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ENJEUX D’APPRENTISSAGE, ENJEUX PEDAGOGIE VS ANDRAGOGIE + JEU SUR L’IDEOLOGIE DES DONS
COURS UE 15 F2F Intelligibilité des situations d’enseignement et d’apprentissage dans le cadre de la formation des adultes Cours n°3
Le savoir se construit, l’appren5ssage est une construc5on
Des infos externes …. Une restructura5on interne
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
Apprendre, c’est traiter de l’informa5on Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
Qu’est-ce qu’apprendre ??? � Apprendre est une activité naturelle : on apprend tous les jours, de toutes choses,
à tout âge. On dit bien apprendre sur le tas. Apprendre s’effectue en de nombreuses occasions de la vie quotidienne, apprendre accompagne toute activité. On apprend dans des situations dites non-didactiques (sur la flore et la faune lors d’une randonnée) et aussi dans des situations didactiques où l’enseignant va mettre en scène des apprentissages. Il y a parfois obligation à apprendre selon les circonstances (par exemple: passer le permis de conduire). On apprend par imitation, immersion, association, répétition, essais-erreurs…
� De manière générale, on apprend donc en milieu naturel spontanément ou en milieu scolaire organisé. La différence se situe bien dans la dimension organisationnelle de l’apprentissage scolaire : un apprentissage volontaire, ciblé, structuré, évalué, transférable, un apprentissage aux finalités affirmées
� Apprendre accompagne toute activité humaine. Un humain ne peut pas agir sans qu’il ne produise simultanément des ressources pour gérer son action. Toute activité s’accompagne + ou - d’apprentissages. D’où l’apprentissage par l’expérience, apprendre des situations de travail, accroître son expérience professionnelle…
� L’idée d’apprentissage en milieu naturel spontanément ou en milieu scolaire organisé renvoie à la distinction établie par le didacticien Brousseau entre apprendre en situation non didactique ou en situation didactique construite par un professionnel du faire-apprendre qui va planifier des processus d’apprentissage chez l’apprenant, une progressivité et méthode d’acquisitions...
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
� Apprendre est un processus inscrit dans le temps et la durée : il faut du temps pour apprendre certains concepts et de la maturité… (ex: les concepts grammaticaux)
� Le milieu scolaire organise donc l’apprentissage: il s’agit alors de lier apprendre à enseigner. On peut d’abord dire que l’enseignement accompagne l’apprendre. Du coup, un cours n’est pas conçu pour celui qui enseigne, mais pour celui qui apprend.
� L’acte d’enseigner se préoccupe avant tout de faire apprendre à un public des savoirs reconnus par une communauté. Nous verrons que, quelle que soit la méthode d’enseignement choisie, il y a volonté de faire apprendre, de provoquer un changement dans les représentations des personnes enseignées.
� Tout apprentissage suppose un changement local ou global de l’individu qui apprend. Un changement local avec l’intégration de savoir ou savoir-faire nouveaux. Un changement global de la personne affecte son rapport au monde, sa personnalité tout entière. Ces changements impliquent un enrichissement cognitif de par les expériences, les interactions avec l’environnement physique et social nouveau. Il se produit une réélaboration interne des acquisitions conduisant à une structuration mentale inédite. Apprendre provoque un enrichissement cognitif (ou une restructuration) de par les expériences, les interactions avec l’environnement physique et social. Apprendre transforme l’individu en induisant des changements dans la rencontre entre l’ancienne connaissance et le nouveau savoir mis à disposition. Apprendre modifie donc le rapport au monde et aux objets chez l’apprenant, l’apprentissage influence la personnalité tout entière.
Qu’est-ce qu’apprendre ???
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
Focus sur l’apprentissage � Apprendre transforme la personne humaine. Faire apprendre, c’est transformer
les apprenants. Apprendre, c’est transformer le réel et se transformer soi-même. On peut dire que l’apprentissage est un processus anthropologique qui est fondamental chez les humains. C’est une dimension singulière et propre à l’humain.
� L’homme est « une espèce apprenante ». Ne pas apprendre revient à être en deçà du règne animal (cf. l’enfant sauvage), l’animal est instinctuel, l’humain ne peut pas ne pas apprendre pour survivre: il possède des virtualités, des possibilités à activer par le truchement des apprentissages…
� Apprendre est le produit d’une culture donnée. Le savoir est effectivement tributaire de la culture dont il émerge. Le savoir y évolue dans le temps.
� Apprendre , c’est entrer dans un univers symbolique, entrer dans la culture (pensons à l’entrée dans le monde, la culture de l’écrit des petits enfants de CP).
� Apprendre est une adaptation qui est bien plus qu’une simple adaptation à un milieu naturel, c’est s’humaniser.
� L’apprentissage est en construction constante. Plus on apprend, plus on est en mesure d’apprendre. On ne finit jamais d’apprendre ! Pourvu que du désir d’apprendre soit ! « Apprendre » permet l’accession à un savoir qui ouvre sur ce qui reste encore à apprendre...
� Mais incertitude, erreur, rupture, changement, transformation, déséquilibre font partie de l’acte d’apprendre. Il convient toutefois de s’exercer à les supporter et les surmonter. Ou comme professionnel de l’apprentissage, savoir piloter finement ces passages délicats…
Qu’est-ce qu’apprendre ???
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
� Pour certains, apprendre correspond à l’image d’un cerveau d’élève dans lequel on empiler des briques de connaissances à partir d’un lien direct avec le cerveau du professeur. Pour d’autres, apprendre est un « feu à allumer », une étincelle dit Philippe Meirieu.
� Nous savons, grâce aux recherches en sciences de l’éducation et en psychologie de l’apprentissage et de l’éducation, qu’apprendre n’est pas un processus cumulatif et linéaire. Apprendre est un processus dynamique: la connaissance se restructure, elle n’est pas accumulative.
� Apprendre est bel et bien un processus interne et sa manifestation n’est pas toujours observable : le formateur ou l’enseignant travaille en « aveugle ». Apprendre est toujours une activité opaque pour celui qui observe les apprenants (cf. les illusions d’apprentissage)
� Apprendre, c’est tâtonner, expérimenter, déduire, échanger, évaluer. Apprendre, c’est rompre avec des certitudes. Apprendre conduit à une réélaboration interne des acquisitions déjà présentes, conduisant à une structuration mentale inédite.
� L’apprentissage est un processus qui peut être favorisé, étayé, soutenu par des techniques et des dispositifs pédagogiques. Mais non transmis par injonction, par exemple.
� L’acte d’apprendre relève d’une construction. L’apprenant s’y engage activement : autant cognitivement qu’affectivement.
� On ne peut pas recevoir un apprentissage. On le construit ! C’est la différence entre recevoir passivement de l’information et apprendre activement un contenu de savoir. Regarder un documentaire animalier à la télévision n’engage pas nécessairement de réflexion, de distanciation réflexive sur ce que l’on observe, de mise en mouvement d’un débat cognitif avec la vie animale. On ne pense nécessairement face à un documentaire animalier. Sauf que chercher à comprendre, à conceptualiser des aspects de la vie animale, des enjeux biologiques et écologiques.
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Comprendre l’apprentissage ?
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
� La mise en relation du nouveau et de l’ancien est une opération mentale essentielle, car cette confrontation produit du « conflictuel », une phase de déséquilibre pour reconstruire ses connaissances.
� Le psychologue suisse Jean Piaget a bien souligné la dynamique d’appropriation des savoirs par les individus, au moyen des procédures d’assimilation (produisant un enrichissement de ce que l’individu sait déjà, grâce aux interactions avec un environnement nouveau) et des procédures d’accommodation où la nouveauté du savoir oblige à des réélaborations internes des acquisitions, de ce qu’on savait déjà)
� Dans tous les cas, les procédures d’apprentissage et de conceptualisation entraînent chez les apprenants des structurations mentales inédites, à partir de ce qu’ils savaient déjà. Ne jamais oublier qu’un apprenant est déjà un sachant.
� Apprendre, c’est en définitive conceptualiser, c’est-à-dire former des concepts… pour appréhender le monde.
Comprendre l’appren5ssage ?
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
� « Tous les hommes ont un désir naturel de savoir » : Aristote le dit dès la première phrase de sa Métaphysique. Pour le philosophe, le désir d’apprendre est naturel et commence par le simple fait de tourner les yeux pour s’intéresser à ce qui se passe. J’entends un cri, je vois un attroupement, je veux savoir. Telle est pour Aristote la base de la curiosité naturelle.
� Quelques siècles plus tard, Saint-Augustin fera aussi du désir de savoir (libido sciendi) l’une des pulsions fondamentales des humains aux côtés du désir sensuel (libido sentiendi) et du désir de dominer (libido dominandi).
� Qui pense libido pense à Sigmund Freud. Le fondateur de la psychanalyse nommait « épistémophilie » ce désir de connaître. Pour lui, ce serait l’expression sublimée de la pulsion sexuelle.
D'où vient le désir d'apprendre ?
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
� Apprendre peut s’avérer déstabilisant. C’est pourquoi l’apprentissage est difficile et parfois improbable. C’est transformer ses représentations, rompre avec des certitudes, réaménager ce que l’on jugeait savoir. Ce qui peut parfois bousculer, provoquer un vrai malaise de tourner le dos à ce que l’on pensait savoir.
� Assimiler de nouvelles connaissances nécessite la plupart du temps d’ébranler un savoir ancien avec beaucoup de tâtonnements et d’erreurs. Ceci est souvent une épreuve difficilement soutenable pour l’individu, une expérience frustrante, douloureuse, voire anxiogène. Penser connaître des choses et s’entendre dire qu’on fait fausse route, que nos conceptions sont erronées ou trop partielles est difficile à accepter: c’est une question narcissique d’estime de soi.
� Apprendre résulte de transformations successives, de confrontations personnelles à des poches de résistances cognitives ou à des ruptures épistémologiques : d’où la notion de « conflit » cognitif (et socio-cognitif!). La gestion de la restructuration des connaissances personnelles est délicate à encadrer.
� De nos jours, il est apparu une nouvelle forme de pédagogie où l’on considère maintenant l’erreur comme outil pour enseigner. On part des erreurs pour faciliter le passage vers un apprendre, déterminer le chemin didactique le plus favorable.
� On apprend en faisant des erreurs: en les analysant et en recommençant une procédure. L’apprentissage par l’erreur permet de s’intéresser aux opérations effectuées, aux stratégies mobilisées par l’apprenant. Il s’agit de conduire l’élève à comprendre et rectifier son erreur de raisonnement. C’est un nouveau paradigme pour l’apprentissage qui consiste à privilégier des cerveaux réflexifs à des cerveaux essentiellement bien remplis. La réflexivité est un nouvel enjeu d’un apprentissage tout au long de la vie !
52 Apprendre, est-il déstabilisant ?
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
Plusieurs formes d’apprentissage ?? • Appren&ssage par imita&on : Le plus courant : il suppose de la part de l’enfant (ou de
l’adulte dans certaines situa5ons) la valorisa5on d’un modèle et la volonté de le posséder, de le prendre. C’est par l’imita5on que se font tous les appren5ssages spontanés de la pe5te enfance : parole, gestes, mimiques, etc.., ainsi que ceux de la dimension esthé5que des ac5vités : ton, grâce, style, manière, etc.
• Appren&ssage par associa&on : On associe un s5mulus nouveau à un mécanisme déjà appris afin de créer un nouveau savoir. Pour apprendre des choses complexes, cela permet d’enchaîner des situa5ons de difficulté croissante.
• Appren&ssage par essais et erreurs : Le sujet est mis en situa5on d’essai, on ne lui donne aucun mode d’emploi (parfois même pas la condi5on de succès ou d’élimina5on). Pour fonc5onner correctement, il faut que la solu5on prenne en compte ce que le sujet sait déjà.
• Appren&ssage par explica&on : On explique au sujet, oralement ou par écrit, ce qu’il doit savoir (exemple : un manuel de secourisme). C’est le principe des cours magistraux.
• Appren&ssage par répé&&on : On fait faire au sujet ce qu’il doit apprendre, d’abord passivement, puis de plus en plus ac5vement, jusqu’à ce qu’il puisse faire et refaire seul les opéra5ons.
• Appren&ssage combiné : C’est le plus efficace, et il est très u5lisé en ma5ère d’enseignement de savoir-‐faire professionnel, car il combine les modalités précédentes. Le sujet est mis en situa5on : on lui montre quelques fois les bons gestes en lui expliquant les principes d’ac5on ; on le laisse ensuite se perfec5onner par une répé55on de moins en moins supervisée.
• Appren&ssage par immersion : Les langues s’apprennent mieux en situa5on d’immersion totale. Par exemple, lorsque les cours ne sont donnés que dans la langue à apprendre et que le professeur ne parle avec les élèves que dans leur langue d’immersion.
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
� Nous sommes des millions à apprendre tout au long de la vie, chacun à sa manière, par plaisir ou par nécessité… « Se former tout au long de la vie » est même devenu un véritable slogan des sociétés contemporaines, appelées à répondre aux exigences d’une économie fondée sur l’innovation et une concurrence de plus en plus mondialisée.
� Le monde du travail, en pleine évolution, requiert des salariés capables de s’adapter à des environnements changeants. Le secteur de la formation professionnelle est devenu une préoccupation majeure des démocraties, censées apporter à tous les possibilités de son évolution.
� Les pratiques d’autoformation se démultiplient, facilitées par l’usage des technologies numériques.
� L’apprentissage conduit à se fixer des objectifs bien particuliers, changer de métier, ou même de vie. Cela peut être issu d’une obligation suite à une perte d’emploi ou de choix personnels correspondant à une quête de soi, et engendrer des bifurcations professionnelles, dessinant des parcours inattendus, des histoires de vie originales. C’est aussi tout le bonheur de l’apprentissage tout au long de la vie, qui est processus de transformation de soi.
� Dates récentes essentielles : 2009 Accord National Interprofessionnel sur le développement de la formation professionnelle tout au long de la vie (7 janvier 2009) Loi du 24 novembre 2009 sur la formation et l’orientation professionnelle tout au long de la vie + 2015 : création du compte personnel de formation professionnelle (www.moncompteformation.gouv.fr/ : Si vous avez eu une activité salariée dans une entreprise de droit privé en 2015, vos heures CPF seront automatiquement reportées et sauvegardées dans votre compte personnel de formation, sans démarches de votre part, à la fin du premier trimestre 2016.)
Apprendre tout au long de la vie…
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
Petite histoire de la formation continue professionnelle � 1792 : Projet Condorcet : formation poursuivie pendant toute la durée de la vie, égalité devant l’instruction,
des contenus en liaison avec l’évolution des sciences et des techniques, formation civique du citoyen ; � 19e siècle Création du Conservatoire National des Arts et Métiers, Création des écoles d’ingénieurs
(Polytechnique, Ponts et chaussée, Mines) � 1945-1946 : Deux mouvements éducatifs apparaissent : L’éducation populaire (besoins sociaux) & la
formation professionnelle accélérée (besoins professionnels) Développement de méthode pour adultes (méthode Carrard, entraînement mental…)
� 1946-1950 Développement des progressions pédagogiques Apparition d’un troisième courant : la Formation en entreprise (TWI) Création de la FPA (1946) Création de Léo Lagrange (1950)
� 1950-1955 « Cousinage » entre éducation populaire et formation en entreprise ; Apparition d’un quatrième courant : la promotion sociale (besoin d’encadrement) ; Création des centres régionaux du CNAM (1952) ; Création du CESI ; Joffre Dumazedier fonde le Groupe d'études des loisirs et de la culture populaire (1954)
� 1955-1956 Apparition de la notion d’éducation permanente � 1959 La formation continue devient l’école de la seconde chance ; 1ére loi de la promotion sociale (De
Gaulle et Debré, juillet 59) ; Création de la Délégation générale de la promotion sociale (1961) � 1960-1961 Promotion de l’Education Populaire qui aborde la formation des adultes � 1963-1964 Apparition du concept de promotion professionnelle (pour les ouvriers) ; Apparition du concept
de promotion supérieur du travail (pour les cadres) ; � 1968-1972 Premières négociations syndicales sur la formation professionnelle (1968) ; L’éducation
permanente absorbe la Formation professionnelle ; Loi de 1971 sur la formation professionnelle dans le cadre de l’éducation permanente ; Création de la Délégation à la Formation Professionnelle ; Création des GRETA (1972)
� 1972-1985 Montée du chômage ; Scission de la formation en deux courants : la formation professionnelle en entreprise et le développement des actions pour les chômeurs ; Création des stages Barre ; Création des missions locales
� 1989-1998 Publication du livre blanc sur l’éducation et la formation de Jacques Delors (1996) ; Apparition du concept de « formation tout au long de la vie », de société cognitive, etc... Rapport à l’Unesco de la Commission internationale sur l’éducation pour le XXIème siècle,…
� 1998-2002 Montée en puissance des Technologies de l’information et de la communication Apparition des concepts de FOAD, de e-learning, de Knowledge Management ; Colloques sur l’autoformation
� 2004 Loi relative à la formation professionnelle et au dialogue social (4 mai 2004) ; Transformation de la VAP en VAE ; Création du DIF (DROIT INDIVIDUEL A LA FORMATION)
� 2009 Accord National Interprofessionnel sur le développement de la formation professionnelle tout au long de la vie (7 janvier 2009) Loi du 24 novembre 2009 sur la formation et l’orientation professionnelle tout au long de la vie
� 2015 : création du compte personnel de formation professionnelle (www.moncompteformation.gouv.fr/)
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
Les étapes de la formation en 3T � T1: 19e-20e siècle : la promotion sociale par le savoir : Dans son rapport intitulé
L’Organisation générale de l’instruction publique (1792), Condorcet plaidait pour une éducation populaire, qui garantirait l’égalité des citoyens et devrait se dérouler à tous les âges de la vie.
� En 1794, le Conservatoire national des arts et métiers (Cnam), fondé par l’abbé Grégoire, est destiné (avec l’école polytechnique) à former des ingénieurs pour « perfectionner l’industrie nationale ».
� L’idée d’éducation populaire et de promotion sociale par l’éducation fait son chemin et s’organise au cours du 20e siècle, en prenant son essor grâce à différents mouvements. Elle est portée notamment par Joffre Dumazedier, ardent militant de la formation pour les adultes.
� T2 : Années 1970 : la formation professionnelle continue instituée: Entre les deux guerres, apparaissent des actions de « perfectionnement professionnel » pour l’encadrement. Elles viennent d’institutions créées pour diffuser l’organisation scientifique du travail, comme le Cnam, ou le Comité d’études générales de l’organisation scientifique (Cegos), fondé en 1932. Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les grandes entreprises développent des actions de formation pour leur personnel (Renault, Snecma…).
� La loi du 16 juillet 1971 organise la formation professionnelle continue des adultes en instituant son financement par les entreprises. Les organismes de formation continue se développent : Cnam, greta (groupements d’établissements du second degré de l’éducation nationale), Afpa, première formation continue d’importance dans la société française crée par le ministère du Travail.
� T3 : Années 2000 : le life long learning; à la fin des années 1970, est avancé un concept humaniste de l’apprentissage tout au long de la vie qui va devenir le socle des politiques nationales et internationales.
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
Les étapes de la formation en 3T � L’Unesco considère que le stock des connaissances se renouvelle désormais tous
les sept ou huit ans, bien plus vite que le renouvellement des générations. D’où la nécessité de préparer les populations à se former en permanence. Jacques Delors, président de la Commission internationale sur l’éducation pour le 21e siècle déclare que « le concept d’éducation tout au long de la vie est une clé d’entrée dans le 21e siècle » (Unesco 1996).
� Le slogan « life long learning » est lancé par la Communauté européenne en 1995. Il exprime l’ambition de favoriser l’employabilité des salariés au cours de leur carrière professionnelle et l’adaptation des citoyens à la société de l’information. Ainsi se profile la vision d’une société éducative qui dépasse la distinction traditionnelle entre éducation première et éducation permanente, où tout peut être occasion d’apprendre et de s’épanouir.
� En 2000, le Conseil européen, réuni à Lisbonne, décide de promouvoir dans l’Union européenne, « l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d’une croissance économique durable accompagnée d’une amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et d’une plus grande cohésion sociale ».
� Cette stratégie a échoué et été recentrée dès 2005 sur l’emploi. � En 2010, un nouveau projet vise une « croissance intelligente, durable et inclusive » � Le concept d’inclusion fait récemment son apparition dans le champ des sciences
de l’éducation. L’école inclusive vise l’adaptation aux apprenants, quelles que soient leurs particularités. C’est une structure qui n’exclut personne et qui met en place des dispositifs adaptés pour tous selon les besoins de chacun. C’est un lieu d’échanges qui permet la prise en compte des différences de chacun… C’est une école qui tient compte des difficultés d’apprentissage de chacun, qui adapte son enseignement à chacun, une école ouverte à la différence.
� L’école inclusive est une nouvelle approche de l’enseignement, une nouvelle philosophie de l’éducation.
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
Qu’est-ce que se former ? � on apprend par soi-‐même (obsolescence des connaissances du métier) � on apprend aussi socialement ( au contact des autres) � on apprend en situation de travail (analyses de pratiques professionnelles,
débrie8ing) � on apprend surtout en assurant un retour ré4lexif sur ses expériences
(journal ré8lexif, carnet intime) � on apprend en simulation des situations de travail � On apprend en recherche-‐formation (autoconfrontation)
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
Qu’est-ce que former ??? � Venu du latin « formare », le mot « formation » possède la même racine que
forme, formel et format. Le terme « formation » est étymologiquement de l’ordre du « prendre forme »
� Former, c’est savoir communiquer en sachant qu’il ne suffit pas de bien dire une chose pour être compris : il faut aussi vérifier que le public a bien compris et lui donner l’envie d’écouter la suite.
� Former, c’est faciliter l’assimilation des connaissances par les stagiaires et pour cela mesurer leur possibilité d’apprentissage. Le formateur met à disposition des apprenants des savoirs, des savoirs – faire, des savoir -être qu’ils vont devoir s’approprier de manière à construire des ressources personnelles, un répertoire d’action et de connaissances… en réponse à un besoin de formation identifié ou un souhait d’évolution des compétences professionnelles.
� Former suppose une mise en scène : du groupe et du contenu, une scène d’apprentissage. Nous avons observé que c’est l’enseignant ou le formateur qui imagine, planifie, organise l’acte d’apprendre. il s’agit alors de lier apprendre à enseigner. L’enseignement ou le formateur accompagne l’apprendre. L’enseignement met en scène les apprentissages: en cela, je le répète, cela semble essentiel : « Un cours n’est pas conçu pour celui qui enseigne, mais pour celui qui apprend ! » (Boudreault)
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
Qu’est-ce que former ??? � Dans le cadre de la formation, l’apprentissage est alors interactif : aux stimulations
du formateur vont répondre les formés, aux gestes d’enseignement/formation vont répondre des gestes d’étude du formé (à expliquer va répondre prendre des notes avec un stylo.
� La formation suppose d’animer un groupe qui est une entité vivante avec sa logique et évolution propres, on parle de la dynamique du groupe. Former, c’est aider guider, accompagner, tutorer, conseiller, communiquer, faciliter, concevoir, préparer…
� Le formateur organise en outre la médiation entre l’apprenant et les contenus de l’apprentissage, les contenus de la formation. Il établit un scénario d’apprentissage; il didactise des savoirs, il anime un face à face. En amont, il travaille éventuellement à une ingénierie de formation (objet de l’UE 24 F2F)
� Nous nous intéressons qu’à la seule dimension cognitive, celle de traitement de l’information, de traitement de l’apprentissage au moyen de procédures mises à disposition de l’apprenant par le formateur, en tant qu’expert du faire apprendre, de la formation continuée. Même si on ne peut vraiment pleinement ignorer les dimensions affectives et sociales, ne serait-ce que par les effets de feed-back de la classe d’apprenants.
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
Qu’est-ce que former ?
Un professionnel
de l’apprentissage
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
Différencier modèle pédagogique et modèle andragogique ? � Le terme andragogie est u&lisé comme synonyme de forma&on des adultes. Ce néologisme
est élaboré sur le modèle de pédagogie, le mot « pédagogie » étant emprunté au grec paidagogia, composé de paidos, "enfant", et "agogos", conduire (le pédagogue étant étymologiquement l'esclave chargé de conduire un enfant à l'école). De la même façon a été inventé le terme andragogie, à l'aide de la racine anêr (andros), signifiant "l'homme", "l'être humain de sexe masculin". Ce^e étymologie est discutable selon les féministes puisque « andragogie » ne renverrait donc qu'à une forma5on de l'homme par opposi5on à la femme. Du coup, ce^e équivoque séman5que conduit souvent à préférer « forma&on pour adulte ».
� La pédagogie est définie comme l’art et la science d’enseigner aux enfants ou adolescents. Le modèle s’est développé en Europe, d’abord dans les écoles religieuses dès le VIIe siècle puis dans les écoles publiques au XIXe siècle.
� Le modèle pédagogique fonc&onne avec un ensemble de postulats : les apprenants dépendent largement des adultes et de programmes scolaires énoncés pour eux. Ils doivent apprendre un ensemble de savoirs considérés par le conseil supérieur des programmes comme incontournables pour leur classe d’âge. À par5r de là, l’enseignant décide seul de ce qui sera appris, quand et comment. La logique scolaire est fondée sur l’obliga5on, non pas l’adhésion volontaire. L’expérience de l’apprenant est rarement mobilisée. Les méthodes pédagogiques sont souvent classiques : cours magistraux ou cours dialogués, exercices de systéma5sa5on, travaux d’exposés, parfois des situa5ons problèmes. L’appren&ssage s’appuie sur une logique de contenu. La mo&va&on est plutôt s5mulée par des signes externes comme des notes, des évalua&ons, des encouragements ou des aver&ssements. Elle n’est pas liée aux contenus. La discipline est un moyen de canaliser le manque d’appétence aux appren5ssages, l’absence de désir d’apprendre. Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion
ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
Éléments d’andragogie � Le modèle andragogique se définit comme l’art et la science d’enseigner aux
adultes. Il prend en compte les spécificités des adultes : des personnes responsables, d’expériences qui ont besoin de savoir pourquoi ils doivent apprendre quelque chose pour adhérer à des activités d’apprentissage proposées. Les adultes admettent difficilement qu’autrui impose sa volonté sans justification. Les adultes, arrivant en cours avec une expérience propre, constituent des groupes d’apprenant très hétérogènes. Cela enrichit considérablement les confrontations et les transactions d’apprentissage. Cela peut exiger une personnalisation des stratégies de formation. Dans tous les cas, la formation d’adulte est propice à l’emploi de méthodes expérimentales, de mises en situation, de jeux de rôle, d’activités d’échange à partir des expériences, des conceptions des uns et des autres. L’apprentissage s’appuie sur une logique de besoin : les adultes ont ressenti un besoin de formation et y répondent de leurs propres initiatives ou bien en amont un travail d’ingénierie de formation, avec une analyse des besoins de formation, a été opéré dans l’entreprise : une session de formation est censée apporter des réponses. Parfois, c’est une logique de catalogue de contenus qui prévaut…
� Les adultes adhèrent davantage à un apprentissage dans des situations authentiques, si les savoirs enseignés permettent d’affronter des situations réelles qui leur sont nouvelles.
� L’apprentissage ne peut pas être dissocié du besoin de développement personnel et professionnel de l’adulte. L’assimilation des adultes est d’autant plus facilitée que les connaissances, les compétences, les attitudes sont exposées dans le contexte de leur mise en application sur des situations réelles. L’aspect concret et de transférabilité des connaissances acquises est très important.
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
� Les adultes sont intimement motivés par le désir d’accroître leurs compétences professionnelles, leur satisfaction professionnelle, leur estime de soi. Toutefois, ils ont besoin de savoir pourquoi ils doivent apprendre quelque chose avant d’engager une formation. L’adulte a besoin d’être perçu comme des individus capables de s’autogérer , de prendre leurs propres décisions.
� L’adulte a besoin de comprendre les raisons de la formation pour être motivé : les actions doivent être justifiées et acceptées par les apprenants, elles peuvent être même en certains cas l’objet de négociation et redéfinition pour maintenir l’adhésion du groupe d’adulte apprenant.
� L’adulte a toujours besoin de savoir où il va pour assimiler : le sujet ou thème doit être correctement introduit, les objectifs pédagogiques rigoureusement annoncés, il convient de démontrer le lien logique entre les différentes phases de la formation.
� L’expérience des adultes signi4ie ce qu’ils sont. L’adulte a besoin de s'appuyer sur son expérience pour maintenir sa motivation à apprendre : le savoir nouveau doit lui apparaître comme contextualisé à ce qu’il sait déjà, il doit être confronté à des situations qui vont le conduire à utiliser ou penser le savoir visé, la compétence enseignée.
� La formation doit être interactive au moyen de retours d’expériences, d’expérimentation, de mises en situation (des jeux de rôles à ne pas confondre avec une activité ludique).
Éléments d’andragogie
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
� La personnalisation de la formation tient compte des motivations et des niveaux d’intérêt.
� Les situations didactiques doivent être « actives » dans le sens qu’une activité cognitive est sollicitée chez l’adulte en formation.
� Nous le voyons la pédagogie pour adultes se différencie de la pédagogie pour les enfants et adolescents. En effet, l'adulte n'a pas la même disposition de mémorisation (il n'a plus l'habitude d'apprendre par coeur).
� De surcroît, il n'admet guère les idées toutes faites et il a besoin d'être convaincu. Son esprit est moins malléable que celui d’un enfant, et il a intégré nombre de préjugés.
� Enfin, l'apprentissage peut être mal perçu s’il apparaît comme une redoutable remise en cause de ses certitudes. En revanche, l'adulte dispose d'une expérience, sur laquelle on peut s'appuyer, et d'un esprit critique bien plus ample.
Éléments d’andragogie
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
la lettre en polonais
Expérimentation pour penser la formation; mise en situation : JEU DE L’IDEOLOGIE DES DONS
Objec5fs : me^re en cause l’idéologie des dons et conforter l’image de soi des apprenants en réfléchissant sur « comment les hommes construisent leur savoir et leur personne ? »
Concepts : équilibra5on, accommoda5on, assimila5on, schème.
Démarche: situa5on de recherche en pe5ts groupes, alternance de temps, cheminement par étape, produc5on
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016
� Apprendre est-ce seulement recevoir des informations, des connaissances?
� Sort-on de l’ignorance lorsqu’on apprend? � Doit-on dire « enseigner » ou bien « faire apprendre » ? � Que peut-on dire des opérations mentales pour apprendre? � Est-ce qu’apprendre, c’est avant toute chose s’entraîner à
faire? � Peut-on apprendre sans désir ?
� Merci de défendre son opinion et d’argumenter.
Philippe CLAUZARD MCF Université de la Réunion ESPE - Laboratoire ICARE Février – Mars 2016