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1 Chapitre 2 – Quel est le rôle de la politique de la concurrence ? Indications complémentaires : En s’appuyant sur des exemples, on montrera que la politique de la concurrence s’exerce non seulement à l’égard des entreprises mais aussi en matière d’intervention publique. On soulignera que cette politique est source de débats quant à la place de l’État dans la production de services collectifs et dans la mise en oeuvre de la politique industrielle. On présentera quelques cas dans lesquels les autorités de la concurrence, en France et à l’échelon européen, sont intervenues pour protéger les intérêts des consommateurs. Notions : Abus de position dominante, cartel de producteurs, marché pertinent. Acquis de première : fonctions économiques de l’État, marchés concurrentiels, marchés imparfaitement concurrentiels, pouvoir de marché. Maintenant que nous savons comment se joue la concurrence entre entreprises et comment elle influence les gains des consommateurs et des entreprises elles-mêmes, nous allons passer à l’analyse de l’intervention étatique à son sujet. On élargira dans le même temps à l’analyse des limites possibles de l’intervention des pouvoirs publics. On se posera donc quelques grandes questions : - dans quelle mesure l’existence d’une forte concurrence est-elle favorable aux consommateurs ? - comment font les pouvoirs publics pour préserver le degré de concurrence le plus favorable aux consommateurs ? - que faire si les pouvoirs publics eux-mêmes n’arrivent pas à préserver ce degré de concurrence ? C’est ce que nous ferons globalement en nous attaquant à l’analyse économique des politiques de la concurrence . Nous les définirons au fur et à mesure de l’avancée du chapitre afin de tenir compte des problèmes spécifiques posés par l’analyse des entreprises et des Etats. Mais, d’une manière générale, elles désignent les règles légales et les actions spécifiques visant à réguler le fonctionnement des marchés. Comme un arbitre dans une compétition sportive. Tout le problème va être de savoir : à quel but ? et comment ? I. Le problème central des politiques de la concurrence : entre efficacité économique et protection des consommateurs : On va essayer de rentrer dans le problème, et d’en comprendre les implications. A cette fin, nous allons nous partager le travail. Travail de groupe. L’idée va être la suivante : chaque groupe de 2 élèves aura un micro-dossier à lire (un ou deux documents) sur une pratique des entreprises ou une situation de concurrence. Pour chacun des cas, il s’agira de trouver un côté positif, et un côté négatif, à expliciter aux autres. Ramener un ou deux dictionnaires de SES pour l’aide si besoin. Ce faisant, nous remplirons 3 objectifs : - dresser la liste d’une partie des situations sous surveillance - comprendre le problème de l’arbitrage entre efficacité possible et protection probable - et se doter de plusieurs exemples en matière de pratiques des entreprises Pratique des entreprises Exemple concret Concentration Air France - KLM Ententes (Accords de R&D) IPSEN & Pharnext Ententes (Accords de transfert de technologie) PSA – GEFCO – RZD Ententes (Accord de distribution) La Poste – Mondial Relay APD (Prix prédateur) Vanguard Airlines vs American Airlines

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Chapitre 2 – Quel est le rôle de la politique de la concurrence ? Indications complémentaires : En s’appuyant sur des exemples, on montrera que la politique de la concurrence s’exerce non seulement à l’égard des entreprises mais aussi en matière d’intervention publique. On soulignera que cette politique est source de débats quant à la place de l’État dans la production de services collectifs et dans la mise en œuvre de la politique industrielle. On présentera quelques cas dans lesquels les autorités de la concurrence, en France et à l’échelon européen, sont intervenues pour protéger les intérêts des consommateurs. Notions : Abus de position dominante, cartel de producteurs, marché pertinent. Acquis de première : fonctions économiques de l’État, marchés concurrentiels, marchés imparfaitement concurrentiels, pouvoir de marché.

Maintenant que nous savons comment se joue la concurrence entre entreprises et comment elle influence les gains des consommateurs et des entreprises elles-mêmes, nous allons passer à l’analyse de l’intervention étatique à son sujet. On élargira dans le même temps à l’analyse des limites possibles de l’intervention des pouvoirs publics. On se posera donc quelques grandes questions :

- dans quelle mesure l’existence d’une forte concurrence est-elle favorable aux consommateurs ?

- comment font les pouvoirs publics pour préserver le degré de concurrence le plus favorable aux consommateurs ?

- que faire si les pouvoirs publics eux-mêmes n’arrivent pas à préserver ce degré de concurrence ?

C’est ce que nous ferons globalement en nous attaquant à l’analyse économique des politiques de la concurrence. Nous les définirons au fur et à mesure de l’avancée du chapitre afin de tenir compte des problèmes spécifiques posés par l’analyse des entreprises et des Etats. Mais, d’une manière générale, elles désignent les règles légales et les actions spécifiques visant à réguler le fonctionnement des marchés. Comme un arbitre dans une compétition sportive. Tout le problème va être de savoir : à quel but ? et comment ?

I. Le problème central des politiques de la concurrence : entre efficacité économique et protection des consommateurs :

On va essayer de rentrer dans le problème, et d’en comprendre les implications. A cette fin, nous allons nous partager le travail. Travail de groupe. L’idée va être la suivante : chaque groupe de 2 élèves aura un micro-dossier à lire (un ou deux documents) sur une pratique des entreprises ou une situation de concurrence. Pour chacun des cas, il s’agira de trouver un côté positif, et un côté négatif, à expliciter aux autres. Ramener un ou deux dictionnaires de SES pour l’aide si besoin. Ce faisant, nous remplirons 3 objectifs :

- dresser la liste d’une partie des situations sous surveillance - comprendre le problème de l’arbitrage entre efficacité possible et protection probable - et se doter de plusieurs exemples en matière de pratiques des entreprises

Pratique des entreprises Exemple concret Concentration Air France - KLM

Ententes (Accords de R&D) IPSEN & Pharnext Ententes (Accords de transfert de technologie) PSA – GEFCO – RZD

Ententes (Accord de distribution) La Poste – Mondial Relay APD (Prix prédateur) Vanguard Airlines vs American Airlines

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Document A – Un exemple de concentration (fusion-acquisition) et de ses effets : « Le 18 décembre 2003, Air France et KLM ont notifié un accord-cadre en vertu duquel Air France

devait acquérir le contrôle de KLM. Bien que l'opération aboutisse à la création du plus gros groupe aérien en Europe, l'enquête de la Commission a montré que les réseaux des deux compagnies étaient largement complémentaires. Air France est plus présente que KLM dans le sud de l'Europe et en Afrique, par exemple, alors que KLM exploite un nombre plus grand de liaisons vers l'Europe du Nord et l'Extrême-Orient.

« Du point de vue des consommateurs, l’union des deux compagnies permettra aux clients de KLM d'avoir accès à plus de 90 nouvelles destinations, alors que les clients d’Air France se verront proposer quarante nouvelles liaisons. Les économies que cette opération permettra de réaliser, ainsi que l'amélioration du service qui résultera de la réunion des réseaux, devraient également profiter aux consommateurs et à l'économie en général. […]

« Bien que les deux compagnies soient largement complémentaires, l’opération Air France/KLM – la première concentration proprement dite du secteur aérien européen – éliminera ou réduira sensiblement la concurrence sur 14 liaisons sur lesquelles elles sont actuellement en concurrence active ou potentielle l’une avec l’autre, à savoir : des liaisons intra-européennes (Amsterdam-Paris, Amsterdam-Lyon, Amsterdam-Marseille, Amsterdam-Toulouse, Amsterdam-Bordeaux, Amsterdam-Rome, Amsterdam-Milan, Amsterdam-Venise et Amsterdam- Bologne) ; des liaisons intercontinentales ou long-courrier (Amsterdam-New York, Paris-Detroit, Amsterdam-Atlanta, Paris-Lagos (Nigeria) et Amsterdam-Lagos).

« L’expérience de la Commission dans ce domaine montre que la principale barrière à l’entrée sur ce marché réside dans la rareté des droits de décollage et d’atterrissage dans les aéroports très encombrés de Paris et d’Amsterdam. D’autres restrictions dues aux réglementations nationales peuvent également faire obstacle à une libre concurrence, notamment en ce qui concerne les vols avec escale sur les liaisons long-courrier ».

Commission Européenne, Communiqué de Presse IP/04/194, 11 février 2004

Document B – Un exemple d’abus de position dominante (prix prédateurs) et de ses effets : « En janvier 1995, une jeune société américaine de transport aérien, Vanguard Airlines, commença à

offrir trois vols allers-retours par jour de Kansas City (Missouri), où est situé son siège social, à Dallas. Le prix était très intéressant pour les voyageurs - un vol aller-simple coûtait 80 dollars - comparé au prix de son principal concurrent American Airlines (108 dollars). Mais celui-ci […] déclara très vite la guerre à Vanguard. American Airlines offrit les mêmes tarifs que la jeune société et augmenta de 8 à l4 le nombre de ses vols quotidiens vers Kansas City. Après près d’un an d’une concurrence acharnée, Vanguard baissa les bras et décida d’abandonner temporairement ce vol qui n’était plus rentable. American revint sans tarder à ses anciens horaires ; elle réduisit à 11 le nombre de ses vols quotidiens vers Kansas City et releva son tarif aller simple jusqu’à 147 dollars en moyenne. Selon Brian Gillman, vice-président de Vanguard, ‘‘American a en fait doublé sa capacité pour nous empêcher de revenir sur le marché’’. De son côté, American affirme qu’elle n’a pas violé la loi ».

Carney & Zellner, Problèmes économiques n° 2683, octobre 2000

Document C – Un exemple d’entente (accord de distribution) et de ses effets : « Le secteur postal est totalement ouvert à la concurrence depuis le 1er janvier 2011. Mais force est de

constater que la livraison de colis, dopée par les ventes en ligne, est le seul segment de marché sur lequel La Poste, opérateur historique dominant, subit une réelle pression concurrentielle. […]

« La livraison de colis en points de retrait consiste, pour un gestionnaire de réseau comme Mondial Relay ou Kiala, à collecter, acheminer et livrer le colis acheté par un particulier auprès d'une entreprise de vente à distance (principalement les sociétés de vente par correspondance et les sites de vente en ligne) vers un commerce de proximité membre du réseau (buralistes, fleuristes, boulangeries, pressings…). Le partenariat envisagé entre La Poste et Mondial Relay aurait permis à l’opérateur historique, déjà prédominant sur la livraison à domicile, de bâtir une offre de livraison en points de retrait (So Colissimo) combinant son propre réseau de bureaux de poste et de commerçants avec celui de Mondial Relay.

[Tout en élargissant les services aux consommateurs], cette force de frappe ainsi acquise risquait de marginaliser les autres opérateurs concurrents, qui, ne disposant pas d’un tel réseau, auraient été dans l’incapacité de pouvoir concurrencer efficacement La Poste auprès des sites de vente en ligne. L’Autorité a estimé que l’accord envisagé risquait par ailleurs d’assécher la concurrence sur ce marché dans la mesure où il diminuait fortement les incitations de Mondial Relay à concurrencer La Poste ».

Autorité de la concurrence, Décision 11-MC-01, 12 mai 2011

Document D – Un exemple d’entente (accord de R&D) et de ses effets : « Un accord de R&D et de commercialisation de médicaments destinés au traitement de la maladie

neuromusculaire de Charcot-Marie Tooth a été conclu lundi entre le laboratoire français Ipsen et la société biopharmaceutique Pharnext. Cette dernière est spécialisée dans le développement de traitements innovants "basés sur des mélanges de médicaments" dont les brevets sont tombés dans le domaine public.

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« Cet accord stipule que Pharnext sera en charge du développement jusqu'à la fin des essais cliniques de phase II. Ipsen assurera la phase III, ainsi que l'obtention des autorisations de mise sur le marché, puis le produit notamment en Europe, aux Etats-Unis et en Chine.

« Ipsen, qui acquiert "une option exclusive sur le programme de Pharnext dans l'indication de Charcot-Marie Tooth", souscrit également à une émission d'obligations convertibles de la société. Si Ipsen exerce cette option, à l'issue d'une phase II positive, il versera à Pharnext des paiements d'étape pouvant aller jusqu’à 91 millions d'euros, ainsi que des royalties "à deux chiffres" sur les ventes nettes issues du produit. Enfin, ses obligations pourront être converties en titres Pharnext. [Les deux entreprises seront donc ensemble en situation de monopole absolu avec partage des bénéfices].

« Aucun traitement n’est disponible à l’heure actuelle pour la maladie de Charcot-Marie-Tooth, une maladie neuromusculaire chronique et invalidante principalement déclenchée par des facteurs génétiques. Elle touche 3 millions de personnes dans le monde ».

« Accord de R&D et commercialisation entre IPSEN et Pharnext », ArPhycos, 15 juin 2009

Document E – Un exemple d’entente (accord de vente et de transfert de technologie) et de ses effets : « PSA Peugeot Citroën a annoncé hier le lancement de ‘‘négociations exclusives’’ avec les Chemins de

fer russes (RZD) sur la vente de sa filiale logistique GEFCO. Pour acquérir plus de 75% des actions de la société de logistique, le monopole ferroviaire russe devra débourser 800 millions d'euros. Mais avant la transaction, GEFCO versera à PSA un dividende de 100 millions d'euros. En outre, RZD s’est engagé à ne pas réaliser de changements au sein de la direction de la société. PSA espère conclure l’accord de vente de GEFCO avant la fin de l'année, selon les matériaux de PSA. L’accord a déjà été approuvé la semaine dernière par le conseil d'administration des chemins de fer russes et le gouvernement, a confié un employé de Chemins de fer russes.

« […] GEFCO a été fondée en 1949 et s’occupe du transport des composants et des véhicules finis de PSA Peugeot Citroën et General Motors, grâce à tous types de transports. Le volume transporté en 2011 a atteint 4 millions de voitures et de composants automobiles. La moitié d'entre eux a été transportée par la route, 30% par mer et 20% seulement par rail. Le parc de la compagnie comprend 3.500 conteneurs, 3.800 wagons plats et 30 navires pour le transport de fret roulant, notamment des automobiles. La société opère principalement en Europe occidentale. Selon Interfax, cette région représente plus de 75% de son chiffre d'affaires. PSA vend la société dans le cadre d’un programme visant à débarrasser l’entreprise de ses actifs non stratégiques. […]

« La partie russe cherche de longue date à pénétrer sur le marché européen, a déclaré un employé des Chemins de fer russes. Il existait des entreprises semblables à ces fins, mais seule GEFCO était en vente, a-t-il ajouté. […] L’intérêt pour la société logistique française est lié à l'intention des Chemins de fer russes de fonder une coentreprise logistique conjointe russo-biélorusso-kazakhe sur la base de Transcontainer (le monopole compte y introduire 50% + 1 action), a déclaré un employé de RZD. On ne prévoit cependant aucun transfert de GEFCO. Mais même sans cela, la synergie sera atteinte grâce au fait que la société française possède des technologies éprouvées afin de travailler avec les clients et de livraison, et la coentreprise - des capacités sous forme de conteneurs, de plates-formes et de terminaux, a-t-il dit. Le but principal de l'achat est d’obtenir une part du marché européen et des technologies de transport de fret, résume un autre employé du géant ferroviaire russe.

« Pourtant, le sort de la coentreprise logistique tripartite n’est pas encore scellé, rappelle un représentant d’un des ministères concernés. Il se pourrait que le gouvernement n'approuve pas le projet. En outre, on supposait jusqu'à présent que RZD vendrait une part de Transcontainer. Désormais, il est probable que le monopole russe utilisera l’achat de GEFCO comme prétexte pour conserver une participation dans Transcontainer, assure le fonctionnaire ».

« Les chemins de fer russe convoitent la logistique française », La Russie d’aujourd’hui, 21 septembre 2012 Derrière ces pratiques des entreprises, on constate donc qu’il y a une double possibilité :

- ces pratiques permettent de gagner en efficacité économique, donc peuvent bénéficier aux consommateurs (baisse des prix, hausse de la qualité). Ceci renvoie à la théorie de Schumpeter que la situation de monopole temporaire récompense (!) les innovateurs.

- ces pratiques permettent également de réduire la concurrence sur le marché, et peut se faire aux dépens du consommateur (hausse des prix, baisse de la qualité)

Tout le problème va donc être de déterminer à quelles conditions la balance va pencher plutôt d’un côté ou de l’autre. C’est tout l’enjeu des politiques de la concurrence : arbitrer entre efficacité économique et protection des consommateurs. On verra qu’elle s’applique à deux domaines :

- contrôle des concentrations - contrôle des pratiques anticoncurrentielles (ententes et APD)

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En plus de ces pratiques, certaines n’ont par contre que des avantages pour les entreprises sans augmenter l’efficacité et donc bénéficier aux consommateurs. Ces pratiques vont par contre être directement combattues par les politiques de la concurrence. On peut en détailler 3 cas (parmi la multitude possible) :

- ententes sur les prix : Exemple du « Yalta du Portable » (Orange-SFR-Bouygues) :

« En concluant, entre 1997 et 2003, un véritable ‘‘Yalta’’ du Portable (selon l’expression d’un des opérateurs), France Télécom, SFR et Bouygues Télécom pensaient avoir consolidé, et pour longtemps, leurs parts de marché : respectivement 49%, 35% et 16%. Comment ? En se réunissant chaque mois et en échangeant des données confidentielles afin d’ajuster leurs tarifs et leur politique commerciale. Le trio soignait ainsi ses bénéfices (plus de 25% de marge nette) sur le dos de l’usager ».

J-F. Julliard, « Le grand livre de la jungle économique », Le Canard Enchaîné, 19 juillet 2006 Exemple des meuniers français et allemands :

Autorité de la concurrence, Rapport annuel 2011

- APD par vente liée (on force l’achat)

Génération NT, 25 septembre 2012

- APD par prix de revente imposé (ce qui joue beaucoup dans le cas des relations producteurs, distributeurs)

Autorité de la concurrence, Décision 07-D-06, 28 février 2007

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II. Les politiques de la concurrence face aux entreprises : sur quel marché évaluer la concurrence et intervenir ?

Maintenant que nous avons posé l’arbitrage entre efficacité économique et protection des consommateurs, il nous faut regarder concrètement comment procéder. Pour ce faire, résumons déjà les choses.

A. Le cas de l’analyse économique des concentrations : l’analyse des marchés pertinents :

On va reprendre le problème évoqué ci-dessus. Toute mesure qui réduit la concurrence prise par les entreprises peut en même temps être source d’efficacité. Comment trancher ? C’est tout le problème du contrôle des concentrations, que l’on peut résumer par le schéma suivant :

Le truc embêtant à comprendre, c’est comment est prise la décision. Pour ce faire, prenons un cas pratique, qui nous permettra d’introduire la notion de « marché pertinent ».

Travail de groupe sur GCP-Direct8. Au terme de ce travail de groupe, on peut faire la conclusion suivante : Dans le cas d’une décision prise par les autorités de la concurrence, aussi bien pour le contrôle des concentrations que pour l’analyse des pratiques anticoncurrentielles, il s’agit d’évaluer le risque de réduction de la concurrence qui peut être dommageable aux consommateurs. Pour ce faire, il s’agit d’abord de définir le « marché pertinent » de l’entreprise : c’est le marché sur lequel une entreprise vend son produit et détient donc une part de marché. Selon la manière de définir le marché pertinent, comme dans le cas GCP-Direct8, la décision prise ne sera pas la même puisque les parts de marché ne

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seront pas les mêmes. Généralement, plus le marché est restreint, plus la décision penchera en défaveur de l’entreprise (exemple du marché télévisuel (adossé au marché de la distribution)) ; moins le marché est restreint, moins la décision penchera en défaveur de l’entreprise (exemple du marché audiovisuel).

B. Le problème des cartels de producteurs : quelques exemples : On va essayer de comprendre les choses à partir d’un petit exercice. Document 1 de la FD.

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Pour conclure, un petit schéma récapitulatif à distribuer :

C. Le problème de l’abus de position dominante : quelques exemples : On va enfin finir par la question de l’APD. A nouveau, l’idée est de faire un rapide tour d’horizon pour comprendre ce qui existe à l’heure actuelle. Pour ce faire, travail sur le petit dossier documentaire suivant. Documents 2 a-b-c de la FD.

Document 2 – La politique de la concurrence contre l’abus de position dominante, un tour d’horizon : A – Le principe de l’abus de position dominante :

Question 1 : Pourquoi parler « d’abus » de position dominante et non de « position dominante » ?

B – Cas 1 : « L'UFC-Que Choisir se félicite de la décision rendue aujourd'hui par la Commission européenne,

condamnant la société INTEL à une amende record de 1,06 milliard d'euros, sanctionnant les comportements anticoncurrentiels de cette dernière sur le marché des microprocesseurs x86, et reconnaissant ainsi le préjudice considérable subi par les consommateurs.

« Dans sa décision, le Commission précise qu'Intel s'est rendue coupable de deux types d'abus de position dominante sur le marché des processeurs sur PC afin d'écarter son concurrent américain AMD :

- En premier lieu, la société a accordé des rabais substantiels à des fabricants d'ordinateurs, à condition qu'ils se fournissent en grande majorité ou en totalité chez lui, et a également effectué des paiements directs au profit d'un grand distributeur, à la condition qu'il ne vende que des ordinateurs équipés de ses processeurs ; - En second lieu, elle a réalisé des paiements au bénéfice de ces fabricants pour qu'ils retardent ou annulent le lancement de lignes de PC équipés du processeur AMD […]. « En agissant ainsi, INTEL a gravement porté atteinte au libre choix des consommateurs, a profité de sa

position dominante pour imposer des prix supérieurs à ceux qui résulteraient d'une concurrence saine et loyale, et en affaiblissant la concurrence, a freiné l'arrivée d'innovations sur le marché, privant donc les consommateurs de produits plus performants.

« La question du préjudice subi par les consommateurs est désormais tranchée. En revanche, celle du droit à une réparation effective pour tous les consommateurs reste posée. Cette décision met donc à nouveau en lumière l'inexistence d'une réelle action de groupe, qui est pourtant la seule procédure à même de permettre à l'ensemble des victimes d'obtenir une juste réparation ».

Communiqué de presse UFC-Que Choisir, Condamnation d'INTEL pour abus de position dominante. La Commission européenne a entendu la voix des consommateurs, 3 mai 2009

Question 2 : Pourquoi la Commission Européenne a-t-elle qualifié le comportement d’Intel d’abus de position dominante ? Question 3 : Quelle est la source du document ? En quoi est-elle légitime à intervenir sur le sujet ?

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C – Cas 2 :

Question 4 : En quoi consiste cet abus de position dominante dans le cas de Servier ? Conclusion sur les 3 documents : Question 5 : Pourquoi lutter contre l’abus de position dominante ? Conclusion sur les 3 documents : Question 6 : Comment fait-on ? On conclut par le résumé suivant :

III. La spécificité des politiques de la concurrence face aux Etats : l’Union Européenne et la construction du Marché Unique :

On doit maintenant élargir l’analyse. En effet, il n’y a pas que des entreprises qui interviennent sur les marchés, mais aussi, directement ou indirectement les Etats. Ceci va poser des problèmes particuliers et nécessite de rentrer un peu dans le débat. Avant de le faire, posons le cadre d’analyse. A partir du document suivant :

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Leur bien faire noter l’importance de la coexistence de plusieurs Etats et de la construction du marché intérieur pour justifier les politiques à l’encontre des Etats. A priori, on retrouve ici les mêmes avantages de la politique de la concurrence que celle face aux entreprises. Pourtant, un problème se pose : la politique de la concurrence entre ici en contradiction avec deux missions possibles des Etats, la production de services collectifs d’une part, et la politique industrielle d’autre part. Leur demander d’ajouter ces deux informations sur le schéma, en indiquant que cela pose problème. Ce sont ces deux débats que nous allons maintenant étudier, en prenant des études de cas en compte. On est ici face à des sujets du type : DANS QUELLE MESURE la politique de la concurrence est-elle favorable/défavorable à quelque chose. C’est dans cette optique que nous traiterons les deux parties.

A. Une politique de la concurrence contre les services collectifs ? Les principes de la politique de la concurrence conduisent à remettre en question la production actuelle des services publics. Puisque l’on cherche à augmenter la concurrence, il faut supprimer en principe toutes les situations de monopole, notamment publics. C’est pour cette raison que l’Union Européenne appelle à la modification des services publics, renommés « services universels » : pour l’UE, les missions de service public doivent être remplies par des entreprises privées sous contrôle public. Exemples : ouverture à la concurrence de la téléphonie fixe en 1998 (fin de France Telecom), ouverture à la concurrence sur le marché de l’électricité et du gaz en 2007 (fin d’EDF, GDF), ouverture à la concurrence sur le marché du transport ferroviaire de voyageurs en 2010 (fin pour la SNCF), ouverture à la concurrence sur le marché du transport de courriers de petite taille en 2012 (fin de La Poste). Pour en comprendre les justifications et les effets possibles, avec toutes les difficultés d’analyse que cela pose, nous prendrons un exemple plus détaillé. Exemple : le marché de l’électricité. Gilles Balbastre, EDF, les apprentis sorciers, 2006 Corrigé à faire

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B. Une politique de la concurrence contre la politique industrielle ? Les principes de la politique de la concurrence conduisent à remettre en question la politique industrielle, c'est-à-dire l’intervention des pouvoirs publics dans le soutien à certaines activités économiques (ce qu’on appelle sa fonction d’allocation). C’est quelque chose que l’on sent déjà à la fin du documentaire de Balbastre. Pourquoi peut-on dire que la dérégulation du marché de l’électricité constitue une entrave à la politique industrielle ? On va reprendre cette question de façon argumentée, avec un dernier travail sur document.

Document 4 – Où s’arrête la politique de la concurrence face à la politique de l’innovation ? « Le consensus qui a prévalu au cours des dernières décennies était que l’innovation et la croissance

dépendaient avant tout du libre jeu du marché et de la pression accrue de la concurrence. L’intervention active de l’Etat était supposée néfaste en raison du manque d’information et des comportements pervers de ses agents censés entraîner des distorsions dans le jeu des marchés. Seule une intervention passive consistant à faire respecter les règles concourant au bon fonctionnement du marché était officiellement admise. Dans ces conditions, les interventions traditionnelles de politique industrielle, consistant pour l’essentiel à soutenir le développement de secteurs industriels aux contours technologiques et de marché supposés bien établis (énergie, communication, transport) et à favoriser l’émergence de champions nationaux, ont régressé. La politique industrielle sans dire son nom, y compris dans sa dimension spatiale, a emprunté de manière privilégiée d’autres canaux que l’investissement public : politique de la concurrence, déréglementation, politique fiscale, dont l’objectif commun était de créer un environnement favorable à l’innovation sans interférer directement avec le choix par les entreprises des activités ou des produits. Il s’est agi, en l’occurrence, de substituer aux choix de la puissance publique, qui n’est plus supposée bien informée et bienveillante, un système efficace d’incitations des agents privés aussi bien que publics qui doit permettre une accélération du rythme des innovations.

« […] Sans vouloir nier l’importance et la pertinence d’une telle évolution de l’action publique, il faut convenir que la réalité est plus complexe que le discours censé en rendre compte. L’exigence de coordination et le poids reconnu à la dissémination des technologies fait que l’action publique ne doit ni se limiter à se substituer à un marché défaillant, ni faire simplement place à des règles censées permettre de mimer un marché parfait. Quand la R&D privée s’avère insuffisante, la solution ne consiste pas à simplement accroître les sommes allouées aux entreprises pour faire de la R&D, par le canal de subventions ou de déductions fiscales, mais à créer les conditions d’une meilleure coordination des investissements, dont ceux consacrés à la R&D […]. « Bien sûr, il existe un dilemme : la nécessité de coopérer se heurte à l’exigence du maintien de la concurrence sinon praticable, du moins équitable. Mais c’est bien ce qui rend nécessaire de jouer la complémentarité entre politique de l’innovation et politique de la concurrence : la première est dédiée à favoriser la coopération, la seconde à sanctionner les pratiques anticoncurrentielles ».

Gaffard, « Politique industrielle et politique de l’innovation », in La politique économique et ses instruments, 2010 « La politique de contrôle des aides d’Etat, confiée à la Commission, est destinée non seulement à combattre leurs éventuels effets anticoncurrentiels, mais s’est vue également assigner un objectif de réduction de leur niveau global. […] « Dans le cadre théorique de marchés en concurrence pure et parfaite, une intervention de l’Etat pour soutenir une entreprise ou un secteur déterminé aboutit à une situation sous-optimale, puisqu’elle permet le maintien ou l’apparition de capacités de production inefficaces […]. Toutefois, la théorie économique donne dans certains cas des arguments en faveur de l’intervention de l’Etat pour soutenir une entreprise ou une activité : il s’agit des aides au profit des secteurs caractérisés par des externalités positives, de fortes économies d’échelle ou des aides à la restructuration des entreprises. […] La législation communautaire […] tient compte de l’existence d’externalités positives dans certaines activités. […] Toutefois, ces aides restent soumises à un régime d’autorisation souvent considéré comme contraignant ».

Strassel, « La politique communautaire des aides d’Etats », in La politique économique et ses instruments, 2010 Question unique : Relever dans le document, sous forme d’un tableau à deux colonnes, les arguments en faveur d’une dominance de la politique industrielle, et les arguments en faveur d’une dominance de la politique de la concurrence. Tableau à faire…

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Conclusion du chapitre :