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FMC ISSN 0769-0819 N°416 – NOVEMBRE 2018 www.lecardiologue.com cardiologue presse COMPLICATIONS CARDIOVASCULAIRES DU DIABÈTE DE TYPE 2 DE LA PHYSIOPATHOLOGIE AUX TRAITEMENTS CONTEMPORAINS Coordination : J.-L. Gayet ÉDITORIAL J.-P. KEVORKIAN CHARGE GLYCÉMIQUE : LA MÉMOIRE DU PASSÉ E. LARGER DÉPISTER ET PRENDRE EN CHARGE L’IC DU DIABÉTIQUE M. GALINIER TRAITEMENTS ANTIDIABÉTIQUES P. DARMON

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FMCISSN 0769-0819N°416 – NOVEMBRE 2018

www.lecardiologue.comcardiologuepresse

COMPLICATIONS CARDIOVASCULAIRES DU DIABÈTE DE TYPE 2

DE LA PHYSIOPATHOLOGIE AUX TRAITEMENTS CONTEMPORAINS

Coordination : J.-L. Gayet

ÉDITORIALJ.-P. KEVORKIAN

CHARGE GLYCÉMIQUE : LA MÉMOIRE DU PASSÉE. LARGER

DÉPISTER ET PRENDRE EN CHARGE L’IC DU DIABÉTIQUEM. GALINIER

TRAITEMENTS ANTIDIABÉTIQUESP. DARMON

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Entresto™ est indiqué chez les patients adultes dans le traitement de l’insuffisance cardiaque chronique symptomatique à fraction d’éjection réduite.(1)

Entresto™ peut être proposé aux patients avec insuffisance cardiaque de classe II ou III selon la classification de la NYHA avec une FEVG ≤ 35 %, qui restent symptomatiques malgré un traitement par IEC ou sartan et nécessitent une modification de traitement.(2)

F152

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1. Résumé des Caractéristiques du Produit Entresto™. 2. Avis de la commission de transparence Entresto™ 2017.

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Le Cardiologue 416 – Novembre 2018 III

SOMMAIRE

cardiologuepresse

ÉDITEUR

CARDIOLOGUE PRESSE 13 rue Niepce – 75014 ParisTél. : 04.96.20.62.70Email : [email protected] web : www.lecardiologue.com

Publicité : François BonduEditions CCC - 24 rue Saint-Victor - 75005 ParisTél. : 01.45.23.96.00 – Fax : 01.45.23.96.08

Directeur artistique : Pascal Wolff

RÉDACTIONPrésident et directeur de la publication : Dr Christian Aviérinos Directeur adjoint : Dr Serge Rabenou Rédacteur en chef : Dr Christian Aviérinos Comité scientifique : Pr Victor Aboyans Pr Jean-Paul Bounhoure Dr Thierry Denolle Dr François Diévart Dr Jean-Louis Gayet Dr Robert HaïatPr Daniel Herpin Pr Christophe LeclercqPr Jacques Machecourt Dr Marie-Christine Malergue Dr François Philippe Dr Bernard Swynghedauw Comité de lecture : Dr Frédéric FossatiDr Gérard JullienDr Jean-Pierre Binon

IMPRESSIONKMC Graphic11 rue Denis Papin - ZI des 50 Arpents77680 Roissy-en-Brie

TARIF 20181 an, 10 numérosFrance : 160 eCEE (hors France) : 180 eTout autre pays : 275 ePrix « Spécial adhérent » au syndicat, à jour de cotisation : 80 e Prix unitaire : 20 e

Membre du SPEPSMensuel réservé au corps médical

Commission paritaire : 0119 G 81182 ISNN : 0769-0819Dépôt légal : à parution

Les articles publiés dans la revue Le Cardiologue le sont sous la seule responsabilité de leurs auteurs. Tous droits de reproduction, d’adaptation et de tra-duction par tous procédés réservés pour tous pays. Le Code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992 interdit expressément la photocopie à usage collectif sans autorisation des ayants droit. En appli-cation de la loi du 11 mars 1993, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement la pré-sente publication sans autorisation de l’éditeur ou droits de reproduction versés à celui-ci.

N°416 – NOVEMBRE 2018

COMPLICATIONS CARDIOVASCULAIRES DU DIABÈTE DE TYPE 2

DE LA PHYSIOPATHOLOGIE AUX TRAITEMENTS CONTEMPORAINSCoordination : J.-L. Gayet (Salles d’Aude)

VII CHARGE GLYCÉMIQUE : LA MÉMOIRE DU PASSÉE. Larger (Paris)

XII DÉPISTER ET PRENDRE EN CHARGE L’IC DU DIABÉTIQUEM. Galinier (Toulouse)

XVI TRAITEMENTS ANTIDIABÉTIQUESP. Darmon (Marseille)

XXII DERNIÈRES NOUVELLESL’écho des dernières études et littérature médicale scientifique

IV EDITORIAL DIABÈTE DE TYPE 2, RISQUE CARDIOVASCULAIRE,

INSUFFISANCE CARDIAQUE, GLYCÉMIE ET NOUVEAUX : ANTIDIABÉTIQUES TOUT CELA EST-IL BIEN CLAIR ?J.-P. Kevorkian (Paris)

Conflits d’intérêt :

J.-P. Kevorkian : aucunM. Galinier : Roche DiagnosticsE. Larger : aucunP. Darmon : Novo Nordisk, Lilly, Sanofi, MSD, Astra Zeneca, Boehringer Ingelheim, Novartis, Abbott

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IV Le Cardiologue 416 – Novembre 2018

Cette vie écourtée, émaillée de multiples hospitalisations et consul-tations, est surtout le fait des syndromes coronaires aigus (SCA)

et des accidents vasculaires cérébraux (AVC). L’insuffisance cardiaque (IC) est sans doute aussi en cause, mais son rôle est moins bien connu car, pendant longtemps, elle a rarement, sinon jamais, été un critère d’évaluation du pronostic. Ces causes classiques ne doivent pas faire oublier le surcroît de complications extracardiaques (infectieuses, néoplasiques) qui altère aussi la vie du diabétique. [2]

Ce préambule inquiétant pourrait faire perdre de vue qu’en réalité, le niveau de risque CV se révèle nettement variable dans la popu-lation des DT2. Et surtout, trente ans plus tard, les connaissances et les progrès thérapeutiques s’intercalent. L’histoire du DT2 s’écrit différemment. Les vérités d’hier ne sont plus les mêmes aujourd’hui. En réalité, il n’y a pas de diabète de type 2, il y a des diabétiques de type 2 et cette notion est fondamentale ! Une génération est passée entre le début de l’étude de Haffner et coll. et la publication des résultats d’études, comme STENO-2 et ADDITION-EUROPE.

Grâce à des interventions multiples (hygiénodiététiques et médica-menteuses) et soutenues, elles permettent de redonner l’espoir de pouvoir améliorer le pronostic CV des DT2. Ce bénéfice est en parti-culier remarquable lors d’interventions précoces. De telles données incitent à dépister le plus tôt possible ces patients, en particulier ceux à risque, voire à prévenir l’installation même du DT2. [1, 3, 4]

Au milieu de tout cela, les résultats des études UKPDS, ACCORD et VADT laissent un goût amer. Pour les DT2, l’abaissement de la glycémie ne semble pas un déterminant majeur du pronostic CV ou tardivement (UKPDS), pire, son abaissement brutal, intense et for-cené peut être un facteur de surmortalité (ACCORD, VADT). Avec les glitazones, classe d’antidiabétiques puissants, la surmortalité coronaire et le surcroît d’IC observés précipitent dans la perplexité (études RECORD et PRO-ACTIVE). [5-7]

Un tournant est franchi au début des années 2010 avec l’arri-vée en force de trois spécialités médicamenteuses antidiabé-tiques aux mécanismes d’action originaux, les inhibiteurs DPP4

DIABÈTE DE TYPE 2, RISQUE CARDIOVASCULAIRE,INSUFFISANCE CARDIAQUE, GLYCÉMIE ET NOUVEAUX ANTIDIABÉTIQUESTOUT CELA EST-IL BIEN CLAIR ?J.-P. Kevorkian (Paris)

EDITO

PRÈS D’UNE QUINZAINE D’ANNÉES DE VIE EN MOINS, C’ÉTAIT LA RÉALITÉ DES DIABÉTIQUES DE TYPE 2 (DT2) À LA FIN DU SIÈCLE DERNIER. UNE ÉPOQUE QUE LES MOINS DE TRENTE ANS N’ONT PAS CONNUE ! En 1998, Haffner et coll. soulignaient la gravité du pronostic cardiovasculaire (CV) de ces patients. [1] Le seul objectif « approximatif » était alors de faire baisser la glycémie avec des traitements qui se résumaient aux sulfamides hypoglycémiants, aux biguanides et à un choix limité d’insulines. La correction des facteurs de risque CV associés était possible, mais encore aurait-il fallu avoir conscience de leur rôle et avoir des objectifs appropriés de traitement ! Il en résultait un taux annuel d’événements CV aux environs de 10 % en situation de prévention primaire, soit dix fois supérieur au risque CV d’un non diabétique ! L’aphorisme porté par la conclusion de Haffner et coll. a longtemps fait date : le risque cardiovasculaire auquel les diabétiques de type 2 sont exposés en prévention primaire est équivalent au risque d’un coronarien avéré non diabétique. Après un accident coronarien, le risque CV s’aggravait considérablement (18 % d’événements par an). [1]

N°416 – NOVEMBRE 2018

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Le Cardiologue 416 – Novembre 2018 V

ou gliptines (i-DPP4, voie orale), les analogues du GLP-1 RA (GLP-1 RA injectables) et les inhibiteurs de SGLT-2 ou glifozines (i-SGLT2, voie orale). Après les désagréments CV observés avec les glita-zones, toutes ces molécules sont désormais soumises à l’obligation de faire la preuve de leur innocuité CV, ce qui reste un minimum ! Ces études sont toutes menées sur le même modèle : études rando-misées, de non-infériorité, contre placebo, en double insu, chez des patients traités par d’autres antidiabétiques. Si elles permettent de recruter toujours un grand nombre de patients (plusieurs milliers), à risque élevé d’événements CV (4 à 5 % annuel) et avec un critère de jugement principal qui porte exclusivement sur les événements CV majeurs (mortalité, SCA, AVC), leur durée reste dans l’ensemble relativement courte. [6]

Globalement, les spécialités de ces 3 classes thérapeutiques peuvent être utilisées en toute sécurité CV. En outre, il est possible de retenir trois autres informations : 1. Deux essais thérapeutiques menés en situation particulière de post-SCA, font apparaître, pour l’un, un surcroît significatif d’IC, critère secondaire (saxaglipitine, étude SAVOR) et, pour l’autre, l’absence de bénéfice CV, mais sans surcroît d’IC (lixisenatide, étude ELIXA). 2. De ces trois classes, les GLP-1 RA et les glifozines offrent le bénéfice de prévention CV le plus élevé (grossièrement 15 à 25 % de diminution du risque CV contre moins de 5 % avec les gliptines). Ce bénéfice peut être lié à des vertus intrinsèques propres. Il est possible que l’abaisse-ment de la charge glycémique qui les accompagne puisse être égale-ment un déterminant non négligeable de l’amélioration du pronostic. 3. Le niveau de glycémie (approché au mieux pour l’instant par l’hémoglobine glyquée [HbA1c]) rapporté au temps, la charge glycé-mique, détermine les dégâts sur la paroi artérielle (approchés par les événements CV et les complications de microangiopathie).

Le risque CV apparaît ainsi proportionnel à l’exposition cumulée à l’hyperglycémie à l’instar du risque de cancer du poumon propor-tionnel à l’exposition chronique et cumulée au tabac estimée par le nombre de paquets-année de cigarettes. Pour les GLP-1 RA et les glifozines, rien ne permet de distinguer actuellement ce qui revient à

la baisse de charge glycémique et à leurs vertus propres dans leurs bénéfices CV. Hormis peut-être pour les glifozines puisqu’au regard de la précocité de diminution significative des événements CV, le seul effet métabolique est peu vraisemblable dans l’amélioration du pronostic CV (études EMPAREG et CANVAS). Les glifozines offrent un bénéfice inattendu qui ne faisait pas partie des critères de jugement : la prévention de l’IC (- 35 % avec l’empa-gliflozine dans l’étude EMPAREG, - 33 % avec la canagliflozine dans l’étude CANVAS). [7-10] Le diabète est fortement associé au déterminisme et à la sévérité du pronostic fonctionnel et vital de l’insuffisance cardiaque (IC). Les diabétiques forment environ 10 % de la population générale et 30 à 40 % de la population des patients avec IC à fonction VG (altérée ou conservée). Leur morbi-mortalité est doublée par comparaison avec des insuffisants cardiaques non diabétiques. Contrairement à tous les autres événements CV, l’IC n’est pas préve-nue par l’équilibre glycémique. La base thérapeutique fondamentale de l’IC à fonction systolique altérée (pour l’IC à fonction systolique conservée, c’est moins clair !), avec ou sans diabète, est faite de classes médicamenteuses qui exercent une action hémodynamique et neuro-endocrine (diurétiques, inhibiteurs du Système Rénine-An-giotensine-Aldostérone, ß-bloquants, inhibiteurs de la néprilysine). Chez les insuffisants cardiaques à fonction systolique VG altérée, dia-bétiques ou non, elles permettent ainsi de prolonger la vie, réduire la gêne fonctionnelle et préserver d’hospitalisations multiples justifiées par des décompensations cardiaques. [11, 12] Le choix des antidiabétiques dans le cadre de l’IC peut se révéler complexe. Les glitazones (interdits de commercialisation en France) et l’insuline sont susceptibles d’effets délétères potentiels en favori-sant la rétention hydrosodée quand les sulfamides hypoglycémiants peuvent précipiter la mortalité. L’utilisation de la metformine pour-rait améliorer le pronostic vital des patients athérothrombotiques, en particulier ceux avec insuffisance cardiaque. Aux réserves évoquées ci-dessus concernant l’utilisation de la saxagliptine, les nouvelles classes médicamenteuses (gliptines, GLP-1 RA, glifozines) ne préci-pitent pas dans l’IC (gliptines, GLP-1 RA), au mieux la préviennent (glifozines). [7, 11, 13-15]

Aucune conclusion formelle ne peut cependant être tirée de la rela-

DIABÈTE DE TYPE 2, RISQUE CARDIOVASCULAIRE,INSUFFISANCE CARDIAQUE, GLYCÉMIE ET NOUVEAUX ANTIDIABÉTIQUESTOUT CELA EST-IL BIEN CLAIR ?J.-P. Kevorkian (Paris)

EDITORIAL

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VI Le Cardiologue 416 – Novembre 2018

EDITORIAL

N°416 – NOVEMBRE 2018

tion entre les antidiabétiques et le pronostic de l’IC. En effet, aucun de ces antidiabétiques n’a été évalué à ce jour dans des études ran-domisées spécifiquement dédiées au traitement du diabétique insuf-fisant cardiaque. Dans ces conditions, en l’absence de données, l’utilisation de toutes les spécialités antidiabétiques, anciennes comme récentes, doit res-ter raisonnée et raisonnable. Incontestablement, les glifozines, qui n’ont toujours pas d’agrément en France, tiennent la corde pour une utilisation préférentielle chez le diabétique insuffisant cardiaque. Des études actuellement en cours évaluent les glifozines dans l’IC

à FEVG altérée ou conservée dans des populations… non diabé-tiques ! Si l’on a bien suivi, personne ne doute cependant qu’une forte proportion de ces patients inclus dans ces études sera quand même, diabétique ! Finalement, la prévention de l’IC chez le diabétique est une exigence et relève sans doute d’actions multiples. Dans cet objectif, l’équilibre glycémique ne semble pourtant pas le facteur le plus déterminant (ou alors aux stades les plus précoces du diabète). Des interventions sur d’autres facteurs étiologiques (HTA, dyslipidémies…) ou méca-nismes sont probablement nécessaires. n

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

[1] Haffner S.M, et al. Mortality from coronary heart disease in subjects with type 2 diabetes and in nondiabetic subjects with and without prior myocardial infarction. N Engl J Med. 1998 ; 339 : 229-34

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[3] Gaede P, et al. Effect of a multifactorial intervention on mortality in type 2 diabetes (STENO-2). N Engl J Med 2008 ; 358 : 580-91

[4] Griffin S.J, et al. Effect of early intensive multifactorial therapy on 5-year cardiovascular outcomes in individuals with type 2 diabetes detected by screening (ADDITION-Europe): a cluster-randomised trial. Lancet 2011 ; 378 : 156-67

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[15] Sharma A, et al. Antihyperglycemic Therapies to Treat Patients With Heart Failure and Diabetes Mellitus. JACC Heart Fail 2018 ; 6 : 813-822

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Le Cardiologue 416 – Novembre 2018 VII

L’étude DCCT (Diabetes Control and Complications Trial) qui allait révolutionner la prise en charge du diabète de type 1 avait pour

objet de montrer qu’il est possible de réduire l’incidence des com-plications de microangiopathie par le contrôle des glycémies. Cette étude a montré une diminution de l’apparition et de l’aggravation de la rétinopathie après un suivi médian de 6,5 ans, chez des sujets dont le traitement intensif avait diminué l’HbA1c de 9 à 7 %, traite-ment intensif, comparé à ceux chez qui le traitement n’avait pas été modifié et qui étaient restés à une HbA1c de 9 %. [1] Cette réduc-tion du risque de complications s’étendait à la néphropathie et à la neuropathie. Dans cette population d’adolescents et d’adultes jeunes, le risque de maladie cardiovasculaire était trop faible pour qu’on en observe une réduction, mais ces résultats ont tout de même révolutionné la prise en charge du diabète de type 1. La nouvelle stratégie thérapeutique, basée sur un traitement multi-injection d’insuline avec autosurveillance des glycémies et ajustement des doses d’insuline à l’alimentation et aux circonstances de la vie (activité physique, stress, etc.) a été immédiatement adoptée par tous les diabétiques.La conséquence majeure est visible à l’échelle des populations dans les pays qui disposent d’un registre des diabétiques : à durée égale de diabète l’incidence de rétinopathie est maintenant moindre que ce qu’elle était dans l’ère pré-DCCT. [2]

CONTRÔLER LES GLYCÉMIES NE SERVIRAIT À RIEN DANS LE DIABÈTE DE TYPE 2 ?

Ces résultats ont généré l’espoir qu’on pourrait les appliquer aux diabétiques de type 2 pour une réduction des risques de micro- et de macroangiopathie. Les résultats mitigés, voire négatifs, des essais UKPDS, [3] ADVANCE, [4] ACCORD, [5] VADT [6] et, dans une moindre mesure ORIGIN [7] et LOOKAHEAD, [8] ont généré beaucoup de per-plexité chez les diabétologues, d’effroi chez certains cardiologues (à cause de l’excès de mortalité dans le groupe de traitement intensif de ACCORD) et des prises de positions négatives chez certains, dont les enseignants français de médecine générale, à la suite de réanalyses à charge de ces essais. [9] Traiter les glycémies ne servirait donc à rien ?

RETOUR VERS LE DIABÈTE DE TYPE 1 ET LE DCCTMais revenons au DCCT. Après le choc produit par les résultats de cette étude, un deuxième choc attendait les diabétologues quelques années plus tard. A la fin du DCCT tous les sujets de l’étude ont accepté de participer à une longue étude observationnelle (DCCT/EDIC = Diabetes Control and Complications Trial / Epidemiology of

CHARGE GLYCÉMIQUE : LA MÉMOIRE DU PASSÉCONSÉQUENCES POUR LA MALADIE VASCULAIRE DES SUJETS DIABÉTIQUESE. Larger (Paris)

PARTIE

1

LES DIABÉTIQUES SONT PORTEURS DE LEUR PASSÉ, ET S’IL EST MAINTENANT ÉTABLI QUE L’AMÉLIORATION DU CONTRÔLE GLYCÉMIQUE EST BÉNÉFIQUE, LES DONNÉES RÉCENTES MONTRENT QUE LE BÉNÉFICE EST UNE FONCTION NON SEULEMENT DE L’AMPLITUDE DE L’AMÉLIORATION GLYCÉMIQUE, MAIS AUSSI DU TEMPS. En ce sens, le temps des grands essais de prévention cardiovasculaire chez les diabétiques par l’optimisation de la prise en charge des glycémies n’était probablement pas celui qui est nécessaire pour observer un bénéfice.

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VIII Le Cardiologue 416 – Novembre 2018

Diabetes Intervention and Complications), en retournant chaque année dans les centres de l’étude pour des bilans standardisés. Tous les sujets du groupe de traitement intensif ont choisi de garder cette modalité thérapeutique, et tous les sujets du groupe conventionnel ont choisi d’adopter le traitement intensif. Mais la réalité des choses n’a pas été tout à fait celle qu’on attendait : les patients du groupe conventionnel n’ont pas baissé leur HbA1c de 9 à 7 %, comme l’avait fait les sujets du groupe intensif pendant le DCCT, mais de 9 à 8 %, et les sujets du groupe intensif n’ont pas réussi à maintenir leur HbA1c à 7 %, ils sont remontés en moyenne à 8 %, eux aussi. Le choc est arrivé en 2000, 7 ans après la fin du DCCT [10] : bien que tous les sujets du DCCT aient maintenu leur HbA1c à un niveau simi-laire depuis la fin de l’étude, le risque de rétinopathie restait inférieur chez les sujets du groupe intensif de l’étude DCCT initiale. La suite allait confirmer, 5 ans plus tard, ces résultats [11] : alors que les HbA1c restaient identiques, aux alentours de 8 %, dans les 2 groupes ini-tiaux, les sujets du groupe intensif de l’étude initiale DCCT avaient un moindre risque de maladie cardiovasculaire. Quelques années plus tard, la démonstration a aussi été faite pour la mortalité [12]. Vingt ans après la fin du DCCT l’évolution des sujets du groupe in-tensif reste différente de celle, plus péjorative des sujets du groupe conventionnel du DCCT [13] (figure 1). Enfin le DCCT montre que

l’effet de l’hyperglycémie ne s’exerce pas seulement via des effets directs, mais aussi via des effets indirects, sur la pression artérielle et sur les autres facteurs de risques cardiovasculaires. [14]

LA MÉMOIRE DE L’HYPERGLYCÉMIEOn a pensé initialement que les sujets du groupe intensif du DCCT gardaient, à long terme, un bénéfice des années de bon contrôle pendant l’étude initiale [10,11]. Mais c’était oublier que les sujets du groupe conventionnel, qui avaient tout de même baissé leur HbA1c de 9 à 8 %, ne semblaient pas pour autant tirer bénéfice de cette amélioration puisque le rythme d’aggravation de leur rétinopathie était inchangé. [10] Il ne s’agissait pas là d’aggravation transitoire telle qu’on peut l’observer lors de l’amélioration du contrôle des glycémies, [15] mais d’une absence de bénéfice apparent de l’amé-lioration des glycémies. Pour comprendre les choses, il faut une fois encore revenir sur l’étude initiale du DCCT. Une analyse indépen-dante de l’étude [16] a montré que ce qui s’est alors passé dans le groupe de traitement intensif dépendait, en réalité, de ce qui s’était passé avant même l’étude (figure 2) : les sujets qui avaient une longue durée de diabète et un mauvais contrôle à l’entrée ont peu bénéficié de l’intensification thérapeutique.

100

Conventionnel-DCCT 9,1 % Conventionnel-EDIC 8,0 %

DCCT intervention EDIC observation

Intensif-DCCT 9,1 % Intensif-EDIC 8,0 %

Années d’étude

HbA

1c (%

)

40 1 2 3 95 6 7 8 410 1 2 3 95 6 7 8 1410 11 12 13 1815 16 17

1993 DCCTPrévention primaire et secondaire de la microangiopathie

2000 EDICMoindre risque de rétinopathie chez les « intensifs »

2005 EDICMoindre risque de MCV chez les « intensifs »

2005 EDICMoindre mortalité chez les « intensifs »

Figure 1. Principales dates de l’étude DCCT/EDIC.

La figure montre l’évolution de l’HbA1c dans le temps, pendant la phase expérimentale où ont été constitués les groupes « convention-nel » et « intensif », volontairement séparés par 2 % d’HbA1c, et pendant la phase observationnelle EDIC qui a suivi au cours de laquelle les courbes d’HbA1c se sont spontanément rejointes. Nous avons placé sur la figure les principales dates de cette étude.

COMPLICATIONS CARDIOVASCULAIRES DU DIABÈTE DE TYPE 2

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Le Cardiologue 416 – Novembre 2018 IX

On peut tirer plusieurs conclusions de ces observations : 1/ pour les sujets qui avaient un long passé d’hyperglycémie, la dimi-nution de l’HbA1c de 9 à 7 % pendant 6,5 ans n’a pas permis de rattraper les années antérieures ; 2/ pour les sujets ayant un passé d’hyperglycémie, la diminution de l’HbA1c de 9 à 8 % ne permet pas de rattraper les années antérieures ; 3/ pourtant à l’échelle d’une population on voit les bénéfices du bon contrôle. La comparaison avec des pays moins avancés nous rappelle que nous sommes dans une autre ère du traitement du diabète. [17,18]

UN PEU DE BIOCHIMIE DES COMPLICATIONS DU DIABÈTECes observations sont parfaitement compatibles avec ce que l’on connait de la physiopathologie des complications du diabète. [19] Particulièrement importantes dans cette physiopathologie, sont les séquelles que peuvent laisser des périodes d’hyperglycémie : la glyca-tion des protéines à longue demi-vie et des phénomènes épigénétiques.La première démonstration de phénomènes épigénétiques avait été apportée par le groupe de M. Cooper. [20,21] Des cellules endothé-liales exposées pendant quelques heures à une hyperglycémie puis pendant plusieurs jours (jusqu’à 6 jours) à des concentrations basses de glucose gardent des modifications dans l’expression de gènes sous le contrôle de NF-kB. [20] Ces résultats ont été amplement confirmés et il a été montré que ces modifications du programme d’expression génique sont transmissibles à des cellules filles : des cellules nées par division de cellules exposées à l’hyperglycémie ont des modifications épigénétiques alors qu’elles n’ont jamais été exposées elles-mêmes à l’hyperglycémie. [22]

Pour ce qui est de la glycation des protéines, on sait que c’est un phé-nomène naturel, associé au vieillissement, qui est une cause majeure de la perte des propriétés élastiques de la paroi des gros vaisseaux et que le diabète accélère ce processus qui ne semble pouvoir évoluer que dans le sens de l’accumulation de protéines anormales en l’absence de mécanismes identifiés de réparation. [23] Dans ces deux processus, on comprend comment l’hyperglycémie peut s’associer à des anomalies irré-versibles (ou peu et lentement réversibles comme on le verra plus loin).

ALORS, RIEN À FAIRE CONTRE LES EFFETS DU TEMPS ?Les données épidémiologiques et biochimiques laissent penser que certains dégâts de l’hyperglycémie sont irréversibles. Peut-être pas : tant qu’il ne reste pas que fibrose et tissu cicatriciel, l’espoir existe ! Le DCCT – encore lui – montre qu’il faut persévérer. Sur le très long terme, ce travail suggère qu’on peut aussi observer des bénéfices de l’amélioration du contrôle avec une baisse de l’HbA1c de 9 à 8 %, même si on aurait aimé faire mieux : après 10 ans, le risque de rétinopathie proliférante décroît [24] (figure 3). Malgré qu’il y

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Figure 2. Le DCCT en fonction de ce qui l’a précédé. La figure, redes-sinée d’après le travail de Zhang [16] montre le risque de rétinopathie au cours du DCCT chez les sujets du groupe intensif, en fonction de l’HbA1c au début de l’étude et de l’ancienneté du diabète à l’entrée dans l’étude.

Figure 3. Risque d'apparition d'une rétinopathie proliférative au cours de l’EDIC. (redessiné d’après [24])

La figure montre en fonction du temps le risque d’apparition de la rétinopathie proliférante dans les groupes conventionnel et intensif du DCCT, présentés dans la figure 1. Une cassure nette peut être observée après 10 ans d’EDIC chez les patients du groupe conven-tionnel, suggérant que le bénéfice d’une baisse de l’HbA1c de 9 à 8 % prend du temps pour apparaître.

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X Le Cardiologue 416 – Novembre 2018

COMPLICATIONS CARDIOVASCULAIRES DU DIABÈTE DE TYPE 2

ait beaucoup de dégâts, il reste des choses à faire. Des observations similaires ont été faites sur de petits effectifs, après transplantation de pancréas, avec en particulier une spectaculaire démonstration de régression des lésions glomérulaires et tubulaires rénales. [25,26]

QUELLES CONSÉQUENCES POUR LE CŒUR DU DIABÉTIQUE DE TYPE 2 ? LE RETOUR DES DIABÉTOLOGUES !

On l’a vu, les essais de prévention des complications macrovascu-laires du diabète n’ont pas apporté les réponses attendues, voire même ont suggéré que le contrôle des glycémies est néfaste, ce qui conduit certains à une attitude nihiliste. On fera au passage perfide-ment remarquer qu’une des causes de l’échec de l’étude ACCORD a été que le taux d’événement observé a été inférieur à celui prévu sur la base d’observations historiques [5] et ceci est en accord avec les études montrant une réduction dans le temps du risque vasculaire chez les diabétiques. Mais une réanalyse récente de ces essais par Ronan Roussel et Gabriel Steg [27] suggère une autre conclusion qui n’étonnera pas si on accepte tout ce qui précède : pour obtenir un effet de réduction du risque cardiovasculaire, il faut baisser l’HbA1c et prendre du temps.

Dans les essais dits « négatifs » de prévention des complications cardiovasculaires des diabétiques de type 2, la réduction du risque a été proportionnelle au produit de la baisse de l’HbA1c par le temps.Est-ce une surprise ? Non, car les études épidémiologiques ont depuis longtemps montré une association, constamment observée, entre HbA1c et risque vasculaire. Ce qui a manqué au diabétologue c’est le temps pour le montrer… mais pas seulement. Il nous a aussi manqué les bons outils pour baisser la glycémie. La metformine est en ce sens un bon médicament, les sulfonylurées probablement pas, les inhibiteurs de DPP4 (les gliptines) probable-ment pas non plus. Chirurgie bariatrique, agonistes des récepteurs du GLP1 et inhibiteurs des transporteurs de glucose SGLT2 ont pro-bablement quelque chose de plus que ces médicaments d’ancienne génération. Nous commençons à en être convaincus et les nou-velles recommandations pour le traitement du diabète en tiennent compte. [28]

Le retour du diabétologue : le temps du diabétologue n’est pas ce-lui du cardiologue, nous avons appris une échelle de temps qui se compte en décennies, et quand on s’intéresse au très long terme, on voit clairement que l’HbA1c fait la différence, mais aussi qu’une HbA1c à 7 % est associée à un risque [29] et, plus encore, que même une HbA1c à 6 % ne suffit pas. [30] Nous avons donc besoin de meilleurs outils pour garantir une vie sans complication aux diabétiques. n

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Le Cardiologue 416 – Novembre 2018 XI

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CHARGE GLYCÉMIQUE : LA MÉMOIRE DU PASSÉ

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XII Le Cardiologue 416 – Novembre 2018

COMPLICATIONS CARDIOVASCULAIRES DU DIABÈTE DE TYPE 2

Les liens épidémiologiques entre diabète et IC sont pourtant connus de longue date, puisque dès 1974, l’étude de Framingham a révélé

que, chez les diabétiques, l’incidence de l’IC (après ajustement sur âge, HTA, obésité, dyslipidémies et coronaropathie) est multipliée par 2,4 chez les hommes et par 5 chez les femmes. [3] Ces données ont été confirmées par la cohorte Kaiser Permanent Northwest [4] et l’étude de Reykjavik [5] dans lesquelles l’incidence de l’IC est multipliée res-pectivement par 2,5 et 2,8 chez les diabétiques. Ce risque d’IC est en grande partie relié à l’hyperglycémie, comme le souligne l’étude UKPDS dans laquelle une augmentation de 1 % de HbA1c est associée à une majoration de 16 % du risque d’IC. Ainsi, l’IC est fréquente chez les patients diabétiques âgés, sa prévalence étant de 22,3 % chez les 151 738 diabétiques de plus de 65 ans de la cohorte Medicare. [6] Parallèlement, un diabète est fréquemment retrouvé au cours de l’IC chronique qu’elle soit à FE réduite (ICFEr) ou préservée (ICFEp), la prévalence du diabète au cours des essais thérapeutiques et des études de cohorte variant de 24 à 48 % dans l’ICFEr et de 30 à 43 % dans l’ICFEp. Ainsi, dans l’étude PARADIGM, [7] 35 % des patients ont un diabète connu, 13 % ont un diabète méconnu

(HbA1c > 6,5 %) et 26 % sont pré-diabétiques (HbA1c entre 6 et 6,4 %). L’existence d’un diabète assombrit le pronostic au cours des deux types d’IC, [8] mais sa valeur pronostique est plus marquée dans l’ICFEp comme l’a montré le programme CHARM. [9] L’âge influence la valeur pronostique du diabète au cours de l’IC. Ainsi, si à 5 ans, l’existence d’un diabète multiplie par 2 le risque de décès des insuffisants cardiaques de moins de 75 ans, cette relation n’est plus retrouvée au-delà. [2] Quant à l’intolérance au glucose, sa prévalence est de 12 % dans l’ICFEr comme dans l’ICFEp et sa valeur pronostique similaire à celle du diabète. [10] Au cours de l’IC aiguë, la prévalence d’un diabète connu est de 39,8 % et celle de l’hyperglycémie à jeun (> 1,26 g/L) ou de la découverte d’une HbA1c ≥ à 6,5 % est de 9,6 %. [11] Par rapport au patient non diabétique, le diabète augmente de ma-nière indépendante de 77 % la mortalité hospitalière, de 16 % la mortalité à un an et de 32 % les ré-hospitalisations à 1 an. [11] De plus, une glycémie élevée est un prédicteur indépendant de mortalité à un mois après une hospitalisation pour IC aiguë autant dans l’ICFEr que dans l’ICFEp. [12]

L’origine de l’IC au cours du diabète est polyfactorielle même si la

DÉPISTER ET PRENDRE EN CHARGE L’IC DU DIABÉTIQUEM. Galinier - Toulouse

PARTIE

2

L’IC REPRÉSENTE LA PRINCIPALE CAUSE DE DÉCÈS ET C’EST LA MANIFESTATION INITIALE D’UNE MALADIE CARDIAQUE LA PLUS FRÉQUENTE DES PATIENTS DIABÉTIQUES DE TYPE 2. [1] De plus, quelle que soit la fraction d’éjection (FE), la prévalence du diabète varie de 24 à 48 % chez les patients insuffisants cardiaques et l’existence d’un diabète aggrave leur pronostic. [2] Le dépistage, utilisant des biomarqueurs, des dysfonctions VG asymptomatiques associées au diabète et leur traitement constituent ainsi le nouveau défi de la prise en charge des diabétiques. En effet, la mise en route d’un traitement spécifique orienté : n soit vers le myocarde, avec blocage du système rénine-angiotensine-aldostérone, n soit vers le contrôle glycémique, avec des traitements comme l’empagliflozine ayant fait la preuve d’une

efficacité dans la prévention du risque d’IC, pourrait alors prévenir l’apparition de cette dernière. Le diabète, du fait de sa prévalence croissante, constituera en effet dans les années à venir une des principales causes d’IC tant à FE réduite que préservée.

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Le Cardiologue 416 – Novembre 2018 XIII

cardiomyopathie diabétique en fait l’originalité. La physiopatholo-gie de cette dernière est complexe et encore mal élucidée. Elle est dominée par les phénomènes de glucotoxicité et de lipotoxicité aux-quelles s’ajoute une dysfonction mitochondriale favorisés par une perte de la flexibilité métabolique du myocarde, le cœur utilisant, de façon quasi exclusive, les acides gras pour produire de l’énergie. L’HTA et la maladie coronarienne, souvent associées à une insuf-fisance rénale, sont le plus souvent invoqués. De plus, l’IC facteur d’insulino-résistance favorise l’apparition d’un diabète, cette relation bi-directionnelle entre les deux pathologies étant à l’origine d’un cercle vicieux.

DÉPISTAGE DE LA DYSFONCTION VENTRICULAIRE GAUCHE CHEZ LES DIABÉTIQUES

La détection des patients diabétiques de type 2 à haut risque cardio-vasculaire par le NT-proBNP a fait l’objet de trois études. Dans un travail danois, ayant inclus 315 patients DT2 avec normo-albuminurie (n = 183), micro-albuminurie (n = 80) ou macro-albumi-nurie (n = 47) suivis en moyenne 15,5 ans, le NT-proBNP, au seuil de 62 pg/mL, est apparu un puissant marqueur de risque à long terme, indépendant du taux d’excrétion urinaire d’albumine. [13]

Dans une étude à Vienne, ayant inclus 631 patients diabétiques non sélectionnés, suivis en moyenne 1 an, le NT-proBNP, au seuil de 125 pg/mL, identifie les patients à haut risque d’hospitalisation pour causes cardiovasculaires non planifiées et de décès avec une excel-

lente valeur prédictive négative de 98 % mais une valeur prédictive positive d’uniquement 13 % [14] (figure 1). Au cours de l’étude SICA-Diabetes, ayant inclus 1224 patients DT2 non insuffisants cardiaques ou rénaux, suivis 436 jours, les pour-centages d’hospitalisations cardiovasculaires et de décès, respecti-vement de 8 et 0,6 % pour un NT-proBNP < 125 pg/mL, passent à 13 et 1,2 % pour un NT-proBNP entre 125 et 250 pg/mL et à 19 et 3,9 % pour un NT-proBNP entre 250 et 300 pg/mL. [15] L’intérêt d’un tel dépistage, par les peptides natriurétiques, des patients diabétiques à haut risque d’événements cardiovasculaires qui pourraient tirer bénéfice d’un traitement anti-neurohormo-nal, est validé par l’essai PONTIAC. [16] A partir d’une population de 2 189 diabétiques, les auteurs de cette étude ont sélectionné 300 patients avec NT-proBNP > 125 pg/mL indemnes de maladies cardiaques et les ont randomisés en 2 groupes de 150 patients, l’un traité par IEC ou ARA2 à posologie titrée associé à un bêtabloquant et l’autre (contrôle) ne recevant pas ces traitements. Après un suivi de 2 ans, on observe une diminution significative de 69 % des hos-pitalisations et des décès de causes cardiaques dans le groupe traité par rapport au contrôle (figure 2).Des modifications précoces, tant morphologiques que fonctionnelles, peuvent également être mises en évidence chez les sujets diabé-tiques asymptomatiques par l’imagerie, grâce à l’échocardiographie ou l’IRM. Deux phénotypes sont possibles, soit hypertrophie ventri-culaire gauche concentrique avec dysfonction diastolique, soit une cardiomyopathie dilatée avec dysfonction systolique. [17] Un remo-delage ou une hypertrophie concentrique ventriculaire gauche sont le plus souvent observées au cours du diabète, l’augmentation de la

NT - proBNP > 125 pg/mLn = 358

p < 0,0001 NT - proBNP < 125 pg/mLn = 273

Hospitalisation pour cause cardiovasculairenon planifiée et décès

MonthsKaplan-Meier time analysis

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2.00 4.00 6.00 8.00 12.0010.00

p = 0,035

RR = 0,31 ; IC95 = 0,127-0,975

n = 150 controls

n = 150 treatment

Hospitalisation et décès de cause cardiaque

Months

Prim

ary

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00,6

0,8

1,0

5 10 15 24

- 69 %

20

Figure 1. Détection des diabétiques à haut risque cardiovascu-laire par le NT-proBNP : étude de Vienne. [14]

Figure 2. Essai PONTIAC : prévention des événements cardiaques chez les diabétiques de type 2 présentant un NT-proBNP > 125 pg/mL par les IEC/ARA2 et les bêtabloquants. [15]

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XIV Le Cardiologue 416 – Novembre 2018

COMPLICATIONS CARDIOVASCULAIRES DU DIABÈTE DE TYPE 2

masse myocardique étant indépendante de la pression artérielle, de l’index de masse corporelle, de l’âge et de la maladie coronarienne. Grâce à des techniques de caractérisation tissulaire, une augmenta-tion du contenu en triglycérides du myocarde et une fibrose myocar-dique ont pu être mises en évidence. Une dysfonction diastolique est retrouvée chez 50 % des diabé-tiques. [18] Bien que peu spécifique, puisqu’influencée par de nombreux co-facteurs (âge, obésité, hypertension artérielle), [19] elle a une valeur pronostique : un rapport E/e’ > 15 multiplie par 2,2 le risque de déve-lopper une IC. [20] Dans une large population de patients diabétiques, l’existence d’une dysfonction diastolique est reliée à la mortalité après ajustement sur l’âge, le sexe, l’hypertension artérielle, la FE du VG, la maladie coronarienne et l’ancienneté du diabète. [21] Une dysfonction systolique est mise en évidence chez environ 25 % des diabétiques par les techniques d’imagerie de quantification de la déformation myocardique avec une diminution du « strain » lon-gitudinal global. [18] Sa signification pronostique reste à déterminer. Cette prévalence élevée des dysfonctions myocardiques explique que les patients diabétiques puissent développer une IC à l’occasion d’une rétention hydrosodée modérée favorisée par la néphropathie ou d’une altération surajoutée de la dysfonction cardiaque induite par un événement coronarien aigu.Un dépistage en deux étapes du remodelage et/ou de la dysfonction VG des patients diabétiques pourrait ainsi être proposé : la première biologique par un dosage des peptides natriurétiques, un taux de NT-proBNP ≤ 125 pg/mL arrêtant les investigations. La deuxième étape, échocardiographique, réservée aux diabétiques dont le taux de NT-proBNP est > 125 pg/mL, aboutissant à la mise en route d’un traitement par un bloqueur du système rénine-angiotensine en cas d’anomalies morphologiques ou fonctionnelles. De plus, cette détection des diabétiques à haut risque d’IC pourrait per-mettre une individualisation du traitement hypoglycémiant : en évitant les classes thérapeutiques susceptibles de favoriser l’apparition d’une IC, comme les glitazones et parmi les inhibiteurs de DPP4 la saxaglip-tine ; en favorisant l’utilisation des classes ayant un effet favorable, comme les inhibiteurs de SGLT-2, ou neutres, comme les biguanides. [22] La place des marqueurs de remodelage, comme le sST2, ou de fibrose comme la galectine-3, devra être précisée par de futurs travaux.La validation de cette stratégie de dépistage des sujets à risque d’IC a fait l’objet d’un grand essai d’intervention, l’étude irlandaise STOP-HF. [23] Elle a inclus 1 374 patients âgés de plus de 40 ans pré-sentant des facteurs de risque d’IC, (HTA, diabète, obésité, dyslipidémie, maladie vasculaire, arythmie), non-insuffisants cardiaques, sans dysfonc-tion ventriculaire gauche connue. Ces patients avaient un dosage annuel de BNP, dont les résultats n’étaient pas communiqués au médecin dans le groupe contrôle mais déclenchaient une prise en charge spécifique si > 50 pg/mL dans le groupe intervention. Elle comportait un avis cardio-logique avec échocardiographie et d’autres investigations si nécessaire, puis un suivi par un cardiologue et une infirmière spécialisée.

Après un suivi pouvant aller jusqu’à 8 ans, le critère primaire de l’étude, associant un critère clinique (survenue d’une IC) et un critère paraclinique (dysfonction VG systolique : FE < 50 %) ou diastolique (FE ≥ 50 % et rapport E/e’ > 15) en fin d’étude. L’incidence de ce critère primaire a été moindre de 41 % dans le groupe intervention sur la population totale de l’étude et de 54 % dans le sous-groupe de 498 patients présentant un BNP > 50 pg/mL (figure 3). Parmi les critères secondaires, on observe une diminution des événements car-diovasculaires dans le groupe intervention de 31 % dans la popula-tion générale et de 35 % dans le sous-groupe avec BNP > 50 pg/mL. Ce bénéfice semble essentiellement lié à une plus grande utilisation des médicaments bloquant le système rénine-angiotensine-aldosté-rone (IEC, ARA2 et antagonistes des récepteurs minéralo-corticoïdes) dans le groupe intervention.

TRAITEMENT DE L’IC CHEZ LES DIABÉTIQUESLes traitements médicamenteux de l’ICFEr ont globalement la même efficacité chez les patients diabétiques et non diabétiques, notam-ment les IEC, bien que les bêtabloquants et les antagonistes des ré-cepteurs des minéralocorticïdes soient un peu moins efficaces. Quant au LCZ696, inhibiteur de l’angiotensine 2 et de la néprilysine, qui di-minue par rapport aux IEC de 20 % la mortalité cardiovasculaire et le risque d’hospitalisation pour IC, il est tout autant efficace chez les dia-bétiques que les non-diabétiques. De plus, son utilisation est associée à un meilleur contrôle glycémique, l’HbA1c diminuant en moyenne de 0,2 %. [24] Enfin, les effets bénéfiques de l’ivabradine chez les patients

DDCG (FE > 50 %, E/eʼ > 15)DSVG (FE > 50 %)IC

Dysfonction ventricuaire gaucheet insuffisance cardiaque

Population totale

Patients avec BNP > 50 pg/ml

Pou

rcen

tage 20

18

16

14

12

10

8

6

4

2

0677

Contrôle

n = 59

n = 393,8

2,8

2,1

2,02,31,0

n = 44

6,4

7,2

5,1

n = 25

3,0

4,6

1,9

697Intervention

235Contrôle

263Intervention

OR = 0,59 [0,38, 0,97]p = 0,01

OR = 0,46 [0,27, 0,77]p = 0,003

Figure 3. Prévention de l’IC chez les sujets à risque : étude STOP-HF. [22]

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Le Cardiologue 416 – Novembre 2018 XV

DÉPISTER ET PRENDRE EN CHARGE L’IC DU DIABÉTIQUE

en rythme sinusal dont la fréquence cardiaque reste supérieure à 70/min sont aussi bien retrouvés chez les patients diabétiques que non diabétiques. Le traitement électrique de l’ICFEr, défibrillateur au-tomatique implantable et stimulation multisite, a également le même bénéfice chez les patients diabétiques et non diabétiques. Par contre la réadaptation est moins efficace chez les diabétiques dont la capacité d’effort est plus basse. De plus, la survie après transplanta-tion cardiaque est moins bonne et les événements plus fréquents sous assistance mono-ventriculaire gauche chez les patients diabétiques.

Enfin, les effets spécifiques des différentes classes d’hypoglycé-miants sur le risque d’IC, positifs ou négatifs, laissent suggérer le développement de stratégies de prévention et de traitement qui justifient l’identification précoce des patients diabétiques présentant une altération des structures et fonctions ventriculaires gauches, venant compléter le dépistage de l’ischémie silencieuse. Cardiologues et diabétologues doivent donc poursuivre leur colla-boration en l’élargissant à la pathologie myocardique pour mieux prévenir le risque d’IC. n

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XVI Le Cardiologue 416 – Novembre 2018

COMPLICATIONS CARDIOVASCULAIRES DU DIABÈTE DE TYPE 2

TRAITEMENTS ANTIDIABÉTIQUES DES ÉTUDES DE SÉCURITÉ CARDIOVASCULAIRE AUX RECOMMANDATIONSP. Darmon - Marseille

PARTIE

3

DEPUIS 2008 ET LA CONTROVERSE SUR LA ROSIGLITAZONE, LA FOOD & DRUG ADMINISTRATION (FDA) EXIGE QUE TOUT NOUVEAU TRAITEMENT ANTI-HYPERGLYCÉMIANT MIS SUR LE MARCHÉ DÉMONTRE SA SÉCURITÉ CARDIOVASCULAIRE (CV) PAR LE BIAIS D’UNE ÉTUDE DÉDIÉE. L’Agence Européenne du Médicament (EMA) exige aussi de telles études depuis 2010. Des essais prospectifs, randomisés, contrôlés de grande envergure ont donc été initiés afin de démontrer, chez des patients diabétiques de type 2 (DT2) à haut risque, la non-infériorité – voire la supériorité – de ces nouvelles molécules, vs placebo, sur le risque de complications CV.

Dans ces études, les investigateurs étaient encouragés à ajouter, en cours d’étude, d’autres anti-hyperglycémiants pour optimiser

l’équilibre glycémique des patients. L’idéal était d’obtenir une HbA1c identique entre les deux groupes afin de ne tester réellement que l’impact CV de la molécule à l’étude, sans biais potentiel lié à une ex-position différente à l’hyperglycémie. Plusieurs de ces grands essais ont été publiés ces dernières années et ont permis de mieux cerner la sécurité CV de certaines molécules de la classe des inhibiteurs de la dipeptidyl-peptidase-4 (iDPP4), des agonistes des récepteurs du glucagon-like peptide-1 (GLP-1 RA) et des inhibiteurs des co-trans-porteurs sodium-glucose de type 2 (iSGLT2). Ces antidiabétiques ont en commun de ne pas induire d’hypoglycémie et, pour les GLP-1 RA et les iSGLT2 (ces derniers non commercialisés en France à ce jour) d’entraîner le plus souvent une perte de poids et une baisse de la pression artérielle. Les résultats de ces essais ont profondément modifié les recommandations des sociétés savantes concernant la prise en charge des patients avec DT2 à haut risque CV, plus particu-lièrement en prévention secondaire.

INHIBITEURS DE LA DPP4Les études menées avec les iDPP4 ont produit des résultats homo-gènes démontrant, vs placebo, la non-infériorité de ces molécules

sur le risque d’événements CV (critère primaire composite incluant décès CV, IDM non fatals et AVC non fatals) (tableau 1). C’est le cas pour :

n l’alogliptine (non commercialisée en France) dans l’étude EXAMINE, portant sur plus de 5 000 patients avec DT2 inclus après un syndrome coronarien aigu ; [1]

n la saxagliptine dans l’essai SAVOR-TIMI 53 chez plus de 16 000 patients avec DT2 à haut risque et/ou en prévention secondaire ; [2]

n la sitagliptine dans l’étude TECOS portant sur plus de 14 000 patients avec DT2 en prévention secondaire ; [3] et, récemment, la linagliptine (non commercialisée en France) dans l’étude CARMELINA incluant près de 7 000 patients avec DT2 à haut risque et/ou en prévention secondaire. [4] Seule ombre au tableau, une majoration de 27 % (p = 0,007) du risque d’hospitalisations pour IC (IC) sous saxagliptine vs placebo dans SAVOR-TIMI 53. Cet effet était particulièrement marqué chez les sujets avec antécédent d’IC, un taux de NT-proBNP initial élevé ou une insuffisance rénale. [5] Une telle augmentation, mais non signi-ficative, du risque d’hospitalisation pour IC avait aussi été retrouvée dans EXAMINE, alors qu’aucun signal n’était détecté dans TECOS et CARMELINA. La différence de sélectivité des molécules vis-à-vis de la DPP4 ainsi que l’existence ou non de métabolites actifs pourraient expliquer l’hétérogénéité de ces résultats. Notons que, si les études

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Le Cardiologue 416 – Novembre 2018 XVII

observationnelles ne montrent pas de sur-risque d’hospitalisation pour IC sous iDPP4, [6] le doute reste permis à la lecture des méta-analyses d’essais randomisés. [7] La FDA recommande d’utiliser avec prudence la saxagliptine et l’alogliptine chez les patients à risque d’IC et de les arrêter si des signes d’IC apparaissent.

AGONISTES DES RÉCEPTEURS DU GLP-1A ce jour, cinq essais de sécurité CV d’un GLP-1 RA sont publiés et leurs conclusions sont plus hétérogènes (tableau 2). L’étude ELIXA, menée chez plus de 6 000 patients avec DT2 (HbA1c moyenne à l’inclusion 7,7 %) après un syndrome coronarien aigu, a démon-tré la neutralité CV du lixisénatide (GLP-1 RA d’action courte non commercialisé en France). [8] L’étude EXSCEL a démontré la neu-tralité CV de l’exénatide retard (1 injection par semaine) chez près de 15 000 patients avec DT2 à haut risque et/ou en prévention secondaire (73 % des sujets) avec HbA1c moyenne à l’inclusion de 8,0 %. [9] En revanche, dans l’étude LEADER, menée chez plus de 9 000 patients avec DT2 (HbA1c moyenne 8,7 %) âgés de plus de 50 ans en prévention secondaire (80 % des sujets) ou âgés de plus de 60 ans en prévention primaire mais avec au moins un facteur

de risque (parmi : albuminurie, HTA avec hypertrophie ventriculaire gauche, dysfonction ventriculaire gauche ou artérite des membres inférieurs), le liraglutide 1,8 mg/j s’est révélé supérieur au placebo, réduisant de 13 % le critère primaire composite (MACE), de 15 % la mortalité totale et de 22 % la mortalité CV. [10] Dans une population similaire, SUSTAIN-6 a montré chez 3 300 patients avec DT2 (HbA1c moyenne 8,7 %) que le sémaglutide (GLP-1 RA d’action prolongée non commercialisé en France,) entrainait une baisse significative de 26 % du critère primaire composite (MACE) et de 39 % des AVC vs placebo. [11] Récemment, l’essai HARMONY-OUTCOMES a montré, chez près de 9 500 patients avec DT2 (HbA1c moyenne 8,7 %), en prévention secondaire, une baisse significative de 22 % du critère primaire composite (MACE) et de 25 % du risque d’IDM sous albi-glutide (GLP-1 RA d’action prolongée non commercialisé en France) vs placebo. [12] Dans l’attente du détail des résultats de l’étude FREEDOM-CVO avec l’exénatide en implant sous-cutané (effet neutre sur le critère primaire déjà dévoilé) et ceux de l’étude REWIND avec le dulaglu-tide (GLP-1 RA en une injection hebdomadaire) dans une population constituée majoritairement de patients en prévention primaire, se pose la question d’un effet classe des GLP-1 RA sur les événements

Tableau 1. Etudes de sécurité cardiovasculaire menées avec les iDPP4

Etude Population étudiée HbA1c initiale

Suivimédian

Principaux résultats

EXAMINEalogliptine*

n = 5 380post syndrome coronaire aigu 100 %

8,0 % 1,5 an Neutralité cardiovasculaire

SAVOR-TIMIsaxagliptine

n = 16 492 Prévention secondaire 100 %

8,0 % 2,1 ans Neutralité cardiovasculaireHospitalisations pour IC +27 %

TECOSsitagliptine

n = 14 671Prévention secondaire 100 %

7,2 % 3,0 ans Neutralité cardiovasculaire

CARMELINAlinagliptine*

n = 6 979Prévention secondaire 57 %Maladie rénale chronique 74 %

7,9 % 2,2 ans Neutralité cardiovasculaire

Tableau 2. Etudes de sécurité cardiovasculaire menées avec les GLP-1 RA

Etude Population étudiée HbA1c initiale

Suivimédian

Principaux résultats

ELIXAlixisénatide*

n = 6 068Post SCA 100 %

7,7 % 2,1 ans Neutralité cardiovasculaire

EXSCELexénatide retard

n = 14 752Prévention secondaire 73 %

8,0 % 3,2 ans Neutralité cardiovasculaire

LEADERliraglutide

n = 9 340Prévention secondaire 81 %

8,7 % 3,8 ans MACE -13 %Mortalité cardiovasculaire -22 %, mortalité totale -15 %

SUSTAIN-6sémaglutide*

n = 3 297Prévention secondaire 83 %

8,7 % 2,1 ans MACE -26 %AVC -39 %

HARMONY-Oalbiglutide*

n = 9 463Prévention secondaire 100 %

8,7 % 1,6 an MACE -22 %IDM -25 %

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XVIII Le Cardiologue 416 – Novembre 2018

COMPLICATIONS CARDIOVASCULAIRES DU DIABÈTE DE TYPE 2

CV chez les patients avec DT2 à haut risque. L’existence d’un effet classe semble soutenue par une méta-analyse des cinq essais pu-bliés présentée lors du congrès européen de diabétologie en octobre 2018. Il est intéressant de noter que les 3 essais n’ayant pas réussi à montrer de bénéfice significatif (ELIXA, EXSCEL, FREEDOM-CVO) sont ceux menés avec des agonistes dérivés de l’exenadine. Toutefois, il est probable que les discordances entre les études s’ex-pliquent avant tout par des différences expérimentales (niveau de risque CV des populations, valeur initiale de l’HbA1c, delta d’HbA1c entre le groupe traitement et le groupe placebo, pourcentage d’arrêt du traitement, recours plus fréquent à certains anti-hyperglycémiants dans le groupe contrôle…). Au final, le bénéfice CV des GLP-1 RA est surtout démontré chez les patients en prévention secondaire présen-tant un DT2 mal équilibré. Pour autant, les mécanismes mis en jeu ne sont pas clairement élucidés : des effets pléïotropes pourraient s’ajouter aux bénéfices des GLP-1 RA sur l’HbA1c, la pression arté-rielle, le poids ou les lipides, mais rien n’est clairement démontré à ce jour. Par ailleurs, si les GLP-1 RA ont montré des effets protecteurs dans des modèles précliniques d’IC, leur impact positif sur la fonction ven-triculaire gauche chez l’homme n’est pas constamment retrouvé. Des études pilotes avaient suggéré l’existence d’un bénéfice des GLP-1 RA chez des patients avec IC, diabétiques ou non, mais ce bénéfice n’a pas été confirmé par les données d’études spécifiques dans ce type de population. Aucune influence sur les événements liés à l’IC n’est rapportée dans les études de sécurité CV menées avec le lixisé-natide, [8] le liraglutide, [9] le sémaglutide, [10] l’exénatide retard [11] et l’albiglutide. [12] Dans ces essais, les analyses en sous-groupes ne montraient pas d’interaction entre les antécédents d’IC et l’influence du traitement testé sur les MACE. Par contre, dans l’étude FIGHT, réalisée chez 300 patients, diabétiques ou non, présentant une IC (FEVG < 40 %, moyenne 25 %), le liraglutide 1,8 mg/jour prescrit dans les suites d’une hospitalisation pour poussée d’IC n’était pas associée à une plus grande stabilité clinique à 6 mois vs placebo, mais au contraire à une tendance défavorable en termes de ré-hospitalisations (+30 %, ns) ou de décès (+10 %, ns). [13] Dans l’étude LIVE, menée chez 241 sujets diabétiques ou non présentant une IC stable avec FEVG

altérée (34 % en moyenne), le liraglutide 1,8 mg/j n’a pas permis d’améliorer la FEVG à 24 semaines vs placebo, mais était associée à une majoration des événements indésirables cardiaques graves (tachycardie ventriculaire létale ou non, fibrillation auriculaire, syn-drome coronarien aigu…). [14] Ces signaux défavorables chez des patients présentant une altération de la FEVG pourraient être liés à l’effet tachycardisant, modeste mais significatif, des GLP-1 RA (+2 à 4 bpm).

INHIBITEURS DE SGLT2Ces dernières années, les résultats les plus spectaculaires sont venus des études réalisées avec les iSGLT2. Ces agents anti-hyper-glycémiants agissent en inhibant la réabsorption du glucose dans le tube proximal du néphron ; outre cet effet glycosuriant ils ont aussi un effet natriurétique. Les résultats des études de sécurité CV menées avec les iSGLT2 sont homogènes (tableau 3). Ainsi, l’étude EMPA-REG OUTCOME a démontré, dans une population composée quasi-exclusivement de patients avec DT2 en préven-tion secondaire que l’empagliflozine était supérieure au placebo, réduisant le critère primaire composite de 14 %, la mortalité to-tale de 32 %, la mortalité CV de 38 % et le risque d’hospitalisation pour IC de 35 % après 3,1 années de suivi ; ce bénéfice survenait dès les premiers mois. [15] Les résultats de l’étude EMPA-REG OUTCOME sont en accord avec ceux du programme CANVAS incluant plus de 10 000 patients avec DT2 en prévention secondaire (66 % d’entre eux) ou âgés de plus de 50 ans, avec au moins 2 facteurs de risque. Elle a montré, sous cana-gliflozine vs placebo, une réduction significative de 14 % de l’inci-dence du critère majeur composite et de 33 % des hospitalisations pour IC; en revanche, il n’y avait pas de diminution significative de la mortalité totale ni de la mortalité CV et un excès de risque d’amputa-tion était retrouvé dans le groupe canagliflozine (+97 %). [16] La dapagliflozine a, quant à elle, été évaluée dans l’étude DECLARE-TIMI 58 incluant 40 % de patients avec DT2 en prévention primaire ; ses résultats seront présentés lors du congrès de l’AHA de novembre 2018, mais on en connaît déjà les grandes lignes : baisse non signi-ficative du MACE et diminution significative du critère composite

Tableau 3. Etudes de sécurité cardiovasculaire menées avec les iSGLT2

Etude Population étudiée HbA1c initiale

Suivimédian

Principaux résultats

EMPA-REGempagliflozine*

n = 7 020Prévention secondaire 100 %

8,1 % 3,1 ans MACE -14 %Mortalité cardiovasculaire -38 %, mortalité totale -32 %Hospitalisations pour IC -35 %

CANVAScanagliflozine*

n = 10 142Prévention secondaire 66 %

8,2 % 3,6 ans MACE -14 %Hospitalisations pour IC -33 %

DECLARE-TIMIdapagliflozine*

n = 17 160Prévention secondaire 41 %

8,3 % < 5 ans Co-critère primaire composite « décès cardiovasculairesou hospitalisations pour IC »

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Le Cardiologue 416 – Novembre 2018 XIX

TRAITEMENTS ANTIDIABÉTIQUES

“mortalité CV + hospitalisations pour IC” (co-critère primaire). [17] Plusieurs grandes études d’observation ont confirmé le bénéfice CV des iSGLT2 en conditions de vie réelle. [18-21] Les mécanismes par lesquels les iSGLT2 exercent ce bénéfice ne sont pas totalement élucidés, mais sont sans doute surtout liés à la diurèse osmotique qu’ils induisent, à l’origine d’une amélioration du statut hémodyna-mique. [22] Toutes ces données font des iSGLT2 les antidiabétiques de choix chez les DT2 insuffisants cardiaques. [23] Des études me-nées spécifiquement dans cette population sont en cours avec ces molécules. Concernant le risque d’amputation observé dans CANVAS, des fac-teurs prédictifs ont été identifiés comme une artérite des membres inférieurs, une neuropathie, le sexe masculin ou une HbA1c supé-

rieure à 8 %. [16] Ce signal négatif n’avait pas été retrouvé dans une analyse post-hoc d’EMPA-REG. [24] Les résultats des études d’observation en vie réelle sont discordants et ne permettent pas de conclure sur la réalité de ce risque, et s’il existe, sur un effet propre à la canagliflozine [18-19]. Cependant, certaines données issues de bases de pharmacovigilance (à interpréter avec prudence compte tenu des biais de déclaration) suggèrent l’existence d’un effet secondaire commun à tous les pro-duits de la classe. [25] Ces données ont conduit à l’ajout d’un aver-tissement sur la notice de la canagliflozine aux USA et de tous les iSGLT2 en Europe. Cet événement indésirable pourrait être lié à l’hé-moconcentration induite par ces agents aux propriétés diurétiques.

PATIENT EN PRÉVENTION CARDIOVASCULAIRE SECONDAIRE : STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE• La stratégie « commune » de prise en charge du DT2 peut être suivie chez les patients en prévention cardiovasculaire secondaire en

portant une attention particulière au risque d’hypoglycémie.

• La metformine doit être maintenue ou introduite sous réserve du respect des contre-indications.

• Pour les patients en prévention cardiovasculaire secondaire, dont le phénotype clinique et biologique justifie la prescription d’un traitement par GLP-1 RA, le liraglutide doit être privilégié, en raison de son bénéfice cardiovasculaire démontré dans l’étude LEADER dans cette situation. Dans les cas où une insulinothérapie basale est envisagée chez un patient recevant déjà un GLP-1 RA, le maintien du liraglutide doit être envisagé chez les patients en prévention cardiovasculaire secondaire.

• Chez un patient en prévention cardiovasculaire secondaire, si le choix en deuxième ligne s’oriente vers un traitement oral ou s’il apparaît que le liraglutide n’est pas souhaitable (mauvaise tolérance aux GLP-1 RA, sujet âgé…), le recours à la sitagliptine est à privilégier compte tenu de sa sécurité d’emploi démontrée dans l’étude TECOS chez les patients en prévention secondaire, sans sur-risque d’hospitalisation pour IC.

AVIS n°26 PRISE DE POSITION DE LA SFD SUR LA PRISE EN CHARGE DU DT2 (2017)

PATIENT PRÉSENTANT UNE INSUFFISANCE CARDIAQUE (IC) Chez un patient diabétique de type 2 présentant une IC :

1/ La metformine doit être le traitement de première intention s’il s’agit d’une IC stable sans IRC sévère associée (DFG > 30 ml/min/1,73 m2), mais doit être évitée en cas d’IC instable et/ou nécessitant une hospitalisation.

2/ La sitagliptine a démontré, dans l’étude TECOS, sa sécurité vis-à-vis du risque de mortalité et/ou d’hospitalisation liés à l’IC, alors que la saxagliptine augmente le risque d’hospitalisation pour IC dans l’étude SAVOR-TIMI 53 et doit donc être évitée.

3/ Toutes les autres classes d’anti-hyperglycémiants disponibles sur le marché peuvent être utilisées, mais aucun médicament n’a montré, à ce jour, de bénéfice particulier sur les événements liés à l’IC, à l’exception de l’empagliflozine et de la canagliflozine, iSGLT2 non com-mercialisés en France actuellement.

4/ Les sulfamides et le répaglinide ne seront pas privilégiés, en raison du risque hypoglycémique.

5/ Les GLP1-RA doivent être évités en cas d’IC à fraction d’éjection diminuée, compte tenu de l’accélération du rythme cardiaque et du signal défavorable observé avec le liraglutide dans les études LIVE et FIGHT chez de tels patients.

6/ La coordination entre généraliste, cardiologue et endocrinologue-diabétologue est recommandée.

AVIS n°27 PRISE DE POSITION DE LA SFD SUR LA PRISE EN CHARGE DU DT2 (2017)

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XX Le Cardiologue 416 – Novembre 2018

COMPLICATIONS CARDIOVASCULAIRES DU DIABÈTE DE TYPE 2

QUID DES RECOMMANDATIONS ? Publiée en octobre 2017, la prise de position de la SFD propose une approche centrée sur le patient, reposant sur la décision médicale partagée. Elle définit les stratégies thérapeutiques pour le patient DT2 « commun » mais aussi pour un certain nombre de popula-tions particulières, notamment les sujets en prévention CV secon-daire et les patients avec IC. [26] Ses préconisations sont basées sur les preuves scientifiques disponibles à cette époque, mais tiennent compte également de la disponibilité ou non des molécules sur le marché français (non commercialisation des iSGLT2 en particulier). Les avis relatifs aux patients avec DT2 en prévention CV secondaire et les patients présentant une IC sont repris dans les encadrés 1

et 2. Une réactualisation de cette prise de position est prévue pour le deuxième semestre de l’année 2019. Publiée en octobre 2018, la nouvelle version du consensus d’experts américains et européens de l’ADA et de l’EASD fait elle aussi la part belle à l’approche centrée sur le patient et la décision médicale parta-gée. [27] Elle se caractérise surtout par les stratégies proposées chez le patient DT2 en prévention CV secondaire et/ou présentant une mala-die rénale chronique après échec des modifications du mode de vie et de la metformine, intégrant les données des études de sécurité CV des antidiabétiques et réservant, de ce fait, une place privilégiée aux iSGLT2 et aux GLP-1 RA. Les grandes lignes de ce consensus concer-nant ces patients à haut risque CV sont résumées dans la figure 1, et semblent refléter au mieux l’état actuel des connaissances. n

Figure 1. Consensus ADA/EASD 2018, patient en prévention CV secondaire ou présentant une maladie rénale chronique. [27]

Profil prédominant :athérosclérose

GLP-1 RA ou iSGLT2(avec bénéfice CV avéré)

Si HbA1c > objectif, ajouter :• GLP-1 RA ou iSGLT2 selon le choix précédent• iDPP4 chez les patients non traités par GLP• Insuline basale• Thiazolidinedione• Sulfamide hypoglycémiant

Profil prédominant :insuffisance cardiaque (IC)

ou maladie rénale chronique (MRC)

iSGLT2 (avec bénéfice avéré sur IC et/ou MRC)ou

GLP-1 RA (avec bénéfice CV avéré) si intolérance/CI aux iSGLT2

Si HbA1c > objectif, ajouter :• GLP-1 RA ou iSGLT2 selon le choix précédent• iDPP4 (sauf saxagliptine) chez les patients insuffisants cardiaques non traités par GLP-1 RA• Insuline basale• Sulfamide hypoglycémiant• Eviter les thiazolidinediones

Patient en prévention CV secondaire ou présentant une maladie rénale chroniqueMODIFICATIONS FAVORABLES DU MODE DE VIE + METFORMINE

HbA1c > objectif

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Le Cardiologue 416 – Novembre 2018 XXI

TRAITEMENTS ANTIDIABÉTIQUES

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XXII Le Cardiologue 416 – Novembre 2018

Dernières nouvelles Yves Carat

OPTIMISER LE PRONOSTIC CARDIOVASCULAIRE AVEC LES ANTI-PCSK9Débuter maintenant pour éviter la survenue possible d’un IDM ou d’un AVCSymposium satellite AMGEN ESC 2018

La criticalité d’un LDLc augmenté (Laufs U, GE)« Si tu rencontres une personne qui a une douleur dans sa poitrine, son estomac et ses bras, dis-toi que sa mort est proche » Papyrus Ebers (XVe siècle AC).Les principales causes de décès en Europe sont d’origine CV, en parti-culier chez les femmes. Les maladies CV, longtemps silencieuses, sont liées en grande partie à un LDLc trop élevé. Une réduction de 50 % du LDLc sur une longue période de vie d’un jeune adulte peut laisser espérer une ample réduction des événements coronariens. Le niveau de LDLc a été considéré à tort comme étant optimal chez plus de 60 % des patients traités par une statine en prévention secondaire, par les praticiens ayant participé à l’étude DISCOVER, alors qu’il l’était, en réalité, chez seulement 15 % des patients.

Quand les statines ne suffisent pas (Giugliano R, USA)Selon le registre EUROASPIRE V (2018), le LDLc reste insuffisam-ment contrôlé en prévention secondaire : 71 % des patients ont un LDLc ≥ 0,7 g/l, y compris chez ceux traités par des statines de haute intensité (60 %). L’importance de réduire le LDLc en dessous de la valeur cible est étayée par de multiples études de prévention pri-maire et secondaire, non seulement avec les statines, mais aussi avec d’autres traitements, en particulier l’ézétimibe (étude IMPROVE-IT). Cette réduction du LDLc, même quand elle est très ample, n’a pas été associée à une augmentation des effets indésirables.Une avancée supplémentaire sur le bénéfice d’un LDLc assez bas a été apportée par l’étude FOURIER avec l’évélocumab, un inhibi-teur des PCSK9, en sus d’un traitement par statine. Une réduction supplémentaire de 59 % du LDLc, obtenue précocement dès la 4e semaine, a favorisé la réduction des événements CV (HR = 0,85 ; IC = 0,79-0,92 ; p < 0,001, pour le critère principal composite).Ce bénéfice est également suggéré dans le sous-groupe des 2 034 patients avec un LDLc basal < 0,7 g/ : le traitement par évélocumab a réduit numériquement le critère composite des décès CV, des infarc-tus du myocarde ou des AVC (HR = 0,70 ; IC = 0,48-1,01), parallèle-ment à la réduction profonde du LDLc (0,19 g/l contre 0,61 g/l sous placebo), et toujours sans excès d’effets indésirables graves.Le principal message qui découle des résultats de l’étude FOURIER est « the lowest LDLc is the best ».

Traiter un patient à risque cardiovasculaire(Laufs U, GE - De Ferrari G, IT - Sattar N, UK)Les patients à haut risque CV, comme le sont ceux avec une atteinte pluri-artérielle, bénéficient particulièrement d’une réduction ample du LDLc. Dans l’étude FOURIER, la réduction importante du LDLc avec l’évélocumab, prescrit en sus d’une statine, a été associée à une impor-tante réduction de risque de survenue des événements majeurs CV ou cérébrovasculaires, mais également celui des événements graves

concernant les membres inférieurs, comme les amputations. De même, un bénéfice sur plusieurs territoires artériels a été observé chez les pa-tients atteints d’artériopathie des membres inférieurs isolée, au départ sans antécédent d’infarctus du myocarde ou d’AVC (HR = 0,52 ; IC = 0,35-0,76 ; RRA 6,3 % et NNT 16). Globalement, dans l’étude FOURIER, les bénéfices de l’évélocumab ont été constatés chez l’ensemble des sous-groupes de patients, y compris chez ceux les plus à risque : avec un antécédent d’infarctus du myocarde récent ; avec plus de deux infarctus du myocarde ; et enfin, avec une atteinte pluri-artérielle.

Propos recueillis par P. Attali (Strasbourg)

Étude Fourier. Résultats de l’évélocumab, un inhibiteur des PCSK9 en sus d’une statine, sur le LDLc et sur la morbimor-talité chez des patients à haut risque CV.

PlaceboEvolocumab

EvolocumabMedian 0,78 mmol/L

IQR [0,49-1,2]

Placebo

KM

rat

e (%

) at 3

yea

rsLD

L-c

(mm

ol/L

)

Weeks after randomization0

15

10

5

0CV death, MI, stroke

UA, cor revasc.CV death, MI, stroke

59 % mean declinep < 0,001

absolute 1,45 mmol/L(1,43-1,47)

Sabatine MS. et al. NEJM 2017:376:1713-22

14,6

9,97,9

12,6

6 12 24 48 72 96 120 144 168

2,5

1,5

2,0

1,0

0,5

0

HR = 0,85 [0,79-0,92]p < 0,001

HR = 0,80 [0,73-0,88]p < 0,001

For LDL-c, 1 mmol/L - 38,67 mg/dLMI : myocardial infarction - UA : unstable angina

LDL-c by 59 % (from 2,4 0,8 [0,5, 1,2] mmol/L) CV outcomes inpatients already on statin therapyEvolocumab well tolerated with a positive safety profil compared to control

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Le Cardiologue 416 – Novembre 2018 XXIII

Derniè

res no

uvelles

ENTRESTOLE TRAITEMENT DE NOVARTIS DANS LA PRISE EN CHARGE DE L’INSUFFISANCE CARDIAQUE CHRONIQUE SYMPTOMATIQUE À FRACTION D’ÉJECTION RÉDUITE, EST DÉSORMAIS DISPONIBLE DANS LES PHARMACIES DE VILLE • Entresto est, depuis le 11 octobre 2018, inscrit sur la liste des spé-cialités pharmaceutiques remboursables aux assurés sociaux ainsi que sur celle des spécialités pharmaceutiques agréées à l’usage des collectivités et divers services publics. • Le traitement est maintenant disponible dans les pharmacies de ville, permettant ainsi aux patients atteints d’insuffisance cardiaque d’avoir un accès facilité à cette solution thérapeutique innovante.

• Depuis le lancement d’Entresto en France, début 2016, plus de 35 000 patients ont bénéficié du traitement. • L’insuffisance Cardiaque (IC), affection chronique, complexe et grave, touche plus d’un million de personnes en France. En 2013, plus de 70 000 décès sont survenus pour cause initiale ou associée d’insuffi-sance cardiaque et plus de 165 000 patients ont été hospitalisés avec un diagnostic principal d’insuffisance cardiaque en 2014.

DIABÈTE DE TYPE 2BAISSE DES INSUFFISANCES CARDIAQUES AVEC L’EMPAGLIFLOZINE DANS UNE ÉTUDE OBSERVATIONNELLEL’antidiabétique oral inhibiteur du SGLT2 empagliflozine (Jar-diance*, Boehringer Ingelheim/Lilly) a été associé à une réduc-tion de risque d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque par rapport aux inhibiteurs de la DPP-4, dans une étude observation-nelle, annoncent les deux laboratoires dans un communiqué le 5 novembre 2018.Boehringer Ingelheim et Lilly mettent en avant le fait que ces résul-tats observés dans la «vraie vie» confortent ceux de l’étude rando-misée EMPA-REG OUTCOME qui avait comparé l’empagliflozine et un placebo en plus d’un traitement antidiabétique standard chez des patients à haut risque cardiovasculaire. L’étude EMPRISE a été initiée à 2014 et doit se terminer en 2019,

en ayant inclus 200 000 diabétiques de type 2. A terme, elle don-nera des informations sur l’efficacité, la sécurité, les coûts et l’utili-sation des ressources de santé pour d’un côté l’empagliflozine et de l’autre côté des inhibiteurs de la DPP-4. Les données disponibles couvrent pour le moment la période allant d’août 2014 à septembre 2016. Le nombre de patients analysés à ce stade n’est pas précisé. Une réduction de 44 % des hospitalisations pour insuffisance car-diaque a été observée avec l’empagliflozine. Les laboratoires estiment que cela conforte les données antérieures : dans EMPA-REG OUTCOME, une réduction de 35% du risque d’hos-pitalisation pour insuffisance cardiaque avait été observée.

L’ANTIDIABÉTIQUE DULAGLUTIDE DIMINUE LE RISQUE D’ÉVÉNEMENT CARDIOVASCULAIRE CHEZ DES PATIENTS « TOUT-VENANT »L’antidiabétique analogue du GLP-1 dulaglutide (Trulicity*, Lilly) a diminué le risque d’événement cardiovasculaire chez des dia-bétiques de type 2 « tout-venant », dont la majorité ne présentait pas de maladie cardiovasculaire au départ, dans l’étude REWIND dont les résultats ont été annoncés le 5 novembre 2018.Comme dans les autres études de morbimortalité cardiovasculaire, le médicament était comparé à un placebo en plus d’un traitement antidiabétique standard. Mais Lilly met en avant le fait qu’il s’agit de la première étude dont la plus grande partie des patients inclus n’avaient pas d’antécédent cardiovasculaire, alors que les essais antérieurs sur d’autres antidiabétiques incluaient très majoritaire-ment des patients à haut risque. Dans cette étude qui a comparé 1,5 mg de dulaglutide hebdoma-daire et un placebo chez 9 901 patients, seulement 31 % avaient un antécédent d’infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral is-

chémique, angor instable, revascularisation (coronaire, carotidienne ou périphérique) ou ischémie myocardique. C’était le cas de 83 % des patients dans SUSTAIN-6, 81 % dans LEADER, 73 % dans EXSCEl et 100 % dans HARMONY, rappelle le laboratoire. Il s’agissait de patients dont la glycémie était déjà relativement bien contrôlée par le traitement antidiabétique standard : le taux d’HbA1c était en moyenne de 7,3 %. Là aussi, Lilly souligne que c’est un taux inférieur aux autres essais dont l’HbA1c moyenne se situait selon les cas à 8 % ou 8,7 %. Le suivi des patients était en médiane supérieur à 5 ans, plus long que dans les autres études, souligne aussi le laboratoire. Une ré-duction statistiquement significative des décès cardiovasculaires, infarctus et AVC, a été observée. Les résultats devraient être présentés au prochain congrès de l’American Diabetes Association (ADA) en 2019.

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XXIV Le Cardiologue 416 – Novembre 2018

Dernières nouvelles Yves Carat

LA PROPORTION D’ADULTES AVEC UN LDL-CHOLESTÉROL ÉLEVÉ N’A PAS ÉVOLUÉ DEPUIS 2006 EN FRANCELa proportion d’adultes présentant une cholestérolémie LDL trop élevée, exposée par conséquent à un risque cardiovasculaire, est restée stable entre 2006 et 2015 en France, une situation que des chercheurs de Santé publique France estiment « préoccu-pante », dans une étude publiée mardi par le Bulletin épidémio-logique hebdomadaire du 6 novembre 2018.« L’hypercholestérolémie est un facteur de risque cardiovasculaire important, souvent non diagnostiqué rappellent Camille Lecoffre de Santé publique France et ses collègues ». « D’après l’Etude Nationale Nutrition Santé (ENNS), 18,8 % des adultes avaient un cholestérol-LDL (LDL-c) supérieur à 1,6 g/l en 2006 en France », ajoutent-ils.Ils ont mené l’étude ESTEBAN entre 2014 et 2016 sur 2 074 adultes âgés de 18 à 74 ans. Leur objectif était d’estimer la cholestérolé-mie LDL moyenne et la fréquence de l’hypercholestérolémie LDL, tout en décrivant la prise en charge de cette pathologie en France métropolitaine (hors Corse) en 2015 afin d’en étudier les évolutions depuis 2006.Ils ont ainsi calculé qu’au sein de la population, en 2015, il y avait toujours une proportion de 19 % des adultes qui présentaient un LDL-C supérieur à 1,6 g/l.

De plus, 6 % avaient un LDL-C dépassant 1,9 g/l.La cholestérolémie LDL moyenne de la population s’élevait à 1,30 g/l, sans différence selon le sexe.Ainsi, entre 2006 et 2015, la proportion d’adultes avec un LDL-c élevé (> 1,6 g/l et > 1,9 g/l) et la cholestérolémie LDL moyenne sont restées stables.En 2015, sur l’ensemble des participants, 10,9 % des hommes et 6,7 % des femmes avaient eu au moins 1 traitement hypolipémiant au cours de l’année précédente. Cette proportion d’adultes traités par hypolipémiant a significativement diminué, de 29,6 %, par rap-port à l’étude de 2006, mais les auteurs considèrent qu’en 2006, la proportion était probablement sous-estimée, les données récentes, issues du Système national d’information interrégimes de l’assu-rance maladie (Sniiram), étant plus exhaustives.« La proportion d’adultes avec un LDL-c > 1,6 g/l, relativement élevée par rapport aux autres pays industrialisés, n’a pas évolué depuis 2006. Ce nouvel état des lieux témoigne d’une situation qui reste préoccupante en France, dans la mesure où l’hypercholes-térolémie-LDL est souvent associée à d’autres facteurs de risque cardiovasculaire », concluent les auteurs.

LE TRAITEMENT DE L’HYPERTENSION SANS BÉNÉFICE CHEZ LES PATIENTS LÉGÈREMENT HYPERTENDUS SANS FACTEUR DE RISQUEUn traitement antihypertenseur ne semble réduire ni la mortalité ni les maladies cardiovasculaires chez les individus présentant une hypertension légère et dont le risque cardiovasculaire est faible, selon une étude britannique publiée dans le JAMA Inter-nal Medicine (29.10.2018 en ligne) qui montre qu’au contraire une telle stratégie augmente certains effets indésirables.« Les données probantes appuyant l’instauration d’un traitement pharmacologique chez les patients présentant une hypertension artérielle légère et étant à faible risque cardiovasculaire ne sont pas concluantes et les recommandations cliniques à travers le monde sont contradictoires », rappellent James Sheppard de l’Université d’Oxford (Royaume-Uni) et ses collègues.Ils ont analysé les dossiers de santé électronique de 38 286 patients atteints d’hypertension légère, définie comme une hypertension artérielle n’ayant jamais été traitée, comprise entre 140/90 mmHg et 159/99 mmHg, et à faible risque cardiovasculaire (absence d’antécédent de maladie cardiovasculaire, d’hypertrophie ventricu-laire gauche, de fibrillation atriale, de diabète, de maladie rénale chronique et d’antécédent familial). Leur objectif était d’évaluer si l’utilisation d’un traitement antihypertenseur chez ce type de pa-tients était associée à une réduction de la mortalité et des maladies

cardiovasculaires.La moitié des patients ont reçu un traitement antihypertenseur dans les 12 mois suivant le diagnostic, l’autre moitié était appariée selon un score de propension.Au cours d’un suivi médian de 5,8 ans, aucune preuve d’association n’a été trouvée entre le traitement antihypertenseur et la mortalité ou les maladies cardiovasculaires.En revanche, le traitement a été associé à un risque accru d’effets indésirables comme l’hypotension (augmentation du risque relatif de 69 %), la syncope (+28 %), les anomalies des taux d’électrolytes (+72 %) et les lésions rénales aiguës (+37 %).Les chercheurs en concluent que, chez les patients légèrement hypertendus dont le risque cardiovasculaire est faible, les méde-cins devraient faire preuve de prudence lorsqu’ils suivent les re-commandations issues de résultats généralisés d’essais cliniques menés chez des sujets à risque cardiovasculaire élevé.«  Il est possible que les avantages du traitement mettent plus de temps à se manifester dans cette population à faible risque  », nuancent-ils. Ils estiment toutefois que leurs résultats peuvent être « particulièrement pertinents pour les patients plus jeunes souffrant d’hypertension légère ».