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Juillet 2004 n°218 Une version plus complète de ce bulletin est accessible sur le site de l'INRA www.inra.fr. sous son nom dans : Information Scientifique et Technique puis Publications INRA en ligne. Le signe ### dans cette version papier indique quelques développements supplémentaires ou des commentaires additionnels consultables dans la version électronique. André BERKALOFF e-mail : [email protected] Concepts et Techniques 1.Une revue supplémentaire de J Courcelle et al.; Research in Microbiology 155 (MAY04) 231-237 traite de la réplication du chromosome chez Escherichia coli face à tous les aléas liés aux dégâts divers subis par l'ADN. La revue analyse les conditions dans lesquelles les divers acteurs (et ils sont légion) sont recrutés à la fourche de réplication pour résoudre les problèmes. Voir également le Bulletin d'Avril-Mai §3 pour les bactéries). 3. Le raccourcissement des télomères peut entraîner une instabilité chromosomique et l'apoptose des cellules somatiques et germinales mâles. On vient de montrer que des télomères anormalement courts à la suite d'un défaut de télomérase empêchent, chez la souris, la synapsis et la recombinaison, en particulier chez les femelles où les ovocytes constituent un stock définitif. Les cellules mâles subissent plus simplement une apoptose, ce qui est facilité par le renouvellement continu de ces cellules. Chez les femelles les descendants de souris à télomères fortement raccourcis, même croisées avec des mâles de générations plus récentes (ayant des télomères relativement longs), on observe ces défauts de synapsis et de recombinaison. L Liu et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (27APR04) 6496-6501. 4. Les fonctions enzymatiques des ARNs ribosomaux sont actuellement scrutées. Mais le fonctionnement du ribosome dans son ensemble au cours de la traduction est un sujet constamment renouvelé. Une revue sur le rôle de protéines dites Release Factors (RFs) dans la lecture du codon de fin de traduction (codon stop) est parue avec WP Tate et al.; Bioessays 26 (MAY04) 582-588. Ces protéines usurpent la fonction des tARNs en reconnaissant le codon de terminaison (codon stop). 5***. Les miRNAs miR-196 sont complémentaires de régions non traduites aval (3' UTRs) de certains gènes HOX (HOXB8, HOXC8 et HOXD8.). On constate une répression de l'expression de ces trois HOX8, plus HOXA7 par miR-196. Ces miR-196 sont codés juste en amont des HOX9 (sauf HOXD9). miR-196a est presque parfaitement complémentaire de cette région du gène humain HOXB8. Ce site est conservé chez les poissons et les amphibiens. Il est vraisemblable que le messager de HOX8, comme les cibles des miRNAs chez les plantes et d'autres animaux, voit son activité régulée par destruction. Ceci n'exclue pas un autre forme de répression post transcriptionnelle complémentaire par inhibition de la traduction. S Yekta et al.; Science 304 (23APR04) 594-596. On vient, par ailleurs, de montrer que le virus d'Epstein-Barr virus (EBV) responsable de la mononucléose infectieuse et du lymphome de Burkitt, utilise également cette technique, car il code plusieurs miRNAs qui régulent des activités aussi bien cellulaires que virales. 6. Les duplex siRNAs sont issus du clivage d'ARN doubles brins par la RNase Dicer. Ils induisent le clivage des messagers présentant une séquence identique. La partie duplex de ces ARNs étant longue de ~19 pb, ils sont plus courts que les ARNs doubles brins induisant la réponse non spécifique des interférons α/β (>30 pb). Les microRNAs (miRNAs) sont transcrits du génome comme des ARNs en épingle à cheveux. Les pré-miRNAs sont également clivés par Dicer, mais agissent essentiellement en inhibant la traduction des messagers présentant des sites approximativement homologues. Des données récentes indiquent que, malgré les apparences, le mécanisme d'action des siRNAs et miRNAs est très proche. BR Cullen; Virus Research 102 (01JUN04) 3-9 montre que la voie de production des miRNAs offre au moins trois stades où des siRNAs artificiels peuvent induire une inactivation de gènes en s'incorporant dans le complexe RISC. Il discute des avantages et inconvénients de chacun de ces points d'attaque.

Concepts et Techniques · la résistance aux stress de Listeria monocytogenes (une gram+)ainsi que dans sa virulence. ... point d'ancrage du facteur d'exportation nucléaire

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Juillet 2004 n°218 Une version plus complète de ce bulletin est accessible sur le site de l'INRA www.inra.fr. sous son nom dans : Information Scientifique et Technique puis Publications INRA en ligne.

Le signe ### dans cette version papier indique quelques développements supplémentaires ou des commentaires additionnels consultables dans la version électronique. André BERKALOFF

e-mail : [email protected] Concepts et Techniques

1.Une revue supplémentaire de J Courcelle et al.; Research in Microbiology 155 (MAY04) 231-237 traite de la réplication du chromosome chez Escherichia coli face à tous les aléas liés aux dégâts divers subis par l'ADN. La revue analyse les conditions dans lesquelles les divers acteurs (et ils sont légion) sont recrutés à la fourche de réplication pour résoudre les problèmes. Voir également le Bulletin d'Avril-Mai §3 pour les bactéries).

3. Le raccourcissement des télomères peut

entraîner une instabilité chromosomique et l'apoptose des cellules somatiques et germinales mâles. On vient de montrer que des télomères anormalement courts à la suite d'un défaut de télomérase empêchent, chez la souris, la synapsis et la recombinaison, en particulier chez les femelles où les ovocytes constituent un stock définitif. Les cellules mâles subissent plus simplement une apoptose, ce qui est facilité par le renouvellement continu de ces cellules. Chez les femelles les descendants de souris à télomères fortement raccourcis, même croisées avec des mâles de générations plus récentes (ayant des télomères relativement longs), on observe ces défauts de synapsis et de recombinaison. L Liu et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (27APR04) 6496-6501.

4. Les fonctions enzymatiques des ARNs

ribosomaux sont actuellement scrutées. Mais le fonctionnement du ribosome dans son ensemble au cours de la traduction est un sujet constamment renouvelé. Une revue sur le rôle de protéines dites Release Factors (RFs) dans la lecture du codon de fin de traduction (codon stop) est parue avec WP Tate et al.; Bioessays 26 (MAY04) 582-588. Ces protéines usurpent la fonction des tARNs en reconnaissant le codon de terminaison (codon stop).

5***. Les miRNAs miR-196 sont

complémentaires de régions non traduites aval (3' UTRs) de certains gènes HOX (HOXB8, HOXC8 et HOXD8.). On constate une répression de l'expression

de ces trois HOX8, plus HOXA7 par miR-196. Ces miR-196 sont codés juste en amont des HOX9 (sauf HOXD9). miR-196a est presque parfaitement complémentaire de cette région du gène humain HOXB8. Ce site est conservé chez les poissons et les amphibiens.

Il est vraisemblable que le messager de HOX8, comme les cibles des miRNAs chez les plantes et d'autres animaux, voit son activité régulée par destruction. Ceci n'exclue pas un autre forme de répression post transcriptionnelle complémentaire par inhibition de la traduction. S Yekta et al.; Science 304 (23APR04) 594-596.

On vient, par ailleurs, de montrer que le virus d'Epstein-Barr virus (EBV) responsable de la mononucléose infectieuse et du lymphome de Burkitt, utilise également cette technique, car il code plusieurs miRNAs qui régulent des activités aussi bien cellulaires que virales.

6. Les duplex siRNAs sont issus du clivage d'ARN

doubles brins par la RNase Dicer. Ils induisent le clivage des messagers présentant une séquence identique. La partie duplex de ces ARNs étant longue de ~19 pb, ils sont plus courts que les ARNs doubles brins induisant la réponse non spécifique des interférons α/β (>30 pb).

Les microRNAs (miRNAs) sont transcrits du génome comme des ARNs en épingle à cheveux. Les pré-miRNAs sont également clivés par Dicer, mais agissent essentiellement en inhibant la traduction des messagers présentant des sites approximativement homologues.

Des données récentes indiquent que, malgré les apparences, le mécanisme d'action des siRNAs et miRNAs est très proche.

BR Cullen; Virus Research 102 (01JUN04) 3-9 montre que la voie de production des miRNAs offre au moins trois stades où des siRNAs artificiels peuvent induire une inactivation de gènes en s'incorporant dans le complexe RISC. Il discute des avantages et inconvénients de chacun de ces points d'attaque.

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7. On a récemment réalisé que la protéine Hfq se

liant aux ARNs joue un rôle régulateur dans un grand nombre de mécanismes physiologiques. JK Christiansen et al.; Journal of Bacteriology 186 (JUN04) 3355-3362 montrent qu'elle joue un rôle dans la résistance aux stress de Listeria monocytogenes (une gram+) ainsi que dans sa virulence.

Chez Escherichia coli, elle module la stabilité comme la traduction des messagers en interagissant avec plusieurs petits ARNs régulateurs. C'est donc un acteur supplémentaire dans les interférences ARN. Les auteurs montrent qu'elle participe à la résistance à l'éthanol ainsi qu'à une forte osmolarité. Elle intervient également dans la survie en carence d'acides aminés. Elle le fait en intervenant sur le facteur σB. Elle ne joue pas de rôle essentiel dans la résistance aux stress oxydatifs ou acides.

8. Durant la méiose, les coupures doubles-brins

donnent deux types de recombinants, avec crossovers (CO) ou sans (NCO). La détermination de ces deux issues de la recombinaison semble se faire avant les échanges de brins (le terme de "strand" est ambigu, et il est particulièrement utilisé par les généticiens classiques pour désigner une chromatide, là où les biologistes moléculaires l'utilisent pour polynucléotide, voir FW Stahl; Genetics 138 (OCT94)241-246) et donc bien avant la résolution des jonctions de Holliday. La synapsis des chromosomes a lieu après cette détermination et elle n'est pas requise pour la distribution, régulée par interférence entre eux, des crossovers le long des chromosomes. Une revue de DK Bishop et al.; Cell 117 (02APR04) 9-15 analyse cette détermination précoce.

10.*** On trouvera une revue sur les données

récentes sur le pore nucléaire dans B Fahrenkrog et al.; Trends in Biochemical Sciences 21 (APR04) 175-182.

L'architecture du pore est très conservée, même si les mensurations varient beaucoup suivant l'organisme. Au-delà du transit noyau/cytoplasme dans les deux sens, le complexe du pore nucléaire intervient, directement ou indirectement, dans bien d'autres mécanismes comme la ségrégation des chromosomes, l'expression génique (voir (voir le §12) et l'apoptose ou mort cellulaire programmée.

Les transferts des protéines, par exemple, sont ciblés par la présence de séquences NLS d'importation (Nuclear Localization Signal) ou d'exportation NES (Nuclear Exportation Signal) reconnus par un ou plusieurs transporteurs. Il peut même exister plusieurs signaux de ciblage permettant d'utiliser plusieurs transporteurs différents.

Un métazoaire dispose de plus de 20 protéines de ce type, ce qui n'est pas étonnant vu la variété des cargaisons à transporter dans un sens ou un autre, voire dans les deux. Le seul transporteur spécifique est, d'ailleurs, celui de la petite GTPase Ran (voir plus loin son rôle). Il a lieu grâce au facteur NTF2 (Nuclear Transport Factor 2 alias p10). Ce facteur spécialisé a, d'ailleurs, une activité impressionnante car il permet le

transport de plusieurs millions de molécules de Ran par minute.

Je rappelle que, dans le cas de l'importation de protéines dans le noyau, ce sont les importines également appelées karyophérines qui interviennent. L'importine α se lie aux NLS de la cargaison, et l'importine β transporte le complexe trimérique au travers du pore nucléaire. La directionnalité du transport est assurée par la petite GTPase Ran qui dissocie l'importine β du complexe. Le complexe est alors réduit à la charge fixée sur l'importine α par la NLS.

La structure consensus du pore est illustrée, dans la revue, par un joli schéma avec les principaux composants et les dimensions des divers éléments. Les dimensions mesurées du canal central coincideraient avec celle des molécules transportables.

Le mécanisme exact de translocation est encore très mal connu. Ce transport est très efficace, car on a calculé que chaque pore assure 1000 translocations par seconde, et ceci souvent contre un gradient.

L'interaction des récepteurs de transport (comme les importines) avec les répétitions FG (phénylalanine-glycine) des nucléoporines semble importante.

A la présence de multiples sites fixant les répétitions FG sur les récepteurs de transport correspond à la multiplicité et la diversité des répétitions dans les nucléoporines, et à l'autre extrémité de la chaîne, la multiplicité des séquences de ciblage.

Pour satisfaire les exigences de tels mécanismes, il faut imaginer un dispositif concentrant ces transporteurs libres au voisinage du pore ainsi que des mécanismes régulateurs.

La revue analyse en détail la reconstitution du pore nucléaire après la mitose et lors de la reconstitution de la poche périnucléaire du réticulum appelée improprement membrane nucléaire.

Le rôle des complexes du pore nucléaire dans l'expression génique a été analysée en détail chez la levure (voir le §12).

L'intervention du complexe du pore nucléaire dans la mitose est indiqué par la fixation de plusieurs nucléoporines et de la RanBP (Ran Binding Protein) sur le kinétochore des chromosomes. Des mutations dans la nucléoporine Nup170p chez la levure, et la délétion de RanBP2 chez les vertébrés, entraînent des défauts dans la ségrégation chromosomique à la mitose.

11. L'importation dans le noyau des nombreuses

protéines à fonctions nucléaires est régulée par une phosphorylation d'un site adjacent à la séquence de ciblage nucléaire NLS. MT Harreman et al.; The Journal of Biological Chemistry 279 (14MAY04) 20613-20621. Cette phosphorylation inhibe l'interaction avec l'importine α. Le transport est automatique pour beaucoup de ces protéines, et on joue sur le frein.

12. L'association des génes avec le complexe du

pore nucléaire (NPC) et les facteurs de transport nucléaire ont été impliqués dans la régulation de la transcription. Chez la levure Saccharomyces cerevisiae, la plupart des nucléoporines et

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caryophérines s'associent préférentiellement avec quelques gènes abondamment transcrits et à ceux qui possèdent les sites de fixation du régulateur de transcription Rap1 (une petite GTPase), tandis que RanGEF (Ran Guanine-nucleotide Exchange Factor) s'associent préférentiellement avec les gènes inactifs. JM Casolari et al.; Cell 117 (14MAY04) 427-439. Les auteurs montrent, par exemple, que la transcription des gènes GAL entraîne leur association avec les protéines des pores nucléaires, donc à leur transfert vers la périphérie nucléaire et la perte de l'association avec RanGEF.

Le pore nucléaire de S.cerevisiae comporte environ ~30 nucléoporines. La partie nucléaire est organisée sous la forme d'un panier (voir les belles figures de G Blobel et al.; Nature 403 (24FEB00) 835-836). Les gènes des nucléoporines joue souvent dans la fixation des limites des zones hétérochromatiques et non exprimées. Ainsi NUP60 et NUP145 sont indispensables à la répression du locus sexuel silencieux HMR. La nucléoporine Nup2 est un point d'ancrage du facteur d'exportation nucléaire Cse1. L'absence de Nup2 abolit la fixation de cette limite au locus HMR. RanGEF s'associe, d'une part avec une protéine du panier, Nup98, et d'autre part avec la chromatine.

13.*** Les mêmes JM Casolari et al.; Trends in

Cell Biology 14 (MAY04) 222-225 analysent le sort des pré-messagers imparfaitement épissés lors de l'exportation hors du noyau. On vient, en effet, de montrer que la protéine Mlp1 de Saccharomyces cerevisiae retient spécifiquement dans le noyau les messagers où les introns n'ont pas été tous éliminés. V Galy et al.; Cell 116 (09JAN04) 63-73 (analysé dans le Bulletin de Mars §4). Mlp1 possède, par ailleurs, de multiples rôles dans le fonctionnement des télomères, l'organisation du noyau et, en particulier, dans l'exportation des messagers.

La rétention du pré-mRNA requiert un site d'épissage amont (5') normal. La protéine Npl3 s'associe à SF1 qui est un facteur d'épissage intervenant au début du processus. Ce complexe reconnaît le site.

14.*** Les gènes codant les ARNs ribosomiques

(rDNA) sont répétés en tandem sur un ou plusieurs chromosomes. On compte, chez S. cerevisiae, environ 150 copies de rDNA sur le chromosome XII. On pourrait penser que ces répétitions causent des difficultés à la cellule en provoquant une perte ou une addition, par recombinaison, de ces répétitions rendant la structure instable. La production de minicercles issus d'une excision est, par ailleurs, toxique pour la levure (voir le Bulletin de Décembre 2003 §7). De telles instabilités ont bien été constatées, notamment chez les mutants bobbed de Drosophila. Il est donc vraisemblable que ces recombinaisons sont maîtrisées par la cellule qui maintient leur nombre constant. Des mutations dans le gène SIR2 accroissent le nombre des répétitions et celles dans FOB en diminuent le nombre. SIR2 régule la recombinaison entre différentes répétitions des rDNAs, mais pas la recombinaison au sein des gènes individuels des ARNs ribosomiques. T Kobayashi et

al.; Cell 117 (14MAY04) 441-453. La protéine Sir2p empêche, en effet, les crossovers inégaux entre chromatides sœurs en les stabilisant grâce à des cohésines. Cette stabilisation est sans effet notable sur la recombinaison au sein d'un même gène. C'est un des facteurs de longévité de la levure.

15. On trouvera dans G Fourel et al.; Bioessays 26

(MAY04) 523-532, une revue sur les "isolateurs" de la chromatine, séquence limitant les régulations régionales dans le génome (liés à l'activité des "enhancers", "silencers", etc…. Ces chercheurs lyonnais analyse les aspects dynamiques de l'action des isolateurs permettant d'expliquer les bordures de ces structures qui peuvent être aussi bien précises que floues. Les auteurs utilisent surtout les données acquises chez la levure.

16.*** Les porines OMPs (Outer Membrane

Porins) sont des structures "filtres" de la membrane externe des bactéries Gram-. Quand les porines malformées s'accumulent dans le périplasme bactérien (espace entre les deux membranes), un mécanisme de purge protéolytique se déclenche, avec activation de DegS. Les protéases à sérine oligomériques HtrA comportent une domaine trypsine-like N-terminal et au moins un domaine C-terminal PDZ. Les domaines PDZ permettent un ciblage des interactions protéine/protéine. Leur dénomination provient des initiales de trois protéines où ces domaines ont été initialement identifiés. Ce sont des domaines d'environ 90 amino-acides. Les protéines à domaines PDZ sont des adaptateurs moléculaires permettant la liaison de diverses protéines membranaires au cytosquelette d’actine ou à des protéines régulatrices. Les domaines PDZ régulent, ici, l'activité protéolytique en bloquant l'accès au site actif. Il est vraisemblable que les activateurs ouvrent et stabilisent un accès à ce site.

C Wilken et al.; Cell 117 (14MAY04) 483–494 montrent que la fixation de l'extrémité C-terminale (aval) des porines libres accumulées dans le périplasme, indiquant une malconformation, sur le domaine PDZ de DegS active l'activité protéasique de cette protéine qui peut alors les détruire. Trois acides aminés adjacents (Tyr-X-Phe) démasqués signalent une mauvaise conformation.

Cette réponse aux stress de l'enveloppe cellulaire est un autre exemple de diversification des paralogues: la protéase DegS régule, en particulier l'expression du gène homologue codant une autre protéase périplasmique DegP qui, contrairement à DegS, a une spécificité très large et n'a pas de rôle régulateur. Voir également le commentaire de C Schlieker et al.; Cell 117 (14MAY04) 417-420.

17.*** Les différentes fonctions du PCNA

(Proliferating Cell Nuclear Antigen) sont probablement dues à des modifications post-traductionnelles. SN Naryzhny et al.; Journal of Biological Chemistry 279 (07MAY04) 20194-20199, montrent qu'au moins trois des isoformes sont acétylées et que ceci modifie leurs fonctions. p300 et l'histone désacétylase HDAC1 sont probablement les agents de l'acétylation et de la désacétylation.

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18.*** La translocation des protéines à travers les

membranes fait intervenir un appareil que l'on a dénommé (selon la mode du temps) le translocon. Ce complexe est constitué par un hétérotrimère SecYEG/Sec61αβγ. La structure tridimensionnelle du complexe avec sa charge vient d'être établie chez une archée (voir le Bulletin de Mars §150, B van den Berg et al.; Nature 427, (01JAN04) 36–44) et une revue discute des perspectives J Eichler et al.; Trends in Biochemical Sciences 21 (MAY04) 221-223.

19.*** Le système ubiquitine–protéasome intervient

dans un grand nombre de processus régulateurs. La fixation de l'ubiquitine sur son substrat a lieu en trois étapes. La première est l'activation de l'ubiquitine au niveau de la Gly76 par fixation de l'enzyme E1. L'activation est suivie par l'intervention d'E2 (ubiquitin-conjugating enzymes) qui transfère l'ubiquitine d'E1 sur E3, l'ubiquitine ligase. Cette dernière assure l'étape finale, la fixation covalente de l'ubiquitine sur le substrat protéique à détruire. Un des points importants de son fonctionnement est la reconnaissance du substrat par les multiples ubiquitine ligases, les enzymes dites E3s. Pour la plupart des substrats on pense que la première ubiquitine se fixe par la Gly76 C-terminale sur l'ε−ΝΗ2 d'une lysine interne de la cible par une liaison isopeptidique.

Il existe plusieurs familles d'E3s, basées sur des motifs structuraux conservés. Toutes sont relativement ou fortement spécifiques, ce qui fait que le génome humain enc ontient un bon millier. Certaines transfèrent l'ubiquitine de E2 sur E3 avant la conjugaison avec le substrat. Celles à doigt RING (voir, par exemple, le Bulletin de Novembre 2003 §17) assurent un transfert direct de l'ubiquitine activée sur une E3 liée au substrat. Une troisième famille, différente, a été caractérisée (S Hatakeyama et al.; Genes to Cells 9 (JUN04) 533-548). Cette famille dite à U-box interagit avec des chaperones et co-chaperones qui reconnaissent les protéines endommagées.

Des addition successives d'autre ubiquitines ont lieu sur la Lys48 de la première unité d'ubiquitine. Cette poly-ubiquitinylation est le signal reconnu par le protéasome 26S. On ignore cependant comment se réalise les poly-ubiquitinylations. Il semble clair, cependant, que chaque protéine doit posséder un motif de reconnaissance par une E3 et une ou plusieurs lysines permettant le greffage. Mais il existe des différences notables entre cibles. Si dans certaines protéines, une ou plusieurs lysines doivent être présentes en une position donnée, chez d'autres n'importe quelle lysine même artificiellement insérée

convient. A Ciechanover et al.; Trends in Cell Biology 14 (MAR04) 159-166.

21. La mort programmée chez Escherichia coli, est

assurée via l'“addiction module,”qui est constitué par le système pemI-pemK composé d'une paire de gènes codant une toxine stable et un inhibiteur instable, comme beaucoup de systèmes de maintien de plasmides. Il est, en effet, porté par le plasmide R100. La toxine PemK inhibe la traduction des messagers. On vient de montrer que PemK est, en réalité une endoribonucléase qui pulvérise les messagers en s'attaquant .aux ARNs simple brin au niveau du A de AUH (H étant C, A ou U). On retrouve des homologues de pemK chez de nombreuses autres bactéries. J Zhang et al.; The Journal of Biological Chemistry 279 (14MAY04) 20678-20684.

22. Les récepteurs couplés aux protéines G

(GPCRs) sont très répandus dans les processus biologiques. Ils possèdent de grands domaines hydrophobes, ce qui ne facilite pas leur purification qui, par ailleurs, entraîne une perte de la conformation normale. L'exhibition de bibliothèques de peptides sur différents supports commodes bactériens, phagiques, viraux ou sur levure est largement utilisé pour détecter des affinités de ces peptides. On ancre les peptides gâce à des protéines transmembranaires où on insère le peptide dans une boucle exposée à l'extérieur de la membrane. On peut également utiliser des fragments de petite taille de ces protéines, ou des protéines chimériques adaptées. On a également utilisé des bactéries magnétiques (comme Magnetospirillum magneticum AMB-1) pour ancrer des protéines sur leurs chaînes de magnétosomes constitués de magnétite (Fe3O4) emballée par une membrane. On disrupte la cellule et on récupère les magnétosomes pour essayer l'activité des protéines ainsi immobilisées.

T Yoshino et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (MAY04) 2880-2885, viennent d'ancrer des GPCRs sur des nanoparticules magnétiques utilisant la protéine Mms16 de la bactérie magnétique comme ancre, plutôt que la protéine classique de transport du fer MagA utilisable pour les protéines normalement soluble, mais inadaptée aux protéines transmembranaires comme les récepteurs . La protéine A de 16-kDa, Mms16, ressemble à des petites GTPases impliquées dans la formation de vésicules intra-cellulaires, et elle est étroitement associée à la membrane des magnétosomes. L'essai a d'abord été réalisé avec une protéine classique non réceptrice, la luciférase, puis sur les récepteurs de la dopamine.

Les Productions Végétales Les gènes et les génomes

25. Des chercheurs malais décrivent la diversité génétique des palmiers à huile africains (Elaeis guineensis) de 26 populations conservées par le Malaysian Palm Oil Board correspondant à dix pays africains ainsi qu'un Deli de type dura Cette dernière variété est relativement productive en Asie (moins en

Afrique), introduite en Indonésie en 1848 sous forme de quatre plants seulement et en Malaisie en 1911 comme une plante ornementale et utilisée dans la plupart des programmes d'hybridation en Asie du sud-est.

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La variété génétique de ces populations a été mesurée au niveau de sept loci enzymatiques. A Hayati et al.; Theoretical & Applied Genetics 108 (MAY04) 1274-1284.

Les flux géniques entre populations sont faibles. Ils indiquent les populations qui seraient à utiliser dans l'amélioration et celles qui constituent une réserve de variété.

26. Des chercheurs japonais ont recherché des

allèles du gène waxy (Granule-Bound Starch Synthase I déficiente entraînant une absence plus ou moins complète d'amylose) chez 168 cultivars communs de blé. M Saito et al.; Theoretical & Applied Genetics 108 (MAY04) 1205-1211. En effet, le blé waxy présente un grand intérêt pour les applications en boulangerie-patisserie ou, du fait de la présence quasi exclusive d'amylopectine, le phénomène de rétrogradation responsable du rassissement est retardé. Les chercheurs japonais s'intéressent, eux aux nouilles Udon qui exigent des blés partiellement waxy. Les blés tendres, hexaploïdes, en possède donc trois versions dont une, deux ou trois peuvent être déficientes. Des mutations dans chacune des trois garnitures sont connues (A1, B1 et D1).

Le cultivar Kanto 107 possède des mutations dans deux de ces gènes, A1 et B1. Tous les cultivars dépourvus de la protéine Wx-B1 correspondent à la

mutation Kanto 107. Les cultivars dépourvus de Wx-A1 possède la même mutation que Kanto 107, mais différente de celle de Turkey Wx-A1. Il s'agit, dans ce dernier cas, d'une insertion de 173 pb dans un exon, mais en un site différent. Cette insertion est flanquée par une répétition de 8 pb indiquant l'intervention d'un transposon de type II. Le gène Wx- D1 du cultivar Bai Huo (qui a été introduit en 1999 aux Etats-Unis dans les programmes d'amélioration) possède une délétion de 588 pb et une insertion de 12 pb.

27. Le riz glutineux est particulièrement apprécié

en Asie du sud-est, malgré son rendement plus faible. Il correspond à une mutation waxy. Deux allèles sont présents chez les riz normaux japonica (Wxa) et indica (Wxb). La différence entre Wxa et Wxb est liée à un épissage alternatif causé par la substitution AGGT en AGTT au niveau site donneur dans le premier intron du gène Wx. Les variétés waxy du riz possèdent des allèles dérivés de Wxa et Wxb, mais c'est surtout le dérivé de Wxb qui est prédominant et sa distribution est indépendante de la différence indica (plus tropical)/japonica (plus tempéré). Les parents sauvages du riz possèdent tous l'allèle AGGT. S Yamanaka et al.; Theoretical & Applied Genetics 108 (MAY04) 1200-1204.

Le développement 30.*** Les consommateurs sont attirés par les fruits

sans pépins, même si le goût en pâtit. La mandarine satsuma (Citrus reticulata parfois appelée Citrus unshiu selon que l'on utilise la nomenclature de Swingle ou de Tanaka) est une petite mandarine du Japon avec une chair pâle et sans pépins, et qui mieux est, dont la peau s'enlève facilement (autre requête des consommateurs). Son goût est voisin de celui de la tangerine, ce qui n'est pas étonnant,car c'est un hybride Citrus reticulata X Citrus aurantium. L'absence de pépins est liée à une stérilité cytoplasmique d'origine mitochondriale.

L'hybridation somatique a été largement utilisée chez les agrumes pour contourner les difficultés causées par la polyembryonie nucellaire, les stérilités et les longues périodes juvéniles (sans reproduction) qui gênent ou ralentissent les croisements.

Normalement les protoplastes de mésophylle ne se divisent pas et ne régénèrent pas de plants. Malgré tout, on peut obtenir des régénérations en fusionnant ces protoplastes avec des protoplastes de cals embryogènes. Cette régénération nécessite la formation de cybrides avec noyau du parent foliaire et mitochondries du parent embryogène. La nature des chloroplastes importe peu. On retrouve le même patron chez tous les agrumes allotétraploïdes. WW Guo et al.; Plant Cell Reporter 22 (MAY04) 752-758. L'absence de pépins n'est pas gênante car la

plupart des agrumes donnent volontiers des fruits sans fécondation (parthénocarpie).

32. La vigne présente, comme pas mal de plantes

pérennes, une phase juvénile et une phase adulte où elle fructifie. La floraison ne commence que deux ans après le passage à la phase adulte après 3 à 6 ans de phase végétative. Des chercheurs de Colmar, Strasbourg et Versailles ont analysé l'expression des gènes homologues chez la vigne (orthologues) des gènes LEAFY, APETALA1 (AP1), AGAMOUS (AG), TERMINAL FLOWER1(TFL1) et SEPALLATA3 (SEP3) au cours de cette transition. D Joly et al.; Plant Science 166 (JUN04) 1427–1436. L'expression de VvLEAFY et VvTFL1 (Vv pour Vitis vinifera) est détectée juste après la germination dans le méristème apical caulinaire des plantules et, plus tard, dans les bourgeons dormants des plantes juvéniles. Chez les plants adultes, les bourgeons latents sont formés dès la première saison adulte, mais ne se développe qu'après la période hivernale. Les plants de vigne au champ présentent une expression constante de VvLEAFY durant deux ans, même quand la température descend à –10°. Ce n'est que le printemps suivant que les bourgeons expriment VvTFL1, VvLEAFY, VvAP1, VvAG et VvSEP3.

La Physiologie des Plantes 33.*** COP1 (COnstitutive Photomorphogenesis 1)

est un répresseur dimère des effets des signaux lumineux chez Arabidopsis. Il intervient dans le noyau en dégradant, via l'ubiquitine, des facteurs de transcription. COP1 possède, non seulement un

signal de ciblage nucléaire, mais aussi un signal d'exportation nucléaire riche en leucines inséré dans un domaine impliqué dans la dimérisation de la protéine. C Subrmanian et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (27APR04)

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6798-6802 ont voulu suivre les rôles respectif du signal d'exportation et du domaine de dimérisation dans la régulation de l'activité de COP1 in vivo. C'est l'exclusion nucléaire de COP1 qui est responsable, de l'arrêt de son effet.

34.*** Des chercheurs chinois ont étudié la

protéine kinase se liant à la calmoduline du tabac (NtCBK2) durant le développement de la plante et sous stress salin. W Hua et al.; Plant Science 166 (MAY04) 1253–1259.

L'expression de NtCBK2 est fortement stimulée après 10 minutes de traitement hypersalin ou par l'acide gibbérellique, avec un maximum une trentaine de minutes après. L'expression est fortement stimulée dans les organes floraux. Les auteurs ont utilisé l'hybridation in situ pour suivre l'expression.

L'expression de la calmoduline bovine chez le tabac permet une germination plus rapide sur sols salés. P Olsson et al.; Plant Science 166 (JUN04) 1595–1604.

Ce genre de caractéristique est intéressant, car les cultures doivent démarrer vite pour échapper à la phase critique de la germination, particulièrement dans des sols défavorables.

35.*** Le riz est d'une très grande sensibilité aux

stress salins, même s'il existe des riz d'estuaires qui poussent dans des eaux très saumâtres. Les mesures des ions présents dans la plante sont difficiles car les conditions du milieu (humidité, insolation, etc…) qui modifient la transpiration et favorisent le pompage sont très fluctuantes. Des chercheurs de l'IRRI ont analysé la diversité génétique de riz présentant différentes adaptations aux conditions salines. GE Brown et al.; Plant Science 166 (MAY04) 1275–1285.

36.*** Le lin est de plus en plus une plante dont on

vante les propriétés diététiques précisément du fait de la teneur de la graine en acides gras essentiels [ω-6 (linoléique) et ω-3 (linolénique)]. Des chercheurs canadiens ont cloné toute une série de gène de synthèse des acides gras chez le lin. B Fofana et al.; Plant Science 166 (JUN04) 1487–1496. Ils ont, par ailleurs, étudié leur expression au cours de la germination de la graine.

Les données laissent augurer qu'il doit exister d'autres membres de chacune de ces deux familles. La teneur en acides gras de la graine à la germination suggère une forte activité des enzymes de condensation et des ∆12 et ∆15 désaturases à ce stade du développement.

37. Brassica juncea est une version tétraploïde des

moutardes, issue d'un croisement entre Brassica rapa

et Brassica nigra qui a dû se dérouler en Asie. Si on y exprime le gène ADS1 d'Arabidopsis codant une acyl-CoA ∆9 désaturase d'Arabidopsis on constate une diminution significative des teneurs des graines en acides gras saturés [surtout palmitique (16:0), stéarique (18:0), mais aussi arachidique (20:0), behénique (22:0) et lignocérique (24:0)]. KN Yao et al.; Plant Biotechnology Journal 1 (MAY03) 221-229.

Mais la décroissance de la teneur en acides saturés n'est pas toujours accompagnée d'une augmentation des acides mono-insaturés comme l'acide oléïque (18:1). Certains d'entre eux sont même en diminution comme les acides palmitoléique (16:1), gondoïque (20:1) et nervonique (24:1). Il est donc difficile de prévoir les résultats de transgenèse dans le cas des synthèse d'acides gras, car elles dépendent probablement de régulations complexes.

39. Un consortium de chercheurs israéliens et de

l'INRA à Avignon s'est penché sur la détection, par cartographie, des gènes déterminants dans des locus QTLs. Ils utilisent la synthèse des caroténoïdes (plus particulièrement le lycopène) de la tomate comme système modèle. La recherche des gènes candidats est basée, dans ce cas, sur des sondes correspondant à diverses enzymes impliquées dans cette synthèse. Soixante quinze lignées ayant subi une introgression homozygote d'un seul segment défini par un marqueur RFLP de Lycopersicon pennellii ont permis de préciser certains des gènes impliqués. Trois mutations déjà connues ont été caractérisées (elles concernent des gènes de synthèse, et les séquences associée à cette synthèse ont été placées dans 23 loci. Mais la conclusion de cette étude est qu'il y a probablement bien plus que les gènes de synthèse qui sont impliqués dans la couleur de la tomate. D Zamir et al.; Plant Biotechnology Journal 1 (MAY03) 195-207.

40. La couleur des grains de raisin est due à

l'accumulation d'anthocyanes dans la peau du raisin. On pense que les raisins blancs sont issus de mutations indépendantes dans des raisins noirs, mais on ne les connaît pas. Des mutations en sens inverse existent également et ont eu lieu dans des bourgeons (comme on greffe la vigne on peut les généraliser). Des chercheurs les ont recherchées dans une vigne adaptée aux régions nordiques (Etat de New York,Canada et Japon), Vitis labruscana. Des chercheurs japonais ont constaté qu'une variété blanche dérivée de celle à grains noirs (Kyoho) résulte d'un insertion d'un rétrotransposon Gret1-like dans un des trois gènes Myb-like qui régulent la synthèse des anthocyanes. S Kobayashi et al.; Science 304 (14MAY04) 982.

Les Symbioses 41.*** Azotobacter vinelandii est une bactérie

Gram- strictement aérobie très répandue dans les sols. Elle présente des caractéristiques intéressantes comme pouvoir se multiplier sur carbohydrates alcools et acides organiques, de produire des alginates et surtout de fixer l'azote atmosphérique. Elle possède, en effet, trois nitrogénases qui contrairement à tous les autres

diazotrophes fonctionnent en présence de l'oxygène atmosphérique car la bactérie les protège en respirant à fond. C'est dons une "bête" intéressante. C'est une bactérie voisine des Pseudomonas. H Rediers et al.; Microbiology 150 (MAY04) 1117-1119.

Si la capacité de fixer l'azote atmosphérique était considérée comme particulière à Azotobacter

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vinelandii, on a pu caractériser des Pseudomonas qui en sont capables. Il est vraisemblable que c'est une acquisition par transfert horizontal. L'organisation de la région nifH d'A.vinelandii est, en effet, identique à celle de Ps.stutzeri A15.

42. La glutamine synthétase (GS) est une enzyme

clé qui permet l'assimilation de l'azote et son incorporation dans la glutamine. Des cDNAs de GS de Glomus mosseae et Glomus intraradices, deux champignons mycorhiziens arbusculaires. Les sources d'azote modulent l'activité de la GS, mais pas sa production.

43.*** Les Bacillus colonisant la rhizosphère du

colza, de l'orge et d'Arabidopsis ont été caractérisés par ON Reva et al.; FEMS Microbiology Ecology 48 (MAY04) 249–259.

Ils ont isolé cinq souches de Bacillus subtilis subsp. subtilis, trois souches apparentées à B.subtilis subsp. spizizenii et deux souches de B.mojavensis. Les sept dernières sont proches, mais distinctes de Bacillus amyloliquefaciens. Ces dernières semblent les mieux adaptées à la colonisation des racines.

Mais la classification des Bacillus subtilis est un peu floue, et c'est certainement un complexe de plusieurs espèces, dont Bacillus atrophaeus, Bacillus mojavensis, et Bacillus vallismortis. Comme B.subtilis et B.amyloliquefaciens sont difficilement distinguables, il est probable que la référence à B.subtilis dans de nombreuses études de la microflore endophyte ne sont pas allé assez loin dans la caractérisation des espèces observées (cela est probablement vrai pour les cocktails biopesticides vendus sous la référence de B.subtilis si on se réfère aux brevets correspondants).

44.*** Sinorhizobium meliloti est une α-

protéobacterie fixant l'azote dans des nodules de plusieurs Légumineuses comme Medicago sativa. Elle a besoin de fer et de manganèse pour assurer cette fonction tout en se prémunissant des effets toxiques de ces métaux (oxydations intempestives). Ce pompage doit donc être étroitement régulé. TC Chao et al.; Journal of Bacteriology 186,n°11 (JUN04) 3609-3620 analysent une région chromosomique de S.meliloti comportant l'opéron sitABCD qui code vraisemblablement un transporteur du fer et le gène régulateur fur (ferric uptake regulator). Les auteurs ont examiné, grâce à un réseau d'expression correspondant à l'ensemble du génome de la bactérie, cette régulation.

45. L'agriculture traditionnelle mexicaine utilise les

tiges du maïs pour support des cultures intercalaires de haricot. Rhizobium etli, permettant une fixation nodulaire de l'azote atmosphérique chez le haricot Phaseolus vulgaris, est, par ailleurs, un endophyte du maïs.

Des chercheuses de Cuernavaca ont analysé la compétitivité respective des diverses souches coexistant dans les sols des champs de maïs, où l'alternance avec le haricot est pratiquée, pour la colonisation des racines du maïs. M Rosenblueth et al.; Archives of Microbiology 181 (MAY04) 337-344. Cette compétitivité est accrue pour les souches, comme Ch24-10, qui résistent aux exsudats racinaires (6-méthoxy-2-benzoxazolinone) anti-microbiens du maïs.

Les Pathogènes des Plantes et les Mécanismes de Défense 46. Nectria haematococca est un pathogène du pois.

Des chercheurs d'Orsay ont caractérisé le gène, pksN, d'une nouvelle polycétide synthase qui est responsable de la coloration rouge du périthèce. Elle rassemble, comme les PKS de type I, des domaines responsables des activités ß-cétoacyl synthase, acyltransférase, thioésterase, ainsi que deux protéines "acyl-carrier". L'inactivation du gène ne cause aucune modification sensible du phénotype hors de ma couleur du périthèce. S Graziani et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (MAY04) 2984-2988.

47.*** Les pertes de récoltes dues aux insectes

herbivores sont estimées à 10–20% pour les principales cultures. Une revue de N Ferry et al.; Current Opinion in Biotechnology 16 (APR04) 155-161 se penche sur l'ingénierie des cultures ayant pour but de stimuler les résistances endogènes. L'expression des δ-endotoxines de Bacillus thuringiensis (Bt) à partir du milieu des années 90 a été un succès commerciale dans plusieurs pays avec plus de 10 millions d'hectares. Mais ce n'est probablement pas suffisant.

La durabilité de ce type de résistance reste encore un objet de débats pas toujours de bonne fois. Mais pour l'instant on n'en a pas caractérisées au champ.

L'empilement de gènes est déjà commercialisé chez des maïs avec deux gènes de résistance par δ-endotoxines au corn rootworm (Diabrotica virgifera).

La perception de la présence d'un insecte est détectée via ses sécrétions orales. La production locale et généralisée d'inhibiteurs protéiques est une des premières réponses à ce signal. Les productions de substances toxiques ou repoussantes font suite.

Systémine, jasmonate, acide oligogalacturonique et peroxyde d'hydrogène sont des signaux intracellulaires commandant les défenses. Les réseaux d'expression ont souligné l'activation simultanée des voies de l'acide salicylique, de l'éthylène des cytokinines et surtout de l'acide jasmonique durant une attaque par un herbivore. Ces voies agissent en réseau et non d'une façon linéaire.

Le problème, dans ce cas, est qu'il est difficile d'imiter le réseau de mécanismes des défenses, dont aucun n'est pleinement efficace, mais dont l'ensemble l'est généralement. Chez Arabidopsis, ils commandent plus de 700 messagers différents. Chez le Tabac ce sont environ 500 messagers. Mais la plupart des gènes exprimés ont une fonction inconnue, et il est vraisemblable que beaucoup de ces gènes ne contribuent pas directement aux défenses (la baisse

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d'activité des gènes de photosynthèse en est un exemple).

Il faut distinguer les insectes herbivores des insectes piqueurs comme les homoptères (pucerons, etc…) qui vont chercher leur nourriture dans le phloème des plantes. Ils font peu de dégâts à la structure de la plante et donc ne stimulent directement que très peu les réactions aux blessures. Les réactions des plantes s'apparentent, dans ce cas, beaucoup plus aux réactions aux pathogènes avec des gènes spécialisés de réponse à un éliciteur précis de l'insecte.

Les auteurs abordent également l'émission de substances volatiles qui sont parfois communes à plusieurs plantes et peuvent servir à la fois de déterrents, d'alerte des plantes voisines et d'attracteurs pour des ennemis des herbivores. On peut, de ce point de vue, modifier l'émission des terpènes. Voir les bulletins de Juin 2003 §56, Juillet §38, Octobre §35 sur ce sujet,

La revue renvoie à plusieurs autres revues plus spécialisées.

48. Les Geminivirus sont des virus mono ou

bipartites à ADN simple-brin. Chez les bipartites, le DNA-A est consacré à l'appareil réplicatif et à la protéine de capside pour l'essentiel. La transcription est complexe et peut, selon les promoteurs, donner lieu à une expression généralisée et permanente, ou à un expression ciblée.

Des chercheurs mexicains et cubains ont montré qu'une séquence de 132 nucléotides (entre les nucléotides 2454 et 2585) de l'ADN-A du Tomato mottle Taino virus (ToMoTV) DNA-A, est suffisante pour une expression spécifique des vaisseaux. PL Ramos et al.; Virus Research 102 (15JUN04) 125-132. Ce virus est très répandu sur tomate et pomme de terre à Cuba.

49. Les virus ARNs sont condamnés à utiliser des

"suppresseurs de silencing". C'est particulièrement vrai chez les plantes ou la majorité des virus sont de ce type. Ils construisent des ARNs doubles-brins au cours de leur réplication et induisent donc ce type de défense. Une revue de BM Roth et al.; Virus Research 102 (01JUN04) 97-108 est consacrée à ces tactiques virales.

L'étude de maladies virales présentant une synergie entre deux virus différents a révélé cette tactique. La protéase dite Helper Component proteinase (HC-Pro) des potyvirus assure l'un des types de cette synergie. Son expression dans des plantes transgéniques permet à toute une série de virus hétérologues de s'accumuler dans des plantes, où il ne sont normalement pas virulents. Tout se passe comme si HC-Pro bloque un des processus de défense, et c'est le silencing. On a, depuis révélé plusieurs autres acteurs de ce type. Le tableau 1 de la revue résume les différents suppresseurs viraux de "silencing" avec les arguments en faveur d'une telle fonction.

Chez les plantes on constate, de plus une course entre le virus et une substance mobile (encore à caractériser) qui se répand dans la plante dès le

début de l'infection. Certains des facteurs inhibant le "silencing" systémique (généralisé).

La revue s'attarde sur les techniques de révélation de la fonction. Elles ont permis une caractérisation encore rudimentaire du mécanisme d'action, et une identification des suppresseurs, mais on observe, quand même, des contradictions entre essais différents. On ne constate, de toute façon aucune similitude entre les différents supresseurs caractérisés, ce qui indique vraisemblablement des mécanismes différents.

On peut cependant distinguer deux types de suppresseurs : ceux qui interviennent sur la formation et le métabolisme des petits ARNs impliqués dans le "silencing", et ceux qui les séquestrent. C'est le cas de P19 des Tombusvirus (Tomato bushy stunt virus). On ne comprend, de toute façon, pas tout. Ainsi HC-Pro affecte l'accumulation non seulement des siRNAs assurant le "silencing", mais également les miARNS endogènes régulateurs du développement.

Beaucoup de suppresseurs bloquent le "silencing" généralisé. Ce n'est pas le cas du puissant suppresseur qu'est HC-Pro. La protéine 2b du virus de la mosaïque du concombre a plutôt un effet sur le "silencing" généralisé.

On peut se poser la question de savoir si tous les virus disposent de suppresseurs de "silencing". Probablement non, car le fait que HC-Pro aide tant d'autres virus dans le cadre d'une co-infection plaide en faveur du contraire. Il doit exister d'autres mécanismes de défense et d'autres moyens de les contourner.

50.*** Les viroïdes sont, un peu comme les prions,

des énigmes moléculaires. Ce sont des ARNs circulaires non codants supertorsadés mais bigrement pathogènes qui se répliquent par le mécanisme dit du "cercle roulant" qui débite le génome comme des saucissons, puis les circularise.

La réplication des viroïdes comporte une copie en tandem des ARNs (+) servant de modèle pour une nouvelle copie. Les multimères en tandem sont clivés en unités de viroïdes qui sont ensuite circularisés.

Ce schéma asymétrique est celui du viroïde nucléaire Potato spindle tuber viroid (PSTVd ou viroïde du fuseau de la pomme de terre). L'Avocado sunblotch viroid (ASBVd) présentent une division symétrique où les multimères (-) donnent une forme circulaire (-) qui est ensuite répliquée en donnant le cercle (+). Le clivage des multimères (+) et (-) est autocatalytique pour les Avsunviroïdes et assuré par une ribozyme en marteau. L'ARN ligase est probablement cellulaire.

Arabidopsis a été transformé, par des chercheurs valenciens, avec des cDNAs exprimant des transcrits dimériques (+) de Pospiviroïdes (PSTVd) et Avsunviroides (ASBVd), qui se répliquent, respectivement, dans le noyau et dans le chloroplaste. JA Daros et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (27APR04) 6792-6797. On observe toujours la formation normale de monomères (+) circulaires, ce qui indique qu'Arabidopsis possède l'équipement nécessaire (RNase et RNA ligase). On vient de montrer que le Hop stunt viroid (HSVd), et

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probablement les autres Pospiviroïdes peuvent subir une réplication complète chez Arabidopsis, mais que le processus n'est pas assez efficace pour généraliser et révéler l'infection.

52.*** Solanum torvum est une proche parente

d'origine indienne de l'aubergine (S. melongena). Elle présente, malgré sa tendance à être envahissante, un intérêt avec sa tolérance à Ralstonia solanacearum qui pourrait être transférée dans l'aubergine. Mais elle peut contenir des alcaloïdes fâcheux qu'il faudrait éliminer dans le cadre du principe de précaution, ce qui n'est pas sans un coût appréciable en temps et argent. De plus les hybrides initiaux (F1) sont stériles pour aggraver la situation. Elle est, cependant, déjà utilisée comme porte greffe pour des cultivars sensibles. Ceci est démontré, avec la grande homogénéité génétique (par RAPD) des accessions de la Réunion par C Clain et al.; Plant Science 166 (JUN04) 1533–1540.

53. Des chercheurs indiens décrivent l'introduction,

par transgenèse, d'une résistance aux insectes piqueurs comme Nilaparvata lugens (brown planthopper) et Empoasca decipiens (green leafhopper) chez le riz indica. Ils ont exprimé le gène

de la célèbre lectine antiaphides de Galanthus nivalis (une Amaryllidacée) commandée par un promoteur phloème spécifique. Une résistance plus grande a été observée contre les deux insectes. KV Rao et al.; Plant Biotechnology Journal 1 (MAY03) 231-240.

54. Un article de F Tenllado et al.; Virus Research

102 (01JUN04) 85-96. discute de l'utilisation de l'interférence ARN (RNAi, ici le PTGS pour Post-Transcriptional Gene Silencing) pour la lutte contre les virus végétaux. Ce mécanisme implique une reconnaissance par hybridation, de la cible et le déclenchement d'une dégradation séquence spécifique des ARNs viraux. Les auteurs ont utilisé les données de la RNAi chez les animaux pour utiliser des ARNs doubles brins, administrés de façon exogène, pour interférer spécifiquement avec la multiplication des virus chez les plantes.

55. Des chercheurs de Grignon analysent sur le plan

épidémiologique les conséquences des pratiques agricoles sur les attaques du complexe de Microdochium et Fusarium et la production de mycotoxines. A Champeil et al.; Plant Science 166 (JUN04) 1389–1415.

Les plantes recombinantes 55. On trouvera dans ME Horn et al.; Plant Cell

Reporter 22 (MAY04) 711-720, auteurs appartenant à Prodigene, une analyse des produits pharmaceutiques exprimés dans les plantes transgéniques (molecular farming) et les techniques utilisées. Les premiers produits sont maintenant commercialisés.

La production dans les plantes élimine un certain nombre de risques (mais peut en créer d'autres), mais surtout est considérée comme bien plus économique que celle en fermenteurs, bioréacteurs ou dans des animaux, malgré le coût de la purification (qui existe dans tous les cas). Le choix de la plante et du site tissulaire de production est crucial de ce point de vue.

Le premier marqueur utilisé dans les recherches sur la transformation (glucuronidase) est maintenant un produit commercialisé obtenu par cette technique. Les premiers anticorps humains ont été produits en 1988 et la première protéine produite (l'avidine) dans le but expressément avoué de l'extraire, de la purifier et de la commercialiser dans un but analytique date de 1997. L'aprotinine destinée à diminuer les inflammations d'origine chirurgicale produite depuis 1999 ne devrait pas tarder à être autorisée à la commercialisation.

Il existe quatre stratégies. La première est une transformation nucléaire stable donnant une plante cultivable en champ ou en serre. La seconde en dérive mais consiste en une transformation plastidiale. La troisième est une transformation avec expression transitoire. La dernière consiste à utiliser la plante productrice en système hydroponique où on récupère le produit dans le milieu de culture, un peu comme dans un bioréacteur. Les auteurs analysent systématiquement les avantages et inconvénients de chacune des stratégies, avec une vue un peu partiale

pour les techniques de leur firme, ce dont on peut les excuser.

56. Les racines du manioc (Manihot esculenta)

fournissent une grande part de l'alimentation de près de 500 millions de personnes, surtout dans les pays en développement d'Afrique. Toutes les parties de la plante contiennent des cyanoglucosides (linamarine ou acétone cyanohydrine) très toxiques qui jouent un rôle important dans la résistance aux insectes, et on ne peut pas les éliminer complètement pour cette raison. On le fait lors de la préparation des aliments par lavage et cuisson pour obtenir, par exemple, le tapioca.

L'hydroxynitrile lyase (HNL) libère, dans les parois et les laticifères des feuilles, le cyanure de l'acétone cyanohydrine. Les racines n'en possèdent pratiquement pas. La surexpression du gène de l'enzyme sous la commande d'un double promoteur 35S du CaMV permet une surproduction de l'enzyme de 13 fois dans les racines. Ceci permet d'améliorer l'élimination du cyanoglucoside lors de son traitement et donne un produit moins dangereux tout en conservant la protection contre les insectes herbivores. D Siritunga et al.; Biotechnology Journal 2 (JAN04) 37-43.

57***. Le niveau des folates est très bas dans les

céréales et dans les racines et tubercules. Ils sont par contre plus abondants dans les légumes verts. Les carences sont surtout manifestes dans les pays dits en développement dont Roger Beachy s'est souvent préoccupé.

L'enrichissement en folate des plantes consommées est un des objectifs visés par ingénierie métabolique. Les folates sont synthétisés à partir des ptérines et de l'acide para-amino-benzoïque, donnant

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de dihydroptéroate, précurseur direct du dihydrofolate. Le groupe de Beachy associés à Dupont Agriculture and Nutrition a supposé que l'étape contrôlée par la GTP cyclohydrolase-1, catalysant la première étape

dédiée de la synthèse des ptérines est limitante. T Hossain et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (06APR04) 5158-5163.

Les Insectes et leur Maîtrise 58. On peut penser que des fluctuations dans les

capacités à réaliser une interférence ARN (RNAi) pourrait expliquer pourquoi certains moustiques sont des vecteurs de virus et d'autres pas (pourquoi ne pas céder à la mode).

La RNAi existe chez les Aedes transmettant les arboviruses. Un virus Sindbis recombinant exprimant un fragment d'ARN du virus de la dengue 2 (non apparenté) interfère avec la réplication de ce dernier chez Aedes aegypti par un "silencing" analogue à celui des plantes. Par ailleurs, la transfection de cellules C6/36 (d'Aedes albopictus) par des ARNs doubles brins dérivant d'un génome d'arbovirus interfère avec la réplication du virus homologue. Enfin, un ARN en épingle à cheveux spécifique du virus de la dengue 2, exprimé à partir d'un plasmide donne des lignées C6/36 résistantes. I Sanchez-Vargas et al.; Virus Research 102 (01JUN04) 65-74. Les auteurs son en train de monter des moustiques exprimant ces résistances.

59.*** La génétique de la résistance aux

insecticides fait l'objet d'une revue de RH ffrench-Constant et al.; Trends in Genetics 20 (MAR04) 163-170.

On a, au cours des dernières années, caractériser les gènes des cibles de la grande majorité des insecticides. On dispose de la séquence de plusieurs génomes d'insectes et on a identifié et cloné plusieurs gènes de résistance chez la Drosophile sur laquelle les auteurs focalisent leur attention. .

Les résistances multigéniques comme celles faisant jouer les estérases, cytochrome P450s et glutathione-S-transférases ont ainsi pu être élucidées.

Toutes ces études permettent de répondre, au moins partiellement, à trois questions sur le nombre des gènes impliqués, les mutations naturelles existantes, et leurs fréquences d'apparition dans la nature.

Les trois principales cibles visées par les insecticides conventionnels sont les canaux ioniques pilotés par leurs ligands, les canaux ioniques régulés par le potentiel transmembranaire et l'acétylcholinestérase.

Les canaux ioniques pilotés par leurs ligands, sont normalement régulés par l'acétylcholine ou l'acide γ-amino-butyrique (GABA), et convertissent le signal du ligand en signaux électriques en ouvrant le canal.

Le récepteur du GABA est la cible des insecticides cyclodiènes (comme la dieldrine) et phénylpyrazoles dont fait partie le fipronil qu'on accuse de tous les maux. Le gène codant la sous-unité du récepteur visé a été cloné à partir d'un mutant naturel de Drosophila Rdl (Résistant à la dieldrine).

La résistance est due à la substitution, par une sérine ou une glycine, de l'alanine 302. C'est précisément le site de fixation de l'insecticide. C'est donc une résistance par modification de la cible. On retrouve le même site de résistance chez plusieurs

autres insectes. C'est donc un bel exemple d'évolution parallèle. On a fait de même pour le fipronil. Mais la substitution d'un seul acide aminé rend l'apparition de résistances assez probable.

Ces canaux ioniques sont également la cible des néonicotinoïdes (analogues de la nicotine) et des ivermectines, mais on ne connaît pas encore le site exact dans la cible moléculaire. Là encore la Drosophile a permis d'avancer. Les néonicotinoïdes agissent sur le récepteur nicotinique à plusieurs sous-unités de l'acétylcholine. Plusieurs de ces sous-unités ont été clonées chez la Drosophile et d'autres insectes.

Les cibles des ivermectines et de l'acide nodulisporique ont été identifiées grâce à des mutants Drosophila résistants à l'acide nodulisporique. Ce sont des mutants où un seul acide aminé a été substitué dans le canal ionique piloté par le glutamate, et plus précisément dans la sous-unité GluCla.

Un exemple de canal ionique piloté par le potentiel transmembranaire est le canal à sodium qui est la cible du DDT et des pyréthroïdes. C'est encore une mutation ponctuelle qu'on retrouve chez de nombreux insectes.

L'acétylcholinesterase est la cible des organophosphorés et des insecticides carbamates. Le premier gène d'acétylcholinestérase (Ace) a été cloné chez Drosophila. Plusieurs mutations ponctuelles isolées ou combinées déterminent une insensibilité de la cible aux insecticides. La Drosophile ne possède qu'un seul gène Ace alors que les moustiques en possèdent deux différents, qu'on a retrouvé dans le génome d' Anopheles gambiae, ce qui complique les choses. Un seul de ces gènes, Ace, a pu être associé à une résistance chez Culex pipiens. Tous les C.pipiens ont le même génotype de résistance, avec une sérine à la place de la glycine 119 dans le site actif de l'enzyme. On retrouve la même substitution chez les A.gambiae résistants.

60. Les insectes sont capables comme certains

autres animaux de prélever les métabolites secondaires des plantes qu'ils dévorent pour s'en faire une protection. T Hartmann; Planta 218 (MAY04) 1-4. Voir également le Bulletin de Juin §75.

C'est le cas des alcaloïdes pyrrolizidines (PAs) qui sont de puissants déterrents et existent sous deux formes une forme pro-toxique et une forme non toxique N-oxyde. La plupart des plantes produisent et stockent les PAs sous cette forme non toxique. Ces derniers sont facilement réduits dans le tube digestif des herbivores et passent dans le sang ou l'hémolymphe. Ils deviennent alors un substrat pour les cytochromes P450 oxydases. Les produits d'activation des PA, des intermédiaires pyrroliques réactifs, sont hépatotoxiques pour les Vertébrés et mutagènes pour les insectes. Certains insectes ont su tourner cet obstacle. Les chenilles du papillon arctiide

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Tyria jacobaeae séquestrent les PAs prélevés sur sa plante préférée, Senecio jacobaea et conserve ce pactole jusqu'au stade adulte. Ceci leur permet, au passage, de se nourrir sur des plantes dépourvues de ces alcaloïdes tout en restant protégées. C'est un atout pour des espèces polyphages. Mieux, un arctiide voisin, Utetheisa ornatrix, transmet ce trésor à la femelle au cours de la copulation et ces alcaloïdes sont transmis aux œufs. Ces PAs modulent fortement le comportement sexuel. Les mâles indiquent, comme dans une party américaine, comme ils sont riches en émettant d'autant plus de la phéromone hydroxydanaidal que leur charge en PAs est élevée.

Les PAs sont de puissants phagostimulants pour la plupart des chenilles d'arctiides sachant stocker ces toxines sans en être indisposées. Les espèces polyphages de ce type sont extraordinairement sensibles à la présence de plantes porteuses des PAs. Les papilles des chenilles d'Estigmene acrea détectent 10-12 M de ces alcaloïdes et donc repérer les plantes productrices avec facilité. Tout le système nerveux est orienté dans le sens du stockage le plus efficace et en particulier si la stimulation du récepteur dure trop longtemps, il se désensiblise et la chenille se sent autorisée à dévorer une autre plante sans alcaloïde dès que le stockage est suffisant.

Tout cet édifice repose sur la capacité de maintenir les PAs sous la forme de N-oxydes non toxiques. Les espèces adaptées possèdent une sénécionine N-oxygénase (SNO) qui est une mono-oxygénase NADPH-dépendante, mais flavine dépendante, qui assure ce maintien.

Les coléoptères chrysomélidés se défendent par des projections issues de glande du dos du premier segment du thorax. Les boules puantes ainsi engendrées sont généralement le produit propre de l'insecte, mais il arrive que l'insecte les emprunte aux plantes. C'est le cas d'Oreina qui se nourrit d'Adenostyles alliariae, et d'Asteracées. Elle est capable d'absorber les PAs de son menu sans les réduire et les PAs passent sans transformation dans son hémolymphe. Elle les dirige vers ses glandes prothoraciques qu se chargent de les projeter sur les agresseurs. La chrysomèle choisit, d'ailleurs, parmi les PAs absorbées et un fort gradient de concentration indique que l'insecte utilise un transport actif spécialisé.

61.*** La destruction des tissus larvaires lors de

la métamorphose des insectes dits holométaboles (métamorphoses complètes avec un stade nymphe) est une apoptose coordonnée. Cette apoptose dépend de l'action de l'hormone stéroïdienne appelée ecdysone qui régule les niveaux des facteurs pro- et anti-apoptotiques. L'ecdysone se lie à son récepteur hétérodimérique associant le récepteur proprement dit, EcR à Ultraspiracle pour assurer la transcription des gènes commandés par l'ecdysone. On vient de montrer qu'une histone-arginine méthyltransférase, CARMER, est indispensable au déclenchement de l'apoptose, mais seulement lors de la métamorphose, et pas dans celle déclenchée par les stress. D Cakouros et al.; Journal of Biological Chemistry 279 (30APR04) 18467-18471.

62.*** Une revue sur les aspects structuraux (au sens moléculaire) de la communication inter-individus chez les insectes et, en particulier, sur l'attraction sexuelle rédigée par des chercheurs du CNRS à Marseille est parue avec M Tegoni et al.; Trends in Biochemical Sciences 21 (MAY04) 257-264.

De petits protéines solubles (10–20 kDa) à fortes concentrations (~10 mM) ont été détectées dans l'hémolymphe des sensilles des antennes de papillons. L'olfaction des insectes est, en effet, assurée par ces protéines des antennes, qu'on appelle protéines liant les phéromones (PBPs), et celles liant les substances odorantes (OBPs) ainsi que des protéines chimiosensorielles (CSPs). Elles ont été, initialement, proposées comme vecteurs air/fluide vers les récepteurs olfactifs. Les PBPs et OBPs sont des protéines de 120–150 amino-acides, avec trois ponts disulfures

L'interaction du message (odorant ou phéromone) avec un GPCR (G Protein Coupled Receptor) déclenche une cascade de signalement faisant intervenir un second message chimique (cAMP ou Inositol (1,4,5)- trisphosphate) et induisant l'ouverture d'un canal cationique.

Les séquences génomiques ont indiqué qu'il existe de multiples copies des gènes d'OBP et de PBP: 38 chez Drosophila melanogaster et 29 chez Anopheles gambiae. Les gènes de récepteurs olfactifs sont au nombre de 40 chez Drosophila. Ces récepteurs jouent un rôle olfactif comme gustatif compte tenu de leurs sites d'expression. AC Melo et al.; Chemical Senses 29 (JUN04) 403-410, et RJ Pitts et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (06APR04) 5058-5063. Certains de ces récepteurs sont spécialisés dans l'olfaction, car on ne les retrouve que dans les antennes (MJ Krieger et al.; Journal of Comparative Physiology A 189 (JUL03) 519-526).

Deux articles récents suggèrent un rôle essentiel des OBPs et PBPs dans la perception du signal chimique et dans la discrimination des ligands entre eux. Chez Drosophila, la mutation lush (pour poivrot) n'exprime pas OBP et, de ce fait, la mouche perd la propriété d'évitement des alcools à courte chaîne comme l'alcool éthylique (SW Kruse et al.; Nature Structural Biology 10 (SEP03) 694-700 et JJ Zhou FEBS Letters 558 (30JAN04) 23-36). Chez la fire ant (la fourmi spécialement urticante Solenopsis invicta), le polymorphisme social dans les colonies dépend de l'un des deux allèles de Gp9 codant la PBP (MJ Krieger et al.; Science 295 (11JAN02) 328–332, et KG Ross et al.; Genetics 165 (DEC03) 1853-1867).

Une troisième classe de protéines intervenant dans la chimiosensibilité, les CSPs (ChemoSensory Proteins), a été récemment découverte chez un phasme, Eurycantha calcarata. Les CSPs (d'environ 110 acides aminés, à deux ponts disulfures) sont capables de lier de nombreuses substances chimiques et ont une distribution tissulaire beaucoup plus large que les OBPs et PBPs. La protéine caractérisée est spécifique de l'insecte étudié, car la même protéine d'autres orthoptères ne donnent pas lieu à une réaction immunologique croisée.

Les auteurs de la revue ont décrit les changements conformationnels importants se déroulant lors de la fixation d'un des multiples ligands (de 12-bromo-

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dodécanol, avec trois molécules d'un coup dans la cavité de la molécule) chez une protéine de ce type de Mamestra brassicae. V Campanacci et al.;

Proceedings of the National Academy of Sciences USA 100 (29APR03) 5069-5074.

Les Biopesticides 63. Les orobanches sont des plantes

achlorophylliennes parasites très gênantes dans certains pays où elles détruisent des récoltes entières, notamment de maïs. Leur avantage sélectif est dans la production d'un nombre énorme de graines (un million par plant). Des chercheurs italiens ont recherché des Fusarium pathogènes pour cette plante dans les régions d'Italie infestées par Orobanche ramosa. La sélection a été faite sur tomate parasitée. Un Fusarium oxysporum et un Fusarium solani semblent prometteurs. Des isolats de Fusarium camptoceras et de Fusarium chlamydosporum sont un peu moins efficaces. A Boari et al.; Biological Control 30 (JUN04) 212-219.

Orobanche ramosa est surtout présente dans les régions méditerranéennes, mais vient d'apparaître en Australie et aux Etats-Unis. Elle s'attaque à plusieurs solanacées cultivées comme la tomate, l'aubergine et la pomme de terre. Elle infeste, avec Orobanche aegyptiaca, 2,6 millions d'hectares. On ne peut lutter contre elle avec des herbicides qui tuent l'hôte et l'orobanche, sauf si on admet que la plante soit résistante à l'herbicide grâce à ingénierie génétique. Ce que l'on a envisagé.

D'autres Fusarium efficaces ont été caractérisés, avec F.lateritium dans des champs de tabac traités avec des conidiospores dans l'eau d'irrigation. F.oxysporum f.sp.orthoceras a été proposé contre Orobanche cumana sur tournesol. Deux Fusarium arthrosporioides ont été isolés en Israël à partir de jeunes plants d'O.aegyptiaca et leur efficacité a été améliorée par transgenèse.

64. L'effet létal de Beauveria bassiana,

Metarhizium anisopliae et Paecilomyces fumosoroseus sur les œufs de l'acarien Tetranychus cinnabarinus sont décrits dans WB Shia et al.; Biological Control 30 (JUN04) 165-179.

Cet acarien est répandu dans le monde entier et s'attaque à plus de 100 plantes différentes. Il est devenu résistant à plusieurs acaricides. C'est le cas du parathion ou du decofol où une augmentation de résistance de cent fois s'est développée en moins de 20 générations. Pour l'instant il est, en Chine, résistant à plus de 25 pesticides. Une solution doit donc être trouvée. C'est ce que proposent ces chercheurs chinois.

65. Le champignon Verticillium dahliae est l'une

des plaies majeures de l'olivier dans le monde entier. C'est particulièrement vrai en Espagne qui possède 2,3 millions d'hectares d'oliviers (le quart de la surface cultivée mondiale). Verticillium s'y est propagé sensiblement au cours des 20 dernières années, et nécessite des précautions avant et après la plantation des jeunes plants.

Les souches de Verticillium dahliae se présentent sous deux pathotypes, l'un défoliant, l'autre non

défoliant un peu moins sévère, qui se distinguent également chez le coton.

L'un des moyens envisageables serait d'utiliser des bactéries endophytes. On en connaît quelques unes. Ainsi certains Bacillus subtilis ont un effet sur le champignon s'attaquant à divers hôtes.

Des chercheurs de Cordoba ont utilisé 8 isolats de Pseudomonas fluorescens ou Pseudomonas putida provenant de racines d'olivier et les ont administrées à des plantules d'oliviers en serre. Tous les isolats produisent de la pseudobactine, un sidérophore, mais quelques uns des P.fluorescens produisent également de l'acide salicylique ou du HCN in vitro. L'effet sur V.dahliae varie selon les conditions de culture de la bactérie. On observe un certain effet en nurseries. Il n'y a malheureusement pas de corrélations entre les effets in vitro sur le champignon et in planta en nurserie. J Mercado-Blanco et al.; Biological Control 30 (JUN04) 474-486.

66. L'invasion des Etats-Unis par le Russian thistle

(la chénopodiacée Salsola tragus) pose des problèmes de plus en plus grand. On envisage toutes sortes de moyens de lutte,car des résistances aux sulfonylurées ont déjà été détectées. Malheureusement, il semble que ce soit une espèce fagot et il va falloir tenir compte de cette hétérogénéité génétique. On a déjà confondu Salsola kali utilisée dans une étude de l'effet d'Uromyces salsolae (un autre biopesticide envisagé) avec Salsola pestifer, Salsola australis et Salsola iberica. Les deux derniers synonymes correspondent à S.tragus. Elle-même est donc un mélange de deux espèces dérivées qui sont inégalement sensibles à la mouche Cecidomyidée Desertovellum stackelbergi comme on l'a montré en Ouzbékistan. On sait que les Salsola ont des sensibilités différentes vis à vis de pathogènes fongiques. W Bruckart et al.; Biological Control 30 (JUN04) 306-311 ont étudié l'effet d'un isolat hongrois de Colletotrichum gloeosporioides sur des S.tragus de type A et B. mais ce C.gloeosporioides cause plus de dégâts sur le type A.

67. Une analyse économique de la production de

bioinsecticides comportant Bacillus thuringiensis (Bt) est parue avec GE Rowes et al.; Biotechnology & Bioengineering 86 (MAY04) 377-388. Les différentes possibilités de production sont analysées, puis leur coût et le retour sur investissement sont déduits. Le coût en capital (l'investissement initial est de 11 millions d'Euros pour une installation avec une capacité 3 l07 milliards d'unités internationales (BIU) par an. Les coûts récurrents sont de 0,9 million d'Euros par an pour la matière première, dont la moitié pour la formulation du produit final. Les coûts augmentent sensiblement au dessous d'une production annuelle de 107 milliards BIU/an, mais restent ensuite proportionnels au dessus de 3 milliards

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BIU/an . La production en fed batch à faible densité est le procédé le moins coûteux à toutes les échelles de production. L'utilisation du procédé en haute densité est un peu plus coûteuse. Le prix de vente à l'équilibre est de 0,27 Euro/BIU pour le procédé en batch simple, de 0,21 Euro/BIU pour le fed batch en faible densité. Ce dernier donne un retour sur investissement de 12% dans ces conditions. La profitabilité de cette production suppose un marché à forte valeur ajoutée comme la lutte contre les vecteurs de maladies en sus de l'utilisation en foresterie. Une capacité de production tournant autour de 107 milliards BIU/an et la co-production d'autre chose pour valoriser l'investissement en matériel dans l'intervalle, et pour donner la souplesse nécessaire à la production.

68. Les performances des parasitoïdes dépendent

de la qualité de l'organisme herbivore dans lequel il va pondre. Celle-ci dépend, elle même, de la plante dont il se nourrit. Quand on modifie la plante, notamment en la domestiquant ou en l'améliorant, il faut que le parasitoïde s'adapte. E Campan et al.; Biological Control 30 (JUN04) 220-228, se sont préoccupé de cet aspect chez deux guêpes parasitoïdes, l'une généraliste (Dinarmus basalis une Ptéromalidée) et un spécialisé (Stenocorse bruchivora une Braconidée) s'attaquant au bruchide (Coléoptères) Zabrotes subfasciatus des graines de haricot. Les auteurs ont sélectionné des guêpes parasitoïdes sur des Phaseolus vulgaris sauvages et cultivés. Après 12 générations de sélection au laboratoire les guêpes ont été confrontées aux bruchides des deux types de plantes. On constate que Stenocorse bruchivora préfère les bruchides pour lesquels elles ont été sélectionnées.

Les plantes peuvent être peu appétantes pour un herbivore, soit à cause de composants nutritionnels, ou à cause de substances répulsives allélochimiques pour l'herbivore. Les plantes peuvent également fournir à l'herbivore des substances répulsives pour le parasitoïde. Voir le §60.

S.bruchivora n'a pas encore été utilisée comme biopesticide alors que D.basalis a montré qu'elle était très efficace en Afrique sur plusieurs bruchides.

Des études antérieures ont montré que les performances du bruchide comme du parasitoïdes sont meilleures sur le haricot cultivé Phaseolus coccineus et P.vulgaris que sur leur parents sauvages.

69.*** Fopius (alias Biosteres) arisanus et

Psyttalia (alias Opius) fletcheri sont des parasitoïdes des œufs et des larves de la mouche du melon, la mouche téphritide Bactrocera cucurbitae. Les effets de ces parasitoïdes sont décrits par des chercheurs de Hawaii. RC Bautista et al.; Biological Control 30 (JUN04) 156-164.

Cette mouche est une peste pérenne des melons cultivés comme sauvages (Momordica charantia, la marmose, un melon amer), mais aussi de bien des cucurbitacées et même des solanacées. En l'absence de ces légumes, elle s'attaque au papayer (Carica papaya, mais elle aime moins). Elle a été découverte à Hawaii en 1896, et on a cherché à mettre au point une lutte biologique faute d'insecticides, qui n'existaient pas à l'époque. On a donc une longue expérience sur ce point. Fopius arisanus, Opius oophilus et Psyttalia

fletcheri ont été introduites. Ces parasitoïdes se sont fermement établis dans l'archipel et les dégâts de la mouche ont été sensiblement réduits.

Psyttalia fletcheri est un parasitoïde strictement solitaire des larves de la mouche. F.arisanus est surtout un parasite des œufs, mais pourrait également s'attaquer aux larves et même aux jeunes adultes. Curieusement malgré une prédilection pour les mouches téphritides, F.arisanus se développe rarement dans la mouche du melon.

Il existe par ailleurs une variabilité dans le parasitisme des mouches sur différents fruits par F.arisanus ou P.fletcheri. Bactrocera dorsalis infectant les guavas (Psidium guajava) ainsi que Terminalia catappa, sont plus facilement parasitées par F.arisanus que la même mouche sur agrumes. P.fletcheri préfère, elle, les larves de la mouche du melon sur Momordica balsamina (la pomme de merveille) par rapport à celles sur le concombre.

Ce sont manifestement les odeurs de ces différents fruits qui font la différence et probablement celles des fruits infectés.

Des essais généralisés de lutte intégrée ont été lancés à Hawaii. Des largages massifs hebdomadaires de P.fletcheri ont été réalisés en 2002 pour saturer les plantations. On désire maintenant compléter ce programme en larguant, en sus, F.arisanus. C'est pourquoi cette étude de complémentarité/compétition a été lancée.

70. Les kairomones sont des signaux olfactifs à

grande distance indiquant la présence d'une proie à un prédateur. Beaucoup de coléoptères phytophages utilisent des kairomones et des phéromones d'agrégation pour optimiser la localisation de leur plante hôte et la rencontre du partenaire sexuel.

Le système doit être suffisamment puissant pour permettre de mesurer la densité des proies. On peut espérer renforcer l'attrait des parasitoïdes pour les herbivores de cette façon, car ils utilisent déjà ce système. Les phéromones d'agrégation de certains insectes peuvent en tenir lieu.

L'idée de renforcer l'attraction des prédateurs et parasitoïdes vers leurs proies par l'administration de kairomones a déjà été sérieusement étudiée sur le couple Vespula germanica et la mouche méditerranéenne des fruits Ceratitis capitata. Vespula germanica capte en effet les effluves de phéromones des mâles de Ceratitis capitata lorsqu'ils se rassemblent. Le nuage des phéromones des pucerons est capté par Chrysopa cognata

La réponse kairomonale des prédateurs potentiels de la cochenille de l'écorce du pin, Matsucoccus été explorée par des chercheurs israéliens. Z Mendel et al.; Biological Control 30 (JUN04) 134-140. Les phéromones sexuelles femelles peuvent constituer une kairomone et si elles attirent les mâles correspondants elles le font également pour des prédateurs spécialement équipés comme les Névroptères Elatophilus, Hemerobius et Sympherobius. Les phéromones de Matsucoccus sont des cétones partageant un noyau chiral cétodiène commun. Les phéromones de trois espèces de Matsucoccus ont été utilisées.

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71. Les larves aussi bien que l'adulte de Coccinella septempunctata sont polyphages et se nourrissent d'aphides et de divers pucerons. Comme tous les prédateurs, elle n'a aucun intérêt à ravager les populations de ses proies, c'est pourquoi son utilisation doit être intégrée à des stratégies plus larges. Inversement, si on veut ne pas limiter leurs populations, il faut faire attention à l'utilisation des produits phytosanitaires utilisés conjointement. L'exposition des coccinelles à des insecticides répandus sur les feuilles, mais aussi contenu dans ses proies est, en effet, un danger.

Le maintien de la coccinelle au voisinage de ses proies dépend de signaux entretenus. Si un signal de proximité n'est pas perçu dans les 70 secondes, l'insecte va abandonner le terrain pour voir ailleurs. Ceci est lié au comportement grégaire de ses proies. De plus le miellat, indiquant la présence de pucerons proches retient les larves. Mais la présence d'un insecticide aussi bien libre que contenu dans les pucerons modifie le comportement qui perd de son efficacité. Ceci a été montré avec du dimethoate. R Sally et al.; Biological Control 30 (JUN04) 127-133.

72. On sait que certaines souches de Bacillus

thuringiensis ont une activité cytocide sur certaines lignées de cellules humaines.

On vient de caractériser le gène d'une protéine de cristaux des δ-endotoxines d'un Bacillus thuringiensis serovar dakota ayant cette propriété On peut y voir un nouvel anticancéreux (notamment des cellules de cancer du colon et du foie) ou un danger de l'utilisation de ce biopesticide. A Ito et al.; The Journal of Biological Chemistry 279 (14MAY04) 21282–21286.

73. P20 est une petite chaperone codée par

l'opéron cry11A de Bacillus thuringiensis subsp. israelensis qui produit une protéine toxique pour les moustiques. Cette chaperone est nécessaire à la production de Cyt1Aa. Des chercheurs chinois ont exprimé P20 dans des souches sauvages de B.thuringiensis subsp. kurstaki qui est anti-lépidoptère. Cela double la production de la protoxine Cry1A mais pas de Cry2A. P20 cause, par ailleurs, des modifications dans la forme de la bactérie et de la sporulation. Il semble que P20 empêche, en fait, une dégradation de la protoxine. Z Shao et al.; Current Microbiology 48 (MAY04) 321-326.

74.*** Xenorhabdus nematophila, sert d'ouvre-

boîte au nématode insecticide du sol Steinernema carpocapsae. La bactérie est libérée dans l'insecte après invasion par le nématode et détruit le contenu du corps que consomment les deux malfrats.

Les fimbriae jouent un rôle dans les interactions entre bactéries présentant ces appendices et les cellules ou les surfaces. C'est le cas de la symbiose entre Vibrio fischeri et le calmar Euprymna scolopes. Elles sont assemblées grâce à un système chaperone-usher (huissier ou placeur). Les opérons codant ces fimbriae contiennent entre 8 et 11 gènes codant divers éléments de structure, d'assemblage, mais aussi régulateurs. Les protéines structurales de toutes les

fimbriae se ressemblent, mais il n'en est pas de même pour la régulation des opérons qui les codent. En effet, une cellule donné d'E.coli uropathogène peut, théoriquement, exprimer plusieurs fimbriae différentes ayant chacune une spécificité de reconnaissance particulière pour un polysaccharide de l'hôte.

X.nematophila va, ainsi, produire des fimbriae sur agar, mais pas en milieu liquide aéré. On vient de disséquer l'opéron des fimbriae de cette bactérie. H He et al.; Microbiology 150 (MAY04) 1439-1446.

On ne trouve aucun signe de la variation de phase qui est liée à un processus de recombinaison commandé par une recombinase site-spécifique.

75. On parle beaucoup des communications

positives entre organismes (phéromones, quorum sensing, etc…) peu des négatives.

Pseudomonas aureofaciens 30-84 inhibe Gaeumannomyces graminis var. tritici, pathogène du blé et de l'orge. Il produit des antibiotiques de type phénazine sous la commande d'une N-acyl homosérine lactone (AHL), donc d'un système de quorum sensing.

On connaît plusieurs composés qui interfèrent avec les régulations de l'expression génique par les AHLs. C'est le cas des furanones halogénées et de dipeptides cycliques. D'autres bactéries détruisent les AHLs grâce aux produits de aiiA chez des Bacillus et aiiD de Ralstonia. Par ailleurs certaines plantes produisent des imitations d'AHLs pouvant affecter les régulations par ces lactones.

La production des phénazines, régulée par le système PhzR/PhzI est indispensable à la survie de P.aureofaciens 30-84 dans la rhizosphère. Une sous-population de la rhizosphère du blé affecte, ainsi, positivement cette production par P.aureofaciens 30-84. Il existe, par ailleurs, une autre sous-population de la rhizosphère du blé qui l'affecte négativement. JE Morello et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (MAY04) 3103-3109.

76. Trichoderma harzianum est un champignon du

sol s'adonnant au mycoparasitisme. Les chitinases Chit42 et Chit33 de T.harzianum CECT 2413, sans domaine liant la chitine (!!!) seraient impliquées dans l'activité antifongique. On peut accroître l'activité spécifique (activité par gramme) de la chitinase de T.harzianum ainsi que son activité antifongique par addition d'un domaine liant la cellulose de la cellobiohydrolase II de Trichoderma reesei. Si on conjugue une surexpression avec l'addition du domaine liant la cellulose on obtient une efficacité nettement améliorée sur Rhizoctonia solani, Botrytis cinerea et Phytophthora citrophthora. MC Limon et al.; Applied Microbiology & Biotechnology 64 (MAY04) 675-685.

77. Des chercheurs de Kiel décrivent une

production de masse en milieu liquide de Heterorhabditis bacteriophora, un nématode insecticide. SA Johnigk et al.; Applied Microbiology & Biotechnology 64 (JUN04) 651-658.

La production est faite après une pré-incubation avec le symbiote Photorhabdus luminescens. Le problème est que cette préincubation a lieu avec des "dauer juveniles", une forme d'arrêt

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développemental, mais la sortie de cet arrêt est variable. Il faut donc arriver à mieux piloter ce

développement en jouant sur le pH. C'est un peu l'innovation de cet article.

Les Productions animales La transformation

78. Le crapeau sud-africain Xenopus laevis est un modèle qui a très longtemps été utilisé par les embryologistes pour analyser les premiers stades du développement. Les défauts de ce système sont l'absence de génétique classique, et la difficulté de transformation. La transformation de Xenopus via le sperme est plus ou moins acquise (voir, par exemple, DR Buchholz et al.; Molecular Reproduction & Development 67 (JAN04) 65-69). La technique d'intégration assurée par enzymes de restriction décrite en 1992 par A Kuspa et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 89 (15SEP92) 8803-880 consiste à introduire une enzyme de restriction adéquate en même temps que l'ADN plasmidique linéarisé ce qui permet l'introduction de ce dernier dans le génome au niveau des sites reconnus par l'enzyme. Cette technique qui permet d'insérer des gènes avant la première division de la segmentation est le premier outil utilisable chez les batraciens. On a usuellement utilisé des expressions permanentes comme aux débuts des autres modèles. Ces techniques sont suffisantes pour étudier les premiers stades de l'embryogenèse, où on injecte des messagers ou des morpholino oligonucléotides. Celà ne suffit pas pour étudier des évènements tardifs comme la métamorphose. Beaucoup d'expressions sont létales, quand elles ne sont pas réalisées au bon moment. Il faut donc piloter l'expression et, ici, la différer jusqu'au stade à étudier. B Das et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (06APR04) 4839-4842, décrivent une construction inductible par l'analogue de progesterone RU-486 et une autre par la tétracycline doxycycline.

L'expression des gènes 79. L'idée d'exploiter l'interférence ARN en

utilisant de petits ARN en épingle à cheveux en faisant commander leur expression par un promoteur reconnu par la polymérase III n'est pas nouvelle, mais se décline de diverses façons. Des chercheurs du Salk Institute for Biological Studies décrivent un système d'introduction, grâce à un vecteur lentiviral (HIV), de ces ARNs qui peuvent être induits par la recombinase CRE.

Il utilise un promoteur U6 de souris séparé de la séquence codant l'épingle à cheveu par un intercalaire aléatoire flanqué par des sites loxP (la cible de cette recombinase site-spécifique).modifiés. Cette construction ne devient fonctionnelle que si on introduit un second vecteur lentiviral exprimant la recombinase CRE. G Tiscornia et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (11MAY04) 7347-7351.

81.*** Femelles et mâles possèdent quasiment la

même information, mais l'utilisent différemment. La différenciation sexuelle ressemble à tout évènement du développement, sauf qu'elle donne deux individus entièrement différents (dimorphisme sexuel). Il doit donc exister des compromis dans la structure des gènes. On conçoit que la séquence d'un même gène actif dans deux organes différents puisse être sub-optimale dans chacun des cas pour une utilisation à peu près efficace dans les deux cas (les duplications montrent que, quand cette contrainte disparaît, on assiste à une divergence).

Les mâles sont hémizygotes pour le chromosome X, de sorte que toute mutation même récessive dans ce chromosome, favorable au sexe dit "fort", est immédiatement disponible pour une sélection (encore faut-il qu'il soit exprimé). Ce n'est pas le cas pour une mutation favorable au sexe féminin. La sélection ne peut, alors, s'exercer que quand l'allèle mutant est suffisamment fréquent pour que des homozygotes apparaissent. Par contre, comme il

existe deux fois plus de chromosomes X chez des femelles, le support pour une mutation est plus abondant. On devrait donc voir s'accumuler sur ce chromosome X des gènes ou des allèles favorables aux mâles. Si le chromosome X mammalien est effectivement enrichi en en gène s'exprimant dans le spermatocyte (MJ Lercher et al.; Molecular Biology & Evolution 20 (JUL03) 1113-1116), ce ne sont en réalité pas des allèles à expression préférentiellement mâle chez Drosophila et Caenorhabditis. Pourquoi? C'est l'objet d'un commentaire de B Oliver et al.; Bioessays 26 (MAY04) 543-548.

La mesure du succès de multiples génotypes pour la survie et la reproduction montre qu'il existe un antagonisme très fort entre les adultes de Drosophila. Les génomes associés à une bonne adaptabilité (fitness) femelle ne permettent qu'une médiocre adaptabilité mâle et vice-versa. Mais on n'a aucune idée du nombre des gènes impliqués. Une analyse de l'expression globale indique qu'il y en a pas mal.

Malgré les difficultés engendrées par l'échantillonnage des réseaux qui ne comprennent pas toutes les sondes nécessaires, on estime à ~15% du génome la fraction où l'expression est biaisée selon le sexe. Mais si on n'envisage que les gonades, on peut monter à 35% du génome.

Chez les mâles de Drosophila, il existe un très grand polymorphisme d'expression des gènes subissant ce biais sexe-spécifique. Chez les hybrides ces gènes ont tendance à être nettement sous-exprimés. Ceci indique que le gène et sa régulation sont soumis à une évolution rapide chez les mâles, probablement parce que la sélection est immédiate.

Mais expression ne signifie pas fonction. On a des indications génétiques selon lesquelles les fonctions spécifiques des mâles sont, en fait, sous représentées sur le chromosome X de la Drosophile. Ceci est encore plus accentué chez Cænorhabditis. Le

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chromosome X y est spécialement dépourvu de fonctions vitales, d'une façon générale..

La démasculinisation du chromosome X ne dépend pas du tissu, et semble due à une perte progressive des gènes ou un changement dans le biais de l'expression.

Il existe des gènes qui échappent au dosage compensatoire sur le X, et un nouveau gène autosomique transloqué sur X ne sera pas immédiatement compensé. Ceci peut entraîner une perte de fonction mâle spécifique, car il sera à l'état haploïde au lieu de diploïde sur l'autosome. Les fonctions rendues ainsi déficientes peuvent être compensées par des gènes d'autosomes ayant une fonction analogue. On aura donc perte du gène à expression préférentiellement mâle. Mais ce raisonnement ne tient pas compte du fait que

l'expression des gènes mâles spécifique est en constante évolution.

Dans le cas de l'X des mammifères l'inactivation du X est accompagnée par une expression précoce (avant l'inactivation) des gènes nécessaires à la spermatogenèse, donnant des transcrit ultérieurement utilisés. Aucun des 26 gènes "tardifs", par contre, n'est porté par le X. C'est également le cas chez la Drosophile où le X est particulièrement riche en gènes impliqués dans les stades précoces de la spermatogenèse. Mais cela n'est probablement qu'une explication partielle car, sinon, expliquer la situation dans les cellules somatiques où le chromosome X n'est pas inactivé.

Le développement 82. On sait que les ovocytes des mammifères

restent bloqués à la prophase de la première division de la méiose. Ce repos forcé est levé par une poussée de l'hormone lutéinisante (LH).qui va déclencher la maturation d'un certain nombre d'ovules (nombre dépendant des espèces). On sait, également, que la LH assure également la survie des cellules germinales mâles en méiose dans le testicule. Mais comme la LH est reconnue par les cellules somatiques (thèque et granulosa dans le follicule ovarien) et cellules de Leydig dans le testicule, le mécanisme exact de ces deux effets sur les cellules germinales est un peu énigmatique.

K Kawamura et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (11MAY04) 7323-7328 montrent que la LH stimule la transcription du gène de l'INSL3 (hormone Leydig insulin-like 3) dans la thèque de l'ovaire et dans les cellules de Leydig du testicule. INSL3 se lie à un récepteur particulier des cellules germinales appelé LGR-8 (leucine-rich repeat-containing G protein-coupled receptor 8), stimulant la production de cAMP. Ce traitement par INSL3 déclenche la maturation des ovocytes préovulatoires et supprime toute apoptose des cellules germinales mâles.

83. La plupart des neurones du système nerveux

central possèdent un cil immobile dit "primaire" (découvert en 1898 par l'anatomiste suisse KW Zimmerman). Ce cil primaire s'étend comme une antenne à partir d'un des deux centrioles de la cellule (le centriole parental), gainé par la membrane plasmique. Comme on n'a jamais compris à quoi pouvait servir cet organite incomplet considéré comme une relique de l'évolution, on l'a enseveli dans un oubli profond. Pourtant c'est le même organite qui constitue la partie photosensible des récepteurs photoniques de la rétine et que l'équivalent dans les cellules rénales sert à mesurer les flux liquides. Sa disparition entraîne d'ailleurs (ou accompagne) une maladie rénale, la maladie polycystique. Enfin ces cils sont ceux qui interviennent sur l'asymétrie droite/gauche de l'embryon, avec une particularité dans ce cas, ils sont motiles (voir le Bulletin de Juin §93).

Les récepteurs de somatostatine sst3 et les récepteurs 5-HT6 de la sérotonine sont portés par les

cils primaires des neurones de différentes parties du cerveau. Ils pourraient constituer une nouvelle catégorie de transmetteurs de signaux extra-synaptiques complétant les réseaux de neurones fonctionnant par ailleurs grâce aux synapses ou aux jonctions communicantes (gap junctions voir le Bulletin de Juin §106). Une revue intéressante est parue sur le sujet, avec JF Whitfield; Cellular Signalling 16 (JUN04) 763-767.

84. Les gènes Pax codent des facteurs de

transcription conservés. Les deux gènes Pax3 et Pax7, issus d'une duplication, ont commencé à diverger. On le constate au cours du développement de la musculature des membres. F Relaix et al.; Genes & Development 18 ((01MAY04) 1072-1087. Pax7 peut se substituer à Pax3 dans de nombreux processus comme la formation du tube neural, la différenciation des cellules des crêtes neurales et la formation des somites, mais pas quand il s'agit de la migration à grandes distances des cellules progénitrices des muscles des membres. Dans les muscles de souris chez qui on a substitué Pax7 à Pax3 on constate des modifications qui suggèrent que si Pax7 est ancien. Pax3 a divergé avec l'apparition des membres.

Les gènes Pax peuvent être groupées en quatre familles. Tous les Vertébrés ont au moins un membre de chaque famille. Les oiseaux et les mammifères ont un Pax3 et un Pax7, alors que Danio rerio possède un Pax3 et au moins quatre variants de Pax7, dont un ressemble à celui des mammifères.

Le Pax3/7d'origine s'observe chez les ascidies ou l'amphioxus, ces ancêtres lointains des Vertébrés. La Drosophile possède déjà trois de ces gènes (Prd, Gsb et Gsbn), issus de duplications indépendantes.

Le patron d'expression de Pax3/7 chez une ascidie indique que l'intervention dans la formation du tube neural est la fonction d'origine. Chez la souris, Pax3 et Pax7 sont exprimés dans le tube neural, où seul Pax3 s'exprime dans la région la plus dorsale.

Les souris Splotch (Sp), chez qui une mutation bloque la fonction de Pax3, présentent des défauts dans la fermeture du tube neural (spina bifida et exencéphalie). De plus lamigration des cellules des crêtes neurales (celles qui vont donner neurones et glie périphériques, ainsi que les mélanocytes) ont

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une migration presque complètement inhibée, particulièrement à l'arrière de l'embryon. Pour les mutants de Pax7, c'est plutôt l'inverse. Si on regarde ce qui se passe chez l'Amphioxus, l'expression du gène ancestral Pax3/7 suggère que des cellules homologues des cellules des crêtes prémigratrices existent déjà chez ce céphalochordé.

Les fonctions des gènes Pax3/7 dans le mésoderme semblent d'acquisition plus récente. L'amphioxus possède, comme les Vertébrés, une segmentation des muscles axiaux où Pax3/7 est exprimé. Cette fonction dérivée est donc déjà présente chez cet ancêtre des Vertébrés.

Chez la souris l'expression de Pax3 a lieu dans le mésoderme avant la formation des somites puis se localise dans le dermomyotome (la partie dorsale du somite) puis se focalise de plus en plus près de l'axe de l'embryon et dans la partie opposée (hypaxiale) du myotome. On comprend donc qu'une perte de fonction de ce gène entraîne de graves défauts de la segmentation du corps. De plus, comme les parties hypaxiales sont celles qui vont émettre les cellules migrantes qui vont donner la musculature des

membres, les souris Splotch ne possède pas de musculature des membres.

Pax3 intervient dans l'activation de c-met codant un récepteur à tyrosine kinase qui intervient dans la migration cellulaire. Pax3 intervient également dans l'activation de MyoD marqueur de la myogenèse.

Bien que Pax7 soit exprimé dans un partie du dermomyotome, les mutants de ce gène ont une musculature normale.Pax7 est, par contre, indispensable à la formation des cellules dites satellites qui vont permettre la croissance et la régénération des muscles squelettiques (en quelque sorte des cellules souches musculaires). Pax3 est également exprimé dans ces cellules. Mais comme les souriceaux mutés meurent à la naissance on ne sait pas quel rôle joue ce gène chez l'adulte.

Pax3 et Pax7 interviennent donc apparemment à des stades différents de la myogenèse. L'expérience de substitution des auteurs cités indique que Pax3 intervient à plusieurs stades du développement des muscles appendiculaires.

La Physiologie 85. Chez les Salmonidés la hiérarchie des

individus dans une population est souvent très accusée, notamment chez la truite arc-en-ciel Onchorynchus mykiss, que ce soit dans nature ou dans les élevages. Elle se traduit, pour les individus subordonnés, par un ajustement des cycles d'activité et de prise de nourriture pour ne pas se heurter aux individus dominants. Comme chez les autres Vertébrés la mélatonine libérée par la glande pinéale, joue un rôle dans la synchronisation des cycles nycthéméraux.

En fait le stress social rencontré dans les populations denses, est accompagné par une libération de corticoïdes et une élévation des taux de mélatonine la nuit chez les subordonnés. Il n'y a pas d'effet sur le niveau bas de la journée commun à tous les individus. C'est un des effets les plus notables du stress social résultat de la dominance.. ET Larson et al.; General & Comparative Endocrinology 136 (01MAY04) 322–327.

86. La CRH (Corticotropin-Releasing Hormone)

modifie le comportement des saumons chinook (Oncorhynchus tshawytscha) juvéniles dans le courant d'une rivière et les freine dans leur descente du courant. Un peu comme les stress subis, au même stade, dans les échelles des barrages installées avec la bénédiction des défenseurs de la nature dans un compromis apparemment "vaseux". Ce frein à la descente confine souvent les poissons dans des zones de forte prédation et contribue au déclin des populations sauvages. Ceci a été vérifié au stade où les saumons deviennent capables de tolérer l'eau de mer ("parr-smolt transformation"). Cette transformation comporte une décroissance de la territorialité et de l'agressivité, ce qui permet une agrégation des individus avant la descente. S Clements et al.; General & Comparative Endocrinology 136 (15MAY04) 1-8.

Ces modifications du comportement sont liées à des modifications hormonales où la CRH initie la réponse

de l'axe hypothalamique–pituitaire–interrénal aux stress. Cette réponse se traduit par la sécrétion de l'hormone adrénocorticotrope qui va réguler les réponses périphériques.

********************** 87. Les muscles squelettiques sont impliqués dans

l'homéostase du glucose et des lipides, c'est pourquoi on encourage diabétiques et obèses à faire de l'exercice. On a déduit de nombreuses observations de couplages entre des anomalies du tissu adipeux et du muscle que, comme les adipocytes les fibres musculaires doivent émettre des facteurs agissant sur d'autres tissus et sur le muscle lui-même à l'instar des adipocytokines émises par les adipocytes. On vient d'identifier un nouveau facteur sécrété pas le muscle, la muscline (ce n'est pas original, mais clair) qui pourrait être lié à l'homéostase du glucose. H Nishiszawa et al.; The Journal of Biological Chemistry 279 (07MAY04) 19391-19395.

89. Le récepteur nucléaire "orphelin" CAR

(NR1I3) a été récemment caractérisé comme un élément important dans la réponse aux stress du fait de sa similitude avec le PXR (pregnane X receptor). On appelle orphelin un récepteur dont on ne connaît pas la fonction. JM Maglich et al.; The Journal of Biological Chemistry 279 (07MAY04) 19832-19838 viennent de montrer qu'il intervient sur la régulation du métabolisme de l'hormone thyroïdienne. De ce fait il intervient dans une résistance à l'amaigrissement, même en périodes de restrictions caloriques.

Ce récepteur est la cause d'une catastrophe psychologique pour les personnes cherchant à perdre du poids et qui, malgré leurs efforts, n'en perdent presque pas et le récupère avec aisance.

En général la barrière homéostatique majeure à ces bonnes intentions réside dans un abaissement du métabolisme de base quand la ration calorique est diminuée (on en consomme moins).

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Les hormones thyroïdiennes, la thyroxine T4 et la triiodothyronine T3 sont les hormones régulatrices les plus importantes de ce métabolisme. La plus puissante est la T3. Elle baisse d'un tiers après 10 semaines de régime hypocalorique. Elle agit dans la quasi-totalité des tissus en se liant aux récepteurs nucléaires TRα (NR1A1) et TRβ (NR1A2). T3 résulte d'une déiodation de la thyroxine T4 et cette déiodation va piloter le niveau de T3

La déiodinase la plus importante (hépatique) agit sur le cycle extérieur de l'hormone et donne aussi bien T3 que le dérivé déiodé du cycle interne (reverse-T3 inactif). La déiodation extérieure ne se fait plus si T4 est sulfatée et c'est la déiodation du cycle interne qui est très fortement stimulée.

90. Les calpaïnes, dénommées ainsi du fait que ce

sont des protéases activées par le calcium, sont connues depuis plus de trente ans dans les cellules de mammifères. On en connaît maintenant une famille d'au moins 14 membres.

En surexprimant un inhibiteur endogène de cette protéase, la calpastatine humaine chez des souris, on vient de montrer que ces enzymes participent à la régulation de la masse musculaire et du métabolisme du glucose en dégradant le

transporteur de glucose GLUT4. K Otani et al.; The Journal of Biological Chemistry 279 (14MAY04) 20915-20920.

92. Le récepteur de l'hormone de croissance

(GHR) émet ses signaux, après fixation du ligand, via une tyrosine kinase cytoplasmique associée à la Janus protein kinase 2 (JAK2). La voie activée est celle de STAT5 (Signal Transducer and Activator of Transcription 5) ainsi que celles d'ERK1 (Extracellular signal-Regulated Kinase (ERK) et -2.

En étudiant des pré-adipocytes murins sensibles à la GH, N Yang et al.; The Journal of Biological Chemistry 279 (14MAY04) 20898-20905, montrent que les membranes sont très enrichies en GHRs dans les caveolae (les sites supposés faire partie des fameux radeaux lipidiques). JAK2 y est également, mais légèrement, enrichi. ERK1/2 et le petit adaptateur de cette voie, Grb2 (Growth factor receptor-bound protein 2), y sont également enrichies. L'addition de GH induit une accumulation supplémentaire de ces composants des caveolae. Mais pas de trace de STAT5.

Le système immunitaire 93.*** L'existence d'un grand nombre d'anticorps

monoclonaux pouvant reconnaitre, chacun, plusieurs antigènes non apparentés (self ou non self) met, apparemment, en défaut la notion très répandue de la spécificité très stricte des anticorps. AL Notkins; Trends in Immunology 25 (APR04) 174-177. L'auteur soutient que la fente liant l'antigène est plus flexible qu'on ne le pensait. Il discute du rôle éventuel de cette polyréactivité dans les défenses immunitaires et notamment dans la tolérance du "soi".

Au début, on a pensé que les anticorps polyréactifs sont des auto-anticorps, car on pouvait les détecter, par immunofluorescence, dans tout le corps. Mais on a pu constater que les immunoglobulines correspondantes reconnaissent aussi bien des antigènes étrangers. Près de 20% des cellules B périphériques (circulantes) produisent, en réalité, des anticorps polyspécifiques pour qui plusieurs antigènes, sans rapport entre eux, entrent en compétition, mais avec une très forte fluctuation dans la constante d'affinité (Kd = 10-3 à 10-7 mol l-1), par ailleurs nettement plus faible que celles des anticorps monospécifiques pour "son" antigène (Kd = 10-7 to 10-11 mol l-1).

Ce sont essentiellement des IgM (avec quelques IgG et IgA). Cette polyréactivité est un trait conservé du système immunitaire (on le retrouve des hommes aux requins). La polyréactivité est surtout liée à la conformation du CDR3 (Complementarity-Determining Region 3) un des trois domaines des parties variables des immunoglobulines (Fabs). Le remplacement du CDR3 d'un anticorps monospécifique par celui d'un anticorps

plurispécifique confère la plurispécifique à la chimère, par exemple.

95.*** Les cellules présentatrices d'antigènes

modulent la réponse immunitaire, après la rencontre de microbes étrangers, en stimulant la différenciation des cellules T CD4+ en "helpers" Th1 ou Th2. Ces cellules utilisent la voie Notch dans ce but. Ainsi les deux ligands de Notch, Delta induit des Th1, et Jagged induit les Th2. On a toujours considéré la différenciation des Th2 comme un processus par défaut. En fait, c'est Jagged qui oriente la différenciation en Th2, indépendante d'IL4/STAT6. Cette différenciation en Th2 est supprimée, dans les cellules T, en l'absence de l'effecteur RBPJk commandé par cette voie, qui comporte le facteur de transcription GATA3, et en régulant directement la transcription du gène il4 grâce à des sites reconnus par RBPJk dans un "enhancer" en aval du gène. D Amsen et al.; Cell 117 (14MAY04) 515-526. Je suppose qu'il faudrait regarder l'effet de Lunatic Fringe, dont on sait qu'il module l'affinité de Notch pour ces deux ligands.

IL4 est un important facteur de differenciation des Th2. Le signal est transmis, dans ces cellules par STAT6. Un paradoxe amusant est qu'IL4 est nécessaire à la différenciation du type cellulaire qui va le produire. Comme cette différenciation ne peut être assurée par de l'IL4 provenant de cellules autres que les cellules T, il faut donc un signal autre qu'IL4 pour amorcer le processus.

GATA3 est Th2-spécifique et répond au récepteur d'IL4 et peut, à lui seul commandeer la différenciation des cellules Th2.

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Les Pathogènes 94. PR Hardwidge et al.; The Journal of Biological

Chemistry 279 (07MAY04) 20127-20136 ont analysé la réponse protéique des entérocytes à une invasion par Escherichia coli entéropathogène (EPEC). Cette bactérie utilise un système de sécrétion de type III pour injecter des protéines effectrices dans la cellule hôte entraînant la lésion caractéristique des villosités (attaching/ effacing) avec attachement sur une excroissance de l'entérocyte en forme de coupe, puis la diarrhée. Le travail a été réalisé sur la lignée intestinale Caco-2 infectée avec des EPEC pourvues ou dépourvues de système de sécrétion.

95. L'inhibition du cycle viral par interférence

ARN et son utilisation éventuelle dans une stratégie antivirale est étudiée chez le poliovirus par MC Saleh et al.; Virus Research 102 (01JUN04) 11-17. Il s'agit, en quelque sorte de savoir si les animaux se défendent aussi bien que les plantes contre un virus à ARN. On ne sait pas en effet si chez les animaux, comme chez les plantes il y a bien amplification du mécanisme, et s'il peut se propager dans l'organisme. Ceci a pu être observé, non seulement chez les plantes, mais encore chez Caenorhabditis et, in vitro, chez la Drosophile.

96.On a pu montrer que les siRNAs doubles-brins

inhibent le pneumovirus RSV (respiratory syncytial virus), le rhabdovirus VSV (Vesicular Stomatitis Virus), et le paramyxovirus HPIV Human ParaInfluenza Virus). Tous sont des virus à brins négatifs (qui doivent être répliqués pour être traduit) et à génome non segmenté. Tous les gènes d ces virus sont susceptibles de donner lieu à une interférence. S Barik; Virus Research 102 (01JUN04) 27-35. Une constatation intéressante est qu'un ARN simple brin antisens est également efficace, mais il faut en fournir plus. Ceci est probablement lié au fait que ces virus sont à brin négatif. Les brins génomique et antigénomique encapsidés et qui servent de substrat à la réplication sont immuns vis à vis de l'interférence.

Il en est de même pour les rotavirus où l'ARN génomique est fragmenté en 11 segments et où les transcrits viraux utilisés par la réplication sont insensibles.CF Arias et al.; Virus Research 102 (01JUN04) 43-51.

98. Les récepteurs Toll-like (TLRs) intervenant

dans l'immunité innée reconnaissent des motifs conservés dans les pathogènes. Les ARNs doubles brins réplicatifs des virus à ARN sont des ligands de TLR3 (voir également le §99). Mais KH Edelmann et al.; Virology 322 (01MAY04) 231-238 montrent que ce récepteur n'est pas indispensable à une défense efficace contre le virus de la chorioméningite lymphocytaire, celui de la stomatite vésiculaire, le cytomégalovirus murin et les REOvirus. Car les souris dépourvues de ce récepteur ont des défenses normales. Cela ne signifie cependant pas qu'il n'intervient pas à titre de mécanisme redondant.

99. TLR7 est un récepteur des imidazoquinolines

qui sont des dérivés de la guanosine et sont des substances antivirales. JM Lund et al.; Proceedings

of the National Academy of Sciences USA 101 (13APR04) 5598-5602 montrent que TLR7, impliqué dans l'immunité innée et présent sur les cellules dendritiques plasmacytoïdes et les lymphocytes B, reconnaît les ARNs simples brins de virus comme le virus de la grippe ou de la stomatite vésiculaire (VSV). Cette reconnaissance dépend de la voie endocytaire et son acidification induite.

Des souris déficientes soit en TLR7, soit en l'adaptateur correspondant MyD88 ont une défense amoindrie vis à vis du VSV. Le TLR7 humain a été récemment dupliqué en TLR7-8. Tous deux reconnaissent bien les imidazoquinolines, mais le récepteur TLR8 semble inactif chez la souris. Voir le commentaire de K Crozat et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (04MAY04) 6835-6836.

101. LZ Osherovich et al.; Public Library of Science

Biology 2 0442–0451 (2004) ont analysé les domaines de deux prions de la levure Sup35 donnant le prion [PSI+], et New1. On trouve, dans Sup35, une séquence N-terminale riche en asparagine et glutamine et chez New1 en asparagine associée, dans les deux protéines, à des répétitions d'une même séquence qui constitue le domaine prion. On sait que ces prions sont transmis lors de la fusion des cytoplasmes ou au cours de la division. Leur agrégation nécessite à la fois la croissance et la division cellulaire. L'amplification du phénomène résulte probablement d'une fragmentation des agrégats avec l'aide d'une "chaperone".

La capacité de Sup35 à donner le prion dépend de l'extrémité N-terminale retrouvée chez les trois prions de la levure associée à cinq répétitions et demi de la séquence également retrouvée sous forme de cinq répétitions chez le prion PrP humain.

La région riche en glutamine/asparagine intervient dans la spécificité d'agrégation, différant d'une levure à une autre. Ces protéines peuvent s'agréger dans une même cellule, mais de façon indépendantes. Le rôle des répétitions est moins évident, mais elles sont impliquées dans la propagation. C'est ce rôle qui vient d'être établi par Osherovich et al. chez New1, dont on a de bonnes raisons de penser que c'est un prion. Ce prion possède une répétition et demi de la séquence répétée de Sup35. La malheur est qu'on n'a aucun élément pour prouver que c'est réellement un prion (donc infectieux). Les auteurs l'ont modifié en une forme qui le devient. C'est donc un prion artificiel qu'ils ont créé, [NU+]. Ils ont remplacé tout le domaine "prion" de Sup35 par celui de New1. La séquence riche en asparagine de [NU+] cause l'agrégation et la transmission efficace de ce prion. Alors que les cinq répétitions et demi de Sup35 sont nécessaires à la transmission de [PSI+], la répétition et demi de [NU+] suffit.

Ces répétitions sont interchangeables. La région riche en asparagine intervient bien dans la spécificité d'agrégation.

Les auteurs ont élargi leur démonstration en construisant une séquence riche en glutamine. Il faut au moins 35 glutamines consécutives. Les auteurs

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suggèrent que les répétitions facilitent le travail de la "chaperone" lors de la fragmentation.

La question qui se pose est celle des extrapolations à d'autres prions et d'autres espèces. Ainsi les répétitions de PrP des mammifères ne sont pas

indispensables à l'infectivité. Cependant les répétitions de PrP peuvent faciliter la propagation de [PSI+].

Les animaux transgéniques 102. Les acides gras polyinsaturés que les

mammifères ne savent pas synthétiser du fait de l'absence de désaturases sont dits "essentiels" et doivent être fournis dans les aliments (vitamine F). Ce sont les acides linoléique (18:2n-6) et α-linolénique (18:3n-3). Ils ont une double fonction, la fluidisation des membranes et la production des prostaglandines, des leukotriènes et des glycolipides en dehors d'un rôle important dans le développement de la rétine et du cerveau. On leur attribue, par ailleurs, plein de vertus préventives contre plein de maladies, dont les cancers. ce qui justifierait la consommation d'huiles de poissons qui sont riches en ces acides comme suppléments alimentaires. On a déjà réussi à en enrichir le gras des porcs en fournissant ces huiles dans l'alimentation,mais le procédé est forcément coûteux car les poissons se font rares et l'huile n'est pas utilisée de façon optimale. Les auteurs ont utilisé la technique de micro-injection qui a de nombreuses limitations qui sont l'impossibilité de cribler les embryons exprimant le transgène, ce que l'on ne peut faire qu'après la naissance, qui s'ajoute à la mortalité élevée des descendants, etc…

On peut augmenter l'efficacité de la transgenèse en utilisant des vecteurs lentiviraux ou en utilisant la transformation par le sperme (voir le §78). Mais on manque de recul pour juger de la stabilité de l'expression. L'embryon porcin est d'ailleurs assez particulier, avec sa forte teneur en lipides (qui le rend très sensible à la cryopréservation).

Les plantes les produisent en désaturant l'acide oléique (18:1n-9) aux positions C12 et C15.

Les auteurs se sont de plus compliqué la tâche en faisant exprimer un cDNAs de l'enzyme, ce qui rend l'expression aléatoire, car les introns contiennent parfois des éléments régulateurs importants. Ils ont donc dû perfectionner la construction, pour accroître son efficacité et pour bien cibler l'expression dans les adipocytes

On avait déjà constaté que les porcs transgéniques surexprimant l'hormone de croissance avaient une composition en lipides relativement proche des besoins humains. Et pourtant on préfère détruire les bancs de poissons, plutôt que de consommer ces porcs.

Si la transformation est difficile et inefficace, le clonage somatique des rares animaux où l'opération a réussi permet d'augmenter le rendement. Ce clonage somatique rend possible la délétion de certains gènes. C'est ce qui a été fait pour les porcs transgéniques destinés à la xénotransplantation avec knockout du gène de l'α-galactosyltransférase. Kolber-Simonds et al. d'Infigen et Immerge Biotherapeutics; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 101 (11MAY04) 7335-7340 . Les auteurs ont ici transplanté des noyaux de fibroblastes dépourvus de l'enzyme dans des ovocytes. Cet article est commenté par H Niemann, p.7211-7212.

Bien qu'on ne dispose pas encore d'une séquence génomique complète du porc, on a pu identifier, à partir de séquences, des gènes intervenant sur la qualité de la viande. Ainsi une mutation dans le gène du récepteur de la ryanodine entraîne une sensibilité au stress, et donne la viande "pisseuse". C'est le fameux gène de la sensibilité à l'halothane, si je me souviens bien.

Une mutation dominante dans le gène PRKAG3 causant une accumulation de glycogène dans les muscles squelettiques de certains porcs de la race Hampshire améliore le goût de la viande, mais complique la découpe automatique des carcasses. Enfin deux QTLs (Quantitative Trait loci) influant sur la masse musculaire et sur le gras ont été identifiés.

On peut donc penser que l'amélioration des techniques devrait élargir le champ des transgenèses du porc pour en améliorer la qualité. Il faudra ensuite optimiser les performances de ces troupeaux, car le caractère dépend du contexte génétique où le transgène est exprimé.

Les Productions Microbiennes 103.*** Une minirevue de C Zeyl; Research in

Microbiology 155 (MAY04) 217-223 traite des mutations comme source d'adaptations chez la levure. C'est une façon différente d'envisager les mutations dites "adaptatives" où l'apparition des mutations serait biaisée par un facteur du milieu dans le sens d'une adaptation plus rapide. (voir le Bulletin de Décembre 2003 §2). L'élévation du taux de mutation (essentiellement des délétions ou insertions d'un nucléotide) a lieu chez la levure comme chez Escherichia coli, dans des cellules en phase stationnaire à la suite de carences. Comme chez E.coli les mutations sont, en réalité aléatoires et non pas biaisées en faveur de mutations permettant

l'adaptation. Cette élévation du taux de mutation est liée à une baisse d'efficacité de la réparation des mésappariements et à une ADN polymérase particulièrement fantaisiste.

On estime à 10-11 par division la probabilité d'apparition d'une mutation favorable. Elles sont donc bien rares, ce qui ne facilite pas leur étude, d'autant qu'elles sont souvent perdues par dérive génétique lors de la phase où elles sont encore très rares et avant d'avoir pu avoir un effet sur l'adaptation de leur organisme porteur. Les mutations neutres ou délétères sont beaucoup plus fréquentes, car elles affectent le bel équilibre des fonctions étrenné de l'évolution. On peut se poser la question de leur nature : gènes

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régulateurs ou de structure, par exemple. Un bon outil génétique est indispensable et la levure satisfait à ce critère.

Toutes les informations dont on dispose sont issues d'expériences de laboratoire, où on peut manipuler à la fois les génomes et les facteurs de sélection.

L'un des exemples les plus fouillés est celui de l'adaptation à des concentrations limitantes de phosphate organique étudiée par l'équipe de Julian Adams à Stanford depuis 1992 (voir, par exemple, MJ Dunham et al.; Proceedings of the National Academy of Sciences USA 99 (10DEC02) 16144-16149). Il a décrit 17 réarrangements chromosomiques dans 9 des 13 populations étudiées mais, curieusement, seules 4 des populations présentent des réarrangements impliquant des gènes de phosphatases acides, qui sont pourtant supposées être des intervenants directs. On pouvait donc se poser la question de la valeur adaptative des autres réarrangements.

Des expériences ultérieures ont utilisé l'adaptation à du glucose limitant. L'utilisation de réseaux d'expression a montré que dans un délai de 500 générations, ce sont apparemment des modifications assez globales de régulations qui sont intervenues. Elles favorisent l'utilisation respiratoire du glucose au détriment de la fermentation.

Un certain nombre de réarrangements à conséquences sur les régulations ont été observés à trois reprises dans des expériences indépendantes, ce qui indique qu'ils ont vraisemblablement une valeur adaptative. Une observation intéressante est que l'un des gènes de transport des hexoses (HXT) impliqués dans les réarrangements adaptatifs précédents est sub-télomérique, zone aux modifications rapides. Dans d'autres cas les transposons Ty ainsi que les gènes de tARNs sont impliqués, ce qui souligne le rôle ces séquences dans les réarrangements. Mais comme pour les autres mutations la transposition cause plus fréquemment des dégâts que des améliorations du fonctionnement cellulaire. Cependant Ty a manifestement joué un rôle dans l'adaptation de la levure aux stress de la vinification et entraîné un polymorphisme chromosomique accentué dans ces souches.

On pouvait, à ce propos se poser la question de savoir si les réarrangements observés au laboratoire (pour des raisons de commodité) ont leur pendant dans la nature. Cela a été montré pour des souches œnologiques italiennes où le polymorphisme d'expression est très poussé (JP Townsend et al.; Molecular Biology & Evolution 20 (JUN03) 955–963).

105.*** Le ciblage de la mutation insertionnelle

comme outil d'analyse des fonctions géniques a été utilisée surtout chez la levure Saccharomyces cerevisiae. Elle a ensuite été étudiée chez la levure à fission Schizosaccharomyces pombe dont les génomes sont séquencés et permettent une génétique inverse, et enfin sur des levures dites "non conventionnelles".

Pourtant ces dernières sont intéressantes, car on ne développera jamais le trésor de connaissances de génétique chez S.cerevisiæ, mais le nombre d'études qui leur sont consacrées est encore faible. Ces levures

non conventionnelles sont, en effet, intéressantes car des levures comme Debaryomyces hansenii et Zygosaccharomyces rouxii sont, par exemple, osmotolérantes. Une revue de U Klinner et al.; FEMS Microbiology Reviews 28 (MAY04) 201-223 s'en préoccupe en regard de ce que l'on sait chez S.cerevisiae.

107.*** ETT2 est un système cryptique de

sécrétion de type III chez Escherichia coli. Il est présent chez la plupart des souches, mais son analyse indique qu'il est en pleine phase de dégénérescence. CP Ren et al.; Journal of Bacteriology 186,n°11 (JUN04) 3547-3560.

108.*** CB Michielse et al.; Fungal Genetics and

Biology 41 (MAY04) 571–578 ont étudié le rôle des protéines de virulence d'Agrobacterium lors de la transformation d'Aspergillus awamori. Il faut une machinerie de transfert intacte, mais tout ce qui détermine la spécificité de plante cible (VirE3, VirH et VirF) d'Agrobacterium ne joue aucun rôle dans cette transformation.

109. La culture en chemostat d'Aspergillus niger et

d'autres champignons filamenteux est souvent handicapée par l'apparition spontanée de mutants morphologiques. Des chercheurs de Wageningen ont isolé un mutant aconidial stable de ce point de vue, fluffy. PJ van de Vondervoort et al.; Biotechnology & Bioengineering 86 (05MAY04) 301-307.

110.*** Une production de bioéthanol avec de

l'amidon de maïs empesé à relativement basse température (80° pendant 5 minutes, usuellement on dépasse les 120° et même 140°, au moins pour quelques secondes) utilisant des souches de Saccharomyces cerevisiae floculantes exhibant à sa surface une glucoamylase de Rhizopus oryzae et sécrétant une α-amylase de Bacillus stearothermophilus est décrite dans H Shigechi et al.; Biochemical Engineering Journal 18 (MAY04) 41-48. La levure produit 18 g/l d'éthanol en 36 h de fermentation ce qui n'est pas si mal. On peut démarrer avec 90 g/L, ce qui est permis par un empesage à basse température (qui ne donne pas un gel trop compact) on peut atteindre 30 g/L dans le même temps. .

111. Des chercheurs portugais ont optimisé

l'induction par le méthanol d'une production de protéines hétérologues dans le système classique de Pichia pastoris. AE Cunha et al.; Biotechnology & Bioengineering 86 (20MAY04) 458-467. Il s'agit d'un anticorps monocaténaire (scFv) particulier.

On observe dans le surnageant de la culture recombinante des monomères, homodimères associatifs et covalents. Les auteurs ont cherché à savoir ce qui explique cette variabilité du produit. Ils ont constaté que la limitation principale à haute densité cellulaire est le transfert d'oxygène requis. Il faut donc bien adapter le moment de l'induction de la production à la densité cellulaire.

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112. La souche Escherichia coli KO11 a été construite par le groupe d'Ingram avec une intégration chromosomique des gènes de Zymomonas mobilis codant une pyruvate décarboxylase à Km bas Km (pdc) et une alcool déshydrogénase II (adhB). Cette souche [voir l'US Patent n°6 333 181 (25DEC01) du groupe] fermente hexoses et pentoses en éthanol en milieu riche [voir l'US Patent n°6 130 076 (10OCT00) avec extrait de levure et hydrolysat de soja]. Mais la production volumétrique (par m3 de réacteur) reste faible du fait de la prolifération très mesurée de la souche, si on se limite à une alimentation minimale, clé du succès commercial.

On attribue cette réticence à une attribution déficiente du carbone à la synthèse du glutamate et

d'autres produits de la partie citrate du cycle tricarboxylique. Le groupe vient de montrer, qu'en réalité, c'est la production d'osmolytes protecteurs qui fait défaut. En milieu minimum et 9% de xylose plus 1% de corn steep liquor (le liquide de trempage du grain de maïs, lors de l'extraction de l'amidon) seule la proline peut jouer ce rôle en anaérobiose. En aérobiose la biomasse double et on a une production d'un mélange d'osmolytes: glutamate, tréhalose et bétaïne. Des transgenèses ont montré que le glutamate est le facteur limitant. On peut supprimer cette exigence pour un pool abondant de glutamate en ajoutant au milieu un osmoprotecteur (bétaïne 2 mM ou diméthylsulfoniopropionate 0.,25 mM).

Les Protéines et les Enzymes 113. Y Eisenberg-Domovich et al.; Proceedings of

the National Academy of Sciences USA 101 (20APR04) 5916-5921 montrent comment on peut transformer la streptavidine en une pseudoenzyme comme l'avidine. L'avidine active l'hydrolyse du biotinyl p-nitrophényl ester (BNP) en conditions alcalines (la lysine 111 jouant un rôle essentiel dans la catalyse), alors que la streptavidine empêche l'hydrolyse du BNP jusqu'à pH 12, agissant un peu comme un inhibiteur compétitif.

Se basant sur les structures moléculaires permettant l'hydrolyse par l'avidine les auteurs avaient, par une approche rationnelle, modifié la streptavidine. Plusieurs types de mutants ont maintenant été analysés et la structure de la protéine associée à un analogue (biotinyl p-nitroanilide ou BNA) du substrat décrite. Le transfert de la boucle fixant la biotine (plus longue de seulement 3 acides aminés) de l'avidine dans la streptavidine est un élément essentiel du changement de comportement de la streptavidine recombinante en lui conférant une structure ou le ligand est plus accessible au solvant et provoquant un basculement du groupement nitrophényle du BNP. Tout ceci est renforcé par une mutation ponctuelle Leu124Ar.

114. L'idée de faire détruire leur cible par des

anticorps qui leur sont spécifiques est discutée par T Uda et al.; Journal of Bioscience & Bioengineering 97, 3 (2004) 143-152. Il faut, pour celà, transformer l'anticorps en une abzyme protéasique. On parle d'antigénase. K Ohara et al.; Biochemical Biophysical Research Communication 315 (12MAR04) 612-616, avait montré qu'un traitement de l'anticorps par une lysyl-endopeptidase améliore l'activité enzymatique de l'anticorps. Les auteurs ont ainsi produit des anticorps qu'ils affublent du nom de supercatalytiques. Ils ont ainsi détruit la protéine d'enveloppe gp41 du HIV-1, le récepteur de chimiokine CCR5 (voir Y Mitsuda et al.; Biotechnology & Bioengineering 20 (APR04) 217-225 et l'uréase d'Helicobacter pylori. La fonction catalytique des anticorps réside essentiellement dans la chaîne légère. L'analyse des chaînes Vk (Variable kappa) de la souris indique que les anticorps supercatalytiques sont issus de lignées germinales

discrètes. On y trouve au moins une fois les trois composants de la triade catalytique des protéases à sérine, Asp1, Ser27 et His93.

Par ailleurs, personne n'a pu établir pourquoi les anticorps comportent deux types de chaînes (les chameaux et llamas n'en ont cependant qu'une). Les auteurs estiment (je simplifie) que la chaîne légère serait prédisposée à avoir un rôle lytique qui complète la fonction de détection des anticorps. Il est masqué dans le duplex avec la chaîne lourde.

115. Les β-1,4-xylanes sont le composant principal

des hémicelluloses de la lignocellulose. Les xylanes sont découpés en tronçons par des endo-xylanases, tandis que les exo-xylosidases les grignotent par le bout. Elles sont utiles dans la préparation de la pâte à papier en diminuant l'utilisation du chlore. On commence à s'intéresser à leur utilisation dans la production des aliments pour volailles (ce qui diminue leur viscosité que les animaux supportent mal), et en boulangerie, ainsi que dans l'extraction des huiles et jus de fruits. On a intérêt, comme souvent, à opérer à haute température. Bacillus thermantarcticus, une bactérie thermophile d'un site géothermique de l'Antarctique, produit une xylanase de Topt 80° à pH 5,6 et une β-xylosidase de Topt 70° à pH 6,0 extracellulaires. L Lama et al.; Research in Microbiology 155 (MAY04) 283–289.

116. L'impact des modifications oxydatives et de

l'élimination partielle de la lignine par des traitements par un complexe laccase (celle de Trametes hirsuta)-médiateur (comme la N-hydroxy-N-phenylacétamide, NHA, ou son dérivé acétylé) sur l'hydrolyse enzymatique de softwood (en gros le bois de résineux) prétraité à la vapeur a été évalué par des chercheurs de VTT Biotechnology. H Palonen et al.; Biotechnology & Bioengineering 86 (05JUN04) 550-557.

On obtient une meilleure hydrolyse par des cellulases commerciales quand on applique séquentiellement les traitements par laccases et cellulases.

NHA oxydée par la laccase inhibe clairement les cellulases de Trichoderma reesei, mais le substrat protège l'activité enzymatique des oxydations.

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118. Les cellulases de Trichoderma reesei sont

inhibées par le cellobiose (c'est à dire le produit final). Des chercheurs estoniens ont étudié ce qui cause ces inhibitions sur les endoglucanases Cel 7B, Cel 5A, et Cel 12A et la cellobiohydrolase Cel 7A sur cellulose bactérienne et la cellulose amorphe. Ils constatent que le type même de l'inhibition dépend de la nature du substrat. M Gruno et al.; Biotechnology & Bioengineering 86 (05JUN04) 503-511.

119. Les acides humiques dénaturent parfois les

laccases fongiques utilisables en biodépollution. Des chercheurs de Hawaii montrent qu'elle est due à la dissociation du cuivre. YS Keum et al.; Applied Microbiology & Biotechnology 64 (MAY04) 588-592. Ceci a été vérifié pour une laccase de Trametes versicolor sur des hydroxypolychlorobiphényls. Ceci n'est pas vrai pour une peroxydase comme celle d'Arthromyces ramosus.

120. K Yokoyama et al.; Applied Microbiology &

Biotechnology 64 (MAY04) 447-454, d'Ajinomoto, analysent les propriétés et les applications des transglutaminases (TGases). Ils s'intéressent à l'enzyme de Streptomyces mobaraensis (alias Streptoverticillium mobaraense) et c'est donc une transglutaminase microbienne (MTGase). Elle permet comme les autres des pontages dans les protéines alimentaires comme caséines, globulines de soja, gluten, actine et myosines, ainsi que des protéines du blanc d'œuf et le fait aussi bien que les TGases mammaliennes. Ces enzymes pontent les ε-(γ-glutamyl)lysine. L'avantage de cette enzyme est qu'elle ne nécessite pas d'ions calcium pour fonctionner, et sa masse moléculaire est relativement faible, ce qui doit la rendre plus stable, je suppose. Ajinomoto a mis au point une technique de production dans Corynebacterium glutamicum [voir l'US Patent Application 20030082746 (01MAY03)]. La firme a déjà décrit la production dans E.coli [US Patent n°6 538 122 (25MAR03)], et dans Micrococcus, Clostridium, Torulopsis, Rhizopus et Monascus [US Patent n°6 472 182 (29OCT02)]

122. Le gène pelA de la pectate lyase de 33,5 kDa de l'alcaliphile Bacillus licheniformis 14A a été séquencé. Les caractéristiques enzymatiques ont été établies et le produit final semble être des trigalacturonates insaturés. L'activité sur polygalacturonate, pectines d'agrumes et de betterave a été examinée. S Berensmeier et al.; Applied Microbiology & Biotechnology 64 (MAY04) 560-567.

123.*** On vient de décrire la structure cristalline

du domaine liant les polysaccharides de l'endoglucanase 5A de Cellvibrio mixtus. VMR Pires et al.; The Journal of Biological Chemistry 279 (14MAY04) 21560-21568.

Les glycosides hydrolases contiennent un domaine non catalytique (CBMs) permettant à l'enzyme de se lier à ses substrats insolubles. La spécificité des diverses familles de CBMs est variable entre ces familles.

Les structures 3D de deux modules, l'un d'une xylanase 10A (CtCBM6) de Clostridium thermocellum et l'autre d'une xylanase de Clostridium stercorarium avaient été établies.

Le CBM de l'endoglucanase 5A de Cellvibrio mixtus (Cm) fait partie de la famille 6. Les CBMs CBM6 sont excentriques, car ils possèdent deux fentes (A et B) pouvant assurer cette fonction. Les auteurs montrent que ces deux fentes ont probablement des spécificités de reconnaissance différentes, la fente A distinguant les gluco- et xylo ligands.

124. La transthyrétine (TTR) est une protéine

plasmatique homotétramérique qui joue le rôle de transporteur de la thyroxine (T4) et du rétinol (dans ce cas en se liant à la RBP ou retinol-binding protein). Une partie de cette TTR est portée par les HDL (High Density Lipoproteins) via l'apolipoprotéine AI (apoA-I). On vient de montrer que c'est une protéase cryptique qui clive la partie C-terminale d'apoA-I, après la Phe225. Elle doit choisir ses fonctions, car quand elle est complexée à RBP, sa fonction enzymatique disparaît. MA Liz et al.; The Journal of Biological Chemistry 279 (14MAY04) 21431-21438.

L'Agroalimentaire 125. IF Nes et al.; Current Opinion in

Biotechnology 16 (APR04) 100-104, explorent le potentiel antimicrobien des bactéries lactiques avec les outils de la génomique. Plusieurs de ces bactéries, dont les bactéries lactiques, sont utilisées dans les fermentations alimentaires, soit comme agents de fermentation, soit pour leurs activités préservatrices. Ce sont essentiellement des acides organiques comme l'acide lactique qui jouent un rôle essentiel de préservation, mais ces bactéries produisent également de nombreux antimicrobiens (les bactériocines), dont le plus connu est la nisine (le seul autorisé pour un usage direct), mais sous-tendant l'activité préservatrice de bactéries lactiques diverses dans de nombreux aliments (notamment les végétaux, comme la choucroute, ou la charcuterie, comme les saucisses et saucissons). On considère les bactéries

lactiques comme sans danger et on extrapole en en disant autant de leurs bactériocines.

On vient, récemment de se rendre ainsi compte que les bactéries lactiques produisent d'autres substances protectrices contre les microorganismes non souhaités que les bactériocines.

Le terme de bactériocine a, initialement, été utilisé pour les protéines antimicrobiennes analogues à la colicine d'Escherichia coli. Il est maintenant utilisé pour tous les composés antimicrobiens à synthèse ribosomique. Les petites bactériocines qui sont, de ce fait, relativement thermostables (et donc utilisables dans des procédés où des traitements thermiques sont pratiqués) sont considérées comme prometteuses. Elles ont, de plus, un spectre de cibles intéressant, car comprenant notamment Listeria, Clostridium et d'autres bactéries Gram+ y compris les autres bactéries

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lactiques qui ne sont pas toujours désirables dans une fermentation donnée.

Les bactériocines des bactéries Gram+ sont, soit des lantibiotiques modifiés post traductionnellement par déshydratation, notamment de thréonine et sérine, ou des lanthionines (type I), soit de petits peptides non modifiés (type II). Certains composés de faible masse moléculaire sont produits par les bactéries des fermentations alimentaires ou du tube digestif. Ces sont des dipeptides cycliques ou le β-hydroxypropionaldéhyde qui sont des antifongiques

On a récemment montré que la nisine qui a été très étudiée, interagit avec un précurseur membranaire du peptidoglycane de la paroi, le lipide II. Le cycle N-terminal de la nisine est impliqué dans cette interaction, tandis que la partie médiane flexible du peptide participe à la formation de pores dans la membrane de la cible.

Les pédiocines sont des bactériocines de type II qui possède toutes un motif N-terminal conservé (YGNGVXCXXXXCXV). L'activité dépend d'une α-hélice C-terminale (à l'autre bout du peptide).

Les auteurs discutent la synthèse et le mode d'action de ces antimicrobiens. On commence donc à pouvoir imaginer de nouvelles bactériocines. Mais, pour l'instant, ce n'est encore qu'un vœu pieux. On peut, par contre, détecter plus facilement des gènes de synthèse ou d'immunité, ce qui a été fait chez deux pathogènes, Streptococcus pneumoniae et Streptococcus mutans. Ce qui serait intéressant serait de caractériser leurs régulations.

127. Des chercheurs de l'INRA à Montpellier

proposent un modèle de la fermentation œnologique, avec une analyse des effets de l'azote assimilable et de la température sur la cinétique en conditions réelles. S Malherbe et al.; Biotechnology & Bioengineering 86 (05MAY04) 261-272. Les données acquises ont été vérifiées expérimentalement.

128. Dans le vin, comme dans beaucoup de jus de

fruits, des aglycones (monoterpènes, norisoprenoïdes, composés aliphatiques et phénoliques) sont couplés d'abord à un glucose puis à des mono- ou disaccharides substitués par des α-L-arabinofuranosyl, α-L-rhamnopyranosyl, β-D-xylopyranosyl ou β-apiofuranosyl.

Ces derniers sont dégrafés les premiers, durant la fermentation malolactique, avant qu'une β-D-glucosidase enlève le glucose. C'est, tout au moins, ce que l'on suppose. Des chercheurs australiens et italiens N D’Incecco et al.; Food Microbiology 21 (JUN04) 257–265 ont vérifié ces activités enzymatiques chez le cépage Chardonnay par une souche d'Oenococcus oeni. Six aglycones ont été analysés (3-hydroxydamascone, α-terpinéol, vanilline, méthyl vanillate, acide 4-hydroxybenzoïque et tyrosol). La souche O.oeni Lalvin EQ54 possède une β-glucosidase et des activités limitées en α-L-rhamnopyranosidase et α-L-arabinofuranosidase. L'addition de ces deux enzymes facilite à la fois la libération des disaccharides et la fermentation

malolactique sans, pour autant , accélérer la multiplication de la bactérie.

129.*** L'addition de starters malo-lactiques dans

le vin présuppose une étude de l'effet du choc éthanolique à l'inoculation d'Oenococcus oeni. En effet, l'inoculation des starters entraîne beaucoup de déchets. MG Silveira et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (MAY04) 2748-2755 ont étudié la localisation dans la cellule des protéines impliquée dans la tolérance à l'éthanol (essentiellement membranaires).

130.*** Une phytase idéale doit survivre aux

traitements de mise en pellets notamment les traitements thermiques et doit avoir une forte activité à bas pHs (celui de l'estomac). Je rappelle que les phytases permettent de mieux utiliser les phytates des plantes (myo-inositol 1,2,3,4,5,6-hexakis dihydrogène phosphate) chez la volaille et les porcins (les monogastriques). Des chercheurs de Diversa ont amélioré la tolérance thermique et les performances gastriques de la phytase d'Escherichia coli . JB Garrett et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (MAY04) 3041-3046. Les auteurs ont utilisé une mutation à saturation.

131. Des chercheurs de Norwich montrent comment

on peut extraire les arabinoxylanes et l'acide férulique mono- et dimérique du brassin de brasserie, la pâte de malt hydrolysée qui est, en fait, un sous-produit après extraction du moût, et que l'on souhaiterait valoriser. CB Faulds et al.; Applied Microbiology & Biotechnology 64 (JUN04) 644-650. Les auteurs ont utilisé des féruloyl estérases et glycosyl hydrolases d'Humicola insolens contenues dans la préparation commerciale Ultraflo L de Novozymes. L'hydrolyse des arabinoxylanes est également nécessaire pour augmenter la production d'éthanol à partir du blé. L'examen de ce qui se passe chez le blé et l'orge indique des différences notables entre les structures des arabinoxylanes féruloylés entre les deux grains.

132. Les végétariens sont une nouvelle niche de

l'industrie agro-alimentaire. Une revue sur les substituts de viande est parue dans MJ Sadler; Trends in Food Science & Technology 15 (MAY04) 250-260.

La revue analyse le marché et les développements techniques mis en œuvre pour répondre à la demande. On estime, dans une enquête publiée en 2001, à 4% la proportion des anglais se réclamant de cette religion. Ce pourcentage est monté à 5,7% pendant la crise de la vache folle. Elle était de 2,1% en 1984.

Si les végétariens semblent avoir moins de risques d'un certain nombre de maladies, on n'a pas tenu compte dans les statistiques du fait que c'est aussi un mode de vie un peu différent que mènent ses adeptes. N'empêche, c'est bien un créneau que l'on peut occuper.

Le soja (Glycine max et pas le haricot mungo) est consommé depuis 4000 ans en Chine et ce n'est que dans les 40 dernières années qu'il a commencé à entrer dans les mœurs alimentaires de l'Occident. Ce sont

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surtout les extraits et les protéines et le produit fermenté du soja qu'est le tofu (après extraction de la sauce de soja). Les isolats de protéines de soja sont la forme la plus raffinée, car dépourvue des saccharides et des huiles. Extraits à l'eau, ils contiennent les isoflavones de la graine, mais ont été débarrassés des antinutritionnels naturels (inhibiteurs de trypsine) par chauffage. A partir de là on peut en faire ce que l'on veut, des saucisses, des blancs et autres imitations de produits de "poulet".

Les protéines texturées sont préparées à partir de farine de soja dégraissée puis extrudées. On s'en sert dans des hamburgers, des "saucisses", etc…

Le tofu est celui des produits qui est le moins riche en protéines. On coagule le soja avec du sulfate ou du chlorure de calcium. On peut en faire ce que l'on veut, car il n'a strictement aucun goût. On peut améliorer la texture en créant l'illusion de fibres pour simuler le muscle, comme dans le surimi.

Sur le plan nutritionnel de nombreuses études ont été réalisées et les conclusions de la UK Joint Health Claims Initiative britannique de 2002 sont qu'effectivement une ration quotidienne de 25 g de protéines de soja par jour combinés à un reste de l'alimentation pauvre en graisses saturées et en cholestérol, vous fera du bien. Mais les conclusions indiquent qu'il faut que le produit conserve les isoflavones du soja.

Il existe d'autres graines de légumineuses qui se prêtent à ce genre de cuisine, mais elles ne sont pas utilisées commercialement et restent du domaine de la cuisine familiale et folklorique et ne cherchent pas à imiter une viande.

On peut également utiliser le gluten des céréales associé ou non, à part égale, à des protéines de pois.

Le Quorn™ de Marlow Foods a été une préparation entièrement nouvelle dont ce bulletin a fait état à de nombreuses reprises depuis son lancement par ICI au début des années 80s. C'est le mycélium de Fusarium venenatum A3/5 (ATCC PTA-2684). C'est une mycoprotéine produite en continu et commercialisée depuis 1984. On traite le mycélium pour le débarrasser d'une partie de l'ARN. La biomasse est alors filtrée et agglomérée par du blanc d'œuf. On peut alors lui donner l'arôme que l'on veut, comme dans le cas des surimis.

Inversement, si on consulte les données sur les allergies alimentaires de la FAO, la viande est certainement loin derrière (sauf la chair de poisson) le soja (et l'arachide), le gluten de céréales. L'allergie au

gluten (une allergie ne faisant pas intervenir les IgE) représente de 1 à 30 pour mille des personnes selon la technique de détection.

Mais il reste encore beaucoup de choses à confirmer. Les allergies liées au soja dépendent de la préparation utilisée, mais on constate des doubles allergies au lait et au soja.

Le Quorn™ comme tout nouvel aliment a été surveillé sur ce point . Commercialisé depuis 20 ans il ne donne pas lieu à plus d'allergie que les aliments classiques usuels (moins d'un cas par million de boites vendues). Les études de réactions croisées indiquent qu'on constate la présence d'antigénicités croisées avec Cladosporium herbarum, Aspergillus fumigatus et quelques une avec Alternaria alternata. Il convient donc être prudent pour les personnes connues pour avoir des allergies aux champignons.

133. L'idée d'utiliser des levures immobilisées en

brasserie n'est pas vraiment nouvelle. Elle est intéressante dans un processus en continu. Dans une fermentation continue, la population de microorganisme doit s'entretenir sur des périodes longues et, par conséquent, être stable génétiquement et physiologiquement et, bien entendu, toute contamination doit être évitée. Les premiers essais de brassage en continu ont été réalisés en 1900, mais ils échouèrent faute de satisfaire ces conditions.

Seules deux brasseries en Nouvelle Zélande ont utilisé ce procédé depuis 1959 ainsi qu'apparemment une grande brasserie japonaise qui utiliserait, au moins au stade pilote, un procédé à haute densité de cellules que permet ce procédé. Une des raisons du faible succès est probablement l'exigence d'un pilotage soigné des installations en sus des exigences classiques, ainsi que le manque de souplesse quantitative et qualitative vis à vis de la demande de bière. On peut, par contre, abaisser à quelques jours le temps de fermentation.

Mais un des problèmes reste la difficulté à maîtriser la production des flaveurs qui font de la bière une boisson agréable. On pense que le CO2 a un effet inhibiteur sur la croissance et le métabolisme de la levure, notamment sur le pompage des acides aminés ramifiés et la production des alcools à longues chaînes et des esters. Une matrice récupérant le gaz permet de tourner cet obstacle. HY Shen et al.; Applied Microbiology & Biotechnology 64 (JUN04) 636-643.

Les Pré et Probiotiques et Autres 134. K Brandt et al.; Trends in Food Science &

Technology 15 (JUL-AUG04) 384-393, exposent les résultats d'une analyse européenne sur les effets positifs des fruits et légumes sur la santé. On prête depuis des lustres des qualités, de ce point de vue, à la consommation de cinq fruits et légumes par jour (pourquoi cinq et pas dix???). Autant donner une base un tant soit peu solide à ces affirmations.

L'introduction de l'article est une réflexion sur le sujet. Elle insiste sur le fait que la santé par la nourriture ne vient pas surcharger le budget santé des nations (elle n'est pa remboursée par la Sécurité Sociale), et elle est d'un coût équivalent à la nourriture

elle-même. Elle souligne que les bienfaits sont surtout déduits des carences, comme cela a été le cas pour les vitamines au début du XX° siècle. La surcharge en ses éléments "bénéfiques" n'a pas un effet bien sensible si ce n'est, comme cela a été le cas pour les vitamines, des dangers lors de supplémentations incontrôlées (cas du β-carotène, que l'on n'a pas hésité à utiliser à hautes doses penant la bataille d'Angleterre chez les pilotes de chasse, mais ils mourraient bien plus vite d'autres choses).

La linéarité des réactions permet cependant de déterminer qu'environ 400 grammes de fruits et légumes par jour sont un ordre de grandeur

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raisonnable et que 200 grammes est un seuil inférieur en l'absence de complémentation par d'autres aliments ou de supplémentation. Une autre affirmation selon laquelle les légumes c'est mieux que des pilules de suppléments alimentaires, reste à prouver. De toute façon, la meilleure réponse est que les effets bénéfiques sont dus à des substances, probablement inconnues jusqu'à présent, et donc absente des supplémentations.

De plus l'effet de la cuisson des produits végétaux de l'alimentation modifie probablement leurs propriétés (ce qui fait dire qu'il vaut mieux les consommer crus ???). La variabilité entre cultivars est encore très mal connue, et il est difficile de généraliser des observations ponctuelles. Ce n'est pas très satisfaisant. Le bon sens qui dicte de manger de la façon la plus variée possible (ce qui est un luxe de nos civilisations développées) pallie cette ignorance.

Cette étude avait pour but d'identifier de nouvelles substances potentiellement bénéfiques pour notre santé. Malheureusement cet article aux nombreux signataires finit par conclure que le mieux dans ce domaine c'est le falcarinol des carottes, et on retombe dans un certains pointillisme.

135.*** LH Duc et al.; Applied & Environmental

Microbiology 70 (APR04) 2161-2171 ont caractérisé

les Bacillus présents dans des préparations dites probiotiques et vendues en tant que tel. Bacillus cereus, Bacillus clausii, Bacillus pumilus ont été retrouvés dans cinq préparations commerciales vendues sous forme de spores. Leurs propriétés de colonisation, immunostimulation et activités anti-microbiennes ont été examinées. Les cocktails commercialisés contiennent jusqu'à 109 spores/g ou 109 spores/ml dans chaque dose.

Trois souches de B.cereus survivent jusqu'à 18 jours dans le tractus digestif de souris. Elles sont donc capables de colonisation. Les spores de l'une des souches de B.cereus sont, par contre, incapables de résister à l'acidité de l'estomac, ni au fluide intestinal. Toutes les spores des bactéries étudiées sont immunogéniques par voie orale, mais une des souches de B.pumilus engendre une réponse particulièrement élevée en IgG contre les spores. Certaines sont pro-inflammatoires. La souche de B.pumilus et l'une des souches de B.cereus (B.cereus var. vietnami) produisent une bactériocine contre les autres Bacillus. Tout ceci en ferait, peut être des probiotiques acceptables si trois des souches de B.cereus ne produisaient pas les entérotoxines Hbl et Nhe, ce qui est très regrettable.

La sécurité alimentaire 137. La production de bactériocine par une

bactérie ne va pas sans un système d'immunité contre cette bactériocine. Les protéines d'immunité contre les bactériocines de type pédiocine sont très spécifiques de ce point de vue. L Johnsen et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (MAY04) 2647-2652 ont recherché les motifs responsables de cette spécificité. Six protéines d'immunité hybrides ont été construites à partir de trois protéines de ce type ayant des séquences semblables, mais une spécificité différente. Les auteurs ont, ainsi, pu montrer que la spécificité réside dans la partie aval (C-terminale) de la protéine. Mais l'efficacité de ces protéines diffère selon la souche où elles sont exprimées, ce qui indique l'intervention d'autres facteurs cellulaires. Les protéines d'immunité contre l'entérocine A et la leucocine A (EntA-im et LeuA-im) ont été purifiées et leur structure examinée. Toutes deux sont des α-hélices. Mais leur activité, contrairement à celle des bactériocines ,n'implique pas d'association avec la membrane.

138. L'ovalbumine est une glycoprotéine qui

constitue le composant le plus important du blanc d'œuf. Elle comporte trois isoformes différant par leur phosphorylation. On avait découvert qu'elle fait partie de la superfamille des inhibiteurs de protéases à sérine, donc une serpine, mais sans en avoir cette propriété inhibitrice. Des peptides antimicrobiens sont connus dans toutes sortes d'organismes. On peut les obtenir par hydrolyse de toute une série de protéines fonctionnelles. C'est le cas de la cathepsine G, l'aprotinine, le lysozyme, la lactoferrine, l'α-lactalbumine et la β-lactoglobuline. Des fragments protéolytiques (obtenus par la trypsine ou la

chymotrypsine) de l'ovalbumine ont, également, des propriétés antimicrobiennes. A Pellegrini et al.; Biochimica et Biophysica Acta General Subjects 1672 (03MAY04) 76-85.

Ils sont très actifs contre Bacillus subtilis et dans une moindre mesure contre d'autres bactéries. L'ovalbumine peut donc fournir, indirectement une protection antibactérienne. D'où l'intérêt, je suppose, de gober des œufs crus.

141. La flore intestinale est très riche. On estime

que 99% de cette flore est anaérobie et constituée essentiellement de Bacteroides, Clostridium et Fusobacterium. Ce sont, par définition des commensaux, mais il ne faut pas que ces bactéries quittent ce ghetto soigneusement contrôlé par l'organisme pour s'installer ailleurs, car certaines sont des pathogènes opportunistes pouvant être dangereux. Les infections par des microbes anaérobies sont difficiles à bloquer du fait de résistances aux antibiotiques acquises par transfert horizontal très facile dans les conditions incroyables de densité de la microflore du colon. G Vedantam et al.; Current Opinion in Microbiology 6 (OCT03) 457-461 traitent de cet aspect de la coexistence dans le tube digestif humain. Les auteurs se préoccupent de ce qu'il faut faire quand le confinement des bactéries échappe à l'organisme.

142. L'histamine est un signe de putréfaction et

une cause d'allergies alimentaires qu'on rencontre, notamment, dans les poissons pas frais. Elle est produite par des microorganismes contaminants possédant une forte activité L-histidine décarboxylase. Il est donc souhaitable de pouvoir la

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détecter autrement qu'à l'odeur. On utilise usuellement la fluorométrie ou la HPLC mais c'est long et

Le plus simple est d'utiliser des enzymes donnant un produit facilement détectable. C'est le cas des oxydases et on connaît de nombreuses amine-oxydases, mais leur spécificité est faible puisqu'elles détectent, entre autres, tyramine, putrescine et cadavérine.

Une histamine oxydase relativement spécifique de l'histamine (mais encore plus de la tyramine) a été isolée d'Arthrobacter globiformis IFO12137. Or le thon (comme le chocolat) contient beaucoup de tyramine. Il faut donc améliorer cette enzyme. En fait, on en trouve une qui est thermostable (65°) et plus spécifique chez un Arthrobacter crystallopoietes. Son pHopt est de 9.0, et elle est stable de pH6 à 9. Elle est inactive sur putrescine, cadavérine, spermine et spermidine. Elle contient un atome de cuivre. Y Sekiguchi et al.; Journal of Bioscience & Bioengineering 97, 2 (2004) 104–110.

143. A O'Brien et al.; FEMS Microbiology Ecology

48 (MAY04) 157-167 décrivent des résultats de leurs recherches sur des microbes de l'Antarctique. Des substances bactériostatiques ou carrément antimicrobiennes permettant de préserver des aliments pendant leur stockage en réfrigérateur. Les souches isolées ont été criblées contre Listeria innocua, Pseudomonas fragi et Brochothrix thermosphacta. L'idée est que ces antimicrobiens doivent fonctionner à froid pour conférer un avantage sélectif suffisant à ces organismes cryophiles et, en particulier, continuer à être exprimés aux températures du réfrigérateur. La nature de ces inhibiteurs est manifestement en cours

d'étude et certains sont protéiques. Quatre des bactéries productrices sont des Arthrobacter, Planococcus et Pseudomonas.

144. Lactobacillus casei CRL705 produit des

bactériocines actives sur Listeria innocua et Lactobacillus sakei CRL1424. Cette bactérie a été isolée de saucissons. Des chercheurs argentins ont étudié leur effet dans des extraits et des pâtés de viande, pendant leur stockage au froid. PH Castellano et al.; Food Microbiology 21 (JUN04) 291–298. Cette bactérie semble pouvoir être utilisée dans ces conditions. En effet, de plus en plus de viandes sont expédiées sous vide et au froid, conditions dans lesquelles les bactéries lactiques ont un avantage sur les contaminants comme les Enterobacteriacées et Brochothrix thermosphacta. Dès qu'on ouvre le paquet, les pathogènes peuvent reprendre le dessus, et il vaut mieux que leur persistance soit la plus faible possible.

145. JC McEntire et al.; Applied & Environmental

Microbiology 70 (MAY04) 2717-2721, montrent que la résistance à la nisine de Listeria monocytogenes ATCC 700302 est liée à une activité plus vigoureuse de l'ATPase F0F1 éjectant les protons. En effet, un mutant spontané de cette bactérie présente une résistance à cette bactériocine, et iune plus grande sensibilité aux pHs acides que la bactérie normale. La résistance à la nisine et la sensibilité aux pHs acides sont indépendantes. Mais l'activité accrue de l'enzyme vide la cellule de son ATP et cause sa mort en milieu acide.

L'Environnement 146. Pseudomonas B4 est capable de dégrader les

biphényls polychlorés (PCBs). On sait que les polyphosphates inorganiques (polyP) jouent un rôle dans l'accroissement de la résistance microbienne aux stress. En présence de PCBs et polychlorobiphényls, cette bactérie accumule à la fois les polyPs et des protéines de stress comme GroEl . FP Chavez et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (MAY04) 3064-3072.

147. La biodégradation anaérobie du

tétrachlorure de carbone par des Geobacter, qui procède par une respiration sur quinones, est facilitée par la présence d'acides humiques ou de leur analogue AQDS (anthraquinone-2,6-disulfonate un médiateur redox) qui sont réduits au cours de la dégradation. Mais on obtient des produits intermédiaires comme le perchloroethylène, guère plus ragoutant. FJ Cervantes et al.; Applied Microbiology & Biotechnology 64 (JUN04) 702-711.

********************** 148. R Chakraborty et al.; Applied Microbiology &

Biotechnology 64 (MAY04) 437-446, passent en revue les voies de dégradation anaérobie des hydrocarbures monoaromatiques. On connait relativement bien la dégradation aérobie de ces substances, moins celle par voie anaérobie.

Benzène, toluène, ethylbenzène et les trois isomères du xylène (BTEX) peuvent être dégradés de façon anaérobie par un grand nombre de microorganismes. Ces substrats constituent une source de carbone et d'énergie dans le cadre d'une respiration anaérobie sur nitrate, fer ferrique, sulfate ou dioxyde de carbone ou chez des bactéries phototrophes.

On a également observé une dégradation de ces substrats dans le cas d'une respiation sur des oxyanions du chlore, comme chlorate ou perchlorate, ou avec réduction des quinones des substances humiques. En général la voie s'amorce avec une activation du substrat par addition de fumarate.

Dans le cas du toluène, l'addition du fumarate sur le groupe méthyle assurée par la benzylsuccinate synthase semble le mécanisme universel d'amorçage. Chacune des voies présnete des intermédiaires qui permettent de déterminer la voie utillisée dans un environnement donné.

149. La diversité génétique et fonctionnelle des

communautés bactériennes d'une nappe phréatique contaminée par des BTEX (voir §148) a été évaluée par des chercheurs de Milano. L Cavalca et al.; Applied Microbiology & Biotechnology 64 (MAY04) 576-587. Cette analyse a été pratiquée pour mettre au

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point un consortium bactérien aérobie stimulable par aération forcée.

Les auteurs ont mesuré l'expression de gènes correspondant à des toluène monooxygénases (tmo), catéchol 1,2-dioxygénases, catéchol 2,3-dioxygénases et toluène dioxygénase extraits de la nappe sans culture préalable. Cinq mois d'injection d'oxygène réduisent la diversité des espèces cultivables, mais sans réduire sensiblement celle de la communauté totale. Ce sont des Pseudomonas, Microbacterium, Azoarcus, Mycobacterium et Bradyrhizobium qui dégradent les BTEX. Il semble que, chez certaines de ces bactéries, plusieurs voies de dégradation soit simultanément actives.

De plus les souches les plus abondantes sont des Pseudomonas de type P24 ne poussant que sur catéchol et pas sur BTEX, ce qui indique qu'elles utilisent les déchets des autres.

150.*** L'alachlor (2-chloro-2',6'-diéthyl- N-

(méthoxyméthyl) acétanilide) est un herbicide de faible toxicité, mais qui pourrait être hépatotoxique. C'est un herbicide de pré- et post-émergence utilisé en mélanges sur sojas, colzas, canne à sucre et coton. Il est phytotoxique pour la betterave et les cucurbitacées. Il donne lieu à un lessivage modéré dans les sols. Son utilisation demande donc une pratique agricole bien maitrisée, pour éviter une contamination des eaux et des aliments.

Des chercheurs de Campinas décrivent la dégradation de l'alachlor par des streptomycètes du sol. L Duraes et al.; Applied Microbiology & Biotechnology 64 (JUN04) 712-717. Ce sont des streptomycètes résistants à cet herbicide. Les auteurs

ont analysé les intermédiaires et les produits finaux de dégradation.

********************** 151.*** Le vanadium est le métal de transition le

plus fréquent dans les eaux au voisinage de certaines mines métalliques. Il est également présent dans beaucoup de gisements de matériels organiques fossiles. C'est, par ailleurs, un métal stratégique dans beaucoup d'applications industrielles. Le vanadium peut exister sous des formes d'oxydations très diverses allant de –2 à +5,mais ce sont les formes +3, +4 et +5 que l'on trouve dans la nature.

Sa toxicité est d'autant plus élevée que son degré d'oxydation l'est également. La forme pentavalente est, à la fois, la plus soluble et la plus toxique. On vient de montrer que Geobacter metallireducens est capable de réduire le vanadium (V vanadate) en (IV vanadyl)) qui précipite à partir de l'oxydation de l'acétate. I Ortiz-Bernad et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (MAY04) 3091-3095.

********************** 152. La réponse des archées aux pollutions des

rivages par les hydrocarbures est inconnue. C'est la raison pour laquelle des chercheurs de Newcastle en ont entrepris une étude. WFM Röling et al.; Applied & Environmental Microbiology 70 (MAY04) 2614-2620. Ce sont, pour l'essentiel, des euryarchées. Elles sont sévèrement affectées par ces contaminations en microcosmes, apparemment moins en conditions naturelles, où la population est constamment alimentée par la mer et les animaux, pendant qu'une population bactérienne dominée par les Alcanivorax se charge de dégrader les hydrocarbures.

**********************

La sécurité génétique 153. Des chercheurs catalans ont recherché la

transmission aux bactéries des champs de maïs du gène de résistance à l'ampicilline présent dans un montage commercial de maïs Bt (Bt176). Les résistances décelées ne sont pas signficativement différentes de celles observées dans un champ de maïs classique (car ces résistances pré-existent dans la nature d'où on les a isolées. La recherche, dans l'ADN du sol, du gène bla (β-lactamase qui n'est pas exprimé dans la plante, mais y est présent) avec des sondes correspondant au gène et aux séquences flanquantes du vecteur de clonage pUC18 ou de la construction Bt176, ce qui permet de caractériser un transfert.

Les auteurs ont analysé des échantillons de champs et réalisé 864 analyses par PCR. Ils estiment avoir caractérisé 108 bactéries. Le seuil de détection a été estimé à 10-6. Quatre échantillons se sont révélés

positifs dans des champs Bt, et cinq dans des cultures de maïs classiques. Quand on a cherché à identifier les gènes présents dans ces échantillons, aucun ne correspondait aux constructions artificielles qui seraient la signature de la transmission à partir des maïs. Les auteurs discutent, fort à propos, les limites de ce type de recherches.

Sur le plan plus général, il faut se rappeler que le transfert de marqueurs de sélection n'a jamais été détecté dans le cas de bactéries pathogènes. On est arrivé, en laboratoire, à observer un tel transfert en utilisant des systèmes très compliqués permettant de tourner les barrières connues.

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La Politique 154.*** Friends of the Earth, un groupe

"environnemental" international dans sa version londonienne, souhaite publier les moyens d'accès aux données industrielles sur la toxicologie des produits. Elle s'appuye sur son expériences avec les données de Bayer CropScience. Comme ceci pourrait intéresser les concurrents de la firme. Bayer CropScience,.la société ne souhaite pas perdre le contrôle des données et a donc cherché, par voie judiciaire, à empêcher cette publication. Dans son cas, s'agit de résistances du maïs l'herbicide glufosinate ammonium. L'herbicide est autorisé depuis dix ans en Grande Bretagne au vu des données toxicologiques. Ce sont ces données que voulait publier l'organisation. Elle y a eu accès dans les bureaux de la société, mais sans pouvoir en emporter copie. J Giles; Nature 428 (08APR04) 590.

Mais fin Juin la société a renoncé, moyennant une renonciation à toute poursuite judiciaire sur cette base. www.foe.co.uk/campaigns/realfood/news/ 2004/june/bayer/index.html

155. Un article de deux chercheurs du Sandia

National Laboratories, Albuquerque, NM, prennent la défense des restrictions sur les pathogènes potentiels et discutent des moyens pour alléger le fardeau de la sécurité dans ce domaine, aux Etats-Unis. J Gaudioso et al.; Science 304 (30APR04) 687.

La détention des souches ou toxines doit être notifiée aux autorités. Celà fait actuellement tourner toutes les firmes de séquençages qui repèrent les caractéristiques de toutes les souches détenues, ce qui facilitera l'identification d'une fuite, comme celle du bacille du charbon utilisée en 2001 et qui n'a, à ma connaissance, pas été encore formellement identifiée.

Les exigences de sécurité comportent l'enregistrement du laboratoire et de l'institution qui l'héberge, la désignation d'un responsable de la sécurité, l'évaluation des risques posés par les personnes ayant accès à ce laboratoire, le respect des consignes pour les mouvements des agents pathogènes, la tenue de cahiers spéciaux, les restrictions à certaines expérimentations, etc… Mais tout ceci est stipulé dans un langage laissant une grande marge d'interprétation ce qui augmente à la fois la responsabilité, et ce faisant encourage les timorés à aller au delà d'une interprétation très restrictive. C'est notamment ce qui se passe pourles inspections prévues.

La restriction sur les personnes ayant accès à ce type de recherche est également vasouillarde (les motifs de figuration sur une liste de prohibition sont très variés, comme un exclusion de l'armée pour homosexualité!!!). Gare aux homonymies, et anomalies informatiques etc…

La liste des agents couverts par la réglementation est parfaitement manichéenne: un microbe y figure, et rien n'est autorisé, ou n'y figure pas, et tout est théoriquement permis. Légalement Bacillus anthracis et Rickettsia rickettsii sont mis sur le même plan, bien

que le charbon soit manifestement plus dangereux que le typhus.

Un certain nombre de chercheurs ont décidé de ne plus travailler sur ces agents, ne voulant pas aller en prison pour la moindre infraction involontaire (voir ce qui est arrivé à ce chercheur texan, je crois, qui ne savait plus ce qu'il avait fait d'une souche). Le CDC (Centre for Disease Control) estime à 817 le nombre des laboratoires qui devraient être enregistrés. Or seuls 323 le sont actuellement. La plupart d'entre eux ont arrêté leurs recherches, ce qui n'était probablement pas le résultat attendu. Stanford University a, par exemple, arrêté toute recherche dans ce domaine. Les collections de Francisella tularensis (agent de la tularémie) ont été transférées ailleurs ou détruites, après consultation des chercheurs. Cela coûtait trop cher d'appliquer les règles de sécurité imposées face à l'intérêt des collections.

Il conviendrait donc de sortir de ce piège déjà amorcé. La conception en noir et blanc des différents agents doit être affinée. Celà est évidemment fonction de la "militarisation" possible des agents (voir plus haut). Cette analyse est clairement différente de celle des risques sanitaires qui ne prennent en compte que les contaminations possibles au laboratoire. Il faudrait, comme pour bien d'autres risques, définir plusieurs niveaux (les auteurs en proposent quatre). Le plus bas est celui de plusieurs des agents de bioterrorisme. On exigerait seulement leur conservation dans des locaux fermés et un suivi des utilisations. La plupart des agents sont, selon eux d'un niveau de risque modéré et nécessiteraient, un contrôle limité des accès. Ces deux catégories ne sont pas très coûteuses à faire respecter. Très peu d'agents doivent être considérés comme à haut risque et requièrent des mesures plus drastiques, comme la supervision par un responsable de la sécurité affecté. Le risque extrême est celui du virus de la variole car il n'existe plus dans la nature et les sources disponibles sont extraordinairement limitée (officiellement deux). On peut alors se payer une garde spécialement affectée à cette ressource.

156. Dans un éditorial provocateur Y Chisti;

Biotechnology Advances 22 (MAY04) 361, pose la question de savoir qui a encore besoin d'une industrie laitière conventionnelle. Un bon fermenteur produirait des substituts tout à fait acceptables, à moindre risque et à un coût beaucoup plus réduit que la chaine agro-industrielle du pâturage au laitier du petit matin. Cette sortie a d'autant plus de sel qu'elle émane d'un chercheur néozélandais, où les coûts à qualité égale, sont les plus bas du monde.

Si cette production n'a pas encore été réalisée, elle est techniquement faisable. On fait déjà des substitut du beurre depuis un siècle à partir de substrat végétaux sans faire souffrir des vaches laitières à qui on impose génétiquement de fabriquer plus de dix tonnes de lait par an.