin. Car, une fois quon en a fait des

    dterminations des choses en soi, il ny a aucune raison de devoir les restreindre

    aux seuls tres finis. Pour ne pas se contredire, la thologie se voit force [Die

    Theologie, damit sie sich nicht selbst widerspreche, sieht sich gentigt] den

    faire seulement la forme de notre sensibilit et de mettre sous toutes les choses

    que nous pouvons connatre, comme phnomnes, des noumnes que nous ne

    connaissons pas, mais en rapport avec lesquels seuls il y a de linconditionn.

    Or, comme on ne peut mettre fin au conflit entre les principes de lincon-

    ditionn dans la synthse et ceux du conditionn dans lespace et le temps, donc

    lantinomie de la raison, sans faire cette distinction entre les objets et leurs re-

    prsentations, la thologie conduit la critique esthtique [so fhrt die Theolo-

    gie auf die sthetische Kritik] . [g] 10

    10. Respectivement : [a] R 5962 (1785-1789), Ak.XVIII, 401. [b] R 6285 (1785-1788), Ak.XVIII, 552. [c] Meta. Plitz, Ak.XXVIII.2.1, 567. [d] Meta. K 3 [1794-1795], Ak.XXIX.1.2, 977. [e] Ak.XXIII, 81. [f] R 6429 (1785-1789), Ak.XVIII, 713 (cf. LEIBNIZ, P.S., VII, 373 : Si lespace tait une ralit absolue, bien loin dtre une proprit ou accidentalit oppose la substance, il sera plus subsistant que les subs-tances. Dieu ne le saurait dtruire ni mme changer en rien. Il est non seulement im-mense dans le tout, mais encore immuable et ternel en chaque partie. Il y aura une in-finit de choses ternelles hors de Dieu. ) [g] R 6317 (1790-1791 ?), Ak.XVIII, 623-

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  • Ni la Critique de la raison pure (et ce, ds sa premire di-

    tion), ni, a fortiori, la Critique de la raison pratique, nont cherch dailleurs masquer lenjeu : si espace et temps existent en soi comme conditions des choses, linfinit et lindpendance de Dieu sont menaces, on perd surtout tout moyen dchapper au spino-zisme et la ngation, ruineuse pour la morale, de la libert 11.

    La libert pose prcisment le problme suivant :

    Comment faire tenir ensemble le prdterminisme, suivant lequel des vne-

    ments quelconques ont leur raisons dterminantes dans le temps pass (lequel,

    lui et son contenu, ne se sont plus en notre pouvoir) avec la libert, suivant la-

    quelle laction aussi bien que son contraire doivent se trouver, dans linstant

    dans lequel laction se produit, au pouvoir du sujet : telle est la difficult . [a]

    La ralit du concept de libert entrane inluctablement la doctrine de

    lidalit des objets comme objets de lintuition dans lespace et le temps. Si

    ces intuitions ntaient pas, en effet, de simples formes subjectives de la sensi-

    bilit, si elles taient des formes des objets en soi, leur usage pratique, cest--

    dire les actions, dpendraient absolument du mcanisme de la nature et la liber-

    t, avec toutes ses consquences, la moralit, serait ananties . [b]

    La source de la philosophie critique, cest la morale, touchant limputabilit

    des actions . [c]

    629, ici 626-627. Texte plac sous le titre explicite : Von der Veranlassung der Kritik. SCHMUCKER ( Licht , 418) pense toutefois quil y a eu une volution dans la pense de Kant, largument thologique en faveur de lidalit de lespace et du temps napparaissant quaprs 1781. Mais Kant ne juge-t-il pas au 7, 3 de lEsthtique que, si la thse newtonienne a lavantage de laisser le champ des phnomnes ouvert pour les propositions mathmatiques, ses tenants sont singulirement embarrasss par les conditions despace et de temps, quand lentendement veut sortir de ce champ ? La RG IV ne dit rien dautre. Le souci davoir les moyens de soustraire Dieu laxiome de Crusius est trs prsent dans la Diss. (cf. 27) ; il est trs fortement affirm dans le commentaire de la Dissertation de 1770 qua donn Herz (cf. Betrachtungen aus der spekulativen Weltweisheit, 133-134). Linvestissement mtaphysique dans la ques-tion de la nature de lespace et du temps na rien de spcifiquement kantien (cf. HEIMSOETH, Der Kampf um den Raum, KOYR, Du monde clos lunivers infini). Les raisons incitant Kant rejeter Leibniz sont celles au nom desquelles Leibniz rejetait Newton !

    11. Mais Kant reconnaissant lui-mme aux physiciens mtaphysiciens leibnizo-wolffiens lavantage dchapper lembarras quand lentendement veut sortir du champ des phnomnes, comment imputer cette difficult la thorie leibnizienne ? Quoi-quelles soient attribues au ralisme transcendental en gnral, ces difficults ne vien-nent vritablement que du ralisme newtonien.

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  • Lhypothse commune, mais trompeuse de la ralit absolue des phnomnes

    montre aussitt son influence pernicieuse qui trouble la raison. En effet, si les

    phnomnes sont des choses en soi, on na pas sauver la libert [so ist Frei-

    heit nicht zu retten] [] lenchanement universel de tous les phnomnes dans

    un contexte de la nature tant une loi indispensable, cette loi devrait ncessai-

    rement renverser toute libert, si lon voulait sattacher obstinment la ralit

    des phnomnes. Aussi ceux qui suivent ici lopinion commune ne peuvent-ils

    jamais russir concilier la nature et la libert . [d]

    La difficult que pose la libert treint beaucoup plus fortement (uniquement

    en fait []), le systme dans lequel lexistence, qui peut tre dtermine dans le

    temps et dans lespace, est prise pour lexistence des choses en soi elles-mmes

    [] En fait si les actions de lhomme, en tant quelles appartiennent ses d-

    terminations dans le temps, ntaient pas de simples dterminations de lhomme

    comme phnomne, mais des dterminations de lhomme comme chose en soi,

    la libert ne pourrait tre sauve [so wrde die Freiheit nicht zu retten sein].

    [] Cest pourquoi je ne vois pas comment ceux qui persistent considrer le

    temps et lespace comme des dterminations appartenant lexistence des cho-

    ses en soi, veulent viter ici la fatalit des actions . [e]

    Si lon nadmet pas cette idalit du temps et de lespace, il ne reste plus que

    le Spinozisme, dans lequel lespace et le temps sont des dterminations essen-

    tielles de ltre primitif lui-mme, mais dans lequel aussi les choses qui dpen-

    dent de cet tre (et nous-mmes aussi par consquent), ne sont pas des substan-

    ces, mais simplement des accidents qui lui sont inhrents ; puisque si ces choses

    existent simplement, comme effets de cet tre, dans le temps, qui serait la

    condition de leur existence en soi, les actions de ces tres devraient aussi tre

    les actions que produit cet tre primitif, en quelque point de lespace et du

    temps . [f]

    Il est possible (lorsque nous admettons seulement lexistence dans le temps comme quelque chose qui vaut seulement pour les phnomnes, non pour les

    choses en soi), daffirmer la libert sans compromettre le mcanisme naturel

    des actions comme phnomnes [] Il en serait tout diffremment si les tres

    du monde existaient dans le temps comme choses en soi, car alors le crateur de

    la substance serait en mme temps lauteur de tout le mcanisme de cette subs-

    tance. Telle est limportance de la sparation [Absonderung] opre dans la Cri-

    tique de la raison pure spculative entre le temps (comme entre lespace) et

    lexistence des choses en soi . [g] 12

    12. [a] Ak.VIII, 49-50a. La solution dont Kant sest dabord satisfait dans la Dilucidatio lui apparat dsormais comme un misrable subterfuge, cette libert ne vaudrait gure mieux que celle dun tourne-broche ou dun automate de Vaucanson (cf. Raison prati-que, Ak.V, 101-102, tr. Picavet, 107). [b] Lose Bltter, d. Reicke, I, Knigsberg, 1889, 217. [c] Progrs, Ak.XX, 335, tr. Guillermit, 101. [d] KdrV, A 536-537 / B 564-565 ; Ak.III, 365 ; TP, 396-397. [e] Raison pratique, Ak.V, 100-101, tr. Pica-vet, 106-107. Les adeptes du ralisme spatio-temporel sont doublement nocifs : 1/ ils ruinent lindpendance des actions des cratures, toutes les actions deviennent indirec-tement des actions de Dieu mme : Lhomme serait une marionnette ou un automate de Vaucanson, faonn et mis en mouvement par le matre suprme de toutes les u-

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  • *

    LEsthtique transcendantale a pour premier effet de prserver un espace pour la mtaphysique, de laisser en droit un sens ce dont la connaissance spculative nous est certes interdite, mais cette po-lice ngative de la mtaphysique saccompagne dune police posi-tive, ou plutt, elle savre tre rellement une police positive : si lEsthtique napprenait prendre lobjet en deux sens, si lobjet des sens tait lobjet en soi, ou si, ce qui revient au mme, la sensibilit tait essentiellement expressive , matrialisme, fatalisme, athisme et autres maux de ce genre seraient notre lot. LEsthtique en pr-serve : elle coupe la racine tout ce qui menace la mtaphysique, elle autorise seule toutes ces hypothses transcendantales , licites certes exclusivement dans lusage polmique, jamais dans lusage dogmatique, mais que lon peut, au moins, toujours lever bon droit pour se dfendre contre les prtentions matrialistes 13 ; cest

    vres dart . 2/ Ils compromettent linfinit et lindpendance de Dieu : il faut dnoncer la contradiction dans laquelle ils tombent, quand ils considrent lexistence dans le temps comme la dtermination ncessairement inhrente aux choses finies en elles-mmes ; car Dieu est la cause de cette existence, mais il ne peut cependant tre la cause du temps (ou de lespace) mme (parce que le temps doit tre suppos comme condition ncessaire a priori de lexistence des choses), et par consquent sa causalit, par rapport lexistence de ces choses, doit tre conditionne, mme suivant le temps, et ainsi doivent invitablement se produire toutes les contradictions avec les concepts de son infinit et de son indpendance . On a dans cette dernire vue la raison dtre de la RG IV. [f] Raison pratique, Ak.V, 101-102 ; tr. Picavet, 108. [g] Raison prati-que, Ak.V, 102 ; tr. Picavet, 109. KAULBACH va mme jusqu tenir la dcouverte de la possibilit de sauver la libert grce la distinction de la sensibilit et de lentendement pour la grande lumire de 69 (cf. Metaphysik des Raumes, 111) mais rien, dans la Dis-sertation, ne vient tayer cette thse. Le 27 o Kant dnonce laxiome subreptice de la premire classe ( tout ce qui est, est dans un lieu et dans un temps ) voque sans dramatisation excessive, pour ce qui est de lespace, les problmes du sige de lme et de la reprsentation dune prsence locale de Dieu, et, pour ce qui est du temps, le la-byrinthe inextricable dans lequel on sengage lorsque lon en fait une condition de lexistence mme de Dieu (Kant nindique ici toutefois que des problmes relativement mineurs, choix du moment de la cration et conception de la prescience divine). Cest mutiler luvre de Kant que de ne lui accorder quune vise mme principalement er-kenntniskritisch.

    13. KdrV, A 777 sqq / B 805 sqq ; Ak.III, 506 sqq ; TP, 527 sqq. LEsthtique lve lhypothque que fait peser le ralisme absolu de lespace et du temps sur les noncs du spiritualisme, au moins autant, sinon plus, que lobstacle que reprsente lextension

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  • lEsthtique qui sauve la possibilit de la libert, dfaut de ltablir dogmatiquement et sur le plan spculatif. Lhypothse commune, mais trompeuse de la ralit absolue des phnomnes exerce linfluence la plus pernicieuse sur la raison. LEsthtique transcen-dantale, o cette hypothse commune trouve sa rfutation, a un double et considrable rsultat : elle permet, dune part, dchapper au scepticisme ruineux qui nat de la considration des antinomies de la raison en matire cosmologique, antinomies qui sont invita-bles si lon ne peut parler de lobjet quen un seul et mme sens, si thses et antithses mathmatiques parlent de lobjet en soi et si th-ses et antithses dynamiques parlent du mme objet, parlent lune et lautre de lobjet en gnral, ce qui est forcment le cas si nous navons pas motif entendre lobjet en deux sens ; elle rend, dautre part, seule possible une alternative au moins pensable au spinozisme, doctrine de la fatalit des actions humaines et de lunicit de la substance dans lequel Kant voit la philosophie quasi oblige, la phi-losophie par excellence du ralisme spatio-temporel 14. Quelque rle que puisse jouer assurment lAnalytique dans la solution des antinomies dynamiques 15, cest sur la seule Esthtique que sappuie le principe (qui est au fondement de la solution de lantinomie) quespace et temps ne sont pas des proprits de la chose, mais du phnomne ; principe qui permet, dans le cas des antinomies ma-thmatiques, dcarter thses et antithses en tant quelles prten-dent dterminer ce qui nest que phnomne comme sil sagissait dune chose en soi, et, dans le cas des antinomies dynamiques, de concilier thses et antithses parce quelles peuvent tre vraies en mme temps pourvu quelles puissent porter sur des objets diff-rents. LAnalytique ne se trouve ni au principe de la solution des an- des principes de lexprience possible la possibilit des choses en gnral (cf. A 393 sq ; Ak.IV, 246 sq ; TP, 317-318).

    14. Telle est limportance de la sparation opre dans la Critique de la raison pure spculative, entre le temps (comme entre lespace) et lexistence des choses en soi . Raison pratique, Ak.V, 102, tr. Picavet, 109.

    15. Il est clair que si le principe de causalit ntait pas une simple condition de lunit de lexprience, mais tendait en droit son empire la chose en gnral, on ne gagne-rait rien dans la lutte contre le spinozisme pouvoir distinguer entre la chose comme phnomne et la chose comme objet en soi.

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  • tinomies proprement mathmatiques, ni au fondement de la dis-tinction de lobjet comme phnomne et comme chose en gnral, distinction qui constitue le principe de la solution de lantithtique en gnral 16.

    LEsthtique transcendantale constitue la vritable assise de la Critique. Sy trouve, au minimum, tabli : que lespace et le temps ne peuvent convenir, en quelque sens que ce puisse tre, aux choses en elles-mmes, que la rceptivit de notre pouvoir de connaissance a des formes a priori (lespace et le temps), que lapriorit des juge-ments pourtant synthtiques de la mathmatique tire sa seule expli-cation possible de ce quelle repose sur lintuition a priori de lespace et du temps, que rien de ce que nous connaissons dans lintuition ne peut tre considr comme une chose en soi et que la connaissance sensible est incommensurable avec toute connaissance des choses en soi : il y a un abme entre le phnomne et la chose en elle-mme.

    Kant y pose la ngation radicale de lespace et du temps comme prdicats ontologiques, laffirmation inoue de lexistence dune sensibilit a priori ; le nexus spculatif entre le sensible et la posteriori, lintellectuel et la priori sy trouve dnou pour la pre-mire fois. Il y donne une thorie du fondement de la connaissance mathmatique en mme temps que son invalidation ontologique (la mathmatique nest pas une science de ltre et cest pour cela quelle est une science !) ; il y distingue radicalement la connais-sance sensible davec une connaissance ontologique relative aux choses en soi, il y assigne la connaissance sensible quelque chose qui nest pas ltre.

    En enseignant que nous ne saurions faire des conditions particulires de la sensibilit des conditions de la possibilit des cho-ses, mais seulement de leur manifestation phnomnale , cest--

    16. On ne travaille pas ici minimiser lapport de lAnalytique transcendantale. Esthti-que et Analytique ne doivent pas tre considres comme les deux plateaux dune ba-lance dont lun ne pourrait monter que si lautre descendait. Lapport complmentaire de lAnalytique reste essentiel : les antinomies dynamiques rsultent de ce que nous consi-drons les phnomnes des sens comme des choses en soi et de ce que nous accep-tons les principes de leur liaison comme ayant une valeur universelle pour les choses en soi et non simplement pour lexprience (cf. Prol., 52 a).

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  • dire que nous ne saurions riger les conditions de notre intuition nous autres hommes en conditions dintuition sensible de tous les tres finis pensants, ni a fortiori les conditions de lintuition sensi-ble en conditions de lintuition en gnral, ou encore faire des conditions de la rceptivit de notre connaissance des conditions de ltre, lEsthtique donne lontologie 17 critique sa premire ex-pression et sa vritable assise. Sans doute nest-elle pas acheve par l et reste-il tablir que nous navons pas davantage le droit de faire un usage transcendantal de nos catgories en prenant les conditions de lexprience possible pour des proprits des choses ; sans doute reste-t-il parachever cette ontologie critique par une critique de la mtaphysique spciale en montrant que nous navons pas le droit de faire un usage (constitutif) transcendant des ides de la raison. Mais, outre le rle dcisif que joue lEsthtique en car-tant lespace et le temps de ltre et en dissociant ainsi le phno-mne de ltre, cette invalidation ontologique des principes de la sensibilit a ouvert la voie celle des principes de lentendement, raison pour laquelle Kant peut voir dans la Dissertation de 1770 le vritable commencement de son uvre critique 18, quelque dogma-tique que soit pourtant dans ce texte sa conception de lentende-ment et si loigne quelle soit donc encore du vritable point de vue critique. Sil est vrai que seule lAnalytique transcendantale peut accomplir la rvolution copernicienne, lEsthtique la prfi-gure, linaugure et la rend mme, seule, possible : on ne peut en-visager, en effet, que les objets puissent se rgler sur les concepts de lentendement que si lon a tabli au pralable que lobjet auquel nous avons affaire se rgle sur la nature de notre pouvoir dintui-

    17. Esthtique et Logique transcendentales sont les deux parties constituant la philo-sophie transcendantale ou ontologie (Meta. von Schn, seconde moiti des annes 80, Ak.XXVIII.1, 470). Lontologie est la science qui contient les concepts a priori pour la connaissance des choses. On lappelle aussi philosophie transcendantale. [] Lontologie ne reprsente que les objets auxquels peut tre adquat un objet de lexprience (Meta. Dohna, 1792-1793, Ak.XXVIII.2.1, 617).

    18. Cf. lettre Tieftrunk du 13 octobre 1797. Si la distance thorique entre la Critique et la Dissertation de 1770 est bien connue et reconnue, celle entre lEsthtique et les sec-tions II et III de la Dissertation est loin de ltre.

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  • tion, que si lon a dabord rduit ces objets ntre que de sim-ples reprsentations de la sensibilit ou phnomnes.

    II. Rdaction et composition On ne connat pas de brouillon de lEsthtique 19 et lon ne

    peut rien avancer sur sa premire rdaction. Les indices sont trop minces pour risquer lhypothse que lexposition du temps ait pu prcder celle de lespace 20, quoique lon puisse sexpliquer ainsi que le nerf de largumentation dans le quatrime numro de lexpo-sition de lespace ne soit pas formul et, dans une moindre mesure, que Kant ait omis de prciser dans le deuxime numro, comme il le fait pour le temps, que la ncessit de lespace tait entendre lgard des phnomnes 21.

    Il faut accorder Adickes que les deux derniers alinas du 7 sont un ajout qui nest pas en rapport logique avec les remarques qui prcdent et qui constituent effectivement une Erluterung, 19. On peut toutefois considrer, dans lordre, les analyses de la lettre Herz du 21 f-vrier 1772 que reprennent les deux premiers alinas du 7, la R 4673, de la priode 1774-1775, Ak.XVII, 636-642 (in Duisbourg, 99-109), la leon Raum und Zeit de la Me-ta. L 1 (cf. Ak.XXVIII.1, 177-181), enfin une partie de la R 5637, Ak.XVIII, 268 sqq, pr-lude la dmonstration de lapodicticit de lEsthtique en A 46-49 / B 64-66.

    20. La Dissertation exposait dabord le temps et on ne voit pas que lexposition de lespace prenne le pas dans les textes qui prfigurent lEsthtique (la R 4673 ou la leon Raum und Zeit). La rdaction des consquences du temps ne peut avoir prcd celle de lespace, Kant sappuyant sur ce qui a t dit de lidalit transcendantale et du ra-lisme empirique de lespace.

    21. Si le nerf de largument nest donn qu propos du temps, la thse nonce nest pleinement comprhensible que dans le numro correspondant de lespace : il faut comprendre, en effet, non simplement que le temps nest pas un concept discursif ou universel (comme Kant semble le dire), mais, prcisment, quil nest pas un concept universel de rapport des choses en gnral . Kant poursuit paradoxalement la symtrie parfaite dans les expositions et la varit dans les noncs et il sy prend de telle faon que tout se passe souvent comme sil fallait chercher le sens des noncs relatifs lespace en faisant lexgse des noncs correspondant relatifs au temps et rcipro-quement.

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  • conformment au titre de la rubrique, mais il nest pas vident quils aient t crits aprs lintroduction. Les deux alinas consti-tuant lExplication proprement dite ont un rapport troit avec les objections formules lencontre de la Dissertation de 1770, lemploi du mot Idealismus sans autre prcision dans le deuxime alina tmoigne du caractre trs antrieur de la rdaction du pas-sage. Le troisime alina reprend presque mot mot le 15, D de la Dissertation. Considrant, dune part, que si les premires remar-ques gnrales avaient dj t crites lors de la rdaction des der-niers alinas du 7, ceux-ci leur auraient t annexs plutt que dtre aussi arbitrairement insrs dans le 7, et, dautre part, que la limitation de la sensibilit aux phnomnes sy trouve au premier plan, Adickes en conclut quelles ont t composes au moment o Kant se proccupait de la dialectique et inclinait lidalisme ; mais nous ne voyons pas de raison de le suivre.

    Ne parat pas non plus retenir la thse dAdickes selon la-quelle les allusions la nature synthtique des propositions sur lespace et le temps ne feraient pas partie de ltat originel du texte et seraient postrieures lintroduction, thse qui se fonde notam-ment sur la construction bizarre dun membre de phrase du 6 a, qui trahit un ajout postrieur (und a priori durch synthetische Stze erkannt und angeschaut werden), mais surtout sur lide que la na-ture synthtique des propositions na rien voir avec lintuition a priori qui motive le rejet de la conception du temps comme dtermination ou ordre inhrent aux choses elles-mmes 22. Le caractre synthtique des axiomes de lespace et du temps joue demble un rle fondamental de preuve de lidalit de ces repr-sentations. Dj dans le Manuscrit de Duisbourg, au-del duquel on ne peut faire remonter la rdaction de lEsthtique, Kant crit que la preuve que lespace est une condition subjective, cest que les propositions portant sur lui sont synthtiques et que des objets peu-vent par l tre connus a priori. Ce serait impossible si lespace ntait pas une condition subjective de la reprsentation de ces ob-jets 23. Les vues dAdickes reviennent soutenir que lEsthtique a 22. ADICKES, Kants KdrV, 81-82. VAIHINGER, II, 264-265, 391.

    23. R 4674, Ak.XVII, 645 ; tr. 20.

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  • t compose sur les mmes bases que la Dissertation. Cela tant, il faut reconnatre que ladjectif synthtique est tonnamment peu prsent dans les six premiers paragraphes : il ne figure que dans le quatrime numro de lexposition du temps et dans la consquence a du temps. Il figure davantage dans la suite : deux fois au troisime alina de lErluterung et six fois dans le dernier alina des remar-ques gnrales ; soit, au total, dix occurrences en A, contre dix-sept en B.

    *

    Il ny a pas de raisons de tenir lEsthtique transcendantale

    pour un corps tranger la Critique, dont la rdaction serait signifi-cativement antrieure la Logique transcendantale, Kant y expri-mant un point de vue quil aurait par la suite dpass. On trouve certes quelques archasmes dans lEsthtique qui peuvent inquiter. Il sagit principalement des formules suivantes : dans les Consquen-ces de lespace : wenn sie durch die Vernunft an sich selbst erwogen werden (A 28 / B 44) ; dans le troisime alina du 7 : wenn sie von Gegenstnden nicht als Erscheinungen, sondern blo im Verhltnis auf den Verstand urteilen wollen (A 40 / B 57) ; dans la premire des remarques gnrales, au quatrime alina : den Unterschied der Sinnlichkeit vom Intellektuellen blo als logisch betrachtete (A 44 / B 61). A quoi sajoutent lobservation faite dans le dernier alina des consquences du temps : des proprits qui appartiennent aux choses en soi ne peuvent jamais, dailleurs, nous tre donnes par les sens et le jugement port sur la thorie newtonienne de lespace, dans le troisime alina du 7, comme si elle tait acceptable du point de vue des intrts de la mathmatique, mais seulement m-taphysiquement inacceptable.

    Nous examinerons pour quelle raison les choses en soi ne peuvent jamais tre donnes et connues par les sens. Cette thse peut tre discute, mais elle ne peut certainement pas tre juge pr-critique. Nous tudierons ultrieurement la question de lapparente dissymtrie dans les raisons avances dans la Critique pour rejeter les conceptions newtonienne et leibnizienne de lespace et du temps. Arrtons-nous, pour lheure, sur les formules litigieuses : que veut

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  • prcisment dire Kant lorsquil affirme lidalit de lespace par rap-port aux choses, quand elles sont examines en elles-mmes par la rai-son ? Aux choses pour la sensibilit, il semble opposer les choses pour la raison et prter cette dernire laptitude connatre les choses en soi. Kant dirait ici, en croire Vaihinger, que les choses sont spatiales, en tant quelles sont des objets de la sensibilit ; elles ne sont pas spatiales, en tant quelles sont des objets de la rai-son 24. Cette faon de voir correspondrait celle en vigueur dans la Dissertation o les sensibilia et les intelligibilia sont opposs de cette manire. Figureraient dans lEsthtique, ici comme dans dautres passages 25, des vestiges palontologiques dune tape rvolue du dveloppement de la pense kantienne. Il est penser que, si vestige il y a, il est davantage dans lexpression que dans la pense. Le fait que Kant utilise ici une formule que lon dirait ti-re de la Dissertation de 1770 ne suffit prouver ni que lEsthtique a t rdige une poque o Kant ne stait pas encore dpris de lillusion dun usus realis de lentendement, ni quil y pense en 1781 a fortiori encore en 1787 o la formule est tout de mme, de fait, reconduite toujours la mme chose. On peut dautant moins limputer une proximit thorique de lEsthtique avec la Disserta-tion, un retard de lEsthtique sur la Critique, que lon trouve des formules similaires plus dun endroit de la Critique et dans des uvres ultrieures 26. Il convient davantage dy voir la permanence dun strotype verbal nexcluant pas le renouvellement radical de la pense. Kant ne cessera pas de parler des choses telles quelles sont devant lentendement ou telles quelles sont examines par la raison, dutiliser des formules datant de la Dissertation sans quil faille com-prendre autre chose que la chose en elle-mme , la chose en g-nral , la chose en tant quelle nest pas objet de lintuition sensi-ble, la chose abstraction faite de la sensibilit. La formule est peut- 24. VAIHINGER, II, 354.

    25. Cf. au 7, 3 et dans le 4me alina des RG I.

    26. Par exemple, der pure Verstand (Prol., 13) ; was durch den Verstand als zu Sa-chen an sich gehrig betrachtet werden kann (Bemerkungen, Ak.VII, 154). Les Progrs opposent la srie des conditions considre comme objet de la sensibilit ou comme objet de la seule [bloen] raison (cf. Ak.XX, 328 ; tr. Guillermit, 94).

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  • tre malheureuse, mais elle ne permet pas de prter ici Kant la croyance rmanente que la raison connat les choses en soi. Ce pas-sage ne signifie rien dautre que ce que dit Kant au deuxime alina du 7 : la chose peut tre considre sous deux rapports. Sous lun, elle est considre en elle-mme, indpendamment de la manire de lintuitionner, rapport sous lequel sa nature reste toujours probl-matique ; sous lautre, on la considre en ayant gard la forme de lintuition.

    La formule juger des objets, non comme phnomnes, mais, simplement dans leur rapport lentendement , nest pas da-vantage imputable la survivance du point de vue prcritique quelle nest la preuve que lEsthtique de la Critique de 1781 a t compose peu aprs 1770. On pourrait certes y trouver une nou-velle raison de douter que ce passage soit contemporain du restant de lEsthtique ou de juger que lEsthtique elle-mme est fondamen-talement prcritique, du point de vue dont elle procde ou quelle actualise sinon dans le moment de sa rdaction. On doit certes convenir que subsistent dans lEsthtique des formules archaques, mais faut-il qu larchasme des formules corresponde toujours et ncessairement un archasme dans la pense mme ? Il nest pas vraisemblable que juger des objets [] simplement dans leur rap-port avec lentendement puisse signifier ici autre chose que dans lalina prcdent, savoir : considrer lobjet en lui-mme, ind-pendamment de la manire dont nous lintuitionnons. Le problme vient ici seulement de ce que Kant persiste et persistera dans toute la Critique appeler objet pour lentendement tout en ayant renon-c attribuer lentendement un objet lobjet tel quil est indpen-damment de tout rapport avec le sujet, la spontanit de lenten-dement excluant par principe toute dpendance lgard dune dis-position spciale du sujet et servant pour cette raison de modle de la connaissance de lobjet tel quil est en soi.

    La formule den Unterschied der Sinnlichkeit vom Intellek-tuellen blo als logisch betrachtete noffre rien de dcisif pour recu-ler dans le temps la date de rdaction de lEsthtique. Kant ncrit-il pas Bernoulli, le 16 novembre 1781, die Sinnlichkeit unseres Er-

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  • kenntnisses [] vom Intellektuellen unterscheiden ? 27 Les archas-mes stylistiques que lon trouve dans lEsthtique nont rien de signi-ficatif ; ils ont t reconduits lors de la rvision du texte en 1787 et ils persistent bien au-del dans la Critique et dans luvre 28. Sil y a comme un faux jour jet par lEsthtique sur nombre de problmes, et sil est exact que, si nous ne possdions que lEsthtique de la Cri-tique de la raison pure, nous nous ferions une ide assez diffrente de la connaissance de celle que la Logique transcendantale en donnera, la Logique nest pas, pour autant, une palinodie de lEsthtique, compose bien aprs elle et leve sur un tout autre socle thorique.

    Il est incontestable que si la rdaction de la Critique, fut luvre de quelques mois, sa conception et sa composition se sont tales sur quelque dix annes et quelle est constitue de dveloppe-ments loin dtre tous spculativement contemporains. Il nest donc pas principiellement absurde denvisager que lEsthtique ait t r-dige trs antrieurement. Kant a utilis pour la rdaction de la Cri-tique des matriaux de dates, dorigines et dintentions fort diffren-tes ; malgr le projet architectonique dont elle se rclame, la Criti-que nest pas une uvre issue dun projet unique et clos ; mais elle nest en aucun cas assimilable un patchwork et il nest pas pensable quune partie aussi essentielle que lEsthtique ne soit pas lheure thorique de la Critique. Quand elle aurait t rdige trs antrieu-rement la Logique transcendantale, quand on en ferait remonter, invraisemblablement, la rdaction une poque o Kant ignorait encore le problme proprement critique et la fonction daperception 27. Ak.X, 260. Il est vrai que Kant voque dans cette lettre la Dissertation de 1770.

    28. Ces formules ont t maintenues en 1787 et lon en trouve danalogues dans la Cri-tique. Cf., en B mme, je me connais moi-mme [] non pas tel que je suis devant lentendement [Verstande], mais tel que je mapparais moi-mme (B 155 ; Ak.III, 122 ; TP, 133) ; si jenvisage toutes les choses non comme phnomnes, mais comme choses en soi, et comme objets du simple entendement [des bloen Verstan-des] (A 206 / B 251-252 ; Ak.III, 177 ; MD, 938 ; TP, 192 donne ici une traduction aberrante) ; cf. dans la critique du quatrime paralogisme : le raliste transcendantal se reprsente donc les phnomnes extrieurs [] comme des choses en soi [] qui se-raient donc hors de nous, suivant les concepts purs de lentendement [Verstandesbe-griffen] (cf. A 369 ; Ak.IV, 232 ; TP, 299) ; regarder des phnomnes comme des choses en soi et aussi comme des objets donns au simple entendement [dem bloen Verstande] (A 500 / B 528 ; Ak.III, 344 ; TP, 377).

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  • de lentendement avant 1774-1775 donc, puisque le point de vue critique y est dsormais atteint , resterait quil la insre dans la Critique, quil en a fait la premire partie de la thorie transcen-dantale des lments en 1781 et quil la reconduite, dans cette fonction et dans ses thses, en 1787 ; mme admettre des scories rsiduelles, elle doit donc se trouver essentiellement lheure tho-rique de la Logique transcendantale 29.

    * En mars 1786, Hartknoch avise Kant que la premire dition

    de la Critique est puise et le prie den prparer une seconde. En raison de ses occupations 30, il fallut Kant, pour ce travail, beau-coup plus de temps quil ne le prvoyait. LEsthtique ayant t re-travaille et considrablement augmente, lon ne peut luder la question prjudicielle de savoir sil ne conviendrait pas, en bonne mthode, dtudier sparment et successivement les textes de 1781 et de 1787. Mais, quoique lEsthtique ait t amplifie et corrige dans la deuxime dition, elle ne la pas t au mme point que lAnalytique, mais plutt la faon dont la t lIntroduction : elle a davantage t amplifie (ajout des expositions transcendantales et de trois remarques gnrales, le texte saccroissant de dix pages 31) que rcrite. Les diffrences entre les deux ditions napparaissent pas

    29. Il faut reconnatre que certains passages ont une parent troublante avec la Disser-tation, ainsi une partie du 7, 3 (cf. 15, D), et que la diffrence apparente des motifs pour lesquels le temps absolu et le temps comme dtermination ou ordre inhrent aux choses elles-mmes sont rcuss (cf. 6 a et 7, 3) serait propre faire douter que le point de vue de la Dissertation soit effectivement surmont. Mais il nest pas de bonne mthode de projeter sur lEsthtique le texte de la Dissertation (on nabusera donc pas des rapprochements et on vitera les explications de lEsthtique par la Dissertation) ; des passages qui semblent emprunts la Dissertation se rvlent trs diffrents (ainsi les vues du 7 de la Diss. et du troisime alina des RG I).

    30. Lettre Bering du 7 avril 1786, Ak.X, 418. Kant devint recteur le 23 avril. La mort de Frdric II alourdit ses obligations protocolaires. Si lon en croit Hamann, il se mit sans dlai luvre ; il aurait envoy son manuscrit limpression fin janvier et il travaillait encore en mars la prface quil achve la mi-avril.

    31. A 19-49 / B 33-73.

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  • telles que lon ait affaire quelque chose comme deux Esthtiques transcendantales que le commentaire devrait donc envisager de fa-on soigneusement spare.

    LEsthtique prsente, en 1781, un nombre trs restreint de divisions : aprs un expos liminaire dnu de titre (dont Kant fera en 1787 le 1, sans titre non plus), souvre une Premire section : De lespace comportant deux parties, dont une seule est indique, la seconde, par le titre de Consquences des concepts prcdents. Souvre alors la Deuxime section : Du temps qui stend juqu la fin de lEsthtique. Elle comporte de fait quatre parties, la premire ne re-oit aucun titre, la seconde est indique par le titre de Consquences tires de ces concepts ; la troisime porte le titre dExplication et la dernire celui de Remarques gnrales sur lEsthtique transcendantale 32. Ldition de 1787 comporte deux innovations dans la prsenta-tion : lintroduction dune division en paragraphes numrots et le recours plus systmatique des titres. Il semble que la raison pour laquelle Kant substitue lexpos continu de la premire dition une division en paragraphes numrots soit son dsir daider la lecture de luvre, de faciliter les rfrences et de rpondre aux desi-derata du public philosophique. De fait, depuis Leibniz, la philo-sophie allemande (Wolff, Baumgarten, Crusius, Tetens, etc.) y re-court rgulirement ; Kant lui-mme le fait dans la Dissertation et il composera les Prolgomnes sous cette forme, avant que Schtz nmette, en 1785, le regret que Kant nait pas observ cette bonne habitude des philosophes 33 ; la marche libre de lexpos dans la Critique ntait pas conforme aux habitudes du temps : Schwab lui en fera encore grief dans sa Preisschrift 34.

    La structure gnrale en deux parties (De lespace / Du temps), aprs un paragraphe dintroduction, est conserve en 1787, mais dautres divisions viennent recouvrir celles de 1781. Kant y intro-duit une division en paragraphes numrots de 1 8, dots de titres ( lexception du premier), certains tant emprunts aux sous-

    32. Au pluriel ds 1781.

    33. SCHTZ, Recension des Erluterungen de Schultz, ALZ, III, 41.

    34. SCHWAB, Fortschritte, 132-134.

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  • divisions de 1781, dautres tant nouveaux. Il ne sest pas astreint la tche dune prsentation en paragraphes dots de titres avec un soin excessif. Cest ainsi quen ce qui concerne lEsthtique, il a laiss en 1787 le premier paragraphe sans titre ; il a plac lintrieur du 2, cens tre une exposition mtaphysique de lespace, tout un ali-na de prsentation qui ne rpond pas cette dfinition ; il a laiss subsister lintrieur de lexposition transcendantale de lespace ( 3) les Consquences des concepts prcdents (alors quil fait, avec raison, de lexpos symtrique consacr au temps un paragraphe part en-tire, le 6) ; il a plac sous la mme rubrique du 7 deux parties absolument htrognes. Il nest pas sr que ce nouveau mode de prsentation constitue un progrs aussi substantiel que lestime Co-hen 35.

    Au nombre des diffrences majeures entre les deux tats du texte, il y a tout dabord le ddoublement de lexposition des concepts despace et de temps en une exposition mtaphysique et une exposition transcendantale qui saccompagne logiquement de labandon du troisime numro de lexposition de lespace, le troi-sime numro du temps ne subsistant que par inconsquence 36. Il y a ensuite la rdaction de trois remarques gnrales supplmen-taires, contribuant ajouter six pages lEsthtique. A cela sajoutent diverses corrections, allant de minimes modifications la rcriture complte 37, en passant par des remaniements 38 ou des prci- 35. COHEN, Erfahrung, 217. La division en paragraphes, pratique avec ngligence, entretient plus la confusion quelle ne permet une vue densemble, juge ADICKES (Kants KdrV, 75).

    36. Labandon du n 3 aurait d saccompagner dun remaniement du n 4 qui lui est homogne dans sa seconde partie (et qui aurait pu faire, en A, lobjet dun numro dis-tinct). De mme que la certitude apodictique de la gomtrie repose sur la ncessit a priori de lespace, le caractre synthtique de tous les principes gomtriques repose sur le fait que lespace est une intuition a priori. Linsertion de lexposition transcen-dantale na peut-tre pas aussi dramatiquement gt le texte que le pense Vaihinger, mais son troisime alina anticipe, pour le moins, sur la consquence b de lespace. Lexposition transcendantale rend par ailleurs quelque peu superftatoire la seconde partie des RG I (que Kant maintient en B en la prsentant comme un claircissement de lexposition transcendantale).

    37. Cf. dernier numro de lexposition de lespace ; consquences de lespace, 4me alina.

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  • sions 39. Signalons quil court quelques lgendes, au moins trois, concernant les modifications opres sur le texte en 1787 40.

    Quels objectifs ont poursuivi ces remaniements et compl-ments ? Peu clairante et plutt dconcertante, en vrit, est la d-claration de la prface de 1787 dans laquelle lessentiel des correc-

    38. Cf. 1, 3, modification de la dfinition de la forme du phnomne ; note 1, 5 : modification pour laccorder avec la dcouverte quune science du got possde des principes a priori ; cf. 4, n 5 : modification du contenu de la parenthse explicative.

    39. Dans le 1, 1, deux prcisions : uns Menschen wenigstens et vermittelst ge-wisser Merkmale .

    40. Lajout effectif de neben einander dans le n 1 de lexposition mtaphysique de lespace na rien dune rectification, dun remords. En A, Kant ne parle que dextriorit rciproque entre les choses, en B il fait mention de leur juxtaposition, souligne VUILLE-MIN : Kant ajoute le mot "nebeneinander". Lextriorit spatiale implique la juxtapo-sition. Kant loppose ainsi la simple succession temporelle. On reconnat ici le souci constant de Kant, dans la seconde dition, dviter tout argument qui pourrait faire conclure lidalisme et, par consquent, de privilgier le sens externe par rapport au sens interne (Algbre, I, 457, n. 3). Il y aurait, en croire PRAUSS, une volution dans la conception kantienne de lespace : dabord conu comme condition de possi-bilit de lextriorit dans la Dissertation et encore en 1781, finalement conu comme condition de possibilit de la reprsentation de la juxtaposition dans lOpus postumum, cet ajout de 1787 marquerait un tournant dans la pense de lespace, Kant prenant une conscience progressive que lextriorit nest pas spcifique lespace et quelle est mme, loppos, le caractre propre du temps plac sous le signe de la succession tandis que celui de lespace est la simultanit. On peut objecter que la juxtaposition nest pas un concept nouveau en B et que la rectification nest quune prcision : elle est affirme explicitement en A 27 : Toutes choses sont juxtaposes dans lespace et implicitement en A 20 : Par le sens externe [] nous nous reprsentons des objets comme hors de nous et tous ensemble dans lespace . La Dissertation disait dj que je ne puis pas concevoir une chose comme hors de moi [], ni des choses rci-proquement extrieures si je ne les place en des lieux diffrents de lespace. (Cf. 15, A ; Ak.II, 402 ; tr. Mouy, 65).

    VAIHINGER (II, 370), FRIEDMANN ( Momente , 327), LIEBRUCKS (Sprache, IV, 370), font tort de la parenthse et de son contenu figurant dans le deuxime numro de lexposition du temps un ajout de B gtant aprs coup largument. R. SCHMIDT af-firme tort, dans son dition de la KdrV, que la phrase na t mise entre parenthses quen B.

    Se fondant sur ldition Hartenstein, COHEN affirme tort que les consquences de lespace portent Errterungen en A et Errterung en B. (Il est vrai, par contre, que les ditions C, D et E portent le singulier). Le prtendu singulier en B est cens appuyer la thse de lidalit transcendantale sur la seule exposition transcendantale ! Il faudrait lire : Unsere transzendentale Errterung lehret demnach (Erfahrung, 175-176).

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  • tions est attribu lintention de remdier au malentendu de lEsthtique, surtout dans le concept du temps 41 puisquil ny a pas de malentendu spcifique relatif au temps et quon ne voit pas, en tout cas, que Kant en combatte effectivement un ; le seul malen-tendu porte sur le concept de phnomne et ne concerne pas celui de temps 42. Lexploration de la littrature de la rception des thses kantiennes entre 1781 et 1787 peut jeter quelques lumires sur les motivations de Kant.

    La Critique a t svrement recense dans la Knigsberger po-litische und gelehrte Zeitung du 1er juillet 1781 par Hamann (qui en tait le rdacteur) 43, elle a t recense anonymement par Garve et Feder dans les Gttinger gelehrte Anzeigen (19 janvier 1782), par Ewald sans doute dans la Gothaische Gelehrten Zeitung (24 aot 1782), par Schtz dans lAllgemeine Literatur-Zeitung 44. Tiede-mann lui a consacr trois articles intituls ber die Natur der Meta-physik en 1785 dans les Heische Beitrge 45. A quoi il faut ajouter les diverses recensions des Prolgomnes, parues de 1783 1786, no-tamment celles de Lossius et de Pistorius 46. La recension des Eclair- 41 B XXXVIII ; Ak.III, 23 ; TP, 27.

    42. On considre que Kant rpond au malentendu de lEsthtique dans la RG III. RA-DEMACKER juge que cela a lieu dans la RG II (cf. Sinn, 35).

    43. Elle a t aussi recense en 1781 dans les Frankfurter gelehrte Anzeigen, Nr. LVII & LVIII, 456-461 (17 et 20 juil. 1781) et les Neueste Critische Nachrichten [Greifswald], St. 44, 345-346 (3 nov. 1781).

    44. [GARVE-FEDER], Gttinger gelehrte Anzeigen, St. 3, 40-48, 19 janvier 1782. La recension originale de Garve parut dans lAllgemeine deutsche Bibliothek (Anhang zu XXXVII-LII Bde, 838-862, automne 1783, 838-862. [EWALD ?], Gothaische Gelehr-ten Zeitung, St. 68, 560-563, 24 aot 1782. SCHTZ, ALZ., Iena, III, 1785, 41a-44a ; 53a-56b ; 117a-118b ; 121a-128b.

    45. TIEDEMANN, Heische Beitrge zur Gelehrsamkeit und Kunst, Frankfurt a. M, I, 1785, 113-130, 233-248, 464-474. Le premier article est intitul Gegen die sthetik (cf. HAUSIUS, Materialien, I, 53-76). Kant les a lus (cf. R 5649, Ak.XVIII, 296-298) et na pas apprci (cf. lettre Bering du 7 avril 1786).

    46. Altonaischer Gelehrter Mercurius, Altona, St. 31, 31 juil. 1783, 243-245 ; Gothais-che gelehrte Zeitungen, St. 86, 25 oct. 1783, 705-710 et St. 87, 29 oct. 1783, 715-718 ; LOSSIUS, bersicht der neuesten Literatur der Philo., Gera, I-1, 1784, 51-70 (puis AdB, Berlin, 59-2, 1784) ; PISTORIUS, AdB, 59-2, 1784, 322-356 (cf. HAUSIUS, II, 131-155) ;

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  • cissements de J. Schultz (1784) dans lA.d.B. en 1785 a t loccasion pour Pistorius dmettre des rserves et critiques lencontre de lEsthtique 47. Les crits de Platner, de Selle, dUlrich, de Mendels-sohn, de Meiners, dAbel lattaquent galement sur divers points 48. Enfin, le livre de Feder, ber Raum und Zeit. Zur Prfung der kan-tischen Kritik, paru au dbut de 1787, prend parti lEsthtique 49.

    Philos. Unterhaltungen, Leipzig, I, 1786, 122-133 ; Russische Bibliothek, X, 1786, 163-165.

    47. Denkwrdigkeiten aus der philos. Welt, Leipzig, avril 1785, 242-247 ; PISTORIUS, AdB, 66-1, mai 1786, 92-123 (cf. HAUSIUS, II, 156-186). Les Erluterungen ont aussi t recenses dans lALZ, Nr. 162, 12 juil. 1785, 41-44 ; Nr. 164, 14 juil., 53-56 ; Nr. 178, 29 juil., 117-118 ; Nr. 179, 30 juil., 121-124 et Supplment ce mme numro, 125-128.

    48. PLATNER, Aphorismen, I, 2. Aufl., Leipzig, 1784 (critique de lEsthtique, 294 sqq). SELLE, Versuch eines Beweises, da es keine reinen [] Vernunftbegriffe gebe , Berlinische Monatsschrift, dc. 1784, 565-575 (cf. HAUSIUS, I, 98-106) ; De la ralit et de lidalit des objets de nos connaissances [Mmoire publi en 1792, mais lu en 1786-1787 ; cf. la traduction quen donne Eberhard dans le Philos. Archiv, I-1, 1792, 81-125]. Le jugement de Selle, lun des rares ddicataires de la premire dition de la Criti-que, importe Kant. ULRICH adressa Kant ses Institutiones logicae et meta-physicae (Ina, 1785), sollicitant de lui une recension (cf. lettre du 21 avril 1785, Ak.X, 378). Cette dernire, anonyme, due Schultz (ALZ, Nr. 295, 13 dc. 1785, 297-299), dfend certes la table des catgories contre les objections dUlrich, mais saccorde avec lui pour juger que les catgories et le temps doivent pouvoir sappliquer aux choses en soi et que notre conscience ne peut tre un phnomne. MENDELSSOHN, Morgens-tunden, Berlin, 1785 ; 2me d. modifie, 1786. Il reproche surtout Kant son idalisme et sattache tablir que les formes de notre sensibilit sont les formes de toute sensibi-lit et que lespace et le temps sont des proprits de ltre. MEINERS, Grundri der Geschichte der Weltweisheit, Lemgo, 1786 ; Grundri der Seelenlehre, Lemgo, 1786. ABEL, Einleitung in die Seelenlehre, Stuttgart, 1786, ber die Quellen der menschlichen Vorstellungen, Stuttgart, 1787 et Versuch ber die Natur der spekulativen Vernunft. Zur Prfung des kantischen Systems, Frankfurt a. M., 1787. La confrontation avec les mprises et questions de Schultz qui na pas t demble le zlateur quil est devenu, les uvres des premiers adeptes et dfenseurs, ont galement jou leur rle : Schultz, Schtz, Jakob notamment (cf. SCHULTZ, Erluterungen ber [] Kants KdrV, Knigs-berg, 1784 ; SCHTZ, Quaestio de syntheticis mathematicorum pronuntiationibus, Iena, 1785 [contre Tiedemann] ; JAKOB, Prfung der Mendelssohnschen Morgenstunden, Leipzig, 1786).

    49. FEDER, ber Raum und Zeit. Zur Prfung der kantischen Kritik, Gttingen, 1787 (prface date du 31 janvier).

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  • Quoique lEsthtique B ne fasse, en vrit, quun cho trs indirect toutes ces polmiques, elles ont toutefois incit Kant complter ses vues et tenter de vaincre les rsistances. Sil na rien retenu apparemment des critiques de Tiedemann, il a ragi la re-cension de Garve et Feder (dans la troisime des remarques gnra-les), aux recensions de Pistorius (origine dune large partie des re-marques gnrales 50) et aux tentatives de rfutation de Mendels-sohn dans ses Morgenstunden (origine de la quatrime remarque). Les progrs thoriques dont les Prolgomnes ont t loccasion ex-plique le ddoublement de lexposition des concepts despace et de temps 51. La deuxime des remarques gnrales prouve, sinon que Kant ntait pas pleinement satisfait de son argumentation relative au sens interne, du moins quil tait conscient de navoir pas suffi-samment soulign que le sens interne tait bien un sens et que lidalit des phnomnes internes ne ressortait pas avec la mme vidence que celle des objets de lexprience externe. La troisime des remarques prouve quil a tenu se dfendre contre laccusation davoir tout transform en simple apparence 52. Le motif de la qua-

    50. Dans sa recension des Prolgomnes (AdB, 59-2, 1784, 322-356), PISTORIUS re-jette la thorie de lidalit du temps et sinquite du statut du sujet comme Erscheinung (la RG II pourrait tre une rponse sur ces deux points) ; il sinterroge sur la possibilit dune distinction entre lErscheinung et le Schein (les explications des Prolgomnes ne lont pas convaincu ; la RG III pourrait lui rpondre). Dans ses recensions des Erlute-rungen de Schultz (in AdB, 66-1, 1786, 92-123) et de la Prfung der Mendelssohnschen Morgenstunden de Jakob (in AdB, 82-2, 1788, 427-470), il se soucie de la troisime possibilit quespace et temps soient aussi des formes des choses (peut-tre la RG IV lui rpond-elle sur ce point). Que lobjection ait t entendue, cest ce que prouve le fait que JAKOB tente de rpondre Pistorius sur la question de la troisime possibilit dans sa Prfung der Mendelssohnschen Morgenstunden (Leipzig, 1786).

    51. Lexposition transcendantale reprend le contenu de la Consquence b de lespace et la dernire partie de la premire remarque gnrale. Lapport, rel, des Prolgo-mnes est tout de mme limit. Il nest pas possible de dire quen 1787 espace et temps deviennent, de cadres de la sensation quils taient seulement en 1781, des mthodes de la connaissance. Outre linadquation de ces catgories, lexposition transcendantale procde dune clarification, plutt que dune rupture conceptuelle.

    52. Que Kant ait eu le souci de se dfendre contre laccusation didalisme, cela est vident dans la troisime des remarques gnrales (intimement lie la rfutation de lidalisme en B). On peut en voir aussi une trace dans lobservation faite dans la deuxime remarque que les reprsentations des sens extrieurs constituent la matire

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  • trime remarque nest pas aussi vident ; elle interdit, en tout cas, que lon prenne la ncessit de laffection, et donc de la sensibilit, pour une ncessit de la connaissance en gnral et que lon fasse des conditions de lintuition sensible les conditions de lintuition en gnral 53 et elle poursuit la polmique contre le ralisme spatio-temporel. Il nest pas du tout arbitraire de penser, enfin, que Kant prenne en compte en 1787 lobjection de la troisime possi-bilit ; les trois remarques de 1787 peuvent en tout cas tre lues de cette manire : la subjectivit de lespace et du temps se trouve attes-te par le fait que tout le contenu de nos intuitions se rsout en simples relations (deuxime remarque), que la subjectivit de lespace et du temps permet seule de sauvegarder la ralit empiri-que, le ralisme transcendantal conduisant fatalement Berkeley (troisime remarque), que le ralisme transcendantal rend impossi-ble de concevoir Dieu sans contradiction (quatrime remarque).

    A lexception de celles de la note au cinquime alina du 1, les modifications apportes au texte ne procdent pas dune reconsi-dration des thses soutenues ; les rectifications et ajouts ne sont pas tels, en tout cas, que lon a affaire deux versions de lEsthtique quil y aurait soigneusement sparer sous peine de pratiquer un amalgame douteux.

    *

    On renvoie, pour la commodit, la traduction Treme-saygues et Pacaud, mais on ne saurait trop tre en garde contre les traductions existantes de la Critique, quelles quelles soient. Elles ont dabord pour dfaut commun 54 de ne comporter aucun appa-

    propre dont nous enrichissons notre esprit. Il parat difficile, par contre, den trouver trace dans lajout de neben einander dans le premier numro de lexposition mta-physique de lespace et dans la modification de la premire phrase du dernier numro qui devient en B : der Raum wird als eine unendliche gegebene Gre vorgestellt.

    53. Lajout au 1, 1 de uns Menschen wenigstens obit cette intention.

    54. La Critique de la raison pure a t traduite pour la premire fois par Claude-Joseph Tissot (3 vol., 1835-1836 ; 2me d. revue, 2 vol., 1845 ; 3me d. revue, 2 vol., 1864) ; puis par Jules Barni en 1864 (2 vol.) [B] et par Andr Tremesaygues et Bernard Pacaud

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  • rat critique et dignorer les problmes que pose ltablissement du texte. Or, en ce qui concerne lEsthtique, un certain nombre de passages posent problme : la dernire phrase du 1, 1e alina, cor-rige en B 55 : la premire phrase du 2, deuxime numro 56, un passage du troisime numro du 4, Axiomen von der Zeit ber-haupt. Sie hat nur eine Dimension : verschiedene Zeiten 57, un pas- en 1905 (Alcan) [TP]. Paul Archambault a repris la traduction Barni en 1912 (Flamma-rion) [BA], Franois Marty et Alexandre Delamarre ont repris et corrig la traduction Barni en 1981 (Bibliothque de la Pliade) [MD].

    55. Alles Denken aber mu sich, es sei geradezu (directe), oder im Umschweife (indi-recte), vermittelst gewisser Merkmale zuletzt auf Anschauungen, [] beziehen . La prcision ajoute vaut-elle du seul rapport indirect du penser lintuition [im Ums-chweife, vermittelst gewisser Merkmale] ou bien du rapport indirect et du rapport direct ? Kehrbach, Adickes, Vorlnder, Grland, ldition acadmique, ne mettent pas lexpression entre virgules ; Hartenstein, Kirchmann, Erdmann, Schmidt, Weischedel, Heidemann la placent entre virgules. Place entre virgules, lexpression vermittelst ge-wisser Merkmale constitue une apposition explicative im Umschweife (indirecte) ; si lon supprime la virgule, ce quelle nonce vaut aussi du rapport direct [geradezu (di-recte)]. BA, TP rapportent la prcision au seul cas du dtour. MD est moins explicite : soit en ligne droite (directe), soit par des dtours (indirecte), au moyen de certains ca-ractres . Born met lexpression entre virgules : sive circuitione quadam atque an-fractu, ope certarum notarum ; . Nous pensons, avec Beck (Standpunkt, 368-369) et Vaihinger (II, 24), que le caractre nintervient que dans la relation indirecte. Cf. Lin-tuition se rapporte immdiatement [unmittelbar] lobjet [] ; le concept sy rapporte mdiatement, au moyen dun signe [mittelbar, vermittelst eines Merkmals] qui peut tre commun plusieurs choses. KdrV, A 320 / B 337 ; Ak.III, 250 ; TP, 266. Ce que ne contredit pas la Logique en affirmant que tout penser comme tel se fait per notas com-munes : De la part de lentendement, la connaissance humaine est discursive, cest--dire quelle se produit par des reprsentations qui fondent la connaissance sur ce qui est commun plusieurs choses, par consquent au moyen de caractres et cela sappelle prcisment reconnatre [erkennen] qui vient de connatre [kennen] []. Par consquent tous nos concepts sont des caractres, et penser ce nest jamais rien dautre que se reprsenter au moyen de caractres , Logique, Introd. VIII, Ak.IX, 58, tr. Guillermit, 64.

    56. Der Raum ist eine notwendige Vorstellung a priori, die allen ueren Anschauun-gen zum Grunde liegt. ou notwendige Vorstellung, a priori, die ? Les diteurs sont diviss : Kirchmann, Erdmann, Grland, Schmidt ne mettent pas de virgule, Ro-senkranz, Kehrbach, Adickes, Vorlnder, Weischedel, Heidemann en placent une ; ncessaire a priori (TP) ; ncessaire, a priori (BA, MD). Cf. VAIHINGER, II, 185.

    57. La prcision comme ceux-ci (BA) prsuppose que Kant donne bien deux axio-mes diffrents. Il y a deux points dans le texte original, ce qui donne penser que la suite est une explication ; les ditions critiques sy tiennent en gnral, sauf Hartenstein,

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  • sage du 7, 1e alina : sie ist also wirklich, nicht als Objekt, son-dern 58, un passage de la RG II : dieses Setzen seiner Vorstel-lung 59, un passage de la note de la RG III 60 : und von der Vors-tellung des letzteren unzertrennlich ist

    Dune manire gnrale, les traductions sont rarement fiables dans lutilisation quelles font des italiques et ignorent quil y a des diffrences en la matire entre la premire et la seconde dition 61.

    Erdmann dans son dition (qui change donc davis dans ld. acadmique), Vorlnder. Deux points impliquent un seul axiome ; un point virgule quil y en a bien deux. Deux points chez Born, TP, MD ; point virgule chez B, BA.

    58. Il ny a pas de virgule dans le texte original. Dans ses deux ditions de la Critique, Erdmann place une virgule entre wirklich et nicht (ce dont il se justifie dans son dition de 1884, 66), de mme Grland. Hartenstein, Rosenkranz, Kirchmann, Adickes, Schmidt, Weischedel, Heidemann nen mettent pas. Vorlnder propose les corrections suivantes : als wirklich, nicht als Objekt, sondern als Vorstellungsart (83, n.) ; Adickes propose : also als wirklich nicht als Objekt, Erdmann : also wirklich nicht als Objekt, etc. Il faut donc le considrer comme rel (TP, MD) ; il ne doit donc pas tre rellement considr comme un objet (BA) est la limite du contresens.

    59. On trouve ihrer dans les ditions originales ; Hartenstein, Rosenkranz, Kirchmann, Schmidt, Weischedel sy tiennent. Kehrbach, Vorlnder, Adickes, Erdmann (dans ses deux ditions), Grland, Heidemann corrigent par seiner ; Erdmann sen explique : Il y a ihrer dans le texte original ; mais ce qui est pos dans lesprit, donc la reprsentation qui nat de laffection, ne peut tre pense comme une reprsentation de "lactivit pro-pre" ; positione suae repraesentationis (Born) ; par cette position de sa repr-sentation (BA, MD) ; par cette position de leur reprsentation (TP). Nous pensons quil sagit de la position des reprsentations externes dans notre esprit, donc de la posi-tion de leur [ihrer] reprsentation (HEIDEMANN, Spontaneitt, 164 sq ; GRAUBNER, Form, 199)

    60. insparable de la reprsentation que nous en avons (BA, TP) ; de la repr-sentation de ce sujet (MD). Le problme est ici de savoir sil faut sen tenir au texte original, o lon lit en A comme en B : des ersteren qui renvoie ncessairement Objekt (comme le font Rosenkranz, Hartenstein, Kirchmann, Kehrbach, Vorlnder, Adickes, Grland, Schmidt, Weischedel, Heidemann) ou sil faut corriger, comme le jugent Adic-kes et Erdmann, lire des letzteren et comprendre von der Vorstellung des Subjekts. Born traduit de mme : a repraesentatione rei objectae non potest separari . PRAUSS ( Problematik , 223-224) refuse formellement la correction. Nous pensons quil faut comprendre insparable de la reprsentation de lobjet , voir notre article sur La note de la troisime remarque gnrale .

    61. Dans lexpression die ursprngliche Vorstellung Zeit ( 4, 5), Zeit est soulign en B, ce dont B, BA et TP ne tiennent pas compte. Dans le 1, 4, Kant souligne reine Ans-chauung heien ; BA nen tient pas compte. Dans la RG II, Kant souligne uerer Sinne

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  • Toutes les traductions comportent non seulement une foule din-exactitudes de dtail mais une multitude de contresens et de faux sens qui les rendent peu sres 62.

    dans le passage die Vorstellungen uerer Sinne den eigentlichen Stoff ausmachen, ce que nglige TP. Kant y souligne aussi selbstttig dans la formule selbstttig gegeben wre ; ce que ngligent BA, TP, MD. Au 8 (RG IV, 1) nicht ursprnglich est soulign dans le texte, BA, nen tient pas compte. Il arrive aussi au traducteur de souligner de son propre chef. Ainsi, par exemple, TP traduit zuletzt beziehen ( la fin du 1, 1) se rapporte finalement ; dans le 6, 4, Art dans Wenn wir von unsrer Art nest pas sou-lign, TP le souligne pourtant : notre mode ). Dans le 6, 5, BA et MD soulignent ab-solute Realitt, expression qui nest souligne ni en A ni en B.

    62. Il arrive au traducteur de corriger le texte qui ne le satisfait pas. Ainsi, TP omet la traduction de jetzt au 7, 1 (die wir uns jetzt als Vernderungen vorstellen) ; unseren innern Sinnen ( 7, 2), pluriel choquant rendu au singulier ; die Vorstellungen uerer Sinne (RG II), TP dissimule ce pluriel.

    Relevons quelques contresens de TP.

    (Consquences de lespace en A, 4e alina) welches affiziert wird : welches ne peut se rapporter qu das Gesicht ; TP le rapporte der Sinn.

    (RG I, 4) da er offenbar transzendental ist, und nicht blo die Form der Deutlichkeit oder Undeutlichkeit, sondern den Ursprung und den Inhalt derselben betrifft : elle ne porte pas seulement sur leur clart ou leur obscurit, mais sur lorigine et le contenu de cette clart et de cette obscurit . Le sens est quelle ne concerne pas simplement la forme de la distinction ou de la confusion, mais lorigine et le contenu de ces connaissances

    (RG I, 5) so fern wir den letzteren Begriff nur physisch verstehen : TP rapporte letzteren Begriff Regen : tant que nous donnerons la pluie un sens physique , il faut le rapporter Sache an sich selbst. Le sens est : pour autant que nous entendions le concept de chose en soi dans un sens seulement physique .

    (RG I, 7) scheinbare Hypothese : TP traduit hypothse univer-selle !

    (RG III, n.) dem Objekt fr sich : lobjet en soi . Il ne sagit pas, notre avis, de la chose en soi, mais de lobjet-phnomne lui-mme (la chose en soi empirique).

    (RG IV, 1) wenn man sie nicht zu objektiven Formen, als da sie zu subjektiven For-men machen will : si lon ne veut pas faire de lespace et du temps des formes sub-jectives de toutes choses il ne reste plus qu en faire des formes objectives . TP in-verse subjectif et objectif !

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    L'assise de l'ontologie critique. CHAPITRE IProlgomnesL'esthtique, assise de l'ontologie critiqueRdaction et composition