Contrôle parlementaire de l'état d'urgence

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L'Assemblée nationale veut contrôler l'état d'urgence. Cette note du députée PS Jean-Jacques Urvoas, transmise mercredi aux députés PS, en présente le cadre.

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  • Jean-Jacques Urvoas | 2 dcembre 2015

    Note sur le contrle parlementaire des mesures prises pendant ltat durgence

    Lors de lexamen parlementaire de la loi prorogeant ltat durgence, la Commission des Lois a unanimement adopt un amendement crant un nouvel article 4-1 dans la loi de 1955 installant le Parlement comme autorit de contrle durant toute la dure de ltat durgence. Par la suite, lAssemble nationale et le Snat ont confort cette perspective.

    Lambition tait ainsi de confrer au Parlement un pouvoir de contrle troit et constant sur les mesures adoptes et appliques par lexcutif en ce temps de crise.

    Sur ce chemin dmocratique, le Premier ministre, ainsi que le ministre de lIntrieur ont dores et dj pris linitiative de renouveler avec la voie qui a t partiellement trace par Michel Rocard dans un autre contexte puisquil sagissait alors de la Guerre du Golfe, en recevant les prsidents des groupes politiques des deux chambres pour leur exposer les manuvres opres.

    Guy Carcassonne soulignait qu il ne suffit pas de donner des pouvoirs lAssemble, encore faut-il que les dputs qui les exercent . Aussi, je vous propose aujourdhui une architecture de contrle parlementaire ambitieuse et indite.

    Avec Jean-Frdric Poisson, vice-prsident de la Commission des lois et co-rapporteur dapplication du texte prorogeant ltat durgence, nous allons mobiliser ainsi tous les pouvoirs mis la disposition des parlementaires, tant ceux cres par la loi de 1955 que ceux prvus dans le rglement de lAssemble nationale, pour quun contrle effectif et permanent des mesures prises pendant ltat durgence soit exerc.

    Ainsi, pour la premire fois depuis le dbut de la Vme Rpublique, la commission des Lois va se voir doter des prrogatives attribues aux commissions denqute, ainsi que le permet larticle 5 ter de lordonnance de novembre 1958.

    1. Lorganisation des travaux Les deux rapporteurs chargs de ce suivi auront ainsi la facult dexercer leur mission sur pices et sur place. Tous les renseignements de nature faciliter cette mission doivent leur tre fournis. Ils sont habilits se faire communiquer tous documents de service . La commission des lois leur donnera mandat pour que les informations quils jugeront utiles de diffuser sur le sujet soient publies au fil de leau , aprs consultation des services enquteurs. Cela permettra de nourrir chaque semaine en donnes statistiques un espace ddi sur le site internet de lAssemble et, toutes les trois semaines, de raliser une communication de synthse devant la commission.

  • 2. Contenu de la dmarche de contrle a) Objectif poursuivi Le contrle parlementaire se veut innovant. Sans prjudice du travail classique danalyse a posteriori de laction du Gouvernement qui conduira en dresser le bilan, il consistera mettre en place une veille parlementaire continue tout au long des trois mois. Quoique concomitante de laction des pouvoirs publics, il sagira donc de favoriser, en temps rel, le regard de lAssemble sur les services auxquels ont t consentis temporairement des pouvoirs particuliers et ainsi prvenir, le cas chant, tout risque dabus. Ce mode opratoire permettra ainsi la commission des Lois dvaluer la pertinence de lapplication de ltat durgence, en dlivrant une analyse technique et statistique complte ainsi quobjective des procdures mises en uvre, en valuant les bnfices retirs (scurit publique, procdures judiciaires, renseignement) des mesures exceptionnelles, et en adressant, le cas chant, des prconisations au Gouvernement dans le but, soit de renforcer lefficacit du dispositif, soit de mieux garantir les liberts publiques. b) Mthode propose Le contrle conjuguera un suivi hebdomadaire de donnes relatives la mise en uvre de ltat durgence et une rflexion plus approfondie sur certaines thmatiques. Ainsi, ds lentre en vigueur du dispositif, cinq tableaux de bord thmatiques seront institus et actualiss chaque semaine, grce une remonte quotidienne dinformations fournies par les ministres de lIntrieur et de la Justice : le suivi des procdures exceptionnelles de ltat durgence, leurs suites judiciaires, leurs suites administratives, les recours intents contre elles ou contre leurs suites, et le suivi par la presse de ltat durgence. En complment de ce suivi hebdomadaire et grce aux donnes ainsi collectes, le contrle sera complt, partir du dbut du mois de dcembre, par un travail denqute et dinformation portant sur plusieurs thmatiques dtermines en fonction des premires analyses des donnes fournies. Les outils de travail habituels dune commission denqute seront alors mobiliss : auditions, demandes de pices, contrles sur place et/ou dplacements sur certaines zones, envois de questionnaires, etc. Enfin, directement sollicit, le Dfenseur des droits a accept de mettre en alerte ses 397 dlgus territoriaux afin de transmettre des informations utiles la commission. Ceux-ci recevront les ventuelles rclamations des citoyens concerns par une mesure et communiqueront les lments indispensables une exploitation (date et heure des faits, lieu des faits, description prcise et chronologique des faits, prcisions sur les dmarches ventuellement entreprises pralablement par le rclamant et suites donnes).

  • Paralllement, la Commission nationale consultative des droits de lHomme (CNCDH) a t contacte pour conduire un travail de sensibilisation auprs des associations reprsentes en son sein pour, l encore, faire parvenir aux rapporteurs tous les lments quelles pourraient juger opportuns.

    Enfin, videmment les parlementaires qui devraient tre rgulirement informs par les prfets comme le ministre de lIntrieur en a accept le principe auront la facult de faire remonter des observations.

    3. Les modalits du contrle La commission des Lois, en plus de recourir ses moyens propres, a demand sappuyer sur un rseau de correspondants en poste au sein des structures de direction. Chacun dentre eux sera charg de centraliser les informations utiles au contrle parlementaire et constituera aussi un point dentre pour des demandes plus cibles. Ce rseau sera structur autour de sept correspondants :

    - Le premier lInspection gnrale de la Police nationale (IGPN), charg notamment de recueillir les lments utiles au travail des rapporteurs au sein du service central du renseignement territorial (SCRT), des directions dpartementales de la Scurit publique (DDSP), de la direction centrale de la Police judiciaire (DCPJ), de la direction du renseignement de la Prfecture de Police (DRPP), de la direction de la scurit de proximit de lagglomration parisienne (DSPAP), de la direction rgionale de la PJ et de lunit de coordination de la lutte antiterroriste (UCLAT) ;

    - Le deuxime la direction gnrale de la Scurit Intrieure (DGSI) ; - Le troisime lInspection gnrale de la Gendarmerie nationale (IGGN), ce qui

    permettra de solliciter la sous-direction lanticipation oprationnelle (SDAO) et les diffrents groupements dpartementaux de la Gendarmerie nationale ;

    - Le quatrime auprs du Coordonnateur national du Renseignement, de manire obtenir des lments auprs de la direction de la protection et de la scurit de la dfense (DPSD), de Tracfin et de la direction gnrale de la Scurit extrieure (DGSE) ;

    - Le cinquime au parquet de Paris ; - Le sixime auprs du Dfenseur des droits ; - Le septime au secrtariat gnral du Conseil dtat, pour le suivi des recours ports

    devant les juridictions administratives ou des questions prioritaires de constitutionnalit.

    Pour tre efficaces, ces correspondants devront disposer dune autorit suffisante lgard des services oprationnels. Il reviendra au Gouvernement de procder la dsignation des cinq premiers correspondants ; les deux derniers pourraient tre choisis par le Dfenseur des droits et le Vice-Prsident du Conseil dtat.

  • 4. Le calendrier des travaux Les travaux se poursuivront tout au long du mois de janvier et intgreront, la fin de la priode, une audition du ministre de lIntrieur. Le bilan prendra la forme dun rapport dfinitif susceptible dtre dbattu loccasion dune sance ddie dans le cadre dune semaine de lAssemble nationale consacre au contrle parlementaire.

  • Collecte de donnes factuelles prcises (cf.

    exemple page suivante) au sein de lappareil dtat, via des correspondants

    (cf. infra)

    Le suivi statistique des procdures :

    - perquisitions administratives ;

    - dissolution dassociations et de groupements

    - assignations rsidence ;

    Suivi et documentation par

    lquipe administrative

    CHAQUE JOUR :

    Remonte de linformation UNE FOIS PAR SEMAINE :

    Actualisation de cinq tableaux de bord

    Les recours :

    - saisines du dfenseur des droits ;

    - recours administratifs

    Les suites administratives :

    - saisies darmes ;

    - alimentation et structuration du renseignement

    Les suites judiciaires :

    - interpellations ;

    - GAV ;

    Le suivi par la presse :

    - donnes contradictoires publies ;

    UNE FOIS PAR SEMAINE :

    Publication web de donnes statistiques

    Sur le site internet AN :

    - donnes de volumes sur les procdures et leurs suites ;

    - idem sur les recours

    TOUTES LES 3 SEMAINES :

    Communication la Commission

    Communication dune synthse sur lensemble des donnes collectes.

  • Elments demands pour la perquisition administrative Date et Heure de dbut Adresse, code postal Nature du local : par destination, afin disoler les locaux professionnels, dhabitation, etc. Autorit dcisionnaire : service demandeur Origine du ciblage : il sagit de dterminer llment dclencheur de la perquisition. Dans le cas o celui-ci est une demande ou une information manant dun service (de scurit ou de renseignement), il convient de prciser lequel. Si la dcision fait suite un tmoignage, une audition, une prcdente perquisition ou lexploitation des techniques de renseignement ou de donnes numriques saisies, il convient galement de le prciser. Unit en charge et effectif mobilis Saisie : si oui, prciser. Exploitation de donnes numriques : dans le cas o du matriel informatique est saisi, ou non Personne prsente : il sagit notamment de prciser le lien de la personne non seulement avec le local, mais aussi avec lenqute en cours (prciser laquelle). Infraction releve Elments demands pour lassignation rsidence : Date et Heure de dbut Plage horaire dassignation rsidence Nombre de pointages prvus Adresse Code postal Lieu de lassignation (notamment si autre que domicile) Autorit dcisionnaire : service demandeur Origine du ciblage Unit en charge et effectif mobilis Motifs invoqus Bnfices induits