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INTRODUCTION GENERALE
1. Croissance, emploi et inégalité des revenus
* croissance et emploi (ISLAM)+ Chapter 2 – Labor Market Policies: Theoretical Background
(A. Abrahart and P. Verme)+ Job with equity
* emploi et inégalité
* emploi et pauvreté
* Politique du marché du travail (the politics of economic reform)
Malgré la croissance économique rapide des années 80 et 90 en Thaïlande, les inégalités
économiques et sociales se sont accrues de manière significative [Takei (2002), pp. 17]. La répartition
des gains qui ont bénéficié de l’expansion économique s’est faite au profit des plus riches et
notamment des petits groupes de travailleurs hautement qualifiés. Le marché du travail urbain occupe
de ce fait une place centrale dans la réduction de la pauvreté et de l’inégalité salariale, notamment dans
les pays du Sud-Est asiatique [Acharya (2000) p. 02].
Litchfield (1999) suggère que l’inégalité intervient progressivement dans des analyses de la
pauvreté et du bien- être social. Son concept est plus large que la notion de la pauvreté et plus étroit
que le concept deu bien être social. Contrairement à l’analyse de la pauvreté, l’étude de l’inégalité
prend en compte toutes les échelles de distribution du revenu. La distribution des salaires en haut et
auen milieu de l’échelle, aussi bien que la répartition des salaires en bas de l’échelle, contribuent à
mieux appréhender le phénomène de l’inégalité. Ainsi, pour Dalton(1920), la persistance de
l’inégalité dans une société se traduit par un phénomène de perte en terme du bien être potentiel…
L’inégalité doit ainsi se définir en terme du bien être social et se mesure en terme du revenu [Dalton
(1920) pp. 394].
Les études de leur relation sont d’autant plus répandues que les salaires prennent une part de
plus en plus importante dans la répartition des revenus de la population. En Thaïlande, le revenu d’un
ménage en provenance du marché du travail a atteint près de 45 % du revenu total de ceu ménage en
1990, 48 % en 1992 et près de 50 % entre les années 1994 et 1996, et était compriselle a été entre 45 et
50 % durant des années de crise financière [Isra (2001) pp. 21]. De ce fait, il est indéniable de prendre
en compte de l’inégalité des salaires dans l’explication de l’inégalité globale de revenus.
1
LDes années 60 ont été marquées par un changement profond de l’économie thaïlandaise. Lors
d’un passage d’une économie traditionnelle essentiellement rurale à une économie industrielle, les
programmes du développement industriel et de services financiers ont été placés au premier plan
national du développement économique du pays. La création des zones industrielles a été mise en
place autour de grandes villes, notamment à Bangkok et son agglomération. Par conséquent, l’exode
rural est un phénomène inévitablement attendu, en particulier de l’immigration de la région Nord-est
vers la capitale. Cette mobilité a pour objectif de répondre aux pénuries successives de la main
d’œuvremain-d’œuvre, qualifiée et peu qualifiée, dans des milieux industriellement urbains. Il en
résulte de ce fait que les revenus issus du marché du travail , particulièrement du marché urbain,
conditionnent progressivement le niveau de vie de la population dans l’ensemble du pays en raison des
transferts monétaires d’une zone urbaine à une zone rurale1. Or, l’économie thaïlandaise, durant les
années 60 et 90, a traversé plusieurs périodes de fluctuations économiques dues, à la fois, aux risques
liés à l’ouverture économique à l’économie mondiale et à la faiblesse de la structure économique
interne. De ce fait, les changements économiques se répercutent directement sur la réduction des
revenus des travailleurs urbains à travers des phénomènes fréquents liés au marché du travail, à savoir
une réduction du temps du travail, une situation sans emploi et un retour à la zone rurale. Il importe
par conséquent d’étudier des trajectoires de revenus pendant une longue période de changements
économiques afin d’appréhender une structure de la répartition de revenus et de l’inégalité des salaires
dans le milieu urbain.
L’inégalité des revenus en Thaïlande fait l’objet d’un débat constitué à partir d’une relation
inverse entre croissance économique et inégalité des revenus. Ainsi, Pasuk et Isra (2000) montrent
qu’en 1985, l’indice de Gini était de 0,50. Il a atteint son maximum de l’ordre de 0,53 en 1992. Medhi
et all (2006) confirme qu’en 1992, l’indice de Gini est sans précédent au maximum de l’ordre de 0,536
et en 2002, il atteint 0,510 [Medhi et all (2006) pp. 14]2. Or, la part des salaires et des transferts
monétaires occupe une place de plus en plus significative dans le revenu total des ménages,
notamment durant les années 1992 et 1996 [Pasuk et Isra (2000) pp.32]. Par conséquent, il importe
d’intégrer une analyse synthétique de l’inégalité des revenus dans un marché du travail en appuyant
essentiellement sur la question de l‘équité et de l’efficacité économique au cours de ces 20 dernières
années.
1 La part des transferts monétaires dans le revenu total d’un ménage augmente de manière progressive durant les années 80.Voir Isra (2001).2 Les indices de Gini ont été calculés à partir des séries d’Enquête socio-économiques sur l’ensemble des ménages représentatifs (SES Survey) avec les revenus déclarés y compris les salaires, les revenus non agricoles, revenus agricoles, les transferts monétaires, les revenus du patrimoine et autres.
2
[2.] Contexte macroéconomique et l’emploi
1. Prospérité économique des années 1980
La fin des années 1980 marque le début d’une période de forte croissance de l’économie
thaïlandaise, permise non seulement par la mise en œuvre des stratégies politiques internes favorables
mais également par l’expansion de l’économie mondiale durant cette période. La transformation de
l’économie traditionnelle vers l’économie industrielle se déroule par l’acceptation progressive de
l’ouverture économique vers l’extérieur et par l’incitation à l’investissement.
A. De la substitution aux importations à l’orientation aux importations
Tout comme les autres pays en développement, la Thaïlande possède un modèle deu
développement dualiste par lequel on distingue deux grands secteurs de production, à savoir le secteur
traditionnel, essentiellement rural, et le secteur industriel situé principalement dans le milieu urbain.
Durant des années 1960, la production agricole contribue approximativement près de 40 pour cent au
PIB, et plus de 80 pour cent de la population s’est engagée dans l’agriculture. Le riz est le produit
principal, suiviant de l’s étains, dues caoutchoucs, des kénafs et dues maïs. La part de la production
industrielle dans le PIB reste largement inférieure à celle de l’agriculture. Le processus de
transformation vers l’économie industrielle s’inscrit dans le plan national du développement
économique et social. Ainsi, ce dernier est mis en place en 1961, en mettant l’accent sur la stratégie
des industries de substitution aux importations. L’initiative de ce plan est, en particulier, de viser à
contrôler les flux des échanges internationaux en adoptant le système économique « protectionniste »
qu’onta connu la plupart des pays industrialisés durant lesaux années 1960 et 1970. Cette stratégie
consiste en l’application d’une tarification douanière et dles stricts contrôles stricts des importations
afin de protéger les industries de naissance. Or, le bilan du déroulement est globalement médiocre par
rapport aux autres pays de la même zone. En fait, durant ces années, le taux de croissance du PIB réel
per capita atteint un chiffre de l’ordre de 4,8 pour cent, restant inférieur à celui du Corée, de
Singapour et de Taiwan, mais supérieur à celui de la Malaisie, de l’Indonésie et des Philippines
[Richter (2006) p.8]. Par conséquent, l’histoire économique de la Thaïlande tourne sa page suite au
changement radical des stratégies du développement. Les responsables politiques réalisent alors que le
protectionnisme élevé dûue essentiellement au plan de substitution aux importations durant les années
1970 a été néfaste à l’économie [Wisarn (2002) p.5]. En fait, l’événement déclencheur provient
principalement du deuxième choc pétrolier qui provoque une dévaluation du Baht, monnaie nationale.
Ceci contribue ensuite à augmenter la valeur des produits importés et à hausser le coût de production.
3
Le changement de régime est alors nécessaire. Ainsi, la démarche d’ouverture économique et
commerciale est apportée au troisième plan national (1972-1976). Il s’agit d’une première préparation
au grand déploiement des investissements afin de répondre aux programmes de l’orientation à
l’exportation et à la création des industries intensives en main d’œuvremain-d’œuvre. En étant
pleinement en concurrence avec d’autres pays voisins en matière d’exportation et d’incitation aux
investissements étrangers, le cinquième plan national (1982-1986) s’appuie essentiellement sur la
restructuration et l’amélioration de l’efficacité et de la compétitivité internationale. Soulignons qu’une
série de stratégies industrielles et un ensemble des programmes du développement des ressources
humaines ont été prioritairement mobilisés afin de rassurer une telle efficacité et compétitivité. Ainsi le
sixième et le septième plans (1987-1991 et 1992-1996) ont été conçus dans leun même ordre d’idée.
L’effort doit être désormais porté afin d’améliorer des politiques favorables à la création des industries
nouvelles exportatrices, centrées sur l’utilisation intensive en capital et en technologie.
B. Période de croissance économique des années 1980
Les politiques de stabilité macroéconomique conduites par les gouvernements et l’expansion de
l’économie mondiale durant les années 1980 permettent unela croissance économique sans précédent
ende la Thaïlande.
Entre la fin des années 1970 et le début des années 1980, les vagues de chocs pétroliers et la
récession de l’économie mondiale ont dramatiquement provoqué une multiple instabilité économique
en Thaïlande, signalée, entre autres, par un déficit important de la balance de paiements important et
par une montée de la dette extérieure au début des années 803. Sans attendre, le gouvernement
thaïlandais a demandé une aide financière auprès des institutions internationales, au premier rang
desquelles le FMI et la Banque Mmondiale, qui ont imposé des réformes du programme d’ajustement
structurel. Par la suite, un ensemble de politiques conservatrices et restrictives ont été mises en place à
l’aide de plusieurs instruments économiques tel que les contrôles fiscaux, les taux d’inflation, les taux
de change et les contrôles des prix agricoles et des produits énergétiques etc. Il faut dire que les
politiques macroéconomiques conduites par le gouvernement thaïlandais durant cette période de
récession économique ont permis à la Thaïlande de profiter d’un environnement favorable de
l’économie mondiale dès la seconde moitié des années 1980. Parmi les facteurs consécutifs, on note
une hausse de la demande des produits exportés, un déclin des taux d’intérêt et une diminution des
prix du pétrole.
3 Le déficit de la balance de paiement et le service de la dette extérieur ont atteint de l’ordre de 7 % du PIB et de 18,7 % des exportations en 1980 [Wisarn (2002) p.11], voir également Charoenseang, Manakit (2002) p.599.
4
Ainsi, vers la fin des années 1980, le taux de croissance du PIB réel est dépassé en moyenne de
9%4. L’expansion économique a eu un impact considérable, non seulement sur le niveau de vie de la
population mais également sur la création successive de l’ensemble des infrastructures, nécessaires au
futur développement économique et social du pays. Sussangkarn (1994) synthétise des facteurs
fondamentaux permettant à la Thaïlande de réaliser une telle croissance de manière suivante :
En partie en raison des ajustements de taux de change, en partie en raison du déclin des prix du
pétrole en 1986, et en partie en raison de la transition des pays d’Asie nouvellement industrialisés à
des produits intensifs en main d’œuvre main-d’œuvrequalifiée et en technologie, la croissance de
l'économie thaïlandaise a accéléré de manière significative à partir de1986. Elle a été principalement
conduite par une forte hausse des exportations manufacturées [Sussangkarn (1994) p.589]. La
Thaïlande est devenue l’un des pays exportateurs de produits hautement technologiques dès la fin des
années 80, tel que les appareils es électroménagers, les pièces automobiles et d’autres produits divers
issus des industries manufacturières.
C. De l’économie traditionnelle au processus d’industrialisation
L’adoption des stratégies du développement basé sur l’exportation et l’investissement de masse
au début des années 80 contribue à changer la structure globale de la production industrielle et la
composition de la répartition des revenus. Progressivement, la production industrielle dépasse celle du
secteur agricole tandis que les actifs au sein dedans ce dernier ne diminuent pas au même rythme. La
part de la production agricole dans le PIB a diminué de 23,2 pour cent en 1980 à 11,3 pour cent en
1997 tandis que celle de la production manufacturière a augmenté de 21,2 à 28,2 pour cent [Nipon et
Somkiat (2001) p.1].
Ces épisodes de croissance ont marqué une nouvelle ère du « miracle asiatique » qui résulte de
deux moteurs déterminants, à savoir une accumulation accrue du capital et du travail qui contribue à la
croissance de la productivité totale des facteurs (PTF), notamment dans le secteur manufacturier. En
effet, l’étude de Tinakorn et sussangkarn (1998) montre qu’entre 1978 et 1990, le taux de croissance
en moyenne annuelle, étant d’environ 7.6 pour cent, pourrait s’expliquer par les facteurs suivants : (1)
à environ 26 pour cent parde la réallocation de l’emploi ; (2) à environ 20 pour cent parde la qualité de
la main d’œuvremain-d’œuvre ; (3) à environ 37 pour cent par lede capital physique ; et (4) à environ
1.2 pour cent par ld'utilisation de la terre. En fait, 84,2 pour cent de la croissance s’expliquent par toute
4 Le taux de croissance enregistrée a atteint l’ordre de 13,29 % en 1988, 12,19 % en 1989 et 11,17 % en 1990 [Charoenseang, Manakit (2002) p.600].
5
la quantité du facteur de production et les 15.8 pour cent restants sontest attribuése à toute productivité
de facteur. En définitive, la prospérité économique de la fin des années 1980 résulte, non
réellementpas tant du progrès technique, mais d’une importance d’accumulation du capital physique et
d’une réallocation de la main d’œuvremain-d’œuvre [Richter (2006) p.7].
L’industrialisation s’effectue par une transformation du type des produits agricoles basés sur
l’utilisation intensive des ressources naturelles aux produits manufacturés centrés sur la base
technologique et la main d’œuvremain-d’œuvre intensive. La clef de l’accélération industrielle est
l’investissement du secteur privé par des investisseurs étrangers, très peu du secteur public. Ainsi, la
Thaïlande est classée parmi les dix pays dont l’investissement direct de l’étranger est le plus important
durant ces trois décennies [UNCTAD (1999)]. Nombre de grands projets d’investissement vont dans la
production industrielle à base technologique qui excède nettement celle des produits intensifs en
ressources naturelles et en capital. Cependant, l’importance des investissements ne signifie pas que la
Thaïlande est mieux placée relativement à d’autres pays en termes de croissance économique. Pendant
les années 1990, beaucoup des pays du Sud--ouest asiatiques ont réalisé des taux de croissance
économique semblables à celui à la Thaïlande avec des taux d'investissement inférieurs. Ceci signifie
qu’en Thaïlande, des investissements sont moins productifs que dans des économies voisines. Par
conséquent, elle exige un taux d’investissement plus élevé afin de compenser une baisse du taux de
croissance [Colaco (1998) p.]. Ce désavantage comparatif peut être considéré comme une des causes
de la crise économique et financière de la fin des années 1990 puisqu’une baisse du niveau
d’exportation dépend en partie d’une faible productivité des investissements.
La croissance économique phénoménale ne dure que jusqu’au début des années 1990. De
nNombreux signes de récession, tels qu’une baisse consécutive de l’exportation et une montée des
dettes du secteur privé vers l’extérieur, se préparent à révéler la face cachée de l’économie
effervescente, fragilisée notamment par la dépendance des flux des capitaux étrangers et la mauvaise
gestion des politiques internes. En effet, pendant plusieurs années, les emprunts extérieurs ont été
largement contrôlés. En d’autres termes, les entrées des capitaux étrangers ont été strictement
réglementées par l’Etat. Or, dès le début des années 90, on assiste à une libéralisation du marché
financier imposée notamment par le Fond Monétaire International. Par conséquent, face à
l’environnement incertain et complexe des flux de capitaux étrangers sur lesquels reposent l’ensemble
des activités économiques, le marché financier s’effondre, ce qui entraîne inévitablement une entrée en
crise de l’économie à partir de juillet 1997.
2. Crise financière des années 90 et ses conséquences
6
La crise économique et financière des années 1990 s’est tout d’abord manifestée dans le secteur
financier avant de s’étendre rapidement aux autres secteurs d’activités économiques. Les
conséquences douloureuses de cet effondrement sont à la fois économiques et sociales.
A. Prémisses de la crise économique et financière
Bien avant l’arrivée de la crise, la Thaïlande a pu bénéficier de l’expansion de l’économie
mondiale, lui permettant de réaliser une croissance considérable durant des années 1980. La fin dee
cetttelle prospérité est probablement due à l’application du modèle du développement économique
« hors norme ». Il est frappant de voir combien certains pays tournent le dos à tous les dogmes. Au
modèle autocentré, l'expérience asiatique oppose sa focalisation sur les exportations. Contre la
théorie standard, elle présente des excédents commerciaux et budgétaires en pleine période de
décollage économique. A l'orthodoxie libérale, elle répond par l'interventionnisme des Etats, la
relative fermeture aux importations de biens de consommation, le contrôle sévère des investissements
étrangers et des marchés financiers. A tel point, selon certains, que c'est pour avoir trahi cette
orientation que l'Asie a subi la crise que l'on sait.» [Severino (2004) pp.2].
En réalité, les investisseurs et les économistes thaïlandais sont frappés en surprise par la crise
économique et financière de l’s années 1997 qui se prépare silencieusement par plusieurs dimensions.
On regroupe trois grandes causes de la crise : (i) Choc et développement exogène dans les marchés
internationaux des biens et services, (ii) mauvaise gestion de l’économie interne durant la période pré-
crise, (iii) instabilité intrinsèque dans les flux des capitaux de l’étranger. Commençons par ce dernier
facteur. En effet, ce modèle du développement asiatique rend l’économie thaïlandaise de plus en plus
tributaire de l’extérieur, non seulement en termes d’échanges commerciaux mais également en matière
de dettes vers le reste du monde. La demande domestique des biens et services a considérablement
diminué depuis le début des années 80 et l’épargne domestique a été limitée par rapport à
l’accroissement des investissements. Le recours aux sources monétaires extérieures a été alors plus
que nécessaire. Ainsi, durant la première moitié des années 90, les banque commerciales et notamment
la Banque de Bangkok « the Bangkok International Banking Facility (BIBF) », libéralisée en 1993, ont
progressivement importé des capitaux étrangers dont la part relative aux autre institutions financières a
été multipliée par dix en 10 ans. Ces entrées massives des capitaux5 ne peuvent s’expliquer que par un
différentiel entre ldes taux d’intérêt domestiques et ceux de l’étranger : un niveau relativement élevé
5 Par exemple, entre 1996 et 1997, les entrées des capitaux privés se sont élevées à environ 20% du PIB en Thaïlande [Lee et Rhee (1999) p.11].
7
des taux d’intérêt domestiques des emprunts par rapport aux taux d’intérêt de l’étranger [Krongkeaw
(1999) p.399]. En pratique, ni les firmes ni les banques thaïlandaises n’ont eu assez d’expériences pour
la gestion d’un tel volume des capitaux. Par conséquent, une quantité considérable de ces derniers est
destinée à financer les projets à haut risque dans les secteurs non productifs tel que le secteur
immobilier.
Notons ensemble que les causes de la crise résultent d’une erreur de la gestion des flux des
capitaux et d’un malchanceux évènement lié à la malchance. Dollar et Hallward-Driemeter (1997) se
réfèrent, avec un certain risque de caricature, à ces causes comme hypothèses de « mauvaise
politique » et de « mauvaise chance ». La « mauvaise politique » signifie que les pays tels que la
Thaïlande ont fait des erreurs principalements dans la gestion macro-économique et, plus important,
dans la gestion des secteurs financiers et de corporation6. Le régime de politique a encouragé les
emprunts à l'étranger afin d’investir dans ce que nous appelons « le stock des mauvais capitaux» ; cet
emprunt a été destiné aux problèmes principaux tôt ou tard. En effet, les flux des capitaux ont été mal
orientés et ont en grande partie servi aux spéculations immobilières. La « mauvaise chance » signifie
que les pays asiatiques ont été les victimes d'une variation des gains espérés des investisseurs qui sont
devenues une prophétie défaitiste mais qui n'a pas pu se réaliser [Dollar et Hallward-Driemeter (1997)
p. 2]. S’agissant d’un choc exogène dans les marchés internationaux des biens et services, l’impact
progressivement négatif pèse sur le déficit de la balance de paiement qui s’est envolé, dû à une
diminution graduelle de la demande mondiale des produits exportés7, notamment les produits
manufacturés. Malgré une performance productive du secteur manufacturier au cours de la première
moitié des années 1990, l’exportation a été réalisée au taux de croissance de zéro pour cent en 1996.
La moitié de l’année 1997 marque également un apparent ralentissement de la demande internationale
des produits exportés tel qu’électroniques, produits alimentaires et germens. Combinée à cette chute
de la demande mondiale, la Thaïlande a considérablement perdu sa compétitivité internationale en
matière d’échanges commerciaux dûdue à une hausse du taux de salaire réel entre 1991 et 1995, et à
une appréciation du Baht, attaché au panier du dollar américain qui a été surévalué par rapport au Yen
japonais. En effet, durant la même période, le dollar a apprécié près de 40 % par rapport au Yen
6 La crise asiatique n'était certainement pas un résultat des politiques monétaires fiscales erronées puisqu’avant l’éclatement de la crise en juillet 1997, la Thaïlande a maintenu un excédent fiscal chaque année pendant les années 1990. Ceci est le contraste important avec la crise latino-américaine de la dette au début des années 80. Un des dispositifs principaux de la crise latino-américaine de dette était la mauvaise gestion des politiques macro-économiques, les grands déficits budgétaires [Lee et Rhee (1999) p.3].7 Le déficit de la balance de paiement est passé de -5.6 % du PIB en 1994 à -8.1 % du PIB en 1996 [Hicken (2004) p.5]. Ceci est dû à une baisse brutale du revenu de l’exportation dont le taux de croissance n’était que de 1 % en 1996 après deux ans de croissance élevée au dessus de 20 %.
8
japonais. Or, le Japon a été le principal pays destinataire des exportations. Par conséquent, les firmes
thaïlandaises ont eu un déclin considérable de leurs produits exportés. En outre, l’enchaînement de
l’effondrement financier a provoqué une baisse des investissements japonais en Thaïlande, sources de
l’innovation et de la croissance de la productivité à long terme.
L’éclatement de la bulle spéculative s’accélère par une fuite des capitaux étrangers. En effet,
comme précédemment précisé, les flux d’investissement sont mal gérés et sont destinés
principalement à l’investissement dans le secteur immobilier, non productif. Des vagues spéculatives
sont formées dans ce secteur immobilier où des prix ont brutalement baissé, suivi de la chute du cours
due Baht. Les emprunts de ces projets immobiliers auprès des institutions financières deviennent des
créances douteuses. L’ensemble du système financier s’est effondré consécutivement à une fuite des
capitaux étrangers. La Banque Centrale Thaïlandaise a tenté de soutenir le cours du Baht en dépensant
près de la moitié de sa réserve en devise. Mais face à une telle incertitude du marché financier, les
autorités thaïlandaises sont contraintes d’annoncer un système de monnaie flottante dès juillet 1997.
L’entrée en crise économique et financière est pratiquement inévitable lors d’une dévaluation sans
cesse de la valeur du Baht qui a baissé de près de la moitié par rapport à celle d’avant la crise.
B. Ajustement à la crise
La récession a eu un effet immédiat sur l’ensemble des activités économiques. La situation due
chômage et la réduction du temps de travail résultent de deux grandes opérations. D’une part , il s’agit
d’un processus direct de la fermeture des institutions financières : parmi ces dernières, près de 58 ont
été contraintes à lade fermeture en raison d’une détention des créances douteuses. D’autres parts, la
chute brutale des exportations et de la hausse de l’inflation ont pénalisé les investissements,
notamment dans le secteur industriel, en rendant les coûts de production plus chers. Sur ce, il convient
d’introduire une analyse microéconomique de l’ajustement à la crise par des firmes industrielles afin
d’appréhender des conséquences finales sur l’emploi. En effet, on observe deux points importants de
la formation de la crise à l’égard de la gestion des entreprises. Tout d’abord, les entreprises continuent
à investir à un niveau très élevé en 1996 et pendant la première moitié de l’année 1997 malgré une
baisse tendancielle de la profitabilité, des exportations et des ventes. Ensuite, la relation entre les
firmes et les institutions financières se base essentiellement sur un emprunt de courte période qui,
contrairement à celui de longue période, risque d’être plus vulnérable au choc. En effet, lorsque
l’octroi des prêts à courte terme se révèle non transparent et complexe, les institutions financières
s’explosent facilement à des multiples risques. Par exemple, quand les prêteurs étrangers ne
9
parviennent plus à faire confiances à l’en économie du pays, les institutions financières thaïlandaises
font des pertes considérables à cause d’une fuite des capitaux.
Du côté de la gestion des entreprises face à la crise, l’enquête de Dollar et Hallward-Driemeier
(2000), auprès des grandes firmes industrielles8, montre qu’à la fin de 1996, trois cinquièmes des
firmes considérées ont une sous capacité de production, due à la contraction de la demande des biens
et services. En effet, près de 60 pour cent des firmes déclarent d’avoir des difficultés de production à
cause de la chute de la demande domestique et de la hausse des coûts de production, générées par une
dévaluation du Baht et par une montée de l’inflation. Plus particulièrement, l’industriel due textile a
subi à une dépréciation du Baht et l’industrie des pièces automobiles, quant à ellelui, a été confrontée à
une baisse de la demande domestique. Près de 40 pour cent des firmes exportatrices, notamment dans
le secteur de l’électronique et de germent, font face à une chute de la demande mondiale comme étant
une cause principale du déclin de leur production. Cependant, un tiers des producteurs qui considèrent
les problèmes d’accès au capital financier comme une cause de la baisse de production concerne
principalement les petites entreprises domestiques et non exportatrices.
Par conséquent, les capacités limitées de production se traduisent immédiatement par un
licenciement des employés, notamment dans les petites entreprises et les grandes firmes dont la
production dépend étroitement de la demande domestique. En définitive, les firmes exportatrices ont
subi moins de conséquences de la crise par rapport aux firmes non exportatrices en termes de
licenciement et de la baisse des salaires.
C. Conséquences économiques et sociales de la crise
En juillet 1997, l’adoption du système de la monnaie flottante entraîne une baisse irréversible de
la valeur de cette dernière. Toute une série de crises de panique s’installe. La sortie des capitaux
étrangers a pour l’effet d’une illiquidité financière des entreprises. La valeur boursière a chuté de 75%
en 1997. Le taux de croissance des revenus des exportations est passé de 25,1 % en 1996 à -1,3 % en
1997 en dollar américain. Le taux d’inflation est monté en flèche en passant de 4,7 % en 1996 à 7,2 %
en 1997, provoquant une baisse de la consommation et une hausse des coûts de production. De 1996 à
1998, le PIB par habitant s’est alors contracté près de 12.7% [BASD (2007) p.6]
8 Il s’agit de 4 firmes industrielles, à savoir l’industriel de textile, de des pièces automatiques de transformation, des produits alimentaires, de l'électronique.
10
La récession a eu un effet pervers sur le niveau de vie de la population. Ainsi, l’incidence de la
pauvreté, considérablement réduite durant les années 1980, a augmenté de 11,4 pour cent en 1996 à
13,0 pour cent en 1998, ce qui soit équivautlent à une hausse de 1,1 millions de personnes pauvres en
l’espace de deux années [Medhi et al. (2006) p. 13]. La récession fait retomber le revenu par tête au
niveau de l’année 1996. L’impact de la hausse des prix a été relativement important sur la réduction
des revenus des ménages, notamment à Bangkok et son agglomération. De plus, les ménages urbains
ont globalement plus souffert de la hausse des prix que ceux du milieu rural [NESB et BASD (1999)
p.8]. Cependant, il convient de s’interroger sur les effets spécifiquement négatifs de la crise sur les
ménages à faibles revenus qui se situent essentiellement dans le milieu rural. Contrairement à ce qu’on
pourrait imaginer, les familles à faible revenus vivant dans une zone rurale ont été également touchées.
Ceci pourrait s’expliquer par les divers facteurs. Tout d’abord, juste avant l’arrivée de la crise, le
programme de réduction de la dépense publique suggéré par le programme d’ajustement structurel a
engendré une suppression d’une grande partie des services publics, notamment dans les dépenses
sociales et dans les programmes de lutte contre la pauvreté [BASD et NESDB (1999) p.2]. Ensuite,
l’ajustement du marché du travail s’effectue par une grande mobilité géographique des travailleurs
entre une zone rurale et urbaine. Ainsi, en Thaïlande, la zone rurale absorbe un nombre significatif des
migrants qui quittent provisoirement la zone urbaine lors d’une contraction de la demande de travail
des entreprises. L’impact de la crise économique s’étend rapidement de la zone urbaine vers la zone
rurale par le biais du retour aux origines. Enfin, une raison principale de la hausse des personnes
pauvres dans le milieu rural est attribuée à des effets indirects de la dévaluation du cours du Baht qui
contribue à augmenter le prix relatif des produits agricoles exportables qu’en dont dépendent les
revenus des agriculteurs ruraux [Mazumdar et Son (2001) p.4].
La répercussion négative de la crise a été d’autant plus forte que les revenus des ménages en
provenance du marché du travail prennent une part substantielle. C’est bien le cas de la Thaïlande. En
fait, un effet négatif et immédiat sur le marché du travail se déroule à travers d’un ajustement en
termes de quantité et de prix. En ce qui concerne l’ajustement par la quantité, on assiste à une flambée
du taux de chômage qui est passé de 1,1 pour cent en 1996 à 3,4 pour cent en 1998, soit équivalent à
une hausse de 779,700 chômeurs. L’investigation quantitative du chômage pourrait en effet dissimuler
l’effet apparent issu d’une baisse du nombre d’heures du travail. Ainsi, les travailleurs ayant 35 heures
deu travail hebdomadaires et moinsinférieur onta augmenté de 1,7 % en 1997 à 2.8 % en 1998
[Banque Mmondiale (2000) p.10]. Par conséquent, on remarque une combinaison de la réduction
artificielle de l’emploi et du nombre d’heures de travail. S’agissant d’ajustement par le prix, la
récession a eu globalement peu d’impact négatif sur la réduction des salaires des travailleurs
thaïlandais. En effet, le salaire réel d’après la crise a dépassé celui d’avant la crise, dû probablement à
11
l’effet compensateur des ajustements en quantité (le chômage et la réduction du nombre d’heures de
travail). De plus, contrairement aux pays voisins, les travailleurs thaïlandais ont eu un certain nombre
d’avantagess en termes de la protection de salaires réels à la période de la crise. Le salaire moyen a
décliné de l’ordre de 7.6 pour cent en 1998, qui a été inférieur au déclin du PIB réel (-10.0%), tandis
qu’en Corée et en Indonésie, il a baissé de près de 3 fois plus que la chute du PIB réel dans la même
année. L’apparente flexibilité limitée de salaire dans le marché du travail thaïlandais est en effet d'une
surprise, étant donnée l'absence des indications par lesquelles les politiques gouvernementales
concernant la syndicalisation introduisent autant de rigidité [Behrman et al. (2001) p.4].
Au lendemain de l’entrée en crise, la Banque Mmondiale, le FMI, la Banque Asiatique du
Développement et le gouvernement thaïlandais, ayant pris en conscience des effets dévastateurs sur le
plan social, ont conjointement mobilisé maints programmes de coopération afin de mettre en œuvre
des politiques de restructuration du marché financier et de la protection sociale. Ce changement est
considéré comme un retour au modèle social qui est susceptible d’apporter un nouvel équilibre à la
fois économique et social à plus long terme.
3. Reprise économique et retour au modèle social
La restructuration du secteur financier est une toute première mesure du gouvernement
thaïlandais en réponse à la crise. Pour cela, le recours au Ffond Mmonétaire Iinternational est
nécessaire et immédiat. Or, en faiessant la pression sur le gouvernement thaïlandais, l’ensemble des
groupes sociaux, des ONG et des organisations internationales réclament une attention de ce dernier
sur les dégâts sociaux qui, contrairement au secteur financier qui favorise la richesse des riches,
détériore non seulement le niveau de vie de la population thaïlandaise mais également le
développement économique et social à long terme.
A. Recours au fond monétaire international et politiques de régulation
En août 1997, comme la plupart des pays du Sud-ouest asiatique9, la Thaïlande fait appel à
l’aide financière auprès du FMI qui impose ensuite des politiques d’austérité. La somme totale
empruntée s’est élevée à 17,2 trillions de dollars américains, collectés principalement dans les pays
asiatiques. Ce montant a inclut 2,7 trillions de dollars américains qui provienaient de la Banque
Mmondiale et de la Banque asiatique du développement et avait pour but d’améliorer la compétitivité
9 Au même moment que la Thaïlande, L’Indonésie et la Corée ont effectué une même demande de l’aide financière et de la mise en place des programmes d’ajustement.
12
industrielle, le marché financier et d’atténuere mitiger les éventuels dégâts sociaux causés par les
programmes d’ajustement [Lauridsen (1998) p.1598]. Deux grands volets ont été impliqués : d’une
part, les politiques visant à augmenter la demande domestique et, d’autres parts, des réformes
structurelles permettant de dégager un budget excédentaire. Ce choix reflète en effet le point de vue du
FMI à l’égard de l’origine de la crise, c'est-à-dire qu’il place la première responsabilité de la crise
sur la faiblesse structurale du capitalisme asiatique, particulièrement son système financier,
inexpérience et inefficacité des institutions financières dans l'évaluation et la gestion des risques [Lee
et Rhee (1998) p.16]. Ainsi, parmi les programmes imposés par le FMI, il faudrait compter une hausse
du taux de fiscalité de 7 % à 10 % afin d’atteindre 1 % du surplus budgétaire en 1998, et une baisse
globale de la dépense publique sauf dans les domaines de l’éducation et de la santé. Ensuite, la
politique restrictive doit ramener le taux d’inflation de 9,5 % en 1997 à 5 % en 1998 et le déficit de la
balance de paiement de 5 % en 1997 à 3 % en 1998 alors qu’il était de l’ordre de 8,2 % en 1996
[Lauridsen (1998) p.1598]. Une grande partie du fond monétaire consiste à réparer les dégâts du
marché financier ravagé par la crise. En octobre 1997, le plan pour la restructuration du secteur
financier a été mis en place. Le gouvernement thaïlandais privilègie la restructuration financièere en
promettant la recapitalisation des banques privées afin de redémarrer la machine des activités
économiques du pays. Le processus de restructuration, sous la haute surveillance de la Banque
Centrale de Thaïlande, commence par une injection de 300 trillions de baht pour encourager la
recapitalisation des banques commerciales thaïlandaises et des entreprises financières. Au milieu de
l’année 1999, les prêts non productifs (Non Performing Loans, NPLs) atteint son maximum de 47,7 %
de la totalité des emprunts, conséquence d’un ralentissement des activités économiques au début de
1998 [Charoenseang et Manakit (2002) p.604]. Cependant, cette proportion diminue avec le temps.
Malgré un progrès considérable fait dans la reconstitution du marché financier, les problèmes liés à la
transparence et aux risques de la gestion financière des banques commerciales et des institutions
concernées restent à résoudre.
La reprise des activités économiques a été plus rapide que prévue malgré les apparentes limites
des emprunts financiers pour l’investissement. Dès la fin de 1999, le taux de croissance du PIB devient
positif, grâce notamment à la stabilité macroéconomique et à la reprise progressive de la demande
mondiale. Ainsi la croissance du PIB réel est passée de 3,9 pour cent en 2000 à 5,4 pour cent en 2004,
soit en moyenne de 4,2 pour cent par an depuis 1999 [Ritcher (2006) p.8]. Parmi les facteurs
compromettants, on note une accélération d’investissement, résultat d’un progrès considérable de
l’utilisation de la capacité de production, des faibles taux d’intérêt et une montée du cours mondial des
produits agricoles, qui, toust ensembles, favorisent l’expansion des exportations.
13
B. Retour au modèle social
Etant donnés ldes dégâts sociaux créés par la crise économique et financière, il est question pour
la Thaïlande d’adopter un système généralisé de la protection sociale. La situation sans emploi dans
une zone urbaine a été d’autant plus dramatique que le système de protection sociale ne couvre qu’une
minorité de travailleurs: seulement 6,08 millions de personnes ont adhéré en 1997 [Ranee et SAWG
(2001) p. 7]. De ce fait, une partie de l’aide financière du FMI est destinée à créer le filet de protection
sociale (Social Safety Net) afin d’alléger l’impact de la crise. Le processus prend un grand délai long et
jugé inefficace. En effet, ce programme devant être mis en ouvre dès la fin de l’année 1998, prend un
temps considérable, notamment pour les responsables de la conceptionvoir dles programmes dans un
pays où les bases nécessaires du système social sont presque inexistantes. Finalement, le programme a
pu naître en janvier 1999 avec un montant disponible de 300 millions de dollars mais seul 66 projets
ont été créés avec un coût total de 20 millions de dollars [Phongpaichit et Baker (2000) p.40]. Cela se
révèle insuffisant quant à la présente détresse sociale à l’époque. Ainsi que les groupes activistes du
marché du travail, des ONGs et la partie d’opposition gouvernementale accusent le gouvernement
d’avoir une politique laxiste en matière de protection sociale. En mars 1999, le gouvernement
thaïlandais a annoncé une injection de 1,50 trillions de dollars en économie. Cette somme provient de
l’aide du Japon pour mettre en œuvre un plan de Miyazawa qui consiste principalement à la création
d’emploi et à la protection sociale.
Dans cette optique, la crise économique est considérée à la fois comme un dévastateur
économique et un signal envoyé au gouvernement pour prendre en considération la dimension sociale
dans le développement économique. Bien que la crise ait donné l'impulsion pour la Thaïlande de
raffiner sa stratégie vers la protection sociale, le nouveau défi repose sur la création de la couverture
de manière proportionnelle, prévisible, et équitable. Actuellement, la protection sociale couvre
seulement un cinquième de la population qui travaille notamment dans le secteur public ou semi
public, laissant plus de 50 millions de personnes sans protection [BASD (2007) p.8]. Avec les
initiatives de la Banque Mondiale en coopération avec le gouvernement thaïlandais, le programme de
coopération CDP (Country Developement Partnership) a été lancé en 2003 et mis en application tout
au long du neuvième plan. Il est question d’une collaboration d’un projet porté au niveau national,
composé de plusieurs sous- programmes visant à obtenir les objectifs du développement sans recourir
au fond de la Banque Mmondiale. Le premier programme, nommé CDP-PAM (Country Developement
Partnership on Poverty Analysis and Monitoring), a pour objectif principal de mettre en œuvre des
moyens efficaces pour l’appréhension des phénomènes de pauvreté et d’inégalité des revenus. Il
consiste à réaliser entre autres quatre dimensions méthodologiques liées à l’étude de la pauvreté, à
14
savoir une amélioration de la qualité des données, des mesures de la pauvreté, de l’inégalité et de
diverses stratégies de lutte contre la pauvreté [Banque Mmondiale et PCU (2003) p. 4]. Le deuxième
projet, CDP-SP (Country Developement Partnership on Social Protection), consiste à améliorer la
gestion des risques liés aux problèmes sociaux dans deux grandes directions, tel qu’un système global
de protection sociale pour les marchés du travail formel et informel (indemnité de chômage, sécurité
sociale etc.). L’introduction du modèle social dans l’agenda national devrait permettre à l’économie
thaïlandaise de passer du mode de stabilisation économique au développement socialement soutenable
dans les années à venir [Wisarn (2002) p.3].
2.[3.] Cadre d’analyse et problématique (à faire)
CHAPITRE I : Inégalités et mobilités en théorie et marché du travail en Thaïlande
En Thaïlande, la nouvelle constitution de 1998 faiessant apparaître l’importance de la législation
du travail10exige un principe de base d’équité, d’égalité et de droits de l’Hhomme. En principe,
l’objectif initial est d’insister sur le renforcement des capacités individuelles en donnant les moyens
nécessaires aux individus de faire face aux divers risques sociaux et éventuels chocs économiques. En
pratique, nombre initiatives du gouvernement thaïlandais pour améliorer la qualité des ressources
humaines, engendrent des résultats peu satisfaisants. Ceci est en partie en raison des cibles mal
définis des dépenses budgétaires et de manque des sources d’information nécessaires à la
construction de l’évolution de la société, notamment en matière du capital humain, social et culturel
[Banque Mmondiale (2004) p. 11-36]. Il en est ainsi que l’étude du marché du travail en termes de
dynamique, constituant un ensemble des programmes d’amélioration de la qualité des ressources
humaines, attire particulièrement notre attention à son sujet. Dans cette optique, nos analyses porteront
sur deux directions théoriques et empiriques du marché du travail. Dans un premier temps, il convient
d’aborder une étude théorique des déterminants de l’inégalité et la mobilité des salaires et les mobilités
10 La loi sur le travail, introduite dans la dernière constitution de 1997, interdit formellement l’esclavage et le travail forcé. Elle constitue un ensemble de base de droits de l’homme, y compris les droits de constituer les associations, les syndicats et d’autres organisations. L’égalité homme-femme est respectée. Cette constitution interdit également la discrimination raciale, régionale et d’autres formes discriminatoires [Brown Earl V (2003)].
15
d’emploi. Dans un deuxième temps, la présentation des caractéristiques du marché du travail en
Thaïlande constituera une base analytique ultérieure.
Si les personnes hautement qualifiées sont facilement embauchées grâce à leur niveau supérieur
de capital humain, il est fort possible que les personnes peu qualifiées ou ayant un faible niveau
d’instruction risquent davantage d’être au chômage, voire d’être exclues de la société [Steedman
(1996)]. Par conséquent, les sociétés ayant tendance à être inégalitaires du point de vue de l’accès à
l’enseignement et des niveaux de formation le sont également en matière de répartition de revenus
[OCDE (2001)].
A suivre
1. Théories orthodoxes contre théories institutionnalistes
Les recherches en économie sur la question des inégalités et des mobilités d’emploi font l’objet
d’une diversité des théories économiques liées au marché du travail. Si l’on pouvrrait les regrouper en
plus grande famille, l’apparente opposition submerge en deux directions de pensées économiques
possibles. La première s’attache à l’individualisme méthodologique qui priviléègie les comportements
individuelsle dans l’explication du phénomène étudié. Elle englobe un ensemble des « théories
dominantes » néoclassiques. La seconde s’interroge sur l’influence des structures économiques et
sociales qui gouvernent l’action des individus, non pas à l’inverse. Cette dernière correspond aux
théories hétérodoxes, et plus précisément la théorie de la segmentation du marché du travail. Ce
faiessant, dans cette section, il est question d’approfondir nos connaissances sur une dimension
théorique du débat portant sur l’inégalité salariale et les mobilités d’emploi. Quels sont les
déterminants de l’inégalité des salaires et les mobilités d’emploi dans un marché du travail du type
néoclassique et en version de la théorie de la segmentation ? Quels sont les liens spécifiques existants
entre ces deux phénomènes récemment abordés dans l’économie contemporaine ? Plus
particulièrement, quel est le sens de la relation conjointe entre l’inégalité et la mobilité salariale en
théorie ? Afin de répondre à ces questions, anciennes malgré elles mais tout à fait d’actualité, nous
allons tenter d’opposer les théories néoclassiques aux théories institutionnalistes de manière à nous
centrer sur l’intérêt porté aux sujets d’études, c'est-à-dire l’interaction possible entre l’inégalité,
mobilité salariale et mobilité d’emploi. Enoncé ?
1. Théories néoclassiques de l’inégalité, des mobilités salariales et professionnelles
16
Inspirées et développées par des économistes néoclassiques, les notions d’inégalité, mobilités
salariales et d’emploi constituent un vaste champ de recherche en économie moderne. Parmi les
théories dominantes, il faudrait compter deux modèles fondamentaux qui servent comme base de
l’analyse néoclassique de ce sujet, à savoir la théorie du capital humain et la théorie de l’appariement.
En effet, l’exploration de ces derniers constitue une première démarche théorique afin d’appréhender
une liaison fonctionnelle entre, d’une part, inégalité salariale et mobilités d’emploi , et, d’autre part
inégalité et mobilité salariale. S’agissant de la théorie du capital humain, elle consiste à clarifier
l’existence des disparités salariales en attribuant le rôle central au processus de différenciation des
dotations et du stock deu capital humain comme étant son principal facteur explicatif. Conçue dans un
même ordre d’idée, l’analyse de mobilités d’emploi évoquée par la théorie de l’appariement montre un
lien étroit entre le capital humain spécifique et la productivité du travail. Selon la théorie de
l’appariement, la mobilité d’emploi aboutit généralement à une efficacité en termes de croissance
salariale.
Les disparités salariales seront expliquées par le modèle du capital humain. Les mobilités
d’emploi seront théoriquement constituées par le modèle de l’appariement et enfin la mobilité salariale
reste un terme récent tant en analyse théorique qu’empirique.
A. Disparités salariales dans la théorie du capital humain
Pour parler d’inégalité des salaires, la théorie du capital humain occupe une place centrale 11.
S’inscrivant avant tout dans une analyse microéconomique du marché du travail, elle explique le
différentiel salarial par les différences en matière de qualifications du travail. Le développement du
concept des ressources humaines remonte à la période d’Adam Smith. La reprise de ses recherches par
des économistes néoclassiques amène à une démarche révolutionnaire des théories néoclassiques des
années 1960.
a. Fondement de la théorie du capital humain et modèle de base
L’approche classique de la détermination des rémunérations est apparue dans un livre d’Adam
Smith intitulé la richesse des nations dans lequel s’inscrit la théorie du « Equilibrium wage
differences ». Cette dernière pose un ensemble des conditions, qui engendrent indirectement le
11 Parmi les théories néoclassiques de la formation des salaires, il convient de rappeler la théorie hédonique des salaires, formalisée par Rosen (1974). Selon cette théorie, les écarts salariaux sont liés à la pénibilité des tâches.
17
différentiel des salaires, parmi lesquelles la proportionnalité entre le salaire d’un individu et le coût
d’apprentissage se veaut nécessaire à la construction ultérieure du concept du capital humain
[Leontaridi (1998) pp. 65]. En fait, il fallait attendre les années 1960 pour que cette relation
fonctionnelle soit réellement incorporée dans les théories néoclassiques sous le nom de la théorie du
capital humain, développée notamment par les contributions de Schultz (1961), de Becker (1964) et de
Mincer (1958). Selon Becker, l’accumulation ou l’investissement en capital humain d’un individu, qui
correspond à de nombreuses activités au cours d’une vie, est susceptible d’avoir un impact plus ou
moins positif sur ses rendements futurs – en forme monétaire ou non. Ainsi, le capital humain se
définit comme l’ensemble des capacités économiquement productives qu’un individu acquiert par
accumulation de connaissances générales ou spécifiques, de savoir-faire, etc. La notion de capital
exprime l’idée que c’est un stock immatériel imputé à une personne (i.e. idiosyncrasique) pouvant être
accumulé, s’user au fil du temps [Gleize (2000)]. Le stock deu capital humain augmente à travers
l’action de multiples facteurs dont les principauxl sontest l’éducation et la formation qui permettent
l’acquisition de connaissances et leur mise en œuvre. D’autres facteurs, l’état de santé, de nutrition, la
migration, influent également sur le capital humain à de faibles stades de développement de
l’économie [Becker (1993) p. 11]. L’investissement en capital humain est alors un résultat d’une
décision individuelle d’optimisation de ses gains au cours de sa vie sous contraintes à savoir ses coûts
liés à l’investissement : des revenus de ses parents (coûts directs), le temps d’apprentissage et d’autres
facteurs non monétaires (coûts indirects).
Dans notre étude, l’investissement en capital humain inscrit dans le modèle de base s’opère
sous formes de scolarisation et de formations. La première approche du capital humain est
intelligemment développée par Becker. La contribution de Ben-Porath consiste à compléter le modèle
de base en abordant l’investissement optimal du capital humain.
L’établissement du concept deu capital humain par l’approche de Becker est à partir d’un
constat d’une relation étroite entre les compétences et les connaissances acquises et les gains dans un
marché du travail parfaitement concurrentiel, hypothèse implicite des théories néoclassiques. La
personne humaine est vue comme un « capital », et l’éducation et la formation sont conçues comme
un investissement susceptible d’accroître ce capital. Le coût de l’investissement sera amorti par les
accroissements de revenus futurs obtenus grâce au surcroît de l’éducation et de la formation.
La scolarisation formelle est considérée comme une première forme susceptible d’accroître le
stock du capital humain. Il s’agit des études initiales formelles dans une école ou à l’université. En
18
effet, le rôle de l’éducation dans la détermination des gains dans le modèle de base est crucial.
L’acquisition des connaissances dans les établissements d’enseignement constitue une première
démarche vers le positionnement surdans le marché du travail. L’individu est incité à investir en
éducation formelle d’autant plus que l’impact de celle-ci sur les gains futurs est significatif.
Cependant, l’acquisition des connaissances après la fin des études est également non négligeable. Les
formations ou l’acquisition des connaissances après les études accroissent directement les
compétences et les qualifications de l’individu, qui engendrent ensuite sa productivité adu travail de
manière proportionnelle. Ces formes particulières du capital humain sont mesurées par un ensemble de
périodes d’apprentissage, de stages ou simplement de connaissances acquises avec l’expérience
professionnelle.
Afin d’expliquer un impact du capital humain sur les gains futurs, l’approche standard du
capital humain met en relation entre les coûts liés à l’investissement et les gains espérés. S’agissant
des coûts d’investissement, on distingue les coûts directs et indirects spécifiques à la scolarité formelle
et aux formations. En effet, les coûts émergés dans la scolarité formelle sont à la fois directs et
indirects. Les coûts directs sont, par exemple, les achats des livres, les coûts de transports à l’école, les
frais d’inscription, etc. Ils sont généralement assurés par la famille, du moins dans les premières
années d’études. Et les coûts indirects sont les gains que l’individu aurait dûu obtenir s’il entrait dans
la vie professionnelle. Ils sont également appelés les coûts d’opportunité -le prix du temps consacré à
l’étude. Selon Riboud, ces coûts d’opportunité varient selon l’âge : un enfant de moins de 16 ans, âge
auquel il peut travailler sans trop de peine, a un coût d’opportunité relativement faible, voire nul. Au-
delà de cet âge, l’étudiant pourrait gagner un salaire dont le montant croîtra à mesure de
l’accroissement de ses qualifications [Riboud (1978) p. 8]. Dans les formations, le temps dépensé dans
l’apprentissage est considéré comme un coût d’opportunité, susceptible, pour un employé, d’être plus
important que les coûts directs – les frais d’inscription, de déplacement ou d’autres dépenses
monétaires. De la même manière que dans le cas de la scolarisation, plus les coûts directs et indirects
d’investissements post-scolaires sont importants, plus les gains correspondants deviennent
proportionnellement à la hausse. De ce fait, la décision d’investissement dépend fondamentalement du
degré de cette corrélation, autrement dit du taux de rendement de ces investissements. Pour démontrer
cette relation, l’individu sera placé comme une entreprise d’optimisateur au cours de sa vie active.
Considérons les coûts liés à la scolarité formelle et les formations suivants.
Cn=∑ DM (1+r )n+∑ CPn (1-1)
19
Les coûts inhérents à l’investissement total au bout de n années (Cn ) représentent la somme
combinée des dépenses monétaires des n années (∑ DM ) compte tenu du taux d’actualisation
(1+r ) et des coûts d’opportunité (∑CPn ). Pour que l’investissement soit rentable, il faut que les
revenus (ΔY ) actualisés soit supérieurse au coût de l’investissement.
ΔY (1+r )n>Cn (1-2)
Or, l’accroissement des revenus futurs est fonction à la fois du niveau d’instruction (E) et de la
formation (F), et due capital humain de départ, c'est-à-dire des qualités naturelles (QN)12.
ΔY =f ( E ,F , QN ) (1-3)
Les inégalités scolaires de parcours, de réussites scolaires et de formation résultent donc du
comportement rationnel. Les individus choisissent la voie dont la combinaison coût/bénéfice est la
plus avantageuse pour eux, étant données les contraintes que leur impose leur situation sociale, leurs
résultats scolaire etc. De fait, la prise en compte de ces coûts et rendements permet de calculer un taux
de rendement privé qui servira de critère pour la décision d’investissement [Riboud (1978) p. 8]. Par
exemple, le taux de rendement de l’éducation se définit comme un accroissement des revenus
individuels résultant d’une année d’études supplémentaires. Les taux de rendement aux autres formes
du capital humain se définissent de manière analogue. L’idée centrale de la théorie du capital humain
est que les individus investissent pour l’avenir en faisant un calcul rationnel du taux de rendement
d’une poursuite d’études et font leur choix d’orientation en conséquence. Les calculs individuels
peuvent être transférés au plan collectif, en tenant compte de l’ensemble des coûts de l’enseignement.
Le calcul des taux de rendement social permet d’évaluer le caractère optimal du développement de
différents niveaux et types d’enseignement et devenir ainsi un instrument de planification [Bertrand
(1994) p.2-3].
La perspective théorique de l’individualisme méthodologique considère qu’un fais social résulte
de l’agrégation des décisions rationnelles des individus. La prise en compte d’un état optimal de
l’investissement individuel en capital humain est alors l’une des préoccupations principales. Dans
12 Bien que les qualités naturelles – en particulier capacités intellectuelles- soient présentées dans l’équation (1-3) –modèle de base, elles ne seront explicitement incorporées que dans le modèle développé.
20
cette optique, l’analyse de Ben-Porath (1967) en termes de l’accumulation optimale de capital humain
sur le cycle de vie complétera le modèle de base de Becker.
Selon le modèle de Ben-Porath, à chaque période du temps, l’individu investit en capital
humain en fonction des coûts et des bénéfices qui en décroulent à chaque stade de sa vie. Il se
comporte comme une entreprise face à des conditions de prix donnés. L’investissement en capital
humain est décrit à l’aide d’une fonction de production et sera réalisé jusqu’à ce que son coût marginal
égalise la valeur actuelle des gains marginaux. Les gains perçus au cours d’une vie résultent en fait
d’une succession de décisions optimales d’investissement en capital humain pour chaque période.
L’hypothèse du modèle de Ben-Porath stipule que chaque individu partage son temps entre activités
rémunérées et production de capital humain, en ignorant, afin de simplifier, une partie de ses loisirs.
En effet, produire à la période t la quantité de capital humain Qt nécessite l’utilisation de la fraction
st du stock de capital humain existant, K t , ainsi que l’achat des biens et services Dt . La fonction de
production de capital humain est alors :
Qt=α( st K t )β Dt
γ (1-3)
En effet, les activités effectuées par l’individu et la production de capital humain ne peuvent se
dérouler conjointement, le paramètre st ,compris entre 0 et 1, reflète une proportion du temps
consacré à cette production. α , β et γ sont les paramètres représentant la capacité individuelle et les
conditions institutionnelles de production, respectivement. On parle d’investissement optimal à la
période t lorsque l’individu détermine la combinaison optimale des facteurs pour toute quantité (Qt )
et la fonction de coût correspondant. Exactement comme dans le cas d’une entreprise compétitive, face
aux conditions de production, aux prix des facteurs et au prix de vente, il décide de manière optimale
de la quantité à produire en maximisant les gains ou en minimisant les coûts de production.
La fonction (1-3) présente des rendements d’échelle décroissant, puisque les individus
rencontrent des limites pour assimiler des connaissances en temps très rapide. En effet, selon Ben
Porath (1967), il est démontré que le rendement marginal de l’investissement est décroissant, au moins
à partir d’un certain âge. En effet, tant que l’investissement brut est supérieur à la dépréciation du
capital humain, l’investissement net positif entraîne un accroissement du taux de salaire. Par contre,
l’investissement brut tend à diminuer avec l’âge car, d’une part, les coûts d’opportunité augmentent,
et d’autre par, le nombre d’années restantes pour percevoir des revenus supplémentaires et consommer
21
davantage diminuent naturellement avec l’âge. A l’inverse, l’obsolescence du capital humain
augmentea avec l’âge en raison de son incorporation à la personne. Au total le taux de salaire
augmente avec l’âge jusqu’à un certain point avant de redescendre ensuite. Par conséquent, il est
avantageux, pour l’individu, de se consacrer pleinement aux études au début de la vie et de continuer
les investissements en formation à un rythme décroissant durant la vie active. De plus, comme le choix
de formation dépend de la capacité des individus à valoriser cette formation et de l’importance des
ressources qu’ils sont en mesure de mobiliser pour la financer, le niveau de l’investissement optimal
en capital humain est fortement individualisé.
Becker distingue deux types deu capital humain: le capital humain général et spécifique. On
parle de capital humain général lorsqu’il s’agit des connaissances qui ne sont ni spécifiques à une
entreprise, ni à la tâche singulière au sein d’une entreprise. Ce sont les connaissances et les
compétences génériques –capacité d’analyse ou intelligence des situations – essentiellement
accumulées par l’expérience professionnelle et de l’éducation formelle. De manière générale, le salarié
doté d’une formation générale bénéficie du même accroissement de la productivité marginale dans
toutes les entreprises. Par conséquent, le salarié se verra offrir la même rémunération, supérieure à
celle perçue avant l’investissement, par toutes les entreprises. Le capital humain spécifique à la tâche
s’accumule essentiellement par des formations professionnelles et au moyen de l’expérience. Il
correspond à des compétences spécifiques à un poste de travail, assistant de direction, par exemple.
L’individu perd ses compétences lorsqu’il change de tâches dans une même ou nouvelle firme
[Gibbons et Waldman (2004) p. 206]. L’analyse du capital humain spécifique à la firme est aussi
répandue que celle du capital humain général. En effet, le capital humain spécifique correspond à des
compétences et des connaissances acquises dans leun cadre d’un corpus des connaissances collectives
spécifiques à une firme donnée. Par exemple, l’organisation du travail ou les formations spécifiques de
la firme sont considérées comme une forme deu capital humain spécifique. Le salarié formé ne verra
une hausse de sa productivité ainsi que de ses salaires que dans l’entreprise dans laquelle il est formé.
Dans ce cas, la probabilité qu’il change d’emploi est relativement plus faible que ceux qui
n’obtiennent aucune formation ou qui ont une formation générale. La simultanéité des salaires élevés –
rémunérations supérieures à celle qu’il espère surdans le marché du travail – justifie le faible taux de
rotation et la stabilité d’emploi. Le capital humain spécifique crée alors une longue relation entre
l’employeur et l’employé dans la mesure où ce dernier n’a pas d’intérêt àde quitter l’entreprise
puisque ses compétences et connaissances acquises spécifiques à la firme ne seront utilisées que
partiellement dans une autre firme.
22
Selon Becker (1964), l’entreprise ne sera pas en mesure d’investir dans le capital humain
général puisque cette dernière ne pourra pas récupérer la totalité des dépenses lors d’un départ du
salarié formé. Dans le cas d’une formation parfaitement générale, les coûts seront donc supportés par
le salarié. Par contre, l’équilibre ne sera atteint que lorsque les rendements tirés des investissements
spécifiques se partagent entre l’individu et la firme concernée. En d’autres termes, les coûts des
formations spécifiques seront partagés entre celui qui les reçoit et l’entreprise afin d’éviter les dégâts
éventuellement causés par la mobilité d’emploi du salarié. Hashimoto (1981) a repris l’idée de Becker
en relâchant l’hypothèse de l’information parfaite et non coûteuse. L’auteur propose un modèle de
partage des coûts financiers des formations selon lequel l’entreprise et le salarié formé ont tout intérêt
à partager les coûts de financement et les rendements car ces deux agents ont potentiellement des
incitations à cesser la relation d’emploi après que l’investissement a eu lieu. La minimisation des
pertes totales de ces séparations leur permet donc d’améliorer leur bien être respectif, ainsi que leur
bien être commun.
L’analyse contemporaine du capital humain fait apparaître une vision plus réaliste quant au
soutien financier des formations générales. En effet, Katz et Ziderman (1990) suggèrent que le capital
humain acquis dans une entreprise courante, puisqu’il n’est pas signalé officiellement (par un diplôme
par exemple), n’est pas parfaitement perçu par les autres entreprises. Face à ces incertitudes et à
l’imperfection du marché du travail, les autres entreprises ne seront pas capables de proposer un même
niveau de salaires que celui offert par l’entreprise dans laquelle l’individu se trouve. De ce fait, la
probabilité deu départ de l’entreprise est considérablement réduite, le financement des formations
générales devient alors possible. Acemaglu et Pischke (1999) proposent une analyse du marché du
travail imparfaitement concurrentiel. Le marché du travail imparfait – l’accroissement de l’incertitude
et l’information imparfaite – est une clef qui explique la possibilité du soutien financier des formations
de la part de l’entreprise. Au fur et à mesure que le salarié travaille dans l’entreprise, l’employeur
bénéficie d’une information supplémentaire sur la valeur de son salarié par rapport aux autres
entreprises. Ce qui en retour diminue progressivement l’incertitude sur cette dernière. Puisque
l’entreprise a intérêt que le produit marginal augmente, elle doit former leurs salariés. Dans cet
environnement imparfait, les formations générales deviennent petit à petit spécifiques.
La modèle du capital humain est mathématiquement démontré par la contribution majeure de
Mincer (1958, 1974) qui consiste à établir une liaison fonctionnelle entre la répartition des salaires et
le capital humain. Ainsi les écarts salariaux s’expliquent, à l’aide des outils mathématiques et
statistiques, par les différences en dotations du capital humain.
23
b. Inégalités salariales et fonction de gains
L’analyse de la causalité entre le capital humain et les rémunérations est développée par Mincer
(1958, 1974) et Chiswick (1974). Le modèle du capital humain a pour objet d’étudier non seulement la
dispersion salariale durant une période donnée mais également les écarts salariaux inter temporels.
C’est à travers la fonction de gains que l’interaction entre les coûts, les bénéfices et les taux de
rendements sera mise en œuvre. On appelle la fonction de gains « des relations qui expliquent la
détermination du salaire d’un individu, à un moment donné, par les différentes variables inhérentes au
capital humain ». Dans ces directions, l’éducation formelle et les formations professionnelles prennent
une place prépondérante dans l’explication des écarts salariaux.
Dans le modèle du capital humain, le rôle de l’éducation formelle dans la répartition salariale
est primordial. Comme précédemment cité, les coûts de la scolarité (coût direct) sont financièrement
supportés en grande partie par la famille sans oublier les coûts d’opportunités (coût indirect) engendrés
par l’absence d’es activités rémunérées de l’individu pendant ses années d’études. Ce processus résulte
d’une décision rationnelle des agents économiques de l’optimisation des gains au cours d’une vie. En
d’autres termes, l’investissement en éducation est supposé récompensé par les gains futurs par le biais
d’un accroissement de la productivité du travail13. Il est possible alors de mettre en relation, entre les
gains obtenus dans le marché du travail et l’éducation formelle (en années d’études) sous forme
mathématique. La fonction de gains de l’éducation s’écrit de manière suivante :
ln Y s=lnY 0+rS
(1-4)
où Y s et Y 0 sont les gains nets des coûts directs et indirects14 en S années et 0 années d’éducation
respectivement, r pourrait être interprété comme le taux de rendement de l’éducation et S représente le
niveau d’éducation atteint par l’individu. L’individu sans instruction (S = 0) s’aperçoit le revenu à un
13 Rappelons qu’à l’équilibre, le coût marginal du travail égalise la productivité marginale du travail. En d’autres termes, l’accroissement d’une unité supplémentaire de salaire est égal à une hausse d’une unité supplémentaire de la productivité du travail.14 Pour que l’investissement à l’éducation soit rentableDans ce contexte, il s’agit du salaire net. Cependant, dans certaines équations, les gains bruts, ou au mieux les gains net, doivent être supérieurs aux coûts liés à ce dernier. Par conséquent, dans certaines équations, les gains peuvent être éventuellement les salaires bruts et observables. En effet, les salaires bruts sont les salaires qu’une personne devrait apercevoir, compte tenu de sa productivité ou ce qui revient au même, compte tenu de son stock initial de capital humain et de ses investissements passés. Les salaires nets proviennent de la soustraction des salaires bruts par les coûts (directs et indirects). Les salaires observables sont égaux à la somme des salaires nets et des coûts directs. Or, lorsqu’il s’agit des investissements professionnels, il n’existe que les coûts indirects – les coûts d’opportunité –alors les salaires observables sont égaux aux salaires nets [Riboud (1978) pp. 57].
24
montant égal à Y0. Afin d’expliquer la disparité salariale entre individus, Chiswick (1974) est amené à
exprimer l’équation (1-4) en termes de variance des revenus perçus par tous les individus considérés 15.
Ainsi la fonction de gains se transforme en équation des déterminants de l’inégalité des salaires.
σ2( ln Y i )= r2 σ 2( s )+ s2 σ2 (r )+σ 2( s )σ 2(r ) (1-5)
Avec r kkket s sles moyennes du taux de rendement et des années d’instruction, respectivement,
σ 2( ln Y i ) est la variance du log de salaires pour touts individus i. Il est alors possible de définir les
déterminants de cette dispersion à partir de la reformulation (1-5) ci-dessus. Cette dernière représente
une double d’explications quant à l’inégalité des salaires. D’une part, l’inégalité salariale, sans
prendreant en compte les formations professionnelles, dépend positivement de la moyenne des taux de
rendements internes (r ) et de la dispersion du niveau d’instruction (σ2( s) ). Ceci semble confirmer
l’idée avancée par Becker selon laquelle les rémunérations sont déterminées, toutes choses égales par
ailleurs, par les niveaux d’études. Par conséquent, les individus mieux instruits ont un niveau de
rémunérations relativement plus élevé que ceux moins éduqués. En outre, plus la moyenne des taux de
rendements privés est élevée, plus la répartition des salaires devient inégale. D’autre part, la dispersion
des salaires augmente avec la moyenne des années d’études et la variance des taux de rendements de
l’éducation. Contrairement au modèle de base développé par Becker, on observe une autre version
plus réaliste selon laquelle les taux de rendements internes se diffèrent d’un individu à l’autre. Dans ce
cas, le capital humain est appelé hétérogène, c'est-à-dire que la rémunération d’une unité de capital
humain n’est plus unique mais varie d’un individu à l’autre. Le modèle du capital humain hétérogène
sera ultérieurement démontré par Willis (1986). Selon Chiswick (1974), ces différences du taux de
rendement contribuent de manière significative à expliquer l’inégalité des salaires. Selon Mincer
(1970), il est démontré qu’aux Etats-Unis, la relation entre la moyenne des années d’éducation et
l’inégalité des salaires se révèle négative, l’équation (1-5) reste partiellement pertinente en fixant r et( s)
σ (s ) . En effet, en ayant l’année d’éducation s pour tous les individus, l’équation (1-5) devient :
σ 2( ln Y s)= s2 σ2 (r ) (1-6)
Si r est unique pour tous les individus, l’équation (1-5) est :
15 A l’origine, l’auteur a simplement introduit une analyse comparative de l’inégalité des revenus parmi les différentes régions aux Etats-Unis. Voir Chiswick (1974) et Hirsch (1978).
25
σ 2( ln Y s)=r 2 σ2 (s ) (1-7)
Dans ce modèle, r est considéré comme un indice des capacités individuelles – capacités de
transformer les savoirs et les connaissances en revenus monétaire. Par conséquent, si l’année d’études
est égale pour tous, ce sont les différences en capacité individuelle qui expliquent l’inégalité salariale,
présentée par l’équation (1-6). En ayant la même capacité individuelle, les différences en éducation
créent, toutes choses égales par ailleurs, la dispersion des salaires entre individus.
En dépit de la simplicité des modèles, la prise en compte du niveau d’instruction uniquement ne
permet d’expliquer que partiellement la dynamique des trajectoires salariales et l’inégalité des salaires.
Nous sommes alors amenés à nous questionner sur l’impact de l’ensemble des variables du capital
humain sur les gains au cours d’une vie active.
L’investissement en capital humain ne s’arrête pas à la sortie de l’école mais il continue tout au
long de la vie. A partir d’une observation selon laquelle plus les individus avancent dans l’âge, plus les
salaires se dispersent. La théorie du capital humain justifie ce fait par des différences d’une
accumulation du capital humain, notamment dans le milieu du travail telles que l’expérience
professionnelle, les formations professionnelles. Le rôle de l’expérience et des formations
professionnelles dans la formation salariale n’en est pas moins important que celui de l’éducation
formelle. En fait, afin de constituer les profils salaire-âge, selon Mincer (1993), trois déterminants
consistent à expliquer la divergence des trajectoires salariales : les dotations initiales du stock deu
capital humain, des taux de croissance et des taux de variation de l’accumulation du capital humain
[Mincer (1993) p. 72].
Figure (1-1) : Profil Salaire-âge
26
Salaire net
Âge
S
A1 A2 A3
∆S1
∆S2
∆S3
S
Sources: d’après Riboud (1978).
Le graphique (1-1) illustre bien l’évolution des carrières salariales au cours d’une vie active.
Imaginons trois adultes dont deux sont dotés d’un même niveau initial deu capital humain et un a une
dotation initiale inférieure. En fait, ce dernier, individu (1), quitte l’école ou l’université de manière
précoce à l’âge A1 avant deux autres individus, individu (2) et (3), qui préfèrent investir plus en
éducation, entraînant une sortie de l’école à l’âge A2 et A3, respectivement. Sur le graphique, la prise
en compte des salaires nets de la dépréciation du capital humain vient du fait que cette obsolescence
du capital humain peut modifier les résultats de l’analyse. En effet, elle vise à augmenter l’inégalité
salariale si l’on considère les salaires bruts au lieu des salaires nets. Si le taux de dépréciation est égal
pour tous les individus, la diminution du stock qui en résulte est plus grande pour les personnes ayant
un stock de capital humain plus élevé. D’où l’effet de la dépréciation contribue éventuellement à
atténuer la croissance des écarts de salaires entre individus [Riboud (1978) p. 84-93]. Par ailleurs,
comme précédemment mentionné dans le modèle de Ben Porath(1967), dû à la domination de l’effet
de la dépréciation du capital humain sur l’investissement brut, une baisse tendancielle de
l’investissement net provoque, à un certaine âge, une diminution de salaires nets. Par conséquent, le
profil salaire-âge, présenté dans la figure (1-1), est sous forme concave.
A l’aide du graphique (1-1), deux stades de vie peuvent être évoqués pour expliquer l’évolution
des écarts salariaux. Au premier stade, à l’âge A1, l’individu (1) quitte l’école et entre dans la vie
27
active en ayant S1 comme salaire net de départ tandis que les deux autres sont en cours d’études.
Arrivé à l’âge A2, les individus (2) et (3) entrent à leur tour dans le marché du travail avec un salaire de
S2, nettement supérieur à celui du premier individu. Ceci résulte du fait que, étant donné des dotations
initiales du capital humain déjà plus réduites pour ce dernier, le taux de croissance de l’accumulation
du capital, indiqué par ΔS1, ne lui permet pas de rattraper des deux autres adultes. Par conséquent, on
assiste à une disparité des rémunérations de plus en plus importante entre ces deux groupes
d’individus. Au second stade, le passage d’âge entre A2 et A3 marque une différence salariale entre
salariés ayant une même dotation initiale endu capital humain. Malgré une rémunération égale à
l’entrée du marché, l’écart des salaires entre s’est progressivement creusé entre les deux périodes.
Cette différentiation est due à une décision rationnelle de l’agent en matière d’investissement en
capital humain après l’école. Dans ce même graphique, on observe que l’individu (3) décide, une fois
sorti de l’école, d’investir plus en capital humain alors que l’individu (2) décide d’en faire moins,
probablement en raison de ses diverses contraintes plus ou moins monétaires. Graphiquement, les taux
de croissance des salaires sont pour tous les deux positifs mais à un rythme différent : le taux de
variation de l’accumulation du capital humain est plus élevé pour l’individu (3) que pour l’individu
(2). Ces différents rythmes d’investissement entraînent peu à peu un processus de différentiation des
gains entre deux individus. Par conséquent, à des mêmes années d’expérience et mêmes dotations
initiales endu capital humain, les salariés dotés d’une importance accumulative du capital humain dans
le milieu du travail seront relativement mieux rémunérés que ceux qui n’obtiennent aucune formations
ou qui les ont moins. Il est aisément possible d’étendre ce modèle regroupant 3 agents à un modèle se
composant de plusieurs groupes d’individus, identiques à ces trois salariés. Certes, ce modèle est
probablement réducteur compte tenu de l’hétérogénéité des caractéristiques individuelles telles que les
capacités intellectuelles et les conditions du marché du travail dans lesquelles les individus se
trouvent. Or, l’individualisme méthodologique nous renseigne que des actions individuelles issues des
décisions rationnelles constituent un vaste champ qui encadre l’ensemble des actions collectives, voir
le fait social.
Jusqu’à présent, l’établissement de la fonction de gains, l’équation (1-4), ne prend en compte
que la variable de l’éducation formelle comme une forme pertinente du capital humain. Or, comme
nous venons de le voir, les formations professionnelles et/ou l’expérience dans le travail continuent à
accroître les gains individuels étant donné le niveau d’études. Dans cette optique, la formulation
générale de la fonction de gains, conceptualisée par Mincer (1974), représente une relation
fonctionnelle entre les gains, nets ou bruts, et les différentes variables du capital humain. La fonction
de gains avec dépréciation du capital humain est sous une forme mathématique suivante16 :
16 Sans dépréciation du capital humain, la fonction de gain est la suivante ;
28
ln Y it= lnY 0+r s S i+r p∫0
t
K t dt +ln(1−K t )+U it (1-8)
Rappelons que Yit est le salaire net de l’individu i durant la période t, rs est le taux de rendement
moyen des investissements en éducation, Si est le nombre d’années de scolarité de l’individu i, rp est le
taux de rendement moyen des investissements professionnels (formations, expérience et autres), t est
un indice de temps et mesure la durée de vie professionnelle, Kt représente un rapport entre les coûts
monétaires liés aux investissements et les gains potentiels de l’individu. Il pourrait être sous forme
d’un temps équivalent dans le cas où les coûts sont sous forme du temps dépensés aux
investissements postscolaires. Le terme de dépréciation du capital humain est indiqué par ln (1−K t )
et U it est le résidu du modèle spécifique à l’individu i et au temps t.
En générale, pour estimer ce type d’équation, la sélection des variables indépendantes relève de
la décision des auteurs. Parmi d’autres variables, l’investissement professionnel est souvent approximé
par les années d’expériences lorsqu’il est difficile d’obtenir les autres formes du capital humain tel que
les formations spécifiques ou générales. Par conséquent, les paramètres rp et rs varient dans le temps et
dans l’espace et dépendent, d’une part, de la corrélation entre ldes variables explicatives et les
variables expliquées , et, d’autre part, du nombre des variables explicatives du capital humain prises
en compte dans ces modèles. DansA l’état actuel, nombre de recherches tendent à questionner sur la
pertinence de l’approche standard de fonction de gains, notamment la remise en cause des les
hypothèses implicites de l’exogénéité : le choix d’investissement en capital humain n’est pas
déterminé par d’autres variables exogènes, et de l’homogénéité du capital humain : le taux de
rendement d’une unité du capital humain est unique pour touts individus. Si l’on abandonne ces deux
hypothèses en adoptant d’autres hypothèses plus pertinentes à savoir l’endogénéité et l’hétérogénéité
du capital humain, la décision d’investissement en capital humain dépend alors d’autres variables
endogènes et les taux de rendements varient d’un individu à l’autre.
c. Endogénéité et hétérogénéité du capital humain
ln E it=ln E0+rs S+r p∫0
tK t dt +V it
où Eit est le salaire brut ou potentiel de l’individu i durant la période t, Voir le développement de la formulation de la fonction de gains dans du modèle de gain dans les articles de Riboud (1978) pp. 57-66 et , Liu et Wong (1981) et Mincer (1993) pp. 47-55.
29
L’endogénéité et l’hétérogénéité du capital humain, deux notions conceptuellement liées, font
naître une nouvelle dimension de l’analyse néoclassique. En effet, l’homogénéité du capital humain
dans l’approche de Becker implique que toutes les unités du capital humain sont de parfaits substituts
et accroissent les gains d’un même montant. Par conséquent, le taux de rendement d’une unité du
capital humain supplémentaire est égal pour tous. Cette approche ignore, d’une part, l’aspect
qualitatif de l’éducation et des formations , et, d’autre part, d’autres facteurs à savoir les capacités
intellectuelles des individus et les opportunités de financement liées à l’investissement en capital
humain, qui sont susceptibles de modifier les taux de rendements pour chaque individu. Or, en réalité,
la décision d’investissement est endogène et dépend largement d’autres variables pertinentes. Pour des
individus dotés d’un même niveau deu capital humain mais de différentes capacités intellectuelles, les
salaires et les taux de rendements de diffèrent. Le terme deu capital humain homogène fait appel à la
fonction de demande de capital humain émanant des employeurs ainsi que des implications en termes
d’équilibre du marché du travail. Non seulement le taux de rendement d’une unité du capital n’est pas
unique mais chaque profession exige un taux de rendement différent.
Face à une telle critique, Becker a repris son modèle en intégrant, comme celle de Ben Porath,
l’analyse d’investissement optimal pour la durée totale de la vie. L’hypothèse explicite de son nouveau
modèle est que l’accès au capital humain varieer d’un individu à l’autre à cause des différences
conjointes en termes d’opportunité de financement des études et de capacités intellectuelles à la
naissance. Dans ces directions, la réponse de Becker consiste à incorporer dans le modèle initial les
fonctions d’offre et de demande du capital humain.
En effet, la courbe de demande de capital D est la fonction de bénéfice marginal mesurée par un
taux de rendement marginal : taux de rendement de chaque euro investi supplémentaire. Chaque
individu n’a pas la même capacité intellectuelle à la naissance (ability) : les capacités intellectuelles
peuvent se définir comme les aptitudes individuelles de transmettre ses connaissances et ses
compétences à l’entreprise. Les salaires résultent directement de cette révélation. En d’autres termes,
les rémunérations sont fonction du taux de rendement, qui lui dépend d’autres facteurs non pris en
compte dans le modèle de base. La courbe d’offre S est la courbe des coûts de financement de
l’investissement en capital humain mesuré par le taux de financement marginal : taux d’intérêt payé
pour chaque euro investi supplémentaire. Ces coûts proviennent des dons de la famille, des
subventions du gouvernement et des fonds personnels. Le montant d’investissement optimal.
L’investissement optimal est alors obtenu par l’intersection entre ces deux courbes d’offre et de
demande au capital humain.
30
Figure (1-2) : Courbes d’offre et demande du capital humain.
Source : Mincer (1970).
Becker (1967) explique la pente négative de la courbe de demande par le fait que l’individu est
limité dans sa capacité physique (mémoire) dans l’acquisition des connaissances. Par conséquent,
l’investissement augmente, le coût marginal s’accroît, le bénéfice marginal diminue. L’échelle
différente entre les courbes de demande résulte d’une différence des productivités et des capacités
personnelles. Les courbes d’offre qui différent d’un individu à l’autre s’expliquent par le fait que
chaque étudiant vient des familles plus ou moins riches et n’a pas la même dépense en termes de coûts
de l’éducation. Certains ont des bourses d’études, certains d’autres font appel aux emprunts de
diverses sources. Dans la figure 1-2, les gains sont déterminés par la surface ODPC. Si la courbe
d’offre et de demande pour l’individu 2 correspondent à S2 et D2 respectivement, l’investissement
optimal du capital humain pour ce dernier se trouve alors au point P qui engendre un montant d’un
salaire ODPC. Dans cette optique, les inégalités des capacités et des opportunités de financements des
études sont désormais des déterminants de l’inégalité salariale. A l’aide de cette figure, imaginons
trois cas suivants. (i) Etant donné l’égalité des opportunités de financement, ou l’égalité des coûts de
financement, la courbe d’offre est unique et indiquée par la courbe S2, le taux de rendement marginal
(ou moyen), les gains et l’investissement sont positivement corrélés. En d’autres termes, si les coûts de
financement sont égaux pour tous, l’inégalité salariale ne dépendra que des différences de capacités
intellectuelles à la naissance. Ceux qui ont plus de capacités investissent plus, donc les salaires sont
plus élevés. (ii) Etant donnée l’égalité des capacités intellectuelles, indiquée par une seule courbe de
demande D2, les gains et le montant d’investissement sont positivement corrélés mais le taux de
31
Taux de rendement marginal S1 S2 S3
D P
D3 D2
D1
0 C Capital humain investi
rendement marginal et l’investissement sont négativement liés. Cela est dû au fait que le capital
humain est indissociable à la personne, précédemment cité. L’inégalité des salaires repose dans ce cas
sur les différences en termes de coûts d’investissement. La figure 1-2 montre que, en fixant la courbe
de demande à D2, l’individu qui exige moins de coûts de financement tend à investir plus en capital
humain tandis que celui qui demande plus de financements investit moins. Le salaire de ce dernier est
alors faible malgré l’importance relative de son taux de rendement marginal. (iii) Imaginons le cas de
parfaite corrélation entre les capacités et les coûts : un individu avec une forte productivité demande
moins de coûts pour financer son investissement, les salaires et l’investissement sont positivement
corrélés, le taux de rendement marginal et l’investissement peuvent être positivement ou négativement
corrélés. Par conséquent, la liaison fonctionnelle entre l’investissement en capital humain et les gains
perçus dépend fortement de la corrélation entre les capacités individuelles et les coûts exigés pour cet
investissement.
S’agissant de l’estimation empirique de la fonction de gains, l’introduction de l’hétérogénéité
individuelle dans la théorie du capital humain pose un problème d’auto-sélection [Willis(1986) p.535]:
l’estimation du taux de rendement est biaisée vers le haut, dûdue au fait que les personnes les plus
douées tendent à atteindre le niveau d’éducation élevé. Le modèle standard de fonction de gains
suppose que l’individu choisit l’alternatif qu’il préfère parmi l’ensemble des choix éducatifs possible
en ignorant l’ensemble des opportunités qui sont non observables et varient selon les individus.
Griliches (1977) a évoqué un problème le plus sérieux auquel l’économiste est confronté lors de
l’estimation d’une fonction de gains parest le biais de la sélection causées par l'endogénéité de
l’éducation. La démarche empirique de Griliches (1977) afin d’alléger la sévérité de l’effet endogène
consiste à décomposer les gains en fonction, d’une part, du niveau d’études , et, d’autres parts,
d’autres indicateurs observables et non observables. Cette méthode est critiquée ensuite, notamment
par Willis (1986), parce qu’elle ne permet pas de tenir compte directement dles restrictions imposées
par les règles de sélection au niveau des données concernées. Rosen et Willis (1979) avancent une
analyse approfondie permettant de prendre en compte le problème d’auto-sélection dans l’équation de
gains. A l’heure actuelle, les économistes disposent d’un ensemble ded’s outils économétriques
capables de tenir compte une telle limite méthodologique.
L’étude de l’impact du contexte familial et social sur les salaires à travers le modèle du capital
humain s’implique dans une autre direction de recherche en économie contemporaine. Inspirés de la
théorie de l’inégalité des chances de Roemer (1998)17, Bourguignon et al (2003) mettent en avant une
nouvelle approche de l’inégalité des résultats et l’inégalité des chances. L’horizon temporel de 17 L’axe de recherche intégrera la thématique post-welfariste de l’égalité des chances à l’analyse des problèmes de justice sociale et d’équité [DIAL (2005)].
32
l’analyse des inégalités s’inscrit dans une thématique des mobilités sociales intergénérationnelles18.
Les théories récentes des mobilités des revenus apportent, en vertu des disponibilités de données
longitudinales, de nouvelles implications politiques en termes de réduction de la pauvreté et de
l’inégalité des revenus19. La question de l’inégalité des chances, combinée avec le souci du
développement à long terme, fait actuellement l’objet d’un débat théorique. Le rapport mondial du
développement 2006 affiche la thématique centrale des recherches en développement de 2006, sous le
nom Equité et Développement20, en s’interrogeant sur le rôle de l’égalité des chances dans le
développement sur une longue période.
L’approche des inégalités des résultats et des chances21 est considérée comme une analyse
étendue de la théorie du capital humain. L’accès ex ante au capital humain est éventuellement inégal
d’un individu à l’autre. Etant donnée l’égalité des efforts des individus, la présence de l’inégalité des
chances contraint certains individus à accéder à l’éducation formelle. Par conséquent, l’inégalité des
résultats, ou plus exactement l’inégalité des salaires, persiste d’une génération à l’autre. L’étude
empirique montre que l’inégalité des chances, qui se traduit au travers de la scolarisation des parents,
peut être responsable pour une part substantielle de l’inégalité totale au Brésil…. L’éducation des
parents affecte les revenus directement via l’éducation des individus eux-mêmes plutôt
qu’indirectement. [Menedez (2003) p. 118-119]. Les implications en terme de politique économique
de lutte contre la pauvreté consistent à donner des chances aux enfants d’accéder à l’éducation
formelle, afin qu’ils puissent être moins dépendants de leurs parents [Bourguignon et al (2003) p. 2].
Par conséquent, plus la mobilité sociale intergénérationnelle (: l’état d’indépendance des enfants par
rapport à leurs parents), est importante, mieux l’égalité des chances est prononcée [Martinez et al
(1998) p. 24]. Une analyse empirique comparative de la mobilité sociale a été menée sur plusieurs
pays (Côte d’ivoire, Madagascar, Guinée, Ghana, Ouganda et Mauritanie) par Cogneau et al (2001).
Elle révèle de très fortes disparités de fluidité sociale entre les pays, notamment entre pays
francophones et pays anglophones, au détriment des premiers. Les résultats montrent que ni les
18 Voir, entre autres, Piketty (2000), Behrman et al (2001).19 Dans le cadre des stratégies de réduction de la pauvreté, la nécessité de viser aussi bien une égalisation des opportunités (d’accès aux soins et à l’éducation) d’une génération à l’autre qu’une distribution au sein d’une même génération est mise en perspective [Cogneau (2003)]., une phrase citée dans DIAL (2005) pp. 27.20 Dans ce rapport, l’équité est définie comme le respect de l’égalité des chances combiné à l’absence de privations absolues [Banque Mondiale (2005)].21 L’approche de l’inégalité des chances stipule que parmi les déterminants du revenu d’un individu actif, nous pouvons distinguer les caractéristiques qui sont indépendantes de la volonté de l’individu, nous appellerons circonstances (des ressources familiales), et les caractéristiques qui, au contraire, sont le reflet des efforts entrepris par l’individu pour accroître sa productivité et ses revenus. Les circonstances se définissent comme les attributs socio-démographiquessociodémographiques fixes que sont notamment la race, la région d’origine et le contexte familial de l’individu, et les efforts correspondent essentiellement au capital humain accumulé par l’individu dès qu’il est libre de prendre des décisions pour lui-même [. Voir Bourguignon et al (2003) pp. 02 et Menendez (2003) pp. 72].
33
structures économiques, ni la segmentation ethnique particulière des sociétés étudiées n’apparaissent
comme des explications convaincantes de ces disparités.
L’hypothèse de la rationalité des agents économiques dans la théorie du capital humain
s’implique dans une perspective de l’optimisation des gains futurs non seulement par le biais d’une
accumulation du capital humain mais également par la recherche optimale de l’appariement d’emploi.
Dans cette optique, la mobilité professionnelle ou d’inter-firmes joue un rôle crucial pour les agents
économiques dans la recherche des gains maximisés tout au long de la vie active.
B. Mobilités salariale et professionnelle dans les théories néoclassiques
Les mobilités professionnelle et salariale seront conjointement analysées dans leun cadre des
théories néoclassiques. L’étude de la mobilité professionnelle, qui se réfère généralement à une
séparation employeur-employé ou à un changement d’entreprise émanant d’un individu considéré à
une période donnée, engendre des résultats théoriques et empiriques divers. Dans les théories
néoclassiques, deux directions de recherche doivent être considérées : l’une priviléègie la spécificité
du capital humain comme étant le déterminant de la mobilité d’emploi, l’autre qualifie la combinaison
entre la théorie de la recherche d’emploi et le capital humain spécifique, connue sous le nom de la
théorie de l’appariement. Dans tous les cas, la mobilité professionnelle est susceptible de générer une
croissance salariale des individus qui l’entreprennentd selon ces théories. Il est ainsi que la mobilité
professionnelle constitue théoriquement un lien étroit avec la mobilité salariale.
La démarche constructive des théories néoclassiques de la mobilité trouve son origine dans les
modèles pertinents du capital humain spécifique et de l’appariement salarié-emploi. Dans un premier
temps, le capital humain spécifique sera évoqué comme étant une origine de la mobilité. Dans un
deuxième temps, la théorie de l’appariement sera présentée.
a. Modèle du capital humain spécifique
Plusieurs modèles ont été développés suite à l’étude de Blument et al. (1955) constituant le
modèle de « mover-stayer ». Selon ce dernier, la mobilité professionnelle est un caractère intrinsèque
de l’individu : les individus à forte productivité évitent la mobilité alors que ceux à faible productivité
ont tendance à se soumettre à une mobilité fréquente et involontaire tout au long de leur carrière. Par
conséquent la croissance salariale se manifeste rarement dans ce dernier groupe tandis que la mobilité
d’emploi est profitable dans le groupe d’individus ayant une faible mobilité. La distinction entre faible
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et forte probabilités individuelles de mobilité résulte, selon les néoclassiques, des effets de
l’hétérogénéité d’individus ou dans les relations d’emploi. Les individus ont les différentes
productivités d’une firme à l’autre et leurs relations d’emploi sont plus ou moins particulières. Ces
effets sont non négligeables mais ils sont moins pertinents quant aux faits de la mobilité
professionnelle. Selon les théories néoclassiques, les changements d’emploi résultent uniquement d’un
comportement rationnel des individus. Comme précédemment précisé, la spécificité du capital
humain, développée par Becker (1964), vise à établir une longue relation d’emploi puisque les
individus formés par ce type de formations voient leur productivité adu travail dans la firme courante
supérieure à celle dans d’autres firmes, et donc leurs salaires. Parsons (1972) constate ainsi une
relation inverse entre les changements d’emploi et le niveau du capital humain spécifique. En d’autres
termes, la mobilité professionnelle diminue avec l’expérience ou encore l’ancienneté du travail.
Mortisen (1978) parvient à construire un modèle deu capital humain spécifique et de la mobilité
professionnelle. L’idée centrale du modèle est que la probabilité de changement d’emploi dépend
négativement de la part du capital humain spécifique dans l’appariement d’emploi. Le concept deu
capital humain spécifique et de la mobilité est repris par Farber (1999) pour mettre en avant l’efficacité
des séparations d’emploi.
Il importe d’introduire un modèle deu capital humain spécifique et dela mobilité d’emploi par
une démonstration mathématique simplifiée. Supposons que le salaire actuel d’un individu (W) est la
somme du salaire alternatif – proposé par d’autres entreprise – noté Wa , et du montant du capital
humain spécifique dans la totalité du capital humain investi dans la firme courante (λY ).
W =W a+ λY (1-9)
Où λ est le coefficient de partage du retour sur l’investissement, c'est-à-dire la part (%) qui
revient au salarié. Notons que dans ce modèle l’information est parfaitement connue des agents et la
mobilité d’emploi est non coûteuse. Dans cet environnement, le salarié est parfaitement informé sur
saleur productivité actuelle et sonleur salaire alternatif. La séparation n’a lieu que lorsque le salaire
alternatif est supérieur àau celui actuel. De ce fait, Farber (1999) a introduit une variable aléatoire dans
ce modèle de base. Les salaires offerts (W0), arrivés simultanément à chaque période, sontest
composés du salaire alternatif (Wa), considéré comme une moyenne des salaires offerts, et dule terme
aléatoire (θ ). Le salarié quitte l’entreprise si W a+θ>W a+λY , ou θ> λY . Dans cette condition,
plus la part du capital humain spécifique dans l’entreprise courante est élevée, plus l’employé a plus
de probabilités de rester. Par conséquent, dans ce modèle, l’acquisition du capital humain spécifique
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dans l’entreprise actuelle conditionne le changement d’emploi de l’employé. En d’autres termes, la
séparation volontaire de l’employeur actuel n’aura lieu que si et seulement si la productivité
alternative du travail dépasse celle aperçue dans son emploi actuel [Borjas et Rosen (1980) p. 161].
Dans le cas d’une séparation involontaire, l’individu sera licencié lorsque le choc négatif de la
productivité marginale dépasse la part du capital humain spécifique dans la firme considérée. Notons
que la valeur de la productivité marginale que l’employé produit est équivalente à :
V=W a+Y (1-10)
Le choc aléatoire de la productivité sera introduit dans l’équation (1-10) afin d’étudier son
impact sur les faits de licenciement. Selon le modèle, il résulte des fluctuations de la demande ou de la
productivité du travail, traitées analytiquement dans les littératures macroéconomiques. La valeur du
produit marginal de la firme devient :
V=W a+Y +φ (1-11)
Où φ représente le choc aléatoire de la productivité à moyenne nulle. Le profit de la firme pour
l’individu est alors la différence entre cette valeur et le coût, indiqué par l’équation (1-9).
π=V −W=(1−λ )Y +φ (1-12)
L’entreprise va licencier l’employé si et seulement si le profit est négatif, ou lorsque
−(1−λ )Y >φ (1-13)
En d’autres termes, l’employé sera licencié si et seulement si le choc est suffisamment négatif et
dépasse la part du capital humain spécifique accumulé. Plus le capital humain spécifique est largement
partagé par l’employé, moins la séparation involontaire a lieu [Farber (1999) p.2461].
En définitive, le modèle « mover-stayers » est un cas particulier du modèle du capital humain
spécifique. Les ’individus ne sont’est pas définis par leur probabilité de mobilité tout au long de leur
vie mais cette propension de mobilité diminue avec l’accumulation du capital humain spécifique,
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approximé généralement par les années d’ancienneté du travail22. Les individus immobiles se
caractérisent par une accumulation importante deu capital humain spécifique et de l’ancienneté malgré
une mobilité fréquente durant une période de l’appariement. A l’inverse, les individus mobiles ont
moins de capital humain spécifique accumulé et moins d’ancienneté. Cependant, le modèle théorique
prévoit la convexité de la relation entre l’immobilité professionnelle et l’ancienneté au cours d’une vie
active, c'est-à-dire que plus l’ancienneté augmente, plus la mobilité d’emploi diminue [Jovanovic et
Mincer (1978) p.147].
Le modèle du capital humain spécifique suppose un monde frictionnel où l’information est
parfaitement connue et la mobilité professionnelle est totalement gratuite. Il aboutit à une relation
négative entre la mobilité et l’ancienneté par le biais d’une accumulation du capital humain spécifique.
Or, les hypothèses implicites peuvent fausser les résultats finaux. Le modèle pertinent ne parvient pas
à expliquer une forte mobilité au débout des carrières salariales alors que la liaison mobilité-
ancienneté prévaut à partir de certains stades de la vie. La théorie de l’appariement, mise en œuvre par
Jovanovic (1979), tend à inclure le concept du capital humain spécifique et le modèle de la recherche
d’emploi afin de donner une représentation complète des théories néoclassiques de la mobilité.
b. Théorie de l’appariement (job matching theory)
Le modèle de l’appariement considère une relation d’emploi comme étant une clé de l’efficacité
de l’appariement salarié-emploi. La qualité de ce dernier, qui n’est pas connue ex ante, est un pur
produit de l’expérience (experience good) par lequel l’appariement se révèle au fur et à mesure que
l’ancienneté augmente. Il s’agit alors d’un passage d’un état des appariements non optimaux à l’état
d’équilibre où les rémunérations individuelles sont équivalentes à chaque période à la valeur attendue
de leur productivité, conditionnelle de l’ensemble de l’information disponible à chaque période.
Contrairement au modèle précédent, le modèle impose ldes hypothèses suivantes : (1) il n’existe
aucun choc de la productivité et de la demande, (2) l’information est imparfaite et se révèle
simultanément, (3) l’employeur est capable d’évaluer une rémunération basée sur une relation étroite
avec l’employé, il est en mesure de payer l’employé en fonction de la qualité de l’appariement, et (4)
la productivité individuelle diffère d’une firme à l’autre. L’hypothèse de l’information imparfaite est
explicite puisque le processus de l’appariement est lié à la révélation de cette dernière. En effet,
comme au départ, ni les salariés ni les employeurs ne connaissent l’information sur la véritable
22 La plupart des études empiriques considèrent les durées d’occupation, l’ancienneté, comme une approximation de la variable du capital humain spécifique dont la mesure directe n’existe pas. Cette méthode est cependant contestable et critiquée en raison de sa réduction [Farber (1999) p. 2479].
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productivité du travail dans l’emploi, des appariements se révèlent alors non optimaux. Or, la
disponibilité informationnelle permettra au fur et à mesure à chacune des deux parties d’accumuler les
connaissances sur la valeur progressivement créée.
La qualité de l’appariement n’est pas connue ex ante pour un individu, elle est connue au cours
du temps. La fréquence de mobilité est ainsi liée à l’incomparabilité salarié-emploi, divulguée par
l’ensemble des nouvelles informations [Jovanovic (1979) p. 973]. En effet, le modèle prévoit des
conditions de rupture de la relation d’emploi par le processus de révélation des informations .
L’individu quittent l’entreprise si et seulement si la qualité de l’appariement espérée est inférieure à
celle de réservation, compte tenu de l’ensemble de l’information disponible à cette date. Chaque
travailleur a une productivité différente suivant le poste auquel il est affecté. L’arrivée de nouvelles
informations permet non seulement une actualisation des croyances de l’employeur sur la productivité
de l’employé, mais également une réévaluation de la qualité de l’appariement. Certes, plus la qualité
de l’appariement réservée est faible, moinsplus le taux de séparation est moins élevé. Cependant, la
qualité de l’appariement est incertaine au débout des carrières lorsque les coûts de mobilité sont
relativement importants. Par conséquent, il est très probable que les nouveaux entrants restent dans
l’entreprise actuelle malgré une faible qualité révélée car la probabilité d’avoir la forte qualité
ultérieure est relativement importante. Il convient de signaler une importance relative de la révélation
des informations sur la productivité, affectant ensuite, par le biais d’une qualité de l’appariement, une
décision de mobilité professionnelle. Contrairement au modèle précédent, la spécificité du capital
humain joue un rôle secondaire dans la propension à changer d’emploi. La corrélation positive entre
salaire et ancienneté se traduit uniquement par une meilleure productivité révélée. En effet, si les
nouvelles informations apportent la meilleure qualité de l’appariement d’une période à l’autre,
l’employeur effectuera simultanément une réévaluation du salaire de l’employé. Ce dernier suit alors
un processus stochastique dont la variance diminue avec le temps. Malgré les déséquilibres à court
terme, l’équilibre global de l’appariement existe à long terme lorsque toute information est
instantanément disponible [Jovanovic (1979) p. 973].
Contrairement au modèle du capital humain spécifique dans lequel l’individu est licencié si sa
productivité effective est inférieure à celle espérée, la théorie de l’appariement suppose que l’employé,
considéré comme un agent rationnel, ne choisira jamais une situation sans emploi. L’analyse du
chômage prospectif est évoquée dans le modèle de la recherche d’emploi, mis en avant par Burdett
(1978). Selon cette approche, l’efficacité de recherche d’emploi a un impact positif sur les gains futurs
aussi bien pour les chômeurs que les occupés. A la différence du modèle du capital humain spécifique,
la productivité d’un individu est supposée constante au cours du temps et son niveau varie d’une firme
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à l’autre, dépendant de la manière dont les firmes l’évaluent. L’effet de la spécificité du capital humain
ne joue aucun rôle dans la croissance des gains. Le modèle de base suppose que (1) l’employeur et
l’employé sont à la recherche des opportunités d’emploi, (2) l’offre de salaire d’un emploi spécifique
est aléatoire, fluctuant en fonction des capacités spécifiques individuelles liées à l’emploi et des
propositions de salaire émanant des firmes et (3) la décision d’acceptation du salaire offert résulte d’un
processus de l’optimisation des gains futurs [Mortensen (1988) p.447].
L’individu procssède en effet à un calcul coût-avantages de sa recherche. Le temps et les efforts
seront consacrés à la recherche des opportunités d’emploi. Il convient de distinguer, parmi les
individus qui recherchent l’emploi, entre les actifs déjà occupés et les actifs sans emploi. Dans le cas
où l’individu recherche un emploi en ayant déjà un poste occupé, la meilleure stratégie consiste à fixer
un niveau de salaire de réservation23 qui servira de critère d’acceptation de l’offre de salaire, liée à un
emploi alternatif. L’employé acceptera l’offre de salaire et quitte l’emploi actuel si et seulement si le
salaire proposé est au moins équivalent à son salaire de réservation, tout en prenant en compte
l’ensemble des coûts liés au changement d’emploi [Burdett (1978) p.121]. Notons que le niveau de
salaire réservé est fonction de l’expérience dans la recherche tandis que l’offre de salaire dépend de
l’intensité de recherche. Dans ce modèle, le chômage est considéré volontaire dans la mesure où les
coûts de recherche d’emploi en étant au chômage sont probablement moins élevés qu’en occupant un
poste. L’information étant imparfaite, il est peut être plus avantageux pour le chômeur considéré de
prolonger sa période sans emploi afin d’acquérir le maximum d’informations sur les postes
disponibles. Pour ce faire, il arbitre entre les coûts tels que les pertes de revenus pendant qu’il est au
chômage et coûts de l’information etc. et le revenu futur d’un emploi mieux rémunéré. Plusieurs
raisons pour que la recherche d’emploi en étant au chômage soitest optimale. Pour Burdett(1978), les
coûts de la recherche sont moins chers quand l’individu est sans emploi. En outre, ce dernier aura plus
de chance de percevoir une l’offre de salaire relativement importante dès lors qu’il a tout son temps
àpour consacrer à sa recherche [Jovanovic(1984) p.110]. Cependant, la longueur du temps passé à la
recherche peut être l’origine d’une baisse de salaire espéré puisque la dépréciation du capital humain
accélère d’autant plus que l’individu est considéré comme non productif. Dans ce cas, une longue
durée de chômage engendrera une perte de revenus.
La plupart des études empiriques de la mobilité d’emploi, appliquées notamment aux pays
développés, tendent à confirmer la pertinence des modèles théoriques de l’appariement et de la
recherche d’emploi. Le rejet de l’approche du capital humain réside dans le fait que la croissance
23 Ce salaire de réserve, ou d’acceptation, égalise coûts et gains marginaux de la recherche d'emploi, ce qui dépend de la distribution des salaires dans l'économie, du degré de stabilité des emplois proposés et de l'impatience de chaque demandeur d'emploi
39
salariale dans une entreprise donnée est empiriquement peu générée par l’accumulation du capital
humain spécifique [Mortensen(1984) p.447].
c. Mobilité professionnelle et salariale : évidences empiriques
La relation entre mobilité salariale et professionnelle est un phénomène complexe, compte tenu
de diverses formes de mobilité d’emploi. La mobilité volontaire ou stratégique améliore en général la
position de l’individu dans la distribution des salaires tandis que la mobilité involontaire ou contrainte
se traduit par une dégradation des revenus de l’individu. Par conséquent, il convient de distinguer les
différents mouvements d’emploi affectant la croissance salariale de l’individu. Dans la pratique, on
divise les formes de mobilité en trois sous groupes : (1) mobilité volontaire et involontaire, (2)
mobilité passant par une courte ou longue durée de chômage, et (3) mobilité parmi les jeunes et les
plus expérimentés. Malgré la pertinence des modèles néoclassiques, les faits observés de l’impact de la
mobilité d’emploi sur les salaires sont peu concluants.
L’approche « stayers-movers » stipule que chaque individu est caractérisé par sa propre
propension à changer d’emploi. Ceux qui ont subi une mobilité fréquente ont le revenu relativement
faible par rapport à ceux qui sont moins mobiles. Ce phénomène, conduit par les effets de
l’hétérogénéité individuelle, tend à persister dans le temps. Or, l’observation évoquée dans un cadre
des théories néoclassiques suggère une baisse tendancielle des mobilités professionnelles, notamment
en fonction du niveau d’ancienneté. S’agissant de la relation entre mobilité d’emploi et âge, le
changement d’emploi au débout de carrière semble plus bénéfique qu’à la fin des carrières24. Bien que,
les changements d’emploi soient souvent associés à la perte d’accumulation du capital humain
spécifique, les jeunes individus accumulent des compétences à un taux plus rapide que celles des
immobiles. Le différentiel des salaires disparaît [Bougheas et Georgellis (2004)]. De plus, les
mobilités fréquentes de certains adultes expérimentés conduisent à une chute des revenus,
conséquence d’une hausse des coûts d’opportunités. Les effets positifs de la mobilité d’emploi sur la
croissance des salaires s’expliquent dans les théories de l’appariement et de la recherche de manière
suivante : d’une part, la forte intensité de recherche d’emploi permet à certains individus d’accéder
directement à des emplois plus lucratifs, permettant d’avoir les postes bien rémunérés [Munasinghe et
Sigman (2003) p. 217]. Malgré des mauvaises qualités éventuelles de l’appariement souvent révélées
enau débout de carrière, les changements d’emploi permettent aux jeunes employés non seulement de
mettre à jour leur ses informations sur leur productivité mais également d’augmenter leurses gains
24 Voir, entre autres, les analyses des mobilités des jeunes dans Keith et McWilliams (1997, 1999) et Topel et Ward (1992)
40
futurs grâce à leurses expériences accumulées en recherche et en qualité d’appariement. Cependant,
quant au modèle du capital humain spécifique, la croissance salariale due à la mobilité d’emploi ne se
manifeste pas. En fait, puisqu’au départ, les jeunes travailleurs ont un niveau initial deu capital
spécifique assez faible, ils ont tendance à changer d’emploi plus fréquemment que ceux qui ont une
longue durée d’occupation [Eriksson (1991) p. 237]. La mobilité d’emploi est un synonyme de pertes
en termes d’accumulation du capital humain.
S’agissant de la question de mobilité volontaire et involontaire, l’effet de la mobilité d’emploi
sur la mobilité salariale est plus ou moins négatif. Mincer (1986) a évoqué, dans ses analyses
empiriques appliquées aux États-Unis, que la hausse des salaires conduite par les mobilités d’emploi
est généralement observée, exception faite des travailleurs plus âgés qui sont souvent liés à la situation
de licenciement [Mincer (1986) p. 184]. Dans ce cas, la mobilité involontaire ou un licenciement
apparaît avantageux pour certains groupes d’individus. Par conséquent, la mobilité professionnelle
peut apparaître ainsi comme le chemin le plus rapide par lequel les individus améliorent leur carrière
salariale ou augmentent leur niveau de salaire relatif [Jovanovic et Mincer (1981)]. Cependant, les
faits prouvés par d’autres études empiriques conduisent à une conclusion opposée. En fait, les
licenciés, par rapport à ceux qui se démissionnent, semblent avoir des rémunérations moins
avantageuses à la suite d’une séparation involontaire [Perticara (2002) p.19]. Dans cette optique, il est
possible que, dans les modèles néoclassiques, les salaires suite à une mobilité d’emploi augmentent
seulement en termes absolus, maisnon pas en termes relatifs. L’individu considéré aperçoit une hausse
du niveau de salaires mais sa position dans la distribution ne parvient pas à changer.
La durée de chômage a un impact non négligeable sur la croissance éventuelle de salaires. En
suivant l’approche de l’information imparfaite, l’existence d’unee durée de chômage pourrait avoir un
effet négatif sur le salaire. Selon Blanchard et Diamond (1994) et Lockwood (1991), le chômage
entraînera un effet substantiel sur les salaires futurs des individus si la durée de ce dernier est longue et
s’il est assez fréquent. Cela vise à sous-estimer l’impact négatif de la mobilité d’emploi sur les
salaires. Ces analyses remettent en cause des études de Jovanovic et Mincer (1981) selon lesquelles la
mobilité subie est globalement profitables sans prendre en compte la durée du chômage qui pourrait
nuancer l’effet positif de la mobilité d’emploi sur la mobilité salariale.
En définitive, l’allocation des ressources est efficace dès lors que le marché du travail est
instantanément mobile au sens des néoclassiques, les facteurs du travail peuvent être transférés d’un
travail à faible productivité à un travail à forte productivité. La croissance salariale est généralement
engagée et l’écart salarial est progressivement atténué [Douglas Holtz-Eakin et Ruody (1997) p. 776].
41
S’il est vrai qu’à l’état d’équilibre, la productivité marginale est égale au taux de salaire pour
chaque période, l’inégalité salariale résultera directement de différences en termes d’investissements
en capital humain, que ce soit en éducation ou en formation. La logique de la rationalité individuelle
conduit alors à l’optimisation de revenus individuels. L’implication des politiques économiques
consiste à mettre en œuvre des moyens nécessaires aux incitations à l’investissement en ressources
humaines. Or, les réalités économiques nous ont révélé certaines limites théoriques. Dès la fin des
années 60, l’économie américaine a été marquée par une montée de la pauvreté, de l’inégalité des
revenus dus à la défaillance des programmes d’éducation et de formation, aux discriminations et à
d’autres facteurs associés [Cain (1976)]. Encore d’actualité, les pays en voie de développement font
face d’une façon sans précédent aux problèmes des inégalités et de la pauvreté, liées notamment au
marché du travail. Seuls les programmes mise en pratique par des théories néoclassiques ne suffissent
pas à mettre fin à ces fléaux. La remise en cause du modèle standard du capital humain provient tout
d’abord des hypothèses fondamentales du modèle standard. En fait, la formation est avant tout un
critère de classement et le système éducatif permet essentiellement de trier la population qui est
ordonnée en fonction des compétences révélées par les niveaux d’éducation [Spence (1973)]. Le rôle
du système productif est avant tout de filtrer la population active afin de signaler aux employeurs des
potentialités productives des individus [Arrow (1973)]. En outre, des institutions et la structure sociale
jouent un rôle crucial dans la détermination des salaires et l’affectation de l’emploi. Or, cet aspect
n’apparaît que peu dans ce modèle standard. Il semble tout à fait raisonnable d’intégrer les théories
institutionnalistes, en particulier de la segmentation, afin d’éclairer la réalité économique liée aux
phénomènes conjoints de l’inégalité salariale et de la pauvreté.
2. Théorie récente de la segmentation du marché du travail
Les critiques des théories néoclassiques de l’inégalité de revenus et de la pauvreté trouvent
leurses origines dans un renouvellement des théories institutionnalistes, particulièrement la théorie de
la segmentation. La controverse théorique entre les théories orthodoxes et de la segmentation conduit à
une opposition idéologique non seulement au sujet des deux phénomènes cités (répartition de revenus
et pauvreté), mais également du chômage, de la discrimination et des pouvoirs de négociation
collective. La théorie de la segmentation, ancienne mais tout à fait d’actualité, se distingue des
modèles théoriques orthodoxes par son intégration des aspects institutionnels et socio-économiques. Si
les théories néoclassiques ne reflètent pas les réalités économiques, c’est probablement parce qu’elles
ignorent ces facteurs prépondérants. Dans le cadre des approches institutionnelles, la structure et les
42
opérations du marché du travail sont beaucoup plus complexes [Iliassova(2000) p.5]. L’argument de la
théorie de la segmentation est de proposer une analyse dynamique et structurelle du marché du travail
dans lequel ldes différents segments sont plus ou moins concurrentiels. Contrairement aux approches
néoclassiques, l’hypothèse implicite du marché segmenté est l’idée selon laquelle le différentiel des
salaires et la pauvreté résident non plus dans des caractéristiques individuelles en terme de
compétences et d’éducation, mais dans d’autres facteurs non incorporés à la personne, c'est-à-dire les
conditions des marchés dans lesquelles les individus se trouvent telles que les différentes mécanismes
de détermination salariale, les pouvoirs de négociation et d’autres facteurs socio-économiques.
Ajoutons à cela, l’existence des barrières à l’entrée àde certains types de marchés empêche non
seulement un processus automatique d’égalisation de salaires, mais également une mobilité d’emploi
entre marchés, ce qui engendre une mobilité salariale défavorable pour certains groupes d’individus.
Les intérêts de ces études théoriques portent alors dans un premier temps sur l’apparition de la théorie
de la segmentation, en particulier de la dualité du marché du travail, qui aboutit à une conclusion
opposée aux théories standards quant à l’explication de l’inégalité des revenus et de la pauvreté.
Ensuite, le processus dynamique des marchés sera analysés à l’aide de l’analyse des mobilités
d’emploi et salariales qui sont spécifiques à chaque segment deu marché.
A. Marchés du travail segmentés et inégalité des salaires
L’inégalité des salaires est une des questions préoccupantes de la théorie de la segmentation.
Les écarts salariaux exprimés dans cette dernière doivent être appréhendése à la fois par une méthode
d’étude sociale, historique et économique approfondies [Harrison et Sum (1979) p. 699]. Or, les
structures du marché du travail varient dans le temps et dans l’espace, notamment d’un pays à l’autre.
En prenant par exemple ?????quoi ?, puisque les influences institutionnelles se diffèrent d’une
économie à l’autre, il est peu probable que les origines des marchés segmentés se résument à un
ensemble de déterminants assimilés. Par conséquent, il importe de préciser que la description des
sources ou des origines de la segmentation sont spécifiques aux économies concernées, en fonction de
chaque structure du marché étudiée. Il est tout à fait normal de concevoir la diversité des
interprétations économiques des marchés segmentés à partir d’une même base de théories
institutionnalistes.
a. Fondement de la théorie du marché du travail segmenté
L’établissement des théories institutionnelles appartient à une longue période de débat théorique
depuis Adam Smith. En oppositionant à l’hypothèse du marché parfaitement concurrentiel d’Adam
43
Smith, Stuart Mill (1873) et Cairnes (1873) suggèrent un substitut du marché en prenant en compte
l’importance des facteurs non marchands. En effet, les règles institutionnelles vont se substituer au
mécanisme du marché parfaitement concurrentiel, mis en avant par Adam Smith. Mill (1873) rejette
l’hypothèse implicite de la concurrence parfaite en observant qu’en réalité, il existe deux groupes
d’individus à des mêmes caractéristiques personnelles, l’un détient des salaires relativement élevés et
l’autre est forcé d’accepter un emploi à bas salaire. Les mécanismes du fonctionnement du marché se
divisent en deux sous segments distincts. En fait, il existe, d’une part, des marchés concurrentiels
(« competing groups ») de type néoclassique dans lesquels les agents sont en parfaite concurrence , et ,
d’autres part,s des marchés non concurrentiels (« non-competing groups ») où les agents ne sont pas
en parfaite concurrence25. Le marché ne représente plus un endroit d’échange universel puisque selon
Cairnes (1873), précurseur de ces concepts, il existe dans sa structure des différents niveaux
superposés, classés par les différents degrés de compétences. Ce phénomène est conduit par une
classification sociale.
Ce que nous trouvons, en effet, n'est pas une population entière qui soint aléatoirement en
concurrence pour toutes les professions, mais des séries de couches industrielles, superposées les unes
sur les autres, dans lesquelles les chercheurs d’emploi possèdent un vrai pouvoir de choix, alors que
ceux qui occupent les multiples strates sont, par la vertu de concurrence parfaite, pratiquement isolés
entre eux. … L'ouvrier moyen, de quelque rang qu’il soit pris, trouvent ses pouvoirs de choix limités
pour certains emplois, de sorte que, plus les taux de rémunération des emplois dans lesquels il se
trouve augmentent, plus il est exclu de les partager. Nous sommes ainsi amenés à identifier l'existence
des groupes industriels non concurrentiels comme dispositif de notre économie sociale [Cairnes(1987)
p.66-68].
Les conditions de la concurrence parfaite sont peu réalistes et le différentiel des rémunérations
résulte en fait d’une stratification sociale des individus. Veblen (1900) assimile l’hétérogénéité des
agents économiques à la classification sociale de manière suivante.
Puisque l’on conçoit que les motifs qui guident des individus dans leur choix des emplois et du
domicile diffèrent d’un individu à l’autre et d’une classe à l’autre, non seulement en degré, mais en
nature, et puisque la variété des antécédents, d'hérédité et d'habitude, les influence différemment dans
leur choix de manière de vie, le seul stimulus pécuniaire quantitatif ne peut pas être considéré afin de
décider les résultats sans recours. Il y a des variations déterminables de l'alacrité avec laquelle les
différentes classes ou communautés répondent au stimulus pécuniaire ; et pour autant que cette
25 Ces notions sont empruntées des analyses de Cairnes en 1873, voir Dimou (2005) pour les arguments détaillés.
44
condition règne, les classes ou les communautés en question sont non-concurrencent [Veblen (1900)
p.244].
Ce fondement théorique, aussiplus descriptifve soit-il, est très vite reprise par les théoriciens de
pensée institutionnalistes en opposant les approches néoclassiques à la fois sur le plan théorique et
méthodologique. Si l’état d’équilibre stationnaire dans des théories néoclassiques fait apparaître une
condition d’égalité entre la productivité marginale et le salaire, tout autant que le marché soit en
concurrence parfaite, l’école de pensée institutionnaliste26, qui a régnée entre 1890 et 1930, remet en
cause cette hypothèse en introduisant de divers mécanismes institutionnels qui remplacent la vertu du
mécanisme du marché. L’existence des marchés non concurrentiels impliquent non seulement un
renvoi du fondement du capital humain selon lequel la concurrence parfaite conduit à égaliser les taux
de rendements de toutes les formes du capital humain investi, mais également une entrave de certains
groupes sociaux dans les emplois indésirables et la pauvreté. Par conséquent, l’orientation des
politiques économiques proposée par les institutionnalistes fait appel aux réformes suivantes : (1) la
législation de la protection sociale vise à bénéficier aux salariés occupés dans le segment secondaire ;
(2) les unions syndicales tendent à favoriser les salariés du segment primaire ; et (3) la régulation et le
contrôle industriel par le gouvernement sont supposés bénéfiques pour toute la société [Cain (1973)
p.1226].
Les années 40 et 50 marquent le débout du processus vers la théorie de la segmentation en
partant d’une base d’inspiration institutionnaliste. Sous l’influence des professeurs Dunlop (1957) et
Kerr (1950 et 1954) à l’Université de Harvard, Doeringer et Piore (1971) ont mis en avant les concepts
de marché du travail interne et de la segmentation en s’appuyant initialement sur les relations
professionnelles et industrielles. Dunlop(1957) effectue une analyse institutionnelle du processus de
décision interne dans les organisations. Il introduit les concept de classification en groupes
d’entreprises et de contours salariaux (« wage contours ») comme étant des mécanismes permettant de
conceptualiser le marché du travail interne tandis que Kerr (1954) s’intéresse aux règles
institutionnelles liées au marché dont les dimensions sont fixées non plus par la volonté des
travailleurs ou des employeurs mais par les règles formelles et informelles [Leontaridi (1998) p. 67].
Ces deux approches ouvrent une voie à suivre dans l’émergence du concept du marché du travail
interne. Ainsi, le célèbre article de de Doeringer et Piore (1971), intitulé Internal labour market and
manpower analysis, continuer à être une référence très forte en termes de théorie de la segmentation.
Les contributions ultérieures et successives de Piore ont pour but de spécifier, voir modifier, son
approche originale avant de terminer un schéma considéré, de facto, comme final. Selon Doeringer et 26 Pour le développement des théories institutionnalistes, voir, entre autres, Commons (1934), Doeringer (1967) et Ray Marchall (1974).
45
Piore, le marché du travail interne se définit comme une unité administrative,…, dans laquelle
l'évaluation et l'allocation du travail sontest gérées par un ensemble de règles et de procédures
administratives [Doeringer and Piore (1971) p.2]. Au côté des courants de pensée institutionnalistes,
des travaux d’inspiration marxiste s’attaquent rapidement àsur la problématique segmentationniste.
L’argument fondamental de l’économie marxiste dans les lectures segmentationnistes tourne autour de
la théorie de la valeur, de l’exploitation et de la polarisation de l’économie entre employeurs et salariés
[Cain (1979) p.1226]. Cette approche marxiste de la segmentation, conçue par Reich, Gordon et
Edward (1973), montre que le processus capitaliste des forces politiques et économiques conduit tôt
ou tard à une division des marchés du travail, résultant d’un passage de l’économie capitaliste
concurrentielle au système capitaliste monopolistique. Ainsi, le marché du travail segmenté se définit
comme un processus historique dans lequel les forces politiques et économiques visent à séparer le
marché en sous segments, caractérisés par leurs propres conditions de marché et leurs règles
comportementales [Reich et al (1973) p.359]. La théorie radicale renforce l’idée des conflits existants
entre les différentes classes sociales, notamment entre employeurs et salariés. Ces approches
institutionnaliste et radicale sont en interconnexion, voire complémentaires, quant à la détermination
des modes de fonctionnement du marché puisque la première apporte des dispositifs institutionnels et
la seconde complète la première par la prise en compte de la classification sociale dans la
transformation du marché.
Dans le modèle de base de lectures segmentationnistes, il est aisé de distinguer les marchés en
deux sous segments. L’approche de dualité, qui est ancienne mais nécessaire à l’appréhension des
phénomènes étudiés, se compose de marchés interne et externe. Pour Doeringer et Piore (1971), le
marché du travail interne, généré par un ensemble des règles institutionnelles, doit être distingué du
marché du travail externe, qui correspond au marché du travail parfaitement concurrentiel. Ces deux
marchés se sont liés par les mouvements inter-segments en passant par des ports d'entrée et de sortie
du marché interne (« Ports of entry and exit ») qui justifient les barrières à l’entrée du marché interne.
En effet, ces dernières empêchent certains salariés du secteur secondaire d’entrer dans le marché
primaire où les conditions de travail sont meilleures et où le taux de salaire est relativement élevé. Par
conséquent l’inégalité salariale s’explique désormais directement par la nature duale du marché du
travail engendrée par les règles et les procédures institutionnelles [Zajdela et Cahuc (1991) p.470].
Sobel+handbook.
La remise en cause du modèle standard du capital humain se manifeste par le fait que, pour une
même unité d’investissement en capital humain, les taux de rendement varient désormais d’un
individu à l’autre et aussi d’un segment à l’autre [Leontaridi (1998) p. 66]. Dés lors, le différentiel des
46
rémunérations ne peut pas s’expliquer totalement par les différents niveaux d’investissements
individuels en capital humain mais également par d’autres perspectives institutionnelles et socio-
économiques [Gottfries et McCormick (1995) p.2].
a. Sources de la segmentation du marché du travail
Il existe dans la littérature une variété des sources de la segmentation, citées par les différents
courants de pensée en fonction de la délinéation des segments. Dans ces conditions, on note, parmi
d’autre, les recherches de Doeringer et Piore (1971) centrées sur les relations industrielles, les théories
de la segmentation dans le cadre de l’économie marxiste et les courants néo-institutionnalistes de la
pensée segmentationniste.
Selon Doeringer et Piore (1971), trois causes d’existence des marchés internes sont avancées :
la formation sur le tas, l’existence de coutumes propres à l’entreprise et enfin la spécialité des
qualifications mise en œuvre. Cet ensemble conditionne la naissance des marchés internes par le biais
d’une décision prise par l’entreprise. Dans un environnement imparfait de l’information et la présence
des coûts, il est nécessaire de stabiliser les salariés et de minimiser les coûts de production. Les
coutumes spécifiques à l’entreprise dans lesquelles l’équité et la justice des organisations résultent
d’un ensemble des règles non écrites, sont basées essentiellement sur les pratiques antérieures des
entreprises. La pratique coutumière et l’ensemble des règles institutionnelles des entreprises se
traduisent par dles politiques d’embauches plus ou moins restrictives et la promotion interne des
carrières salariales visant à établir une stabilité d’emploi pour les salariés. En effet, la loi coutumière et
la formation sur le tas sont très peu reprises par Piore. Il porte son attention sur le capital humain
spécifique dans la relation industrielle. En effet, lorsque les compétences individuelles deviennent
spécifiques et très demandées, les employeurs sont incités à investir dans les recrutements sélectifs en
vue de minimiser les coûts de rotation. L’analyse des relations industrielles aux Etats-Unis proposée
par Piore en 1975 suggère un lien étroit entre la spécificité du capital humain et la stabilité de la
demande des produits dans certains secteurs industriels. Au milieu des années 1970, Piore porte
l’accent sur le déterminisme technologique en amont de la spécificité des qualifications en se plaçant
sur le côté d’offre du travail en termes des classes sociales. Réalisant que la demande des biens joue
un rôle crucial dans la gestion industrielle, Piore reprend alors deux axes de justification, en termes
d’offre et de demande de travail. Selon l’auteur, dès lors que les entreprises font face à la demande
stable des marchandises, elles ont tendance à exiger des facteurs de production quasi-fixes, notamment
les compétences spécifiques des salariés. Par conséquent, la segmentation du marché du travail peut
être considérée comme une réponse des industries de production au flux et à une incertitude face à la
47
demande des bien durables [Leontaridi (1998) p.70]. C’est la variabilité et l’incertitude qui vont être
déterminantes dans l’existence ou non d’un marché interne. En effet, Piore (1975) suggère deux
modalités, essentielles mais non exclusives, d’émergence de la segmentation. D’une part, la variabilité
des marchés engendre une crainte pour les salariés à l’égard de leur emploi stable. Certains salariés,
souvent dans les grandes firmes, sont amenés alors à réclamer une stabilisation d’emploi. Le processus
d’émergence du marché interne s’enchaine, notamment dans la plupart des pays industrialisés durant
les années 1980. D’autre part, la division du travail est considérée comme une réponse à la stabilité du
marché des biens. En fait, les grandes entreprises, à un coût de production décroissant, doivent
répondre à la demande stable des biens et services, elles peuvent alors se permettre de stabiliser leurs
employés. A l’opposée, les plus petites entreprises s’occupent de la part flexible de la demande, la
gestion de l’emploi est alors flexible. Cela crée progressivement des marchés externes. Il existe un lien
inséparable entre les grandes et petites industries. En effet, lorsque l’économie est stimulée par une
croissance exogène de la demande des biens durables, le marché du travail interne bénéficie
directement de cette expansion. Par contre, le marché du travail externe pourrait en profiter par le biais
de sous-traitances en réponse aux besoins du secteur interne. Cependant, ces activités sont toujours
menacées de cessation en cas de récession économique [Averrit (1968)]. On observe notamment ces
caractéristiques de liaisons productives dans les pays en développement où les activités de sous-
traitances englobent une partie importante dans l’économie. L’essentiel des recherches de Piore est
l’émergence de la segmentation des marchés face à l’incertitude et à la variabilité de la demande sans
approfondir un schéma de l’analyse dynamique. Les différents arguments développés par Piore se
reposent sur le principe d’efficience dans lequel les stratégies d’optimisation sont adoptées par la
décision du côté de l’offre et de la demande de travail [Petit(2001) p.5].
La vision radicale de la segmentation met l’accent sur les systèmes changeants de
l’organisation au sein de la société capitaliste. La clef de la segmentation est recherchée dans les
stratégies des employeurs d’imposer les divers contrôles sur les employés. Les règles
comportementales et le rapport de force entre les agents économiques sont adoptés dans cette
approche afin de justifier la dynamique de la structure du marché. En effet, une grande partie des
’employeurs a recours au contrôle bureaucratique, érigeant des procédures impersonnelles, qui
fournissent des perspectives de sécurité de travail afin de gagner la fidélité et la motivation des
employés. L’apparition des marchés internes résulte du processus du contrôle sophistiqué permettant
aux entreprises capitalistes de mesurer les rendements des individus afin de pouvoir mieux
récompenser le travail effectué. On passe alors d’un développement des compétences au système
salarié-motivation. Par conséquent, le marché du travail segmenté est un long processus historique des
politiques économiques et sociales susceptible d’encourager la segmentation des marchés [Reich,
Gordon et Edwards (1973) p. 359]. Il s’agit en effet d’analyser les relations sociales de la production :
48
la segmentation s’émerge non pas par la force du marché elle-même, mais elle résulte des rapports de
forces sous-jacentes dans le travail [Edwards (1979) p.165]. La segmentation est fonctionnelle
puisqu’elle favorise principalement l’intérêt des capitalistes [Reich, Gordon et Edwards (1973) pp.
1973]. Son apparition s’attache alors au mode de fonctionnement capitaliste de sorte que les secteurs
« noyaux », traditionnellement appelés les marchés primaires, se caractérisent par l’intensité du capital
et la grande rentabilité tandis que les segments « périphériques », ou les secteurs secondaires,
s’identifient par une petite taille de firmes et la faiblesse d’intensité du capital. Dans le même schéma
de raisonnement marxiste, Rubery et Wilkinson (1981) s’apprêtent à analyser la dynamique de la
structure du marché du travail. Ils regroupent dans un même cadre analytique des causes multiples et
corrélées de l’existence de segments. L’idée centrale est que l’internalisation du marché est un outil
parmi d’autres mis à disposition deà l’employeur pour structurer, gérer l’emploi. En fait, l’émergence
de la segmentation résulte des mouvements contraires des forces entre les employeurs et les employés
qui constituent deux groupes de stratégies opposées. Les employeurs cherchent à homogénéiser la
force de travail employée et simultanément à diviser l’ensemble de la population. Selon Sengenberger
(1981), avec une forte tension sur le marché du travail, les employeurs auront intérêt à cloisonner des
marchés internes afin d’éviter la pression à la hausse sur les salaires et les conditions de travail tandis
que les salariés tentent de décloisonner toutes les entraves existantes afin de profiter de la pression de
la concurrence. Dans le cas où le chômage est important, les employeurs ont une volonté de
décloisonner la gestion de l’emploi et d’ouvrir les marchées internes afin de profiter de la situation
défavorable des salariés. On voit ici une analyse en termes dynamiques de la structure du marché dans
une logique de continuité : seuls le niveau et la taille de la segmentation changent mais le principe de
base reste inchangé. Durant les années 1990, les recherches des causes des marchées internes
s’attachent à la fois au processus de production et à la politique d’emploi des entreprises. Pour
Wilkinson et White (1994) et Rubery (1994), d’une part le processus de production est toujours
compris comme une combinaison d’éléments technologiques et sociaux et, d’autre part, la politique
d’emploi des entreprises est le fruit d’interactions entre les marchés du travail, des produits et les
institutions légales [Petit(2001) p.12]. L’analyse des rapports sociaux dans la théorie de la
segmentation est développée par Piore.
L’intérêt de la segmentation de marché du travail porte sur les groupes sociaux et les
institutions. Les processus qui gouverne l'allocation de travail et les prix dans les marchés internes
sont sociaux, opposé aux processus concurrentiels ou aux calculs instrumentaux. L'engagement de
main d'œuvre des groupes qui créent le potentiel pour une viabilité du secteur secondaire est social.
La structure qui distingue les salariés hautement qualifiés d'autres catégories de la main
d’œuvremain-d’œuvre et qui fournit leur éducation et formation distinctives sont également sociale.
49
Pour comprendre ces phénomènes, on a besoin donc d'un paradigme qui identifie et entoure social
phénomène, par opposition à l'individu [Piore (1983) p.252].
Le processus social de la création des marchés segmentés est au cœur de l’analyse. Certains
suggèrent un passage d’un processus qualification-accumulation au mode d’une qualification-
socialisation [Nohara (1983) p. 1211]. En d’autres termes, les compétences et les connaissances se
valorisent non plus par le mécanisme d’accumulation du capital humain, mais par les pratiques
sociales, qui déterminent les conditions d’accès aux emplois primaires et qui facilitent le mécanisme
d’appariement salarié-emploi [Evers et Gerke (1993) p. 4]. La structure et le fonctionnement du
marché du travail sont alors complexes, impliquant les multiples dimensions économiques, sociales et
institutionnelles.
L’émergence des marchés internes fait appel également à la théorie des négociations.
L’opposition « insiders » et « outsiders » s’identifie à la distinction interne et externe des marchés du
travail27. MacDonald et Solow (1985) ainsi que Burda (1988) expliquent le caractère dualiste du
marché du travail par une force influence du mécanisme de négociation collective dans le marché
primaire. Non seulement elle détient la clef de la création des marchés internes mais elle renforce
également l’internalisation des marchés. Tant dans les pays développés que dans les pays en voie de
développement, les unions syndicales obtiennent le monopole sur l’offre du travail. Elles déterminent
les salaires à un niveau important. Les salaires relatifs dans le segment primaire restent par conséquent
élevés [Cahuc et Zajdela (1991) p.470]. Si les conditions du travail et les salaires dans le segment
secondaire sont à la baisse, c’est parce que ce type de marchés est exclut, voir absent, des négociations
collectives. Le rôle des institutions telles que les unions syndicales et les régulations des marchés est
crucial quant à l’explication de l’inégalité salariale28. Plus le degré de négociations dans les marchés
internes est fort, plus la dualité des marchés est renforcée. Cette approche justifiant l’existence des
marchés segmentés par les stratégies de négociations reste théoriquement peu répandue et
empiriquement difficile à démontrer.
Malgré une multiple tentative d’approfondir les concepts de la segmentation, la plupart des
analyses porte spécifiquement l’intérêt sur les marchés internes notamment dans les pays industrialisés
alors que la démarche segmentationniste vise initialement à appréhender la situation des pauvres et des
moins avantagés.
b. Pauvreté, inégalité salariale et marchés secondaires 27 Voir Lindbeck et Snower (1988).28 Voir entre autres Blau et Kahn(1996).
50
L’interprétation du marché du travail concurrentiel par les orthodoxes semble être simple et
moins complexe que celle des théories institutionnalistes : le marché du travail a une structure quasi
homogène dans laquelle les agents économiques sont en parfaite concurrence, les moins instruits et
moins formés sont les plus défavorables. A l’opposée, les analyses de la segmentation ouvrent une
voie de recherches plus réaliste sur la dynamique de la structure des marchés par laquelle l’interaction
des facteurs sociaux-économiques et institutionnels s’interposent.
La dualité du marché du travail est probablement une représentation simpliste du modèle de
base d’inspiration segmentationniste mais elle est importante pour la compréhension d’idées générales.
On associe souvent les bons emplois au marché interne (ou primaire) et les mauvais emplois au
marché externe (ou secondaire) en fonction des critères de conditions du travail et du niveau de
salaires. Dans le marché primaire, les règles institutionnelles ou coutumières spécifiques à l’entreprise
substituent le mécanisme du marché. Ainsi, le mode de fonctionnement interne diffère de celui du
marché secondaire, c'est-à-dire que les politiques d’embauches s’effectuent par les règlements internes
basés éventuellement sur les principes non concurrentiels tels que, par exemple, les recrutements par le
bais des réseaux sociaux ou des personnels connus de l’établissement. La structure d’emploi se
caractérise par une forte influence des négociations salariales – quelques soit les unions syndicales ou
tous types d’associations – une sécurité d’emploi et salariale. Le processus de promotions internes se
déroule discrètement, permettant aux salariés de construire une relation d’emploi à plus long terme.
Les mobilités professionnelles, si elles existent, ont pour but généralement de favoriser la croissance
salariale. Dans tous les cas, non seulement les rémunérations dans ce secteur sont relativement élevés,
mais les trajectoires salariales sont également à la hausse par le biais d’un développement des carrières
d’emploi. A la différence du marché primaire, on observe le nombre significatif des travailleurs peu
qualifiés dans le segment secondaire dans lequel les conditions du travail et les rémunérations sont peu
instables. Puisque ce type de marchés, contrairement au marché interne, fait face à la pression de la
concurrence aussi bien sur les salaires que sur l’embauche, les rémunérations sont relativement moins
élevés dés lorsque ces dernières se déterminent par le mécanisme du marché. A la différence des
marchés internes, la rotation est rapide, souvent défavorable pour la croissance des salaires [Osterman
(1975) p.509]. Le processus de production dans ce segment regroupe des tâches simples et répétitives
pour lesquelles l’offre de travail peu qualifié devient infinie. Maints individus, une fois restés dans ce
segment, sont incapables d’échapper à ce cercle vicieux, et y restent tout au long de leur vie [Harrison
et Sum (1979) p.690]. En outre, il importe de notre que selon la théorie radicale de la segmentation,
deux segments à l’intérieur des marchés internes doivent être pris en compte. Reich et al (1973)
parviennent à distinguer les secteurs primaires subordonné et indépendant dont les caractéristiques de
51
l’emploi se diffèrent. Le marché primaire subordonné regroupe les emplois qui exigent les disciplines
et les responsabilités tout étant sous le contrôle strict des règles et des autorités. Le secteur primaire
indépendant concerne les emplois qui exercent la créativité, la résolution aux problèmes posés et les
initiatives. Par conséquent, les motivations et les réussites sont hautement récompensées [Reich et al
(1973) p.360].
Dans ce contexte, la paupérisation et la montée de l’inégalité salariale doivent être analysées à travers
des conditions d’enfermement au marché secondaire. En d’autres termes, il importe d’étudier le
processus dynamique des marchés qui favorise l’accès des individus au secteur primaire. Dans ce cas,
on parle d’existence des barrières à l’entrée de certains segments du marché qui empêche le
mécanisme de mobilité d’emploi et enfin d’égalisation des salaires. Pour Piore (1970), le problème de
la pauvreté pourrait s’appréhender en terme de marché du travail dual…les pauvres se sont enfermés
dans le marché du travail secondaire. Eliminer la pauvreté exige qu’ils accèdent au premier segment
[Piore (1970) p.55]. En effet, l’accès au marché primaire exige certaines conditions spécifiques
inhérentes aux critères institutionnels, sociaux et individuels. Or, les individus font face à une double
contrainte, à savoir, d’une part des caractéristiques individuelles peu favorables – peu de
qualifications, origine sociale et sexe etc. –, et, d’autre part, des contraintes d’accès aux ressources
nécessaires. S’agissant de la première contrainte, on fait souvent référence à la discrimination contre
certains individus. La discrimination économique signifie que les individus ayant un même niveau de
capacités ou de productivité perçoivent différemment leurs rémunérations. Cela résulte probablement
d’une différenciation des salaires pour un emploi égal, ce qui est appelé également la discrimination
de salaire ou alors des emplois inégaux qui engendrent l’inégalité des salaires, on appelle la
discrimination d’emploi29. La deuxième contrainte relève des facteurs externes en termes d’accès aux
ressources nécessaires. Il s’agit également d’accès aux ressources informationnelles. En effet, les
individus possèdent peu d’information nécessaire pour la recherche d’emploi et l’acquisition de
qualifications, qui leur permet d’accéder au secteur primaire [Wial (1991) p. 414]. Aujourd’hui, nous
parlons de la promotion du capital social30 qui pourrait permettre aux pauvres d’échanger des
informations nécessaires et d’accéder au marché primaire par le biais des réseaux sociaux.
La persistance de l’inégalité salariale et la pauvreté sont les conséquences de l’existence des barrières
à l’entrée aux bons emplois. En fait, les individus à des mêmes dotations initiales du capital humain
perçoivent différemment leur salaires, cela est dû essentiellement aux divers modes de détermination
29 Voir entre autres Becker (1957) et Bergman(1970).30 On considère souvent le sociologue James S. Coleman (1988) comme étant à l’origine de la notion de capital social. Pour lui le capital social, comme le capital économique ou le capital humain, peut être vu comme une catégorie particulière de ressources à la disposition des acteurs. À la différence des autres types de capital, le capital social réside, selon Coleman, dans la structure des relations entre les acteurs, qu’ils soient individuels ou collectifs. [Lemieux (2001) pp. 83].
52
des salaires propres à chaque segment: la formation salariale du secteur primaire se base sur les
négociations et les règles internes existantes tandis que les salaires du secteur secondaire se
déterminent dans une marché parfaitement concurrentiel. La mobilité d’emploi entre deux segments
est susceptible de réduire les écarts salariaux si le marché est parfaitement flexible. Or, cela n’est pas
le cas. Les arguments proposés par les intentionnalistes réclament le contraire : non seulement
l’existence des barrières à l’entrée provoque simultanément l’immobilité inter-sectorielle, mais les
mobilités d’emploi dans le secteur secondaire, déjà très fréquente, sont défavorables aux carrières
salariales. La question de la mobilité d’emploi et salariale est l’une des préoccupations principales des
analyses segmentationnalistes. Nous sommes amenés à nous interroger sur la validité des modèles
standards de la mobilité d’emploi selon lesquels la mobilité d’emploi est volontaire et génère
généralement un accroissement des salaires. Contrairement à ces derniers, les mobilités d’emploi dans
la théorie de la segmentation parviennent à la conclusion contraire et beaucoup plus réaliste.
B. Mobilités d’emploi et salariales dans la théorie de la segmentation
Un grand défi des théories intentionnalistes se base sur les études des mobilités du marché du
travail. L’investigation empirique sur ce sujet n’est pas nouvelle mais tout à fait d’actualité. Le
nouveau regard sur la persistance de l’inégalité salariale tourne actuellement vers la problématique de
la rigidité du marché du travail qui entrave les mobilités et provoque une instabilité d’emploi aussi
bien dans les pays développés que dans les pays en développement31. Dans ce contexte, les théories
institutionnalistes semblent être les plus pertinentes afin d’éclairer la réalité de ces phénomènes. Il
convient de distinguer deux types de mobilité dans ce modèle, à savoir les mobilités intra et inter-
segments. On parle de mobilité inter-segment lorsqu’il s’agit de mouvements des individus entre
segments, ceci concerne également la mobilité d’intra-firmes ou d’inter-industries puisque les
différentes secteurs pourraient exister au sein d’une même firme ou d’une même industrie de
production et de mobilité intra-segment lorsqu’il s’agit de mouvements d’emploi au sein d’un même
segment aussi bien entre firmes qu’au sein d’une même firme. Contrairement au concept du marché du
travail concurrentiel dont la structure des mobilités est homogène, la théorie de la segmentation
suppose un ensemble des interactions existantes entre segments. En effet, les mobilités inter-segments
sont généralement limitées, introduisant une rigidité dans le marché. Selon Doeringer et Piore(1971),
la seule possibilité d’accéder au secteur primaire est à travers les portes d’entrée (« ports of entry »)32
par lesquelles les emplois proposés font partie des moins désirées dans l’échelle de la distribution. Par
conséquent, les individus émanant du secteur secondaire cherchent leurs emplois parmi les plus
31 Voir ce surjet dans Cappellari (2000), et Glewwe et Nguyen (2002).32 La notion des portes d’entrée est mise en avant par Reder (1955) et reprise par Doeringer et Piore (1971).
53
mauvais classements du secteur primaire car les emplois mieux classés ne sont remplis que par les
salariés qui sont déjà à l’intérieur du marché primaire. S’agissant des mouvements intra-segments, les
individus dans le marché interne sont particulièrement peu mobiles puisque les incitations à établir une
longue relation d’emploi sont très présentes. Non seulement les rémunérations sont relativement
élevées mais les productivités augmentent d’autant plus que l’accumulation du capital humain
spécifique est grande. Les mobilités correspondent alors aux partitions des modèles théoriques
conventionnels dès lorsqu’elles sont issues d’une décision rationnelle des individus afin d’optimiser
leurs gains futurs actualisés. Comme précédemment démontré, ce type de mobilités engendre un
bénéfice aux individus mobiles. A l’opposée, les mobilités fréquentes apparaissent peu favorable aux
pauvres dans le secteur secondaire. La distinction des mobilités entre les approches néoclassiques et
les démarches intentionnalistes montre qu’il s’agit de deux paradigmes différents. En effet, Vietorisz
et Harrison (1973) observent une divergence des processus dynamiques des deux marchés au lieu
d’une convergence de l’économie vers l’équilibre. Pour ce faire, les auteurs mettent en avant les
analyses schématiques en termes de rétroactions. La rétroaction est un cercle enfermé de causalité
dans un système complexe dont les différentes parties sont en interaction. Les mécanismes de
convergence en équilibre et de divergence des processus dynamiques sont démontrés par les simples
schémas suivants :
Figure 1-3 : Processus de rétroaction.
Source : Vietorisz et Harrison (1973) p.368.
54
Activité A
1. Salaires élevés
4. Salaires réduits
2. Adoption du capital intensif en technique
3. Demande de travail réduite
Activité A
Activité B
1. Bas salaires
2. Hausse de salaires
3. Adoption du travail intensif en technique
Rétroaction négative (modèles néoclassiques)
4. Hausse de la demande de travail
Marché primaire
1. Salaires élevés
2. Hausse de salaires
3. Adoption du travail-innovation
4. Accroissement de productivités
Marché secondaire
1. Bas salaires
2. Salaires stagné
3. Persistance du travail intensif en
technique
4. Productivités réduites
Rétroaction positive (segmentation)
La figure 1-3 montre les mécanismes de rétroactions visant à distinguer deux paradigmes
différents entre les modèles néoclassiques et de la segmentation. En premier lieu les théories
conventionnelles contiennent plusieurs exemples de rétroactions. Dans notre étude, nous prenons un
cas des changements de salaires et des types de production dans l’explication des phénomènes de la
mobilité. Dans cette figure, les écarts salariaux sont temporairement supposés, dû éventuellement aux
chocs économiques divers. Ce différentiel de salaires entre l’activité A et B se réduira au cours du
temps. En effet, l’utilisation intensive du capital aura pour occasion de substituer le facteur du travail,
la demande de travail diminue par la suite. Ainsi les salaires suivent une tendance à la baisse. On
appelle dans ce cas une rétroaction négative puisque l’on observe des mouvements de salaires réduits
au point final, contraire au niveau initial. En d’autres termes, ce changement entraîne un signe opposé,
une fois le cycle est accompli. Par conséquent, les processus d’égalisation des salaires, ou d’équilibre
néoclassique, sont conditionnés par ces rétroactions négatives. Tandis que l’équilibre du marché est
atteint petit à petit dans les théories conventionnelles, les mécanismes de rétroactions conçus par la
théorie de la segmentation conduisent à la conclusion opposée. En effet, la persistance des marchés
segmentés résulte d’une très forte rétroaction positive qui conduit à l’état initial des niveaux de
salaires. Dans le marché interne, le niveau de salaires reste instantanément élevé puisque les
entreprises adoptent une stratégie du travail intensif en innovation, accompagnée par l’investissement
intensif en recherche et développement. Les productivités du travail augmentent considérablement et
donc une hausse des salaires. A l’opposée, le marché secondaire, dont les salaires sont déjà bien réduit
au départ, poursuit une même technique de production – travail intensif en technique. Les
productivités se réduisent, au mieux inchangées. Par conséquent, les rémunérations jouent à la baisse
ou inchangées. Selon Vietorisz et Harrison (1973), les rétroactions positives ne sont pas les seules
causes de la segmentation, les processus de divergences la renforcent également : la segmentation
implique conjointement la cohésion interne au sein d’un segment et la divergence entre des segments.
A l’intérieur de chaque segment, la mobilité est grande et les salaires tendent à se converger alors
qu’entre segments, la mobilité est faible et les salaires se diffèrent [Vietorisz et Harrison (1973)
p.371]. La faiblesse des mobilités inter-segments est due fondamentalement aux plusieurs facteurs
combinés, précédemment cités. Ajoutons à la discrimination et aux barrières sociales, les différentes
zones géographiques peuvent avoir leur propre mécanisme de rétroactions positives, les niveaux de
salaires varient alors d’une région à l’autre. Les politiques spécifiques du gouvernement constituent
potentiellement une divergence du système tel que, par exemple, les contrôles stricts de certains
groupes éthiques. La pauvreté persistante et la montée de l’inégalité salariale sont alors liées à la
situation d’auto-renforcement à l’enfermement (« self-reinforcement cycle of stagnation ») dans le
segment à bas salaire et à faible niveau du capital humain. En effet, la situation de l’enfermement a
55
lieu à posteriori dès lors que les personnes entrent une fois dans la vie active, mais elle peut être
également incorporée à la personne dès la naissance en fonction de ses contextes socio-économiques.
Piore (1975) appelle des chaînes de mobilité. Les points de départ dans une chaîne de mobilité
peuvent se présenter sous diverses formes: ils se définissent non seulement par les types d’emploi mais
également d'autres points d'importance sociale et économique. Ainsi les individus considérés,
occupant un emploi spécifique, tendent généralement à être titrés par un ensemble limité de
caractéristiques telles que des écoles, des voisinages, et des types de familles; et réciproquement, les
personnes étant issues de la même école ou voisinage ont une forte probabilité de procéder à des
emplois de mêmes types [Piore (1975) p. 128]. Les mobilités d’emploi ont alors une structure
hétérogène, prédéfini non seulement par les différentes catégories d’emploi mais par les facteurs
socio-économiques et familiaux des individus. Dans ce contexte, la mobilité et la dynamique salariale
peuvent être appréhendée par la mise en œuvre des analyses de la stratification sociale.
L’étude de mobilité salariale est presque inséparable celle de mobilité professionnelle. La
théorie de la segmentation avance plusieurs hypothèses à l’égard des mobilités salariales. En effet, la
place de ces dernières est prépondérante dans l’appréhension des phénomènes de la pauvreté et de
l’inégalité. Les mobilités salariales dans la pensée segmentationniste s’opèrent de manière différente
pour chaque segment. Les mécanismes d’enfermement et de rétroaction positive engendrent un effet
négatif sur la qualité des mouvements de salaires dans le secteur secondaire alors qu’ils favorisent la
croissance salariale dans le secteur primaire. En fait, le fait de rester dans le marché interne pendant
une longue période ne fait courir aucun risque de pertes en terme monétaire alors que travailler dans le
secteur secondaire pour une longe période entraîne une perte relative de salaire, dû essentiellement à
une dévalorisation économique et sociale des compétences. Les mobilités d’emploi subie dans un
marché secondaire peuvent entraîner une baisse considérable de salaires tandis que dans un marché
primaire, elles sont considérées comme génératrices de salaire d’autant plus que celle-ci sont
généralement voulue [Apostle et al (1986) p.341]. L’immobilité et l’instabilité salariale dans le secteur
secondaire sont susceptibles d’aggraver encore plus les problèmes structurels des marchés du travail.
Elles renforcent de manière profonde le processus dynamique de la segmentation [Contini (2001)
p.19]. En prenant un exemple d’une société où les productions sont de base hautement technologique,
les emplois peu qualifiés, dont la demande de travail est faible, ont fréquemment subi à une
discrimination et à la mobilité salariale descendante, empêchant de monter dans la classe économique
et sociale plus aisée. Encore une fois, on se réfère à l’existence des portes d’entrée et aux mouvements
de salaires par le processus de rétroaction dans chaque marché. En effet, la fluidité des marchés et
donc des salaires dépend du degré de l’ensemble des conditions qui constitue les marchés internes tel
que le processus sélectif d’embauche, de promotions et le mécanisme de détermination salariale. Les
56
emplois vacants du secteur interne sont remplis généralement de l’intérieur du segment sauf certains
postes moins désirés sont proposés aux personnes en provenance du secteur secondaire à travers les
portes d’entrée. Le schéma suivant illustre l’interaction entre la mobilité salariale et les conditions des
marchés du travail.
Figure 1-4 : Fluidité des marchés et des salaires.
Source : Lazear et Oyer (2004) p.531.
La figure 1-4 montre que le processus de recrutement (inter ou externe) combiné avec le sens
de mobilité salariale détermine le degré des marchés existants. Si les salaires tendent à se converger à
l’équilibre (rétroaction négative) et les recrutements s’effectuent substantiellement par les personnes
émanant du secteur secondaire, on assiste à un processus d’externalisation du marché. Dans ce cas, le
marché devient de plus en plus concurrentiel et les mobilités sont génératrices de croissance salariale,
comme cela précédemment proclamé par les théories néoclassiques de la mobilité d’emploi. A
l’opposée, si le mécanisme de rétroaction est positif – les salaires suivent un mouvement
idiosyncratique et les emplois vacants s’effectuent essentiellement de l’intérieur du secteur interne – le
degré de la segmentation est fort. De fait, les mobilités salariales ascendantes sont observées dans le
secteur primaire, provoquées plusieurs vertus du marché interne tel que les promotions des carrières
ou les mobilités d’emploi favorables à la croissance salariale. A l’opposée, le fort degré de la
segmentation conduit à une situation dans laquelle les employés du secteur secondaire sont face à une
multiple fluctuation de salaires. Les mobilités salariales s’associent fréquemment à des mouvements
descendants et aléatoires. Nombre de recherches en économie contemporaine tentent de filtrer les
déterminants de ce phénomène particulièrement complexe. La mobilité des bas salaires, souvent
associée à la structure des marchés segmentés, est un principal sujet d’analyses portant sur les causes
de l’inégalité des salaires en Europe. En fait, le réseau des bas salaires en Europe 33 (« European Low-
Wage Employment Research Network (LoWER) »), initié en 1996 et financé par les programmes de
recherche en socio-économie de l’Union Européenne, contribue essentiellement à des analyses
centrant sur l’impact des institutions du marché du travail sur la mobilité, l’inégalité et l’emploi des
bas salaires. Il fait appel à l’intervention des politiques publiques qui consiste à créer les meilleures
33 Voir, entre autre, Gregory et al. (2000).
57
Mouvement de salaires
Processus d’embauche (portes d’entrée)
Marché externe
Deux types de marchés
Deux types de marchés
Marché interne
Recrutement externe élevé Recrutement interne
Convergenc
Divergence
conditions pour le marché du travail non seulement par l’approche de la création d’emploi mais
également par la promotion de la mobilité salariale ascendante et le soutien des bas revenus par la
mise en place des programmes institutionnels tel que le salaire minimum légal, la loi sur la
discrimination ou sur les unions syndicales etc. Les phénomènes observés dans les pays OCDE sont
divers en fonction des présences institutionnelles dans les marchés du travail. Selon cette approche, les
pays où l’inégalité salariale est élevée ont un système dé-régularisé ou décentralisé du marché du
travail dans lequel les contraintes institutionnelles ont une faible influence sur le fonctionnement du
marché. A l’opposée, les pays où les écarts salariaux sont faible ont souvent une forte présence des
institutions telles que la négociation collective, la protection sociale solide et le salaire minimum légal
etc. Bien que les contraintes institutionnelles constituent une structure des salaires plus ou moins
rigide face aux diverses risques économiques, elles sont les instruments de politiques nécessaires à
l’amélioration et à la protection des individus de bas salaires dans une société [Lucifora (1999) p.10].
Les évidences empiriques à l’égard des déterminants de bas salaires, avancées notamment dans les
pays européens, ont pour vocation de justifier la marge de main d’œuvremain-d’œuvre des politiques
d’intervention. En effet, Gosling et al. (1997) suggèrent que, entre 1991 et 1994, seul 50 pour cent de
persistance dans les bas salaires parmi les hommes est expliqué par les caractéristiques individuelles
alors que l’autre moitié reste inexplicable. Van Opstal et al. (1998) explique que le capital humain
spécifique est loin d’être le seul déterminant de mobilité salariale ascendante tandis que l’expérience
professionnelle explique la part significative de cette dernière. Il existe un accord selon laquelle les
mouvements ascendants de salaires sont souvent observés dans les sociétés où l’inégalité salariale est
élevée. Les plus immobiles concernent les femmes, les seniors et les moins instruits. Les déterminants
de persistance dans des emplois à bas salaires s’associent, d’une part, aux caractéristiques
individuelles – l’effet d’hétérogénéité –, et, d’autre part au temps passé dans l’emploi à bas salaires –
la structure de dépendance. Pour Sloane et Theodossiou (1996), ce dernier semble être le plus
important que le premier effet. Cela signifie que les individus font face aux contraintes externes qui
constituent des barrières à la mobilité. Par conséquent, les politiques d’intervention par le biais des
instruments institutionnels ont pour objectif non seulement de réduire les effets de compression
salariale pour ce groupe d’individus, mais également de les protéger des risques divers liés aux
fluctuations dans les marchés du travail [Sloane et Theodossiou (1996) p.99]. Bien que la démarche
des analyses des bas salaires ne s’identifie qu’indirectement à l’existence des marchés du travail
segmentés, les bases conceptuelles et les implications des politiques économiques s’assimilent. A la
différence des théories conventionnelles, la mise en œuvre des politiques économiques suggérées par
les théories institutionnelles s’appuie sur le côté de la demande de travail, à savoir la création des
emplois publics, les subventions de salaires et les programmes d’anti-discrimination etc. De fait, toute
intervention sur le côté d’offre tel que les programmes d’éducation, de formation et d’assistance de
58
recherche d’emploi devrait être minimisée, voir même rejetée. Les économistes radicaux, quant à eux,
proposent une solution assez large, non spécifique, consistant, d’une part, à renforcer les pouvoirs des
salariés dans le rapport de force, d’autre part, à établir une qualité de relation sociale convenable dans
le milieu du travail [Cain (1979) p.1224].
Les fonctionnements et les structures dynamiques des marchés du travail font un objet de débats
théoriques actuels à l’égard de la pauvreté et la persistance de l’inégalité. Moins complexe mais plus
commode à la compréhension, les théories dominantes suggèrent, dans une logique d’équilibre du
système, une structure homogène du marché, parfaitement concurrentielle, dans laquelle la
confrontation entre l’offre et la demande de travail conduit à déterminer le niveau de salaires du
marché. Par conséquent, les individus ayant les mêmes dotations initiales du capital humain perçoivent
systématiquement les mêmes rémunérations puisque les productivités sont hypothétiquement égales.
Les pauvres sont pauvres parce qu’ils sont considérés comme les moins instruits et peu qualifiés.
Sortir des emplois qui génèrent des faibles revenus exige une importance capitale des investissements
en éducation et en formation, et de l’efficacité des recherches d’emploi. Ces modèles, probablement
simplistes, se révèlent limités quant à la mise en place des politiques préconisées face aux
changements de structures des marchés qui deviennent de plus en plus complexes. L’interaction
systématique entre éléments institutionnels et agents économiques est introduite par les théories
institutionnalistes afin de ségréger l’ensemble des composantes hétérogènes de marché. Le marché du
travail interne, non concurrentiel et dynamisé par les règles institutionnelles propres à l’établissement,
regroupe les bons emplois mieux rémunérés et de bonnes conditions de travail alors que le marché du
travail externe, parfaitement concurrentiel, englobe les mauvais emplois peu rémunérés et de
conditions du travail dégradées. La mobilité d’emploi inter-segment est contrainte par l’existence des
barrières à l’entrée du marché interne. L’étude de la pauvreté et l’inégalité des salaires doit porter
notre attention d’une part sur les dynamiques de l’emploi et des salaires dans le secteur secondaire , et,
d’autre part, sur les individus les plus vulnérables aux risques inhérents à l’instabilité et aux
fluctuations économiques. Parmi les pays les plus inégalitaires en termes de revenus, la Thaïlande
procède à un ensemble d’éléments du marché du travail qui défavorise les plus désavantagés. Le
dilemme entre l’efficacité (croissance économique) et la mise en place du système de protection
sociale constitue un enjeu politiquement important. Pendant trois décennies, le système économique
capitaliste a bénéficié des personnes les plus aisées en adoptant des politiques d’emploi laxistes qui
conduisent une persistance des inégalités économiques et sociales. Très peu de salariés se sont
protégés par le système de sécurité sociale qui n’était pas réellement répandu. Depuis la veille de la
crise économique des années 1990, les politiques de filet social de protection (« Social Safety Net ») se
mettent en place afin de fournir un système global de la protection sociale qui est destiné notamment à
59
créer des bonnes conditions du le marché du travail. Dans ce contexte, l’identification des individus
vulnérables et l’appréhension des dynamiques des marchés constituent un enjeu politique important.
2. Réalité du marché du travail en Thaïlande
L’objectif de cette présente partie consiste à établir une vue d’ensemble de structure et
l’évolution des marchés du travail à travers des différentes périodes. Le déroulement vise
particulièrement à établir des hypothèses pertinentes de la segmentation des marchés, aussi bien par un
aspect déjà bien connu (l’informalité du marché du travail) que par une approche dualiste appliquée
notamment aux pays développés (marché interne et externe). Tout comme dans les pays en
développement, la Thaïlande a une structure du marché du travail qui évolue rapidement et qui change
en fonction des mesures politiques préconisées adaptées aux multitudes de l’économie mondiale.
L’économie thaïlandaise est qualifiée dualiste lorsque son système de production se dirige par deux
secteurs principaux : secteur agricole (traditionnel) essentiellement rural et secteur industriel
(moderne) principalement urbain. L’industrialisation contribue considérablement à changer les
structures économique et sociale du pays: l’inégalité des revenus entre le milieu urbain et rural est
observée au cours des trois dernières décennies ; la criminalité et la dégradation de l’environnement
sont accélérées à travers l’effet de l’urbanisation ; la pauvreté urbaine augmente significativement.
Cependant, l’effet positif est global. Sur le plan économique, le niveau de vie de la population
augmente, sans oublier l’arrivée de l’ensemble des infrastructures nécessaires au développement
économique du pays. Sur le plan social, le nombre des personnes éduquées augmente
considérablement. Par conséquent, il est indéniable que les activités économiques dans des zones
urbaines, tout particulièrement à travers le marché du travail urbain, jouent un rôle déterminant, mais
non exclusif, dans l’amélioration du niveau de vie de la population toute entière.
Notre présente étude est organisée de manière suivante. Tout d’abord, l’évolution globale de la
structure d’emploi, y compris l’offre et la demande de travail, la qualité d’emploi et les rendements à
l’éducation sera présentée de façon générale. Ensuite, nous sommes amenés à nous focaliser sur le
fonctionnement dynamique du marché du travail urbain en précisant un ensemble des phénomènes liés
au chômage, sous-emplois et informalité du marché. Enfin, la présence des institutions du marché du
travail permet d’appréhender le mode de fonctionnement du marché et des conditions du travail,
notamment pour les travailleurs urbains.
A. Structure d’emploi et qualité de travail
60
Le marché du travail en Thaïlande a connu maintes séries de mutations au cours de ces trente
dernières années. En effet, pendant les années 1960, une grande partie de la population vivaient dans
une zone rurale, la production agricole était un moteur de croissance économique. A partir des années
1970, on assiste à une grande mobilisation de la main d’œuvremain-d’œuvre, ayant but de favoriser
l’expansion des activités industrielles dans une zone urbaine. La part des produits manufacturés dans
le PIB a rapidement dépassé celle de l’agriculture durant les années 1970 et 1980. Dés lors, tout effort
doit être porté sur les processus de transition de l’économie agricole vers l’économie de production
industrielle et des services concernés. Aussi tôt, durant les années 1990, de nouvelles contraintes
s’imposent. Lorsque les stratégies du développement se reposent sur l’adoption des industries
intensives en technologies, il est tout à fait normal que la quantité de main d’œuvremain-d’œuvre
qualifiée ne parvient pas à répondre à ces besoins massifs. Non seulement, la pénurie des travailleurs
qualifiés prévaut mais les productivités restent mitigées. Ce dernier obstacle est d’autant plus
dramatique que les investissements étrangers sont sensibles à la hausse des coûts de main
d’œuvremain-d’œuvre en Thaïlande en comparaison avec d’autres pays asiatiques tel que la Chine, le
Vietnam et la Malaisie. Le nouveau défi pour la Thaïlande est alors de former des travailleurs qualifiés
en appuyant sur l’amélioration du système éducatif et la mise en place du système d’information
efficace sur la formation des travailleurs [Makishima et Suksiriserekul (2003) p 37-38].
a. Structure d’emploi au niveau national
A partir de 1984, l’âge légal pour travailler est à partir de 13 ans et plus. La modification a été
apportée à la constitution datée de 1998 qui a prévu l’âge légal de travail à partir de 15 et plus. Le
tableau 1-1 montre qu’une hausse continue du nombre de la population thaïlandaise qui est passé de
51,45 millions en 1985 à 65,19 millions en 2004. Les enquêtes sur la main d’œuvremain-d’œuvre34
(« Labor Force Survey »), effectuées sur une base annuelle par l’Office National de Statistique
permettent d’observer l’évolution globale de la structure du marché du travail en Thaïlande.
Tableau 1-1: Répartition de la population selon le statut et le secteur (pour mille personne). 1985 1990 1995 1998 2000 2003 2004Population totale 51 450,7 56 405,0 59 450,9 61 248,4 62 481,4 64 062,6 65 197,2
34 L’Enquête de main d’œuvremain-d’œuvre (LFS) a été effectuée pour la première fois en 1963. Elle avait pour objectif d’observer l’évolution du chômage, de sous-emploi nécessaire à l’établissement des politiques nationales de l’emploi. Elle est une des principales missions de l’Office national de Statistique. A partir de 1998, elle est devenue trimestrielle, avec une première édition en février, mois creux pour l’agriculture car en pleine saison sèche, une seconde en mai, période normalement considérée comme intermédiaire car se situant juste avant le début de la saison des pluies et correspondant à l’arrivée des nouveaux diplômés sur le marché du travail, une troisième en août, au plus fort de la saison agricole, et une quatrième en novembre, au moment des récoltes. Depuis 2001, la LFS est effectuée sur une base mensuelle. Nous allons présenter ultérieurement des informations détaillées sur cette enquête.
61
Population économiquement active 26 847,4 31 553,8 32 950,2 33 276,0 33 813,7 35 550,1 36 647,4Actifs occupés 25 852,6 30 843,8 32 575,1 32 138,0 33 001,1 34 945,4 36 097,0Répartition des actifs employés par secteurs industriels
Agriculture et pêche 18 300,5 20 175,4 17 141,3 16 812,2 16 312,9 15 840,8 15 598,3Industries manufacturières 2 128,5 3 187,1 4 410,6 4 395,4 4 912,7 5 368,1 5 611,8Constructions 629,2 1 059,2 1 888,2 1 452,4 1 381,9 1 526,6 1 732,5Electricité, gaz et eau(1) 103,1 109,1 168,5 178,7 173,3 114,8 98,9Commerce de gros et de détail 2 408,0 3 006,6 4 119,8 4 575,4 4 868,4 5 018,8 5 501,9Transports et communications 541,2 737,5 996,2 949,0 972,0 974,4 1 108,8Services 2 497,1 3 122,7 4 141,5 4 686,7 4 936,2 6 095,2 6 544,7Autres 13,6 24,5 5,9 9,7 11,4 327,6 241,7
Taux d'activité(2) 81,2 83,3 78,4 76,0 75,3 80,6 81,5Homme 87,1 88,5 85,2 83,6 82,9 88,2 89,5Femme 75,3 78,0 71,5 68,5 67,7 73,0 73,5
Taux de chômage(3) 3,7 2,3 1,1 3,4 2,4 1,7 1,5rurale 3,5 2,2 1,2 3,1 2,3 1,5 1,4Urbain 4,4 2,4 1,0 4,1 2,6 2,0 1,6
Notes: (1) Secteur de distribution d’électricité, gaz et eau ; (2) Taux d'activité, appelé également taux d'offre, est le rapport entre la population économiquement active -employé et chômeurs- et la population totale, généralement en âge de travailler (13-64 pour 1985-2000 et 15-64 pour 2003-2004) ; (3) le taux de chômage se définit comme un rapport entre le nombre de personnes sans emploi et la population active (chômage et actifs occupés).sources : les enquêtes sur la main d'œuvre au troisième trimestre (1985-2004).
Le nombre de la population économiquement active augmente en termes absolu près de 9,81
millions de personnes en vingt années. Cependant, l’analyse en terme relatif montre une tendance
inversée. En fait, les taux d’activité, indiqués dans le tableau 1-1, suivent une tendance à la baisse
malgré une proportion élevée de ceux qui participe au travail. En fait, près de 81,2 pour cent de la
population est activement impliquée dans le marché du travail en 1985 avant d’atteindre 75,3 pour
cent en 2000. Cependant à partir de l’année 2003, le taux d’offre commence à augmenter jusqu’en
2004. Parmi ces participants, le nombre d’hommes est nettement supérieur à celui des femmes, l’écart
de proportion est compris entre 10 et 16 pour cent. Le rôle des femmes dans la participation aux
activités économiques est crucial, notamment dans le processus d’ajustement quantitatif du marché du
travail. En fait, dans la région du Sud-ouest asiatique, l’implication des femmes contribue à la fois à
une expansion de l’offre du travail et à l’ajustement quantitatif du marché [Dowling et Worswick
(1999) p.91]35. Cependant, comme dans la plupart des pays en développement, les femmes
thaïlandaises doivent faire face à de diverses pratiques discriminatoires au sein du marché du travail
tant dans l’obtention de l’emploi que dans la détermination de salaires. Par conséquent, en Thaïlande,
le genre et la qualification sont les principaux déterminants de la discrimination souvent observée dans
les secteurs privés [Bourguignon et Goh. (2002) p.22]. Ce résultat reflète l’existence de la
segmentation du marché du travail qui qualifie une cause des inégalités d’emploi et de salaires entre
les hommes et les femmes, notamment dans les secteurs à faible productivité. De fait, ces derniers, une
fois refusés par le secteur formel, sont obligés de chercher un emploi dans le secteur informel où les
salaires sont relativement faibles et les conditions de travail sont peu confortables.
35 L’analyse montre également que les femmes immigrées sont aussi actives que les femmes non immigrées. En Indonésie et Philippines, les probabilités pour les femmes immigrées de trouver un emploi s’élèvent à 19 à 30% par rapport aux femmes non immigrées alors qu’en Thaïlande, elles sont non significatives [Dowling et Worswick (1999) p. 91].
62
L’effet spécifique souvent constaté en Thaïlande est les écarts de productivités entre secteurs
agricole et industriel. Ceci crée simultanément une inégalité des revenus alors que la fluidité
géographique rurale-urbaine de main d’œuvremain-d’œuvre tend à la réduire par le biais des transferts
monétaires. En effet, le déséquilibre sectoriel est observé par le fait que la part de la production
agricole reste largement en dessus de celle du secteur non agricole dans le PIB alors que le nombre des
travailleurs dans le secteur traditionnel dépasse celui du secteur non agricole, malgré une baisse
tendancielle depuis les années 1980 [Acharya(2000) p.6]. La répartition des individus par secteurs
industriels montre que le secteur primaire – agriculture, prêche et industrie extractive – génère près de
70 pour cent d’actifs occupés en 1985, équivalent à 18,30 millions de personnes. Ce pourcentage
diminue progressivement duant les années 1980 et 1990 avant d’atteindre 49,4 pour cent en 2000, soit
16,31 millions de personnes. Ce phénomène correspond à la mobilisation de main d’œuvremain-
d’œuvre du secteur à faible productivité à celui à forte productivité à travers une grande mobilité
géographique de la main d’œuvremain-d’œuvre. Le départ des jeunes diplômés à la recherche des
opportunités d’emploi a déclenché une explosion d’un phénomène d’exode rural. L’écart des
productivités entre ces secteurs est généralement mesuré par les différences en valeur ajoutée amenées
pour chaque secteur. En fait, le tableau A-1-1, indiqué en annexe, suggère qu’entre 1980 et 2004, la
part de la production agricole dans le PIB ne cesse de diminuer, au rythme annuel de 3,2 pour cent. La
variation à la baisse est rapidement accélérée dès la première moitié des années 1980 à partir de
laquelle le développement des activités industrielles permet au pays de connaître une croissance
économique phénoménale. A l’opposée, la part de la production non agricole continue à croître,
notamment celle des produits manufacturiers qui représente à elle seule 23,9 pour cent du PIB en 1980
et a atteint près de 41 pour cent du PIB en 2004. Ce déséquilibre des croissances productives entre
deux secteurs est spécifique à la Thaïlande et rarement observé dans d’autres pays de voisinages36. Le
rôle des secteurs non agricole est déterminant pour le développement économique, en particulier pour
la réduction de la pauvreté au niveau national. Selon Warr (2002), bien que les activités industrielles
se situent aux grandes villes autour de la capitale, Bangkok, cette expansion économique est
également profitable aux personnes vivant en milieu rural grâce au mécanisme de mobilité de main
d’œuvremain-d’œuvre rurale-urbaine qui engendre ensuite un flux des transferts monétaires entre deux
zones. La croissance économique dans les zones urbaines est susceptible de réduire la pauvreté rurale
à un rythme dont le degré dépend de cette mobilité [Warr (2002) p.25].
La répartition des actifs occupés selon les secteurs permet d’établir une structure globale du
marché et son évolution. Parmi les secteurs non agricoles, les emplois dans les secteurs de commerce
et de service occupent une place significative dans la totalité des actifs occupés: près de 28,9 pour cent 36En Indonésie, le pays voisin de la Thaïlande, sa part de la production agricole dans le PIB national reste encore importante, elle a atteint 19,5% du PIB en 1999 en comparaison avec 27,3% en 1979 [Hawley (2000) p. 274].
63
et 30 pour cent de la totalité des actifs occupés travaillent dans le secteur de commerce et de service
respectivement. Entre 1985 et 2004, les proportions des effectifs augmentent sensiblement, notamment
pour les secteurs manufacturiers et de services : les parts d’effectifs occupés passent de 25,6 pour cent,
soit équivalent de 2, 13 millions, à 30 pour cent, soit 5,61 millions pour l’industrie manufacturière, et
de 30 pour cent, équivalent à 2,50 millions de personnes, à 31,4 pour cent, soit 6,54 millions de
personnes. La construction et le transport englobe également une part non négligeable mais leur
rythme est sensiblement moins accélérés. La disparité de productivité qui engendre les inégalités de
revenus existe non seulement entre les secteurs modernes et traditionnels, comme précédemment cité,
mais au sein même du secteur non agricole, les valeurs ajoutées se diffèrent. En fait, la répartition du
PIB, figurée dans le tableau A-1-1 en annexe, suggère que le ratio de la production manufacturière
dans le PIB est largement en dessus de celui des autres secteurs. La part de la production du secteur de
commerce dans le PIB continue à augmenter juste avant l’arrivée de la crise économique. La récession
a pesé lourdement sur les activités de commerce, le ratio de la production dans le PIB est passé de 24,3
pour cent en 1995 à 18,1 pour cent en 1999. Cependant, il est repris à partir de l’année 2002 pour
atteindre de l’ordre de 21,5 pour cent en 2004. Cette proportion reste encore loin derrière celle des
industries manufacturières alors durant les années 1980, elles ont été quasi-égales. En dépit d’une
hausse des effectifs dans les services, la part de production de ce secteur dans le PIB est
substantiellement réduite, la même observation est également faite dans le secteur de construction. Au
total, les disparités urbaines-rurales ou sectorielles de l’emploi conduisent à des conditions
économiques et sociales qui favorisent une persistance des inégalités de salaires au niveau national.
Par conséquent, nous sommes amenés à questionner sur l’évolution et le mécanisme du marché du
travail visant à faire apparaître la disparité d’emploi entre le milieu rural et urbain. Dans ce contexte,
le calcul des taux d’activité37 va éclairer des aspects spécifiques des conditions d’offre du marché en
milieu rural et urbain. Notons que le taux d’activité est un indice permettant à la fois d’écrire une
évolution structurelle du marché et d’appréhender par quel mécanisme du marché l’économie est en
plein expansion et en récession.
Tableau 1-2: Taux d'activité selon l'âge, le niveau d'éducation, la région et la zone (1985-2004).Rural Urbain
1985 1990 1995 2000 2004 1985 1990 1995 2000 2004Classe d'âge
11-14 51,8 44,1 16,9 9,4 - 17,7 16,2 7,8 4,3 -15-19 76,5 76,6 52,7 37,6 37,1 42,5 42,9 35,7 26,5 26,320-24 88,5 90,0 85,0 75,5 78,2 69,4 75,4 71,3 63,2 62,325-34 92,1 92,7 91,5 87,9 88,7 84,4 86,1 86,1 87,8 89,535-54 93,1 93,6 92,4 90,0 90,8 83,1 85,0 85,0 86,0 86,0>55 97,0 103,6 94,4 94,1 100,0 72,8 75,2 70,0 72,4 84,4
Niveau d'éducation Sans instruction 89,2 91,9 81,6 77,2 87,5 69,0 70,8 63,3 67,2 67,3Primaire 87,5 88,7 84,7 81,0 90,9 72,6 75,4 74,8 74,4 84,2Secondaire (1er cycle) 60,4 67,6 61,7 62,3 62,9 56,8 61,3 62,8 64,0 63,0
37 Voir la définition du taux d’activité dans les notes du tableau 1-1.
64
Secondaire (2ème cycle) 78,9 81,9 76,3 76,0 75,0 47,2 58,2 56,1 55,1 57,2Secondaire
professionnel(1) 56,7 64,3 44,6 44,5 69,6 56,0 62,8 57,5 55,9 76,5Diplôme (Bac+2) 95,2 94,2 90,1 86,5 90,1 88,6 85,6 83,6 83,8 88,2Universitaire 94,7 93,1 92,9 89,0 92,5 90,7 92,6 92,4 89,2 90,2
Région Bangkok et
métropolitaine 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 64,8 69,7 69,4 70,8 73,5Région centre 82,8 81,5 77,8 76,2 82,9 72,6 76,3 73,5 73,2 79,1Nord 87,8 89,3 80,8 79,4 84,1 75,7 77,2 74,9 73,6 80,5Nord-est 87,5 90,9 85,0 76,5 83,8 72,4 74,4 72,6 70,9 77,6Sud 83,4 82,6 77,6 76,4 85,7 69,4 72,1 71,2 70,3 79,7
Total 86,0 87,3 81,4 77,1 83,9 69,4 73,0 71,7 71,7 76,8Notes: Rappelons que le taux d'activité, appelé également taux d'offre, est le rapport entre la population économiquement active -employé et chômeurs- et la population totale, généralement en âge de travailler (13-64 pour 1985-2000 et 15-64 pour 2003-2004); (1) Secondaire professionnel fait référence au niveau d'études secondaires second cycle de filière professionnelle et le diplômé de bac+2 regroupe des niveaux d'études secondaires second cycle de filière professionnelle supérieure et de diplôme spécifique pour être professeurs des écoles.sources : les enquêtes sur la main d'œuvre au troisième trimestre (1985-2004).
La configuration de l’offre du travail a considérablement modifié au cours de ces vingt années
considérées. Comme le note en dessus, le taux d’activité au niveau national a significativement
diminué. Ceci est aussi le cas tant pour le milieu rural qu’urbain. Dans une zone rurale, le taux
d’activité a augmenté jusqu’au débout des années 1990 avant de diminuer progressivement durant les
années 1990 et 2000. Il est passé de 86 pour cent en 1985 à 77,1 pour cent en 2000 et à 83,9 pour cent
en 2004. La répartition des taux d’offre selon âge, niveau d’éducation et région constitue un ordre
d’idée des conditions spécifiques de l’offre dans cette zone. En effet, on observe une corrélation
positive entre l’âge et la propension à participer au travail en milieu rural. Les personnes à plus de 55
ans détiennent une proportion relativement importante : 97 pour cent contre 76,5 pour cent pour les
jeunes âgées de 15-19 ans en 1985. Ceci s’explique par le fait que les personnes âgées vivant en milieu
rural ont moins de possibilité d’aller trouver un emploi dans le secteur industriel contrairement aux
jeunes diplômés. Par conséquent, le secteur agricole regroupe de plus en plus les travailleurs âgés, non
qualifiés et peu instruits. En termes d’évolution de cette structure, on remarque une diminution globale
des taux d’activité, notamment pour les jeunes âgées de 15 à 19 ans, passant de 76,5 pour cent en 1985
à 37,1 pour cent en 2004. Cela tient au fait que, d’une part, ces derniers sont de plus en plus incités à
poursuivre leurs études supérieures , et, d’autre part, les effectifs de cette tranche d’âge ont
progressivement diminué puisque le taux de natalité a été relativement faible durant les années 1970
[Chandoevwit (2003) p.2]. Les taux d’activité selon les niveaux d’éducation sont en forme de U, c'est-
à-dire qu’il existe deux extrémités apparentes. On observe les proportions importantes pour les
groupes de personnes peu et mieux instruits alors que les individus ayant une éducation secondaire
(premier et deuxième cycle) semblent être les moins incités à participer au travail. Particulièrement, le
taux d’offre des diplômés secondaire de filière professionnelle est au plus bas, égal à 56,7 pour cent
tandis que celui des diplômés universitaires et des sans instruction s’élèvent à 94,7 pour cent et 89,2
pour cent en 1985, respectivement. La part des diplômés secondaires de filière professionnelle
diminue pour celle seule de 12,2 pour cent en 15 ans. Les participations au travail en milieu rural selon
65
les régions montrent une similitude entre régions. Les taux d’activité sont presqu’égaux malgré
certaines disparités d’activités économiques entre différentes régions. Malgré une proportion moins
importante que celle du milieu rural, la zone urbaine est marquée par une évolution quasi-constante de
la participation au travail des individus. Le taux d’activité est compris entre 70 et 77 pour cent entre
1985 et 2004. La répartition de l’offre selon l’âge en forme de U inversée est très nette : les
participants au travail à l’âge moyen sont relativement nombreux tandis que le nombre des jeunes et
des plus expérimentés reste inférieur. En fait, les membres âgés entre 25 et 54 ans représentent une
grande partie de la totalité d’offre du travail, les taux d’offre s’élèvent près de 84,4 et 83,1 pour cent
pour les personnes âgées entre 25 et 34 ans, et 35 et 54 ans, respectivement. Comme dans le cas de
l’évolution en milieu rural, le taux d’activité des jeunes âgées entre 15-19 en milieu urbain a
considérablement diminué, passant de 42,5 pour cent en 1985 à 26,3 pour cent en 2004. L’offre du
travail en fonction de niveaux d’éducation en milieu urbain est également en U. Les taux d’activité
sont relativement important parmi les moins et les plus instruits : 72,6 pour cent pour les diplômés
primaires et 90,7 pour cent pour les diplômés universitaires, alors que seul 47,2 pour cent est attribué
aux personnes ayant une éducation secondaire en 1985. Cependant, l’évolution de la participation de
ces derniers semble jouer à la hausse durant les années 1990. Cette tendance s’explique notamment par
l’évolution favorable des conditions du marché permettant de recruter les nouveaux travailleurs ayant
les études secondaires et particulièrement des études secondaires de filière professionnelle. S’agissant
d’offre de travail en fonction des régions, les taux d’activités pour la capitale, Bangkok et
métropolitaine, sont relativement faibles malgré une hausse sensible durant les années 1990. D’autres
régions suivent une même tendance à la baisse. L’étude de la structure et de l’évolution de l’offre de
travail suggère que les sources de revenus en provenance du marché du travail déterminent le niveau
de vie de la population. Cependant, l’ouverture économique et commerciale conduit à une nouvelle
configuration de l’économie interne dont l’impact sur le marché du travail est direct. Le passage de
l’industrie intensive en travail à celle intensive en technologie exige des compétences et des
qualifications de plus en plus spécifiques. Or, le niveau et l’évolution de productivité dans les
industries de production en Thaïlande sont encore loin derrière ceux des pays voisins.
b. Qualité et productivité de travail
Depuis 1980, les politiques des gouvernements successifs ont pour vocation de poursuivre une
transformation des économies industrielles par laquelle les processus de production passent d’une
phrase des produits intensifs en travail à la production intensive en technologie. Ce changement de
stratégies résulte en fait d’une intensité accrue de concurrence internationale en termes de forte
productivité et de faibles coûts de production liés aux bas salaires. Par ailleurs, le secteur agricole fait
66
face à une baisse considérable des prix de vente et à une chute continue des productivités malgré un
soutien permanent des politiques publiques en matière de subvention et de progression technologique.
Dans notre étude, l’attention sera portée exclusivement sur les conditions économiques du
déroulement des secteurs non agricoles, notamment du secteur industriel.
Les problèmes généralement connus concernent l’interaction entre trois facteurs :
investissement étranger, productivité et salaires. En fait, en Thaïlande, non seulement les salaires
moyens réels continuent à grimper mais les productivités sont faibles. Ce dernier facteur s’explique
principalement par la faiblesse du système éducatif et la rareté des formations engagées par les
employés. Par conséquent, le premier défis consiste, d’une part, à mener un système d’éducation
efficace afin de répondre aux besoins du marché , et, d’autre part, à mettre en place des mécanismes
d’incitations à former des travailleurs dans le lieu du travail et en dehors du marché [Yosilida(2003) p.
349]. S’agissant du niveau d’éducation, les analyses comparatives parmi les pays sélectionnés
montrent qu’en Thaïlande, la population a un niveau d’éducation relativement faible. Le tableau A-1-
2, reporté en annexe, indique qu’en 1998, le nombre de la population ayant au moins une éducation
secondaire premier cycle reste en dessus de celui d’autres pays non seulement dans la même région
mais aussi d’autres pays Amériques du sud. En prenant par exemple, la proportion des personnes
âgées entre 25 et 29 ans et entre 30 et 35 ans, ayant ce niveau d’études, ne s’élève qu’à 39 et 32 pour
cent alors qu’en Indonésie et en Malaisie, elles atteignent de l’ordre de 49 et 40 pour cent, et 77 et 70
pour cent, respectivement. Les écarts de ces proportions entre la Thaïlande et d’autres pays Amériques
Latines sont plus de 20 pour cent en 1998. Tout effort en matière d’éducation porte à l’heure actuelle
sur la rénovation du système éducatif afin de répondre à une expansion économique dans l’avenir. En
pratique, il s’agit, d’une part, d’augmenter des années d’éducation obligatoire et gratuite , et, d’autre
part, d’adopter de diverses filières de spécificités susceptibles de satisfaire aux besoins futurs du
marché du travail. En fait, le système d’éducation en Thaïlande est régit actuellement par la
constitution de 1997 et la loi de l’éducation nationale de 1999. Depuis l’année 1978, les thaïlandais
pouvaient étudier jusqu’à six ans sans frais d’inscription et à partir de l’année 1997, la constitution
accorde douze année d’éducation sans frais [Makishima et Suksiriserekul (2003) p. 40-41]. Cependant,
le nombre des personnes mieux éduquées augmente lentement.
Tableau 1-3: Nombre et proportion des actifs employés selon le niveau d'éducation (en mille personne et en pourcentage).
1985 1998 2004
Rural Urbain Total Rural Urbain Total Rural Urbain Total
Primaire et inférieur18
340,04
368,622
706,518
024,04
929,322
953,317
262,0 5 090,322
352,3% en ligne 80,8 19,2 100,0 78,5 21,5 100,0 77,2 22,8 100,0% en colonne 93,7 69,6 87,8 80,5 50,6 71,4 70,4 44,0 61,9
Secondaire (1er et 2ème cycle) 765,8 855,3 1 621,1 3 023,1 2 5 236,2 4 960,8 2 941,0 7 901,8
67
213,2% en ligne 47,2 52,8 100,0 57,7 42,3 100,0 62,8 37,2 100,0% en colonne 3,9 13,6 6,3 13,5 22,7 16,3 20,2 25,4 21,9
Secondaire professionnel 137,9 370,9 508,8 397,7 587,2 984,9 583,2 701,5 1 284,7% en ligne 27,1 72,9 100,0 40,4 59,6 100,0 45,4 54,6 100,0% en colonne 0,7 5,9 2,0 1,8 6,0 3,1 2,4 6,1 3,6
Diplôme Bac+2 258,0 244,4 502,4 322,7 363,6 686,3 637,6 694,2 1 331,7% en ligne 51,4 48,6 100,0 47,0 53,0 100,0 47,9 52,1 100,0% en colonne 1,3 3,9 1,9 1,4 3,7 2,1 2,6 6,0 3,7
Universitaire 76,1 437,7 513,8 621,01
656,3 2 277,3 1 084,3 2 142,1 3 226,4% en ligne 14,8 85,2 100,0 27,3 72,7 100,0 33,6 66,4 100,0% en colonne 0,4 7,0 2,0 2,8 17,0 7,1 4,4 18,5 8,9
Total19
575,86
276,825
852,622
388,49
749,632
138,024
527,811
569,136
097,0% en ligne 75,7 24,3 100,0 69,7 30,3 100,0 67,9 32,1 100,0% en colonne 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0
sources : les enquêtes sur la main d'œuvre au troisième trimestre (1985-2004).
Le tableau 1-3 exprime les proportions des individus occupés selon le niveau d’éducation et le
milieu rural/urbain. La figure 1-3 indique que parmi la population active occupée, près de 90 pour
cent, soit 22,71 millions, ont un niveau primaire et inférieur et parmi ces derniers, 80,8 pour cent sont
en milieu rural en 1985. De la même période, le reste des actifs occupés occupe les parts marginales
comprises entre 2 et 6,3 pour cent. On observe un effet de disparité des emplois rural et urbain en
fonction du niveau d’éducation dans la mesure où le secteur rural est largement dominé par les
personnes peu instruites, ayant essentiellement une étude primaire ou sans instruction alors que le
marché urbain englobe des personnes mieux instruites. Le même tableau montre qu’en 1985, ceux qui
ont une éducation secondaire (1er et 2ème cycle) ont majoritairement un emploi en milieu urbain : la part
de ces adultes est de 52,8 pour cent, équivalent à 860 milles personnes, contre 47,2 pour cent en milieu
rural, soit 770 milles personnes. La différence est encore plus remarquable si l’on considère les
diplômés universitaires dont la part est de 85,2 pour cent contre 14,8 pour cent dans la zone rurale.
Malgré une évolution favorable à la croissance des personnes mieux instruites, notamment en milieu
urbain, le nombre de la population avec une étude primaire reste en dessus de l’ensemble des autres
diplômés. La part des actifs occupés qui ont un diplôme primaire et inférieur diminue progressivement
durant les années 1990 et 2000 avant d’atteindre de l’ordre de 62 pour cent en 2004 tandis que le
pourcentage des actifs qualifiés dans les actifs totaux ne dépasse pas 40 pour cent en même année.
Après 15 années, la répartition des travailleurs selon le niveau d’éducation ne change guère la
structure du marché et la majorité des travailleurs sont encore peu éduqués. Cependant, les
changements ont été apportés à la distinction des structures d’emploi urbain et rural. Dans la zone
rurale, le pourcentage des personnes moins éduquées diminue légèrement, il est passé de 80,8 à 78,5
pour cent entre 1985 et 1998, et enfin à 77,2 pour cent en 2004, soit une baisse seulement d’un million
de personnes. L’importance des travailleurs peu qualifiés en milieu rural est un phénomène connu de
la Thaïlande dès lorsque les personnes âgées et moins éduqués sont majoritairement impliquées dans
la production agricole et ont moins de possibilité de partir dans les grand villes. La croissance des
diplômés secondaire et supérieurs est plutôt favorable au développement rural. On observe une hausse
68
sensible des personnes qualifiées qui s’impliquent dans le marché rural. Par exemple, la part des
travailleurs occupés avec une étude secondaire (1er et 2ème cycle) en milieu rural augmente de 47,2 pour
cent, équivalent à 770 milles personnes en 1985, à 62,8 pour cent, soit 4,96 millions de personnes en
2004. D’autres diplômés suivent la même tendance. Le milieu urbain, moins dramatique que le secteur
rural, est aussi dominé par le nombre significatif des travailleurs peu instruits malgré une diminution
continue depuis 1985. Le pourcentage des individus de ce groupe a diminué de 70 pour cent à 44 pour
cent entre 1985 et 2004 alors que la part des diplômés universitaires est passée de manière marginale
de 7 à 9 pour cent durant la même période. En définitive, seul un tiers des actifs occupés ont un niveau
d’éducation secondaire et supérieure en 2004 alors que la pénurie de main d’œuvremain-d’œuvre
commence bien avant les années 1980. Le débat sur la qualification des travailleurs est tout
d’actualité, en particulier en milieu urbain où les industries de productions et de services se
développent rapidement. Pour certains secteurs, le nombre absolu de travailleurs qualifiés restera
insuffisant pour satisfaire les besoins futurs de développement, notamment dans le domaine des
technologies et de la communication qui exigent des travailleurs hautement qualifiés [Makishima et
Suksiriserekul (2003) p.37]. Bien que la part de la population avec une éducation secondaire ait
augmenté progressivement dans le temps, elle semble être inférieure à celle dans les pays voisins.
Ceci conduit à un problème actuel d'éducation en Thaïlande. Il est fréquemment noté par beaucoup
d'observateurs qu’il est l’une des causes principales des limites de capacités de l'économie
thaïlandaise à diversifier son secteur de production [Sussangkearn (1994)]. Le désavantage en termes
de quantité manquée des employés qualifiés se traduit directement par une faiblesse des productivités
de travail. La Thaïlande devrait améliorer la technologie de ses productions en augmentant la
productivité de la main d’œuvremain-d’œuvre et la valeur ajoutée [Banque Mondiale (2001) p.17]. Or,
dans le passé, les processus d’accumulation du capital humain se basent principalement sur
l’apprentissage et les savoirs-faires qui sont généralement non formels. De ce fait, la mise en œuvre du
système efficace de la gestion des ressources humaines est placée en priorité dans le 10 ème plan du
développement économique et social.
Les coûts d’investissement et de la production, supportés notamment par les entreprises
exportatrices, sont infiniment liés au rapport entre les productivités et les salaires. Il est plus coûteux
pour les entreprises lorsque la croissance de productivité est inférieure à la variation des prix de
l’allocation de main d’œuvremain-d’œuvre. Ceci est d’autant moins avantageux pour les investisseurs
étrangers que la productivité est relativement faible en comparaison avec d’autres pays d’accueil. De
plus, pour les entreprises exportatrices domestiques, la hausse du ratio salaire-productivité reflète
directement sur les prix de vente par le biais d’un coût de production élevé. Par conséquent, sur une
scène nationale, les produits proposés sont peu complétif. Cette situation est bien le cas de l’économie
69
thaïlandaise. La compétition sur les coûts du travail provient des pays à revenu moyen comme le
Vietnam et la Chine qui ont plus d’avantages comparatifs non seulement en termes de main
d’œuvremain-d’œuvre bon marché mais également une productivité quasi supérieure. Pour survivre, la
Thaïlande doit se spécialiser sur les produits de haute technologie, non seulement sur les produits
émanant du travail intensif [Sakdina (2004) p. 02]. Pour ce faire, le nouveau défi consiste à améliorer
les productivités du travail. Le tableau A-1-3, reporté en annexe, montre qu’entre 1980 et 1984, un
employé produisait en moyenne près de 11 072 dollars par an de la valeur ajoutée et entre 1995 et
1999, elle a atteint de l’ordre de 19 946 dollars par an. Lorsque l’on compare ces valeurs avec celles
des pays voisins, la Thaïlande est mieux classée loin devant l’Indonésie, la Malaisie et les Philippines
durant ces deux sous périodes considérées: les productivités en moyenne périodiques (1980-1984)
s’élèvent à 3 807, 8 454 et 5 266 dollars américain pour l’Indonésie, la Malaisie et les Philippines
respectivement. Cependant, l’évolution des productivités en Thaïlande semble être moins remarquable
que celles du Singapour, de la Corée du Sud et du Japon. Les productivités de travail en moyenne pour
ces trois derniers augmentent rapidement avant d’atteindre de l’ordre de 40 916, de 40 674 et de
92 582 dollars par an respectivement entre 1995 et 1999 alors que celle de la Thaïlande ne s’élève qu’à
19 946 dollars par an durant la même période. En outre, l’indicateur de la productivité précédemment
présentée est considéré peu fiable dès lors qu’il s’agit de les calculer à partir du nombre de
personnes concernées. Non seulement l’indicateur inclut la totalité des individus économiquement
actifs, y compris sous-emplois, mais il est également influencé par le capital utilisé dans la production.
Il convient par conséquent de raisonner en quantité d’heure du travail. Ainsi, le rapport annuel sur la
compétitivité dans le monde de 1999 (« World Competitiveness Yearbook 1999 ») par la Banque
mondiale (2001) montre une position inférieure de main d’œuvremain-d’œuvre thaïlandaise par
rapport aux pays dans le monde. En effet en Thaïlande, un employé produit une valeur de 5,45 dollars
par heure alors qu’elle est de l’ordre de 31,28 dollars par heure pour un travailleurs aux Etats-Unis, de
25,79 dollars pour le Japon, de 23,79 dollars pour Singapour, de 9,71 dollars pour la Malaisie et de 6,2
dollars pour Philippines [Banque Mondiale (2001) p.12]. En définitive, la faiblesse des productivités
constitue un élément important dans l’attraction des investissements étrangers et la compétitivité
internationale des produits exportés.
La répartition sectorielle des productivités de travail nous permet d’établir des hypothèses
implicites de la dualité des marchés : les secteurs à forte productivité et à faible productivité.
Tableau 1-4: Répartition des productivités de travail selon le secteur en 2002.
PIB (millions baht)Population active
(millions) Productivité (par an et par personne)
Valeur % du PIB Nombre % PIB/actifs PIB ($)/actifs
Agriculture et pêche 514 629,8 10,0 13 612,0 42,4 37 807,1 945,2Industrie extractive 108 161,5 2,1 66,0 0,2 1 638 810,5 40 970,3
70
Industries manufacturières 1 859 780,5 36,3 4 927,0 15,3 377 467,1 9 436,7Constructions 123 875,1 2,4 1 645,0 5,1 75 304,0 1 882,6Electricité, gaz et eau 173 729,5 3,4 98,0 0,3 1 772 750,0 44 318,8Commerce de gros et de détail 809 549,3 15,8 4 688,0 14,6 172 685,4 4 317,1Transports et communications 505 109,5 9,9 1 005,0 3,1 402 596,5 12 564,9Services
Hôtellerie et restauration 199 107,6 3,9 1 918,0 6,0 103 810,0 2 595,3Service social 474 942,8 9,3 3 094,0 9,6 153 504,5 3 837,6Immobilier 206 795,9 4,0 495,0 1,5 417 769,6 10 444,2Banque et finance 145 916,0 2,8 303,0 0,9 481 571,0 12 039,3
Travail familial 5 764,2 0,1 255,0 0,8 22 604,6 565,1Total 5 127 361,7 100,0 32 106,0 100,0 159 701,0 3 992,5Note: la valeur de la productivité per capita pour chaque secteur se définit, dans ce cas particulier, comme un rapport entre la valeur ajoutée produite par le secteur et le nombre des actifs occupés du même secteur. Toutefois, le sous-emploi, étant ignoré dans le calcul, constitue une limite méthodologique d'un tel résultat.
Source: Banque mondiale (2002b).
Le tableau 1-4 montre une répartition des productivités selon les secteurs, calculée par la
Banque mondiale en 2002. On observe une disparité sectorielle des productivités de travail entre d’un
côté les industries à fortes productivité telles que les industries extractives, d’électricité, gaz et eau, de
transport et de communication et les secteurs immobilier, bancaire et financier , et, d’autre part, de
l’autre côté les secteurs à faibles productivités tels que l’agriculture, la construction, commerce,
hôtellerie et restauration, service social et travail familial. En 2002, près de 78,5 pour cent de main
d’œuvremain-d’œuvre, dont 42,4 pour cent sont dans l’agriculture, ont un niveau de productivité très
faible. L’emploi familial génère la plus faible productivité qui est de l’ordre de 655, 11 dollars par ans
par personne tandis qu’un employé dans le secteur d’électricité, gaz et eau produit une valeur de près
de 44 318, 75 dollars par an. Par ailleurs, le débat politique se concentre sur le développement du
secteur manufacturier où la part des valeurs produites dans le PIB atteint près de 36,3 pour cent et qui
engendre près de 15,3 pour cent d’emploi en 2002. Dans les grandes villes, les industries
manufacturières ont un moteur de croissance économique et un créateur d’emploi, notamment des
travailleurs peu qualifiés. Or la productivité de travail dans ce dernier évolue lentement. De plus, une
grande partie de la valeur ajoutée dans ce secteur est dû principalement aux montants en capitaux
dégagés et non pas à l’amélioration du niveau du capital humain [Makishima et Suksiriserekul (2003)
p. 10]. L’amélioration des productivités fait face à des divers obstacles, particulièrement dans un pays
où une base de culture innovatrice de la production est preque inexistante. En fait, les employés sont
peu incités à investir en capital humain, notamment dans le domaine des nouvelles technologies. En
Thaïlande, la plupart de main d’œuvremain-d’œuvre dans les industries de production est entraînées
avec les techniques de productions courantes plutôt que innovatrices …les firmes industrielles ont une
tendance à utiliser des technologies en provenance de l’étranger, limitant ainsi la demande des
technologies locales [Nit (1994)]. Les nouvelles politiques du développement économique des années
2000 consistent alors, d’une part, à réformer le système d’éducation en mettant le contenu intensif
des programmes scientifiques , et, d’autre part, à inciter les travailleurs déjà occupés à acquérir les
nouvelles connaissances basées sur les technologies de production.
71
Tandis que la hausse des productivités de travail semble être insuffisante pour rattraper celles
des concurrents internationaux, l’augmentation des rapports entre les salaires et les productivités
posent un autre problème en termes de coûts de production. En effet, de 1987 à 1996 où l’économie
est en pleine de croissance, la variation à la hausse des salaires réels a dépassé celle des productivités
de travail dans certains secteurs de production [Pitayanon (2002) p.139]. L’accroissement de la
demande de travail dans certains secteurs durant les années 1980 et au début des années 1990 a
provoqué une hausse des salaires pour les travailleurs hautement qualifiés. Non seulement, leur niveau
de rémunérations ont dépassé irraisonnablement celui des personnes à faible qualification, mais les
écarts sont également observés au sein d’un même niveau de qualification durant les périodes
d’expansion économique. Ceci tient au fait que les personnes ayant les mêmes niveaux de qualification
se trouvent dans les secteurs qui sont plus ou moins connus de la croissance, et où la demande de
travail est plus ou moins importante.
Plusieurs travaux empiriques ont avancé les résultats, peu divergeant mais assez distinctif, basés
sur le calcul des taux de rendement privé de l’éducation. En fait, ces derniers s’interprètent comme un
indicateur pertinent mettant en relation fonctionnelle entre les gains et les niveaux d’éducation –
approximé de qualification et donc de productivité – leurs évolutions permettent alors d’expliquer la
justification des politiques économiques. D’une part, l’évolution tendancielle des rendements
contribue à éclairer l’impact de la variation de la demande de travail sur les rémunérations à une
période donnée. Une hausse de la demande provoque une croissance de salaires et donc un
accroissement du taux de rendement. Ce phénomène pourrait très bien, dans certaine mesure,
s’enchaîner par un dépassement des salaires sur les productivités correspondantes. D’autre part,
l’appréciation des rendements privés joue un rôle primordial dans les décisions de politiques
économiques en matière d’investissement de l’éducation au niveau national. L’économie est plus
efficiente lorsque les rendements des niveaux d’éducation, dans lesquels l’Etat décide d’investir de
plus, sont relativement élevés. Les études empiriques suggèrent une vision plus ou moins large des
relations gains-éducation en Thaïlande. En effet, Hawley (2000) montre que le taux de rendement,
estimé à l’aide d’une fonction de gains de Mincer (1958, 1974) est globalement stable durant la
période allant de 1985 à 1998 : ils gravitent autour de 10 à 11 pour cent pour l’ensemble des individus
considérés38 [Hawley (2000) p. 278]. Les écarts de rendements de l’éducation entre les hommes et les
femmes diminuent considérablement durant ces périodes. Bien que les rendements de l’éducation
soient pratiquement stables entre 1985 et 1998, les résultats démontrés par Blunch(2004) sont en
désaccord avec les analyses de Hawley. Blunch (2004) avance plusieurs résultats empiriques en
corrigeant les effets d’endogénéité du capital humain. Tout d'abord, malgré la crise asiatique des 38 Cette analyse n’inclut que les salariés dans un secteur formel. Par conséquent, les travailleurs dans le secteur agricole et informel sont automatiquement exclut.
72
années 1990, en Thaïlande, les rendements de l'éducation sont substantiels au cours de la période
étudiée. Cependant, les rendements sont généralement considérablement fluctuants. De plus, les
rendements atteignent leur maximum en 2002, sauf le niveau d’études universitaires, et diminuent
ensuite. Par ailleurs, ces tendances principales ne devraient pas dissimuler le fait que les rendements
de l'éducation primaire et inférieure restent inchangés au cours de cette période. Ce résultat s’explique
tout simplement par une stagnation de la demande des travailleurs qualifiés [Blunch (2002 p.19-20)].
Par conséquent, les faibles rémunérations dans certains segments du marché sont associées, d’une
part, à l’environnement de concurrence intensive du marché , et, d’autre part, à l’offre excédentaire
de travail peu qualifié. Par rapport aux hommes, les femmes ont un rendement supérieur pour un
même niveau d’éducation. Ceci est dû aux faibles montants du stock en capital humain et à
l’importance marginale de la productivité des femmes. L’écart de rendements entre hommes et
femmes suit une tendance à la baisse en passant de 33 pour cent en 1994 à 24 pour cent en 2002
[Blunch (2004) p. 490].
Le phénomène de la migration, comme facteur d’ajustement du marché du travail en Thaïlande,
est également pris en compte dans l’analyse des rendements de l’éducation par Yamauchi (2001).
Selon ce dernier, le rendement de l’éducation pour les migrants d’origine rurale, vivant en ville moins
de 5 ans, est inférieur à celui des personnes d’origine urbaine puisque ces derniers sont supposés vivre
depuis 9 ans en ville et ont plus d’expériences, entraînant alors un rendement plus important. Cette
étude suggère que pour les personnes immigrées, l’éducation et l’expérience dans le marché
destinataire jouent un rôle complémentaire quant à l’impact positif sur les salaires. En effet, en
ajoutant la variable année d’éducation*expérience (année d’éducation multipliée par l’année
d’expérience potentielle) dans la fonction de gains, le taux de rendement de l’éducation a diminué
considérablement: de 7,1 à 3,5 pour cent pour l’ensemble des échantillons entre 1994 et 2002. Cela
signifie que l’éducation et l’expérience sont visiblement complémentaires [Yamauchi (2001) p.505].
Le processus d'urbanisation engendre également des différentiels de revenu au sein d’une zone urbaine
aussi bien qu'entre les milieux ruraux et urbains. Cette évidence empirique montre qu’il existe une
discrimination économique contre les migrants : l’accès à certains secteurs dont les emplois sont
mieux rémunérés exige certaines conditions particulières : connaissance des villes de destination ou
possession des réseaux sociaux etc. Par conséquence, ces dernières renforcent des barrières à l’entrée
de certains segments du marché et dissimulent les effets positifs de l’éducation sur les salaires.
La différence de rendements sociaux entre les études secondaires générales et professionnelles
fait l’objet d’un débat de politiques récent à l’égard des décisions d’investissement en éducation du
pays. Les formations générales et professionnelles répondent aux besoins spécifiques des secteurs
73
publics et privés mais leurs taux de rendement ne sont pas tout à fait égaux. En effet, en 1994, la
Commission nationale de l’Education, dirigée par le Ministère de l’Education, a présenté un taux de
rendement du niveau secondaire de la filière professionnelle qui s’est élevé à 7,2 pour cent tandis que
celui de l’éducation secondaire générale n’a été que de l’ordre de 2,4 pour cent [Moock (1996)]. Aussi
tôt, Moenjak et Worswick (2003) évoque au contraire que le rendement privé des générales est
largement supérieur à celui des études professionnelle en raison de l’accroissement de la demande du
travail qualifié. La Banque Mondiale (2001) propose un argument selon lequel ces divers résultats sont
peu concluants quant à la détermination des montants de rendements de ces filières [Banque mondiale
(2001) p. 17]. Enfin, Gill et al. (2000) suggère de manière plus réaliste que les stratégies
d’investissement en éducations générale ou professionnelle devraient être conduites sur une base du
niveau de compétences de la population et de la meilleure connaissance de la direction du changement
économique du pays.
Durant les années 1980 et 1990, l’excédent de l’offre de travail peu qualifié favorisé par une
mobilité rurale vers urbaine accentue les écarts salariaux en milieu urbain. Parmi les personnes
immigrées, une part substantielle se dirige vers des emplois peu rémunérés et pénibles. Maint
individus trouvent un emploi à Bangkok dans le secteur manufacturier, les services dans les petites et
moyennes entreprises, souvent dans les usines, les hôtelleries, les restaurations, les conducteurs de taxi
et vendeurs de rue. La majorité des migrants, peu qualifiés, trouve directement un emploi dans le
secteur industriel comme le textile, la construction et les produits alimentaires par le biais des réseaux
sociaux et familiaux [Sakdina (2004) p.3-4]. L’explosion de l’urbanisation, consécutivement à l’exode
rural et au développement industriel, favorise une dynamique de plus en plus complexe des marchés
du travail urbains. La montée des personnes sans emploi, sous emplois et l’importance du secteur
informel sont les conséquences des fonctionnements dynamiques des marchés segmentés en milieu
urbain.
B. Marché du travail urbain : chômage, sous emplois et économie informelle.
Il existe un accord commun selon lequel le marché du travail urbain en Thaïlande se caractérise
par une forte dualité formelle-informelle. Le secteur formel contient une grande partie des emplois
mieux rémunérés, la stabilité d’emploi et les meilleures conditions de travail. Les salariés sont
généralement protégés par la législation du travail telle que la protection sociale liée au travail,
l’indemnité de chômage et d’autres avantages. La particularité du secteur informel tient au fait que ce
dernier est quasiment rempli par les emplois indépendants et les emplois familiaux non payés,
généralement non couvert par les règles légales du marché. Cette structure duale conduit aux résultats
74
du marché particulièrement peu connu : accroissement des personnes sans emploi, notamment les
mieux éduquées, importance des sous emplois, persistance des inégalités d’emploi et de salaires etc.
L’accès à certains emplois mieux rémunérés au sein même du secteur formel se révèle inaccessible
pour certains individus, dû à l’existence des barrières à l’entrée. Nous sommes amenés alors à nous
interroger sur les dynamiques du marché urbain permettant la transposition des marchés segmentés, et
sur l’influence des mécanismes institutionnels sur la détermination de quantité d’emploi et de salaires.
a. Caractéristiques d’emplois et demande de travail dans les zones urbaines
La croissance d’emploi dans une zone urbaine est associée à l’expansion des activités de
production, en particulier autour de la capitale économique du pays – Bangkok et des agglomérations.
A partir des années 1980, une pénurie des personnes qualifiées est connue de la plupart des entreprises
en villes, dont leur base de production est principalement fondée sur l’utilisation intensive des
technologies incorporées. L’offre du travail qualifié se révèle insuffisant pour répondre à des besoins
spécifiques. La faiblesse de l’offre du travail qualifié a provoquée une hausse des salaires dans certains
secteurs. Par conséquent, l’inégalité salariale prend son ampleur depuis la fin des années 80 [Pitayanon
(2002) p.23-24]. Comme précédemment cité, le comportement d’offre de travail dans les zones
urbaines a un caractère spécifique quant aux différents niveaux d’éducation. On assiste à une
polarisation de quantité d’offre : les taux d’offre des diplômés primaire et inférieur et des personnes
ayant un niveau Bac+ 2 et universitaires dépassent ceux des individus ayant une étude secondaire.
L’accès aux marchés du travail urbain pour les originaires ruraux exige non seulement un capital
humain mais également capital social et les richesses familiales nécessaires au déplacement éventuel
d’une ville à l’autre. Certains individus sont contraints de travailler en milieu rural lorsque leur famille
n’est pas en mesure de supporter les coûts élevés relatifs à la mobilité géographique. Par conséquent,
les conditions d’offre de travail sont intimement liées aux barrières à l’entrée de certains types de
marchés en milieu urbain.
Les comportements d’offre doivent s’appréhender en relation avec un caractère dual des
marchés, que nous allons développer de manière approfondie dans une partie qui suit. En fait, l’offre
et la demande de travail se joignent simultanément grâce aux mécanismes spécifiques des marchés
plus ou moins accessibles. Sussangkarn (1987) propose un schéma de la structure d’emploi en milieu
urbain de manière suivante :
Figure 1-5 : Structure du marché du travail urbain.
75
Population active :
qualifié et peu qualifié
Source : Sussangkarn (1987).
Les fonctionnements dynamiques des marchés peuvent être décrits par une double opération.
En premier lieu, s’agissant des travailleurs peu qualifiés, migrants ou non, les opportunités d’emploi
dépendent des conditions économiques favorables à l’accès aux emplois désirés. S’ils ne trouvent pas
un emploi dans le secteur d’activité formelle, c’est qu’ils sont amenés à travailler dans le secteur
moins rémunéré – le marché informel. Etre en situation de chômage est un synonyme de perte de
revenus pour ces derniers, tous types d’emploi qui créent les revenus sont, pour ceux, bénéfiques tout
en attendant les meilleures occasions d’accéder au marché formel. Contrairement à la situation dans la
quelle les personnes de la première catégorie font face, les individus qualifiés et bien formés seront en
position d’attente – chômage involontaire – si le secteur formel ne leur permet pas de trouver un
emploi. Les individus ayant déminé une étude supérieure sont généralement issus des familles aisées,
ils peuvent alors compter sur les aides financières de leur famille en attendant de trouver un poste dans
le secteur formel. Ceci n’est pas le cas pour les personnes peu qualifiées qui sont contraintes
d’accepter n’importe quel type d’emploi contre un certain montant de revenus.
En deuxième lieu, malgré l’importance d’offre de travail dans les grandes villes,
particulièrement les mieux éduqués, il existe plusieurs obstacles dans la recherche d’emploi. Il s’agit
des facteurs socio-éconoliques qui constituent visiblement les barrières à l’entrée. Sussangkarn (1987)
suggère une vision plus large relative à leur existence. (i) les travailleurs d’homme mieux instruit, non
immigrés, ont plus de chance d’être recrutés dans le marché formel; (ii) les meilleures opportunités
d’emploi proposées et une longue relation d’emploi prévalent sous certaines conditions telles que les
demandeurs doivent vivre en villes pendant une certaine année et avoir certaines qualifications. La
raison pour laquelle le recrutement est au profit des personnes d’origine urbaine tient au fait que le
risque lié au changement d’emploi est relativement faible par rapport aux travailleurs d’origine rurale
qui tentent tôt ou tard de quitter l’emploi courant pour aller vivre près des leurs. (ii) le rôle des emplois
76
Marché informelChômage
Marché formel
Trouver un emploi
Sans emploi
En attendant pour trouver un emploi
publics, qui est supposé déterminant dans la conduite des politiques d’emploi, est marginalisé par une
réduction progressive de création d’emploi. Les établissements publics occupent trois fois moins
d’emplois que le secteur privé.
La capacité de l’économie à utiliser ses ressources en main d’œuvremain-d’œuvre en milieu
urbain peut être appréhendée par le calcul des taux d’emploi selon le statut d’emploi.
Tableau 1-5: Taux d'emploi selon le statut du travail et la taille de firme (1990-2004).1985 1990 1995 1998 2000 2003 2004
Statut du travail Employeur 2,0 2,3 2,6 2,6 2,6 3,5 3,2Employé public et semi public 10,8 11,0 9,9 11,1 10,8 9,3 9,4Employé privé 26,9 30,0 32,6 30,9 32,1 34,3 35,1Indépendant(1) 16,2 17,2 16,8 15,7 16,1 16,0 17,0Travail familial non rémunéré 13,1 13,0 11,0 10,5 9,8 10,1 8,9
Taille de firme(2) < 9 - 42,8 39,6 37,0 37,3 - -10-20 - 4,8 4,8 4,8 4,5 - -21-50 - 4,8 5,8 4,0 3,8 - -51-100 - 2,8 3,4 2,7 2,6 - -> 100 - 7,0 9,6 11,1 12,5 - -inconnu - 11,3 9,9 11,1 10,8 - -Total 69,0 73,5 73,1 70,7 71,4 73,2 73,5
Notes: le taux d'emploi se définit comme un rapport entre le nombre d'actifs occupés et la population en âge de travailler (de 15 à 64 ans); (1) les emplois indépendants sans employés ; (2) les données sur la taille de firme ne sont pas disponibles dans l'enquête sur la main d'œuvre en 1985 et celles des années 2003 et 2004 ne sont pas représentatives puisqu'une grande partie est inconnue de l'enquête.
sources : les enquêtes sur la main d'œuvre au troisième trimestre (1985-2004).
Le tableau 1-5 démontre la proportion des personnes actives employées selon les statuts de
travail – employeur, employé public, privé, travail indépendant et familial non rémunéré – et la taille
de firme. Le salariat concerne principalement les employés publics et privés alors que les emplois
indépendants sont les petites entreprises souvent sans employés. L’hypothèse des marchés du travail
segmentés est sans doute pertinente mais la question est savoir si parmi les employés salariés, il existe
des facteurs économiques, sociaux et institutionnels qui conduisent à des pratiques de discrimination
ou de l’exclusion.
En premier lieu, malgré une évolution favorable des créations d’emplois en milieu urbain, le
secteur public a une capacité limitée quant à l’absorption de quantité d’offre excédentaire. Le taux
d’emploi joue à la hausse, passant de 69 pour cent en 1985 à 73,1 pour cent en 1990, soit une hausse
de 1,7 millions de personnes employées en 15 ans, avant d’atteindre son minimum en 1998 de 70,7
pour cent. Cela est dû à une récession de l’économie en période de crise. A partir du début des années
2000, l’emploi reprend son chemin de croissance. Dans certaine mesure, les politiques d’emplois
publics jouent un rôle régulateur. En fait, entre 1985 et 1990, le taux d’emploi dans le secteur public
reste presque constant, autour de 10,8 et 11 pour cent. Cependant en période de crise, l’Etat engage
une hausse de quantité d’emplois afin d’alléger les effets de chômage. De fait, le taux d’emploi est
passé de 9,9 à 11,1 pour cent entre 1995 et 1998 pour ce secteur. Le développement des activités
77
économiques dans les villes se reflète par une expansion de la production industrielle et de l’emploi
engendré. Ainsi, les employés dans le secteur privé ne cessent d’augmenter. La part des actifs occupés
par rapport à l’ensemble dans le secteur privé est passée de 26,9 pour cent en 1985 à 32,6 pour cent en
1995. La crise économique entraîne une chute brutale du taux d’emploi qui est de l’ordre de 30,9 pour
cent en 1998. La croissance d’emploi est reprise à partir de 2000 : le taux d’emploi augmente de 32,1 à
35,1 pour cent entre 2000 et 2004. En même temps, près de 30 pour cent des actifs occupés ne sont pas
concernés par le salariat. Parmi ces derniers, 16,2 pour cent ont un emploi indépendant en 1985. Ce
pourcentage augmente durant la fin des années 1980 avant de se réduire à 15,7 pour cent en période de
crise. Le taux d’emploi du travail familial joue à la baisse entre 1985 et 2004, en passant de 13,1 à 8,6
pour cent. Au total, malgré une hausse continue des personnes employées dans le secteur privé, plus
qu’un quart de la population n’est pas concerné par le salariat. Le problème d’accès à l’emploi urbain
se pose sur la charge du secteur privé.
En deuxième lieu, la taille de firme joue un rôle déterminant dans les processus dynamiques de
la segmentation. Les grandes firmes sont souvent caractérisées la présence des unions syndicales qui
renforcent les pouvoirs des employés. L’internalisation du marché est alors permise par une structure
de négociation collective de salaires et de l’emploi. A l’opposée, nombre de petites firmes, formelle ou
informelle, détermine la quantité d’emploi et les rémunérations par une base de discrétion par laquelle
les employés n’ont que peu de pouvoir de négociation. Le tableau 1-5 suggère que près de 42,8 pour
cent d’actifs ayant un poste en 1990 se trouvent dans les petites entreprises de 1 à 9 personnes, y
compris des personnes avec un emploi indépendant, alors que seul 7 pour cent d’actifs occupés sont
dans les entreprises dont la taille est plus de 100 employés. L’évolution de la structure d’emploi urbain
change au cours de ces quinze années. Ainsi, le taux d’emploi des personnes employées dans les
entreprises de 1 à 9 personnes a réduit de 42,8 à 37,3 pour cent entre 1990 et 2000 alors que celui des
actifs dans les grandes entreprises de plus de 100 employés augmente de 7 à 12,5 pour cent durant la
même période.
L’enquête sur la demande de travail effectuée, pour toute première fois, par Le Bureau de
Statistique Nationale en 2005 conduit à un certain nombre d’éléments susceptibles de constituer une
hypothèse de l’existence des « portes d’entrée » de certains emplois mieux rémunérés.
Tableau 1-6: Demande de travail selon profession, âge, niveau d'éducation et de salaire en 2005. Nombre de personnes %Professions
Manager et personnels de haute qualification 38 774 8,7Personnels administratifs et vendeurs 60 613 13,6Ouvriers et employés peu qualifiés(1) 346 294 77,7
Age <25 169 985 38,125-34 229 817 51,6
78
35-44 7 810 1,845-55 37 550 8,4>55 519 0,1
Niveau d'éducation Secondaire et inférieur 299 943 67,3Secondaire professionnel 25 849 5,8Bac+2 42 340 9,5Universitaire 77 548 17,4
Salaires mensuels (en euro)(2) <145 303 057 68,0145-311 106 270 23,8312-415 5 502 1,2>415 30 852 6,9
Total 445 681 100,0Notes: (1) la catégorie d''emplois ouvriers et peu qualifiés contient les postes qui exigent peu de compétences spécifiques à l’emploi par exemple le travail en usine ou les surveillances ; (2) 1 euros = 48,188, le 24 septembre 2007.
Source: L'enquête sur la demande de travail, Bureau National de Statistique (2005).
Les données sont collectées auprès de 31565 établissements privés dont la taille de firme est
supérieure à 10 personnes. Il s’agit des grandes entreprises industrielles de production, situées
essentiellement en milieu urbain. En effet, parmi 445 681 postes offerts entre 2004 et 2005, une
grande proportion est associée aux emplois peu qualifiés et très peu rémunérés. Le tableau 1-6 montre
que 77,7 pour cent d’emplois offerts concernent les ouvriers et les employés peu qualifiés et 68 pour
cent d’emplois proposés donnent lieu à un niveau de salaires très faible – moins de 145 euros par
mois. Les diplômés secondaires et inférieurs sont les plus demandés, la proportion s’élève à 67,3 pour
cent de la totalité de demande. Certains postes vacants mieux rémunérés sont relativement limités,
souvent attribués aux personnes mieux instruites et ayant plus d’expériences. Le même tableau montre
que seul 8.7 et 13,6 emplois sont proposés pour les managers et les personnels de qualification, et les
personnels administratifs et les vendeurs, respectivement. La proportion des diplômés universitaires
exigés est moins d’un quart de celle des personnes peu instruites. Par conséquent, seul 7 pour cent de
quantité de travail demandée aura une rémunération supérieure à 415 euros par mois.
Une leçon tirée de la crise éclaire un aspect particulier du côté de la demande de travail. On
assiste à une flexibilité de l’emploi et du salaire permettant de faciliter l’ajustement du marché du
travail à la crise économique et de contribuer à atténuer ses effets négatifs. En fait, quand les salaires
sont flexibles à la baisse, le chômage sera peu sensible à un choc économique. Dans le cas contraire,
lorsque les salaires sont rigides, un phénomène de licenciement de masse sera inévitable. La flexibilité
des salaires est toutefois défavorable aux pauvres dans le cas d’une réduction artificielle et souvent
brutale des salaires. Si les travailleurs sont en mesure d’accepter de garder l’emploi actuel, ils vont
certainement subir une conséquence de cette baisse de revenu ou du nombre d’heures du travail
[Medhi (2006) p. 44]. Trois groupes de professions ont subit une baisse considérable des salaires : le
déclin des salaires était de l’ordre de 17 pour cent pour les travailleurs dans la production industrielle,
4 pour cent pour les employés de bureau et 1,5 pour cent pour le reste [Banque Mondiale (2000) p.28]
79
La flexibilité observée des salaires pendant la crise semble être produite majoritairement chez
les jeunes ouvriers et les nouveaux entrants du travail. Une telle situation n'est peu inconnue lorsqu’il
existe une forte rigidité de salaires chez les personnes les plus âgées et les ouvriers les plus
expérimentés [Horton et Mazumdar (1999)]. Cet argument est en accord avec l’analyse de la Banque
mondiale dés lorsque cette dernière conduit un résultat selon lequel l’ajustement du marché s’effectue
par le prix, non pas par quantité. En effet, la Banque Mondiale (2002a) observe que pendant la crise
économique, une quantité accrue du nombre de chômeurs a été supérieur à celle d’une baisse du
nombre d’emplois. Ceci signifie qu’en Thaïlande, une grande partie d’emplois n’a pas été détruite
durant la crise économique puisque les chômeurs proviennent principalement des nouveaux entrants
sur le marché. La flexibilité des salaires contribue alors à atténuer les effets négatifs du chômage.
Les activités économiques en milieu urbain accompagnent une croissance sans précédent de
l’emploi et su salariat depuis des années 1980. Toutefois, le marché du travail urbain subit à plusieurs
fluctuations économiques et sociales conduisant à une structure plus complexe du marché. Dans cette
direction, il serait intéressant d’incorporer une étude approfondie portant sur la situation de chômage,
sous emplois et l’informalité du marché dans les zones urbaines afin d’appréhender les
fonctionnements dynamiques du marché.
b. Chômage et sous-emploi en milieu urbain
Les économies de la région du sud d’ouest asiatique ont un taux de chômage très faible par
rapport aux pays du même niveau de développement. Michaelowa et Waller (2003) ont effectué une
analyse comparative des conditions du marché du travail relatives au chômage, aux sous-emplois et
aux marchés informels parmi les pays non OCDE. Selon cette étude, les taux de chômage dans les
pays du sud d’ouest asiatique pivotent autour de 1,5 et 2,5 pour cent en 1998 alors que les pays en
Amérique du sud tel que la Brésille, le Chili, le Pérou et l’Uruguay ont des taux de chômage compris
entre 4 et 6 pour cent [Michaelowa et Waller (2003) p. III]. Cependant, le rapport montre une
dissimilitude de la réalité des marchés du travail. Particulièrement en Thaïlande, la situation de sous-
emploi et la montée du marché informel sont souvent un synonyme de la pauvreté et de la faiblesse de
salaires, notamment dans les grandes villes.
La particularité du chômage en milieu urbain est que le taux de chômage parmi les mieux
éduqués est relativement élevé. Cela crédibilise l’hypothèse de l’existence du marché du travail
segmenté puisque les personnes qualifiées doivent faire face aux difficultés d’accès au marché formel
ou aux emplois mieux rémunérés alors que les personnes peu qualifiées doivent accepter tous types
80
d’emplois qui engendrent un flux de revenus positifs pour répondre aux besoins de leur famille. Ce
phénomène, tout à fait d’actualité, devient prévisible depuis les années 1980.
Tableau 1-7: Taux de chômage selon l’âge, le niveau d'éducation et la région dans les zones urbaines (1985-2004). 1985 1990 1995 1998 2000 2003 2004Classes d’âge
15-19 8,5 6,9 2,4 9,5 5,7 8,9 5,420-24 10,3 4,7 2,6 8,9 7,3 6,2 4,325-34 4,0 2,2 1,0 4,5 2,5 1,9 1,935-54 1,7 0,7 0,4 2,1 1,5 0,9 0,8>55 1,0 0,4 0,4 1,5 0,5 0,2 0,5
Niveau d'éducation Sans instruction 1,4 1,3 0,4 1,4 0,5 0,9 0,4Primaire 3,3 1,9 0,7 2,9 1,8 0,9 1,3Secondaire (1er cycle) 6,2 3,1 1,1 4,2 2,6 2,7 2,2Secondaire (2ème cycle) 8,2 5,3 1,3 5,2 3,8 2,1 2,3Secondaire professionnel(1) 9,0 3,4 2,5 6,6 3,8 1,5 1,4Diplôme (Bac+2) 4,5 1,9 1,6 1,5 1,4 2,8 1,5Universitaire 8,7 2,4 1,2 6,5 4,1 4,1 1,9
Région Bangkok et métropolitaine 4,6 2,1 0,7 4,6 3,0 2,2 1,5Région centre 4,1 1,8 0,9 3,3 1,7 2,1 1,9Nord 3,7 2,9 1,2 4,1 2,2 1,9 1,7Nord-est 5,9 3,4 1,7 4,3 3,4 1,4 1,4Sud 3,2 2,4 1,0 2,9 2,4 2,3 1,7
Total 4,4 2,4 1,0 4,1 2,6 2,0 1,6Notes: le taux de chômage est le pourcentage des chômeurs dans la population active (actifs occupés et chômeurs), dans le cas du taux de chômage par groupe, on calcule le rapport entre les chômeurs appartenant à ce groupe et la population active comprise correspondant à ce même groupe ; (1) le niveau d’étude secondaire second cycle de filière professionnelle.sources : les enquêtes sur la main d'œuvre au troisième trimestre (1985-2004).
Dans le tableau 1-7, le taux de chômage urbain est considérablement réduit entre 1985 et 1995 :
il est passé de 4,4 pour cent, soit 3 millions de personnes, à 1 pour cent, équivalent à moins de 100
milles personnes. Cependant, la crise économique de 1997 a plongé des millions de travailleurs dans
une situation sans emploi. Le taux de chômage en milieu urbain augmente rapidement avant
d’atteindre de l’ordre de 4,1 pour cent en 1998, soit une hausse de 315 milles du nombre de chômeurs
entre 1995 et 1998. Le taux de chômage diminue en fonction d’âge. Le tableau 1-7 montre que la
proportion des personnes sans emploi âgées entre 20 et 24 ans parmi la population du même groupe
s’élève à 10,3 pour cent en 1985, ce pourcentage est substantiellement réduit en espace de 15 années.
Parmi les personnes mieux éduqués, notamment diplômés secondaire second cycle, professionnel et
universitaires, les taux de chômage sont particulièrement élevés : 8,2 %, 9 % et 8,7 % respectivement.
Malgré une réduction des taux de chômage durant la période considérée, la structure globale semble
inchangée dans la mesure où les taux de chômage parmi les personnes qualifiées restent significatifs.
Le marché du travail urbain se caractérise alors par un déséquilibre entre l’offre et la demande en
termes de qualification. A travers de différentes régions, le chômage a été dramatique dans la région
du Nord-est en 1985, son taux a été le plus élevé, de 6 pour cent contre 3,2 pour cent pour la région du
Sud. Cependant, la récession économique en 1998 a brutalement inversé la tendance, c'est-à-dire que
le taux de chômage à Bangkok et ses agglomérations a dépassé celui du Nord-est : 4,6 pour cent contre
4,3 pour cent en 1998. La reprise des activités économiques à partir de l’année 2000 a modifié la
81
configuration du chômage. Ainsi, en 2004, les taux de chômage dans les différentes régions sont
quasiment égaux, sauf celui de la région du Centre de 2 pour cent qui reste relativement important.
La question du chômage des personnes qualifiées est étroitement liée au problème des barrières
à l’entrée du marché formel et aux difficultés de recrutement des entreprises. Les années d’après la
crise économique sont marquées par une présence des mesures de sélection intensive d’embauche dans
un marché du travail formel, notamment pour les jeunes diplômés et les personnes récemment
licenciées [Machikita (2005)]. L’enquête sur la demande de travail, effectuée en 2005, montre que
parmi 31565 entreprises dont la taille est supérieure à 10 personnes, la majorité, 26,1 pour cent,
déclarent que les compétences spécifiques à l’emploi proposé sont une raison principale des difficultés
de recrutement au cours de six derniers mois, suivent de manque de qualification comme raison
principale (23,3 pour cent des entreprises) [Tableau A-1-3 en annexe]. La spécificité du capital humain
joue alors un rôle incomparable quant au recrutement d’emploi. Le problème de salaires insuffisants
touche près de 22,6 pour cent des entreprises considérées. 16,4 pour cent déclarent que les demandeurs
ont peu d’expérience professionnelle. Les entreprises recourent à plusieurs méthodes de recrutement,
formelles et non formelles. Les principaux facteurs permettant d’accéder aux emplois sont constitués
du capital social et des réseaux sociaux. Le tableau A-1-3, reporté en annexe, suggère que les
méthodes de recrutement se résument à deux grandes opérations : l’une concerne le recrutement
directement à l’entreprise (42 pour cent) et l’autre permet d’embaucher les employés par les réseaux
sociaux (36,7 pour cent). Il convient de noter que ces deux grandes méthodes sont appliquées aux
travailleurs peu qualifiés, notamment les réseaux sociaux qui sont connus des personnes espérant de
trouver un emploi dans le secteur informel. Les meilleurs emplois sont proposés de manière formelle,
c'est-à-dire par les agents de recrutement public ou privé, dans les sites de recrutement ou dans les
journaux. La méthode la plus efficace pour rechercher des employés hautement qualifiés consiste à
proposer les salaires les plus élevées directement aux établissements scolaires, 5,2 pour cent
d’entreprises recourent à cette pratique. C’est l’une des processus de recrutement appliqués par les
grandes entreprises afin de constituer un ensemble de salariés hautement qualifiés, cela favorise
inévitablement l’internalisation du marché du travail [Harakunarak (1985)].
En définitive, la situation sans emploi et les difficultés d’accès au travail sont des causes de la
pauvreté et de la précarité. De bas taux du chômage parmi les personnes non qualifiés s’expliquent
simplement par l’existence de la pauvreté, par laquelle on s'attende à ce que la pauvreté oblige des
personnes à accepter n'importe quel type d'emploi même s’il ne correspond pas aux désires
personnels et aux qualifications. Les rémunérations sont souvent très faibles, instable et sont
généralement en échange de quantité de travail de quelques heures par mois. [Michaelowa et Waller
82
(2003) p. 19-25]. Par conséquent, la faiblesse du taux de chômage se cache à la situation de sous
emplois.
La définition des personnes en sous emploi préconisée par le BIT concerne « toutes les
personnes pourvues d’un emploi, salarié ou non, qu’elles soient au travail ou absentes du travail, qui
travaillent involontairement moins que la durée du travail dans leur activité et qui étaient à la
recherche d’un travail supplémentaire ou disponibles pour un tel travail durant la période de
référence » [BIT (1998)]. Basé sur cette définition, est construit l’indicateur de sous emploi à partir de
données d’enquête sur la main d’œuvremain-d’œuvre. En fait, cette dernière contient les informations
nécessaires à l’estimation des personnes sous-employées telles que les heures de travail
hebdomadaires et les heures hebdomadaires additionnelles désirées par l’individu occupé. Les
personnes en sous-emploi englobent alors les actifs occupés qui ont le temps de travail moins qu’a fixé
la législation du travail et qui ont déclaré d’avoir un temps libre disponible pour travailler plus. Dans
le cas de la Thaïlande et dans la limite des données disponibles, nous sommes amenés à considérer les
personnes occupées ayant moins de 44 heures de travail hebdomadaires39 et ayant des heures
disponibles pour travailler davantage comme étant des employés en sous-emploi. A la lecture du
tableau A-1-5, rapporté en annexe, le nombre des personnes sous employées se réduit entre 1985 et
2004. Le taux de sous-emploi, défini comme un rapport entre le nombre des personnes en sous-emploi
et celui des actifs occupés, diminue de 4,5 pour cent en 1985 à 0,8 pour cent en 2004. Cependant, une
hausse brutale est constatée entre 1998 et 2000, consécutive à la contraction de l’économie à cause de
la crise. Il s’élève à près de 3,4 et 3,1 pour cent en 1998 et 2000. La situation sous-emploi touche
majoritairement les moins diplômés et les travailleurs d’homme. Trois quarts de personnes en sous-
emploi concernent les individus ayant un niveau d’éducation primaire au cours de ces quinze années
considérées. L’écart du nombre des actifs en sous-emploi entre les hommes et les femmes reste
pratiquement constant : plus de 57 pour cent sont les hommes et 42 pour cent concernent les femmes.
Le sous-emploi touche toutes les classes d’âge mais il est plus prononcé pour les personnes âgées entre
25 et 54 ans. Plus de 70 pour cent des personnes sous-employés se trouvent dans cette tranche d’âge.
S’agissant du taux de sous-emploi, indiqué en fonction des caractéristiques individuelles, la probabilité
de se trouver en sous-emploi est sensiblement forte chez les hommes que chez les femmes, exception
faite pour les années de crise: 4,7 pour cent contre 4,3 pour cent pour les femmes en 1985 et 3,2 contre
3,7 pour cent pour les femmes en 1998. De manière tout à fait inattendu, les actifs diplômés primaire
et inférieur, et universitaires concernent l’essentiel du sous-emploi et leur taux de sous-emplois est
relativement élevé durant la période considérée. En fait, parmi les moins éduqués, c'est-à-dire les
personnes ayant un niveau d’étude primaire et sans instruction, les taux de sous-emplois s’élèvent à 39 La législation du travail a fixé 44 heures de travail hebdomadaire pour les emplois au bureau et 48 heures pour le travail en usine.
83
4,7 et 3,8 pour cent, respectivement en 1985. Ces pourcentages ont considérablement diminué avant
d’atteindre 1,2 et 2,2 pour cent, respectivement en 2004. Les mieux éduqués tels que les diplômés de
Bac+2 et universitaires qui désirent de travailler davantage sont près de 7 et 4,1 pour cent de
l’ensemble des actifs occupés ayant une étude Bac+2 et universitaire, respectivement en 1985. L’écart
de taux de sous-emploi entre les moins et les meilleurs instruits et les individus qui ont un niveau
d’étude secondaire se creuse très visiblement en période de crise économique : 3,8 et 3,4 pour cent
pour les deux premiers groupes contre 2,7 pour cent pour les actifs ayant atteint une étude secondaire
(1er et 2ème cycle).
Certes, la présence du sous-emploi est l’une des fondamentales en matière de politiques de
l’emploi. Mais, la comparaison internationale des sous-emplois place la position du marché de la
Thaïlande en dessus des autres pays. Ainsi, en 1998, les taux de sous-emploi en Malaisie, en Indonésie
et encore au Brésil ont dépassé celui de la Thaïlande : 6,62, 9,74 et 18,34 pour cent dans les trois pays
mentionnés contre 2,74 pour cent pour la Thaïlande [Michaelowa et Waller (2003) p. 23].
L’inquiétude de la situation d’emploi relative à la pauvreté et la vulnérabilité se porte à l’état actuel
sur l’informalité du marché du travail.
c. Marché du travail informel
Bien que l’expansion des activités économiques du pays se repose sur les grandes échelles de
production dont la croissance se base sur les technologies très avancées, nombre de travailleurs est
amené à chercher un emploi dans les petites entreprises informelles pour survivre leurs besoins. De
ce fait, le questionnement empirique et statistique de l’informalité permettra d’appréhender
l’ampleur et la spécificité du marché informel, particulièrement très étendu en Thaïlande.
Le concept de « secteur informel » a été introduit pour la première fois par Hart (1971). En
1993, à la 15ème Conférence internationale de la Commission Internationale de la Santé au Travail
(CIST), le B.I.T propose une définition du secteur informel qui peut être décrit, d’une façon générale,
comme un ensemble d’unités produisant des biens et services en vue principalement de créer des
emplois et des revenus pour les personnes concernées. Ces unités, ayant un faible niveau
d’organisation, opèrent à petite échelle et de manière spécifique, avec peu ou pas de division entre le
travail et le capital en tant que facteur de production. Les relations d’emplois, lorsqu’elles existent,
sont surtout fondées sur l’emploi occasionnel, les liens de parenté ou les relations personnelles ou
sociales plutôt que sur des accords contractuels comportant des garanties en bonne et due forme .
84
[BIT (1993)]. Mesurer le secteur informel est une opération difficile40. Dans le cas de la Thaïlande, les
statistiques du secteur informel couvent deux grandes unités économiques de l’économie informelle.
D’une part, les entreprises informelles de travailleurs à compte propre qui emploient
occasionnellement les employés familiaux non rémunérés. Il s’agit des entreprises informelles sans
employés permanents qui ne sont pas enregistrées selon les formes spécifiques de la législation à
savoir par exemple la sécurité sociale et l’impôt sur les revenus etc. D’autre part, les entreprises
d’employeurs informels qui emploient un ou plusieurs salariés permanents. Elles doivent satisfaire à
certains nombres de critère tel que la taille minimale fixée par la législation et le non enregistrement
de l’entreprise ou de ses salariés. Dans ce contexte, les entreprises non enregistrées qui ont une taille
inférieure ou égale à 10 personnes seront classées comme entreprises informelles41.
Les études comparatives des économies informelles parmi les pays dans la région du sud
d’ouest asiatique, proposées par BIT (2001) et Blunch et al (2001), montrent qu’en Thaïlande, près de
77 pour cent de la population active dépensent leur temps dans des activités informelles en 1994
contre 20,6 et 17 pour cent en Indonésie et aux Philippines. Le secteur informel génère généralement
près de 3,5 fois plus d’emplois que celui du secteur formel, tout particulièrement dans le secteur
manufacturier et de services [Blunch et al (2001) p. 79]. L’enquête sur la main d’œuvremain-d’œuvre,
spécialement concentrée sur l’économie informelle a été conduite, pour la première fois, par le Bureau
de Statistique Nationale. Ainsi, le tableau 1-7 représente une structure de répartition et des taux
d’emploi informel hors l’agriculture selon l’âge, le sexe et le niveau d’éducation.
Tableau 1-8: Répartition des emplois informels et taux d'emploi informel selon le sexe, l'âge et le niveau d'éducation entre 1998 et 2006. Répartitions des actifs occupés en emploi informel (%) Taux d'emploi informel (%)
1998 2000 2002 2004 2 006 1998 2000 2002 2004 2006Genre
Homme 53,0 53,1 53,1 53,0 53,4 56,6 53,5 53,7 50,3 50,5Femme 47,0 46,9 46,9 47,0 46,6 61,1 57,6 58,2 54,8 54,3
100,0 100,0 100,0 100,0 100,0Classe d’âge
15-19 6,6 5,6 4,5 4,3 3,8 59,3 53,4 50,4 47,3 46,620-29 23,6 21,7 20,8 18,9 17,3 49,4 44,6 43,9 39,0 37,530-39 25,4 25,5 25,2 24,7 24,1 55,2 52,1 52,0 48,2 46,840-49 22,5 23,5 23,6 23,4 24,6 63,3 60,1 59,8 55,6 56,750-59 14,2 15,4 16,3 17,4 18,9 68,9 67,5 69,3 66,2 66,8>60 7,8 8,3 9,5 11,3 11,3 81,6 77,6 81,9 80,2 80,2
100,0 100,0 100,0 100,0 100,0Niveau d'éducation
primaire et inférieur(2) 83,2 79,8 77,9 74,5 72,9 68,9 65,0 66,4 63,1 64,4secondaire (1er cycle) 10,3 11,6 11,4 12,7 12,9 49,1 49,6 48,4 47,1 46,4secondaire (2ème cycle) 3,0 4,1 5,4 6,3 7,3 40,4 40,5 43,1 41,1 41,9
40 Voir, entre autres, Charmes (2000).41 La mesure de l’informalité prenant en compte exclusivement des entreprises dont la taille est inférieure à 10 personnes semble être moins exhaustive et contestable lorsque celles dont la taille est supérieur à 10 non enregistrées par la législation ne sont pas intégralement incorporée. Il est recommandé pour la Thaïlande d’utiliser la bonne définition pour la prochaine enquête : une entreprise qui n’a pas effectué un enregistrement auprès des autorités publiques ou autres, doit être définie dans secteur informel quelque soit sa taille [Allal (1999)].
85
secondaire professionnel 1,5 1,8 1,8 2,0 2,0 27,8 32,2 31,1 30,9 32,3Diplôme (Bac+2) 0,9 1,3 1,6 1,8 2,1 17,9 22,5 26,0 26,2 28,7Universitaire 1,1 1,4 1,9 2,6 2,8 9,7 11,0 13,4 15,2 14,4
100,0 100,0 100,0 100,0 100,0Total hors l’agriculture 58,6 55,4 55,7 52,3 52,2Notes: (1) le taux d'emploi formel d'un groupe donné se définit comme les actifs occupés ayant un travail dans le secteur informel rapporté à la population active de ce groupe, il s’agit du taux d’emploi informel pour les milieux ruraux et urbains hors l’agriculture;(2) y compris des individus sans instruction.
Source: L'Enquête sur la main d'œuvre du troisième trimestre (1998-2006), le Bureau de Statistique National, disponible sur le site http://www.tdri.or.th/labor/index_e.htm.
Le marché informel génère non seulement une part substantielle de l’emploi mais également
une source de revenus que dépendent une grande partie de la population. L’informalité du marché du
travail prend son ampleur de plus en plus large depuis l’arrivée de la crise économique, très
visiblement en milieu urbain [Brown et al (2002) p. 5]. Pour mesurer les emplois informels dans les
zones urbaines en Thaïlande, notre analyse se base sur l’ensemble des composantes de l’emploi
familial, indépendant avec ou sans employés et des membres de coopératives42 en excluant des actifs
relatif à l’agriculture afin de se focaliser exclusivement sur le secteur non agricole. Dans la limite de la
disponibilité des données, les taux d’emploi informel se calculent en divisant les actifs occupés de
l’informel par la population active totale, rurale et urbaine. A la lecture du tableau 1-8, trois
remarques doivent être évoquées. En premier lieu, on assiste à une réduction générale du nombre des
personnes ayant un emploi dans l’informel. En 1998, près de trois quarts de la population sont
impliquée dans les activités informelles, soit 21 millions de personnes. La part des emplois informels
continue à réduire jusqu’en année 2006: alors que le taux d’emploi informel est de l’ordre de 58,6 pour
cent en 1998, il se réduit avant d’atteindre 52,2 pour cent en 2006. Ceci est probablement une
conséquence vertueuse de la reprise de la croissance dès le début des années 2000 qui permet à
l’accroissement des emplois dans le secteur formel. L’informel touche majoritairement les hommes :
ils représentent en effet près de 53 pour cent contre 47 pour cent pour les femmes. Toutefois, le taux
d’emploi informel pour les hommes actifs occupés est moins élevé que celui des femmes, il s’élève à
56,6 pour cent contre 61,1 pour cent pour les femmes actives. Il en résulte alors que la probabilité de
se trouver dans le secteur informel est plus forte pour les femmes que pour les hommes.
En deuxième lieu, on observe un nombre relativement élevé des actifs âgés entre 20 et 49 ans
dans l’informel. La proportion de ces derniers dans l’emploi informel s’élève à plus de 70 pour cent
contre 7,8 et 6,6 pour cent pour les personnes âgées entre 15 et 19, et de plus de 60 ans,
respectivement. Cependant, l’analyse en termes absolus est insuffisante pour appréhender l’ampleur de
secteur informel. En effet, on remarque une corrélation positive entre le taux d’emploi informel et les
classes d’âge, exception fait pour la catégorie d’âge 15-19 où le taux d’emploi informel est
42 Les membres de coopératives regroupent les personnes travaillant dans une entreprise basée sur le principe de coopération (ou mutualisme) et de la solidarité. L’objectif économique n'est pas la recherche du profit mais la satisfaction des besoins économiques, sociaux et familiaux.
86
significativement élevé. En 1998, les personnes âgées entre 20 et 29 ans ont ainsi un taux d’emploi
informel de l’ordre de 50 pour cent contre 81,6 pour cent pour ceux âgés de plus de 60 ans. De ce fait,
la possibilité de se trouver dans l’informel est relativement forte pour les personnes âgées comparées
aux autres catégories d’âge. Enfin, les moins éduquées concernent l’essentiel du secteur informel. Près
de 83,2 pour cent des travailleurs informels ont terminé les études primaires et inférieures alors que
seul 1,5 et 1,1 pour cent sont attribués aux diplômés secondaires professionnels et universitaires,
respectivement. Toutefois, on assiste à un accroissement sensible du nombre d’emploi informel parmi
les mieux éduqués, passant de 1,1 à 2,8 pour cent les diplômés universitaires et de 0,9 à 2,1 pour cent
pour les diplômés de bac+2. Lorsque l’on prend en compte le taux d’emploi informel, la structure
d’emploi informel suit la même tendance. C'est-à-dire que parmi les actifs occupés les moins éduqués,
près de 70 pour cent trouvent un emploi dans l’informel contre 27,8 et 9,7 pour cent pour les
personnes ayant des niveaux d’éducation secondaire professionnelle et universitaire, respectivement.
Par ailleurs, ces proportions augmentent légèrement en 2006, passant à 32,3 et 14,4 pour cent pour ces
deux derniers groupes.
Les spécificités du marché informel résident dans le fait les privations et des écarts persistants
de revenus sont nettement prévisibles dans la mesure où nombre d’employés informels ne sont ni
couvert par le droit d’accès au salaire minimum légal, ni à d’autres formes de la protection sociale. La
grande partie des personnes ayant un emploi informel concerne les plus vulnérables, c'est-à-dire les
travailleurs peu qualifiés, les femmes et les personnes âgées dont les rémunérations et les conditions
du travail sont peu tables et défavorables à l’accès aux emplois désirés qui correspondent à leur
qualification. Les techniques de production sont très peu avancées et les rémunérations sont instables.
Si le problème d’appariement salarié-emploi formel des mieux qualifiés existe, la gravité de la
situation d’emploi urbain est apaisée par une croissance d’emploi informel qui permettent aux
individus de subvenir les besoins de leur famille. Dans ce contexte, la question demeure quant à ce qui
serait la meilleure manière de fournir les filets de sécurité sociale pour des personnes travaillant dans
le secteur informel. Etant donné la nature du secteur, il devient difficile de mettre en application des
programmes tels que les allocations de chômage et toue formes de protection sociale. En outre,
l’intervention des politiques publiques dans le secteur informel en matière de l’insertion des
programmes institutionnels semblables au marché formel affaiblira la compétitivité et l’efficacité des
micros entreprises informelles par rapport à celles dans les activités formelles. A un tel instrument
politique d’intervention, ajoute des difficultés d’accès au capital financier que font face les entreprises
informelles. En effet, la transformation d’une entreprise informelle à une petite et moyenne entreprise
formelle demande un investissement additionnel significatif qui représente entre 2 et 14 fois du
capital investi selon les secteurs productifs [Allal (1999) p.77].
87
Faut de politiques d’emploi moins actives dans le passé, l’instabilité économique a rendu la
population vulnérable aux risques économiques et sociaux. Le phénomène de privations et de
l’inégalité de revenus soulève alors une question de l’implication des dimensions institutionnelles dans
la régulation du marché du travail43: Quel rôle doit-on attribuer aux institutions du marché du travail
afin d’alléger des dégâts causés par la crise économique et de protéger des individus contre les
éventuelles menaces prmises par les fluctuations économiques. En Thaïlande, les autorités politiques
prennent conscience de l’importance des dommages économiques et sociaux dus à la récession des
années 1990 en mettant en place, au lendemain de la crise, des politiques d’intervention, plus ou moins
active44 à l’aide des instruments institutionnels du marché [Banque Mondiale (2002a)].
C. Rôle des institutions du marché du travail et des politiques sociales
Dans les pays en développements, les modalités institutionnelles45 au travail se regroupent en
deux grandes parties. D’une part, il s’agit des institutions formelles qui font appel à l’ensemble des
règles bien établie et écrites dans la législation du travail, à savoir les unions syndicales et la
négociation collective. D’autre part, les institutions informelles se réfèrent aux accords existants entre
les acteurs économiques. Ils peuvent se représenter sous formes de parenté, d’ethnicité et de contrats
verbaux de travail etc. Ajoutons à cette dernière catégorie, des règles coutumières spécifiques à
l’entreprise qui permet d’alimenter des processus dynamiques de la segmentation des marchés en
fonction de la division formelle-informelle ou primaire-secondaire au sein du marché formel. Cette
partie consiste à développer ces différents aspects relatifs aux processus institutionnels en Thaïlande.
Le rôle des institutions dans l’économie s’opère par une double direction au sens opposé. D’une part,
toute forme de négociation collective fait une pression à la hausse sur des salaires susceptible dans
certain cas de nuire la croissance économique et le développement sectoriel d’activités productives à
cause d’une augmentation des coûts de production. D’autre part, le dialogue social joue en faveur des
employés lors d’une négociation salariale et d’une détermination de quantité d’emploi. Il permet non
43 Voir Blau et Khan (2002).44 « Les politiques d’emploi actives incluent les programmes de la création d'emplois - emplois publics, soutien des emplois à propre compte et subventions salariales-, de formations, et toute forme de services d'emploi qui peuvent affecter directement l’offre et la demande de travail et le fonctionnement du marché en termes d’appariement salarié-emploi. L'objectif global de ces interventions est d'augmenter le volume d'emploi et des revenus. Ils peuvent servir des objectifs d’équité sociale aussi bien que d’aider les groupes les plus vulnérables » [Betcherman (2000) p.2-3].45 L’implication de la dimension institutionnelle dans la croissance économique se résume par le thème de recherche de North(1990). Les institutions se considèrent comme facteur de croissance: la croissance économique s’explique par l’organisation efficiente de l’économie, c’est-à-dire, par un ensemble d’incitations qui découlent des « arrangements institutionnels ». Le système des prix étant incapable d’éliminer ses coûts, les institutions vont être vouées à les minimiser.
88
seulement d’alléger la charge de l’Etat en matière de subventions salariales mais également
d’introduire une régulation automatique du marché quant à la réduction de la pauvreté et de l’inégalité
des salaires. Tout d’abord, la syndicalisation des travailleurs et la règlementation des marchés du
travail feront un objet de débat actuel sur l’efficacité économique et l’équité sociale. Ensuite, la mise
en œuvre des politiques de la protection sociale constituera une composante nécessaire à la lutte contre
la pauvreté et la précarité.
a. Syndicalisation et négociation collective
La Thaïlande est actuellement sous le régime de la Constitution de 200746, accordée par le vote
majoritaire au référendum en 19 août 2007, après deux ans du coup d’Etat. Bien qu’elle soit
nouvellement reconstituée, la législation du travail semble être similaire à celle de 1997. L’histoire de
code de travail a commencé en 1929 lorsque le Code Civile et Commercial a été instauré, basée
essentiellement sur la loi européenne, notamment française et allemande. Toutefois, ce dernier na pas
été réellement mis en pratique. Il a fallu attendre l’année 1956 que la législation des relations d’emploi
et de la protection de travail a été sérieusement appliquée. Le coup d’Etat en 1958 a aboli le code et la
loi sur les unions syndicales ont été suspendues jusqu’en 1972. Le droit de se syndicaliser pour les
employés privés a été reconnu en 1975 par la mise en application de la Loi sur les Relations de travail
de 1975. En 1991, les syndicats de travailleurs publics, qui sont considérés comme les plus grandes
réunions syndicales, ont été renversé par le Coup d’Etat de 1991. En 2000, la Loi sur les Relations de
travail pour les employés publics (SESRA 1991) a été alors reconstituée pour permettre à nouveau aux
employés publics de pouvoir se syndicaliser [Yosihida (2003) p.352]. Par conséquent, les employés
publics et privés sont sous deux régimes différents : les relations de travail dans le secteur privé
conduites sous la Loi sur les Relations de travail date de 1975 et celles du secteur public concerne la
Loi sur les Relations de Travail dans la fonction publique de 2000 (SELRA 2000).
S’agissant des travailleurs privés, la loi de 1975 prévoit la liberté d’organiser des associations et
des unions dans une même entreprise ou au même type d’emploi sans demander à l’autorisation de
l’Etat ni de l’employeur. Elle constitue le droit de liberté d’expression dans le lieu de travail sans
intervention publique, ni celle de l’employeur. Les associations ou les unions auxquelles l’individu
appartient ont pour vocation de le protéger contre tous les actes abusifs relatifs à l’emploi tels que par
exemple la discrimination, la suspension de travail et la réduction abusive de salaire etc. Toutefois, 46 La dernière constitution conduite par le gouvernement militaire en 2007 est légèrement différente de celle de 1997. La Constitution de 2007 interdit l’esclavage et le travail forcé. Elle constitue la base d’un ensemble de droits de l’homme, y compris les droits de constituer les associations, les syndicats et d’autres organisations. L’égalité homme et femme est respectée. Cette constitution interdit également la discrimination raciale, régionale et d’autres formes discriminatoires [Brown Earl V (2003)].
89
aucune loi ne garantit la sécurité pour l’employé-organisateur de l’accusation puisque les employeurs
tendent d’affaiblir les tentatives d’organiser des unions en pratiquant la discrimination contre les chefs
d’union. Les salariés du secteur public n’ont aucun droit de former des unions syndicales sauf pour les
employés des entreprises publiques. La loi permet une union par entreprise publique qui doit contenir
au moins trente pour cent d’employés dans la même entreprise et soumit une pétition auprès du
Ministère de l’emploi afin de s’enregistrer dans le journal officiel. Le rôle des unions publiques est
limité à la négociation pour l’amélioration des conditions de travail, non plus à la négociation
salariale. En outre, des manifestions collectives sont strictement interdites pour les entreprise
publiques tandis que les unions syndicales privées sont permises d’annoncer des grèves à conditions
que la moitié des membres en participent et que leur déclaration soit considérée comme légale par le
Ministère de l’emploi47.
Sur le plan pratique, les unions syndicales restent industriellement faibles et politiquement
marginales. En 1990, 713 unions syndicales ont été enregistrées, 129 ont été formées par les employés
d’entreprises publiques. Entre 1991 et 1996, le nombre d’unions formées par les employés du secteur
privé a augmenté considérablement. Le nombre d’unions syndicales privées augmente de 999 à 1,160
entre 1998 et 2002 tandis que les associations des employés d’entreprises publiques stagnent entre 44
et 45 durant la même période [Chandoevwit (2004) p.7]. En l’an 2000, moins de 2 pour cent de la
population active ou seul 11 pour cent des employés dans l’industrie de production sont concernée par
les organisations syndicales. Ce sont les employés d’entreprises publiques qui participent plus aux
programmes : près de 52,6 pour cent des employés d’entreprises publiques, soit 168,066 employés, se
syndicalisent contre 2,7 pour cent pour les employés du secteur privé en 1999. Les raisons de cette
faiblesse des mouvements syndicaux ont été avancées : (i) l’impuissance syndicale est associée aux
ruptures successives de démocratisation [Brown et al (2002) p. 23]. Le coup d’Etat militaire de 1991 a
eu un impact négativement important sur la syndicalisation, notamment dans les entreprises
publiques ; (ii) les entreprises étrangères introduisent simultanément divers types de relation du travail,
cela rend difficile à organiser des unions ; (iii) le gouvernement thaïlandais n’est pas en position
d’améliorer la législation du travail et de renforcer son application puisque tout changement a un
impact plus ou moins négatif sur la compétitivité internationale en termes de coût de la main
d’œuvremain-d’œuvre[Yosilida (2003) p. 350] ; (iii) enfin, c’est l’attitude culturelle des thaïlandais
vis-à-vis à l’efficacité du système syndicale qui prévaut. En effet, les thaïlandais ont tendance à
accepter les conditions dans lesquelles ils se trouvent, tout particulièrement en raison de l’influence du
Bouddhisme : se battre contre leur propre employeur pour améliorer leur revenu personnel n’est pas
dans les actions habituelles des thaïlandais.
47 Voir Ministère de l’emploi (2000).
90
Les mécanismes de négociation collective sont prévus par la Loi sur des Relations de travail de
1975. Selon cette dernière, les unions syndicales doivent composer d’au moins 20 pour cent de
travailleurs contre 30 pour cent pour les groupes de personnes non syndicalisées afin de pouvoir
initialiser une négociation. L’intervention du gouvernement est nécessaire dans le cas des désaccords
ou des disputes. Dans ce cas, le tribunal du travail, mis en pratique en 1979, s’en charge des affaires.
Rare sont les disputes entre les employeurs et les employés. Seul 59 disputes ont été enregistrées,
équivalent à 20,000 employés durant la première moitié de 2005 contre 102 désaccords, soit 35,000,
en 2004. Les grèves sont très peu fréquentes, seulement deux grèves, impliquant 348 personnes durant
les neufs premiers mois de l’année 2005 contre deux manifestions, regroupant 110 employés,
enregistrées en 2004 [EIU(2005) p.100]. La pratique de négociation salariale collective est très peu
répandue. Ceci est dû au système moins sophistiqué de l’organisation des employés. Dans certaine
mesure, les mécanismes de négociation collective favorisent l’internalisation du marché du travail dés
lorsque la syndicalisation demeure essentiellement les entreprises de grande taille. En effet, la Loi sur
les Relations de travail est appliquée aux établissements dont la taille est supérieure à dix personnes
alors que 828,920 employés, soit dix pour cent des actifs occupés, sont exclut de la couverture de la loi
concernée [Brown et al(2002) p.5]. En outre, la probabilité de se syndicaliser est plus forte pour les
employés dans les grandes entreprises industrielles que ceux dans les entreprises de petite taille
puisque les unions syndicales conduites au sein des grandes firmes sont pratiquement plus actives.
Ainsi, parmi les syndicats de travailleurs existants, les dix unions les plus actives se résument en deux
grandes fédérations: il s’agit d’un côté de la Fédération de l’Union Syndicale de la Thaïlande et de
l’autre de la Fédération Nationale des Travailleurs Thaïlandais. Les autres sont plus ou moins inactives
[EIU(2005) p.98]. Dans ces conditions, la plupart des contrats du travail s’établissent discrètement
entre employeurs et employés, et le reste existe au sein d’une négociation collective. En 2000, seuls
304 accords collectifs ont été signés, notamment parmi les grandes entreprises tandis que les contrats
verbaux sont souvent pourvus par les entreprises de petite taille [Brown et al(2002) p.10-14].
Au total, l’organisation du travail a un impact substantiel sur la croissance des salaires dans
certain segment du marché où la possibilité de se syndicaliser est forte tandis que dans certains
d’autres où les rémunérations sont relativement faibles, la hausse de salaires est généralement une
conséquence de l’augmentation du niveau de salaire minimum légal plutôt que le pouvoir de
négociation collective. Or, malgré une fixation salariale par une négociation tripartite, la majorité des
représentants sont les employeurs et les ménagers qui imposent des enjeux en faveur de l’intérêt des
entreprises.
91
b. Protection sociale et salaire minimum légal
La montée de l’insécurité d’emploi et la dégradation des conditions du travail sont susceptibles
de contrebalancer la prospérité économique et d’emploi. Plusieurs modifications ont été apportées à la
législation du travail depuis l’année 1997. En fait, en coopération avec le Bureau International de
Travail en 1975, la Thaïlande a pris en compte l’importance du système de protection des travailleurs.
Or, l’environnement de politiques durant les années 1980 n’a pas permis de constituer une sérieuse
structure de la sécurité sociale. La Loi sur la Sécurité sociale (Social Security Act Number 1, SSA
1990) voit le jour en 1990, suivi par les Lois numéros 2 et 3 en 1994 et 1999, respectivement.
Toutefois, l’objectif des législations est global, c'est-à-dire qu’elles fournissent certaines assurances et
sécurités d’emploi liées aux accidents, des maladies et des décès en dehors du lieu du travail. Encore
une fois, l’application de ces lois spécifiques excluent les employés travaillant dans les entreprises de
taille inférieure à dis personnes, les employés du secteur public. Le financement du programme est
contribué au moins 5 pour cent du fond par trois parties, c'est-à-dire le gouvernement, les employeurs
et les employés. Actuellement, les travailleurs thaïlandais sont protégés par la Loi sur la Protection du
Travail de 1998 (Labor Protection Act LPA 1998), une version modifiée de la Loi de 1975. La
législation inclut les composantes essentielles du système de protection telles que les heures légales du
travail, l’emploi des femmes et des enfants, les congés payés, les rémunérations des heures
supplémentaires, la santé et la sécurité au travail, l’indemnité de cessation d’emploi et les droits de
réclamer contre l’injustice. Ajoutons à LPA, le Fond de Prestation du Travail et Le comité de Salaire
Minimum ont été intentionnellement établis afin de fournir l’assistance efficace aux travailleurs.
Enfin, l’indemnité de chômage a été mise en application dès 2004 pour faire bénéficier aux chômeurs
qui sont volontairement inscrits au programme. Les faibles montants de paiements pour l’indemnité de
chômage, bien qu’il soit récemment imposé, signifie que le programme n’est encore peu répandu : le
montant ne s’élève qu’à 30,6 millions de Bahts contre 7,999 et 2,126 millions de Bahts pour les
dépenses de la maladie et de la maternité [Phophirul (2007) p.10]. Cependant, la couverture des
travailleurs par la Loi sur la Sécurité Sociale et sur la Protection du travail reste très homogène et
sélective, souvent au profit des employés dans les grandes entreprises formelles. Ainsi, les emplois
informels ne sont concernés que par la sécurité sur la santé tandis que les autres prestations sont
presque inexistantes. Les différences existent au sein même du secteur formel. Ainsi, en 2003, les
personnes assurées par les programmes de protection sont majoritairement concentrées dans certains
secteurs dont le degré de risque est plus grand tels que le secteur de commerce, de construction, de
manufacture, de transport et de communication. Au total, le nombre des personnes protégées atteint 7
millions, soit moins de 20 pour cent de la population active. Seul soixante pour cent des personnes
employées dans les entreprises de taille comprise entre 10 et 99 personnes se sont inscrites dans les
92
programmes de protection en 2001. Tout particulièrement, près de 95 et 50 pour cent des individus
licenciés par les petites entreprises (1-9 personnes) et les grandes entreprises (supérieur à 100
personnes) en 1998 n’ont pas obtenu l’indemnité de cessation d’emploi [Phophirul (2007) p.12]. Par
conséquent, il est très probable que certains individus sont plus avantageux que d’autres en termes de
sécurité d’emploi. La structure hétérogène du système général de la protection du travail complexifie
la gestion des politiques de réduction de la pauvreté et de l’inégalité dans la mesure où les personnes
vulnérables, ayant aucun droit aux prestations sociales s’explosent facilement aux risques liés au
travail.
Le programme de salaire minimum légal est l’une des mesures prioritaires sous la conduite du
Ministère de l’intérieur. Le seuil de salaire minimum est connu comme le niveau de salaire permettant
aux individus de maintenir leur niveau de vie socialement soutenable48. Il peut être considéré comme
une mesure de l’équité sociale qui préserve le pouvoir d’achat et un indicateur de la prospérité
économique du pays. Le taux de salaire minimum fixé par l’Etat est applicable aux employés relevant
aussi bien du secteur public que du secteur privé. Sur le plan théorique, la détermination du salaire
minimum doit avoir un impact positif sur le niveau de vie de la population sans pour autant avoir une
répercussion négative sur les activités économiques49. En fait, la réduction du salaire minimum
augmente l’inégalité des salaires dont l’élasticité est d’autant plus forte dans les pays développés50,
tandis que son niveau élevé est susceptible de conduire à une rigidité d’emploi et à une hausse des
coûts de production, nuisible à la compétitivité internationale. Dans ce contexte, les enjeux sont grands
pour les pays dans la région du Sud-Est asiatique où les investissements étrangers sont attirés par les
faibles coûts de salaires et la déréglementation du marché.
Dans le cas de la Thaïlande, le salaire minimum a été légalement instauré pour la première fois
en 1973. Il a été remodifié après une promulgation de la loi de 1998. En 1973, il n’a été appliqué qu’à
Bangkok et ses agglomérations au montant de 12 bahts par jour et en 1974, il a été appliqué à toutes
les provinces aux différents montants en fonction de la répartition des zones géographiques. La
dernière modification a été élaborée en janvier 2005 avec le taux du salaire minimum compris entre
137 et 175 bahts [Srawooth et al (2005) p. 3-4]. En fait, la modification est en fonction du coût de vie
et le taux d’inflation. Depuis 1990, le taux de croissance du PIB a été introduit afin d’ajuster le taux de
48 Le salaire minimum légal a été introduit pour la première fois en Nouvelle Zélande en 1896, en Australie en 1899 et au Royaume Uni en 1909 avec le but de remonter le niveau de vie des plus vulnérables [Lee (2002)].49 Voir Card et Krueger (1994) et Dickens et al (1999)50 L’étude aux Etats-Unis dans les années 1970 et 1980 montre que la réduction du salaire minimum de 10% vise à faire baisser plus de 8% les salaires des employés, qui gagnent légèrement plus que le taux du salaire minimum [Coen Teulings (2003)]. Voir également Lee (1999).
93
salaire minimum, la formule d’ajustement est alors égale au taux de croissance divisé par deux plus le
taux d’inflation [Peetz (1996) p.3].
Figure 1-6 : Evolution du salaire minimum, du taux de croissance et de l’inflation entre 1981-1999.
1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999-15-10-505
1015
Taux de croissance du PIB (réel) Croissance de salaire minimum (réel)Taux d'inflation
Année
%
Source : Banque Centrale de Thaïlande.
En général, le salaire minimum légal a peu d’impact sur le fonctionnement du marché du travail
puisque, d’une part, son champ d’application est limité, peu d’employés sont concernés par ce salaire
minimum , et, d’autre part, les règles d’ajustement sont peu appropriées et le seuil du salaire
minimum est loin derrière le salaire moyen effectif. On assiste à deux problèmes d’ordre statistique et
institutionnel.
En premier lieu, l’ajustement tardif du salaire minimum entraîne statistiquement un grand
décalage entre la variation du salaire minimum et les variables économiques prise en compte dans le
calcul. En fait, la figure 1-6 montre que, le taux de salaire minimum varie au même sens que le taux
d’inflation mais l’écart entre ces deux grandeurs est plus ou moins grand en fonction des années
considérées. Toutefois, la variation du salaire minimum s’écarte du taux de croissance en deux grandes
périodes. Entre 1985 et 1990, la variation du salaire minimum est nettement en dessus du taux de
croissance du PIB et aussi de l’inflation, l’écart est grand entre 1987 et 1989. La même observation est
faite entre 1993 et 1997. En outre, entre 1995 et 1999, le salaire minimum n’a augmenté que de 10,2 à
11,7 pour cent tandis que le niveau général des prix à la consommation a augmenté de 21,7 pour cent
durant la même période [Banque Mondiale (2000) p.34]. Par conséquent, le processus d’ajustement du
salaire minimum à l’inflation se révèle inefficace. En deuxième lieu, au-delà des calculs statistiques,
l’institution du salaire minimum n’a pas un objectif précis économique quant à l’impact sur la
pauvreté. Peetz (1996) propose des raisons d’ordre institutionnel pourquoi le salaire minimum n’a pas
joué un rôle de filet de sécurité pour les pauvres (« Poverty Safety Net ») : (i) le niveau de salaire
94
minimum n’a globalement aucune influence sur la modification de la structure de salaire. C’est pour
cette raison que la plupart des personnes pauvres sont exclues de l’institution de salaire minimum ; (ii)
l’augmentation du salaire minimum est souvent basée sur une évolution des prix alors que le niveau de
vie de la période précédant à la date de détermination de salaire minimum n’est pas pris en compte ;
(iii) le salaire minimum est placé en se référant aux besoins d'un employé individuel, excluant des
personnes à sa charge, alors qu'un salaire minimum « de filet de sécurité pour les pauvres » devrait
tenir compte des besoins de la famille [Srawooth (2005) p.7].
En définitive, faut d’avoir des objectifs précis et des réelles sanctions, l’institution du salaire
minimum est peu efficace et n’appartient qu’à certains groupes d’employés [Banque Mondiale (2000)
p.82]. En 2002, le Bureau de Statistique Nationale a estimé que près de 1,7 millions de personnes, soit
près de 5 pour cent des actifs occupés, ont un salaire en dessous du salaire minimum [Department of
Labour Protection and Welfare (2002)]. En 1994, plus de 37 pour cent des établissements privés ont
rémunéré leurs employés moins que le taux de salaire minimum tandis que ce pourcentage a
sensiblement diminué : en 2003, un établissement sur dix n’a pas appliqué la politique du salaire
minimum [Peetz (1996) p.5].
Toutes politiques d’emploi doivent refléter les directions du développement économique et
social. L’introduction des programmes de filet social de sécurité et du salaire minimum ne doit pas
limiter la capacité du pays à mener une compétition sur une scène internationale en matière
d’investissement et d’exportation. Les rigidités du marché du travail sont déjà les meilleurs exemples
dans les pays développés. En même temps, la Thaïlande ne s’apprête pas à poursuivre le sentier de
croissance soutenable si les plusieurs milliers de personnes sont en conditions du travail défavorables à
la création des richesses. L’hypothèse de la segmentation du marché, posée au long de cette partie,
doit être considérée comme une base d’analyses d’ordre économique et institutionnel telle est le cas du
marché du travail urbain en Thaïlande.
3. Conclusion
Le marché du travail urbain thaïlandais a traversé des périodes de fluctuations économiques
telles que la période de croissance économique des années 1980 où l’apparente mobilité géographique
est favorable au développement des activités urbaines et la crise économique des années 1990 qui ne
manque pas de dévaster la situation d’emploi relative au licenciement de masse et à la réduction du
niveau de vie. Les hypothèses des marchés concurrentiels et segmentés ont été avancées afin d’étudier
95
l’impact divers de ces chocs économiques sur la vie de la population en milieu urbain. Les théories
néoclassiques et de la segmentation ont alors pour vocation de constituer une préalable appréhension
des causes et des conséquences de l’inégalité et de la pauvreté.
Les controverses théoriques de ces deux phénomènes telles qu’elles ont été avancées depuis des
années 1960 se basent sur la détermination des salaires et sur les causes de l’inégalité et de la pauvreté
dans le marché. A partir des années 1960, la théorie du capital humain, fondée sur une base des
hypothèses néoclassiques, explique les écarts salariaux et la pauvreté par les différences de dotations
en capital humain. L’inégalité de salaire résulte en grande partie des différences individuelles en
éducation et de formation, qui conduisent à un différentiel de productivité du travail, et au final aux
différents gains. Si les rémunérations individuelles se diffèrent, c’est parce que les productivités, qui
sont fonction du capital humain, varient d’un individu à l’autre. En outre, à la vertu du marché
concurrentiel, l’équilibre simultanément atteint conduit systématiquement et automatiquement à la
distribution équitable de salaires. Par conséquent, les moins éduqués et les moins formés ont peu de
possibilité d’avoir un niveau de salaires supérieurs aux personnes mieux instruites. Toutes politiques
de lutte contre la pauvreté se reposent alors sur l’implantation des programmes relevant d’incitation à
l’éducation et à la formation tout en instaurant le système d’assistance de facilité de la recherche
d’emploi. Le bilan des politiques économiques préconisées par ce modèle se révèlent décevants, tout
particulièrement visible parmi les pays industrialisés : l’inégalité et la pauvreté persiste, voir même
s’aggrave ; la discrimination économique et sociale renforce la défaillance des programmes. Ces
échecs imprévisibles montrent une limite la mise en application des théories néoclassiques [Cain
(1976) p.1218–1220]. Basé sur le fondement des théories institutionnalistes, la théorie de la
segmentation décrit le marché du travail de manière plus réaliste en intégrant les dimensions
économiques, institutionnelles et sociales dans la conceptualisation des théories alternatives. Puisque
l’économie est constituée par les marchés parfaitement concurrentiels et non concurrentiels, la
corrélation entre productivités et gains individuels risquent de varier d’un individu à l’autre et d’un
segment à l’autre pour un même niveau de dotations du capital humain. La dispersion des salaires est
due aux mécanismes de détermination de salaires qui diffèrent d’un marché à l’autre et les dynamiques
de rétroaction positive empêchent le mécanisme automatique de l’égalisation salariale au sens
néoclassique. A cet égard, l’existence des barrières à l’entrée de certain marché, quelques soient
d’ordre économique ou institutionnel, constitue un argument central du modèle segmentationniste
quand à la mise en œuvre des politiques économiques de lutte contre la pauvreté et de l’inégalité. La
création d’emploi et la lutte contre la discrimination sont l’un des moyens envisagés pour permettre
aux personnes qui se trouvent dans le marché secondaire s’accéder aux meilleurs emplois par les
« portes d’entrée ». La littérature économique51 contemporaine se consacre à la relation existante entre
51 Voir entre autres Atkinson, Bourguignon et Morrison (1992).
96
inégalité et mobilité salariale. L’interaction entre les mobilités salariales et d’emploi fait un objet de
débat théorique tout d’actualité. S’agissant des théories néoclassiques de la mobilité d’emploi, le
modèle de l’appariement et du capital humain visent à la même conclusion selon laquelle la mobilité
d’emploi est généralement profitable aux individus qui se l’impliquent par le biais de la croissance
salariale. La mobilité d’emploi contribue, toues choses égales par ailleurs, à réduire de manière
automatique l’inégalité salariale et la pauvreté. A l’opposé, la théorie de la segmentation stipule que la
croissance des salaires consécutive à la mobilité professionnelle n’a lieu qu’au segment primaire alors
que l’instabilité salariale est un caractère permanent du segment secondaire. L’analyse de l’interaction
entre différentes segments doit porter l’attention sur l’existence des barrières à la mobilité aussi bien
ses causes que ses conséquences impliquées. Encore plus développé
Les apports théoriques précédemment cités devraient permettre de refléter les réalités
économiques. La Thaïlande est l’un des pays dans le monde où l’inégalité de revenus est la plus élevée
bien que la pauvreté réduit considérablement durant ces vingt dernières années. La flexibilité du
marché, supposée de faciliter l’ajustement du marché, ne fait qu’amplifier la réduction de salaires dans
certains segments. Tant dis que plusieurs études montrent que le marché du travail en Thaïlande est
structurellement flexible et mieux intégré dans toutes les régions et les secteurs, il existe des
inquiétudes permanentes selon lesquelles la distribution des gains du marché du travail devient
significativement plus inégalitaire [Banque Mondiale (1996) p.17]. Certes, plusieurs milliers de
travailleurs thaïlandais sont peu qualifiés et moins instruits, le recours aux politiques économiques
privilégiant des programmes d’éducation et de formation est nécessaire mais insuffisant étant donné
l’existence des marchés segmentés en milieu urbain. Les politiques de filet social de sécurité,
actuellement mises en œuvre dans le marché du travail, sont loin d’être finalisées étant donné une base
presqu’inexistante de sa création. Le caractère global de son application entraîne non seulement un
coût de financement, déjà élevé, mais également un coût d’opportunité au détriment des plus
vulnérables. La Banque Mondiale (2002a) a récemment insisté sur les objectifs de ciblages a priori
déterminés par les autorités politiques. Certains programmes de protection sont en faveur des
personnes déjà mieux protégées tandis que la plupart de travailleurs – les femmes, les plus âgés, les
jeunes et les travailleurs informels – sont en situation précaire relative à l’insécurité liée au travail et
de salaire. Dans ce chapitre, il est déjà démontré à plusieurs reprises que les plus vulnérables sont les
personnes ayant un emploi à caractère précaire tel qu’il existe dans le secteur informel ou dans certain
segment au sein même du secteur informel. Mis à part des problèmes liés à l’existence du marché
informel déjà bien connu, la distinction entre les bons et les mauvais emplois, relativement
inséparables des emplois à meilleurs et bas salaires, constitue une analyse économiquement et
socialement nécessaire à la création des politiques de lutte contre l’inégalité salariale et de la pauvreté.
97
CHAPITRE II: Inégalité salariale et dualité du marché du travail urbain en Thaïlande
Le succès de l’économie thaïlandaise depuis des années 1980 tient au fait que la politique de
redistribution des richesses favorise les incitations à l’investissement et à la production, laissant au
second plan de l’économie égalitaire. Cet avantage fiscal a pour premier objectif d’attirer les
investisseurs étrangers et d’alléger les charges de production. Part conséquent, la croissance
économique de la Thaïlande est moins profitable aux pauvres dés lorsque les richesses ne sont pas
équitablement réparties par l’initiative de l’Etat52. Dans ce même ordre d’idée, les rémunérations du
travail, tout particulièrement en milieu urbain, se dispersent à cause des processus du développement
progressivement divergeant entre différents secteurs de production. Certains secteurs les plus explosifs
à l’ouverture économique et commerciale tels que le secteur manufacturier, immobilier et bancaire ont
pu dégager une croissance soutenue durant les années 90. On assiste à une hausse spectaculaire des
salaires dans tels secteurs, laissant loin derrière des faibles rémunérations des employés peu qualifiés.
Par conséquent, l’écart salarial est provoqué, d’une part, par une croissance distinctive de salaires
pour les emplois à forte productivité , et, d’autre part, par une instabilité de revenu des emplois à
faible productivité. Avec la crise économique des années 90, l’impact de régression économique sur
les ménages à bas revenu a été plus important dans le segment à faible productivité du marché du
travail [Horton et Mazumdar (1999) p.20]. En même temps, il est démontré que la situation sans
emploi est très présente chez les personnes les mieux éduquées et que ces dernières font face à
52 La Corée et la Thaïlande ont une croissance économique élevée durant les années 90 avant la crise économique. Néanmoins, la croissance économique coréenne a généré proportionnellement plus de bénéfices aux pauvres qu’aux non pauvres, alors que la croissance économique thaïlandaise a été profitable proportionnellement plus aux non pauvres qu’aux pauvres [Kakwani et al (2001)].
98
certaines barrières à l’entrée au marché formel. Dans cette perspective, notre attention doit porter sur
l’hypothèse fondamentale de la segmentation du marché du travail urbain. Pour ce faire, il est
nécessaire d’évoquer , d’une part, une vérification de l’existence de la segmentation , et, d’autre part,
des barrières à l’entrée de certains segments. Nous sommes amenés à adopter une approche dualiste au
lieu de l’approche structuraliste pour deux raisons principales. Tout d’abord, la présente étude
permettra de mettre en relation entre l’approche traditionnelle qui distingue les bons et mauvais
emplois et un modèle récemment développé qui différencie des hauts et des bas salaires. Ensuite, il est
aisé de considérer une approche dualiste comme un argument central de l’étude puisque les mobilités
d’emploi ou salariales entre deux principaux segments simplifient la compréhension des analyses et
répondent parfaitement à un argument théorique précédent constitué.
Le chapitre sera organisé de manière suivante. La première partie sera consacrée à un examen
des trajectoires salariales et de l’inégalité agrégée des salaires. Pour ce faire, un ensemble des outils
nécessaires à l’évaluation de l’inégalité et des sources statistiques de l’emploi utilisées seront tout
d’abord présentés. Ensuite, l’analyse de l’inégalité salariale en milieu urbain sera une fois mise en
œuvre, l’étude préalable de la segmentation s’effectuera à l’aide d’une méthode de décomposition de
l’inégalité par sous-groupes, à savoir par niveau d’éducation, classe d’âge et catégories
professionnelles. La deuxième partie consiste à montrer une évidence empirique de la dualité du
marché et de l’existence des barrières à l’entrée. Dans cette direction, les différentes méthodes de
vérification seront précisées, à savoir le modèle à changement endogène avec règle de séparation
inconnue et le modèle probabiliste de transition. A l’issu des résultats attendus, la distinction des
secteurs primaires et secondaires sera rappelée dans le troisième et quatrième chapitre quant aux
analyses des mobilités d’emploi et salariales.
1. Dynamique de l’inégalité salariale
Ce n’est qu’à travers de plusieurs années que l’on pourrait appréhender les résultats concluants
sur la dynamique de l’inégalité des salaires. Les efforts portés à cette étude consistent alors à
démontrer une dimension dynamique des trajectoires salariales, fessant appel à certain nombre de
mesures statistiques de la dispersion telles que l’indice de Gini, de Theil, la courbe de Lorenz et la
décomposition de l’inégalité par sous-groupe. Dès que des indices et des sources statistiques sont
présentés, différentes mesures seront appliquées afin de présenter un phénomène persistent de
l’inégalité salariale.
99
1. Cadre méthodologique et sources statistiques
Dans ce paragraphe, seront présentées les mesures d’inégalité, développées par des approches
axiomatiques élaborées dans un cadre des théories de l’économie welfariste53. Compte tenu de la
diversité d’enquête sur la main d’œuvremain-d’œuvre en Thaïlande, deux sources d’enquête sur la
main d’œuvremain-d’œuvre sont les plus pertinentes. D’une part, des données transversales portant sur
une longue période, il s’git d’une Enquête sur la main d’œuvremain-d’œuvre, Labor Force Survey
(LFS) , et, d’autre part, des enquêtes longitudinales récemment effectuées, l’Enquête du panel socio-
économique, Household Socio-Economic Panel Survey (HSEPS).
A. Mesures d’inégalité
Pigou (1912) et Dalton (1920) sont les précurseurs de la pensée des mesures d’inégalité. Ce
n’est à partir des années 1970 que les recherches en économie s’intéressent à l’évaluation du bien-être
de la société sous formes mathématiques. Il existe plusieurs manières de mesurer l’inégalité. Certains
indicateurs sont plus fréquemment utilisés que d’autres54. Le choix des méthodes est fonction de
certaines règles bien établies que l’on appelle les axiomes des indices. Ces derniers qui doivent être
respectés par mesures de l’inégalité, permettent de constituer la fiabilité des indices de l’inégalité
utilisés.
a. Axiomes des indices de l’inégalité
Parmi les propriétés axiomatiques existantes, on retient d’ici 5 axiomes les plus importants. (i)
le premier est l’axiome d’anonymat, on appelle également un axiome de symétrie. Selon ce dernier, les
mesures d’inégalité doivent être indépendantes de caractéristiques particulières des revenus
considérés. Le changement d’ordre de la distribution ne doit pas changer l’inégalité initiale. En
d’autres termes, en modifiant l’ordre statistique de la distribution, l’inégalité restera inchangée : par
exemple, pour une permutation du vecteur des revenusY ' ( y1 , y2 , y3 , .. . , y n) deY ( y1 , y2 , y3 , .. . , yn) ,
l’indice de l’inégalitéI (Y ' )sera égal à I (Y ) [Cowell (2000) p.97] ; (ii) le deuxième axiome concerne 53 L’approche welfariste traditionnelle (ou de bien-être) consiste à évaluer les situations individuelles par une mesure du bien-être subjectif. Sen (1979) fut le premier à introduire la notion de welfarisme. Le welfarisme réclame qu’une évaluation de l’état social soit fondée exclusivement sur les utilités engendrées par cet état. Voir, entre autres, Sen (1973, 1991), Atkinson (1970) et Cowell (1980a, 1980b).54 Cela est dû au fait que certaines mesures sont sensibles aux déterminants démographique. En prenant pour l’exemple d’un indice simple comme la variance, il varie d’une taille de population à l’autre. Cette caractéristique rend la variance peu fiable pour faire une comparaison des inégalités de deux échantillons à une taille de la population différente.
100
le principe de population. Ce principe s’inspire de l’analyse de Dalton en 1920 qui met en avant l’idée
selon laquelle si la population est dupliquée plusieurs fois, sans aucune influence sur la structure des
attributs individuels de la même population, l’indice d’inégalité ne doit pas se modifier face à un tel
changement [Gajdos (2000) p.17]. En ajoutant la population identique dans une distribution,
l’inégalité doit rester inchangée: I ( y1 , y2 , y3 ,. .. , yn )=I ( y1 , y2 , y3 , y1 , y2 , y3 . . ., yn ) ; (iii) le Principe de
transfert a été initié par Pigou en 1912 et a été redéfini par Dalton en 1920. Ce principe exige une
hausse de l’inégalité consécutive à un transfert du revenu des plus pauvres aux plus riches, et une
baisse de l’inégalité dans le cas contraire. L’inégalité change selon la loi de la conservation des
moyennes, mean-preserving spread55 [Dalton (1920) p.351]. En fait, si l’on considère un vecteur de
revenusY' ( y
'i , y' j) résultant d’une transformation d’un autre vecteur de revenus
Y ( y i , y j ) tel que
y'i> y
'jen provenance d l’opération y i+b> y j−b , pour un montant de revenu transféré b. Le
principe de transfert est respecté si et seulement si I (Y ' )> I (Y ) ; (iv) l’axiome d’invariance relative56
exige une invariance des indices de l’inégalité par rapport aux éventuels changements proportionnels
d’échelles de revenus. Si tous les montants de revenus d’une distribution considérée augmentent de
manière proportionnelle, l’inégalité ne doit pas changer. Par exemple, étant donné un multiplicateur
λ>0 , I (Y ) doit être égal àI ( λ⋅Y ) . De toute évidence, la variance ne respecte pas ce principe
puisque quand l’on multiplie les revenus par un multiplicateur, la variance tend à augmenter :
var ( λ⋅Y )= λ2 var (Y ) . Ces autres derniers axiomes mentionnés sont considérés comme des principes
de base permettant de constituer un indice d’inégalité fiable. Le cinquième axiome est relatif à la
structure de la distribution des revenus. Il peut être utilisé dans le cas d’une analyse de décomposition
de revenus ; (v) le dernier axiome est la décomposabilité de l’inégalité. Depuis les travaux de
Bourguignon (1979), Cowell (1980a, 1980b) et Shorrocks (1980), l’axiome de décompsabilité est
devenu une propriété de référence. Selon ce principe, l’inégalité totale est susceptible de se
décomposer en plusieurs composantes au sein de la même distribution. En d’autre terme, si les
inégalités intergroupes augmentent parmi différents sous groupes de la population, l’inégalité totale
doit augmenter également.
En définitive, parmi l’ensemble des mesures d’inégalité existantes dans la littérature, les
mesures d’entropies généralisées sont satisfaits de tous les axiomes de l’inégalité [Cowelle (1995)].
Les indices de Theil, issu d’une famille de mesures d’entropie, et de Gini sont les plus connus pour
mesurer le phénomène de l’inégalité.
55 Voir Cowell (2000).56 Voir Litchfield (1999)
101
b. Indices de Theil, de Gini et quantiles
Les indices de Theil et de Gini sont deux mesures d’inégalité dont leur origine de construction
est différente. Le premier fait parti d’un ensemble d’indices d’entropie généralisée alors que le second
est issu d’une courbe de concentration.
Theil en 1967 parvient à introduire une mesure d’inégalité de revenu dérivée par analogie de la
seconde loi de thermodynamique, la loi de l’Entropie (qui mesure le désordre d’un système
thermodynamique), qui jauge la contribution des inégalités intergroupes et intragroupes à l’inégalité
totale [Dagum (1997)]. La formule générale des indices d’entropie généralisée se présente sous forme
suivante:
GE (α )=1
α ²−α [1n∑i−1
n
( y i
y )α
−1] (2-1)
Avec n , la taille de la population, y i le revenu individuel avec i de 1 à n et y la moyenne
arithmétique des revenus considérés. La valeur de GE peut varier de zéro à un en sachant que si GE est
égal à zéro, les revenus sont dans ce cas identiques et que si GE est égal à un, l’inégalité atteint son
maximum. Le paramètre α figuré dans l’équation (2-1) mesure le poids de la distance entre les
revenus dans différentes échelles de la distribution. En effet, plus la valeur α sera petite, plus la valeur
GE sera plus sensible aux changements du bas de la distribution. A l’inverse, si la valeur α est grande,
l’indice GE sera plus sensible aux changements du haut de l’échelle de la distribution. Généralement,
α prend la valeur comprise entre 0 et 2, ce qui signifie que pour α = 0, le poids est distribué à la
distance entre les revenus en bas de l’échelle de la distribution, pour α = 1, le poids est partagé de
manière égale et pour α = 2, l’importance du poids est donnée à la distance entre les revenus en haut
de la distribution57. Lorsque α prend la valeur égale à un, l’indice de Theil s’écrit de manière suivante :
T (1)=∑i=1
n
[ yi
∑j
n
y j ] . ln ( y i
y ) (2-2)
57 Voir la formulation avec α = 2 dans Litchfield (1999) et lorsque α = 1 – ε où ε est un paramètre d’aversion de l’inégalité, on retrouve l’indice d’Atkinson de l’inégalité, voir Atkinson (1970) et Cowell (1955).
102
C’est sur la moyenne géométrique pondérée des revenus relatifs de chaque individu ou groupes
d’individus qu’est basé l’indice de Theil. Le premier terme [
y i
∑j=1
n
y j] de l’équation (2-2) représente le
poids calculé par rapport au revenu agrégé et le deuxième terme [In( y i
y )] est le revenu individuel
rapporté à la moyenne totale. Pour α = 0, il s’agit d’une déviation logistique moyenne (DLM) qui est
sous forme suivante :
DLM (0 )=∑i=1
n
ln( y i
y )(2-3)
Dans cette présente étude, l’indice de Theil présente un aspect particulièrement intéressant
lorsqu’il est possible de décomposer l’inégalité agrégée en inégalité inter et intra groupe. Cette
méthode de décomposition sera présentée après avoir introduit l’indice de Gini et la courbe de Lorenz.
La courbe de Lorenz est une représentation graphique de la concentration relative à la
distribution d’une variable aléatoire continue. Elle compare le poids démographique de la population à
son poids économique. C'est-à-dire l’accumulation du nombre d’individus d’un côté et des revenus de
l’autre. Généralement, la courbe de Lorenz met en relation entre le pourcentage accumulé de la masse
des revenus de la population sur l’axe verticale G( x ) et le pourcentage accumulé dans la population
totale dans l’axe horizontaleF (x )sur l’axe horizontale. La figure 2-1 suggère que plus la courbe de
Lorenz est éloignée de la diagonale (la droite de parfaite égalité), plus l’inégalité n’est forte, – ou les
revenus sont moins concentrés –.
Figure 2-1: Courbe de Lorenz.
103
Part accumulée du revenu G(x)
AB
Parfaite égalité
Source: Atkinson (1970) p. 299.
L’indice de Gini est basé sur cette structure. Contrairement à d’autres indices – la variance et
l’indice de Theil – qui comparent une valeur quelconque y i à la moyenne y , l’indice de Gini est
légèrement différent. Ce dernier consiste à évaluer chaque valeur à toutes les autres valeurs de la
distribution et synthétise toutes les comparaisons dans un coefficient [Bouget et Viénot (1995) p.116].
Dans la figure (2-1), la valeur du rapport entre la surface A et la surface A + B montre le niveau de la
concentration des revenus permettant de construire le coefficient de Gini. Sous forme mathématique,
l’indice de Gini est égal ainsi à la différence moyenne divisée par le double de la moyenne
arithmétique [Gini (1912)] :
Gini= 12n ² y ∑i=1
n
∑j=1
n
|y i− y j| (2-4)
La valeur de l’indice de Gini est comprise entre 0 et 1. Si toutes les valeurs sont identiques,
l’indice de Gini est obligatoirement égal à 0 puisque le terme∑i=1
n
∑j=1
n
|y i− y j| s’annule. En revanche,
plus les écarts entre les valeurs y i et y j sont élevés et plus l’inégalité est forte. Dès que l’indice de Gini
atteint la valeur égale à un, la dispersion est maximale.
Les mesures indicatrices, explicitées précédemment, dissimule dans certaines mesures
l’importance de l’information sur la distribution des revenus. Il est souvent opportun d’intégrer une
analyse positionnelle et descriptive de la structure de distribution des revenus considérés. Dans cette
logique, nous incorpore de manière supplémentaire les quantiles et les ratios inter-décile dans notre
présente étude. En fait, une série de distribution par quantiles est considérée comme une
généralisation de la médiane. On note le quantile d’ordre a,Qa , – tel que a est compris entre 0 et 1 –
est une solution de l’équation F ( y )=a , tel que F ( y ) est la fonction de répartition et y est le valeur:
104
Part accumulée de la population F(x)
Courbe de Lorenz
Qa=( y|F ( y )=a ) (2-5)
A partir de la valeur a, il est possible de généraliser les différents quantiles. Dans notre étude,
les quantiles d’ordre a tel que a prend les valeurs 0,1 ; 0,2 ;… ; 0,9 qui correspondent aux déciles notés
d1, d2,…, d9 seront utilisés. En effet, les déciles sont les valeurs de la variable statistique, classées par
ordre croissant : 10 pour cent des unités statistiques ont des valeurs inférieures à d1, appelé premier
décile ; 10 pour cent des observations ont des valeurs comprises entre d1 et d2 ; 10 pour cent des unités
ont des valeurs comprises entre d2 et d3 etc. Enfin 10 pour cent des observations ont des valeurs
supérieures à d9. Il existe une autre méthode plus commode pour décrire la composition de la
distribution des revenus, à savoir le rapport ou ration inter-décile. Il est destiné à mesurer un écart
spécifique des revenus entre deux déciles concernés. En fait, un décile quelconque est séparé du décile
inférieur ou supérieur par un seuil de revenu appelé limite de décile. Chaque décile est alors borné par
sa limite inférieure du décile – la valeur en-dessus de laquelle se situent les individus du décile –, et sa
limite supérieure, le seuil de revenu au-dessous duquel se situent les individus du décile. Ainsi, le
ratio inter-déciles peut être défini comme un rapport entre les limites supérieures de deux déciles
considérés. A titre d’exemple, on not le ratio inter-décile 90-10, le rapport entre la limite supérieur du
10ème et 9ème décile et celle du 2ème et 1er décile. Plus ce dernier est élevé, plus la dispersion des revenus
entre les plus riches et les plus pauvres est forte, et vice versa.
Cependant, l’utilisation des quantiles comme mesures d’inégalité pose un certain nombre de
limites. Selon Bouget et Viénot (1995), ces intervalles ne sont sensibles qu’au classement par ordre
croissant de la variable statistique. De ce fait, toute redistribution des valeurs de la distribution
statistique à l’intérieur des intervalles n’a aucune influence sur la valeur des rapports qui demeure
inchangée. La mesure n’est sensible qu’aux modifications de la distribution à cheval sur au moins un
des quantiles [Bouget et Viénot (1995) p.104]. Dans tous les cas, les mesures indicatrices et
descriptives doivent être utilisées de manière complémentaire dans une analyse de l’inégalité. La
méthode de décomposition, déjà cité dans les axiomes, n’en est pas moins importante, notamment
dans la création préalable d’une hypothèse de la segmentation.
c. Décomposition de l’inégalité
Les techniques de décomposition ont été conçus par les travaux pionniers de Bourguignon
(1979), Cowell (1980a, 1980b) et Shorrocks (1982, 1984), qui consistent à désagréger l’inégalité
105
totale en inégalités inter et intragroupes de la population ou des sources de revenus. Pour cela, on
considère que les individus se distinguent à priori par leurs caractéristiques personnelles, sociales ou
spatiales susceptible de classifier la population en sous-groupe distinct. D’une manière générale, la
technique de décomposition doit permettre d’estimer les parts – relatives et absolues – contribuées par
l’inégalité inter et intragroupes à l’inégalité totale. Par ailleurs, la présente étude ne s’intéressera qu’à
une technique de décomposition de l’inégalité par sous groupes selon le niveau d’éducation, classe
d’âge et la catégorie professionnelle, afin de pouvoir constituer une hypothèse préalable de la
segmentation. C'est-à-dire que la question est de savoir si l’inégalité de salaires au sein de différentes
catégories d’emploi est relativement plus forte que parmi les niveaux d’éducation. Si tel est le cas, la
répartition inégale de l’emploi est considérée comme une des causes prépondérantes de l’inégalité
salariale.
La structure additive de la décomposition statique58 proposée par Shorrocks en 1980 s’explique
sous forme générale suivante :
I=∑j=1
k
w j( μ , n) I j+ I b⇔ I=I w+ I B (2-6)
L’inégalité totale I est la somme de l’inégalité intergroupe,I w , de l’inégalité intragroupe,I b
[Cowell et Jenkins (1995)]. En fait, l’inégalité intragroupe peut être obtenue par les inégalités de
chaque sous groupes k pondérées par leur poids respectifs wj sachant que ce dernier de leur revenu
moyen µj et de leur taille nj (j varie de 1 à k). La contribution relative de l’inégalité intragroupe, x pour
cent (intergroupe, 100-x pour cent), s’effectuent en divisant l’inégalité agrégée par l’inégalité
intergroupe (intragroupe). En pratique, les indices sont non décomposables lorsqu’ils laissent une
partie résiduelle, une fois que l’opération est effectuée. Parmi des mesures indicatrices existantes,
l’indice de Theil se montre avantageux puisque la décomposition de celui-ci nous laisse deux
composantes explicables, à savoir les inégalités inter et intragroupes, précédemment notées, tant dis
que l’opération de décomposition de l’indice de Gini, développé par Bhattacharya et Mahalanobis
(1967), laisse une troisième composante restant difficile à interpréter, malgré maintes tentatives de la
procéder par certains auteurs59. Par conséquent, l’indice de Theil décomposable présente un grand 58 La méthode de décomposition statique consiste à désagréger l’inégalité totale en inégalités inter et intragroupes à une période donnée tandis que la méthode de décomposition dynamique a pour but d’expliquer les causes de changement de l’inégalité d’une période à l’autre. Voir la décomposition dynamique des inégalités dans Mookerjee et Shorrocks (1982).59 La dernière composante est la contribution de l’intensité de la variation transversale entre les groupes, autrement dit la contribution à l’inégalité totale des inégalités intergroupes dérivées du chevauchement entre les distributions, voir Mussard et Terraza (2003).
106
intérêt à l’égard de notre présente étude. La démonstration mathématique se déroule de manière
suivante. A l’équation (2-2) ci-dessus, on ajoute une population totale de taille n répartie en k sous
populations dont le revenu moyen est de y . L’indice de Theil s’écrit alors:
T=1n∑j=1
k
∑i=1
n j [ y ji
y ] . ln( y ji
y ) (2-
7)
En multipliant y ji parn j y j , de sorte que le terme Ttotale = Tw + Tb apparaît, les inégalités inter (Tb) et
intragroupes (Tw) par l’indice de Theil s’expriment de manière suivante60:
T b=∑j=1
k n j y j
n yln
y j
y (2-8)
T w=∑j=1
k n j y j
n y. 1n j∑i=1
n j y ji
y jln
y ji
y j (2-9)
En définitive, les méthodes explicitement considérées doivent s’appliquer aux données
statistiques fiables afin d’obtenir des résultats concluants. En Thaïlande, les sources statistiques sur la
main d’œuvremain-d’œuvre sont disponibles dans plusieurs types d’enquêtes variant en fonction
d’objectifs étudiés, à un horizon périodique plus ou moins longue. Deux sources d’enquêtes, les plus
pertinentes en termes de fiabilité et de disponibilité, qui seront retenues tout au long de ces études
concernene , d’une part l’Enquête sur la main d’œuvremain-d’œuvre, Labor Force Survey (LFS) , et,
d’autre part, l’Enquête du panel socio-économique, Household Socio-Economic Panel Survey
(HSEPS).
B. Sources statistiques
Les principales instances productrices de statistiques nationales se résument à deux grandes
institutions – le Ministère de l’emploi et le Bureau de Statistique Nationale. La première s’occupent
d’une gestion administrative et la seconde s’engage à gérer les enquêtes dérivées auprès des ménages.
Depuis l’année 1968, le Bureau de Statistique Nationale dispose des enquêtes périodiques sur la main
d’œuvremain-d’œuvre, visant à valoriser l’évolution des ressources humaines. Il s’agit de l’Enquête
60 Voir Mussard, Seyte, Terraza (2003) p.2.
107
sur la main d’œuvremain-d’œuvre, Labor Force Survey (LFS). Malgré ses qualités de régularité et de
fiabilité, les ménages et les individus représentatifs ne sont pas suivis de manière répétitive. Dans ce
cas, les données de panel doivent permettre de mettre en œuvre des analyses de mobilités. A cet
égard, il s’importe de considérer l’enquête longitudinale sur la main d’œuvremain-d’œuvre, noté
l’Enquête de panel soco-économique, Household Socio-Economic Panel Survey (HSEPS), réalisé
depuis 2004.
[a.] Enquête sur la main d’oeuvremain-d’œuvre
Mise en place depuis 1963, l’Enquête sur la main d’œuvremain-d’œuvre (LFS) consiste à établir
un ensemble des variables inhérentes à l’emploi nécessaires à l’établissement d’indicateurs du bien-
être dans le marché du travail. Depuis 1971, l’enquête prioritaire est effectuée en deux temps de
l’année: la première énumération se déroule en février-mars, mois creux de l’agriculture car en pleine
saison sèche; la deuxième correspond au mois de juillet-septembre, période de pluies et de l’arrivée
des nouveaux diplômés au marché du travail. Ce n’est à partir de 1998 qu’elle est devenue
trimestrielle: en février, mai, août et novembre qui correspond à la période des récoltes. Depuis 2001,
la LFS s’effectue sur une base mensuelle [Sue Lo-Utai (2003) p.2]. Stratifiée à deux degrés61, les
données de l’enquête sont collectées par les questionnaires auprès de plus de soixante milles ménages
par an, basées sur un calcul annuel de statistique démographique. Entre 1963 et 1983, la population
âgée de 11 ans et plus a été classée comme économiquement active alors qu’à partir de 1983, l’âge de
travailler est passé de 11 et plus à 13 ans et plus. La dernière modification a été apportée en 2001 où
les personnes en âge de travailler ont entre 15 et plus. Depuis sa création, la LFS incorpore petit à petit
des nouvelles variables susceptibles d’apporter les informations supplémentaires sur l’évaluation du
marché du travail. Principales variables englobent généralement les situations de l’emploi – actifs
occupés, chômeurs ou hors du marché –, le nombre d’heure de travail, les revenus, le type d’industrie,
de profession, le statut de l’emploi actuel, le niveau d’éducation, la taille de l’établissement et le statut
de migration. Toutefois, l’absence de certaines informations constitue des limites d’analyses des
mobilités malgré une durée de vie de l’enquête: manque d’informations sur la profession et les salaires
antérieurs, sur le membre d’unions syndicales et sur la satisfaction de l’emploi courant etc.
Mise à jour régulier, l’enquête prioritaire s’appuie sur les normes internationales de concepts, de
définitions et de classifications. Cependant, trois contraintes méthodologiques sont connues.
Premièrement, la définition une personne employée au cours d’une période de référence semble être
inappropriée. En fait, elle se définit comme étant une personne qui travaille au moins une heure durant
61 Voir Anon Juntavich (2000).
108
une semaine référencée, quelque soit niveau de rémunération [Anon (2000) p.7]. Personne ayant une
heure de travail durant une période de référence est considérée comme occupée. Par conséquent, le
nombre d’individus employés pourrait être certainement surestimé, la prise en compte des personnes
sous employées est alors plus que nécessaire à la construction d’indicateurs du bien-être.
Deuxièmement, à partir de 2001, les classifications de certaines variables ont été modifiées afin de
mettre à jour d’une telle enquête par rapport aux changements de classifications internationales telles
que la classification du type d’industries et d’occupation. En effet, entre 1963 et 1999, la classification
des professions est codifiée par la Classification Internationale Type de Professions de 1958 (CITP-
58) tant dis qu’à partir 2000, elle est classée par la CITP de 1988 (CITP-88) [OCDE/ESCAP/BASD
(2004) p.11]. Il s’en résulte que des données entre deux sous périodes sont peu cohérent et que ceci
rend difficile à la stratification des professions et des industries. Enfin, la comptabilité des chômeurs
est régulièrement confrontée au problème de la variation saisonnière de main d’œuvremain-d’œuvre,
notamment entre la période de récolté où le chômage est moins important et d’autres périodes où le
nombre de chômeurs est brutalement à la hausse. Par conséquent, il s’importe, dans les années à venir,
d’améliorer une méthode d’ajustement quantitatif des données statistiques afin de corriger une telle
déformation [Anon (2000) p. 09]. En raison de la disponibilité des données de longue période, la mise
en examen de dynamique de l’inégalité se basera sur l’Enquête sur la main d’œuvremain-d’œuvre
(LFS) comprise entre 1985 et 2004. Toutefois, cette dernière, considérée comme une source statistique
transversale, ne permettrait pas de mesurer des conditions du marché relatives aux mouvements
d’emploi et salariaux. Par conséquence, il importe de compléter nos analyses empiriques de la mobilité
professionnelle et salariale à l’aide de l’Enquête de Panel socio-économique, Household Socio-
Economic Panel Survey (HSEPS).
d.[b.] Enquêtes de panel socio-économique (HSEPS)
Dès la fin des années 1990, est soulevée la question de l’efficacité de méthodes d’évaluation
d’impact de la crise économique et financière sur le bien-être de la population. La Thaïlande doit
disposer une nouvelle source statistique de panel qui contribuera aux analyses dynamiques de
l’économie et de l’évolution de la société. Ainsi, avec les initiatives des instances internationales,
nommées en premier la Banque mondiale et la Banque asiatique du développement économique, le
Comité National du Développement Economique et Social, National Economic and social
Developement Board, (NESDB) est chargé de mener la mise en œuvre des programmes du Partenariat
national pour le développement en matière pauvreté et, Country Developement Partnership on Poverty
Analysis and Monitoring,( CDP-PAM ). Lancé le 30 Mai 2003, cette coopération a pour objectif
principal d’implémenter des moyens efficaces afin d’appréhender des origines de la pauvreté et de
109
l’inégalité de revenus. Quatre dimensions ont été suscité: amélioration de qualité des données (enquête
de panel) ; techniques de mesure de la pauvreté et la vulnérabilité ; stratégie de réduction et
d’appréciation de la pauvreté [Banque Mondiale et PCU (2003) p.4]. L’enquête de panel socio-
économique (HSEPS), faisant parti du projet de rénovation des données longitudinales, se charge par
le Bureau de Statistique Nationale. L’enquête pilote menée au près de 250 ménages pour cinq
provinces a été conduite en 2004 afin de contrôler les éventuelles difficultés. Les observations sont
procédées en trois vagues durant trois années consécutives, de 2005 à 2007, et sont réalisées par des
questionnaires auprès de 6000 ménages, stratifiés à deux degrés. L’investigation consiste tout d’abord
à collecter toute information au près des ménages telle que les revenus aperçus, les avis relatifs à la
question de la pauvreté. Ensuite, l’enseignement inhérent au marché du travail est enregistré dans la
deuxième partie, visant à mesurer un aspect statique et dynamique de l’emploi, c'est-à-dire la situation
d’emploi actuel, la mobilité d’emploi et la durée du chômage ou d’emploi etc. La spécificité de
l’enquête HSEPS est la possibilité d’avoir les informations précises sur le changement individuel de
profession dès leur entrée du marché du travail. Toutefois, certaines variables, non prise en compte
dans l’enquête, posent un certain nombre de limites quant aux analyses de la mobilité. D’une part, les
types de professions sont inexistants et se résument à un simple regroupement de statut d’emploi.
D’autre part, combiné à cette dernière limite, le renseignement du changement individuel d’emploi est
moins précis lorsqu’il s’agit de questionner sur les mobilités d’emploi antérieures, remontant à plus de
deux ans.
Les investigations de dynamiques de l’inégalité et d’évidences empiriques par méthodes
économétriques s’appliquent de manière différente. L’examen de l’inégalité salariale exige l’enquête
sur la main d’œuvremain-d’œuvre (LFS) puisque celle-ci compose d’une série de données
transversales d’une logue période et la vérification empirique de la segmentation et des mobilités,
salariales et d’emploi, se déroulera à l’aide de l’enquête socio-économique de panel (HSEPS).
2. Ampleur et évolution de l’inégalité salariale
L’ampleur et d’évolution des écarts salariaux en milieu urbain s’accompagnent de l’inefficacité
des politiques en matière de répartition des richesses. L’identification du phénomène connu doit être
prise en considération afin d’éviter l’accentuation des dynamiques du marché, déjà défavorables aux
plus démunies. Dans cette perspective, la présente étude consistera à mettre en lumière des trajectoires
et l’inégalité salariale au niveau national et structurel, c'est-à-dire selon les caractéristiques
personnelles, de l’emploi et géographiques, afin d’établir au préalable des causes de persistance de
l’inégalité. Dans un premier temps, nous allons procéder à une analyse descriptive de l’évolution et de
110
l’ampleur de l’inégalité des salaires. Dans un second temps, la décomposition de l’inégalité par sous-
groupes sera examinée, permettant de fonder une hypothèse du marché du travail segmenté.
A. Répartitions et trajectoires salariales
Peu de littérature au sujet de l’inégalité salariale dans les villes sont considérées. Parmi d’autres,
l’examen récent de Medhi et al (2006) parvient à s’interroger, au niveau national, sur la répartition des
salaires selon le niveau d’éducation, la région, le secteur de production et le secteur formel-informel à
l’aide d’une enquête LFS entre 1992 et 2004. Cette dernière montre que, d’abord l’écart salarial est
une conséquence directe de dispersion de productivités individuelles, et ensuite le secteur informel
génère un emploi, non seulement, à faible revenu mais également non protégé par la législation du
travail [Medhi et al (2006) p.33]. Toutefois, un tel résultat n’est issu qu’une étude descriptive sans
approfondir une recherche des causes inhérentes au marché du travail.
A l’aide de l’Enquête prioritaire de main d’œuvremain-d’œuvre (LFS) entre 1985 et 2004,
l’objectif de la présente étude consiste à explorer les dynamiques salariales en milieu urbain au cours
de ces vingt dernières années. Ce fessant, les observations se réduiront exclusivement sur les employés
vivants en ville, âgés entre 15 et 64 ans, qui déclare d’avoir un salaire ou un gain positif,
correspondant à un nombre d’heure de travail hebdomadaire positif durant la période de référence.
Une telle sélection englobe des emplois formels et informels qui regroupent majoritairement un
ensemble respectif du salariat et des emplois indépendants62. Pour une raison de représentation,
l’étude porte sur certaines années de telle sorte que l’on puise poursuivre une analyse dynamique
d’une longue période : 1985, 1990, 1995, 1998, 2000, 2004. Il est à remarquer que l’enquête de 2004
exclut les gains liés aux emplois indépendants en raison d’une séparation de l’enquête formelle-
informelle. L’interprétation des résultats issus de cette période procéder de manière prudente. Sur le
plan technique, le calcul inhérent au revenu mensuel, qui sera utilisé dans l’étude, s’opère de manière
suivante : entre 1985 et 2000, les salaires mensuels seront calculés à partir d’une base d’information
disponible, c’est-à-dire les revenus déclarés du type horaire, journalier, hebdomadaire ou mensuel. Ces
derniers seront ensuite harmonisés à l’échelle mensuelle en utilisant le nombre d’heure du travail
journalière et de jours du travail par semaine63.
a. Dynamique salariale selon genre, âge et région62 La sélection des données suit une recommandation de Milanovic (1998) p.4.63 L’opération est facilitée par le fait qu’une grande partie d’individus ont un revenu mensuel. Le reste a subi une opération mathématique suivante : revenu mensuel = revenu horaire x heure du travail journalier x jours du travail par semaine x 4 (on considère que les individus travaillent en moyenne 4 semaines par mois durant une année) = revenu journalier x jours du travail par semaine x 4= revenu hebdomadaire x 4.
111
L’investigation de l’évolution des revenus du travail permet d’illustrer une dimension
structurelle et dynamique de la répartition des salaires dans le marché du travail urbain. Les calculs
des salaires réels moyens et des taux de croissance salariale selon genre, classe d’âge et région se
résument dans le tableau 2-1.
Tableau 2-1: Salaire réel moyen et taux de croissance de salaires selon genre, âge et région en milieu urbain entre 1985 et 2004.
Salaire moyen réel (Baht (1)) Taux de croissance salariale (%)
1985 1990 1995 1998 2000 2004(2) 85/90 90/95 95/98 98/00 00/04Genre
Homme 6 415 7 436 10 344 9 897 9 728 11 375 10,2 29,1 -4,5 -1,7 16,5Femme 4 651 5 702 7 841 7 915 8 028 10 345 10,5 21,4 0,7 1,1 23,2
Age 15-19 2 064 2 705 4 126 4 016 3 837 4 104 6,4 14,2 -1,1 -1,8 2,7 20-24 3 866 4 280 5 774 5 458 5 533 5 549 4,1 14,9 -3,2 0,8 0,2 25-34 5 562 6 198 8 152 7 545 7 664 9 342 6,4 19,5 -6,1 1,2 16,8 35-54 7 069 8 918 11 980 11 118 10 840 13 897 18,5 30,6 -8,6 -2,8 30,6 55-65 7 637 8 147 12 325 13 189 12 815 18 140 5,1 41,8 8,6 -3,7 53,3Région
Bangkok 6 300 7 630 10 493 10 494 10 288 13 081 13,3 28,6 0,0 -2,1 27,9Centre 5 229 5 771 8 543 7 979 8 081 9 923 5,4 27,7 -5,6 1,0 18,4Sud 5 424 6 501 8 232 8 081 7 698 7 958 10,8 17,3 -1,5 -3,8 2,6Nord 4 634 5 653 7 326 6 888 7 072 9 069 10,2 16,7 -4,4 1,8 20,0Nord-est 4 973 5 475 8 501 7 627 7 709 8 430 5,0 30,3 -8,7 0,8 7,2
National 5 680 6 698 9 261 9 003 8 958 10 927 10,2 25,6 -2,6 -0,5 19,7Notes: les salaires moyens mensuels sont déflatés par le niveau d'inflation (prix base 100 en 2002); (1) au 8 octobre 2007, 1 euro = 48,202 Baht, monnaie nationale; (2) les revenus estimés excluent les gains liés aux emplois à propre compte. Taux de croissance globale des salaires s'exprime entre deux périodes consécutives.
Sources: l'Enquêtes sur la main d'œuvre (LFS) du troisième trimestre (1985-2004).
Le tableau 2-1 montre que le salaire réel moyen dans les villes augmente progressivement
durant la période de prospérité (1985-1995), avant de s’effondre dès l’arrivée de la crise économique.
Le pouvoir d’achat en moyenne augmente de 5 680 à 10 927 bahts pour mois entre 1985 et 2004. Le
niveau de salaire réel a connu une forte croissance de 25,6 pour cent entre 1990 et 1995, période de
croissance économique régulière. Toutefois, l’impact négatif de régression économique induit une
réduction de 2,6 pour cent de salaires moyens entre 1990 et 1998. Cette observation montre, en accord
avec l’analyse du chômage, une flexibilité existante de prix et de quantité quant à l’ajustement à la
crise, c'est-à-dire un phénomène conjoint d’une réduction générale de salaires et de quantité d’emploi.
Par conséquent, une diminution brutale de salaires est combinée à une baisse du nombre d’employé
dont le taux de chômage en milieu urbain rehausse de 1 à 4,1 pour cent entre 1995 et 1998, comme
l’illustre le tableau 1-7, dans le premier chapitre. Néanmoins, en dépit d’une augmentation des
richesses dans l’ensemble de l’économie, la persistance des écarts salariaux – homme-femme, classe
d’âge et région –, forme un caractère structurel de l’économie urbaine. Le tableau 2-1 fait appel à trois
remarques essentielles.
En premier lieu, tout comme des pays en développement, l’écart salarial entre travailleurs
d’homme et de femme existent et persistent malgré sa déduction progressive. Le tableau 2-1 met en
évidence un accroissement de l’écart salarial en dix ans de prospérité économique, passant de 1 763 à
112
2 503 bahts par mois entre 1985 et 1995, équivalent en moyenne à 15 point d’écart du pourcentage du
revenu total. La raison de cette répartition inégalitaire accorde à une hausse spectaculaire du pouvoir
d’achat des employés d’hommes, observée entre 1990 et 1995. Tandis que les salaires réels moyens
des hommes augmentent au rythme de 29,1 pour cent, les revenus perçus par les femmes ne croissent
que de l’ordre de 21,4 pour cent entre 1990 et 1995. Cependant, la dispersion salariale entre deux
sexes joue à la baisse pour les années qui suivent. Ceci déroule systématiquement d’une réduction du
revenu réel des hommes, causée par la contraction des activités économiques en période de crise. Son
impact est négativement significatif pour les hommes. On enregistre une diminution d’environ 4,5
pour cent pour les hommes contre une hausse sensible de 0,7 pour les femmes entre 1995 et 1998. La
même tendance est observée au cours des années 1998 et 2000 avec une baisse de salaires moyens de
1,7 pour cent contre un accroissement de 1,1 pour cent pour les femmes. Par conséquent, à la fin des
années 1990, l’écart salarial entre hommes et femmes trouve son niveau initial de l’année 1985. En
outre, l’exclusion des revenus à compte propre en 2004 réduit considérablement l’inégalité salariale, le
salaire moyen des travailleurs du sexe masculin dépasse celui des employés féminins seulement de
1 030 baht par mois. Ce constat confirme l’étude de Medhi et al (2006) selon laquelle la dichotomie
formelle et informelle est susceptible d’apporter une disparité salariale en milieu urbain en Thaïlande
[Medhi et al (2006) p.33].
En deuxième lieu, le tableau 2-1 confirme l’hypothèse de l’effet d’ancienneté sur les revenus du
marché du travail urbain. D’une part, l’âge et les salaires sont en très forte corrélation, tout
particulièrement dans le secteur public où la tradition et les coutumes sont les valeurs fondamentales
de l’organisation. En fait, la supériorité de salaires réels moyens relatifs aux personnes âgées entre 35
et 65 ans s’affiche nettement. Le pouvoir d’achat des plus âgés (55-65) est entre trois et quatre fois
plus important que celui des plus jeunes (15-19), et une et deux fois plus que celui des employés
appartenant à tranche d’âge comprise entre 24 et 35 ans entre 1985 et 2004. L’évolution des salaires
réels semble être en faveur des personnes les plus expérimentées, au moins durant la période de
prospérité. L’accroissement du revenu réel des personnes appartenant à la classe d’âge 35-54 ans est
exceptionnellement le plus rapide, au rythme de 18,5 pour cent contre 6,4 et 4,1 pour cent pour les
plus jeunes (15-19) et les jeunes (20-24). Les écarts de variations relatives sont encore plus accentués
au cours période de pré-crise (1990-1995) où les taux de croissance salariale de 30,6 et 41,8 pour cent
sont accordés aux classes d’âge respective de 35-54 et 55-65 ans alors que seuls 14,2, 14,9 et 19,5 sont
attribués aux jeunes appartenant aux tranches d’âge de 15-19, 20-24 et 24-35, respectivement.
Toutefois, le ralentissement économique des années 1990 a eu un impact nettement négatif sur les
gains des travailleurs âgés entre 25 et 54 ans. Le déclin des activités économiques induit une baisse de
6,1 et 8,6 pour cent pour les employés dont les tranches d’âges sont comprises entre 25-34 et 35-54
113
ans, respectivement, alors que l’on assiste à une réduction légère de revenus des jeunes employés de
l’ordre de 1,1 et 3,2 pour cent pour les personnes âgées entre 15-19 et 24-34, respectivement. Il est à
noter que les individus ayant un salaire autour de la moyenne nationale ont majoritairement subis à des
conséquences négatives de la régression économique. Seules les personnes les plus âgées ont connu
une croissance de salaires en année de crise. En outre, dès que l’on exclut des gains liés aux emplois
indépendants, l’effet d’ancienneté est encore plus accentué. Pendant les années de redressement (2000-
2004), les individus âgés entre 55-65 ans sont rémunérés quatre fois plus élevés que les plus jeunes. La
tendance des disparités salariales semble persister, seulement exception faite pour la période de
contraction de l’économie.
En troisième lieu, l’essor de l’économie thaïlandaise durant les années 1980 induit un profond
changement en matière des disparités régionales. On constate une déviation très remarquée du revenu
parmi différentes régions. En effet, le tableau 2-1 affiche une prédominance des niveaux de
rémunérations des régions de Bangkok et du centre. Seuls Bangkok et ses agglomérations ont le degré
de salaires réels moyens, situé en dessus de la moyenne nationale tout au long des années considérées.
L’amplitude des salaires est d’autant plus significative que le revenu moyen au niveau national accroît.
Les personnes travaillant à Bangkok et agglomérations gagnent entre 1,3 et 1,5 fois plus que celles
vivant dans la région du Nord-est où les activités économiques sont peu développées. Les croissances
des revenus de différentes régions sont positives entre 1985 et 1990. Cependant, une accélération
remarquée est observée à Bangkok et au Sud où l’implantation des industries lourdes (extractive et
pétrolières) est conduite par les initiatives de l’Etat : les taux de croissance salariale en moyenne
atteint 13,3, 10,8 et 10,2 pour Bangkok, le Sud et le Nord contre 5,4 et 5 pour cent pour la région du
Centre et du Nord-est, exception faite pour la période allant de 1990 à 1995 où le taux de croissance de
cette dernière région est le plus élevé, atteignant son maximum de 30,3 pour cent. La région du Nord-
est est le plus touchée par l’effet négatif de la crise puisque l’on enregistre une réduction de près de 8,7
pour cent de salaires contre 1,5 pour cent pour la région du sud et la stabilité de revenu autour de
Bangkok. La disparité régionale est historiquement dirigée par des politiques du développement
industriel, centralisé autour de Bangkok et ses villes voisines. Les stratégies du développement
économique conçues auparavant, combinées aux dotations naturelles disponibles, ont rendu complexes
et difficiles aux autorités d’adopter des politiques industrielles décentralisées.
L’investigation des trajectoires de revenus selon le niveau d’éducation et de catégories d’emploi
a pour objectif d’évoquer les problématiques du débat théorique, constitué par deux théories
dominantes dans la littérature au sujet de l’inégalité salariale – théorie du capital humain et de la
segmentation.
114
b. Dynamique salariale selon niveau d’éducation, type d’industries et de
professions.
L’observation de la structure d’emploi quant au nombre important d’employés peu instruits
laisse penser que les grandes différences en dotations du capital humain constituent une cause
préoccupante du modèle du développement économique thaïlandais. Or, les dynamiques et les
politiques industrielles font apparaître une diversité de stratégies d’emploi telles que l’internalisation
du marché du travail, les sous-traitances et les emplois temporaires etc. Par conséquent, les parfaites
concurrences ne semblent exister que dans certains segments. Les plus instruits ont une chance égale
de se trouver dans un marché extrêmement concurrentiel aussi bien que dans le marché interne
protégé. Il convient de montrer des disparités salariales entre différents niveaux d’instruction et entre
différents types des industries et des professions
Tableau 2-2: Salaire réel moyen et taux de croissance de salaires selon niveau d'éducation, types des industries et des professions en milieu urbain entre 1985 et 2004.
Salaire moyen réel (Baht (1)) Taux de croissance de salaires (%)1985 1990 1995 1998 2000 2004(2) 85/90 90/95 95/98 98/00 00/04
Niveau d'éducation Sans instruction 4 138 4 680 7 120 4 633 5 226 8 726 11,6 34,3 -53,7 11,4 40,1Primaire 4 371 4 879 6 616 5 790 5 955 5 525 10,4 26,3 -14,3 2,8 -7,8Secondaire (1er cycle) 5 820 6 374 8 891 7 491 7 026 6 601 8,7 28,3 -18,7 -6,6 -6,4Secondaire (2ème cycle) 6 531 6 236 10 267 7 931 7 336 7 228 -4,7 39,3 -29,4 -8,1 -1,5Secondaire professionnel 7 610 10 147 14 483 13 671 13 741 10 725 25,0 29,9 -5,9 0,5 -28,1Diplôme (Bac+2) 7 525 7 586 10 693 9 445 9 957 12 529 0,8 29,1 -13,2 5,1 20,5Universitaire 10 689 12 254 16 213 16 347 15 574 18 861 12,8 24,4 0,8 -5,0 17,4
Types des industries (3) Industrie manufacturière 2 396 3 234 6 347 6 991 7 107 9 616 25,9 49,1 9,2 1,6 26,1Construction 2 672 3 208 6 197 6 946 6 036 10 217 16,7 48,2 10,8 -15,1 40,9Electricité, gaz et eau 4 623 6 593 12 442 18 689 15 991 16 643 29,9 47,0 33,4 -16,9 3 ,9Commerces 3 282 4 622 7 672 9 475 9 729 8 543 29,0 39,8 19,0 2,6 -13,9Transports et communications 3 384 4 667 8 273 9 803 10 136 12 732 27,5 43,6 15,6 3,3 20,4Service 2 944 4 563 7 796 8 948 9 036 16 268 35,5 41,5 12,9 1,0 44,5
Types des professions (4) Personnel des professions scientifiques 8 946 10 809 15 191 14 880 15 756 - 17,2 28,8 -2,1 5,6 -Directeurs et cadres 12 876 18 251 30 219 26 660 21 679 - 29,5 39,6 -13,3 -23,0 -Personnel commercial et vendeurs 7 109 7 621 9 858 9 431 8 215 - 6,7 22,7 -4,5 -14,8 -Employés de type administratif 5 586 6 678 9 309 8 141 8 100 - 16,4 28,3 -14,4 -0,5 -Employés de transport et
communication 5 297 5 805 7 902 7 344 7 104 - 8,8 26,5 -7,6 -3,4 -Artisans et ouvriers de type artisanal 4 370 4 581 6 080 5 645 5 664 - 4,6 24,6 -7,7 0,3 -Employés de service 3 585 4 477 6 130 5 848 5 852 - 19,9 27,0 -4,8 0,1 -
National 5 680 6 698 9 261 9 003 8 958 10 927 10,2 25,6 -2,6 -0,5 19,7Notes: les salaires moyens mensuels sont déflatés par le niveau d'inflation (prix base 100 en 2002); (1) au 8 octobre 2007, 1 euro = 48,202 Baht, monnaie nationale; (2) les revenus estimés excluent les gains liés aux emplois à propre compte. Taux de croissance globale des salaires s'exprime entre deux périodes consécutives. Les valeurs sont manquantes pour l’année 2004 parce que le changement de codification des professions à partir de 2001 rend difficile à mettre en relation avec celle des années précédentes ; (3) Type des industries selon la Classification Types des Industries (CTI) de 1958. (3) Catégories professionnelles selon la Classification Internationale Type des Professions (CITP) de 1958,Sources: l'Enquêtes sur la main d'œuvre (LFS) du troisième trimestre (1985-2004).
Le tableau 2-2 suscite certains commentaires. En premier lieu, on assiste à une corrélation
positive entre les salaires et les niveaux d’instruction, les écarts et les variations relatives entre
différents niveaux semblent être amplifiés au cours de ces années. Le tableau 2-2 montre que les
diplômés universitaires perçoivent leur revenu entre 2,4 et 3,4 fois plus que les personnes ayant un
115
niveau primaire et entre 1,6 et 2,6 fois plus que les employés ayant un diplôme secondaire second
cycle général entre 1985 et 2004. Ces rapports suivent une tendance à la hausse au cours de ces années
concernées. Par ailleurs, la dispersion salariale règne à l’intérieur du groupe des personnes ayant le
niveau d’instruction secondaire. En fait, l’écart de revenu entre les diplômés secondaires premier cycle
et secondaire deuxième cycle de filière professionnelle est compris entre 3,8 et 10,4 point de
pourcentage du revenu total durant cette période. En termes d’évolution des trajectoires salariales, la
fin des années 1980 marque une croissance salariale généralement positive, – hormis le niveau d’étude
secondaire second cycle général –, alors que ce dernier engendre un rythme de croissance
spectaculaire entre 1990 et 1995. Durant cette période, la prospérité économique a bénéficié
approximativement égale à toutes les personnes de tous les niveaux d’instruction. Toutefois,
l’effondrement du système économique et financier est plus destructeur de revenu des moins instruits
que celui des plus diplômés lorsque la réduction des salaires moyens des moins éduqués est très
prononcée : 53,7 et 14,3 pour cent pour les sans instructions et les employés ayant un niveau primaire
contre une croissance légèrement positive de 0,8 pour cent pour les diplômés universitaires. Il est à
remarquer que le développement économique durant les années de redressement (1998-2004) est
moins favorable aux personnes ayant un niveau d’étude secondaire. Le tableau 2-2 met en évidence
une réduction consécutive de salaires moyens pour 1998-2000 et 2000-2004, au rythme respectif de
6,6 et 6,4 pour cent pour les diplômés secondaire premier cycle, et de 8,1 et 1,5 pour cent pour les
personnes avec un niveau d’étude secondaire second cycle général. Au total, les variations relatives de
revenus des personnes peu qualifiées sont loin derrières celles des plus instruits. Cette inégalité
s’explique par une demande excédentaire du travail qualifié, en particulier dans certains secteurs et
certaines catégories des professions
En deuxième lieu, la transformation vers l’économie du marché émerge certain déséquilibre
inhérent au marché du travail. Certaines catégories d’industries et de professions bénéficient d’une
croissance régulière de revenus alors qu’il n’en est moins vrai pour certaines d’autres. Le tableau 2-2
conduit à des résultats intéressants. D’une part, l’accélération de croissance salariale dans le secteur de
production et de distribution d’électricité, gaz et eau dépasse celle des autres secteurs avec une
croissance de 29,9 pour cent en 1985. Les employés, peu nombreux soient ils, gagnent entre 1,7 et 2,7
fois plus que ceux dans le secteur de construction. En outre, l’industrie manufacturière, qui a connu
une croissance expansive dès la fin des années 1980, montre sa performance en matière de croissance
salariale qui atteint près de 25,9 et 49,1 pour cent entre 1985 et 1990, et 1990 et 1995. Cependant, le
niveau de salaires moyens d’un tel secteur reste inférieur à la moyenne nationale. Ce paradoxe se
justifie par l’existence du nombre élevé de main d’œuvremain-d’œuvre peu qualifiée dans ce secteur
de production. Les répercussions négatives de la crise sur les revenus sont les plus prononcées dans le
116
secteur de construction64 et de distribution et de production d’électricité, gaz et eau où les taux de
croissance salariale sont -15,1 et -16,9 pour cent respectivement entre 1995 et 1998. En définitive, les
employés dans les secteurs de construction, de commerce et d’industrie manufacturière, qui se
présentent près de trois quarts de la population active en milieu urbain, sont les moins rémunérés
malgré leur accélération de croissance salariale au cours de ces années. D’autre part, si la dispersion de
salaires parmi diverses industries persiste, il en est également vrai parmi différentes professions. Le
tableau 2-2 montre une hausse spectaculaire de salaire dans certaines catégories de professions, déjà
mieux rémunérées. En fait, les cadres et directeurs perçoivent les salaires entre 3 et 5 fois plus que
ceux des ouvriers peu qualifiés, et entre 2,7 et 3,3 fois plus que les personnels administratifs entre
1985 et 2004. Trois catégories de professions, – les employés de transport et communication, des
ouvriers et des employés de services –, sont non seulement parmi les moins payés mais leur revenu
n’assure pas la moyenne nationale. L’impact négatif de la crise sur les salaires est global et pèse
lourdement sur la réduction salariale des employés administratifs et des cadres au rythme de 14,4 et
13,3 pour cent respectivement entre 1995 et 1998, même près de 23 pour cent entre 1998 et 2000 pour
les cadres supérieurs. La répercussion négative sur les revenus est retardée pour les personnels
commerciaux et vendeurs : -14,8 pour cent entre 1998 et 2000.
L’analyse descriptive des trajectoires salariales – selon genre, âge, région, niveau d’éducation,
catégories d’industries et de profession – conduit à deux principaux commentaires. D’une part, on
assiste à une hausse persistante de la dispersion salariale, causée entre d’un côté des personnes les plus
instruites, relativement âgées vivant à Bangkok et ses agglomérations qui appartiennent à certaines
catégories d’emploi, et de l’autre, les moins instruits, les jeunes vivant dans la région du Nord et du
Nord-est qui ont un emploi dans certains secteur – construction, vendeurs et ouvriers etc. –. D’autre
part, la croissance salariale favorise, dans certaine mesure, la situation des employés peu qualifiés
tandis que la retard de variation salariale est enregistré pour les employés dont l’emploi est moins
rémunéré par rapport aux cadres et d’autres catégories d’emploi mieux rémunérés. Cet écart est
d’autant plus accentué que le revenu moyen national augmente et que l’instabilité économique
s’installe. Nous sommes amenés à mesurer l’inégalité salariale par les mesures précédemment
explicitées afin d’explorer un processus conduisant à la persistance de l’inégalité hypothétiquement
posée.
B. Analyse de l’inégalité salariale dans les zones urbaines64 En fait, au début des années 90, une grande partie de fonds monétaires privés a été consacrée aux projets d’immobilier et de construction, dont l’investissement est un des moteurs de la croissance économique du pays. Une fuite des capitaux a provoqué une panique générale et une rigidité monétaire [Lee et Rhee (1998) p. 2-5]. L’effondrement du secteur financier a entraîné immédiatement une suspension de plusieurs constructions immobilières en cours.
117
L’examen de l’évolution des salaires doit être complété par la présentation des mesures
d’inégalité. Il s’agit de questionner sur la pertinente hypothèse d’une persistance, voire d’une hausse
sans cesse, de l’inégalité salariale en milieu urbain. Basée sur l’Enquête sur la main d’œuvremain-
d’œuvre entre 1985 et 2004, l’inégalité salariale agrégée sera mesurée par indices d’inégalités et
rapports inter-déciles, fréquemment utilisés dans la littérature contemporaine. Afin d’assurer une
comparaison inter-temporelle des inégalités salariales, les revenus mensuels sont déflatés par l’indice
des prix à la consommation, base 100 en 2002. Tout d’abord, les mesures indicatrices délivrent un
certain nombre d’éléments inhérents à la distribution inégalitaire de salaires.
Figure 2-2 : Indice de Gini et de Theil des salaires réels mensuels pondérés.
1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 20040.00
0.05
0.10
0.15
0.20
0.25
0.30
0.35
0.40
0.45
0.50
Gini Theil Gini (sans emploi indép.) Theil (sans emploi indép.)
Source : à partir de LFS (1985-2004).
Il est opportun de procéder à une comparaison, d’une part, entre différentes mesures , et,
d’autre part, entre les indices appliqués aux revenus avec et sans gains liés aux emplois indépendants.
Ce dernier processus a pour objectif d’effectuer une analyse visant à séparer le salariat à l’emploi
compte propre. La figure 2-2 suscite quelques commentaires intéressants. D’une part, deux indices
d’inégalités montrent une stabilité de l’inégalité, voire même une légère hausse pour certaines années.
Ceci qualifie une persistance de l’inégalité salariale malgré des fluctuations incertaines au début des
années 1990. D’autre part, l’exclusion des revenus en provenance des emplois indépendants conduit à
des résultats très peu modifiés. En fait, lorsque les revenus de l’emploi indépendant sont exclut, les
118
deux indices d’inégalités sont très légèrement inférieurs, sauf en 1988 où les gains de l’emploi
indépendant jouent un rôle prépondérant dans la mesure de l’inégalité. Par conséquent, la contribution
du secteur informel, – présenté par des emplois à propre compte, principaux créateurs d’emploi
informel –, à l’explication du phénomène persistant de l’inégalité salariale est relativement réduite. Par
conséquent, la présentation qui va suivre composera des analyses de l’inégalité salariale qui
impliquent les revenus du salariat et des emplois à propre compte.
Pour éviter la surcharge de la présentation, le tableau A-2-1, indiquant les indices de Gini, de
Theil, la part des revenus du décile dans le revenu total et les rapports inter-décile, ont été rapporté en
annexe. De manière tout à fait attendu, le décollage de l’économie thaïlandaise en fin des années 1980
conduit à une croissance de l’inégalité des revenus du travail, caractérisée par une hausse des mesures
d’inégalités. En fait, l’indice de la concentration, figuré dans le tableau A-1-2 en annexe, augmente de
0,40 à 0,43 entre 1985 et 1988, avant de se stabiliser à 0,42 entre 1989 et 1995. La montée de
l’inégalité est plus marquée si l’on considère un indice de Theil. Ce dernier est passé de 0,30 à 0,37
entre 1995 et 1998, près de 7 points d’écart. La deuxième moitié des années 1990 marque une légère
baisse de la dispersion. Toutefois, le déclin de l’économie causé par la crise financière induit une
nouvelle fois une hausse brutale de l’écart salarial en villes. Ainsi, l’indice de Gini est passé de 0,41 à
0,42 et celui de Theil engendre une augmentation plus nette, passant de 0,31 à 0,34 entre 1996 et 1998.
L’inégalité salariale durant la période de redressement en 2000 retrouve vite son niveau initial de
1996. Par ailleurs, l’instabilité des mesures d’inégalités est observée au cours des années 2001 et 2004
malgré une hausse tendancielle de ces dernières65.
En dépit de l’explicité des mesures indicatives, une telle analyse dissimule l’information
nécessaire quant à la structure distributive des salaires. Basés sur les statistiques de fonction de
répartition, la calcul des déciles de revenus permet de monter, d’un part la proportion du salaire d’un
décile dans le revenu total , et, d’autre part, les rapports inter-décile, – rappelons qu’il s’agit du
rapport des limites supérieures de deux déciles intéressés. Le tableau A-1-2, rapporté en annexe, fait
appel à deux remarques essentielles quant à la structure de l’inégalité.
En premier lieu, la part des revenus des personnes peu rémunérées, appartenant au 1er jusqu’en
7ème décile, a considérablement décliné, tout particulièrement pour les travailleurs moyennement
rémunérés. En effet, la montée de l’inégalité durant la période de prospérité est accompagnée par une
réduction des salaires des employés peu rémunéré. Ainsi, la part des revenus des personnes
appartenant aux sept premiers déciles dans le revenu total a réduit de 51 à 49 pour cent entre 1985 et 65 Notons que les revenus liés aux emplois indépendants sont exclut du calcul de l’inégalité entre 2001 et 2004 en raison d’une indisponibilité de ces derniers dans l’enquête prioritaire.
119
1992 alors que 49 et 51 pour cent de revenu total n’appartiennent qu’à 30 pour cent les mieux
rémunérés durant la même période. Ce recul est plus marqué pour les employés moyennement
rémunérés – soient de 4ème à 7ème décile. En fait, la proportion des salaires dans la somme totale de
revenu pour ce dernier connait un déclin de plus de 3 points du pourcentage alors que celle des moins
rémunérés, – du 1er à 3ème décile –, augmente légèrement de 0,2 points. En outre, durant les années
1990, la structure dynamique de l’inégalité semble être stabilisée. Toutefois, à partir de l’année 2001,
la situation de l’économie est plus bénéfique aux personnes mieux rémunérées, – sans emplois
indépendants –, que celles d’en bas de l’échelle de distribution puisque la part des revenus de ce
dernier groupe est passée de 61 à 64 pour cent en l’espace de 4 années. Contrairement au fait éprouvé
en fin des années 1980, la chute des proportions des salaires des personnes mauvais et moyennent
rémunérées pousse l’inégalité globale à la hausse.
En deuxième lieu, l’évolution des ratios inter-déciles confirme les résultats précédents selon
lesquels la répartition salariale est plus favorable aux personnes mieux rémunérés que celles
appartenant aux classes inférieures, notamment celles de la classe moyenne. En effet, la valeur du
rapport des limites supérieures entre 9ème et 5ème déciles a augmenté de 2,2 à 2,9 pour cent entre 1985 et
2000 et a atteint son maximum de 3 pour cent est constaté en 1995. Cela illustre une évolution
défavorable à la classe moyenne puisque les meilleures rémunérées perçoivent près de trois fois plus
que ceux qui appartiennent à la clase moyenne. Inversement, le ratio inter-décile entre 9ème et 1ère
déciles a progressivement diminué, près d’un point entre 1985 et 2000: plus de 6,6 et 5,8 fois de
salaires que 30 pour cent des meilleurs classés perçoivent par rapport à 30 pour cent des plus pauvres.
Dans ce cas, la croissance salariale est qualifiée pro-pauvres. Par ailleurs, la situation des moins
rémunérés est d’autant plus dramatique que l’on exclut les gains des emplois indépendants pour la
période allant de 2001 à 2004. Les rapports inter-déciles entre 9ème et 5ème, et entre 9ème et 1er sont
significativement élevés durant cette période que ceux des années antérieures.
Au total, l’état du marché de l’emploi semble dynamiser l’inégalité salariale persistante en
milieu urbain. L’économie du marché et des politiques de centralisation du développement industriel
conduisent à des disparités salariales entre différents secteurs, catégories de profession, niveaux
d’éducation, âge, gendre et régions. Or, l’objectif de la présente étude est de mettre en examen causes
pertinentes de l’inégalité consécutives aux théories du capital humain et de la segmentation. Dans cette
perspective, les résultats dérivés de la décomposition selon sous-groupe d’éducation, d’âge et de
professions permettent de répondre au préalable à la question relative à l’hypothèse explicite de la
segmentation du marché.
120
3. Décomposition de l’inégalité
Lorsque l’inégalité est décomposable, il devient possible d’expliquer l’inégalité totale par les
inégalités relatives à chaque groupe, inégalité intra-groupe, et parmi différents groupes considérés,
inégalité inter-groupe. La méthode de décomposition de l’indice de Theil est la plus répandue
puisqu’elle parvient à expliquer toutes les composantes dans son explication de l’inégalité agrégée, ne
laissant aucune partie résiduelle. Une telle technique représente un outil statistique nécessaire à la
comparaison des prédominances de facteurs explicatifs de la dispersion salariale.
Tableau 2-3: Décomposition de l'inégalité par sous-groupes d'éducation et de catégories de profession entre 1985 et 2004.
1985 1990 1995 1998 2000 2004
Niveau d'éducation Intra-groupes
Absolue 0,25 0,27 0,27 0,24 0,24 0,31Relative (%) 82,1 79,8 81,0 71,5 73,2 68,6
Inter-groupesAbsolue 0,05 0,07 0,06 0,10 0,09 0,14Relative (%) 17,9 20,2 19,0 28,5 26,8 31,4
Catégories professionnelles(1) Intra-groupes
Absolue 0,24 0,26 0,24 0,23 0,23 0,32Relative (%) 80,0 76,7 71,1 68,0 69,1 72,6
Inter-groupesAbsolue 0,06 0,08 0,10 0,11 0,10 0,12Relative (%) 20,0 23,3 28,9 32,0 30,9 27,4
Classes d'âge Intra-groupes
Absolue 0,21 0,25 0,26 0,30 0,29 0,39Relative (%) 69,6 73,2 77,8 88,0 89,2 87,2
Inter-groupesAbsolue 0,07 0,08 0,07 0,04 0,04 0,06Relative (%) 22,1 22,1 21,6 12,0 10,8 12,8
Theil (total) 0,30 0,34 0,34 0,34 0,33 0,45Notes: La contribution absolue intragroupe est la somme des contributions absolues de chaque sous groupes à l'inégalité totale et la contribution relative est la part (%) des inégalités (inter ou intragroupe) expliquée dans l'inégalité totale, voir des mesures d'inégalités, La méthode de décomposition s’effectue à l’aide de logiciel DAD 4.4, un programme pour l’analyse distributive téléchargeable gratuitement sur internet.; (1) il existe 7 sous-groupes de professions - personnel des professions scientifiques, directeurs et cadres, personnel commercial et vendeurs, employés de type administratif, employés de transport et communication, artisans et ouvriers de type artisanal, employés de service-, et 5 groupes d'âge -15-19, 20- 24, 25-34, 35-54, 55-64.
Sources: l'Enquêtes sur la main d'œuvre LFS du troisième trimestre (1985-2004).
Il est à remarquer encore une fois que l’inégalité salariale a fortement accrue durant la
prospérité économique, indiquée par une hausse de l’indice de Theil entre 1985 et 1990, passant de
0,30 à 0,34. Entre 1995 et 2000, alors que la montée de l’inégalité est enregistrée au début des années
1990, l’indice de Theil est relativement stable. Le tableau 2-3 fait appel à certain nombre de
commentaires.
En premier lieu, pour chaque variables prises en compte, – niveaux d’éducation, catégories des
professions et classes d’âge –, la contribution de l’inégalité intra-groupes à l’inégalité totale dépasse
loin devant celle de l’inégalité inter-groupe, la même remarque a été faite par Mukhopadhaya et al
(2003) pour le Singapour. S’agissant de différents groupes de niveaux d’éducation, l’écart salarial total
est expliqué près de 82,1 pour cent par la composante intra-groupe, équivalent à une contribution
121
absolue de 0,25 sur 0,30 de l’indice de Theil, alors que le reste, – 17,9 pour cent ou 0,05 sur 0,30 de
l’indice de Theil– , est imputée à la composante inter-groupe au courant de 1985. La même
observation est également faite pour l’ensemble des groupes des professions : 80 pour cent de
l’inégalité totale s’explique par les inégalités intra-groupes tandis que 20 pour cent est attribué à
l’inégalité entre sous-groupes. Par ailleurs, pour les classes d’âge, la par de la dispersion totale
qu’explique les inégalités au sein des classées d’âge semble être légèrement inférieure à deux
premières catégories, à savoir 69,6 pour cent contre 22,4 pour cent pour l’écart de salaires parmi
différentes classes durant la même année. Un tel phénomène confirme que l’ancienneté règne dans le
marché du travail en milieu urbain en Thaïlande puisqu’en comparaison avec facteur d’éducation et de
professions, l’inégalité entre classes d’âge, notamment entre les jeunes et les plus expérimentés66,
contribue près de 22,4 pour cent à expliquer l’inégalité totale contre 20 et 17,9 pour cent pour facteur
d’éducation et de professions, respectivement.
En deuxième lieu, les variations des contributions à l’inégalité totale montrent un résultat tout à
fait inattendu pour trois groupes de variables. En effet, on assiste à une réduction des contributions des
inégalités intra-groupes pour différents groupes d’éducation et de professions, et à une hausse
tendancielle pour différentes âges. Concernant l’évolution de décomposition pour différents groupes
d’instruction, la part expliquée par les écarts salariaux intra-groupes de l’inégalité totale continue à
chuter entre 1985 et 2004, passant de 82,1 à 68,6 pour cent avec une légère fluctuation entre deux
temps. Cette réduction est immédiatement compensée par une hausse de la part de contribution
d’inter-groupe, de 17,9 à 32,6 pour cent durant la même période. La désagrégation des sous-groupes
d’emploi suit la même tendance à la baisse, soit une chute de près de 12,6 points, compensée ensuite
par une hausse de proportion de l’inégalité expliquée par l’écart inter-groupe. Toutefois, parmi
l’ensemble de sous-groupes d’âge, on observe une évolution contrariée des éléments intra-groupes
contribués à l’inégalité totale. La part de l’inégalité totale qu’explique l’écart salarial des composantes
internes joue à la hausse entre 1985 et 2004, s’élevant de 69,6 à 82,2 pour cent, équivalent à 17,6
points d’écart. Par conséquent, la contribution relative de l’inégalité intra-groupe à l’inégalité totale
devrait croître de 22,1 à 12,8 pour cent.
Enfin, l’étude de l’évolution d’inégalités décomposées permet d’établir une hypothèse selon
laquelle l’écart persistant de salaires résulte, non seulement d’une différentiation des dotations du
capital humain, – le niveau d’instruction et l’expérience et la formation –, mais également d’un
ensemble des processus d’accès à l’emploi mieux rémunérés dans chaque segment, ou dans chaque
catégorie d’emploi au sein d’un même segment. Le résultat est nettement au profit de cette dernière
66 Voir le tableau 2-1 pour la répartition des salaires selon classes d’âge.
122
hypothèse, c'est-à-dire que la différence dans l’attribution d’emploi explique mieux l’écart salarial.
L’évolution comparée de la contribution relative des inégalités inter-groupe, figurée dans le tableau 2-
3, permet de vérifier une telle condition. En fait, entre 1985 et 2000, la part de l’inégalité totale
expliquée par l’inégalité inter-groupe d’emploi est supérieure à celle de l’éducation : 20 et 30,9 pour
cent et le maximum de 32 pour cent en 1998 contre 17,9 et 26,8 pour cent pour les sous-groupes
d’éducation. Autrement dit, les différences en éducation contribuent moins à l’explication de
l’inégalité que font les différents types d’emploi. On assiste alors à un processus d’harmonisation
salariale au sein d’une même catégorie professionnelle et de différentiation salariale entre différents
groupes d’emploi67. Toutefois, le principe de construction d’une telle hypothèse préalable de la
segmentation pourrait être jugé insuffisant et peu crédible d’autant plus que l’on divise arbitrairement
toutes les professions en sous-catégories d’emploi, au lieu de recourir à une autre classification
susceptible d’apporter une conclusion contraire à la nôtre.
En l’espace de quinze années, le revenu moyen de l’emploi est doublé alors que la répartition
semble être moins favorable aux personnes appartenant aux catégories d’emploi « mal rémunérées ».
La vitesse des rémunérations des « meilleurs » emplois dépasse celle des moins avantagés tels que les
femmes, les jeunes employés, les personnes peu instruites et les individus travaillant dans certains
secteurs. Ajoutons aux observations faites dans le marché du travail urbain dans le premier chapitre,
l’analyse de l’évolution de l’inégalité décomposée conduit à l’hypothèse explicite de la segmentation
du marché du travail. Pourquoi privilégions tant la répartition de l’emploi pour expliquer une telle
persistance de l’inégalité salariale. La première raison est imputable au problème d’accès à l’emploi
désiré, qui assure au minimum de revenu pour le besoin de l’individu ou de sa famille. L’accès limité
et inégal à certains secteurs alimente la disparité salariale et la dynamique de la segmentation. La
deuxième raison est l’ordre microéconomique par lequel s’inscrit la théorie de concurrence pour
l’emploi – job competition theory –, développée par Thurow en 1979. Selon ce modèle, la productivité
du travail n’est pas un produit du travailleur mais elle est considérée comme fessant partie de poste du
travail qu’occupe l’individu. De fait, pour une entreprise donnée, les critères de sélection les plus
pertinentes sont, d’une part, la capacité d’adaptation des travailleurs à la structure de l’entreprise , et,
d’autre part, leur efficacité à son poste du travail. La théorie de concurrence pour l’emploi va jusqu’au
rejet du modèle de concurrence pour le salaire selon lequel la rémunération est en fonction de
67 Ces processus peuvent être vérifiés par une méthode de décomposition dynamique. En fait, la technique de décomposition dynamique consiste à dégager, d’une période à l’autre, les facteurs explicatifs des évolutions de l’inégalité qui se résument à un effet de taille et de revenu. Il se peut que l’effet d’une réduction de la contribution des inégalités intra-groupes résulte d’un transfert de la population, d’un sous-groupe dans lequel le revenu est faible et l’inégalité est forte, à un autre dans lequel le revenu est élevé mais l’inégalité reste faible. Toutes choses égales par ailleurs, la part de l’inégalité expliquée par les inégalités intra-groupes diminue progressivement mais l’inégalité inter-groupe augmente du fait que l’écart des revenus moyens se creuse de plus en plus. Voir Bourguignon et Morisson (1985).
123
qualification et de compétences individuelles. Dans cette logique, il serait opportun de mener une
investigation économétrique rigoureuse afin de parvenir à un résultat décisif. Ce fessant, nous sommes
amenés à vérifier de manière empirique l’existence du marché du travail segmenté à l’aide des
modèles économétriques pertinents.
2. Vérification de la dualité du marché du travail
Nombre de travaux empiriques tentent de soutenir l’existence de la segmentation du marché du
travail à l’aide des méthodes économiques. Généralement, il revient à vérifier deux hypothèses
implicites : d’une part, il existe des différents modes de détermination salariale d’un segmenta à
l’autre. En d’autres termes, à un niveau égal de dotations du capital humain, les individus perçoivent
différemment leur revenu du travail , et, d’autre part, l’existence des barrières à l’entrée de certains
segments du marché qui empêchent un rééquilibrage du niveau de salaires. De ce fait, les études
empiriques de la segmentation ont pour objectif de clarifier d’abord la présence de la dualité du
marché du travail urbain qui dynamise la persistance de l’inégalité salariale, ensuite des facteurs
économiques et sociaux qui constituent des barrières à l’entrée de segment primaire. Malgré les
récentes critiques méthodologiques du modèle segmentationniste68, la dualité du marché est souvent
citée comme une référence des analyses de la pauvreté et de l’inégalité dans le marché du travail. En
adoptant l’approche dualiste au lieu d’une approche structuraliste à la française69, nous serons en
mesure de distinguer les bons et les mauvais emplois, nécessaires aux analyses ultérieures de la
mobilité inter-segments et de la mobilité salariale. Dans cette direction, nous sommes amenés à
considérer deux modèles économétriques pertinents. Tout d’abord, le modèle à changement de régime
endogène avec règle de séparation inconnue, développé par Dickens et Lang (1985, 1988, 1992),
permet de mettre en évidence la réalité des marchés du travail segmentés et de classifier les individus
selon les segments. Ensuite, le modèle probit bivarié à changement endogène, initié par Cappellari
(2000) dans son analyse de bas salaires en Italie, doit révéler l’ensemble de déterminants qui forme
des barrières à l’entrée de segment primaire.
Tout d’abord, il est question d’explorer différentes approches empiriques de la segmentation, la
revue des littératures. La spécification des modèles et la sélection des variables seront explicitées.
Ensuite, les évidences empiriques de l’existence des marchés dualistes à l’aide du modèle à
68 Voir les critiques récemment étudiées par Thomson (2002).69 Ce terme est repris de l’article de Hanchane, Lamanthe et Valette (2005), et l’application empirique des approches dualistes et structuraliste dans Combarnous (2001).
124
changement de régime endogène seront présentées. Enfin, nous analyserons les facteurs déterminants
des barrières à l’entrée et de la mobilité inter-segments par le modèle probabiliste bivarié.
1. Différentes approches du test de la segmentation et spécification des modèles
A partir des années 1970, plusieurs méthodes empiriques pour vérifier le modèle théorique de la
segmentation ont été avancées par les économistes segmentationnistes. Malgré diverses critiques, les
techniques empiriques se sont développées par la mise en œuvre des modèles statistiques et
économétriques. Il est alors nécessaire d’explorer différents modèles et leurs limites. En même temps,
il est question d’aborder la spécification de nos modèles pris en compte et la sélection des variables
pertinentes, qui seront considérées dans notre étude.
A. Exploration des méthodes empiriques de la segmentation
Traditionnellement, l’examen de la vérification empirique doit aborder hypothèses susceptibles
d’être cohérente avec la partition théorique. Rayan (1984) et Psacharopoulos (1978) ont résumés des
règles des méthodes empiriques regroupées en trois grandes hypothèses : (1) Il reste difficile de
distinguer clairement les segments du marché lorsque une méthode d’identification et des procédures
statistiques ne sont pas clairement définies ; (2) Les barrières à la mobilité empêche les mouvements
d’inter segments, ce qui implique l’imparfaite compétition dans le marché du travail; (3) Chaque
segment procède aux différents mécanismes de détermination de l’emploi et de salaires. Ainsi la
théorie néoclassique ne peut s’appliquer aux bas salaires [Leontaridi (1998) p.78]. Plus
particulièrement, il s’agit de rejeter l’idée selon laquelle la productivité marginale est le seul
paramètre de déterminants des salaires [Cain (1976) p.1230]. La difficulté méthodologique du test
pour la segmentation est de déterminer le nombre des segments et de classifier les individus avec un
certain nombre de règle plus ou moins subjective. En suivant les recommandations citées ci-dessus,
trois types de méthodes ont été proposés. D’abord, les méthodes de détermination a priori des
segments sont commodes, mais se heurtent aux problèmes de biais de sélection et de troncature
lorsque la règle de séparation est subjective. De plus, les techniques de classification de groupes et
d’analyse factorielle sont répandues grâce à leur qualité de classement a posteriori des individus.
Enfin, la vérification de la segmentation par la mobilité intersectorielle.
a. Méthodes de détermination a priori
125
On peut distinguer deux processus de classement a priori d’individus en fonction de catégories
professionnelles et de catégories industrielles. Le classement par catégories de professions a été
adopté dans les analyses de Psacharopoulos (1978), et de McNabb et de Psacharopoulos (1981) pour le
marché du travail en Grande-Bretagne. Elles se basent sur l’indice de qualifications professionnelles,
appelé également occupational rating scale70, pour assigner des individus au marché interne ou
externe. D’autres travaux empiriques à l’aide du même type de méthode se sont multipliés: Rosenberg
(1980), Rumberger et Carnoy (1980), Boston (1990) pour le marché du travail aux Etat-Unis ;
Anderson et al. (1986), Theodossiou (1995) et Leontaridi (1998) pour le marché du travail en Grande
Bretagne ; Van Ophem (1987) pour le marché du travail au Pays-Bas, et pour le pays en
développement, l’analyse de Neuman et Ziderman (1986)71 ayant pour objectif d’étudier le marché du
travail en Israël.
La version radicale de la segmentation du marché du travail est mise en avant par Edwards,
Reich et Gordon (1975) qui exprime le marché du travail en termes de structure duale de l’industrie de
production, à savoir l’industrie « centre » et « périphérique ». Quant à l’application empirique de cette
approche, les individus sont attribués aux segments en fonction de différentes caractéristiques
industrielles. A titre d’exemple, McNabb (1987) a considéré deux facteurs essentiels dans la
détermination a priori, à savoir la proportion des femmes et la proportion des travailleurs protégés
dans chaque industrie en Grande Bretagne. Par ailleurs, l’analyse d’Osberg et al (1987) qui se focalise
sur les caractéristiques de produits industriels au Canada montre que le marché du travail se
caractérise, non plus par deux segments distincts mais par six segments. Au total, l’ensemble des tests
empiriques semble confirmer une dualité de relation de gains pour le marché primaire et secondaire en
rejetant le modèle standard du capital humain. La séparation à priori est également observée dans
plusieurs études récentes de la segmentation. Citons quelques exemples d’analyses dans les pays
Asiatiques. Bowles et Dong (2002) ont effectué des estimations de fonctions de gains selon quatre
grandes catégories d’entreprises chinoises, – entreprises publiques, entreprises villageoises,
coentreprise (« joint venture ») et entreprises étrangères –. Les résultats montrent qu’il existe une
légère différence en termes de rendement au capital humain, sauf que les entreprises étrangères ont
tendance à accorder plus d’avantage salarial aux plus anciens. Dans le cadre d’un projet d’Améliorer
les résultats du marché du travail pour les pauvres, « Making Markets Work Better for the Poor »,
réalisé en coopération entre la Banque Asiatique du Développement (ADB) et le Département pour le
Développement international (DFID), l’approche pluridimensionnelle de la segmentation a été adoptée
70 Il s’agit d’une méthode conçue par Goldthorpe et Hope (1974) qui consiste à diviser les emplois selon les critères qualitatifs (nature et statuts de l’emploi etc.) dont le critère est un indice ou de taux de qualification (occupational rating). Par exemple, si le taux est inférieur à 30 %, les emplois seront classés dans le second segment, voir Goldthorpe et Hope (1974).71 Voir les résultats du test de la dualité de fonction de gains dans Thomson (2002).
126
afin de prendre en compte différences de rendements au capital humain entre zones urbaines/rurales,
marchés formels/informels et migrants/non-migrants.
Ces études reposées sur des méthodes de classification a priori ont été techniquement critiquées
lorsqu’il s’agit d’estimer les fonctions de gains selon les critères subjectifs. La division des
échantillons selon ces critères s’explose au problème de biais de troncature, cité par Cain (1976), et de
biais de sélection suggéré par Heckman (1979). En fait, tentatives de fractionner arbitrairement le
marché du travail en différente échelle de salaires ou en différentes caractéristiques du marché afin
d’estimer les fonctions de gains émergent un problème économétrique de biais de troncature dans la
mesure où une telle régression sur des données ayant été tronquées par la valeur des variables
dépendantes entraîne directement le biais des coefficients des variables indépendantes [Cain (1976)
p.1246]. Cela est dû à l’exclusion de certaines populations en haut ou en bas de l’échelle de la
distribution de revenus ou à l’élimination de certains groupes de populations [Boston (1990) p.101].
Par conséquent, la validation du test empirique pour le segment primaire résulte tout simplement d’une
forte dépendance entre niveau de salaires et niveau d’instruction alors que pour le segment secondaire,
la faiblesse de rendements au capital humain provient d’une faible corrélation entre le revenu et la
capacité individuelle. Dans un même ordre d’idée, le biais de sélection, selon Heckman (1979), résulte
d’un mécanisme de sélection prédéfinie des échantillons pour estimer les relations de comportements
des agents économiques… [Heckman (1979)]. Cette contrainte méthodologique devient répandue dans
la démarche des estimations économétriques modernes. Nous pouvons distinguer deux sources de
problème de sélectivité. D’une part, lors d’un déroulement d’enquête, l’échantillonnage représentatif
pourrait avoir pour conséquence le problème d’auto-sélection lié à l’unité enquêtée: une
surreprésentation des femmes ou des moins éduqués dans le secteur informel, par exemple, et d’autres
part, il s’agit de la nature auto-sélective des décisions des chercheurs ou des enquêteurs au regard des
données collectées : une sélection subjective de certaines professions à bas salaire engendre
éventuellement une surreprésentation des jeunes sans diplôme, par exemple. La classification a priori
du marché du travail concerne généralement cette seconde nature de sélectivité.
Contrairement aux méthodes de définition a priori des segments, la technique de classification
de groupes et l’analyse factorielles surpassent ces limites méthodologiques car il s’agit d’un
classement a posteriori des individus à chaque segment.
b. Méthodes de détermination a posteriori
127
On parle de méthodes de détermination a postériori des segments lorsque, contrairement aux
techniques précédemment citées, les données sont aléatoirement classifiées en fonction des critères
introduits. Parmi ces méthodes, il faudrait noter l’analyse en classification de groupe (cluster analysis)
et l’analyse factorielle.
L’analyse en classification de groupe permet de produire une stratification des individus a
postériori. Elle consiste à identifier des groupes statistiquement homogènes par une méthode
centroïde, c'est-à-dire l’appartenance d’un cas à un groupe. Le processus itératif d’assignation des cas
se poursuit jusqu’à ce qu’il n’y a plus de changement dans les centres des groupes. Cette procédure
algorithmique requiert l’introduction des variables qui se servent à assigner les cas. L’estimation des
fonctions de gains s’effectuera à l’issue de la stratification. L’étude portant sur cette technique a été
initiée, entre autres, par Anderson et al (1986), et Sloane et al (1993)72. La littérature récente se
consacre à constituer une approche structuraliste dans laquelle la perception du marché du travail est
hétérogène, notamment dans le secteur informel. Il s’agit des contributions de Lachaud (1994a, 1994b,
1995a, 1995b, 1997) consistant à identifier des ensembles homogènes autour des concepts de
protection, de régularité et d’autonomie73 afin d’appréhender le phénomène de vulnérabilité dans les
marchés du travail.
L’analyse factorielle consiste, quant à elle, à vérifier s’il existe un petit nombre des
composantes principales parmi l’ensemble des variables introduites. Les estimations de fonctions de
gains sont ensuite effectuées74. La plupart des résultats des estimations de la fonction de gains à la
suite des méthodes de désagrégation des segments par l’analyse factorielle témoigne l’existence du
marché du travail segmenté75. Toutefois, l’utilisation de ces outils statistiques n’échappe pas aux
critiques divergentes. Tout d’abord, cette démarche dépend non seulement du nombre et du type des
variables introduites pour déterminer les groupes d’individus homogènes, mais également du type de
l’algorithme utilisé [Leontaridi (1998) p.91]. Ensuite, selon Thomson (2002), une telle analyse sert
simplement à renforcer l’homogénéité d’individus perçue dans le marché du travail [Thomson (2002)
p.19]. La réelle contrainte réside dans l’incapacité à expliquer la relation existante entre, d’une part,
72Voir entre autres, pour les analyses cluster, Boston (1990) pour le marché du travail aux Etats-Unis et Flatau et Lewis(1993) pour le marché du travail en Australie.73 Parmi d’autres, l’analyse de Lachaud en 1997, appliquée au Burkina Faso, a distingué les formes du travail suivant : (i) salarié protégé ; (ii) salarié non protégé (iii) indépendant non agricole évolutif ; (iv) indépendant non agricole involutif ; (v) agriculteur progressif (vi) agriculteur de subsistance ; (vii) éleveur ; (ix) autre actif. [Lachaud (1997) p.237.] 74 Voir Oster (1974), Mcnabb et Whitfield (1998), Tolbert et al. (1980) et Buchele (1983).75 La vérification empirique est positive dans l’analyse de Buchele (1983) qui fait appel à la méthode de l’analyse factorielle et à l’estimation de la fonction de gains et dans l’analyse de McNabb (1986) avec les mêmes méthodes. Elle est négative pour l’analyse d’Anderson et al. (1986) avec la méthode de cluster et l’estimation de la fonction de gain et dans l’étude de Sloane et al (1993) avec les mêmes méthodes.
128
la différenciation des structures industrielles et, d’autre part, l’impact de ces différences sur le
marché du travail, à savoir le niveau de salaire et la stabilité d’emploi etc . [Buchele (1984) p.410]. En
d’autres termes, il n’est pas évident d’établir un lien économiquement solide entre chaque groupes
homogènes et leur fonctionnement spécifique du marché du travail.
c. Méthode de mobilité
La place de la mobilité intersectorielle est prépondérante dans la théorie dualiste du marché du
travail. La proposition selon laquelle les pauvres s’enferment dans le segment secondaire constitue
une critique fondamentale de la théorie du capital humain tel que le marché du travail peu mobile
entraîne un accès limité à certains segments à cause de rationnement non monétaire dans ces
segments. [Leontaridi (1998) p. 93]. L’investigation d’un tel mouvement est tout à fait d’actualité à la
suite des données longitudinales disponibles. Citons quelques exemples, l’étude de Psacharopoulos
(1978) s’est interrogée les facteurs déterminants de la mobilité d’inter-segments. Le résultat de
l’analyse a été au faveur de la théorie du capital humain puisque c’est le niveau d’éducation qui
détermine le mouvement entre secteurs. Dans la même ligne de recherche, Mayhew et Rosewell
(1979) ont également suggéré l’importance du niveau d’éducation dans le changement sectoriel de
l’individu malgré une mobilité très limitée entre secteurs. Contrairement à deux premiers travaux,
Rosenberg (1980) a démontré que les variables du capital humain semblaient très peu significatives
pour certains groupes. L’étude récente de Contini (2001), qui consiste à comparer les degrés des
mobilités d’emploi entre les Etats-Unis et certains pays d’Europe, suggère l’existence de la
segmentation du marché du travail dans les pays de ces deux continents, notamment aux Etats-Unis où
le degré de segmentation est relativement fort. Alfouso (2004) conduit une analyse économétrique
avec trois méthodes d’investigation pour vérifier le marché du travail segmenté en Suisse, –
classification de groupe, modèle à changement endogène avec règle de séparation inconnue et le
modèle bivarié de mobilité des bas salaires –. Les résultats empiriques confirment l’existence de la
segmentation avec une faible crédibilité quant à la mobilité des bas salaires [Alfouso (2004) p.148].
L’approche alternative de la mobilité intersectorielle proposée par Laumov (2004) est considérée
comme une extension du modèle de Dickens et Lang. Il s’agit d’un modèle de mobilité avec règle de
séparation inconnue, appliqué au marché du travail en Allemagne. Le test parvient à rejeter
l’hypothèse de la segmentation du marché du travail allemand.
Compte tenu de la nature des contraintes méthodologiques, il serait préférable de recourir à une
autre méthode plus pertinente et répondant à notre objectif de l’étude de la dualité. Le modèle de
Dickens et Lang (1985a, 1985b, 1987, 1988,1992) correspond à ces critères puisque, d’une part, la
129
méthode échappe aux problèmes économétriques d’auto-sélection et de troncature , et, d’autre part,
elle permet de classer de manière endogène des individus selon segments. Par ailleurs, le modèle
probabiliste bivarié aura pour objectif d’établir des composantes contribuant à créer des barrières à
l’entrée.
B. Spécification des modèles
Le modèle à changement de régime fait partie d’un ensemble de modèles de changement
endogène car le classement des individus dans le secteur primaire ou secondaire est conditionné par
d’autres variables observées. L’origine de la méthode économétrique est apparue dans un article de
Maddala (1983) qui étudie les différents modèles endogènes avec règle de séparation inconnue et
imparfaite76 à partir desquels Dickens et Lang (1985a, 1985b, 1987, 1988, 1992) développe un modèle
appliqué à la théorie de la segmentation. Rappelons que le modèle à changement de régime avec règle
de séparation inconnue suppose que des individus ayant des mêmes dotations initiales du capital
humain n’auront pas les mêmes taux de rendements du capital humain, en raison de différents
mécanismes de détermination salariale spécifique à chaque segment. A l’issue du classement des
individus selon secteurs à l’aide du premier modèle, la méthode probabiliste bivarié, proposée par
Cappellari (2000), permettra d’étudier la mobilité intersectorielle à l’aide des probabilités de transition
en prenant en compte les états initiales de l’individu.
a. Modèle à changement de régime endogène avec règle de séparation inconnue
La spécificité du modèle à changement de régime endogène est le processus d’assigner les
individus avec règle inconnue et l’estimation simultanée des fonctions de gains par la recherche d’une
maximisation de fonction de vraisemblance. Cette fonction compose d’une équation de sélection et de
deux fonctions de gains, – du secteur primaire et secondaire respectivement. Le nombre des segments
ne sont pas arbitrairement prédéfini et les individus ne sont pas classés par les critères subjectifs. Par
conséquent, la méthode de changement de régime endogène représente un grand avantage puisqu’elle
échappe aux problèmes d’auto-sélection et de troncature. Les évidences empiriques du marché du
travail dualiste à l’aide du modèle sont confirmées par nombre d’analyses tant dans les pays en
développement que dans les pays développés77.
76 La méthode à changement de régime avec règle de séparation inconnue est utilisée par plusieurs études sur le marché du travail, à savoir le modèle de « union-nonunion », de « stayers-movers » et autres. Elle est connue également sous le nom du modèle de sélection [Heckman(1979)].Voir Maddala (1983).77 Les tests confirment la dualité du marché du travail : les analyses de Dickens et Lang (1985a, 1987), de Rebitzer et Robinson (1991), de Sakamoto et Chen (1991) appliquées aux Etats-Unis, de Cipollone (2001) pour l’Italie, d’Afouso pour la Suisse, et Basch et Paresdes-Molina (1996) pour le Chili.
130
Supposons qu’un individu maximise sa fonction d’utilité contenant les salaires et les
caractéristiques non monétaires de l’emploi. Trois équations du modèle se présentent sous la forme
suivante :
ln W ip=X i λp+υ pi (2-9)
ln W is=X i λs+υsi (2-10)
Z∗i¿Di Π +υwi (2-11)
Où les équations (2-9) et (2-10) sont les deux fonctions de gains spécifiques au secteur primaire et
secondaire, respectivement. L’équation (2-11), appelé l’équation de sélection, représente une
probabilité qu’un individu se trouve dans le secteur primaire. ln W ip et ln W is sont logarithmes des
salaires, X i et Di sont vecteurs de variables indépendantes. λ p ,λs et Π représentent les
paramètres des équations de gains et de l’équation de sélection respectivement. υ pi ,υsi ,υwi sont
termes résiduels pour trois équations respectives. En effet, Z∗¿ ¿ est une variable latente et non observée.
Il convient alors de définir W i tel que :
W i=ln W ip si Z∗¿0 (2-12)
W i=ln W is si Z∗¿0 (2-13)
Ce processus s’appelle la règle de séparation inconnue. En effet, Z∗¿ ¿ n’est rien d’autres que la
différence entre utilités associées au secteur primaire et secondaire. Par conséquent, la probabilité
qu’un individu se trouve dans le segment primaire est d’autant plus élevée que la maximisation de
l’utilité inhérente au secteur primaire dépasse celle du secteur secondaire. Par contre, notre programme
de maximisation de vraisemblance ne donne pas directement la répartition des individus selon
secteurs. Nous sommes amenés à calculer les probabilités individuelles afin d’assigner les individus
dans leur segment. La probabilité qu’un individu se classe dans le secteur primaire, – Z∗¿0 ou
υwi>−D i Π –, est sous forme suivante78 :
Pr {υwi>−Di Π|Di , X i , υ pi }⋅f (υpi )Pr {υwi>−Di Π|Di , X i , υ pi }⋅f (υpi )+Pr {υwi≤−Di Π|Di , X i ,υ si}⋅f (υsi ) (2-14)
78 Cette formulation a été utilisée par Dickens et Lang (1985a), et Cipollone (2001).
131
Si l’on considère que les termes d’erreurs suivent la distribution normale à moyenne nulle et à
variance constante (σ2
) et que la variance des résidus de l’équation de sélection est normalisée à 1 79,
la somme de logarithme de la fonction de vraisemblance s’exprime80 de manière suivante :
∑i=i
N
ln {[1−θ(−Di Π−σ pw
σ ppυ pi
(1−σ2
pw
σ2pp )
1/2 )] ¿φ( υ pi
σpp1/2)⋅σ
pp−1/2+θ (−D i Π−σsw
σ ssυsi
(1−σ2
sw
σ2ss )
1/2 )⋅φ ( υsi
σss1/2 )⋅σ
ss−1/2} (2-15)
L’établissement de la fonction de vraisemblance est explicité dans l’annexe B-2-1. Selon la
fonction (2-15), σ pw et σ sw représentent des covariances de résidus υ pi et υwi , et de résidus
υsi et υwi , respectivement. σ pp et σ ss sont des variances de résidus inhérents à deux équations
de gains. θ( . )et φ (. ) représentent la fonction de répartition et de densité du modèle Probit,
respectivement. Notons que la variance de l’équation de sélection est normalisée à 1 en raison d’une
identification de la matrice de variances-covariances du modèle81.
Le test de la segmentation par la méthode à changement de régime avec règle de séparation
inconnue s’opère en deux étapes. La première consiste à procéder à une maximisation de fonctions de
vraisemblance (2-15), – fonction de vraisemblance avec contraintes –, et de fonction de vraisemblance
sans contrainte présentée ci-dessous, – équivalent à la fonction de gains estimée par la méthode de
moindre carrée ordinaire.
LFR=∏i=1
N [σ−1/2φ(Y i−
~X i~β
σ1/2 )] (2-16)
79 Cette spécification a pour but de fixer une identification exigée par la matrice de variance-covariance des
résidus pour trois équations tel que
Cov (υp ,υ s ,υw )=[ σp2 σ
ps2 σpw2
σsp2 σ
s2σ
sw2
σpw2 σ
sw2 σw2
]80 Le logarithme de la fonction de vraisemblance est repris de la version originale de Dickens et Lang (1985a). Voir également une démonstration dans Cipollone (2001).81 Cette spécification a pour but de fixer une identification exigée par la matrice de variances-covariances des
résidus de trois équations tel que
Cov (υp ,υ s ,υw )=[ σp2 σ
ps2 σpw2
σsp2 σ
s2 σsw2
σwp2 σ
ws2 σw2
]132
En effet, le modèle sans contraintes, – fonction logarithmique de vraisemblance du modèle à
changement de régime représentée (2-15) –, livrera trois équations simultanées, à savoir deux
fonctions de gains et une équation de sélection. L’hypothèse alternative, s’agissant d’un modèle avec
contraintes de paramètre, – correspond à l’estimation de fonction de gains par la méthode du
maximum de vraisemblance, formulée dans l’annexe B-2-1. A l’issu du processus de maximisation
des fonctions de vraisemblance, il est question de choisir un modèle le plus pertinent par le critère du
test de statistique de Chi-deux. En d’autres termes, il convient de vérifier si le modèle à deux
équations de gains est préférable à celui avec une seule équation. Ce fessant, nous serons amenés à
effectuer un test de χ2, test du rapport de vraisemblance. Si l’hypothèse de la segmentation est validée
par le test, la deuxième étape du test sera nécessaire. La deuxième opération consiste à vérifier si deux
équations de gains suivent la prédiction de la théorie de la segmentation, selon laquelle les rendements
du capital humain du secteur primaire sont relativement supérieurs à ceux du secteur secondaire et les
taux de rendement du secteur secondaire sont proches de zéros. A cet égard, il convient de calculer les
taux de rendement du capital humain associés à chaque secteur. Si une telle hypothèse est vérifiée,
nous n’aurons aucune raison de rejeter l’hypothèse de la dualité du marché du travail.
A l’issu du calcul des probabilités d’attachement au segment primaire par (2-14), les individus
seront classés selon segments – primaire ou secondaire. En disposant des données longitudinales,
l’étude des probabilités de transition permettra d’effectuer un examen de la mobilité intersectorielle et
les déterminants des barrières à l’entrée.
b. Modèle Probit bivarié à changement de régime endogène
La théorie de la segmentation évoque un état d’enfermement des individus au secteur secondaire
où le niveau de salaires reste inférieur à celui du secteur primaire. Les mobilités salariales ou d’emploi
entre deux secteurs sont limitées, permise pas l’existence des barrières à l’entrée. Dans cette logique,
l’étude des probabilités de transition d’un secteur à l’autre permettra d’appréhender les dynamiques de
la pauvreté et de l’inégalité. Sur le plan technique, la détermination des facteurs explicatifs de mobilité
intersectorielle fait appel à un simple modèle probabiliste traite généralement une supposition d’une
indépendance des conditions initiales et finalises d’un changement de segment d’un individu. On
appelle également un modèle exogène des probabilités de transition puisque la probabilité d’être
enfermé dans le secteur secondaire de l’année t n’est pas conditionnée au statut individuel de l’année t-
133
1. Cette technique pose un problème d’endogénéité des conditions initiales, décrit par Heckman
(1981). En effet, si la propension à s’enfermer dans le secteur secondaire de l’année t n’est pas
distribuée de manière aléatoire mais dépend étroitement des conditions initiales inobservables de
l’année t-1, les coefficients de l’équation de transition estimée seront biaisés [Cappellari (1999) p.11].
Initiée par Meng et Schmidt (1985), le modèle bivarié à changement de régime endogène est appliqué
aux analyses dynamiques de bas salaires par Stewart et Swaffield (1999) et Cappellari (1999). La prise
en compte d’un état initial dans la mise en œuvre des déterminants de mobilité nécessite une méthode
plus élaborée qu’une simple technique d’estimation des relations exogènes des variables. Dans le cadre
de la présente étude, nous sommes amenés à appliquer cette méthode à l’analyse de la mobilité
intersectorielle des individus.
Supposons que la probabilité d’attachement au secteur primaire, permis par le calcul de
l’équation (2-14, en période t-1, est déterminée par l’ensemble des caractéristiques observées. Il est
possible alors d’établir une relation fonctionnelle entre ces variables.
g1 ( yi , t−1 )=x i ,t−1 β+ωi 1 (2-17)
Où y i ,t−1est la probabilité d’attachement au segment primaire pour l’individu i à la période t-1,
x i , t−1est le vecteur des caractéristiques individuelles et g1 est la fonction de transformation des
variables telle que ωi1 suit une loi de distribution à moyenne nulle et à variance égale à 1. Si l’on
considère de manière arbitraire que la probabilité d’attachement ne dépasse pas la valeurλ t−1 ,
l’individu sera assigné au secteur secondaire. Il est alors possible de créer une variable indicatrice ( d)
telle que d i ,t−1=1 si l’individu i se trouve dans le secteur secondaire à la période t-1 et d i ,t−1=0
sinon. Par conséquent,
P [ d i , t−1=1 ]=P [ y i , t−1< λt−1 ]=Φ { g1( λt−1)−xi , t−1 β } (2-18)
Φ représente une fonction de répartition de la distribution normale. Si le terme constant porte
peu d’intérêt, l’élimination de cette composante engendre une reformulation de l’équation (2-18) qui
deviendra :
134
P[ d i , t−1=1 ]=Φ { xi , t−1 β } (2-19)
Supposons l’assignation d’un individu au segment secondaire en période t-1 dépend d’un état
individuel de la période t. En d’autres termes, on introduit l’hypothèse de dépendance caractérielle
dans le modèle standard et endogénéise le processus de sélection. Tout particulièrement, le modèle
suppose que le changement du statut individuel dépend ou non de son état initial. Par conséquent, si
d i ,t−1=1 , le processus dynamique de détermination de son statut final est alors :
g2 ( y i , t )=zi ,t γ+ωi 2 (2-20)
Où zi , t représente un vecteur des caractéristiques considérées comme les déterminants de
mobilité. De la même manière que dans la période t-1, si yi,t < λ t−1 (seuil de probabilité), di,t sera égale
à 1 et di,t = 0, sinon. Si la dépendance prévaut comme suppose l’hypothèse, la distribution des termes
d’erreur – ωi1 et ωi2 – doit suivre une statistique de distribution normale bivariée avec une
corrélationρ . La probabilité d’être assigné dans le segment secondaire à la période t, sachant que
l’individu se trouve dans ce même segment à la période t-1, est donnée par :
P[ d i , t=1|d i , t−1=1 ]=Φ2 { x i , t−1 β , zi , t γ ; ρ }
Φ {x i , t β } (2-21)
La probabilité d’être classé dans le segment primaire à la période t, sachant qu’en période t-1
l’individu est enfermé dans le segment secondaire à la période t-1, est donnée par :
P[ d i , t=1|d i , t−1=0 ]=Φ2 {− x i , t−1 β , zi , t γ ;− ρ }
Φ {−xi , t β } (2-22)
Il convient de remarquer que siρ=0 , le modèle devient exogène puisque il n’existe aucune
corrélation entre les conditions initiales et finales de la mobilité. L’équation (2-21) représente une
135
condition d’enfermement au secteur secondaire,ρ>0 , alors que la deuxième exprime une condition
de la mobilité intersectorielle,ρ<0 . La fonction de vraisemblance s’écrit de manière suivante82 :
∑i {d i , t di , t−1 ln [Φ2( x i , t−1 β , zi , t γ ; ρ1 ) ]+d i , t−1(1−d i , t ) ln [ Φ2(x i ,t−1 β ,−zi , t γ ;−ρ1) ]¿ }¿¿(2-23)
Par conséquent, il revient à chercher le maximum de la fonction de vraisemblance afin de
déterminer les déterminants explicatifs des conditions d’enfermement et de la mobilité intersectorielle
des individus. Deux modèles empiriques précédemment explicités doivent s’appliquer aux données
représentatives et aux variables pertinentes qui seront soigneusement sélectionnées. Contrairement aux
analyses salariales auxquelles l’Enquête sur la main d’œuvremain-d’œuvre s’implique, l’Enquête
Socio-économique de Panel, comprises entre 2005 et 2006, sera plus pertinente en termes de sa qualité
longitudinale, permettant de mettre en examen une analyse dynamique du marché du travail.
C. Données et variables
L’investigation empirique de la dualité du marché du travail se déroulera à l’aide de deux séries
d’Enquête prioritaire socio-économique de Panel, comprises entre 2005 et 2006. Il importe de préciser
les procédures de sélection des données et des variables qui seront introduites dans les modèles
économétriques.
En premier lieu, le processus de sélection des unités représentatives s’opère à deux étapes.
D’une part, il s’agit d’une sélection des travailleurs vivants en milieu urbain, en âge de travailler (15
ans et plus), non employeurs ni travailleurs indépendants. L’importance de ce dernier critère tient au
fait que l’analyse se centre sur les rémunérations de l’emploi, et dans une moindre mesure, sur la
situation du salariat dans le marché du travail urbain en Thaïlande. D’autre part, l’absence de réponse
d’un individu dans l’une des enquêtes entraine son élimination. En d’autres termes, les unités
représentatives doivent être obligatoirement présentes dans chaque enquête pour pouvoir étudier la
mobilité intertemporelle. De la même manière, les échantillons sélectionnés doivent déclarer un salaire
positif à chaque enquête correspondant ou non à une procession d’un emploi. Dans les enquêtes socio-
économiques de Panel, les salaires sont estimés à une échelle mensuelle alors que la pertinence de
l’analyse comparative doit se réaliser à l’aide du calcul des salaires horaires. Une telle considération a
82 Voir la construction du modèle Probit bivarié à changement de régime dans Cappellari (1999) et Alfouso(2004).
136
pour objectif d’éviter un effet éventuel de sous-emplois qui dissimule la perception des salaires
individuels. Le taux de salaire s’estime par une simple opération mathématique à l’aide de deux
variables existante des enquêtes, à savoir le nombre de jour du travail par mois et d’heure de travail
hebdomadaire83. Par ailleurs, l’étude en comparaison annuelle des salaires impose une prise en compte
de l’évolution du niveau général des prix dans la présente analyse. Les salaires horaires de chaque
enquête sont alors corrigé de l’indice des prix à la consommation, base 100 en 2002.
En deuxième lieu, les variables sélectionnées doivent être spécifiques à chaque modèle. Pour le
modèle à changement de régime avec règle de séparation inconnue, la variable dépendante est le
logarithme du taux de salaires et des variables indépendantes se divisent en deux sous-ensembles: l’un
concerne les variables explicatives des fonctions de gains de Mincer et l’autre s’agit des variables
explicatives destinées à l’équation de sélection. En fait, le modèle standard de fonction de gains,
développé par Mincer (1974)84, explicite une relation fonctionnelle entre les gains et l’ensemble des
variables telles que le niveau d’éducation, l’expérience potentielle et l’expérience potentielle au carré
etc. Il parvient à expliquer que, toutes choses égales par ailleurs, une année additionnelle d’éducation
engendre un niveau de salaire supérieur. Par ce mécanisme, le taux de rendement marginal privé de
l’éducation est alors déterminé. De manière analogue, les taux de rendements inhérents aux autres
facteurs explicatifs sont estimés par ce modèle. Dans ces directions, il convient de préciser les
variables statistiques continue : la variable d’éducation se présente sous forme d’année d’instruction ;
l’année d’expérience, puisqu’elle n’est pas disponible dans l’enquête, s’exprime par l’année
d’expérience potentielle, approximée par l’âge (en année) moins l’année d’entrée à l’école (6 en
moyenne) moins l’année d’éducation ; l’année d’expérience au carré a pour objectif de capturer l’effet
de dépréciation du capital humain85 ; la variable expérience*éducation est introduite à la suite d’une
analyse de Yamauchi (2001) démontrant que l’éducation est complémentaire à l’expérience quant à
l’impact sur les gains. Elle indique alors l’effet de complémentarité expérience-éducation. Deux
variables indicatrices sont incorporées, à savoir le genre (codé 1 si l’employé d’homme et 0 sinon) et
la résidence à Bangkok (codé 1 si résidence à Bangkok et 0 sinon). Pour l’équation de sélection, seules
le niveau d’instruction et la taille de firme sont deux variables continues, d’autres variables sont
indicatrices : le chef de ménage est égale à 1 s’il agit du chef de ménage et 0 sinon; l’emploi publique
et semi-public (codée à 1 s’il s’agit d’emploi du type et 0 sinon); l’acquisition d’une formation
générale et spécifique au cours de la période de référence est susceptible de conduire à un emploi 83 Puisque l’on ne dispose que des informations portant sur trois variables, salaire mensuel, nombre d’heure de travail hebdomadaire et de jour de travail par mois, le calcul du salaire horaire est nécessaire. Le taux de salaire = salaire mensuel (hors prime de l’emploi ni d’autres rémunérations non monétaire) rapporté à la totalité du nombre d’heure de travail mensuelles, qui, à son tour, est égale au nombre heure de travail hebdomadaire multiplié par le nombre de semaine de travail estimé par le nombre de jour de travail par mois.84 Voir l’équation 1-8.85 Le salaire augmente au rythme décroissant, cela est dû à une dépréciation du capital humain avec l’âge.
137
mieux rémunérés ou à une promotion salariale, la variable est égale à 1 si la personne est reçue la
formation et à 0 sinon. S’agissant des variables introduites dans le modèle Probit bivarié à changement
de régime endogène, elles se regroupent en deux sous-ensembles. L’un concerne des caractéristiques
individuelles et des zones géographiques, et l’autre implique des caractéristiques de l’emploi occupé.
Puisqu’il s’agit d’étudier les phénomènes de mobilité intra et intersectorielle, – ou conditions
d’enfermement au segment secondaire et de mobilité intersectorielle–, les codifications des variables
sont spécifiques selon modèles compte. Ainsi, le tableau A-2-2, reporté en annexe, définit les variables
utilisées et montre leur moyenne.
2. Résultats des tests de la dualité du marché du travail
Le modèle à changement de régime avec règle de séparation inconnue permet non seulement de
tester l’existence du marché du travail dual mais également de répartir, à partir d’un échantillon donné,
des individus selon segments, à savoir le segment secondaire qui englobe essentiellement les bas
salaires et le segment primaire dont la majorité des employés est mieux rémunérée.
A. Test du modèle à changement de régime endogène avec règle de séparation inconnue
Sur le plan technique, l’effet d’endogénéité des variables indépendantes est pris en compte afin de
pouvoir estimer les coefficients non biaisés issus des fonctions de gains. Toutefois, ce modèle élégant
est peu répandue dés lorsqu’il est difficile de trouver le maximum de vraisemblance. Dans la présente
étude, plusieurs valeurs initiales ont été recherchées pour que le processus algorithmique de
maximisation86 évite de tomber dans une zone d’inexistence du maximum. Les processus de
maximisation pour les années 2005 et 2006 sont conduits sous Limdep verions 787 à l’aide d’une
méthode algorithmique de BFGS. Le tableau 2-4 met en évidence des résultats empiriques dérivés du
modèle de changement de régime endogène avec règle de séparation inconnue pour 2005 et 2006.
Tableau 2-4: résultats des estimations du modèle à changement de régime endogène avec règle de séparation inconnue (2005-2006). 2005 2006
Secteurs MCO(1) Primaire Secondaire Sélection(2) MCO Primaire Secondaire Sélection
Variables β t(3) β t β t β t β t β t β t β t
Constant 1,573 13,309* 1,309 6,361* 2,077 11,433*-
3,305-
7,472* 1,658 12,406* 0,773 3,500* 2,715 12,627* -2,954-
8,825*
Année d'instruction 0,113 15,194* 0,147 12,307* 0,058 3,912* 0,160 7,550* 0,108 13,727* 0,185 14,674*-
0,007 -0,415 0,165 8,819*Expérience potentielle(4) 0,050 7,436* 0,066 5,696* 0,040 3,742* 0,053 6,627* 0,090 7,509* 0,014 1,125
86 Il existe plusieurs méthodes algorithmiques de la maximisation des fonctions de vraisemblance, à savoir la méthode de Broyden-Fletcher-Goldfarb-Shanno (BFGS), de Berndt-Hall-Hall-Hausman (BHHH), de Newton, de Davidon-Fletcher-Powell (DFP) et de Steeper ascent.87 Voir Green (1995).
138
Expérience2-
0,001 -6,831* 0,000 -1,214-
0,001 -4,416*-
0,001 -5,194* 0,000 -2,037*** 0,000-
1,909***
Expérience*Education(5) 0,001 3,272*-
0,001 -1,791-
0,001 -1,784 0,000 1,414-
0,002 -5,440* 0,000 -0,045Homme 0,177 6,096* 0,180 4,918* 0,147 3,104* 0,208 6,628* 0,215 5,542* 0,180 3,545*Résidence à Bangkok 0,294 9,795* 0,167 4,755* 0,476 8,743* 0,273 8,590* 0,130 3,335* 0,395 7,013*
Emploi (semi) public 1,796 7,280* 1,416 6,754*Taille de firme 0,353 5,363* 0,254 6,770*Chef du ménage 0,252 1,387 0,445 2,813*Formation 0,617 1,479 -0,076 -0,333Ecart-type 0,415 50,736* 0,267 24,856* 0,422 27,719* Normalisé à 1(9) 0,490 52,690* 0,295 20,492* 0,521 24,333* Normalisé à 1
Covariances(6) -
0,189 -3,200*-
0,181 -2,112** -
0,178 -2,573*-
0,379 -7,185*
Taux de rendement(7)
de l'éducation 0,132 0,133 0,031 0,118 0,141-
0,015
de l'expérience 0,035 0,048 0,004 0,033 0,045-
0,035Homme 0,177 0,180 0,147 0,208 0,215 0,180Résidence à Bangkok 0,294 0,167 0,476 0,273 0,130 0,395
Salaire horaire moyen (bahts)
94,71 29,62 98,89 32,57
MaximisationItérations 18 51 19 41Degré de liberté 8 24 8 24Log de vraisemblance -2124,904 -1917,870 -2306,465 -2083,595
Rapport de vraisemblance(8) 414,068 445,740
N pondéré 2171 2171
Notes: (1) l'estimation de la fonction de gains par méthode de moindre carré ordinaire (équation 2-16); (2) l'estimation des fonctions de gains par le modèle avec règle de séparation inconnue (équation 2-15); (3) statistique de t student = β/écart-type : * = significatif à 1% ; ** = significatif à 5 % ; *** = significatif à 10%; (4) l'expérience potentielle = âge-6-année d'éducation et l'expérience au carré a pour but de prendre en compte la forme quadratique de la distribution des salaires;(5) la variable éducation*expérience est une multiplication des années d'éducation et d'expérience afin de prendre en compte l'effet de complémentarité;(6) il s'agit des covariances des résidus entre fonction de gains et l'équation de sélection; (7) le taux de rendement de l'éducation mesure l'impact d'une année supplémentaire d'instruction sur le salaire; (8) le rapport de vraisemblance se définit de manière suivante -2[log (vraisemblance du modèle sans contraints) - log (vraisemblance du modèle avec contraints)] ; (9) en raison d’identification de la matrice de variances-covariances, l’écart-type de l’équation de sélection est normalisé à 1, voir Cippollone (2001).Source: les Enquêtes socio-économiques de Panel (HSEPS), 2005-2006.
Tout d’abord, il importe de vérifier si le modèle à deux fonctions de gains est bien spécifié. En
fait, la pertinence d’un modèle réside dans le fait que chacune des équations de gains constitue un lien
avec l’équation de sélection. Sur le plan technique, il revient à examiner les covariances des résidus
d’équations de gains considérées. Si la covariance des résidus est significativement différente de zéro,
le modèle est bien spécifié et l’effet d’endogénéité dans le choix individuel du secteur est non
négligeable. Dans le cas contraire, l’assignation des individus dans chaque secteur du marché est
exogène. Ainsi, le tableau 2-4 montre que les résidus entre les fonctions de gains et l’équation de
sélection sont négativement significative pour années 2005 et 2006 malgré une faible corrélation des
résidus de la fonction de gains du secteur secondaire et de l’équation de sélection en 2005, –
covariance égale à -0,181 significatif à 5 pour cent et à 24 degré de liberté –. Par conséquent, l’effet
d’endogénéité joue un rôle prépondérant dans les processus d’assignation des individus selon
segments et dans les estimations des fonctions de gains. Les tests de la dualité du marché du travail
sont alors permis par ce modèle. Ce fessant, deux étapes du test sont à considérer.
En premier lieu, l’investigation consiste à vérifier si le modèle à deux équations de gains est
relativement mieux représenté à l’égard des données par rapport au modèle standard à une seule
équation. Dickens et Lang (1985a, 1985b, 1987, 1988, 1992) suggèrent le test statistique de chi-deux,
ou le test du rapport de vaisemblance, pour lequel il faudrait déterminer le degré de liberté par la
139
méthode de Monte Carlo. En effet, le test de comparaison de deux modèle, avec et sans restriction,
exige une fixation du degré de liberté qui est égal au nombre de paramètres contraints plus le nombre
des paramètres non-identifiés88. Le passage du modèle sans restriction – modèle à deux fonctions de
gains – au modèle standard de fonction de gains rend certains paramètres non identifiés à savoir les
covariances des résidus des fonctions de gains et de l’équation de sélection. Dans notre cas, pour
déterminer la valeur critique, le degré de liberté est égal à 15, c'est-à-dire 7 paramètres qui doivent être
contraints à l’égalité – égal au nombre de coefficients d’une fonction de gains et une variance –, plus 6
paramètres de l’équation de sélection qui disparaissent lors d’un passage au modèle standard et plus 2
covariances non identifiés lors d’un même changement. A la lecture du tableau statistique de Khi-
deux, la valeur critique avec 15 degré de liberté et à 0,1 pour cent du risque d’erreur s’élève à 37,70.
La formule du test de khi-deux, représentée par l’équation 15 reportée en annexe B-2-1, s’égalise à (-
2)*[log (vraisemblance du modèle à deux équation de gains) – log (vraisemblance du modèle
standard)]. Les valeurs du rapport de logs de vraisemblance sont données dans le tableau 2-4. Les
résultats sont nettement au profit du modèle de la dualité. En d’autres termes, le modèle à deux
équations est le plus pertinent. En effet, toutes les valeurs du rapport de logs de vraisemblance
dépassent loin devant la valeur critique de 37,70 pour deux années considérées : 414,068 pour 2005 et
445,740 pour 2006. De ce fait, nous n’avons aucune raison de rejeter l’hypothèse de la dualité du
marché du travail urbain en Thaïlande.
En deuxième lieu, au delà des tests statistiques, il est nécessaire de démontrer que les
estimations économétriques reflètent la partition théorique de la segmentation selon laquelle les
rendements au capital humain du premier segment sont supérieurs à ceux du segment secondaire et les
rendements au capital humain de ce dernier secteur sont proches de zéro. Cette deuxième étape
consiste à comparer les rendements marginaux relatifs à chaque segment. Pour ce faire, il importe de
les approximer par les calculs mathématiques de la dérivation de fonctions de gains. En fait, nous
avons une fonction de gains pour le secteur primaire sous la forme suivante :
E( logW i|W i=W ip )=β p 0+β p 1 s i+β p 2 ei+ βp 3 e i2+β p 4 e i si (2-24)
L’équation (2-24) implique le taux de rendement de l’éducation pour le secteur primaire de manière
suivante :
∂ E ( log W|W=W p )/∂ s=β p1+ βp 4 e (2-25)
Ainsi que le taux de rendement de l’expérience pour ce même secteur :
88 La méthode de fixation du degré de liberté dans ce test statistique est proposée pour la première fois par Goldfeld et Quint (1975).
140
∂ E ( log W|W=W p )/∂e=β p 2+2 β p 3 e+β p 4 s (1-10)
Le calcul des taux de rendement du capital humain pour le segment secondaire s’effectue de
façon analogue. Ainsi, les taux de rendements de l’éducation et de l’expérience pour chaque secteur et
l’ensemble sont donnés dans le tableau 2-4. Les résultats montrent un parfait accord avec la théorie
dualiste du marché, c'est-à-dire qu’il existe non seulement un écart de taux de salaire entre deux
secteurs, mais également une supériorité des rendements marginaux du secteur primaire au détriment
du segment secondaire. Ainsi, les employés ayant un emploi dans le secteur primaire perçoivent en
moyenne trois fois plus de salaire horaire que ceux associés au secteur secondaire. Dans cette logique,
les bas salaires du secteur secondaire montrent un signe des privatisations monétaires et de la
vulnérabilité de certains individus. S’agissant du taux de rendement au capital humain, l’évidence est
nette. D’une part, une année supplémentaire d’éducation engendre, toutes choses égales par ailleurs,
une plus forte élévation de salaires relatifs au segment primaire qu’à ceux de sa contrepartie : 13,3
pour cent contre 3,1 pour cent pour le secteur secondaire en 2005. Pour 2006, les résultats s’affichent
une nette amélioration du taux de rendement du secteur primaire alors que celui du secteur secondaire
devient négatif : 14,1 pour cent pour le segment primaire contre -0,015 pour le secteur secondaire.
Cette dégradation réside dans le fait que les coefficients estimés relatifs à l’éducation sont non
significativement différents de zéro pour ce dernier secteur en 2006, passant de 0,058 en 2005 à -0,007
en 2006 pour l’année d’instruction. Non seulement les rendements de l’éducation sont plus élevés au
secteur primaire que ceux du secteur secondaire mais ils sont proches de zéro, voir même négatifs.
D’autre part, le rendement marginal de l’expérience en moyenne pour le segment primaire, bien
qu’inférieur à celui des années d’instruction, restent 18 fois plus élevés que celui du secteur secondaire
en 2005. L’écart des rendements est accentué en 2006 lorsqu’une année additionnelle d’expérience
dans le secteur primaire implique, toutes choses égales par ailleurs, un accroissement de 4,5 pour cent
du salaire en moyenne contre -3,5 pour cent pour le secteur secondaire en 2006, – ou équivalent à zéro
puisque tous les coefficients du capital humain se montrent non significativement différents de zéro.
Par conséquent, les rendements du capital humain (l’instruction et l’expérience) dans ce dernier
secteur sont relativement faibles comparé à ceux du segment primaire89. Par contre, l’effet de
complémentarité d’éducation*expérience est totalement absent puisque les coefficients de variable
éducation*expérience sont proches de zéros malgré la significativité positive du coefficient au niveau
89 L’interprétation d’un tel résultat doit se faire avec une certaine prudence lorsque les choix d’investissement en capital humain dépendent d’autres variables non observables. Nous parlons alors de l’hypothèse du capital humain endogène [Bourguignon et al (2003) et Menedez (2003)]. Par conséquent, l’estimation des fonctions de gain est liée au problème d’auto-sélection et cette contrainte rend le test de la dualité peu crédible quant au calcul des taux de rendements du capital humain. Pour alléger cet effet, Cipollone (2001) a introduit les variables instrumentales dans les deux modèles (MCO et modèle à changement de régime). L’auteur montre que l’endogénéité a peu d’impact quantitatif sur les coefficients du capital humain, notamment dans le modèle à changement de régime.
141
global en 2005 et négative pour le secteur primaire en 2006. Par ailleurs, les variables indicatrices
Homme et Résidence à Bangkok permettent directement d’observer les taux de rendement des hommes
par rapport aux femmes et du fait de se résider à Bangkok, capitale des activités économiques du pays.
En fait, le rendement marginal des hommes relativement aux femmes dans le secteur primaire dépasse
celui du secteur secondaire durant ces deux années: en 2005, le taux de rendement des hommes dans
ce premier s’élève à 18 pour cent contre 14,7 pour cent pour le segment secondaire, et 21,5 pour cent
contre 18 pour cent en 2006. Toutefois, les rendements relatifs à la résidence de Bangkok, comparée
aux autres régions, sont les plus importants parmi les employés du secteur secondaire que ceux du
secteur primaire. Ainsi, en 2005, ils s’élèvent à 47,6 pour cent contre 16,7 pour le secteur primaire, et
diminuant à 39,5 pour cent contre 13 pour cent en 2006. Ceci s’explique simplement par l’accrue des
opportunités d’emploi à Bangkok par rapport aux autres régions du pays.
En outre, le tableau 2-4 livre un certain nombre d’informations relatives aux conditions
d’accès aux meilleurs emplois – secteur primaire. Sur le plan technique, il s’agit de vérifier la
significativité des coefficients relatifs à l’équation de sélection. A la lecture du tableau, la plupart des
coefficients des variables introduites sont significativement différents de zéro, exceptions faites pour
certaines variables de 2005 telles que le chef du ménage et la formation générale ou spécifique dont
les coefficients sont non significatifs et la formation pour 2006. En effet, la probabilité d’attacher au
segment primaire s’explique essentiellement par la possession d’un emploi public et semi-public dont
les avantages monétaires (salaires élevés) et non-monétaires (système solide de protection sociale)
sont connus. La taille de firme et le niveau d’instruction et le chef du ménage conditionnent l’accès au
segment primaire. De ce fait, l’individu mieux éduqué, occupant un emploi dans le secteur public ou
semi-public et/ou dans une grande firme, aura une chance de se trouver dans le secteur primaire. Ces
résultats confirment les analyses descriptives du premier chapitre et du début du deuxième chapitre
quant aux avantages comparatifs des personnes mieux instruites dans grandes firmes. Ajoutons à cela,
le fait d’être chef du ménage conduit également à un emploi mieux rémunéré en 2006 alors que
l’acquisition des formations au cours de douze dernier mois de référence ne facilite pas l’accès aux
postes meilleurs rémunérés. Il importe de préciser, d’une part, que les variables de sélection sont
restreintes au minimum dans le cadre d’une optimisation de vraisemblance , et, d’autre part, le calcul
des probabilités d’attachement au secteur primaire s’effectue en terme statique, c'est-à-dire au courant
d’une période considérée. L’examen des probabilités de transition par le processus dynamique est alors
nécessaire. Ce fessant, l’étude de la répartition des individus selon secteurs entre deux années doit
préalablement constituer des conditions initiales et finales de mobilité intersectorielle.
142
B. Répartition des individus selon secteurs
L’assignation des individus en secteur se déroule par une comparaison des probabilités
d’attacher au secteur primaire dés lorsque le modèle original ne permet pas directement d’établir une
telle distribution individuelle. L’approximation des probabilités individuelles s’effectue à l’aide de
l’équation (2-14), citée ci-dessus, qui décrit le calcul des probabilités conditionnelles, combinant des
coefficients estimés à leurs variables respectives. La figure 2-3 met en évidence des probabilités
d’attachement au secteur primaire pour 2005 et 2006.
Figure 2-3 : probabilités d’attachement au secteur primaire (2005-5006).
<0,1 0,1-0,2 0,2-0,3 0,3-0,4 0,4-0,5 0,5-0,6 0,6-0,7 0,7-0,8 0,8-0,9 >0,90
5
10
15
20
25
30
35
20052006
Probabilité d'attachement au secteur primaire
prop
ortio
n (%
)
Source : les Enquêtes socio-économiques de Panel (2005-2006).
Les figures 2-3 soulèvent deux remarques essentielles. D’une part, on observe que la forme de
répartition est nettement bimodale pour ces deux années. Deux extrémités se démarquent par un
nombre d’individus ayant une probabilité compris entre 0 et 0,3, et entre 0,7 et 1 respectivement. En
d’autres termes, l’existence d’une forme polaire correspond à l’hypothèse du marché dual dans la
mesure où les personnes ayant une faible probabilité d’attachement perçoivent le salaire moins élevé
que touchent les personnes ayant une forte propension à attacher. D’autre part, malgré une quantité
relativement importante des personnes ayant une forte probabilité, la figure 2-3 enregistre une
réduction de ces dernières au profit de leur contrepartie entre 2005 et 2006. La proportion des
individus ayant la probabilité inférieure ou égale à 0,5 joue à la hausse, ce qui contrebalance celle des
plus attachés au secteur primaire. Cependant, pour deux années considérées, le nombre des personnes
les plus probables d’être classé dans ce secteur dépasse sensiblement celui des moins probables.
L’importance relative des personnes les plus attachées est également observée par les analyses
143
appliquées aux pays développées, à savoir, entre autre, l’étude de Dickens et Lang (1985a, 1985b) sur
les Etats-Unis et de Cipollone (2001) sur l’Italie. Afin d’assigner les individus selon secteurs primaires
ou secondaires, l’utilisation du critère d’un seuil de probabilités semble être logique. En fait, ce seuil
dépend du degré des écarts salariaux pris en compte. A titre d’exemple, si l’objectif de l’analyse est de
séparer les bons et les mauvais emplois, il sera question de considérer un seuil de séparation à 50 pour
cent, et si l’étude consiste à questionner sur la division des plus bas et des plus hauts salaires, les
probabilités des premières et des deuxièmes catégories doivent être comprises entre 0 et 30 pour cent,
et entre 70 et 100 pour cent respectivement. La présente étude de la répartition va prendre en
considération le cas d’un marché du travail dual, lorsque les individus ayant une probabilité supérieure
ou égale à 50 pour cent seront classés au segment primaire et au segment secondaire sinon.
Le tableau A-2-3, reporté en annexe, met en évidence des résultats de la distribution des
individus selon secteurs en fonction des caractéristiques individuelles et professionnelles. De manière
tout à faire attendue, conformément à la figure 2-3 et à la lecture du tableau A-2-3, la proportion
d’individus assignés au marché interne dépasse celle du marché externe, s’élevant à 55 pour cent
contre 45 pour cent pour le marché externe en 2005. Toutefois, cette part se réduit sensiblement,
passant de 55 pour cent à 52,5 pour cent entre 2005 et 2006 alors que le pourcentage des personnes
associées au secteur secondaire augmente de 45 pour cent à 47,5 pour cent durant les mêmes années. Il
importe de distinguer des aspects spécifiques des marchés dualistes.
D’abord, le secteur secondaire génère généralement des individus les plus vulnérables, à savoir
les jeunes travailleurs âgés de 15 à 25 ans, les moins instruits, les ouvriers et les employés dans les
entreprises de production industrielle dont la taille est inférieure à 10 personnes. L’existence d’un tel
sous-groupe correspond aux résultats issus du modèle à changement de régime endogène. En fait, le
tableau A-2-3 en annexe montre qu’en 2005 et 2006, près de 51,5 et 57,8 pour cent d’employés âgés
entre 19 et 25 ans respectivement, sont classés dans le secteur secondaire. Tandis que le sexe
d’individus n’est pas un critère décisif d’identification du secteur, les diplômés primaires et sans
instructions contribuent à agrandir ce marché. Près de 83,6 pour cent en 2005 et 85 pour cent en 2006
de cette dernière catégorie d’employés se trouvent dans le secteur générant les bas salaires. En outre,
les types des professions et la dimension des firmes jouent un rôle nettement concluant quant à
l’identification des individus par secteurs. En effet, près de la totalité des ouvriers, – 99,5 et 100 pour
cent en 2005 et 2006 respectivement –, sont assignés au marché externe, et un peu plus de la moitié
des employés privés et de ceux impliqués dans la production industrielle est concerné par les emplois
du secteur secondaire. Parmi les personnes les moins rémunérées, figurent nombre d’employés des
144
entreprises dont la taille est inférieure ou égale à dix personnes. Parmi ces derniers, près de 90 pour
cent s’impliquent dans ce marché secondaire. Ce résultat attendu soutient maintes analyses
économiques et institutionnelles en Thaïlande dans lesquelles la législation des relations du travail ne
parvient que partiellement à couvrir ce sous-groupe de la population. Par ailleurs, la lecture du tableau
A-2-3 en annexe évoque certaines caractéristiques du secteur primaire. En effet, ce dernier comprend
une quantité importante aussi bien des hommes que des femmes, âgés de plus de 25 ans, vivant
notamment à Bangkok, mieux instruits qui appartiennent à certaines catégories d’emploi et
particulièrement à des grandes entreprises. Il convient de remarquer que près de 95,5 pour cent des
diplômés universitaires s’implique dans le secteur primaire contre 16,4 pour cent des personnes les
moins éduquées entre 2005 et 2006. L’équivalente proportion parmi des employés du secteur public et
semi-public est également observée au sein du marché interne, s’élevant à 98,5 pour cent en 2005 et à
93,4 pour cent en 2006. Contrairement aux emplois peu rémunérés, 84,6 pour cent d’employés des
grandes entreprises, – dont la dimension est supérieure à 200 personnes –, sont associés aux emplois
de hauts salaires.
L’approche statique du modèle segmentationniste, qui consiste à éclairer les mécanismes de
déterminations salariale et de la distribution d’emploi à une période donnée, sera mieux complétée par
les analyses en terme dynamiques du marché. Dans cette direction, l’étude de mobilités intra et
intersectorielles, à l’aide du modèle bivarié des probabilités de transition, permet d’établir de divers
déterminants des barrières à l’entrée du secteur primaire, nécessaires à l’appréhension des dynamiques
salariales et d’emploi dans le marché du travail urbain en Thaïlande.
3. Barrières à l’entrée et mobilités inter-segments
La théorie de la segmentation prévoit une mobilité individuelle limitée entre segments à cause
d’une présence des barrières à l’entrée, constituées des déterminants économiques et sociaux
empêchant la fluidité intersectorielle, et de l’existence des portes d’entrée par lesquelles certains
emplois les moins bons du marché interne seront emplis les employés issus du marché externe alors
que la plupart des postes dans le premier secteur sont généralement comblés par les personnes
émanant du même segment. De fait, les spécificités du marché du travail thaïlandais quant aux
conditions d’accès à certains segments pourraient être aisément dégagées malgré une longueur limitée
des enquêtes longitudinales, collectée en 2005 et 2006. La méthode d’estimations du modèle
économétrique Probit bivarié livrera certains résultats décisifs quant aux facteurs d’enfermement au
secteur secondaire et de mobilité intersectorielle des individus.
145
Tableau 2-5: déterminants de mobilité intersectorielle et des conditions d'enfermement au secteur secondaire à l’aide du modèle des probabilités de transition (2005-2006).
VariablesP[Secondairet-1|Secondairet]
VariablesP[Secondairet-1|Primairet]
Endogène(1) Exogène Endogène Exogèneβ t β t β t β t
Caractéristiques individuelles Caractéristiques individuellesConstant -4,019 -9,692* -4,450 -10,870* Constant -3,109 -5,416* -2,991 -5,951*Primaire et sans instruction 1,619 12,931* 1,645 13,425* Secondaire et plus 1,939 17,194* 1,964 17,806*Expérience (>=20) 0,618 5,457* 0,608 5,451* Expérience (<10) 0,437 3,589* 0,441 3,679*Expérience*Education -0,003 -4,637* -0,002 -4,692* Expérience*Education 0,001 2,101** 0,001 2,285**Femme -0,016 -0,176 -0,010 -0,110 Homme -0,058 -0,61926 -0,067 -0,75327Statut individuel (hors chef)(2) 0,598 5,510* 0,612 6,107* Chef du ménage 0,476 4,582* 0,496 4,967*Marié 0,182 1,921*** 0,225 2,473* Célibataire 0,226 2,049** 0,203 1,997**Mauvaise santé 0,015 0,032 -0,045 -0,110 Bonne et très bonne santé -0,005 -0,053 0,036 0,392
Région RégionNord-est 0,513 3,173* 0,486 3,402* Bangkok 0,827 4,905* 0,789 4,965*Nord 0,280 1,674*** 0,279 1,783*** Centre 0,830 4,377* 0,831 4,621*Sud 0,113 0,542 0,098 0,563 Sud 0,475 1,869*** 0,446 2,033**Centre -0,041 -0,348 -0,096 -0,836 Nord 0,253 1,214 0,242 1,186
Caractéristiques de l'emploi Caractéristiques de l'emploiOuvriers peu qualifiés 1,246 11,043* 1,325 12,551* Emploi public et semi-public 2,024 14,889* 1,985 14,357*Aucune formation(3) 0,172 0,848 0,195 1,0362 Au moins une formation reçue 0,058 0,280 0,106 0,543Taille de firme (<=10 personnes) 1,122 8,069* 1,224 9,023* Taille de firme (>10 personnes) 1,069 7,128* 1,160 8,122*Fois au chômage(4) 0,328 1,880*** 0,349 1,849*** Jamais au chômage 0,229 1,141 0,272 1,398Existence de plusieurs emplois 0,026 0,167 0,083 0,554 Seul emploi 0,036 0,241 0,053 0,339Heure de travail hebdomadaire 0,014 3,741* 0,015 3,301* Heure de travail hebdomadaire -0,011 -2,680* -0,011 -2,373*Jours de travail par mois 0,035 2,490** 0,044 2,997* Jours de travail par mois -0,019 -1,013 -0,029 -1,805***Type de salaire (horaire et journalier) 0,420 3,671* 0,484 4,090* Type de salaire (mensuel) 0,127 1,089 0,123 1,061Mode de recherche d’emploi (famille)(5) 0,141 1,400 0,163 1,633 Mode de recherche d'emploi (formel)(6) 0,179 1,785*** 0,201 2,0481**Coefficient de corrélation (ρ) 0,534 12,291* Coefficient de corrélation (ρ) -0,537 -11,861*
Maximisation MaximisationLog de vraisemblance -1227,751 -646,742 Log de vraisemblance -1107,068 -603,827Itérations 51 7 Itérations 54 7N pondéré 2171 N pondéré 2171
Notes: (1) l'endogénéité est prise en compte dans l'estimation du modèle bivarié (2-23) et l'estimation par la méthode Probit univarié est considérée comme un modèle exogène; (2) il s'agit d'un statut de l'individu au sein de sa famille; épouse, époux, enfants, etc., hors du statut du chef de ménage (3) l'acquisition d'une formation au cours de douze mois de référence; (4) le nombre de fois au chômage au cours d'une période de douze mois de référence;(5) le mode de recherche d'emploi par les réseaux familiaux;(6) le mode formel de recherche d'emploi concerne les recherches dans les annonces, les agents de recrutement ou directement à l'entreprise. Voir également la sélection des variables dans le tableau A-2-2 en annexe.Source: les Enquêtes socio-économiques de Panel (HSEPS), 2005-2006.
La mobilité de transition, indiquée dans le tableau A-2-4 en annexe, met une évidence une
limite mobilité intersectorielle entre 2005 et 2006. Seul 18,3 pour cent des individus dans le secteur
secondaire en 2005 parviennent à pénétrer dans le secteur primaire en 2006 et 81,7 pour cent restent
dans un même secteur secondaire. Toutefois, la statistique de chi-deux montre qu’il existe un état de
dépendance puisque le nombre d’employés restant dans le secteur secondaire est supérieur à ce qui est
statistiquement espéré. Le tableau 2-5 met en évidence des résultats des estimations du modèle Probit
bivarié de probabilités de transition avec une prise en compte d’une sélection endogène. L’étude
consiste à mettre en examen de doubles déterminants : d’une part, dans l’analyse des conditions
d’enfermement au secteur de bas salaires, secteur secondaire, la variable dépendante est une variable
binaire, équivalente à 1 si l’individu est classé dans le secteur secondaire en 2005 et dans le secteur
primaire en 2006, 0 sinon , et, d’autre part, la recherche des déterminants de mobilité intersectorielle
est constituée d’une variable indépendante binaire qui est égale à 1 si l’individu est assigné au secteur
secondaire en 2005 et au secteur primaire en 2006, 0 sinon. Les estimations issues du modèle exogène
et endogène sont effectuées afin de comparer les significativités de leurs coefficients et leur pertinence
relative aux données. S’agissant du modèle Probit bivarié, si les coefficients de corrélation (ρ) dans les
146
équations 2-21 et 2-22 son significativement différents de zéro, l’endogénéité, – états de dépendance
des conditions initiales –, joue un rôle crucial dans les processus d’estimations du modèle. Sinon, le
modèle exogène se révélerait pertinent. En d’autres termes, il n’existe aucune dépendance entre des
états initiaux et finaux. Le tableau 2-5 confirme la supériorité de la méthode endogène des probabilités
de transition en comparaison avec le modèle exogène puisque les coefficients de corrélation sont
significativement différents de zéro. En effet, l’étude des conditions d’enfermement montre un
coefficient de corrélation significativement positif à 1 pour cent du risque d’erreur tandis que, pour
l’analyse de mobilité intersectorielle, il est significativement négatif à 1 pour cent de risque d’erreur90.
Les coefficients conduits sous le modèle exogène tendent d’être surestimés et leur degré de
significativité dépasse de ceux issus du modèle de sélection endogène. Le risque lié à l’ignorance
d’une correction de l’endogénéité est la présence d’un biais des coefficients estimés. A la lecture du
tableau 2-5, deux remarques fondamentales relatives à deux phénomènes économiques étudiés sont à
souligner.
Premièrement, les probabilités de s’enfermer dans le secteur secondaire sont fortement liées
non seulement aux caractéristiques individuelles telles que faible niveau d’éducation et niveau élevé
d’expérience, mais également de l’ensemble des caractéristiques de l’emploi que possède l’individu, –
emploi peu qualifié, taille de firme, période de chômage, nombre d’heure de travail hebdomadaire et
type d’emploi temporaire. D’une part, les variables du capital humain sont toutes significatives à 1
pour cent. Il est observé que les personnes les moins instruites, primaire et sans instruction, ont plus de
chance de rester durablement dans ce secteur. Le résultat tout à fait inattendu est l’impact de
l’expérience potentielle accumulée sur la probabilité d’attacher au marché externe. Toutes choses
égales par ailleurs, le fait d’avoir d’expérience accumulée de plus de vingt ans ne permet pas de sortir
de l’encerclement des bas salaires. L’interprétation de l’estimation du modèle proposé paraît en total
accord avec la théorie de la segmentation au détriment du modèle du capital humain selon lequel
l’expérience est en parfaite corrélation positive avec le niveau de salaire. Toutefois, selon l’estimation
du modèle, l’expérience doit être renforcée en complémentarité par niveau d’éducation afin d’éviter la
situation défavorable. La variable montrant la complémentarité entre expérience et éducation est
significativement négative à 1 pour cent. Par ailleurs, le fait d’être une femme par rapport à l’homme
et d’avoir une mauvaise santé semble dissociée à une forte propension à enserrer dans ce segment.
Cette observation semble tout à fait normale puisque la participation des femmes joue un rôle
prépondérant dans la prospérité du marché du travail des pays du Sud-d’Ouest asiatiques91. De manière
90 Le coefficient de corrélation négatif correspond à une variation du sensé inversé entre des statuts individuels de la période t-1 et t [Staewart et Swaffield (1999)]. 91 La participation des femmes au marché du travail urbain contribue à la prospérité économique dans les pays du Sud-Ouest Asiatiques. Voir Dowling et Worswick (1999)
147
attendue, les salariés de la région Nord-est par rapport à ceux situé à Bangkok sont plus probables de
trouver un emploi peu rémunéré dans le secteur secondaire. D’autre part, la probabilité de s’encercler
dans un secteur des bas salaires s’associe aux caractéristiques de l’emploi, notamment l’emploi peu
qualifié et la taille de firme. A cet égard, travailler comme ouvriers peu qualifié entraîne, toutes choses
égales par ailleurs, une forte probabilité de s’impliquer durablement dans ce secteur. Il en est aussi vrai
pour les personnes ayant un emploi au sein des petites entreprises dont la taille est inférieure ou égale
à 10 personnes. Ainsi, les variables d’ouvrier peu qualifié par rapport aux autres professions et de
taille de firme inférieure ou égale à dix personnes, comparée aux firmes de taille supérieure à dix
personnes, sont toutes les deux significativement différentes de zéro. Par ailleurs, on observe une forte
corrélation positive entre la propension à trouver un emploi à bas salaire et le nombre de jours de
travail par mois, et notamment le nombre d’heure hebdomadaire de travail. En fait, la significativité
des coefficients inhérents au nombre d’heure hebdomadaire et de jour de travail par mois permet de
confirmer que les employés du secteur secondaire sont d’autant plus incités à accumuler les quantités
de travail que leur taux de salaire est relativement faible. Enfin, l’introduction du type de paiement
(horaire et journalier) dans les estimations économétriques a pour objectif de capturer l’effet négatif de
l’emploi temporaire sur la probabilité individuelle. Le résultat du tableau 2-5 montre qu’un tel effet
prévaut au sein du marché du travail urbain en Thaïlande. De fait, la variable de type de paiement
(horaire et journalier) semble être significativement positive à 1 pour cent. Toutefois, certaines
variables n’ont aucune influence significative sur le changement dynamique de statut individuel, à
savoir aucune acquisition de formation, existence des emplois secondaires et la recherche d’emploi par
réseaux familiaux.
Deuxièmement, l’accès aux emplois mieux rémunérés dépend des facteurs socio-économiques
que montre l’estimation du modèle Probit bivarié de mobilité intersectorielle dans le tableau 2-5.
D’abord, les barrières à l’entrée du marché interne sont constituées des variables du capital humain
telles que le meilleur niveau d’éducation, l’expérience potentielle inférieure à 10 années, la
complémentarité expérience et éducation. Ce sont des déterminants du capital humain, tout à fait
opposés au phénomène d’enfermement, qui permettent d’appréhender les processus dynamiques de
mobilité inter-segments. L’accès au marché interne exige, toutes choses étant égales par ailleurs, un
niveau d’éducation secondaire et supérieur. L’importance du niveau d’expérience n’explique peu
l’obtention de l’emploi mieux rémunéré puisque les moins expérimentés avec 10 années d’expérience
accèdent plus facilement au secteur interne par rapport à ceux ayant plus de 20 années d’expérience.
Ces deux variables sont tout à faite significatives à 1 pour cent. Néanmoins, il est possible que l’effet
positif de l’expérience sur la probabilité individuelle soit minimisé à cause de l’incorporation de la
148
variable combinée d’expérience et d’éducation. De fait, l’accumulation conjointe de l’expérience et de
l’éducation conduit à sortir du marché des bas salaires malgré la faible significativité statistique de la
variable concernée, – de 5 pour cent. L’estimation du modèle proposé montre également un effet
positif du chef du ménage sur l’accès au secteur primaire puisque le coefficient de la variable est
statistiquement significatif à 1 pour cent. Les disparités régionales à l’égard de la facilité d’accès aux
emplois mieux rémunérés prévalent au sein du marché du travail urbain. Le tableau 2-5 montre les
résultats tout à fait attendus quant aux opportunités d’emploi à Bangkok et à la région du Centre,
comparées à la région du Nord-est. Les variables de Bangkok et du Centre sont toutes significatives à
1 pour cent alors que celle du sud l’est au seuil de 5 pour cent. En outre, certaines caractéristiques de
l’emploi permettent de prévoir les possibilités individuelles d’accrocher un poste dans un marché
interne. Toutes choses égales par ailleurs, le fait de travailler dans le secteur public et semi-public
facilite l’entrée aux diverses promotions de la carrière et aux meilleures rémunérations. La dimension
de firmes joue un rôle non négligeable sur le passage au secteur primaire: l’individu ayant un emploi
dans les firmes de taille supérieur à 10 personnes a, toutes choses étant égales par ailleurs, plus de
chance d’accéder aux emplois à meilleure rémunérations. Cette observation confirme les résultats
précédemment notés aussi bien dans le premier chapitre que dans le début du deuxième chapitre.
L’accumulation croissante du nombre d’heure hebdomadaire de travail ne fait pas partie des caractères
pertinents de l’emploi primaire lorsque la variable du nombre d’heure hebdomadaire se révèle
significativement négative à 1 pour cent. Il importe de souligner l’importance du mode formel de
recherche d’emploi dans le secteur primaire tel que les annonces journalières ou télévisées ou directes
à l’entreprise et les agents public ou privés de recrutement par rapport au mode de recherche passant
par les réseaux familiaux. Cette variable de recherche formelle est significative à 10 pour cent.
D’autres variables d’intérêts semblent être non significatives, à savoir la formation, l’absence de
période de chômage, la possession d’un seul emploi, le jour de travail par mois, et le type de
rémunération (mensuelle).
En dépit d’une contrainte statistique existante à l’écart du nombre d’intervalle des enquêtes
considérées, l’étude de mobilité inter-segments montre un certain nombre de résultats intéressants
susceptibles d’apporter des réponses au préalable aux questions relatives à la mobilité professionnelle
que traitera le chapitre suivant. Il importe de remarquer que l’analyse de mobilité intersectorielle, que
nous venons d’effectuer, n’est qu’une suite d’une stratification statistique issue de deux modèles
sélectionnés et ne correspond pas spécifiquement à un examen d’une mobilité d’emploi que constitue
l’objet particulier de notre recherche. Dans cette logique, l’étude de la mobilité intersectorielle
rassemble toutes les catégories de mobilité telles que mobilité des carrières au sein d’une même
149
entreprise et mobilité d’emploi entre différents firmes. L’exploration de la mobilité professionnelle est
alors nécessaire à l’appréhension des phénomènes dynamiques du marché du travail urbain.
Conclusion
L’objet de ce chapitre est de dépasser l’aspect descriptif du marché du travail urbain par une
démonstration de ses spécificités à l’aide d’une nouvelle approche de la segmentation. Il s’agissait
d’un passage d’une approche théorique à l’analyse empirique de la dualité du marché. L’intérêt de
l’étude du marché du travail dualiste porte sur deux axes. D’une part, elle consiste à dégager les causes
principales de la persistance de l’inégalité salariale en présence de différents mécanismes de
détermination salariale et de processus dynamique qui l’alimente. D’autre part, les vérifications
empiriques de la dualité du marché et des barrières à l’entrée de certains segments permettent de
disposer des déterminants de mobilité intersectorielle. A cet égard, deux modèles économétriques, –
modèle à changement de régime avec règle de séparation inconnue et modèle Probit bivarié des
probabilités de transition–, s’appliquent aux enquêtes socio-économiques de Panel (HSEPS), allant de
2005 à 2006. L’ensemble des résultats révèle des faits marquants.
Tout d’abord, on assiste à une montée de l’inégalité des salaires entre 1985 et 2004, expliquée
par une baisse tendancielle des revenus de la classe des moins rémunérés, et notamment la classe
moyennement rémunérée. Durant les années de crise économique, l’instabilité de revenus prévaut, dû
essentiellement à une diminution artificielle de salaires et à la montée du chômage. La reprise
économique accentue la répartition inégale de salaires par une hausse des spécifications sectorielles et
de l’emploi. Dans cette direction, il revient à remettre en cause du modèle du capital humain. A la
vertu du modèle à changement de régime, les tests empiriques de la dualité du marché du travail
conduisent à rejeter l’hypothèse de la théorie standard selon laquelle les rendements marginaux sont
homogènes et spécifiques à chaque niveau d’instruction. En effet, il est montré que non seulement les
rendements du capital humain dans le secteur secondaire sont presque nuls mais sont largement
inférieurs à ceux du secteur primaire. Le modèle proposé parvient à définir des travailleurs à bas et à
haut salaires à travers d’une ligne de séparation dualiste. Sur le plan technique, deux étapes du test à
l’aide du modèle à changement de régime rejettent le modèle à une fonction de gains. En première
étape, le test statistique de khi-deux, – le test de rapport de vraisemblance–, indique qu’un modèle à
deux fonctions de gains est le plus pertinent. La deuxième étape du test consiste à quantifier les taux
150
de rendement au capital humain afin d’éclairer la compatibilité du modèle à deux équations avec la
partition théorique. Le secteur primaire se caractérise par un rendement élevé tandis que le secteur
secondaire engendre une apparente infériorité de rendements du capital humain.
En outre, le calcul statistique des probabilités attachées au segment primaire permet de répartir
des individus selon segments afin de constituer un profil de distribution individuelle. A cet égard, le
secteur primaire est généralement surreprésenté par des personnes ayant atteint un niveau d’études
universitaires ou ayant un emploi public ou semi-public ou travaillant dans une grande entreprise de
taille supérieure à 10 personnes tandis que le secteur secondaire se démarque par un nombre
significatif d’employés qui obtiennent un faible niveau d’instruction primaire et secondaire ou qui
occupent d’un emploi peu qualifié tel qu’ouvrier peu qualifié et employés de production industrielle.
L’adoption d’un modèle Probit bivarié à changement endogène, tenant en compte des conditions
initiales dans les estimations économétriques de mobilité, a pour objectif de déterminer les facteurs
économiques et sociaux relatifs à l’accès au secteur des haut salaires. Il en résulte que la répartition
salariale est provoquée non seulement par la différence en termes du capital humain, mais aussi par
d’autres facteurs tels que les zones géographiques et caractéristiques de l’emploi. Par conséquent, il
semble que l’hypothèse de complémentarité de Sobel (1982) est pertinente dans la mesure où les
déterminantes du capital humain jouent un rôle complémentaire, non substituable, à d’autres facteurs
socio-économiques préconisés par la théorie de la segmentation.
Enfin, l’ensemble des résultats dégagés a d’importantes implications dans la mise en œuvre des
politiques de lutte contre la pauvreté et l’inégalité. Ces dernières doivent désormais s’intéresser aux
conséquences néfastes des programmes de formation et d’éducation dont l’impact réel sur le bien-être
se voit mitigé. Selon Shao Zhiqin, un meilleur ciblage de la dépense publique et le système de la
gestion budgétaire efficace seront les principaux outils. Une attention particulière devrait être prêtée
à la plus grande utilisation des approches participatives, et aux transparences du financement et de la
répartition des richesses. Les personnes pauvres sont pauvres non pas parce qu'ils manquent des
moyens monétaires. Mais ils sont pauvres parce qu'ils manquent de l'accès à et du pouvoir de
négociation en atteignant des ressources [Shao Zhiqin (2001) p.10]. Il existe un consensus que la
paupérisation et l’inégalité persistante associées à l’incapacité d’accéder aux ressources sociales ou
informationnelles s’aggravent dans un contexte de rigidité du marché du travail. Par conséquent,
l’objet d’études du troisième chapitre est de mener une analyse dynamique du changement d’emploi à
l’égard de croissance salariale. En d’autres termes, il s’agit de questionner sur les tendances
spécifiques de la mobilité professionnelles et son impact sur les salaires et l’inégalité salariale.
151
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ANNEXES ANNEXE A :
Tableau A-1-1 : Répartition du produit intérieur brut par secteur (en pourcentage).Secteurs 1980 1985 1990 1995 1998 1999 2000 2002 2003 2004
Agriculture et pêche 20,2 19,1 13,6 10,7 11,6 11,4 11,5 10,0 10,4 9,3Industries manufacturières 23,9 24,3 29,4 32,8 34,3 36,8 37,3 39,0 40,2 40,9Constructions 4,6 5,0 6,0 6,2 3,3 2,9 2,5 2,5 2,4 2,5Electricité, gaz et eau 1,7 2,3 2,4 2,7 3,1 3,1 3,3 3,4 3,3 3,3Commerce de gros et de détail 21,0 19,8 22,9 24,3 20,2 18,1 17,5 21,7 21,4 21,5Transports et communications 7,2 7,2 7,6 8,1 9,3 9,4 9,7 10,2 9,9 10,0Services 21,5 22,4 18,2 15,2 18,3 18,3 18,2 13,2 12,5 12,5
100 100 100 100 100 100 100 100 100 100
Sources: calculé à partir des données de Banque Centrale de Thaïlande: http://www.bot.or.th.
Tableau A-1-2: Proportion de la population ayant un niveau d'éducation secondaire (1ère cycle) en 1998.Pays 20-24 25-29 30-34 45-44 45-54 55-64
Brésil 52 49 49 45 36 25Chili 85 80 74 68 46 30Pérou 69 64 55 46 30 18Uruguay 61 61 54 47 37 24Indonésie 56 49 40 26 19 11Malaisie 81 77 70 54 31 12Thaïlande 48 39 32 24 14 8
Source: Michaelowa et Waller (2003) p.XVIII.
Tableau A-1-3 : Comparaison des productivités du travail en moyenne périodique (en dollars USA/ans)Valeur Ajoutée par personne(1)
Pays 1980-1984 1995-1999Indonésie 3 807 5 139
Japon 34 456 92 582Malaisie 8 454 12 661
Philippines 5 266 10 781
172
Singapour 16 442 40 674Corée du Sud 11 617 40 916
Thaïlande 11 072 19 946
Notes: (1) le rapport entre la valeur ajoutée et le nombre d’employés.Sources: Banque Mondiale (2001a).
Tableau A-1-4: Difficultés de recrutement des entreprises et méthodes de recrutement des employés (2005). Nombre d'entreprises %
Difficultés d'embauche Pas assez de qualification 7355 23,3Peu d'expériences 5177 16,4Manques de connaissance en langues 694 2,2Manques de connaissances en TIC 95 0,3Pas assez de compétences spécifiques à l'emploi 8238 26,1Manque de caractéristiques personnelles 2872 9,1Problèmes de salaires 7134 22,6
Total 31565 100,0Méthodes de recrutement
Directement à l'entreprise 13257 42,0Agent de recrutement privé 1168 3,7Agent de recrutement public 2841 9,0Réseaux familiaux 11584 36,7Site de recrutement 1073 3,4Directement à l'école 1641 5,2
Total 31565 100,0
Source: L'enquête sur la demande de travail, Bureau National de Statistique (2005).
Tableau A-1-5 : répartition des actifs occupés en sous emploi et taux de sous-emplois entre 1985 et 2004.répartition des actifs occupés en sous emploi (%) Taux de sous-emploi (%)(1)
1985 1990 1995 1998 2000 2003 20041985
1990
1995
1998
2000
2003
2004
Par âge 15-19 9,2 1,3 6,1 5,5 3,9 2,4 6,5 4,2 2,2 1,6 4,1 2,8 0,6 1,420-24 14,0 8,1 10,1 11,5 11,6 11,1 11,2 4,2 2,1 1,3 3,3 3,3 0,8 0,925-34 33,0 16,1 27,7 32,0 30,1 26,0 24,9 4,4 2,2 1,5 3,4 2,9 0,7 0,735-54 36,1 32,0 42,9 41,1 44,0 51,1 47,6 4,6 2,1 1,9 3,3 3,1 0,9 0,9>55 7,8 42,4 13,2 9,8 10,4 9,4 9,8 5,1 2,6 2,7 3,9 3,7 0,8 0,8
100 100 100 100 100 100 100Par genre
Homme 57,2 54,7 53,0 49,6 54,1 56,7 57,8 4,7 2,3 1,7 3,2 3,1 0,8 0,9Femme 42,8 45,3 47,0 50,4 45,9 43,3 42,2 4,3 2,3 1,8 3,7 3,0 0,7 0,7
100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0Par niveaux d'éducation
Sans instruction 4,2 5,9 5,5 2,9 2,3 5,5 5,2 3,8 3,5 3,9 4,5 3,2 1,1 2,2primaire 65,8 61,5 59,1 53,1 48,3 59,1 59,7 4,7 2,5 1,8 3,8 3,2 0,9 1,2secondaire (1er cycle) 8,8 9,1 11,5 12,6 11,7 11,5 18,2 3,9 1,8 1,5 2,7 2,3 0,9 1,0secondaire (2eme cycle) 3,9 3,3 4,6 5,3 5,6 4,6 6,7 5,1 1,5 1,3 2,7 2,3 0,3 0,5secondaire professionnel 5,0 6,0 3,8 4,1 3,3 3,8 1,7 3,8 2,1 1,0 2,4 1,8 0,4 0,2Diplôme (Bac+2) 6,0 4,0 6,8 5,1 4,4 6,8 1,2 7,0 2,5 4,0 4,7 4,7 0,3 0,2Universitaire 6,3 10,3 8,7 16,7 24,4 8,7 7,4 4,1 2,2 1,2 3,4 3,9 0,8 0,3
100 100 100 100 100 100,0 100Total 4,5 2,3 1,7 3,4 3,1 1,7 0,8Note: (1) le taux de sous-emploi pour un groupe se définit comme le nombre de personnes en sous-emploi dans ce groupe raporté à l'ensemble des actifs occupés dans ce même groupe.
sources : les enquêtes sur la main d'œuvre au troisième trimestre (1985-2004).
Tableau A-2-1: Indices de Gini, de Theil, part du revenu du décile dans le revenu total, rapports inter-décile entre 1985-2004.
Année Gini(1) Theil 1ère(2) 2ème 3ème 4ème 5ème 6ème 7ème 8ème 9ème 10ème Total D50/D10(3) D90/D50 D90/D101985 0,40 0,30 1,8 3,2 4,7 5,7 6,9 8,6 10,3 12,3 15,8 30,7 100,0 2,9 2,2 6,61986 0,39 0,28 1,9 3,4 4,8 5,7 6,9 8,6 10,3 12,6 16,2 29,6 100,0 3,0 2,5 7,41987 0,40 0,30 1,9 3,3 4,7 5,6 6,8 8,5 10,1 12,5 16,3 30,3 100,0 3,0 2,5 7,41988 0,43 0,37 1,8 3,3 4,5 5,5 6,5 8,2 9,5 12,0 15,5 33,2 100,0 2,6 2,4 6,31989 0,42 0,33 1,9 3,4 4,5 5,6 6,8 8,2 9,8 12,5 16,0 31,3 100,0 2,8 2,4 6,91990 0,42 0,34 1,9 3,5 4,6 5,5 6,8 7,8 9,8 12,4 16,0 31,7 100,0 2,5 2,7 6,71991 0,42 0,34 2,0 3,5 4,6 5,6 6,7 7,9 9,7 12,2 16,0 31,8 100,0 2,3 2,7 6,21992 0,42 0,34 2,0 3,5 4,6 5,5 6,3 7,8 9,6 12,1 16,4 32,2 100,0 2,5 2,5 6,21993 0,42 0,33 2,0 3,6 4,7 5,3 6,4 7,9 9,6 12,3 16,2 32,0 100,0 2,2 2,8 6,31994 0,42 0,33 2,0 3,5 4,7 5,2 6,4 7,9 9,8 12,7 16,8 30,9 100,0 2,2 2,7 6,01995 0,42 0,34 2,1 3,6 4,4 5,4 6,5 7,8 9,6 12,7 16,8 31,2 100,0 2,0 3,0 6,01996 0,41 0,31 2,2 3,8 4,5 5,4 6,5 7,8 9,5 12,5 16,9 30,8 100,0 2,0 2,7 5,61997 0,42 0,34 2,3 3,8 4,6 5,5 6,5 7,8 9,6 12,5 17,2 30,4 100,0 2,0 2,8 5,51998 0,42 0,34 2,3 3,8 4,6 5,5 6,4 7,8 9,5 12,3 17,2 30,6 100,0 2,0 2,8 5,61999 0,42 0,33 2,3 3,8 4,6 5,5 6,5 7,8 9,5 12,2 17,2 30,6 100,0 2,0 2,8 5,72000 0,41 0,33 2,4 3,8 4,7 5,5 6,5 7,7 9,4 12,2 17,2 30,6 100,0 2,0 2,9 5,8
173
2001 0,46 0,42 2,2 3,6 4,4 5,1 6,1 7,5 9,5 12,7 17,3 31,6 100,0 1,9 3,2 5,92002 0,44 0,38 2,3 3,5 4,4 5,1 6,2 7,5 9,4 12,9 17,6 31,3 100,0 1,9 3,1 5,92003 0,46 0,43 2,2 3,5 4,2 4,9 5,9 7,4 9,4 12,8 17,3 32,4 100,0 1,0 3,1 3,12004 0,48 0,45 2,1 3,3 4,0 4,6 5,5 6,9 9,0 12,5 17,9 34,2 100,0 2,0 3,3 6,6
Note: (1) Indices de Gini et de Theil avec les revenus des emplois indépendants; (2) La part du revenu du décile considéré dans le revenu total est le rapport entre le salaire moyen de chaque décile et la somme totale des salaires moyens de chaque décile; (3) les rapports inter-décile se calculent par le rapport entre les valeurs des limites du décile supérieur, voir les mesures d'inégalités.
Sources: l'Enquêtes sur la main d'œuvre LFS du troisième trimestre (1985-2004).
Tableau A-2-2: définitions et moyenne des variables statistiques.
Variables Définitions des variablesMoyenne (2005)
Moyenne (2006)
Modèle avec règle de séparation inconnue Variable dépendante
Logarithme de salaire horaire Log (salaire horaire) 3,711 3,733Variables indépendantes
Année d'instruction Année d’éducation formelle 9,450 8,941Expérience potentielle (année) Age-6-année d’éducation 20,028 21,519Expérience2 Expérience*expérience 551,013 621,089Expérience*Education Expérience*année d’éducation 153,964 150,477Homme Indicatrice: 1 si l'homme, 0 sinon 0,542 0,542Résidence à Bangkok Indicatrice, 1 si réside à Bangkok, 0 sinon 0,530 0,532Employé public et semi-public Indicatrice: 1 si l'employé public et semi-public, 0 sinon 0,266 0,277Taille de firme Continue: 1 si 1 employé; 2 si inférieur à 10;3 si 11 à 50;4 si 51 à
100; 5 si 101 à 200; 6 si 201 à 500; 7 si supérieur à 500 4,347 4,329Chef du ménage Indicatrice: 1 si le chef du ménage, 0 sinon 0,368 0,380Formation Indicatrice: 1 si formation reçue, 0 sinon 0,095 0,076
Modèle Probit bivarié à changement endogène Modèle à enfermement (secondaire vers secondaire)
Variable dépendanteD1 et D2 Indicatrice : D1 codé 1 si secondaire en t-1 et 0 sinon, D2 codé 1 si
secondaire en t et 0 sinon. D1=0,449 D2= 0,455
Variables indépendantesCaractéristiques individuelles et régions
Primaire et sans instruction Indicatrice:1 si éducation primaire et sans instruction et 0 sinon 0,414 0,441Expérience (<10) Indicatrice:1 si expérience inférieure à 10 et 0 sinon 0,474 0,503Expérience*Education Expérience*année d’éducation 153,964 153,088Femme Indicatrice:1 si femme et 0 sinon 0,458 0,458Statut individuel (hors chef) Indicatrice:1 si le statut est non chef du ménage et 0 sinon 0,632 0,620Marié Indicatrice:1 si marié et 0 sinon 0,290 0,274Mauvaise santé(1) Indicatrice:1 si déclaration d'avoir une mauvaise santé et 0 sinon 0,017 0,015Nord-est Indicatrice 1 si réside au Nord-est et 0 si réside à Bangkok 0,126 0,127Nord Indicatrice 1 si réside au Nord et 0 si réside à Bangkok 0,100 0,099Sud Indicatrice 1 si réside au Sud et 0 si réside à Bangkok 0,075 0,074Centre Indicatrice 1 si réside au Centre et 0 si réside à Bangkok 0,169 0,168
Caractéristiques de l'emploiOuvriers peu qualifiés Indicatrice: 1 si ouvrier peu qualifié et 0 sinon 0,599 0,646Aucune formation Indicatrice: 1 si aucune formation au cours de période et 0 sinon 0,905 0,924
Taille de firme (¿ 10 personnes) Indicatrice: 1 si taille de firme inférieure à 10 personnes et 0 sinon 0,198 0,180Nombre de fois au chômage(2) Indicatrice: 1 si au moins une fois au chômage et 0 sinon 0,054 0,051Emploi secondaire Indicatrice: 1 s'il existe un emploi secondaire et 0 sinon 0,099 0,095Heure hebdomadaire Nombre d’heure de travail hebdomadaire 46,789 46,231Jours par mois Nombre de jours de travail par mois 24,267 24,020Type de salaire (horaire et journalier) Indicatrice: 1 si salaire horaire et journalier et 0 sinon 0,200 0,197Recherche d'emploi par réseaux familiaux Indicatrice: 1 si recherche d'emploi par aide familiale et 0 sinon 0,215 0,220Modèle à mobilité intersectorielle
Variable dépendanteD1 et D3 Indicatrice : D1 codé 1 si secondaire en t-1 et 0 sinon, D3 codé 1 si
primaire en t et 0 sinon. D1=0,449 D3=0,525
Variables indépendantesCaractéristiques individuelles et régions
Secondaire et plus Indicatrice:1 si éducation secondaire et plus et 0 sinon 0,586 0,559
Expérience (¿ 20) Indicatrice:1 si expérience supérieur et égale à 20 et 0 sinon 0,263 0,228Expérience*Education Expérience*année d’éducation 153,964 153,088Homme Indicatrice:1 si homme et 0 sinon 0,542 0,542Chef du ménage Indicatrice:1 si chef du ménage et 0 sinon 0,368 0,380Célibataire Indicatrice:1 si célibataire et 0 sinon 0,645 0,658Bonne et très bonne santé Indicatrice:1 si avoir une bonne et très bonne santé et 0 sinon 0,721 0,703Bangkok Indicatrice:1 si réside à Bangkok et 0 si Nord-est 0,530 0,532Centre Indicatrice:1 si réside au Centre et 0 si Nord-est 0,169 0,168
174
Sud Indicatrice:1 si réside au Sud et 0 si Nord-est 0,075 0,074Nord Indicatrice:1 si réside au Nord et 0 si Nord-est 0,100 0,099
Caractéristiques de l'emploiEmploi public et semi-public Indicatrice:1 si l'emploi public et semi-public et 0 sinon 0,266 0,277Au moins une formation reçue Indicatrice:1 si formation reçue en période de référence et 0 sinon 0,095 0,076Taille de firme (>10 personnes) Indicatrice:1 si taille de firme inférieure à 10 personnes et 0 sinon 0,802 0,819Jamais au chômage Indicatrice:1 si jamais au chômage et 0 sinon 0,946 0,944Seul emploi Indicatrice:1 s'il existe un seul emploi et 0 sinon 0,901 0,905Heures hebdomadaires Nombre d'heure de travail hebdomadaire 46,789 46,231Jours par mois Nombre de jours de travail par mois 24,267 24,020Type de salaire (mensuel) Indicatrice:1 si salaire horaire et journalier et 0 sinon 0,753 0,751Recherche d'emploi par méthode formelle(3) Indicatrice:1 si recherche d'emploi par aide familiale et 0 sinon 0,742 0,735
Notes : (1) à partir d’une déclaration de l’état de santé (très bonne, bonne, moyenne et mauvaise), la variable indicatrice de l’état de santé est constituée ;(2) le nombre de fois au chômage et la formation reçue se déroulent au cours de 12 derniers mois ; (3) la recherche d’emploi par méthode formelle comprend des annonces dans les journaux ou à la télévision, dans des agents publics de recrutement et directement à l’entreprise.
Source : les Enquêtes socio-économiques de Panel (HSEPS), 2005-2006.
Tableau A-2-3: répartitions des individus selon secteur, caractéristiques individuelles et de l’emploi.2005 2006
Variables Secondaire Primaire Total Secondaire Primaire Total
GenreHomme 47,8 52,2 100,0 49,7 50,3 100,0Femme 41,4 58,6 100,0 45,0 55,0 100,0
Classe d'âge15-25 51,5 48,5 100,0 57,8 42,2 100,026-35 41,5 58,5 100,0 45,0 55,0 100,0>35 44,9 55,1 100,0 46,2 53,8 100,0
RégionBangkok 39,8 60,2 100,0 42,5 57,5 100,0Centre 55,7 44,3 100,0 58,6 41,4 100,0Nord 53,0 47,0 100,0 57,2 42,8 100,0Nord-est 51,0 49,0 100,0 50,3 49,7 100,0Sud 35,4 64,6 100,0 40,8 59,2 100,0
Niveau d'éducationPrimaire et sans instruction 83,6 16,4 100,0 85,0 15,0 100,0Secondaire(1) 31,4 68,6 100,0 32,7 67,3 100,0Universitaire 4,5 95,5 100,0 4,5 95,5 100,0
Catégorie professionnelleIndustries de production(2) 63,7 36,3 100,0 78,9 21,1 100,0Commerce 30,1 69,9 100,0 67,0 33,0 100,0Public et semi-public 1,5 98,5 100,0 6,6 93,4 100,0Employés privés 53,1 46,9 100,0 58,2 41,8 100,0Ouvriers 99,5 0,5 100,0 100,0 100,0
Taille de firmeinférieure à 10 89,3 10,7 100,0 89,5 10,5 100,0de 11 à 200 46,9 53,1 100,0 48,4 51,6 100,0supérieur à 200 15,4 84,6 100,0 21,9 78,1 100,0
Total 44,9 55,1 100,0 47,5 52,5 100,0Notes: la division du secteur d'effectue par un seuil de probabilités de 50 pour cent, si probabilité <50 pour cent, l'individu se classe dans le marché externe, sinon dans le marché interne;(1) le niveau d'éducation secondaire englobe le premier et deuxième cycle, de filière générale et professionnelle;(2) selon la classification des enquêtes socio-économiques de Panel, les industries de production contient des emplois impliquant dans la fabrication des produits alors que l'employé privé concerne principalement le travail dans les services, non dans la fabrication.Source: les Enquêtes socio-économiques de Panel (HSEPS), 2005-2006.
Tableau A-2-4: mobilités intra et intersectorielles entre 2005 et 2006. Primaire 2006 Secondaire 2006
Primaire 2005 Valeur observée 2 665 926 Valeur observée 348 488% 88,4 % 11,6Valeur espérée 1 661 023 Valeur espérée 1 353 391% 55,1 % 44,9
Secondaire 2005 Valeur observée 499 664 Valeur observée 2 230 815% 18,3 % 81,7Valeur espérée 1 504 567 Valeur espérée 1 225 912
% 55,1 % 44,9Notes: Pearson de Khi-deux = 2849019,618.Source: Source: les Enquêtes socio-économiques de Panel (HSEPS), 2005-2006.
175
ANNEXE B :
Annexe B-2-1 : Spécification du modèle à changement de régime
Considérons qu’un individu maximise sa fonction d’utilisé sur les salaires et les caractéristiques non monétaires tout au long de sa vie, sa fonction d’utilité est donc :
U0= log∫0
∞
e−rt w( t )dt +CNM(1)
où r est un taux d’escompte, w ( t )est le taux de salaire et CNM est un aspect non monétaire. Le salaire s’exprime par la formulation standard du capital humain,
w ( t )=exp ( Xβ+at+η ) (2)
où X représente les caractéristiques de l’individu, t est l’année d’expérience, η est la composante non observées des salaires, qui est non corrélée avec les caractéristiques individuelles et avec le temps. On substitue l’équation (2) à (1) en supposant que r−a>0 , on a ;
U0=Xβ+η−log (r−a )+CNM (3)
On suppose qu’il existe deux segments dans un marché du travail, primaire et secondaire. Si l’individu fait un choix de travailler dans le secteur primaire, sa fonction d’utilité au cours de sa vie active est ;
Up0=Xβ p+ηp−log (r−a p )+CNM p
(4)
L’indice P indique le secteur primaire et dans le cas contraire, la fonction d’utilité de l’individu est ;
Us0=Xβ s+ηs− log (r−as )+CNM s
(5)
Par conséquent, la décision individuelle se base sur la maximisation de sa fonction d’utilité. L’individu restera dans le premier segment si
U p0 >U
s0 avec le taux de salaire de log ( wp )=Xβ p+a p t+ηp et dans le second segment si U s
0>Up0
avec le taux de
salaire de log ( w s)=Xβs+as t +ηs . L’équation de sélection est la différence entre les utilités ;
Z=U p0−U s
0=X ( β p−βs )+(ηp−ηs )+log [ (d−as )d−ap ]+CNM p−CNM s
(6)
Or, on suppose que
log [ (d−as )d−ap ]+CNM p−CNM s
= constant + ηw . Etant donné que l’équation de sélection (2-15) soit
égal à Z∗¿ DΠ+υw , D est le vecteur [1, X] et υw est la somme des résidus(ηp+ηs+ηw ).
176
A partir des équations (2-13), (2-14) et (2-15), on définit une variable indicatrice δ i de manière suivante :
δ p=1 si
Z∗¿0 et
δ p=0 sinon,
δ s=1 si
Z∗¿0 et
δ s=0sinon,
Si l’on est en mesure d’observer dans quel segment l’individu est employé, la valeur δ i sera connu. On aura la fonction de vraisemblance
qui sera sous la forme (Heckman et MaCurdy (1986) :
LF={ [ gp (W p )Pr (δ p=1)] }δp { [ gs(W s )Pr ( δs =1 )] }δ s
(7)
Tel que
Pr ( δp=1)=∫0
∞
f (Z )dZ et
Pr ( δs=1 )=∫−∞
0
f (Z )dZ (8)
gp= ∫z∗¿ 0/w p
f (W p , Z )Pr( δ p=1 )
dZet
gs= ∫z∗¿0/ws
f (W s , Z )Pr (δ s=1)
dZ (9)
Où f ( .)
est une fonction de densité. Or, cette fonction de vraisemblance n’est pas applicable dans le cas où δ i est inconnu (le segment
dans lequel l’individu se trouve est inconnu a priori). Il faudrait imposer δ=δ p+δ s qui est par définition égale à 1 pour chaque
individu. La fonction de vraisemblance corrigée est donc :
LF={ [gP(W P)Pr (δP=1 )]+[ gs(W s)Pr (δ s=1) ] } (10)
Avec N individus, la fonction de vraisemblance devient donc :
LF=∏i=1
N
{[ gP(W P ,i )Pr (δ p, i=1)]+[ gs(W s, i )Pr (δ s, i=1)] } (11)
Avec (2) et (3), on écrit,
gP(W P , i )Pr (δp , i=1)=[∫0∞ f (W p , Z )
Pr (δ p=1)dZ ]Pr (δP=1 )=∫
0
∞
f (W P , Z )dz=g (W P)∫0
∞
f ( Z /W P)dz
(12)
On suppose que W P suit une loi spécifique
N (~X P~β , σ PP )
, on pourrait écrire la fonction de densité g( . )
de manière suivante :
g(W P)=∂ Pr (W P≤wP)
∂ W P= ∂
∂W PPr (
W P−~X P
~β P
σ PP1/2 ≤
wP−~X P
~β P
σ PP1/2 )= ∂
∂W Pθ(
wP−~XP
~β P
σ PP1/2 )
177
=σ PP−1/2 φ (
wP−~X P~βP
σ PP1/2 )
(13)
On suppose également que f (Z /W P) suit une loi
N ( μZ /W P, σZ /W P)
tel que
μZ /WP=E( Z )+
Cov (Z , W P )
√[Var ( Z )Var (W P )]√Var ( Z )
√Var (W P )[W P−E (W P )]=DΠ +
σ pw
σ pp[W p−
~X~β p ]
et
σ Z /W p=σ ww(1−
σ pw2
σ pp)=(1−
σ pw2
σ pp)
(σ ww normalisé à 1)
Par conséquent,
∫0
∞
f ( Z /W P)dz=Pr [ Z>0|W p ]=Pr [W−DΠ−σ pw
σ pp(W p−
~X~β p)
√(1−σ pw
2
σ pp)
>−DΠ−
σ pw
σ pp(W p−
~X~β p )
√(1−σ pw
2
σ pp) ]
=1−θ[−DΠ−σ pw
σ pp(W p−
~X~β p)
(1−σ pw
2
σ pp)1/2 ]
(14)
Les composantes du segment secondaire s’obtiennent par un même raisonnement. La fonction de vraisemblance est construite à partir des équations (11) à (13). En mettant cette dernière en forme logarithmique, on obtient ainsi l’expression (1-7).
Test de Chi-deux.
Il s’agit d’un test de chi-deux de la fonction de vraisemblance (LRT) ;
LRT =−2 logMax
ϑ∏i=1
N
LFRi
Maxδ
∏i=1
N
LFUN i
=−2 logMax
ϑLFR
Maxδ
LFUN
LRT ~ X nombre de restriction
2(15)
où ϑ et δ sont les paramètres pertinents, N est le nombre total d’observation, LFR et LFUN sont la fonction de vraisemblance du modèle avec et sans restriction, respectivement, tel que
178
LFUN=∏i=1
N {[1−θ(−Di Π−σ pw
σ pp(Y p , i−
~X i~β p )
(1−σ2
pw
σ2pp )
1/2 )]⋅φ(Y p ,i−~X i
~β p
σpp1/2 )⋅σ
pp−1/2¿ }¿{}
(16) et
LFR=∏i=1
N [σ−1/2φ(Y i−
~X i~β
σ1/2 )] (17)
Le modèle avec contrainte est identique à la méthode de moindre carrée ordinaire où on fixe les valeurs de manière suivante
~βs=~β p=
~β ;υs=υ p=υ ;σ ss=σ pp=σ
Par conséquent, certains paramètres dans le modèle sans restriction sont non identifiables, à savoir les covariances des résidus entre l’équation de sélection et chacune équation de gains. Le test de la deuxième étape consiste à comparer la vraisemblance de LFUN (2) à
celle obtenu par une restriction des paramètres de sélection telle que (Cons tβ p−βs)≡(~β p−
~β s)=Π à l’aide du test de vraisemblance
(1).
179