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Cour d’appel de Bruxelles, Arrêt du 13 octobre · PDF filevices et malfaçons affectant la villa à 1.192.781 F et Vu ... le jugement attaqué, prononcé contradictoirement le 16

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Page 1: Cour d’appel de Bruxelles, Arrêt du 13 octobre · PDF filevices et malfaçons affectant la villa à 1.192.781 F et Vu ... le jugement attaqué, prononcé contradictoirement le 16

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Droit de la construction Indépendance de l’architecte n° 264

Cour d’appel de Bruxelles, Arrêt du 13 octobre 1993 Lorsqu'il résulte des éléments de .la cause qu'un architecte, chargé de rédiger les documents nécessaires à l'autorisation de bâtir, conformément au contrat intervenu entre l'entrepreneur général et le maître de l'ouvrage, ne jouissait d'aucune indépendance à l'égard de cet entrepreneur et n'avait, en contractant, ni l'intention, ni la possibilité d'exercer ses missions légales dans les conditions imposées par la loi, le contrat est nul pour violation des dispositions d'ordre public de la loi du 20 février 1939 (JT 1994, p. 157).

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Arrêt du 13 octobre 1993 Le Tribunal, (…) Vu ... le jugement attaqué, prononcé contradictoirement le 16 octobre 1989 par le tribunal de première instance de. Nivelles, ... Faits et antécédents de la cause. Le 25 février 1985, Mme Moranduzzo et la société Houyoux Construct signent quatre documents, à savoir: - un contrat d'entreprise, par lequel cette société s'engage à construire une villa « selon l'avant-projet ci-joint », dans le délai de septante jours ouvrables, pour le prix forfaitaire de 1.840.000 F, - l'avant-projet, émanant du bureau de l'architecte Bouche, portant la date du 12 février 1985, non signé par l'architecte, - un cahier des charges détaillé, établi par la société Houyoux Construct, - un métré descriptif des travaux émanant également de la société Houyoux Consttuct. Le 5 mars 1985, Mme Moranduzzo signe avec l'architecte Bouche un contrat par lequel celui-ci s'engage à accomplir les missions précisées à l'article 3 de la convention, moyennant des honoraires fixés au montant forfaitaire de 70.000 F. Au cours de l'exécution des travaux, outre le non-respect du délai contractuel d'exécution, de graves problèmes se manifestent notamment à la toiture.

Mme Moranduzzo demande au président du tribunal de première instance de Nivelles siégeant en référé, l'institution d'une expertise, demande à laquelle il sera fait droit à l'égard de la société Houyoux Construct, par ordonnance du 7 février 1986 et à l'égard de l'architecte Bouche, par ordonnance du 7 juillet suivant. L'expert judiciaire déposera son rapport le 19 décembre 1986 et évaluera globalement le coût de réparation des vices et malfaçons affectant la villa à 1.192.781 F et divers préjudices, dont l'indemnisation du retard d'exécution, à 319.843 F. Par citation du 3 mars 1987, Mme Moranduzzo demande au premier juge la condamnation de l'architecte et de l'entrepreneur, lequel sera déclaré en faillite en cours d'instance, à réparer le dommage qu'elle a subi. Le jugement attaqué du 16 octobre 1989 fait droit à cette demande et condamne solidairement l'architecte et l'entrepreneur à payer 413.521 F en principal et l'entrepreneur, à payer 603.985 F, en principal. L'architecte Bouche relève appel de cette décision, d'une part aux motifs que son intervention est postérieure à celle de l'entrepreneur et, que l'antériorité des documents établis par l'entrepreneur « (1)' obligeait à se maintenir dans la conception faite essentiellement par l'entrepreneur ... et que dans ces circonstances, l'architecte n'est plus un concepteur mais bien le rédacteur des documents nécessaires à l'autorisation de bâtir, conformément au contrat intervenu entre l'entrepreneur général et le maître de l'ouvrage » (souligné par l'architecte Bouche, requête d'appel, p. 15) - considérations dont l'architecte déduit que l'entrepreneur assumait la responsabilité de concepteur, et, d'autre part, au motif que les vices et malfaçons relevés par l'expert judiciaire résultent de fautes d'exécution imputables à l'entrepreneur; Qu'il conclut à la réformation du jugement et à sa mise hors de cause.

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Droit de la construction Indépendance de l’architecte n° 264

Au fond la nullité du contrat de l'architecte. Attendu que l'architecte est investi d'une double mission spécifique, - étant la conception et le contrôle de l'exécution des travaux -, mission qui lui est légalement réservée pour tous les ouvrages exigeant la délivrance d'un permis de bâtir; que cette intervention de l'architecte tend à une double protection, celle des maîtres de l'ouvrage et celle de la sécurité publique qui exige que les immeubles soient solides (Cass., 5 mai 1967, Pas., 1968,516); Que les dispositions de la loi du 20 février 1939 sur la protection du titre et de la profession d'architecte, notamment l'article 6, érigent en impératif catégorique l'indépendance de l'architecte et la dissociation nécessaire entre la conception et le contrôle de l'exécution des travaux d'une part et leur exécution d'autre part, tant dans l'intérêt de la profession d' archi-tecte que dans celle des maîtres de l'ouvrage (Cass., 3 mai 1974, Pas., 917); Que ces principes ne constituent nullement des poncifs et des règles de droit relatifs à la conception de la mission d'architecte en circonstance normale, comme les qualifie l'architecte Bouche dans sa requête d'appel (p. 7, souligné par l'architecte Bouche), mais des règles d'ordre public, toujours d'actualité, s'appliquant en toutes circonstances; Attendu qu'en l'espèce - et pour tenter de dégager sa responsabilité, l'architecte Bouche se prévaut lui-même de la collusion entre la société Houyoux Construct et lui, en faisant, valoir, dans sa requête d'appel et dans les conclusions prises devant le premier juge auxquelles elle renvoie, que son intervention, dans la conception de la villa de Mme Moranduzzo était subordonnée aux décisions de cette société, lui-même «étant obligé de souscrire dans la rédaction de ses plans au respect des prescriptions résultant du contrat (souscrit) par l'en-trepreneur (et le maître de l' ouvrage) »; Que les éléments matériels de la cause confirment cette inféodation de l'architecte à l' entrepreneur, notamment la conclusion du contrat d'entreprise quinze jours avant la signature du contrat avec l'architecte Bouche, alors qu'aux dires de l'architecte, aucun contact n'avait préalablement été pris avec lui;

Que le contrat d'entreprise, conclu dans ces conditions, fixe définitivement le prix global à payer par Mme Moranduzzo et le même jour, soit le 25 février 1985, Mme Moranduzzo signe le cahier des charges et le métré rédigés par la société Houyoux Construct; Qu'en outre, la circonstance que l'architecte a fixé forfaitairement ses honoraires à 70.000 F, - ce qui représente un taux d'environ 3,75 % du prix de la villa, alors que le taux minimum prévu par la norme déontologique n° 2 du conseil de l'Ordre des architectes, est de 7 % - est un indice décisif de l'inféodation de l'architecte à l'entrepreneur et permet de déduire leur accord préalable quant à la détermination globale du coût de la construction et à l'abandon à l'entrepreneur de certaines tâches qui incombent normalement à l'architecte, notamment la rédaction du cahier des charges, les plans de detail et le contrôle réel de l'exécution des travaux; Qu'il apparaît des propres allégations de l'architecte Bouche, que la négociation du contrat d'entreprise avec Mme Moranduzzo se réfère à un avant-projet dont lui-même souligne q~'il ne comporte aucune spécification technique ou cotes; que cet avant-projet a nécessai-rement dû être remis à la société Houyoux Construct avant la négociation du contrat d'entreprise avec Mme Moranduzzo puisque l'architecte soutient qu'il n'a eu aucun contact avec celle~ci avant la conclusion du contrat d'architecte, le 5 mars 1985; Que les faits enfin corroborent l'inféodation de l'architecte à l'entrepreneur : que le plan définitif devant être joint à la demande d'autorisation de bâtir a été établi, apparemment sans contact avec Mme Moranduzzo, dans le délai exceptionnel de quinze jours; que l'expert judiciaire relève dans la seconde partie de son rapport, au point 2 intitulé: « Historique de l'affaire », que durant toute la durée du chantier, entamé le 20 mai 1985 et devant contractuellement se terminer le 5 octobre suivant, l'architecte n'avait rédigé que deux procès-verbaux de visite (les 25 septembre et le 13 novembre 1985) et, sur l'insistance de Mme Moranduzzo, a écrit une lettre à l'entrepreneur, traitant de modifications que ce dernier avait apportées' à la conception de la charpente (lettre du 11 octobre 1985); que l'expert judiciaire relève encore l'absence de plans de détail pour la toiture modifiée et la carence de l'architecte dans l'exécution de sa mission de contrôle de l'exécution des travaux;

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Droit de la construction Indépendance de l’architecte n° 264

Attendu qu'il résulte à suffisance de l'ensemble des motifs ci-avant exposés que l'architecte Bouche ne jouissait d'aucune indépendance à l'égard de la société Houyoux Construct et que la manière dont la .convention a été exécutée démontre qu'il n'avait, en contractant avec Mme Moranduzzo, ni l'intention ni la possibilité d'exercer ses missions légales dans les con-ditions imposées par la loi; Attendu que, souvelant d'office le moyen de nullité du contrat pour violation des dispositions d'ordre public de la loi du 20 février 1939, la cour doit ordonner la réouverture des débats pour permettre aux parties de conclure sur ce moyen et en tirer les conséquences de droit. (…)

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