Chapitre 3 Le Choix Des Consommateurs Et La Demande Des Biens

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    CHAPITRE 3 LES CHOIX DU CONSOMMATEUR ET LA DEMANDE DES BIENS 31

    3

    Les choix du consommateuret la demande des biens

    Lobjet de ce chapitre est le comportement dun consommateur typique enconomie de marchs. Lexplication qui en est donne consiste dire, en rsum,que ce quil achte est ce quil prfre, dans les limites de ses moyens. Cetteargumentation trs simple, et trs ancienne en science conomique, a reu au fildes annes une formulation scientifiquement rigoureuse, que nous rsumonscomme suit.

    La section 3.1propose tout dabord un instrument de description des prfrencesindividuelles, appel prordre de prfrence, et reprsent graphiquement par lacarte d indi ffrence.

    La section 3.2spcifie ensuite, et reprsente par la contrainte du budget, leslimites dans lesquelles tout consommateur doit restreindre ses choix, dans uneconomie de marchs.

    La section 3.3dtermine alors le choix rationnel appel quilibr e duconsommateur comme celui qui, dans les limites du budget, est prfr tousles autres. Pour chacun des biens considrs la quantit ainsi choisie constitue la

    demande de ce bien par le consommateur. La section 3.4 examine enfin comment,lorsque les prix et/ou le revenu changent,le choix du consommateur sadapte en consquence, et donc sonquilibre se dplace.Cest ce quexpriment et rsument lacourbe de demandede chaque bien, ainsi queles dplacements le long de la courbe et les dplacements de celle-ci.

    Lannexe ce chapitre introduit le concept dlastici t, et son application lacourbe de demande.

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    32 PARTIE I ANALYSE MICROCONOMIQUE

    Section 3.1Les prfrences

    Pour donner un contenu lide de base de ce chapitre, selon laquelle le consom-mateur achte ce quil prfre 1, nous prsentons dans cette premire section loutilde raisonnement mis au point par la science conomique contemporaine pourdcrire ce que sont des jugements de prfrence individuels portant sur des biensconomiques. Au dpart de simples axiomes que les prfrences sont censesrespecter (1), celles-ci peuvent tre illustres sous une forme graphique trscommode (2), facile interprter conomiquement (3).

    Notons bien quil ne sagit dans cette section-ci que de dcrire les prfrences, etnon pas encore les comportements dachat eux-mmes. Ces derniers, tels quilsdcoulent de ces prfrences, feront lobjet des sections suivantes.

    1 Axiomes sur les prfrences

    La description des prfrences dun individu quelconque savre possible, tout enprservant sa subjectivit, si lon admet quelles ont une certaine structure. Le mini-mum dont nous aurons besoin dans cet ouvrage, est prcis dans les axiomes suivants.

    Soit un consommateur qui considre divers paniers contenant deux biens de la bire (b) et du vin (v) paniers diffrant les uns des autres uniquement parles quantits qb etqvde ces deux biens quils contiennent. Le tableau 3.1 en donnecinq exemples : les paniers dsigns par les lettres X, Y, Z, YetY*, dont le contenuest constitu par les coordonnes des points correspondants sur la figure 3.1. On

    pourrait imaginer dautres paniers, qui seraient reprsents par dautres points du

    1 Et pour pouvoir nous en servir par la suite, car la mme ide consistant expliquer les comportements parles prfrences sera utilise au chapitre 7 pour traiter de loffre de travail dun individu et au chapitre 8 pour sonoffre dpargne. Cette varit daspects du comportement humain que lapproche par les prfrences permetdaborder montre bien son caractre fondamental et unificateur.

    Panier Composition du panierde biens Quantit de bire Quantit de vin

    (litre/unit de temps) (litre/unit de temps)qb qv

    X 30 40Y

    20 30Z 20 20Y 30 20Y* 25 25

    Tableau et figure 3.1

    vq0 10 20 30 40

    10

    20

    30

    Y

    bq

    X

    Z

    Y

    Y

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    diagramme. En fait, chacun des points du quadrant positif de la figure 3.1 (ceuxqui sont reprsents et tous les autres) dsigne par ses coordonnes un panier debiens diffrent.

    Axiome de comparaison En prsence de deux paniers quelconques appelons-les A et B comprenant chacun diverses quantits des deux biens b et v, le consommateur

    peut toujours exprimer lun des trois jugements alternatifs suivants : ou bien il prfrele panier A au panier B ; ou bien il prfre le panier B au panier A ; ou encore il estindiffrent entre les paniers A et B, c.--d. quil les considre comme quivalents.

    Cet axiome postule que le consommateur est capable de comparer entre eux les divers paniers debiens, et dnoncer leur propos un jugement de prfrence ou dindiffrence. Laxiome postuleaussi que le consommateur peut ainsi classer tousles paniers imaginables.

    Axiome de transiti vitSoient trois paniers quelconques A, B et C; si le panier Aest prfr ou indiffrent au panier B, et le panier B est prfr ou indiffrent au panierC, alors le panier A est prfr ou indiffrent au panier C.

    Cet axiome revient postuler que les jugements de prfrence du consommateur ne sont pas

    incohrents (ils le seraient si le consommateur affirmait que Cest prfr A).

    Axiome de dominance (ou de non satur ati on) Soient deux paniers A et B, necontenant que des biens b et v ; si le panier A contient plus de v que le panier B, etcontient autant ou plus de b, alors le panier A est prfr au panier B.

    En termes simples, plus est prfr moins, toutes autres choses restant gales.

    Axiome de substi tuabil i tSoient deux paniers de biens B et C ne contenant quedes biens b et v, le panier C contenant autant de b que le panier B, mais un peu moinsde v ; B est prfr C (par dominance), mais il existe une certaine quantit, si petitesoit-elle, de b telle quen lajoutant au panier C, le nouveau panier obtenu, Bsoit

    indiffrent B pour le consommateur.

    Ceci revient dire que lorsquun panier est jug prfrable un autre, il y a moyen decompenser : le consommateur admet quil est toujours possible de rendre le second panierindiffrent au premier en compensant linsuffisance dun bien par un surplus dun autre bien.

    Axiome de convexitstricte Soient deux paniers de biens A et B contenant desquantits diffrentes des biens b et v, mais entre lesquels le consommateur est indiff-rent. Le panier C, compos dune moyenne arithmtique des quantits de b et de vcontenues dans A et dans B, est toujours prfr ces deux derniers.

    Laxiome revient supposer que, en cas dindiffrence entre paniers diffrents par leur composition,le consommateur prfre toujours un compromis sous la forme dune moyenne des deux.

    Nous allons montrer ci-dessous que si un individu respecte ces axiomes dans sesjugements, alors il est possible de classer, selon ses prfrences et en tenant comptedes cas dindiffrence, tousles paniers de biens quon pourrait lui prsenter. Un telclassement logique est appel prordre2 ; puisquil est fond sur des jugementsde prfrence, on dit prordre de prfrence.

    2 Et non ordre, car on ne pourrait ordonner les paniers indiffrents. Nous empruntons ici un vocabulairepropre aux mathmatiques.

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    34 PARTIE I ANALYSE MICROCONOMIQUE

    2 La carte dindiffrence

    Mais le prordre de prfrence est un concept abstrait, peu facile manier. Heureu-sement, il se prte une reprsentation graphique suggestive : la carte dindiff-rence . Celle-ci reprsente lensemble des paniers prfrs et ceux qui sontindiffrents au moyen dune famille de courbes, appeles courbes dindiffrence.

    Relations 3.1

    Figure 3.1

    Panier Composition du panierde biens Quantit de bire Quantit de vin

    (litre/unit de temps) (litre/unit de temps)qb qv

    X 30 40Y 20 30Z 20 20Y 30 20Y* 25 25

    Tableau 3.1

    Les jugements de prfrence dun consommateur face divers paniers de biens

    Expression formelle des axiomes sur les prfrences dun consommateurquant aux paniers de biens reprsents la figure 3.1.

    Pour toute paire de paniers de biens, par exemple Xet Y,il existe une relation f entre ces deux paniers*, qui spcifie que, pour ce consommateur,ou bien Xest prfr Y(X Yf ), ou bien Yest prfr X( Y Xf )ou encore Xest indiffrent Y(X Y~ ).

    Pour tout triplet de paniers, par exemple X, Yet Z,si pour ce consommateur X f Y et Y f Z,alors pour lui aussi X f Z.

    Pour toute paire de paniers Y q q= ( )b v, et Z q q= ( )b v, qui sont tels queou bien q q q q b b v vet= > , ou bien q q q q b b v vet> = , ou encore q q q q b b v vet> > ,on a chaque fois Y Zf .

    Pour toute paire de paniers Y q q= ( )b v, et Z q q= ( )b v, , qui sont tels que Y Zf ,il existe une quantit dqb(ou dqv) qui, ajoute Z,permet de constituer un nouveau panier = + Y q q q ( d )b b v,qui est tel que Y Y~ .

    Pour toute paire de paniers indiffrents, Y Y~ par exemple,le panier moyen Y Y Y = + a ( a)1 , o 0 1< a < ,est toujours tel que Y Y Y f ~ .

    * ne pas confondre avec la relation plus souvent utilise, et qui spcifie est suprieur ou gal .

    Axiome

    de comp araison

    Axiome

    de transit iv i t

    Axiome

    de domin ance

    Axiome

    de substit uabilit

    Axiome

    de con vex itstri cte

    vq0 10 20 30 40

    10

    20

    30

    Y

    bq

    X

    Z

    Y

    Y

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    laide des axiomes que nous avons poss,nous allons construire dabord une de cescourbes, et ensuite lensemble de celles-ci, cest--dire la carte dindiffrence. Nousobtiendrons ainsi ce que nous avons annonc :un outil de reprsentation des prfrences.

    a Constructiondune courbe dindiffrence

    Partons du panier de biens Y, qui contient20 litres de bire et 30 litres de vin (tableau etfigure 3.2). Supposons alors quune certainequantit dun des biens, dix litres de vin,par exemple, soit enleve ce panier : lacombinaison de biens Zest obtenue ; selon lepremier axiome (comparaison), le consom-mateur est capable de choisir entre Y et Z;selon le troisime axiome (dominance), ilchoisira Y, car plus est prfr moins;selon le quatrime axiome (substituabilit), ilexiste cependant une certaine quantit delautre bien (la bire) qui, ajoute au panier Z,donnera naissance un nouvel assortiment,quivalent Yaux yeux du consommateur;soit dans lexemple, une quantit de dix litresde bire : en lajoutant au panier Z, nousobtenons le nouveau panier Yqui est indiffrent Y.

    Rptons ce type dexprience, mais ennenlevant cette fois Y quune plus petitequantit de vin : cinq litres par exemple. Nousobtenons un nouveau panier Y, indiffrent Y, grce une petite adjonction de bire; lepoint reprsentant ce panier se situe ncessai-rement droite et en dessous du panier Y.Lexprience peut encore tre rpte pour unprlvement de vin suprieur 10 litres : elleaboutit alors la dtermination dun autre

    panier, lui aussi indiffrent Y, tel que Y

    . En faisant varier davantage les quantits

    de bire et de vin que contient le panier Y, eten veillant obtenirtoujours des paniers indif-frents Y, nous obtenons encore dautrespoints : la limite, lensemble de ces pointsforme la courbe continue I2, qui passe par Y.Cest la courbe dindiffrence.

    Relations 3.2

    Tableau 3.2

    (A) Cas de la figure 3.2

    quation de la fonction de satisfaction reprsente autableau et la figure 3.2 :

    S q q= b v

    (B) Cas gnral

    Forme gnrale de la fonction de satisfaction :

    S f q q = C b v( ),

    Figure 3.2

    La carte dindiffrence dun consommateur

    Panier Composition Courbe dindiffrencede biens du panier laquelle appartient

    le panierqb qv

    X 30 40X 40 30 I4M M M

    Y* 25 25I3

    M M M

    Y 20 30Y 30 20

    I2Y 22,5 25

    M M M

    Z 20 20I1M M M

    vq0 10 20 30 40

    10

    20

    30

    bq

    40

    50

    Y

    Y

    Y

    Z Y

    Y*

    X

    X

    I1

    I2

    I3

    I4

    50

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    Une courbe dindi ffrence, associe un panier donn, est une courbe dont chacundes points reprsente un panier de biens jugpar le consommateur indiffrent ce panier.

    Notons immdiatement trois proprits de cette courbe :

    (a) Elle descend de gauche droite. En effet, si elle tait montante de gauche droite, ses

    points successifs au fur et mesure que lon scarte de lorigine seraient prfrs les uns auxautres, en vertu de laxiome de dominance : ce ne serait donc plus une courbe dindiffrence.

    (b) La courbe peut parfaitement rencontrer les axes (lordonne aussi bien que labscisse).Cest mme l le cas gnral.

    (c) En vertu du cinquime axiome, une courbe dindiffrence est convexe par rapport lorigine des axes. En effet, si nous considrons deux paniers indiffrents : Yet Y, le panier Y*compos de la moyenne arithmtique du contenu des deux premiers (et prfr ceux-ci parhypothse) se situe le long de la corde qui joint les points Yet Y; ds lors, des paniers interm-diaires et indiffrents YetY, tel par exemple Y, doiventse situer en dessous et gauche de cettecorde. La courbe dindiffrence est donc convexe entre Yet Y, tout comme entre toute autrepaire de ses points.

    b Construction de la carte dindiffrence

    Dans la figure 3.2, lopration de substitution de quantits de bire des quan-tits de vin peut tre mene partir du panier X, plutt qu partir du panier Y:

    Figure 3.2

    on construit alors une nouvelle courbedindiffrence, passant cette fois par le pointX, qui reprsente lensemble des paniersindiffrents Xet indiffrents entre eux.

    Soit le panier X, considr comme indif-frent X. Sachant que Xest prfr Y, Xest

    donc prfr Y (axiome de transitivit).Dune manire gnrale, tous des paniers ap-partenant la mme courbe dindiffrence queX sont prfrs tous des paniers appartenant la mme courbe dindiffrence que Y.

    Rptons plusieurs fois lopration d-crite en (a), partir de divers autres points dudiagramme tels que Y*, ou Z par exemple,cest--dire au dpart de divers autres paniersde biens. On obtient une famille de courbesembotes les unes dans les autres. Cest lacarte dindiffrence.

    La car te d i ndi f frence dun consommateur est la famille de courbesdindiffrence dcrivant ses prfrences lgard de tous les paniers de biensconcevables.

    3.1

    3.2

    vq0 10 20 30 40

    10

    20

    30

    bq

    40

    50

    Y

    Y

    Y

    Z Y

    Y*

    X

    X

    I1

    I2

    I3

    I4

    50

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    3 Interprtation

    a Carte dindiffrence et niveaux de satisfaction

    En vertu des axiomes de dominance et de transitivit, le principe suivant sapplique la carte dindiffrence : plus le consommateur se situe sur une courbe dindif-

    frence leve, plus son niveau de satisfaction est lev. En effet, chaque courbereprsente un ensemble de combinaisons de biens quivalentes entre elles, maisprfres lensemble des combinaisons reprsentes par les courbes dindiffrenceinfrieures. Les courbes dindiffrence peuvent donc tre vues comme des courbesde niveau de satisfaction ; ce niveau crot au fur et mesure que lon sloigne delorigine des axes3.

    Ds lors, tout dplacement du consommateur dune courbe dindiffrence uneautre signifie pour lui un changement dans son degr de bien-tre, cest--diredans la satisfaction des besoins quil prouve.

    Plus gnralement, ceci revient dire que la satisfaction du consommateur apparat comme unefonction (au sens mathmatique du terme) des quantits consommes. Cette fonction, dont

    lexpression gnrale est donne par la relation 3.2B et un exemple particulier par la relation3.2A, est dailleurs appele fonction de satisfaction 4. Dans le cas de lexemple numrique dutableau et de la figure 3.2, o il est postul que la fonction de satisfaction est de la forme nonce la relation 3.2 A, on peut dduire que le panier Yfournit une satisfaction gale 20 30 = 600,de mme que les paniers Yet Y(qui sont dailleurs indiffrents Y), tandis que le panier Xfournit une satisfaction de 30 40 = 1200, tout comme le panier X.

    Est-il raliste de quantifier ainsi numriquement les satisfactions? Bien des auteurs sy refusent,notamment parce que lon ne voit pas trs bien dans quelles units mesurer les utilits. Heureu-sement pour la suite de notre propos, ce nest pas ncessaire : on peut en effet se borner classerles niveaux dindiffrence, comme nous lavons fait, sans pour autant devoir les chiffrer au moyende la fonction particulire de la relation 3.2A. Dailleurs dautres fonctions auraient pu servirpour reprsenter la carte dindiffrence de la figure 3.2. Et nous ne nous servirons dans la suite

    que du classement que reprsente la carte dindiffrence, sans nous aventurer dans une mesurenumrique des satisfactions.

    b Courbes dindiffrence et substitution entre les biens

    Tout dplacement le long dune courbe dindiffrence sinterprte comme un passage dunassortiment de biens un autre, passage qui est caractris par deux traits essentiels : la substitutionentre les biens, et le maintien un niveau inchang de la satisfaction du consommateur.

    La substitution entre les biens le long dune courbe dindiffrence se mesure par le taux desubstitution dun bien un autre, qui se dfinit comme tant

    le rapport entre quantits de biens cdes (numrateur) et quantits obtenues (dnominateur),

    qui laissent le consommateur en tat dindiffrence, cest--dire un niveau constant de

    satisfaction.

    Au lieu de considrer une substitution dune ampleur quelconque, on effectue habituellementla mesure en ne considrant quuneunit au dnominateur. On parle alors de taux marginaldesubstitution. Ainsi par exemple au point Y1de la figure 3.3, ce taux est de 5,45 pour 1, au point Y3

    3 Remarquons quil est logiquement impossible que deux courbes dindiffrence se croisent.4 On dit parfois aussi fonction dutilit, le mot utilit tant entendu dans le mme sens que satisfaction.

    3.3

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    il est de 1,4 pour 1, au point Y9il est de 0,16 pour 1, etc. Il sagit toujours dun rapport entrequantit cde et quantit obtenue, mais cette dernire tant unitaire, le rapport est alors gal la valeur du seul numrateur5.

    En calculant le taux marginal de substitution du consommateur en chacun des points dunecourbe dindiffrence, on constate que ce taux est dcroissant6lorsquon se dplace de gauche droite. Cette caractristique est commune toutes les courbes dindiffrence. Une interprtationintuitive de ce phnomne peut tre facilement donne : plus on dispose dun bien, plus grandeest la quantit de celui-ci que lon est prt sacrifier pour une quantit donne dun autre bien;ou inversement, moins on a dun bien, moins on est prt en abandonner pour une unit dun

    autre bien.

    c Gnralit de la reprsentation des prfrences

    Comme lnonc des jugements de prfrence peut varier dun individu lautre,le prordre est essentiellement subjectif, et propre chaque consommateur. Lescartes dindiffrence individuelles qui en rsultent varient donc dune personne lautre.Dailleurs, comme la description de ces jugements nest pas fonde sur les mobilesqui y ont conduit, elle nexclut aucune thique individuelle7.

    Figure 3.3

    Panier Composition Taux marginalde des paniers de substitution

    biens (en litres) (approch)qb qv

    q

    qq

    b

    v

    vo = 1

    Y1 60 105,45

    Y2 54,55 11Y3 30 20

    1,40Y4 28,6 21Y5 20 30

    0,65Y6 19,35 31Y7 15 40Y8 12 50Y9 10 60

    0,16Y10 9,84 61

    Tableau 3.3

    La courbe dindiffrence et le taux marginal de substitution

    5 On peut formuler aussi le taux marginal de substitution en termes de la drive de pbpar rapport pvenchaque point de la courbe dindiffrence. Mais nous naurons pas besoin de lutiliser sous cette forme.

    6 Logiquement, elle rsulte de la forme strictement convexe de la courbe dindiffrence, due elle-mme lundes axiomes qui ont servi la construire.

    7 Beaucoup dauteurs invoquent la notion dutilit des biens plutt que celle de prfrence entre paniersalternatifs pour expliquer les choix de consommation. Cette ide, convaincante premire vue (lutilit du painou des chaussures est assez vidente) conduit vite des difficults logiques (que signifie lutilit des cigarettes ?) etpratiques : comment mesurer les utilits pour pouvoir dire si un bien est plus utile quun autre ? cet gard, lanotion de prfrence est plus neutre et respecte davantage la subjectivit de lagent conomique.

    bq

    10

    0 20 30 40 50 60 vq

    20

    30

    40

    50

    60

    10

    Y1

    Y2

    Y3

    Y4

    Y5Y

    6

    Y7

    Y8 Y

    9 Y10

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    De plus, les prfrences dun individu ne sont pas supposes immuables dansle temps : elles peuvent parfaitement se modifier, ainsi que la carte dindiffrencequi les illustre. Nous supposons seulement qu chaque moment du tempselles conservent leur cohrence logique, cest--dire quelles respectent lesaxiomes.

    Par ailleurs, nous avons raisonn sur deux biens seulement; il ny a cependant

    aucune difficult de principe appliquer les mmes arguments des paniers detrois biens, de cent biens, ou de nbiens. Pour la commodit de lexpos, nousnaborderons cependant pas cette gnralisation.

    Enfin, et comme nous lavons dj mentionn, le concept de carte dindiff-rence, ainsi que le prordre que celle-ci reprsente, postulent seulement que leconsommateur soit capable de comparer entre eux et de classer les paniers debiens. Il nest pas suppos prciser lintensit de sa prfrence, ni mesurer la quantitde satisfaction ou dutilit quil retire de ces paniers. Seul compte, pour lesbesoins de cet ouvrage, le classement de ceux-ci.

    Section 3.2La contrainte du budget

    Dans la section prcdente, on a ignor la question de savoir comment le consom-mateur se procurerait les paniers de biens envisags et, en particulier, sil pourraitse les payer. Cest ce qui sera examin ici.

    Par la nature mme du problme conomique, le consommateur na que desmoyens limits pour satisfaire ses besoins. Le moyen limit est, dans ce cas, lebudget dont il dispose. Tous les paniers de biens que dcrivent les courbes dindif-frence ne lui sont donc pas galement accessibles : son budget lempche dedpasser un certain seuil, quil faut maintenant dfinir et reprsenter.

    Ces limites sont essentiellement dtermines par le montant de son revenu, ainsique par les prix des biens considrs.

    1 Choix accessibles et choix inaccessibles

    Soit un revenu R= 600Set deux biens, la bire et le vin, le prix de la bire tant

    pb= 10Sle litre et celui du vinpv= 15Sle litre. Si tout le revenu est consacr labire, la quantit maximum quil est possible dacheter est de 60 litres ; sil lest auvin, cette quantit est de 40 litres. Ces deux choix alternatifs apparaissent dans letableau et sur la figure 3.4 comme les paniers Aet B.

    Partant alors du cas A, supposons que le consommateur se ravise et dcidedacheter tout de mme un litre de vin. Son revenu tant fix 600S, il ne pourrale faire quen achetant moins de bire. Aux prix auxquels se vendent les deux biens,

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    il lui faudra renoncer un litre et demi de bire pour librer une somme suffisante(soit 1,5 10S= 15S) lachat dun litre de vin. Il se retrouvera donc au point C,qui correspond lachat dun panier comportant 58,5 litres de bire et 1 litre de vin.

    En rptant cet argument pour une plus grande quantit de vin, soit cette foisqv= 2 litres, on constate que les limites du mme budget ne permettent plus dache-ter que 57 litres de bire, ce qui correspond au panier Ddans le tableau et sur la

    figure. En poursuivant de la mme manire, on peut construire dautres paniersque permet dacheter un revenu de 600S, aux prix en vigueur : ainsi par exempleles paniers E, F, et G, et mme B. Remarquons quils sont tous situs sur une mmedroite, celle qui joint les points Aet B.

    Mais en fait, tous les paniers contenant des quantits qbet qvque permet 600Sdoivent satisfaire lgalit

    10 15 600q qb v+ =

    Cette expression est appele contrainte de budget du consommateur et ladroite ABqui la reprsente gomtriquement est sa droite de budget. En termesgnraux :

    La droite de budgetdu consommateur est une droite dont chacun des pointsreprsente un panier qui occasionne une mme dpense totale, dpense qui estgaleson revenu.

    Les points situs en dede la droite de budget (Met Npar exemple) reprsen-tent des paniers pour lesquels la dpense est infrieureau montant du revenudisponible, comme le montrent dailleurs les lignes Met Nde la dernire colonnedu tableau 3.4. Il y a pargne dans ces cas (cf. le chapitre 8).

    En revanche, un point tel que P, situ au-delde cette droite, reprsente unpanier pour lequel la dpense est suprieureau revenu. Alors que tous les pointsprcdents taient accessibles au consommateur, ce dernier ne lest pas.

    Ainsi, la droite de budget apparat comme unefrontire entre choix accessibles etinaccessiblesau consommateur, tant donn son revenu et les prix des deux biens.Par analogie avec ce qui a t dit au chapitre 2, on pourrait lappeler droite despossibilits de consommation ; cest pourquoi le revenu est considr par la thoriemicroconomique comme une contrainte qui limite les choix du consommateur.

    2 Pente de la droite de budget et prix des biens

    La droite de budget est incline de gauche droite, pour la raison videntequele long de celle-ci, lacquisition de chaque nouveau litre de vin requiert labandon dune quantit de bire de 1,5

    litre. En dautres termes, lorsque le revenu est totalement dpens, le remplacement dun bienpar lautre se fait dans le rapport 1,5/+1, cest--dire de 1,5 unit de bire pour +1 unit de vin.Convenons de reprsenter par dqb/dqvle rapport de ces deux quantits (o dqb est la quantitngative de bire et dqv la quantit positive de vin), et observons sur la figure 3.4 que gomtri-quement, ce rapport sinterprte comme la pente ngative de la droite de budget.

    Par ailleurs les prix des deux biens sont respectivement depb= 10Sle litre pour la bire et depv= 15Spour le vin, et sont donc dans le rapportpb/pv= 10/15, soit +1/+1,5.

    3.4

  • 8/10/2019 Chapitre 3 Le Choix Des Consommateurs Et La Demande Des Biens

    11/26

    CHAPITRE 3 LES CHOIX DU CONSOMMATEUR ET LA DEMANDE DES BIENS 41

    On peut ds lors noncer la proprit suivante :

    La pente de la droite de budget est ngative et gale, au signe prs,

    linverse du rapport des prix des biens figurant en ordonne et en abscisse.

    Dans les notations que nous venons dadopter, dqb/dqv=pb/pv.

    Avant de terminer cette section, notons encore que le revenu dont il est questionici sentend comme relatif une certaine priode de temps : par exemple un mois,ou mme une anne entire. La longueur de la priode retenue importe peu, maisil est essentiel de raliser que lanalyse est ncessairement insre dans le temps,celui-ci tant implicitement dcoup en priodes dgale longueur.

    Relations 3.4

    Figure 3.4Tableau 3.4

    La contrainte de budget dun consommateur

    (A) Cas de la figure 3.4

    quation de la droite de budget de la figure 3.4 : 15 10 600q qv b+ = ou q qb v= 600

    10

    15

    10

    Pente de la droite :d

    d

    b

    v

    q

    q=

    15

    10

    (B) Cas gnral

    Forme gnrale de la contrainte de budget : p q p q R v v b b+ =

    Pente de la droite de budget :d

    d

    b

    v

    v

    b

    q

    q

    p

    p=

    Paniers Composition des paniers(a) Montant(a)

    alternatifs (en litres) de la dpense

    qb qv

    A 60 0 600C 58,5 1 600D 57 2 600E 55,5 3 600F 54 4 600

    G 30 20 600M 20 20 500N 20 10 350P 20 30 650B 0 40 600

    (a)

    Le revenu du concommateur est R= 600 3. Le prix de la bire estpb= 103le litre. Le prix du vin est pv= 153le litre.

    3.1

    vq0 10 20 30 40 50

    10

    20

    30

    N M

    G

    bq

    40

    50

    60

    P

    A

    B

    F

    0

    FE

    DC

    A

    12345

    54

    57

    60 Pente :

    1,5

    1

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    42 PARTIE I ANALYSE MICROCONOMIQUE

    Section 3.3Lquilibre du consommateuret la demande des biens

    ce stade, nous avons notre disposition un ensemble dlments qui intervien-nent de manire importante dans la dtermination des comportements possiblesdu consommateur : dune part ses prfrences, qui permettent de classer ses choixventuels; dautre part son budget et les prix, dans les limites desquels ses choixsont restreints.

    En posant maintenant lhypothse dun comportement rationnel, ces lmentsvont apparatre comme suffisants pour identifier et justifier un comportementdachat bien prcis, appel quilibre du consommateur.

    1 Dtermination de lquilibre

    Si lon admet que le consommateur se comporte conformment aux axiomes eten particulier ceux de dominance et de transitivit il est logique den dduireque celui-ci choisit le panier de biens quil prfre. De manire un peu plus image,cela revient dire que tout consommateur dsire se situer sur la courbe la plusleve de sa carte dindiffrence, ou encore quil sefforce datteindre un niveaumaximum de satisfaction8.

    Dautre part, la raret des ressources, que traduit au niveau du consommateur lacontrainte de son budget, loblige se limiter aux choix qui lui sont accessibles.

    Ces deux exigences ne sont que partiellement contradictoires, comme le montrela figure 3.5. Une carte dindiffrence et une droite de budget y ont t traces dansle mme diagramme. Il apparat immdiatement que la contrainte budgtaire rendinaccessible la combinaison de biens correspondant au point Het la courbedindiffrence I3. Par contre, la combinaison F, situe sur la courbe dindiffrenceI1,est sa porte, de mme que la combinaison Gqui lui cote dailleurs moinscher pour le mme niveau de satisfaction ; mais la courbe I1nest pas la plus levepossible : en passant lassortiment E, le consommateur accrot sa satisfaction(courbe I2), tout en restant dans les limites de son budget ; il choisira donc certai-nement Eplutt que Fou G. Pourrait-il encore amliorer sa situation? La rponseest ngative : par rapport E, aucun autre point accessible (cest--dire situ sur

    ou en de de la droite de budget) natteint une courbe dindiffrence aussi leveque I2, et aucun des points prfrs ceux de la courbe I2(courbes suprieures)nest accessible avec le budget disponible.

    8 Toutes ces expressions ne sont en fait que des prsentations diffrentes du mme fait fondamental, relev dsle chapitre 1 : le caractre insatiable des besoins humains.

  • 8/10/2019 Chapitre 3 Le Choix Des Consommateurs Et La Demande Des Biens

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    CHAPITRE 3 LES CHOIX DU CONSOMMATEUR ET LA DEMANDE DES BIENS 43

    Le choix dun assortiment tel que E 30 litres de bire et 20 litres de vin estla situation dite dquilibre du consommateur. Celui-ci est dfini comme

    le panier de biens prfrpar le consommateur, parmi tous ceux qui lui sont

    accessibles dans les limites de son budget.En dautres termes, lquilibre est la situation qui lui procure la satisfaction la

    plus grande possible.

    2 Proprits formelles de lquilibre

    Le point dquilibre Eest le seul pointainsi prfr, tout en tant accessible ; lquilibre estdonc unique, cest--dire quun seul choix9sera fait : celui de 30 et 20 litres, respectivement.

    Le point Ejouit aussi de la proprit gomtrique suivante : la droite du budget y est tangente une courbe dindiffrence(figure 3.5). Le point Eest le seul avoir cette proprit. En effet, parchacun des autres points de la droite de budget il passe aussi une courbe dindiffrence (parexemple au point F), mais celle-ci est toujours scante.

    9 On peut montrer que si la courbe dindiffrence ntait pas strictement convexe au point dquilibre,mais bien une droite, et que celle-ci tait par hasard exactement de mme pente que la droite de budget, il yaurait bien quilibre, mais celui-ci ne serait pas unique. Cest en vue dassurer cette unicit que nous avonspos laxiome de stricte convexit.

    Figure 3.5Relations 3.5

    Lquilibre du consommateur

    tant donn :

    le prordre de prfrence illustr par la famille descourbes dindiffrence I1, I2, I3, et reprsent analy-tiquement par la fonction :

    (1) S f q q = C b v( ),

    la contrainte de budget illustre par la droite AB, etexprime par lquation :

    (2) 600 10 15= ( ) + ( )q qb v

    lquilibre du consommateur, dfini comme les quantits qbetqvprfres parmi toutes celles que la contrainte de budgetrend accessibles, est la solution du problme mathmatique

    Trouver le maximum de la fonction (1)en termes des variables qbet qv ,

    sous rserve que ces dernires satisfassent lquation (2)

    La solution peut tre calcule par la technique des multiplica-teurs de Lagrange. Mais tel nest pas notre but, ici. Lintrtde cette formulation mathmatique est de montrer lanature logique du concept dquilibre du consommateur.

    3.5

    vq0 10 20 30 40 50

    10

    20

    30

    bq

    40

    50

    60

    EH

    G

    A

    B

    F

    I1

    I2

    I3

  • 8/10/2019 Chapitre 3 Le Choix Des Consommateurs Et La Demande Des Biens

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    44 PARTIE I ANALYSE MICROCONOMIQUE

    La thorie des choix du consommateur peut tre tendue au cas dun nombre de biensplus grand que deux, ce qui en accrot le ralisme. Cette gnralisation noffre pas de difficult deprincipe, mais bien dexposition; cest pourquoi elle relve de traits plus avancs que ce manuel.Elle repose toutefois sur le mme concept que celui quon vient de voir : quel que soit le nombredes biens, lquilibre du consommateur est toujours dfini comme le panier quil prfre dans leslimites de son budget.

    3 La demande des biens

    Lintrt principal du concept dquilibre du consommateur est didentifier uncomportement prcis de lagent conomique tudi, compte tenu des circonstancesde prix et de revenu o il se trouve. Ainsi, il permet de prdire que sile consom-mateur a les prfrences reprsentes par la carte dindiffrence de la figure 3.5, siil dispose dun revenu de 600S, et siles prix des deux biens sont de 10 Set 15Srespectivement, alorsil achtera 30 litres de bire et 20 litres de vin.

    Ceci conduit dfinir une nouvelle notion, celle de demande individuelle

    pour les divers biens. On appelle la demande individuelle dun bien :la quantitde ce bien quun acheteur est prt acqurir, au cours dune priodedtermine, aux prix en vigueur et dans les limites du revenu dont il dispose.

    Pour le consommateur dont nous avons dcrit lquilibre au 1, il est clair quela demande de bire est de 30 litres, et que sa demande de vin est de 20 litres,puisque ce sont l les quantits du panier quil prfre, parmi ceux qui lui sontaccessibles.

    En termes gnraux, la demande individuelle pour nimporte quel bien est doncla quantit qui correspond lquilibre de cet individu, en tant que consommateur.Mais lquilibre dtermine en fait la demande, non pas dun seul bien, mais,

    conjointement, des deux biens la fois ou encore de tous les biens, si on lesincluait tous dans lanalyse. On peut donc dire que la thorie des choix du consom-mateur fournit une explication logique, et ventuellement un instrument deprvision, de la demande individuelle de tous les biens.

    Prcisons pour terminer que la priode dtermine mentionne dans ladfinition ci-dessus de la demande est celle pour laquelle le revenu a t dfiniet au cours de laquelle la consommation a lieu : il sagit donc de la demandejournalire si lon considre un revenu journalier, de la demande mensuelle silsagit du revenu dun mois, etc. Pour lexemple de la bire et du vin qui nous aoccups, les valeurs numriques utilises suggrent quil serait plus raliste de penseren termes dune priode plus longue : six mois par exemple. Mais on peut trans-

    poser tout le raisonnement une priode plus courte, moyennant une adaptationdes chiffres.

    3.6

  • 8/10/2019 Chapitre 3 Le Choix Des Consommateurs Et La Demande Des Biens

    15/26

    CHAPITRE 3 LES CHOIX DU CONSOMMATEUR ET LA DEMANDE DES BIENS 45

    Section 3.4Les dplacements de lquilibreet les courbes de demandedu consommateur

    Pour dterminer lquilibre comme nous lavons fait, nous avons suppos donnset constants trois lments : les prfrences du consommateur, son revenu, et lesprix ces biens sur le march. Or chacun de ces lments est videmment susceptiblede varier.

    Dans la prsente section, nous tudions comment se modifie, ou se dplacelquilibre du consommateur, dune part la suite de variations du prix dun desbiens (1), et dautre part la suite de variations de son revenu (2). Cette tudenous conduira dfinir divers concepts de courbes de demande.

    1 Variations du prix dun bien

    a Pivotages de la droite de budget

    La droite de budget du consommateur a t construite, sur la figure 3.4, en reprantles paniers Aet B, le point Bcorrespondant la quantit de vin (40 litres) quil taitpossible dacheter au prix de 15Sle litre si tout le revenu (600S) y tait consacr,et le point Atant repr de manire analogue. On retrouve ces points AetBsur lafigure 3.6.

    Supposons maintenant que le prix du vin double, passant de 15 30 Spar litre :le point Bse dplace en Cpuisque seulement 20 litres peuvent tre acquis ce prixavec 600S. Si nous supposons que le prix de la bire reste inchang, le point Adela droite de budget na quant lui aucune raison de bouger. Mais on doit tracerune nouvelle droite pour reprsenter un budget de 600Sde revenu au nouveauprixpv= 30 avecpb= 10 inchang : cest la droite AC.

    Il est pratique de remarquer que cette nouvelle droite de budget peut tre vuecomme rsultant dunpivotagede la premire droite (AB) autour du point A. Deplus, la hausse du prix du bien sillustre par un pivotage de la droite de budget versl intrieur , cest--dire vers lorigine des axes: en effet, les possibilits deconsommation se restreignent quand un prix monte !

    Si nous avions envisag une baisse du prix du vin, le pivotage autour du point Ase serait fait vers lextrieur, cest--dire en sloignant de lorigine des axes,refltant un accroissement des possibilits de consommation.

    b Dplacements de lquilibre

    Nous avons vu la section prcdente quaux prix de la bire et du vin respective-ment de 10 et 15Sle litre, et avec la droite de budget ABqui y correspond lquilibrese situe en E2, (repris sur la figure 3.6A).

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    46 PARTIE I ANALYSE MICROCONOMIQUE

    Figures 3.6

    Dplacements de lquilibre du consommateur enfonction du prix et courbe de demande dun bien

    Si maintenant le prix du vin double (celuide la bire restant inchang), cette droitepivote autour du point A et devient AC.Comme la carte dindiffrence comporte par-tout des courbes dindiffrence, la nouvelledroite ACest ncessairement tangente lune

    de ces courbes; et celle-ci doit logiquement(par dominance) tre infrieure celle dupremier quilibre. Un nouvel quilibre, soitE1, dterminera une nouvelle combinaison desdeux biens, prfre toutes celles qui restentmaintenant possibles.

    Si en revanche le prix du vin est rduit 10S, la droite de budget pivote vers lext-rieur autour du point Aet le nouvel quilibreest constitu par les coordonnes du point E3.

    c Construction de la courbe dedemande individuelle dun bien

    De ces dplacements de lquilibre, on dgageun nouveau concept fondamental : celui decourbe de demande du bien dont le prixvarie (le vin dans lexemple qui nous occupe).

    Au dpart de la famille dquilibres de lafigure 3.6A, reportons en effet sur un graphi-que distinct (3.6B) les divers prix du vin enordonne et en abscisse les quantits corres-pondantes qui sont choisies lquilibre par

    le consommateur. Plus prcisment, sur legraphique A, il apparat que pour un prix de15S, la quantit de vin choisie de prfrence toute autre est de 20 litres par semaine (abs-cisse du point E2). Sur le graphique B, ce prixet cette quantit, mesurs respectivementen ordonne et en abscisse, dterminent lepoint e2. Pour un prix de 30S, au contraire, laquantit de vin choisie lquilibre (sur legraphique A, abscisse du point E1) est de 10litres ; ce prix et cette quantit dterminent le

    point e1sur le deuxime graphique.

    Tableau 3.6

    Prix du vin Quantit de vin Pointpv qv dquilibre

    10 30 E315 20 E230 10 E160 0 A

    Si lon rpte ce raisonnement pour un grand nombre de variations du prix duvin, on voit apparatre au second graphique une succession de points tels que e1, e2,e3, etc., prsentant la forme caractristique dune courbe descendante de gauche droite : cest la courbe de demande individuelle du vin.

    En termes gnraux, la courbe de demande dun biense dfinit comme

    la relation qui existe entre les divers prix dun bien et les quantits de celui-ci quelacheteur est prt acqurir, pendant une priode de temps dtermine.3.7

    bq

    vq100 20 30 40 50 60

    10

    20

    30

    40

    50

    60

    10

    20

    30

    40

    50

    60

    vp

    Courbe

    de demande

    du vin

    A

    C

    E3

    e1

    B

    AA

    BB

    I3

    I2

    I1

    I0

    E2E1

    vq100 20 30 40 50

    a

    e2e3

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    CHAPITRE 3 LES CHOIX DU CONSOMMATEUR ET LA DEMANDE DES BIENS 47

    Le tableau 3.6 donne quelques valeurs numriques de la relation entre prix etquantit demande, dont la courbe que nous venons de construire est lexpression.

    Remarquons que lintersection de cette courbe avec laxe des ordonnes indiquele prix partir duquel le consommateur nachte plus le bien; cest aussi un qui-libre, dtermin par une droite de budget de pente trs forte, puisque le prix dubien est trs lev.

    La courbe de demande individuelle a les proprits importantes suivantes : chaque point dune courbe de demande individuelle correspond un pointdquilibre pour le demandeur.

    Ce sont en effet les quilibres successifs, ns des variations du prix dun bien (celuides autres restant constant) qui dterminent la courbe de demande pour celui-ci.

    La courbe de demande du consommateur est dcroissante (cest--diredescendante de gauche droite, ou de pente ngative) : lorsque le prix baisse, laquantitdemande augmente.

    Cette proprit est assez gnrale dans la pratique, et intuitivement trs plausible.

    Pourtant elle ne dcoule pas ncessairement de la forme des courbes dindiffrenceque nous avons utilises. Avec les axiomes que nous avons poss, il est possible deconstruire des courbes dindiffrence qui impliqueraient une courbe de demandemontante pour lun des deux biens; ce cas se rencontre toutefois rarement dans laralit10.

    d Effet sur la demande des autres biens

    La variation du prix dun bien peut aussi provoquer des changements dans les quantits deman-des des autres biens, mme si les prix de ceux-ci ne bougent pas. La nature et lampleur de ceschangements diffrent cependant selon la forme des courbes dindiffrence du consommateur.Considrons par exemple le graphique 3.7A : si de E2 E1la demande de vin a baiss, celle de la

    bire a augment; pour compenser la hausse du prix du vin, le consommateur substitue partiel-lement de la bire celui-ci. la figure 3.6, o la courbure des courbes dindiffrence tait diff-rente, ce ntait pas le cas. Une autre possibilit est celle du graphique 3.7B, mettant en prsence

    Figures 3.7 Dplacements de lquilibre et consommation des divers biens

    10 Mais on le rencontrera dans les domaines particuliers de loffre de travail (chapitre 7) et dpargne (chapitre 8).

    3.2

    3.3

    B

    A

    I2

    I1C

    bq

    vq0

    A

    E2

    B

    E1

    C

    0

    E2

    E1

    SUCRE

    CAF

    I2I1I0

    A:SUBSTITUTS B:COMPLMENTS

  • 8/10/2019 Chapitre 3 Le Choix Des Consommateurs Et La Demande Des Biens

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    48 PARTIE I ANALYSE MICROCONOMIQUE

    le sucre et le caf : quels que soient les prix, les quilibres E2et E1maintiennent approximati-vement une proportion fixe entre les deux biens, et si la hausse du prix du caf fait baisser lademande de caf, elle entrane aussi une baisse de la consommation de sucre. Sur la figure 3.6 cegenre dinteraction tait absent : ctait cet gard un cas trs particulier.

    2 Variations du revenu du consommateur

    a Dplacements de la droite de budget

    Une variation du revenu du consommateur entrane une modification de lapositionde sa droite de budget, cest--dire un dplacement de celle-ci paralllement elle-mme du moins si les prix des biens restent inchangs, ainsi que les prfrencesdu consommateur,

    En effet, en se rappelant que la droite de budget du consommateur a t cons-truite, sur la figure 3.4, en reprant les paniersAet B, le point Bcorrespondant laquantit de vin (40 litres) quil tait possible dacheter au prix de 15Sle litre si tout

    le revenu (600S

    ) y tait consacr, et le point A(60 litres) tant repr de manireanalogue, il est clair que si le revenu augmente, les quantits de 40 litres et 60litres peuvent tre accrues, et dans la mme proportion. Dans lexemple de lafigure 3.8A, o il sagit dune hausse du revenu de 600 750S, ces quantitsdeviennent 50 et 72,5 litres, respectivement. La nouvelle droite de budget qui rsultedune hausse du revenu est donc bien entirement situe lextrieur et droitede la prcdente.

    Inversement, en cas de baisse du revenu, la droite de budget se dplace parall-lement elle-mme vers lintrieur , cest--dire vers lorigine des axes.

    b Dplacements de lquilibre

    Le dplacement du point dquilibre qui sensuit est galement illustr lafigure 3.8A (passage de E1en E2).

    Selon la forme des courbes dindiffrence, deux types de comportements peuventtoutefois tre constats :

    la consommation des deux biensaugmenteavec le revenu, comme cest le cassur la figure 3.8A; les deux biens sont alors appels des biens normaux ;

    la consommation dun des deux biensdcrotlorsque le revenu grandit, commecest le cas des bas morceaux de viande, dans la figure 3.8B. On appelle inf-rieurs de tels biens, que le consommateur nachte que lorsque son revenu estbas, et quil abandonne au profit dautres lorsque son revenu slve.

    Si lon considre enfin une succession daccroissements du revenu (figure 3.8C),on dtermine une succession de points dquilibre qui dcrivent lvolution deschoix prfrs par le consommateur lorsque son revenu saccrot. En joignant cespoints, on obtient une courbe (de forme quelconque) appele chemindexpansion du consommateur .

    La forme de ce chemin sur la figure 3.8C rvle quil sagit dans ce cas, pour leconsommateur, de deux biens normaux; si la bire tait un bien infrieur, la courbedu chemin dexpansion rebrousserait vers la gauche et vers le haut partir duncertain seuil.

  • 8/10/2019 Chapitre 3 Le Choix Des Consommateurs Et La Demande Des Biens

    19/26

    CHAPITRE 3 LES CHOIX DU CONSOMMATEUR ET LA DEMANDE DES BIENS 49

    Figures 3.8 Dplacements de lquilibre du consommateur en fonction du revenu

    c Dplacements de la courbe de demande individuelle

    Lanalyse de ces derniers dplacements de lquilibre du consommateur permet demontrer quune modification de son revenu tous les prix restant constants provoque un dplacement de la courbe de demande individuelle que nous avonsconstruite aux figures 3.6.

    Considrons en effet les figures 3.9A et C. Pour chacun des niveaux de revenucorrespondant aux droites de budget successives, on peut appliquer largumen-tation du 1 ci-dessus, cest--dire dduire une courbe de demande du vin, donnanten abscisse les quantits de vin demandes en fonction des variations de son prix.On obtient ainsi les trois courbes de demande D1, D2, D3de la figure 3.9C. Onconstate quau fur et mesure quelle est dduite dun niveau de revenu plus lev,la courbe de demande du vin se situe plus droite.

    Figures 3.9 Effets de variations du revenu

    I1

    I2

    bq

    10 20 30 40 50 60

    10

    20

    30

    40

    50

    60

    I0

    E2E1

    BAS MORCEAUXDE VIANDE

    PTISSERIE

    E2

    E1

    0 BIRE

    VIN

    E2

    E1

    0

    E3

    E4

    0

    AA

    Deux b i ens no rmaux

    70

    Chemindexpansion

    vq

    BB

    Un b i en no rma le t d eux b i ens i n f r ieurs

    Chemin d expans i ond u c o n s o m m at e u r

    CC

    E2

    E1

    E3

    600 750 900

    q1

    q2

    q3

    Q

    UANTITSDEVIN

    I2

    I3

    I1

    E2

    E1

    E3

    QUANTITS

    DEBIRE

    QUANTITSDE VIN

    q1

    q2

    q3

    REVENU(EUROS)

    E2

    E1

    E3

    q1

    q2

    q3

    QUANTITSDE VIN

    PRIX

    DU

    VIN

    D2

    D1 D3

    Dp l acemen t s de l qu i l i b reAA

    Co u r b e d e d e m a n d ee n f o n c t i o n d u r e v en u

    BBDp l acemen t s

    d e l a c o u r b e d e d e m an d e

    CC

  • 8/10/2019 Chapitre 3 Le Choix Des Consommateurs Et La Demande Des Biens

    20/26

    50 PARTIE I ANALYSE MICROCONOMIQUE

    Il en rsulte la proposition suivante, qui est de porte trs gnrale :

    Tout accroissement du revenu du consommateur entrane un dplacement versla droite de ses courbes de demande pour les divers biens; toute diminution durevenu entrane de semblables dplacements vers la gauche.

    Le lecteur vrifiera par lui-mme que lorsquil sagit dun bien infrieur, les dplacementssoprent dans le sens inverse.

    titre de remarque mthodologique, attirons lattention sur limportance de ladistinction entre dplacements le long dune courbede demande, et dplacementde la courbeelle-mme. Les premiers dcrivent exclusivement les effets sur lesquantits demandes de modifications du prix du bien considr; les seconds, parcontre, traduisent les effets sur ces quantits demandes de modifications de tousautres lments dont le revenu, comme nous venons de le voir, lexception duprix du bien lui-mme. Il est absolument indispensable de bien distinguer ces deuxtypes de dplacements, car ils proviennent de causes essentiellement diffrentes.Bien des mcomptes dans linterprtation des phnomnes de marchs sont dus la confusion de ces deux notions. Nous aurons plusieurs fois loccasion dyrevenir.

    d Construction dune courbe de demande en fonction du revenu

    Au lieu de transposer les quilibres de la figure 3.9A dans un diagramme prix-quantit du typede la figure 3.9C, on peut aussi le faire dans un diagramme tel que celui de la figure 3.9B, o lemontant du revenu figure en abscisse, et celui des quantits de vin demandes lquilibre enordonne. On obtient alors une autre courbe de demande : on lappelle courbe de demande enfonction du revenu , et parfois aussi courbe dEngel11. Chacun de ses points correspond unpoint dquilibre pour le consommateur, et sa forme croissante ascendante de gauche droite,ou de pente positive, confirme que la demande dun bien crot lorsque le revenu augmente (du

    moins sil est normal ).Lvolution de la demande des divers biens en fonction du revenu, et donc la forme de lacourbe de demande en fonction du revenu, nest pas ncessairement la mme pour chacun desbiens : tout dpend de lallure du chemin dexpansion du consommateur, puisque la figure 3.9Best dduite de la figure 3.9A, et donc des courbes dindiffrence.

    De multiples enqutes statistiques ont confirm que limportance relative des diverses dpensesde consommation varie avec le niveau du revenu. Il est notamment tabli que la fraction durevenu consacre lalimentation dcrot quand le revenu crot; que la fraction consacre lhabillement et au logement est plus ou moins stable ; que celle consacre aux soins de sant, auxloisirs et la culture est dautant plus leve que le revenu est plus important. Toutes cesobservations se dduisent de mesures statistiques des courbes dEngel de ces divers biens.

    Outre les variations du prix des biens, et du revenu du consommateur, un troisimephnomne peut entraner des dplacements de lquilibre : un changement dansles prfrences du consommateur. Ce cas est difficile systmatiser graphiquement

    11 Le statisticien allemand ENGEL est le premier avoir tudi les effets des changements de revenu sur lesdpenses de consommation.

    3.4

  • 8/10/2019 Chapitre 3 Le Choix Des Consommateurs Et La Demande Des Biens

    21/26

    CHAPITRE 3 LES CHOIX DU CONSOMMATEUR ET LA DEMANDE DES BIENS 51

    avec la carte dindiffrence; mais il suffit de raliser quil a pour point de dpartune modification de la forme des courbes dindiffrence, et provoque ds lors desdplacements dquilibres comparables ceux qui viennent dtre tudis.

    Passant directement aux courbes de demande, on a typiquement quune inten-sification des prfrences lgard dun bien la naissance dune mode parexemple entrane finalement un dplacement vers la droite de la courbe de

    demande pour ce bien; cest au contraire un dplacement vers la gauche quisurvient lorsque le bien en question se dmode.

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    52 PARTIE I ANALYSE MICROCONOMIQUE

    AnnexeLlasticit de la demande

    Le terme d lasticit est trs frquemmentutilis en science conomique, et dans un grandnombre de situations trs diverses. Nous lintro-duisons ici en lappliquant la courbe de demandeindividuelle pour un produit, mais nous lappli-querons plus loin aux courbes de demande collec-tive sur les marchs (chapitre 9), ainsi quauxcourbes doffre de produits (chapitres 5 et 9)comme de facteurs (chapitres 7 et 8). La notionest donc trs gnrale. Elle est aussi trs simple, etpeut tre prsente comme suit.

    1 La notion

    Nous venons dtablir le pourquoi dun fait biensimple : si le prix dun bien change, les quantitsdemandes changent aussi. Et la thorie a mmeprcis que si le prix hausse, les quantits deman-des diminuent, et elles augmentent si le prixbaisse. Mais de combien? Cest exactement ceque vise mesurer numriquement llasticit.

    Celle-ci est excellemment dsigne par lexpres-sion anglaise de measure of responsiveness : sichangement de prix il y a, dun certain montant,elle est lampleurde la variation des quantitsdemandes.

    Mais les quantits demandes dpendent aussidu revenu, ainsi que des prix des autres biens. Cestpourquoi en matire dlasticit de la demande,on distingue llasticit de la demande dun bienpar rapport son prix, celle par rapport au revenu,et enfin les lasticits croises de la demandedun bien par rapport aux prix des divers autresbiens.

    2 Calcul de llasticitde la demande dun bienpar rapport son prix

    Llasticit de la demande dun bien par rapport son prix se calcule comme :

    le rapport entre la variation en pourcentage de la quantitdemandeet la variation en pourcentage du prix.A3.1

    Elle est donc donne par la formule

    q pvariation en % de la quantit demande

    variation en % du prix,

    =

    =

    q q

    p p

    Ce rapport est ncessairement ngatif, en raisondu sens inverse dans lequel se font les variationsde prix et de quantit. Llasticit de la demandedun bien peut ainsi varier de zro moins linfini.

    Dans cette vaste plage de variation, on distingueles zones suivantes, au moyen desquelles on carac-trise les courbes de demande (une illustrationnumrique et graphique apparat au tableau et auxfigures 3.10) :

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    ANNEXE A3 LLASTICIT DE LA DEMANDE 53

    (a) = 0le changement du prix ne provoque aucun chan-gement de la quantit demande ; la demande estdite alors parfaitement inlastique.

    (b) 0 1le changement en pourcentage de la quantit de-mande est infrieur au changement en pourcen-tage du prix; la demande est dite ici inlastique.

    (c) = 1le changement en pourcentage de la quantitdemande est exactement gal au pourcentage de

    changement du prix; la demande est dite alordlasticitunitaire.

    (d) 1> >

    le changement en pourcentage de la quantitdemande est suprieur au changement en pourcentage du prix; la demande est dite lastique.

    (e) = le changement en pourcentage de la quantitdemande, qui fait suite un changement donnen pourcentage du prix, est infini ; la demande esalors dite parfaitement lastique.

    Figures 3.10

    Tableau 3.10

    lasticit de la demande dun bien par rapport son prix

    Exemple de calcul dlasticit

    Dans ce tableau, on suppose une baisse du prix de 103 83, soit p= 23, et cinq cas diffrents de variation des

    quantits qsont considrs aux colonnes (a) (e), soit successivementq

    =0,

    +10,

    +25,

    +50, et

    + .Pour les dnominateurs pet qapparaissant dans la formule dlasticit, il faut choisir entre leur valeur avant ou

    aprs variation. Par convention, on utilise la moyenne de ces deux valeurs, soit (10 + 8)/2 = 9 pour le prix, etsuccessivement (100 + 100)/2 = 100, (100 + 110)/2 = 105, (100 + 125)/2 = 112,5, etc. pour la quantit. Lapplicationde la formule ces donnes conduit aprs simplification aux chiffres suivants.

    Divers cas de variation de qsuite une baisse de prix de 23

    (a) (b) (c) (d) (e)

    Effet sur leseffet hausse hausse hausse hausse

    quantitsnul de 100 110 de 100 125 de 100 150 infinie

    demandes

    = 0

    2 9===== 0 =

    1 10 5

    2 9

    ,

    ===== 0,42 =

    2 9

    2 9=====1 =

    2 5

    2 9=====1,8 =

    2 9=====

    Valeur dellasticit

    p

    0 100

    8

    10

    150 q

    p

    0 100

    8

    10

    110 q

    EEPARFAITEMENTLASTIQUE

    DDLASTIQUE

    CCDLASTICITUNITAIRE

    BBINLASTIQUE

    AAPARFAITEMENTINLASTIQUE

    0 100

    8

    10

    q

    p p

    0 100

    8

    10

    125 q

    p

    0 100

    8

    10

    q

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    54 PARTIE I ANALYSE MICROCONOMIQUE

    Le vocabulaire employ est tout fait classiqueet mrite donc dtre retenu!

    Limportance pratique de llasticit de la de-mande dun bien par rapport son prix apparatrasurtout dans ltude des marchs : transpose auniveau de lensemble des consommateurs (cf.

    section 9.5, 1), on verra quelle permet de prvoirla raction de ceux-ci aux changements de prix.Cette prvision est aussi utile aux producteurs dubien, pour valuer le changement de leurs recetteslorsquils envisagent de modifier leur prix de vente(cf. le point a.2 de la section 10.3, ainsi que lana-lyse des recettes en monopole la section 11.1).

    3 Relation entre la pentede la courbe de demande et

    llasticit par rapport au prix

    Les figures 3.10 suggrent que llasticit dunecourbe de demande dsigne en fait sa pente : unedemande inlastique est proche de la verticale, unedemande lastique proche de lhorizontale Bienque cela ne soit qu moiti exact, on peut souventse contenter de cette approximation.

    Pour bien faire la diffrence, il faut se rappeler que lacourbe de demande dun bien peut aussi sexprimer

    comme une fonction, appele fonction de demande dubien , que nous crirons q = qd(p), o la quantitdemande apparat comme dpendant du prix. Si lonsuppose cette fonction continue et drivable, llasticitde la demande du bien par rapport son prix peut alorsse dfinir par lexpression suivante :

    qpd

    d

    d

    d= =

    q q

    p p

    q

    p

    p

    q

    o les variations dqet dpsont supposes infinitsimales.Il est clair que le rapport dq/dpest linverse de la pente

    de la tangente la courbe de demande, au point de coor-

    donnes (p,q) auquel on value cette pente. Llasticitpeut alors encore scrire :

    qppente

    = p

    q

    1

    Elle ne se confond donc pas avec la mesure de la pente,mais est en quelque sorte une pente pondre. La pentede la courbe est, en effet, le rapport entre deux variationsabsolues, alors que llasticit est un rapport entre deuxvariations relatives.

    Une consquence de cette distinction est quunedemande linaire na pas une lasticit constante.Au contraire, celle-ci dcrot de gauche droite,pour des valeurs croissantes de q. En effet, si lapente, et son inverse dq/dp, sont constantes dansce cas, le deuxime facteur,p/q, varie en chaquepoint : plus faible est le prix, plus leve est laquantit demande, et moins grande est alorsllasticit.

    4 Llasticit de la demandepar rapport au revenu

    La quantit demande dun bien dpend nonseulement de son prix, mais aussi du revenu duconsommateur, comme lillustre la courbedEngel. On peut ds lors dfinir une lasticit dela demande par rapport au revenu comme

    le rapport de la variation en pourcentagede laquantit demande la variation en pourcentagedu revenu.

    Formellement,

    qR =

    q q

    R R

    Cette lasticit est normalement positive, cest-

    -dire que laccroissement du revenu provoqueune augmentation de la consommation du bienconsidr, sil sagit dun bien normal (au senstechnique dfini plus haut); elle est en revanchengative sil sagit dun bien infrieur.

    Cest le moment de prciser quen ce quiconcerne les biens normaux, on les appelle suprieurs lorsque llasticit de leur demandepar rapport au revenu est suprieure lunit;on les appelle de ncessit si cette lasticit estinfrieure 1.

    Limportance pratique du concept dlasticitde la demande par rapport au revenu nest pasmoins grande que celle de llasticit par rapportau prix, et ce tant en matire danalyse des marchsque de prparation des dcisions des entreprises.On peut la rsumer en observant quelle sertsurtout dinstrument de prvision de la positionet des dplacements ventuels des courbes dedemande.

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    ANNEXE A3 LLASTICIT DE LA DEMANDE 5

    5 Llasticit croisede la demande

    Llasticit croise de la demande mesure lavariation relative de la quantit demande dunbien par rapport au changement relatif du prix

    dun autre bien. Cette notion dcoule du fait quela demande dun bien dpend non seulement deson propre prix, mais aussi du prix des autresbiens, ce que la thorie des choix du consomma-teur a montr en tudiant les effets sur lquilibredes variations de prix des divers biens (voir enparticulier le point c du 1 la section 3.4).

    Ainsi, llasticit croise de la demande de bire(qb) par rapport au prix du vin (pv) est donnepar12 :

    q ,pb b

    v vb v =

    q q

    p p

    Si les biens sont substituts, comme danslexemple envisag, llasticit croise est positive :une hausse du prix du vin tend augmenter la

    13 On peut dmontrer, en effet, que llasticit dune fonction esgale sa drive logarithmique ; formellement, soit la fonctioq=f(p); llasticit de qpar rapport pest gale dlogq/dlogp.

    demande de bire. Par contre, si les biens soncomplmentaires, par exemple les appareils dephotos et les films, llasticit croise est ngative

    Nous retrouverons cette notion lorsquil sagirade prciser, dans lanalyse des marchs des produits, le concept dindustrie (chapitres 10 et 11)

    6 Autres types dlasticit

    Nous lavons dit en commenant : la notion dlasticit est trs gnrale. Elle traduit en fait toutevariation relative dune variable quelconque enfonction des variations relatives dune autrevariable quelconque. Elle sapplique toute relation fonctionnelle, et elle est dailleurs ce titreun concept plus mathmatique13quconomiqueMais, comme suggr par les exemples prsentsil est dune trs grande utilit tant pour lanalyseconomique que pour la gestion des entrepriseet la comprhension de ce qui se passe sur lemarchs.

    12 La demande du bien b tant considre ici comme une fonctionde plusieurs variables (le prix pb, le prix pv, le revenu R, etc.), lanotation de llasticit se fait en termes de drives partielles.

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