21
Cours 8. M´ ethodes d’analyse des circuits non-lin´ eaires Par Dimitri galayko Unit´ e d’enseignement ´ Elec-info pour master ACSI ` a l’UPMC Octobre-d´ ecembre 2005 1 en´ eralit´ es : ´ el´ ements avec et sans m´ emoire La diode est un ´ el´ ement non-lin´ eaire. En effet, en y appliquant une somme de deux tensions on n’obtient pas une somme des courants correspondant ` a chacune des tensions appliqu´ ee s´ epar´ ement : I D (U D1 + U D2 ) 6= I D (U D1 )+ I D (U D2 ). (1) (D´ emontrez cette propri´ et´ e.) Une diode est alors une dipˆ ole non-lin´ eaire pour lequel on connaˆ ıt la caract´ eristique tension-courant : I D = f (U D ), (2) o` u U D et I D sont la tension et le courant de la diode. Dans l’expression de la caract´ eristique « courant-tension »la tension est souvent prise comme l’argument ; ceci est dˆ u` a l’usage et au fait qu’en pra- tique il est plus facile ` a g´ en´ erer et ` a imposer une tension qu’un courant. Il s’agit plutˆ ot d’une habitude, d’une tradition, mais non pas d’une r` egle – des contre-exemples existent. Ainsi, on peut dire qu’une diode est un ´ el´ ement semblable ` a une r´ esistance, ` a cette diff´ erence pr` es que pour une r´ esistance la fonction f (U R ) est lin´ eaire, alors que pour une diode elle est exponentielle. L’´ etat d’une diode et d’une r´ esistance ` a un instant t est uniquement etermin´ e par leurs tensions et courants ` a ce mˆ eme instant et ne d´ epend 1

Cours 8. M etho des d’analyse des circuits non-lin eairesgalayko/elec_info/polys/poly_cours8.pdf · Cours 8. M etho des d’analyse des circuits non-lin eaires Par Dimitri galayko

  • Upload
    others

  • View
    4

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

  • Cours 8. Méthodes d’analyse des circuits

    non-linéaires

    Par Dimitri galayko

    Unité d’enseignement Élec-infopour master ACSI à l’UPMC

    Octobre-décembre 2005

    1 Généralités : éléments avec et sans mémoire

    La diode est un élément non-linéaire. En effet, en y appliquant une sommede deux tensions on n’obtient pas une somme des courants correspondant àchacune des tensions appliquée séparément :

    ID(UD1 + UD2) 6= ID(UD1) + ID(UD2). (1)

    (Démontrez cette propriété.)Une diode est alors une dipôle non-linéaire pour lequel on connâıt la

    caractéristique tension-courant :

    ID = f(UD), (2)

    où UD et ID sont la tension et le courant de la diode.Dans l’expression de la caractéristique « courant-tension »la tension est

    souvent prise comme l’argument ; ceci est dû à l’usage et au fait qu’en pra-tique il est plus facile à générer et à imposer une tension qu’un courant. Ils’agit plutôt d’une habitude, d’une tradition, mais non pas d’une règle – descontre-exemples existent.

    Ainsi, on peut dire qu’une diode est un élément semblable à une résistance,à cette différence près que pour une résistance la fonction f(UR) est linéaire,alors que pour une diode elle est exponentielle.

    L’état d’une diode et d’une résistance à un instant t est uniquementdéterminé par leurs tensions et courants à ce même instant et ne dépend

    1

  • 2

    pas des états du passé. Les éléments possédant cette propriété s’appellent« éléments sans mémoire ».

    Par opposition, les éléments réactifs, tels que les capacités et les induc-tances, sont des éléments « avec mémoire », car leur état instantané dépenddes états du passé. Par exemple, pour connâıtre le courant du condensateur,il faut connâıtre la dérivée de sa tension par rapport au temps, i.e. l’évolutiondu courant entre le moment t et l’instant immédiatement précédent t − δt.

    Les relations entre les courants et les tensions des éléments sans mémoiresont décrites par des équations algébriques, alors que les relations entre lestensions et les courants des éléments avec mémoire sont donnés par deséquations différentielles.

    Si les équations décrivant les éléments sont linéaires, on parle d’élémentslinéaires, comme les résistances, les inductances et les condensateurs. Dansle cas contraire les éléments sont non-linéaires, comme les diodes. Jusquelà nous n’avons pas présenté un élément réactif non-linéaire ; tel est, parexemple, un condensateur dont la charge dépend d’une manière non-linéairede la tension :

    qC = CU − C1U3. (3)

    Ainsi, le courant dans un tel condensateur dépend d’une manière non-linéaire de la tension et de sa première dérivée :

    iC = CdU

    dt+ 3C1U

    2dU

    dt. (4)

    Par conséquent, les circuits comportant des éléments non-linéaires avecmémoire se décrivent par des équations différentielles non-linéaires.

    En électronique on a rarement affaire aux composants réactifs non-linéaires ;la plupart des circuits non-linéaires utilisent seulement des éléments non-linéaires sans mémoire (associés, éventuellement, avec des éléments linéairesavec ou sans mémoire).

    Dans la plupart des cas il est nécessaire d’analyser les circuits non-linéairesen régime de courant continu. On parle alors d’une analyse en régime sta-tique. Il s’agit, généralement, de résoudre un système d’équations algébriquesnon-linéaires. Lorsque un circuit contenant des éléments non-linéaires estsoumis à des sources de tension ou de courant variables dans le temps, ils’agit d’un régime dynamique, qui est décrit par des équations algébriquesou différentielles non-linéaires.

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 3

    E=4 V

    R=2 Ohms

    Fig. 1 – Exemple de circuit comportant un élément non-linéaire.

    Il n’existe pas de méthode générale pour résoudre les équations non-linéaires. D’ailleurs, dans la plupart des cas, la solution ne peut pas êtreexprimée analytiquement.

    De différentes approches sont employées pour analyser les circuits non-linéaires. Dans les paragraphes suivant nous en présentons quelques-unes lesplus importantes.

    2 Régime statique

    2.1 Méthode graphique

    Il s’agit d’une méthode graphique de la résolution des équations algébriquesnon-linéaires. Supposons que nous souhaitions calculer le courant dans le cir-cuit de la figure 1, qui inclut un élément non-linéaire avec une caractéristiquecourant-tension I(U) donnée, une résistance et une source de tension conti-nue, les trois dipôles étant branchés en série.

    Le courant se trouve à partir de la loi des mailles :

    E = R · I(U) + U, (5)

    où I et U sont le courant et la tension de l’élément non-linéaire.Dans le cas général, cette équation n’a pas de solution analytique.L’idée de la méthode graphique est de représenter le circuit par deux

    dipôles raccordés en parallèle et en série, comme c’est montré figure 2.Ainsi, d’après la loi de nœuds et la loi des mailles,

    I1 = I2, U1 = U2. (6)

    Notez que les sens conventionnels positifs des courants et des tensions sontdéfinis différemment pour les deux dipôles : pour la résistance et la sourcela convention est générateur, pour le dipôle non-linéaire la convention est

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 4

    E=4 V

    R=2 Ohms

    I2I1

    U1 U2

    Fig. 2 – Circuit non-linéaire représenté par deux dipôles raccordés en sérieet en parallèle.

    récepteur1. Ainsi, d’après la loi des nœuds, les courants I1 et I2 doivent êtreégaux, alors que si les conventions étaient identiques pour les deux dipôles,ils seraient opposés ce qui compliquerait légèrement le calcul qui va suivre.

    Par défaut, la caractéristique courant-tension est définiepour une convention récepteur, i.e. la même que pour unerésistance, cf. la définition du sens conventionnel positifde I2 et U2 à la figure 2.

    Soit la caractéristique tension-courant du dipôle donnée par un graphiquede la figure 3.

    Cette caractéristique définit le rapport entre le courant I2 et la tensionU2 du circuit de la figure 2. Il faut alors représenter la caractéristique entreI1 et U1 dans les mêmes axes et ensuite trouver les coordonnées du pointd’intersection des deux caractéristiques.

    Pour un dipôle composé d’une source de tension et une résistance rac-cordées en série, la caractéristique courant-tension est affine, et en respectantla convention pour U1 et I1 définie figure 2 nous avons :

    I1 =E

    R− U1 ·

    1

    R. (7)

    En utilisant les valeurs de R et de E, nous avons :

    I1 = 2 − 0.5U1, (8)

    1Rappelons, que lorsque la tension et le courant définis selon la convention générateursont positifs, le dipôle produit une énergie électrique i.e. la puissance dissipée est négative,alors qu’en cas de la convention récepteur, l’élément consomme de l’énergie électrique, i.e.la puissance dissipée est positive.

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 5

    1 A

    U

    I

    1 V

    Fig. 3 – Caractéristique courant-tension de l’élément non-linéaire utilisé dansla présentation des méthodes d’analyse des circuits non-linéaires.

    où la U1 est exprimée en volts, I1 en ampères.On trace I1(U1) et I2(U2) dans les mêmes axes (figure 4).On voit que les deux caractéristiques ont une intersection à I = −0.7A,

    U = 5.4V . C’est donc la tension et le courant de l’élément non-linéaire de lafigure 1.

    Le caractère visuel de la méthode graphique permet d’analyser le circuitqualitativement et de comprendre ce qui se passe si l’on fait varier un des pa-ramètres du circuit. Par exemple, ici il est évident que pour certaines valeursde la tension E et de la résistance R, on peut avoir deux ou trois intersec-tions : cela veut dire que le circuit peut se trouver dans un des plusieurs états.Différents facteurs peuvent influencer l’état définitif du circuit : la stabilité(tous les états ne sont pas stables), les conditions initiales etc... L’étude deces aspects dépasse le cadre de notre module, car dans la plupart des cas quel’on rencontre en pratique, l’état du circuit est défini d’une manière unique.

    Notez que dans les circuits linéaires les tensions et les courants sont tou-jours définis d’une manière unique, car leurs caractéristiques courant-tensionsont toujours des droites entre lesquelles, sauf cas dégénérés, il existe une seuleintersection.

    2.2 Approximation par un dipôle à caractéristique courant-

    tension linéaire par morceaux

    Afin d’analyser le comportement des circuits incluant les éléments non-linéaires, on représente un élément non-linéaire par un modèle linéaire ap-

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 6

    U

    I

    1 V

    1 A I

    U

    Fig. 4 – Illustration de la méthode graphique d’analyse des circuits non-linéaires.

    proximé. Cette substitution conduit plus ou moins à une dégradation de laprécision des calculs, mais permet d’avoir une idée sur le fonctionnement ducircuit et de faire des estimations approximatives des grandeurs du circuit.

    Très souvent sur la caractéristique courant-tension il est possible de dis-tinguer des zones dans lesquelles l’élément peut être apparenté à un élémentlinéaire. On parle des zones ou des régimes de fonctionnement. Ainsi, danschaque régime un élément non-linéaire est décrit par une équation linéaire quidéfinit un élément électrique linéaire. Dans le cas des éléments sans mémoirece sont les sources réelles de tension ou de courant2.

    Prenons l’exemple de l’élément dont la caractéristique courant-tension estdonnée figure 3.

    On distingue trois régimes de fonctionnement correspondant aux plagesde tension suivantes : (−∞, U1), (U1, U2) et (U2, +∞) (figure 5). Ainsi, sur cesintervalles, on peut approximer la caractéristique par des droites (la figure 5,le graphique en ligne épaisse).

    Chaque droite décrit une source réelle de tension ou de courant continu.La pente de la droite donne la valeur inverse de la résistance interne dela source. La coordonnée de son intersection avec l’axe des tensions ou descourants donne la tension nominale ou le courant nominal de la source (selonle type de la source). Notez, que même si sur l’intervalle où le modèle estvalable la droite ne croise par l’axe des tensions ou des courants, on cherchele point d’intersection en extrapolant la droite en dehors de l’intervalle de sa

    2Démontrez que la caractéristique courant-tension d’un dipôle composé d’une sourcede tension en série avec une résistance est une droite.

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 7

    U

    I

    1 V

    1 A

    U2

    R2R3

    R1

    E2 E3E1

    U1

    Fig. 5 – Caractéristique courant-tension de l’élément non-linéaire approchéepar une fonction continue linéaire par morceaux.

    validité.Ainsi, l’élément décrit par la courbe de la figure 5 peut être modélisé par

    une source de tension réelle, dont les paramètres dépendent de la zone defonctionnement. La caractéristique courant-tension approximée est donnéepar :

    I(U) =

    U/R1 − E1/R1, U < U1,U/R2 − E2/R2, U1 < U < U2,U/R3 − E3/R3, U > U2

    , (9)

    où U et I sont la tension et le courant associés à l’élément non-linéaire.Notez, que d’après le graphique de la fonction approximée (figure 5) dans

    l’intervalle (U1, U2) la résistance interne de la source équivalente est négative.Pour montrer un exemple d’analyse, trouvons le courant et la tension

    de l’élément non-linéaire du circuit de la figure 1. D’après le graphique de lafigure 1, l’approximation linéaire par morceaux de la caractéristique courant-tension I(V ) est donnée par l’expression :

    I(U) =

    U/0.5 + 2/0.5, U < −2,U/(−1) − 1/(−1), −2 < U < 3,

    U/2 − 7/2, U > 3. (10)

    Pour trouver la tension et le courant de l’élément non-linéaire, il fautsavoir dans quel régime, i.e. dans quelle zone, il fonctionne : connaissantcela, dans (5) on substitue I(U) par une fonction linéaire et la solution de

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 8

    E=2 V

    R=2 Ohms

    I

    Ri

    Élément non-linéaire

    U

    Ei

    Fig. 6 – Modélisation de l’élément non-linéaire par une source de tensionréelle.

    l’équation devient triviale. Or précisément, on ne sait pas quelle est la zonede fonctionnement ; c’est là la difficulté de l’analyse des circuits non-linéaires.

    Pour connâıtre la zone de fonctionnement sans utiliser des méthodesnumériques, on avance des hypothèses. On va supposer, par exemple, quela tension sur l’élément non-linéaire se trouve dans l’intervalle (U1, U2). Nousremplaçons l’élément par son modèle qui est linéaire pour touts les tensionset les courants (cf. la figure 6). Ce nouveau circuit est linéaire, or il estéquivalent au circuit original uniquement lorsque la tension se trouve dansl’intervalle (U1, U2).

    En analysant le nouveau circuit de la figure 6, on trouve la tension etle courant sur l’élément non-linéaire. Si ces grandeurs correspondent à lazone pour laquelle le modèle est valable, notre hypothèse est juste, dans le cascontraire, il faut faire une autre hypothèse. Ainsi, au pire, à chaque hypothèseon exclut une zone dans lequel l’élément non-linéaire ne peut pas se trouver.

    Appliquons cette méthode au circuit de la figure 1.Supposons que le circuit se trouve dans la zone I (U < −1V ). Ainsi,

    Ei = −2V , Ri = 0.5Ohm. Donc, le courant dans l’élément non-linéaire vaut(E −Ei)/(Ri +R) = (4− (−2))/(2+0.5) = 2.4A, la tension U = RiI +Ei =2.4 · 0.5 + (−2) = −0.8V . Manifestement, l’hypothèse quant à la zone defonctionnement est fausse, car le modèle avec Ei = −2V , Ri = 0.5Ohm n’estvalable que si U < −1V .

    Supposons maintenant que le circuit fonctionne en zone II, i.e. −1V <U < 3V . Ainsi, Ei = 1V , Ri = −1Ohm. Ainsi, le courant vaut (4 − 1)/(2 +(−1)) = 3A et la tension U = 3 · (−1)Ohms + 1 = −2V . L’hypothèse estfausse car le modèle est valable si −1V < 0V < 3V .

    En zone III Ei = 7V , Ri = 2Ohm. Ainsi, le courant vaut (4 − 7)/4 =−0.75A et la tension Ei = −0.75A · 2Ohms + 7 = 5.5V . L’hypothèse estmanifestement juste.

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 9

    e(t) = E1cosωt

    R

    E0

    Fig. 7 – Circuit contenant un élément non-linéaire fonctionnant en régimedynamique.

    Ainsi, I = −0.75A, U = 5.5V . Ceci est proche des valeurs obtenues parla méthode graphique.

    3 Régime dynamique

    L’électronique s’intéresse au traitement du signal. Par conséquent, pra-tiquement tous les systèmes de l’électronique sont conçus pour fonctionneren régime dynamique, i.e. lorsque les variables d’entrée et de sortie évoluentdans le temps.

    L’exemple le plus simple (mais néanmoins suffisamment général) d’un cir-cuit non-linéaire fonctionnant en régime dynamique est donné à la figure 7.Ce circuit inclut une source de tension continue, une source de tension al-ternative, une résistance et un élément non-linéaire, tous les quatre étantraccordés en série. La tension totale appliquée au circuit contient une com-posante continue et une composante variable dans le temps (alternative) ;on représente cette tension comme la somme des tensions générées par deuxsources raccordées en série :

    Usource(t) = E0 + e(t) = E0 + E1 cos(ωt). (11)

    Ici la forme d’onde de la composante alternative est sinusöıdale, mais enpratique cela peut être n’importe quelle fonction.

    On souhaite déterminer l’allure du courant dans l’élément non-linéaire.On distingue deux régimes de fonctionnement dynamique des circuits

    non-linéaires : régime de grand signal et régime de petit signal.

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 10

    e(t) = E1cosωt

    id(t)R

    E0

    ud(t)

    Fig. 8 – Circuit utilisant une diode en régime dynamique.

    3.1 Régime grand signal

    C’est le cas le plus général : l’amplitude de la composante variable est tel-lement grande que durant une période, l’élément non-linéaire se trouve, d’unemanière consécutive, en différents régimes. Une étude analytique du circuitest impossible dans la plupart des cas ; il faut considérer la caractéristiquecourant-tension dans son intégralité et utiliser des méthodes numériques.Prenons l’exemple d’une diode branchée selon le schéma de la figure 8, avecE0 = −1V , f = 1Hz, E1 = 2V , R = 10Ω. Le système est alors décritpar l’équation (5) dans laquelle la tension constante E est remplacée par latension variable définie par (11) :

    E0 + e(t) = E0 + E1 cos(ωt) = R · iD(uD(t)) + uD(t), (12)

    En résolvant l’équation (12) par une méthode numérique pour chaquet nous obtenons pour le courant et la tension de la diode les graphiquesprésentés figure 9. Nous les avons tracés dans les axes de la caractéristiquecourant-tension de la diode.

    La forme d’onde de la tension et du courant de la diode est complexe ;les lois d’évolution de ces grandeurs ne peuvent pas être exprimées par unefonction analytique. En revanche, on remarque que la diode peut être décritpar une caractéristique courant-tension linéaire par morceaux. Elle a en effetdeux zones quasi linéaires, I et II, comme indiqué figure (9). On voit que dansla zone I la diode se comporte comme un circuit ouvert : la tension sur ladiode est égale à la tension de la source, le courant est défini par la résistanceest nul. En revanche, dans la zone II la diode se comporte comme une source

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 11

    Zone II

    -0.5

    0

    0.5

    1

    1.5

    2

    2.5

    3

    -1 -0.5 0 0.5 1

    A

    temps, s

    -0.5

    0

    0.5

    1

    1.5

    2

    2.5

    3

    -5 -4 -3 -2 -1 0 1 2

    A

    Tension, V

    Caracteristique tension-courant d une diode

    -5 -4 -3 -2 -1 0 1 2-1-0.5

    0 0.5

    1

    V

    temps, sTension de la diode en fonction du temps

    Zone I

    Courant de la diode en fonction du temps

    Fig. 9 – Évolutions temporelles du courant et de la tension sur la diode enrégime grand signal.

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 12

    de tension générant une tension constante VD = 0.7V : le courant dans ladiode est alors défini par la résistance et vaut :

    iD(t) =E0 + e(t) − VD

    R. (13)

    Pour obtenir ces courbes, on aurait pu utiliser la méthode présentée dansle paragraphe 2.2, seulement, il aurait fallu l’appliquer pour chaque instantt, car la tension du circuit change. Toutefois, pour les circuits plus com-plexes, avec des caractéristiques non-linéaires se prêtant moins bien à unelinéarisation, seules les méthodes numériques donne les lois d’évolution destensions et des courants en régime de grand signal.

    Le régime de grand signal est très fréquemment utilisé, en particulier dansl’électronique numérique et dans l’électronique de puissance. La fonction detransfert d’une porte logique (la tension de sortie en fonction de la tensiond’entrée) est un exemple typique d’une fonction de transfert fortement non-linéaire. Cette fonction de transfert manifeste deux zones linéaires (figure 10).Dans chacune des zones, la porte peut être représentée comme une source detension continue – nulle ou Udd – tant que la tension d’entrée reste entre 0 etUth ou entre Uth et Udd. En revanche, la forme d’onde de la tension de sortiedevient très complexe si, lors de son évolution temporelle, la tension d’entréetraverse le seuil.

    3.2 Régime de petit signal

    Un circuit fonctionne en régime de petit signal si sont vérifiées les condi-tions suivantes :

    1. Les éléments non-linéaires ne changent pas de zone de fonctionnement.Cette condition impose une limite à la plage de variation de la grandeurd’entrée, car celle-ci doit permettre aux éléments de rester à l’intérieurd’une zone. Ainsi, s’il s’agit de la diode, elle doit être soit passante, soitbloquée pour tout t.

    2. Le tronçon de caractéristique courant-tension correspondant à l’inter-valle de fonctionnement diffère peu d’une droite, i.e. présente une faiblenon-linéarité.

    Reprenons l’exemple du circuit contenant une diode (figure 8). Soit E0 =3V , E1 = 1V , R = 10Ω.

    Sous ces conditions la tension sur la diode évolue entre 0.720 V et 0.745V, le courant évolue entre 0.12 A et 0.32 A. La zone dans laquelle fonctionnela diode est donc limitée par ces deux points ; comme l’on voit d’après la

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 13

    Zone I

    Zone IIUin

    Uout

    UddUth

    Udd

    Uin Uout

    temps

    Uout

    temps

    Uin

    Niveau Uth

    Fig. 10 – Fonction de transfert statique d’une porte logique.

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 14

    0

    0.5

    1

    1.5

    2

    2.5

    3

    0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1

    A

    Tension, V

    Caracteristique tension-courant d une diode

    0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1-1-0.5

    0 0.5

    1

    V

    temps, s

    0

    0.5

    1

    1.5

    2

    2.5

    3

    -1 -0.5 0 0.5 1

    A

    temps, s

    Courant de la diode en fonction du temps

    Tension de la diode en fonction du temps

    Carac

    térist

    ique l

    inéair

    e équ

    ivalen

    te2

    1

    Fig. 11 – Tension et courant d’une diode fonctionnant en régime de petitsignal.

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 15

    figure 11, entre les points 1 et 2 la caractéristique est proche de la droitemontrée en pointillé. Ainsi, pour analyser le circuit, on peut approximer lacaractéristique courant-tension de la diode par cette droite. Comme on l’adéjà vu, une droite définit une source de tension ou de courant réelle. Cettesource de tension ou de courant s’appelle « modèle linéaire »ou « linéarisé »dela diode.

    On voit que plus l’amplitude de la composante alternative du signal estpetite, plus l’approximation par une droite correspond à la réalité. Un modèlelinéaire est parfaitement précis si l’amplitude de la composante variable estinfiniment petite. En pratique, l’amplitude de la composante variable doit êtreassez petite, de sorte à ce que l’erreur induite soit tolérable. L’appréciationde ce qui est tolérable est bien sûr subjectif ; tout dépend de la précision del’analyse requise par le contexte.

    D’après la figure 11 on voit que si l’amplitude du signal est faible, lerapport entre le courant et la tension est linéaire. On le constate car lesformes d’onde de la tension et du courant sont les mêmes – sinusöıdalessuperposées à une constante, i.e. il n’y a pas de distorsion de la forme d’ondede la tension d’entrée (e(t) + E0). Autrement dit, en régime de petit signalun élément non-linéaire effectue un traitement quasi linéaire. On peut seposer la question : pourquoi utiliser un élément non-linéaire pour effectuerun traitement linéaire ?

    Pour y répondre, étudions l’influence des sources de tension E0 et E1 cos ωtsur le régime de fonctionnement du circuit. Il est évident, que si E1 → 0, lerégime de fonctionnement ne change pas ; le modèle linéaire équivalent restele même. Il en va de même si E1 augmente : la plage de variation de latension et du courant sur la diode s’élargit, mais ceci se traduit juste parun écartement des points 1 et 2 limitant la zone de fonctionnement ; les pa-ramètres du modèle restent à peu près les mêmes.

    En revanche, si l’on modifie la tension continue E0, la zone de fonction-nement se déplace le long de la caractéristique courant-tension ; la droiteapproximant la caractéristique change ses paramètres en imposant un nou-veau modèle linéaire. Par exemple, si E0 = 15V , la zone de fonctionnementse déplace vers la droite (figure 12). On voit que la droite approximant letronçon de la caractéristique courant-tension n’est plus la même, ainsi, ladiode est équivalente à une source réelle (de tension ou de courant) différentede celle du circuit de la figure 12.

    Si l’on diminue la tension E0, on fait déplacer la zone de fonctionnementvers la gauche, et si cette tension est négative, on peut positionner la zonede fonctionnement vers le domaine de la caractéristique correspondant à ladiode bloquée. Dans ce cas la diode sera équivalente à un circuit ouvert –source de tension avec une tension nulle et une résistance série infinie.

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 16

    0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1-1-0.5

    0 0.5

    1

    V

    temps, s

    0

    0.5

    1

    1.5

    2

    2.5

    3

    0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1

    A

    Tension, V

    Caracteristique tension-courant d une diode

    0

    0.5

    1

    1.5

    2

    2.5

    3

    -1 -0.5 0 0.5 1

    Atemps, s

    Courant de la diode en fonction du temps

    Tension de la diode en fonction du temps

    12

    Fig. 12 – Régime de fonctionnement de la diode pour E0 = 15V , E1 = 1V .

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 17

    Ed

    id(t)R

    E0

    e(t) = E1cosωt

    ud(t)

    Rd

    Fig. 13 – Modèle linéaire d’une diode.

    Ainsi, la tension constante E0 contrôle le régime dans lequel fonctionne ladiode, et donc contrôle des paramètres de son modèle linéaire. Les élémentsnon-linéaires offrent donc une fonctionnalité extrêmement puissante : uncontrôle électrique, i.e. par une tension ou par un courant, des paramètresdu circuit linéaire équivalent.

    L’avantage devient plus évident si l’on considère que le circuit de la fi-gure 8 traite, d’un certaine manière, le signal e(t), et si, dans la tension oudans le courant de sortie, l’on ne s’intéresse qu’à la réponse à ce signal, i.e.uniquement au signal de sortie.

    Redessinons le circuit de la figure 8 en utilisant le modèle linéaire de ladiode (figure 13).

    C’est un circuit linéaire, ainsi, le principe de superposition y est alorsappliquable. Par conséquent, tous les tensions et les courants du circuits sontdes sommes des contributions des sources de tension continue E0, Ed et dela source sinusöıdale e(t). Ainsi, les tensions et les courants ont la forme :

    η(t) = Ξ + ξ cos ωt, (14)

    où Ξ et ξ sont la composante continue et l’amplitude de la composante si-nusöıdale de la grandeur considérée (nommée η). On dit que Ξ est la com-posante statique de la grandeur η, alors que ξ cos ωt est sa composante petitsignal.

    D’après le principe de superposition, la composante continue Ξ0 dépenddes sources continues E0 et Ed, alors que la composante alternative dépendde la source de tension e(t).

    Ainsi, si l’on s’intéresse uniquement à la composante alternative de lagrandeur de sortie, i.e. au signal de sortie, on peut annuler les sources conti-

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 18

    u∼d (t)

    i∼d (t)R

    e(t) = E1cosωtRd

    Fig. 14 – Schéma équivalent petit signal du circuit de la figure 14.

    nues et ne considérer que les éléments ayant une contribution dans cette com-posante (figure 14). En éteignant toutes les sources continues indépendanteson obtient ce que l’on appelle « schéma équivalent petit signal »(figure 14)du circuit de la figure 8. La résistance Rd est alors le modèle petit signal dela diode.

    La résistance Rd est un paramètre de modèle et dépend de la tensioncontinue E0 que appliquée à l’entrée. Ainsi, cette tension contrôle directe-ment une résistance du schéma équivalent petit signal : donc, il est possibled’effectuer une multitude de traitements avec le même circuit en faisant justevarier E0.

    3.3 Analyse d’un circuit non-linéaire en régime de pe-

    tit signal

    Dans le paragraphe précédent nous avons présenté l’idée et l’intérêt de lamodélisation petit signal d’un élément non-linéaire. Ici, nous présentons lesdémarches à suivre pour analyser un circuit non-linéaire en régime de petitsignal.

    Tout d’abord introduisons quelques définitions.Dans un circuit non-linéaire modélisé par son schéma linéaire équivalent

    (comme celui de la figure 13) et soumis à une tension ou un courant de type(11), les tensions et les courants évoluent selon la loi donnée par l’équation(14). D’après le principe de superposition, le régime sinusöıdal ne dépendpas du régime courant continu ; ainsi, pour l’analyse du régime sinusöıdal(harmonique) il convient d’utiliser la méthode des amplitudes complexes.

    Ainsi, toute grandeur du circuit est caractérisée par sa composante conti-nue désignée par une lettre majuscule (par exemple, I1) et par l’amplitudecomplexe de la composante harmonique désignée par une lettre minuscule

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 19

    (par exemple, i1). D’habitude on ne met pas un point au-dessus du symbole,comme l’on a fait en introduisant la méthode des amplitudes complexes. Dansla littérature anglo-saxonne la composante continue s’appelle DC component,comme direct current, et la composante alternative AC component, commealternative current.

    Les valeurs DC (i.e. la composante continue) de la tension et du courantde l’élément non-linéaire s’appellent « point de fonctionnement », car ellesdéfinissent le point sur la caractéristique courant-tension qui est au centre dela zone dans laquelle fonctionne l’élément et, puisque idéalement les variationsdes tensions et des courants du circuit sont faibles, l’état de l’élément non-linéaire s’écarte peu de ce point. Pour désigner le point de fonctionnement onemploie les termes « point de polarisation », « point de repos », « tension/uncourant de polarisation/de repos »et, en littérature anglo-saxonne, « biaspoint », « operating point »et « bias voltage/bias current ».

    Définissons maintenant les paramètres du modèle équivalent petit signald’un élément non-linéaire. Considérons les graphiques de la figure 11. Commenous l’avons dit, le modèle devient parfaitement précis si l’amplitude de lacomposante alternative de la tension (ou de courant) tend vers zéro. Ainsi,la droite tend vers la tangente au point de fonctionnement (U0, I0), où U0 etI0 sont les composantes continues du courant et de la tension de l’élémentnon-linéaire. Sur cette droite nous connaissons les coordonnées d’un point

    (U0, I0) et la pentedI(U)

    dU

    U=U0

    , ainsi son équation est donnée par :

    I(U) − I0U − U0

    =dI(U)

    dU

    U=U0

    , (15)

    ou autrement,

    I(U) =dI(U)

    dU

    U=U0

    · U −dI(U)

    dU

    U=U0

    · U0 + I0. (16)

    On sait que cette droite modélise une source réelle contenant une résistanceinterne égale à l’inverse de la pente de la droite et une source de tension conti-nue 3. Or, cette dernière source ne contribue pas aux composantes petit signaldes grandeurs du circuit, ainsi, lors de l’analyse petit signal on l’éteint.

    le modèle équivalent petit signal d’un dipôle non-linéaireest une résistance égale à l’inverse de la pente de la ca-ractéristique courant-tension au point de fonctionnement.

    3Donnez la valeur de la tension de cette source à partir de l’équation (16).

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 20

    Cette résistance, calculée selon la formule

    r =

    (

    dI(U)

    dU

    U=U0

    )

    −1

    =dU(I)

    dI

    I=I0

    , (17)

    s’appelle résistance dynamique de l’élément non-linéaire au point (U0, I0).Cette résistance montre le rapport entre les faibles variations de la tensionet du courant sur un dipôle non-linéaire. C’est un paramètre qui montrecomment l’élément non-linéaire réagit à un signal, i.e. à une tension ou à uncourant variable.

    Ainsi, on peut construire le modèle petit signal d’un dipôle non-linéairesi l’on connâıt le point de fonctionnement. Le point de fonctionnement estdéfini par les sources continues indépendantes faisant partie du circuit. Pourle circuit de la figure 8, c’est la source E0.

    Pour trouver le point de fonctionnement, i.e. les com-posantes continues des tensions et des courants deséléments non-linéaires fonctionnant en régime de petitsignal, on éteint toutes les sources alternatives et oncherche l’état des éléments non-linéaires en régime decourant continu. Pour cela on emploie n’importe quelleméthode d’analyse de circuits non-linéaires de courantcontinu, par exemple, celle d’approximation linéaire parmorceaux ou une méthode numérique.

    Donc, il est très important de comprendre, que pour pouvoir modéliserun circuit non-linéaire en régime de petit signal, il faut connâıtre son pointde polarisation. Le plus souvent, cela nécessite un emploi des méthodesnumériques, bien que dans certains cas (que nous allons étudier plus tard)un peu de bon sens suffit pour calculer le point de polarisation « à la main ».

    3.4 Paramètres petit signal d’une diode passante

    Soit (UD, ID) le point de fonctionnement d’une diode. Calculons sa résistancedynamique.

    rD =

    (

    dID(UD)

    dUD

    )

    −1

    =(

    q

    kTIS(e

    q

    kTUD)

    )

    −1

    , (18)

    Si la diode est passante, eq

    kTUD � 1, ainsi

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1

  • 21

    ID ≈ ISeq

    kTUD . (19)

    Donc, la résistance dynamique d’une diode passante vaut :

    rD =

    (

    dID(UD)

    dUD

    )

    −1

    =(

    q

    kTIS(e

    q

    kTUD)

    )

    −1

    =1

    ID

    kT

    q, (20)

    Calculons la résistance dynamique de la diode dans le schéma de la fi-gure 8, si E0 = 10V et R = 1kΩ. Manifestement, la diode est passante (onpeut le vérifier en faisant des hypothèses quant à la zone de fonctionnement).On sait que lorsque la diode est passante, la tension UD diffère peu de 0.7 V.Ainsi, on peut supposer que UD ≈ 0.7V , donc la tension de la résistance estégale à UR = E0 − UD ≈ 9.3V . Par conséquent, le courant du circuit (doncdans la diode) vaut ID = UR/R ≈ 9.3/1000 = 9.3mA. Ainsi, la résistancedynamique de la diode est donnée par :

    rD =1

    9.3 · 10−31.38 · 10−23 · 300

    1.6 · 10−19= 2.78Ω. (21)

    Une méthode numérique donne pour le point de fonctionnement ID =9.34mA et UD = 0.653V , la résistance dynamique de la diode vaut 2.767Ohms.

    Ainsi, l’hypothèse que la tension de la diode en état passant est constantefacilite le calcul du point de fonctionnement et donne des résultats très précis.

    Dimitri galayko UPMC, Master ACSI UE Élec-info, M1