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Honoré Vinck
Civilisation occidentale et langage au Congo BelgeAuthor(s): G. HulstaertSource: Aequatoria, 16e Année, No. 1 (1953), pp. 23-25Published by: Honoré VinckStable URL: http://www.jstor.org/stable/25838272 .
Accessed: 15/06/2014 08:37
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Civilisation occidentale et Iangage
au Congo Beige
Sous ce titrc ZAIRE, VL 9, publie un article qui a eu quelque retentissement dans
la presse congolaise, preuve que la these exposee est approuvee par au moins une bonne
partie des Europeens et des indigenes europeanises. En effet, l'auteur, Dom Guilbert, pro fesseur d'humanites modernes a Elisabethville, y defend le point de vue europeaniste.
II commence par soustraire le probleme linguistique au Congo a la competence des ... linguistes. Comme argument il expose sa conception de la linguistique qu'il restreiat a l'etymologie et a la philologie comparative. Que n'a-t-il laisse la linguistique aux lin
guistes! II aurait evite quelques enormites - qui, cependant, auront eu l'avantage de pro
curer un pinte de bon sang au P. v. Bulck (que Dom Guilbert prend specialement a
parti). L'auteur expose qu'au Congo il n'existe aucune langue autochtone, si ce n'est a
un stade initial; il vent dire: les langues de traite ou intertribales. II peut affirmer ce
la en ecartant les definitions scientifiques pour accepter celles des profanes: langue =
langue commune, dialecte = patois. Mais, sans doute, les linguistes n'ont rien a voir dans
cette question!
Ayant ainsi ? montre comment le probleme du Iangage en Afrique centrale et spe cialement au Congo beige n'est en rien un probleme de linguistique? (c'est nous qui
soulignons), mais au contraire ? un probleme de contact oblige? entre deux civilisations, l'auteur expose longuement ?ce qui est arrive chaque fois qu'une civilisation superieure s'est imposee a une civilisation inferieure t l'evincement constant des parlers de cette der niere. ?
Ce fait historique est pour l'auteur le premier argumeat en faveur de sa these : la
supplantation des langues congolaises par le frangais. Ce qui revient a dire : puisque toujours la langue venaat avec une civilisation superieure a triomphe, c'est la une loi
qui s'appliquera aussi au Congo; il doit done en etre ainsi et, loin de nous opposer et
d'essayer par notre liberte humaine d'y faire une exception, favorisons son application a ce cas d'espece. Pour comprendre cette position dialectique on peut se rappeler ? la li
gne historique ? chere aux theoriciens du communisme. Et pouc prouver la majeure, Dom Guilbert cite les exemples classiques d'Europe.
Nous croyons cependant qu'ils ne convaincront pas tous les lecteurs. On peut se de mander s'il n'existe pas de faits en sens contraire. L'auteur ne nous explique pas, par
exemple, pourquoi les Francs se sont romanises en Wallonie et pas en Flandre; ni pour
quoi sa regie ne s'est pas verifiee dans les ? coloniae ? romaines de Cologne etd'Augs bourg, ni meme - horribili dictu - dans la seconde capitale de l'Empire d'occident: Tre ves* Nous n'apprenons pas davantage pourquoi le latin plus civilise a ete evince par la
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24 AEQUAT0R1A - COQUILHATVILLR
langue des Anglo-Saxons barbares. L'evincement dcs dialcctcs occitaniens dc France s'ex*
plique-t-il par la civilisation superieure des habitants de l'IIe-de-France ? Et du recent
recul du frangais en Amerique, a Tile Maurice, aux Seychelles, etc. doit-on conclure a la
superiority de la culture anglo-saxonne ?
On nous parle encore des Bulgares dont le parler fut adopte par les conquerants turco
mongols parce que les vaincus avaient la civilisation raffinee de Byzance. Mais on ne nous
dit point pourquoi la regie ne s'applique pas a la langue de ces memes Slaves barbares au
contact de cette meme Byzance et pourquoi ils en ont refuse la langue la plus hautement cul
turelle de l'antiquite pour conserver leur propre parler barbare. On ne nous explique pas non plus pourquoi les autres Slaves, civilises soit par Rome soit par Byzance, ont garde leurs
langues ancestrales. Nous restons encore dans 1'ignorance au sujet de l'Armorique (romani see comme le restant des Gaules ) adoptant le parler breton. Reste aussi inexplique l'evin
cement de l'egyptien, porteur de la plus haute civilisation de l'antiquite, par le grec et, plus tard, de ces deux langues de haute culture par le parler des tribus barbares venues d'Ara
bic parler qui a encore submerge le grec et le syriaque dans de vastes regions tres civilisees.
Et pourquoi les Tcheques et les Slovaques ont-ils conserve leur langue, contrairement
aux Silesiens, aux Wendes, aux Prussiens, etc ? Et, incidemment, la germanisation de ces tri
bus slaves a-t-elle ete heureuse pour la paix de l'Europe ? Qui ignore la profonde diffe
rence entre ces Slaves germanises et les Allemands d'origine ? Quel avantage y a-t-il pour l'avenir de l'Afrique a negliger les legons de I'histoire, afin de faire triompher une politique etroitement nationaliste ?
Ensuite l'auteur decrit la situation congolaise et l'envahissement progressif mais rapide du frangais* Et il semble bien qu'on ne trouvera pas grand'ehose a redire a cette affirma
tion. N'en deplaise a d'aucuns, la tendance gouvernementale fonciere a toujours ete l'euro
peanisation et la francisation du Congo, non brusquement comme le veulent les Frangais, mais graduellement. Et e'est ce que dom Guilbert montre tres clairement. Son expose rejoint ainsi, pour le cas particulier de la langue, l'affirmation de M. Jungers, dans son discours
gouvernemental de 1951, que la politique europeanisante n'est en realite que la continua
tion de la conception qui depuis Leopold II a inspire notre politique indigene. Enfin, dom Guilbert decrit comment les indigenes eux-memes sont de plus en plus ga
gnes a la francisation. Et comme ?le monde occidental a de plus en plus besoin des matie
res premieres africaines ? (et, ajouterons-nous, des marches africains) ?il n'est pas pres de
perdre les moyens d'y maintenir son autorite politique ni surtout son controle economique*. ?II est possible que Tune ou l'autre langue indigene, pour d'imprevisibles raisons, perdure
quelque part?, mais il n'y faut trop compter. Car ? comme il est impensable ou tout com
me que l'emprise blanche se desserre ou s'evanouisse tvant plusieurs siecles, les largues bantoues, soudanaises, koi'm (sic), hamitique ou autres sont condamnees.?
L'optimisme de l'auteur n'est entame ni par les recents evenements d'Asie et par les pre miers essais semblables en certeines parties d Afrique, ni par les reactions enregistrees par l'histoire de TEurope: resurrection de Tirlandais dans TEire anglicisee, lutte du finnois con
tre le suedois, retardement imprevu de la conquete des Flandres par le frangais. II n'y a sans doute personne pour nier les chances du frangais au Congo Beige,
actuellement tres grandes tant a cause de l'attitude officielle et privee des Europeens
que de la part des autochtones. Pour sauvegarder l'avenir il faudra cependant aussi que se realise Tespoir general des Blancs concernant la permanence de leur domination, ce
qui a d'aucuns ne parait pas si absolument certain eu egard a la rapidite des chaogements
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CIVILISATION ET LANG AGE 25
dans l'epoque revolutionnaire que nous vivons*
Et, sans doute, lcs Congolais evolues sont partisans du francais (Ies autrcs aussi, en partie, mais ils sont sans la moindre influence presentement). Et s'ils veulent absolument abandonner leur langue ancestrale et s'ils veulent et peuvent maintenir cette conduite
pendant assez de generations, ils y reussiront et personne ne pourra arreter le mouvement.
Mais s'ils ne restaient pas, apres une ou deux generations, partisans de la mort de leur
langue ancestrale?Et s'il y avait un revirement d'attitude provoque par Dieu sait quel evenement local ou mondial (serait-ce si extraordinaire ?) ?u simplement par depit ou par desenchantemeat ?
Et, evidemment encore, les Franca is ne regrettent pas de ne plus parler ligure ou
gaulois! Et seraient-ils aussi desireux d'echanger leur langue maternelle contre disons
l'anglais ou le russe ou le chinois? Et voient-ils d'un cceur aussi leger le recul du fran
^ais aux Etats-Unis suivi sans doute bientot par le meme phenomene au Canada? S'ils ne geignent pas du sort fait a l'independance de leur pays par les conqueraats brutaux venus de Rome, accepteraient-ils avec la meme indifference facile semblable traitement
par n'importe quelle aation, moderne, fut-elle la plus puissante et la plus civilisee du
globe? Et alors?
G- Hulstaert, MSC.
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