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21 Dossier

Le lycée : objectif

démocratisation

Catégories 30• CPE• Avancement des agrégés• Mouvement des personnels REP+• Non-titulaires

Sur le terrain 32• Osons la démocratisation

en classe prépa

Fenêtre sur 34• Les Fralib

Culture 36• Livres/Revues• Cinéma/Théâtre/Spectacles/Expositions

Droits et libertés 40• Homophobie• La laïcité remise en cause

Dans la classe 41• Le stage d’observation en Troisième

Entretien 42• Joël Gombin,

sur la progression du FN

International 44• Côte d’Ivoire• Amérique du Sud• Turquie

Changer d’ère 46• Espace numérique de travail

ÉditoVœux... sans volontéÀ grand renfort de spectacle,

le président de la République

organisait le 18 janvier ses vœux

à la jeunesse et aux forces de

l’engagement.

Tous les jeunes présents,

quel que soit leur âge, étaient

dans l’attente des mesures de

nature à entrouvrir la porte d’un

avenir, de garanties d’insertion

dans la société, d’emploi, un peu

plus positives qu’aujourd’hui.

Ils en furent pour leurs frais et

durent se contenter d’un show.

Rien sur l’éducation, la culture,

l’emploi, seulement des envolées

lyriques sur la jeunesse,

les valeurs et la société.

Peu avare de prédictions,

le Président s’est exprimé sur

l’apprentissage dont les filières

seraient « largement ouvertes »,

500 000 apprentis en 2017

alors qu’actuellement le nombre

diminue. Avec en plus une

petite dose de développement

du service civique, excellent

dispositif pour retarder l’arrivée

des jeunes sur le marché du

travail mais ne débouchant pas

sur un emploi salarié. Finalement,

rien de plus que les emplois

d’avenir, déjà expérimentés

sous d’autres formes...

Ou comment dire, une addition

de vœux pieux !

Alors que se posent de façon

si aiguë les questions d’avenir, de

cohésion sociale et de solidarité,

les réponses présidentielles

sonnent plutôt comme un glas.

Alors que 2016 débute comme

s’est achevé 2015, devant cette

absence de volonté, nous

voulons forger collectivement,

en particulier dans nos classes,

un espoir pour la jeunesse.

Nous le redirons

dans la grève

et dans la rue

le 26 janvier.

Frédérique Roletcosecrétaire générale

L’Université Syndicaliste, le journal du Syndicat national des enseignements de second degré (SNES, 46, avenue d’Ivry, 75647 Paris Cedex 13.Tél. standard : 01 40 63 29 00). Directeur de la publication : Roland Hubert ([email protected]). Rédacteur en chef : Thierry Pétrault. Secrétairede direction : Bénédicte Derieux. Collaborateurs permanents : Grégory Bekhtari, Nicolas Béniès, Jean-François Claudon, Véronique Ponvert, Stéphane Rio,Nicolas Sueur. Régie publicitaire : Com d’habitude publicité, Clotilde Poitevin, 25, rue Fernand-Delmas, 19100 Brive, tél. : 05 55 24 14 03, fax : 05 55 18 03 73,www.comdhabitude.fr. Compogravure : C.A.G., Paris. Imprimerie : ROTOFRANCE, Lognes (77). C.P. N° 0118 S 06386. I.S.S.N. N° 0751-5839. Dépôt légalà parution. Photo de couverture : © Fotolia.fr / Kubra Konca. Prix du numéro : 3 €. Abonnement : 1) Personnels de

l’Éducation nationale : France 30 € ; étranger et DOM-TOM : 44 €. 2) Autres, France : 42 € ; étranger :56 €. Publicités : Mars Distribution (p. 2), Mediasmart (p. 48). Joint à ce numéro : Courrier de S1 n°5 ; 24 p. Retraités.

6Portrait

Edwy Plenel

34 Fenêtre sur

Les Fralib

SOMMAIRE30 jours 4Rattrapage 5• L’état d’urgence

Portrait 6• Edwy Plenel

Actualité 8• Réforme du collège : carton rouge• Salaires dans la Fonction publique

et pour les enseignants• Déchéance de la nationalité• État d’urgence• Partenariat Microsoft France• Retraités en Grèce

Courants de pensée 14• Unité et Action• École Émancipée• Émancipation• Unité, Revendications,

Indépendance Syndicale (URIS)

Éco/social 18• L’économie mondiale et la finance• Le système fiscal• COP21

Dossier 21• Le lycée : objectif démocratisation

Métier 28• Évaluation au collège• Langues vivantes• Philosophie en série technologique• Journée des documentalistes

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4 - US MAGAZINE - Supplément au no 758 du 9 janvier 2016

BILLET D’HUMEUR

Défendre son boulot n’est pas un délit

30 JOURS

sique et la séquestration est uneviolence physique  ». Dommageque le patron du MEDEF n’ait pasétendu son analyse aux situa-tions de violence sociale, proba-blement parce qu’il ne partagepas les mêmes valeurs que lessalariés de Goodyear. Cet achar-nement contre les syndicalistesn’est pas sans rappeler le casdes salariés d’Air France, licen-ciés pour avoir déchiré une che-mise. Au pays de l’état d’urgenceil ne fait pas bon se battre pourses droits. n Nicolas Sueur

Le tribunal correctionneld’Amiens a condamné huitanciens salariés de Goodyear à24 mois de prison, dont neuffermes, pour la séquestrationdurant trente heures du DRH etdu directeur de production afin deprotester contre la fermeture del’usine. Alors même que lescadres séquestrés avaient retiréleur plainte, le parquet a optépour la fermeté. Pour Pierre Gat-taz «  ce sont des questions devaleurs (…) il faut être opposé àtout ce qui est une violence phy-

Bonne annéeLe SNES-FSU vous présente ses meilleurs vœux pour l’année 2016.

Une pensée particulière pour ceux et celles qui ont été directementtouché-e-s par les événements dramatiques d’une année 2015 mar-quée par l’horreur, mais aussi la solidarité et l’espoir. Que cette annéeapporte à toutes et tous paix, joies et réussites.De rudes combats pour une société plus juste nous attendent, pourun second degré enfin reconnu par un gouvernement qui depuis prèsd’un an refuse tout dialogue et toute écoute des personnels. Sachonsles mener avec détermination, collectivement. Notre boussole a tou-jours été l’égalité, la justice et la fraternité. Trouver les mots et les actions pour lutter contre le repli sur soi d’unesociété qui ne trouve plus l’espoir, qui doute, peut être la marquede cette année nouvelle.

IndigestePlainte pour fraude fiscale contre McDonald’s France.

20déc.

Ma quéL’Italie dit basta aux anglicismes.

21déc.

On en est richeLe nombre de pauvres en France repart à la hausse selon l’Insee.

22déc.

Pas déchu. Réforme constitutionnelle :

la déchéance de nationalité maintenue dans le projet.

23déc.

Croire au Père NoëlCet hiver, la végétation se croit au printemps.

25déc.

Démocratie au centreCentrafrique : une élection en attendant la réconciliation.

29déc.

Plus que des chinoiseriesUne journaliste de L’Obs expulsée de Chine.

30déc.

Tour infernaleSpectaculaire incendie dans une tour de Dubaï.

31déc.

Meilleurs vœuxQue 2016 ne renouvelle pas le cortège de malheurs de 2015.

1er

janv.

Podium. L’année 2015 a été la troisième la plus chaude

depuis 1900 en France.

2janv.

Au bord du gouffre. L’ambassade saoudienne en Iran

incendiée après l’assassinat d’un dignitaire chiite en Arabie Saoudite.

3janv.

Il dégaineObama part en croisade contre les armes à feu.

4janv.

Toujours contemporainLe compositeur et chef d’orchestre Pierre Boulez est mort.

6janv.

Charlie se souvient. Numéro spécial pour commémorer

les victimes de l’attaque de Charlie Hebdo.

7janv.

Au son du canonBombe H : la Corée du Sud riposte avec de la musique pop.

8janv.

Drôle de tambouille. Un logo du parti Les Républicains

apparaît sur TF1 en pleine démonstration d’ustensile de cuisine

dans le téléachat.

9janv.

Le geste à la paroleMosquées ouvertes à tous : « pour un dialogue serein ».

10janv.

Couvre-chef. Le baron de la drogue mexicain « El Chapo »

arrêté après six mois de cavale.

11janv.

Sortie de route Prison ferme pour huit anciens salariés de Goodyear.

12janv.

T’as pas cent ballesDanemark : les migrants devront-ils payer leur séjour ?

13janv.

Promesses de mariage envoléesGeneral Electric supprime 6 500 emplois en Europe,

dont 765 en France chez Alstom.

14janv.

Triste lundiL’auteur de Vendredi ou la vie sauvage, Michel Tournier,

le romancier des grands mythes, n’est plus.

18janv.

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RATTRAPAGE

Qu’il soit décrié, salué avec enthousiasme ou accepté du bout des lèvres au nom de «  l’union nationale  », il n’en est pas moins placé unanimement sous le feu des projecteurs depuis le 13 novembre. Décryptage d’un train de mesures susceptiblesde créer, si elles étaient constitutionnalisées, un état d’exception permanent.

L’état d’urgence

Supplément au no 758 du 9 janvier 2016 - US MAGAZINE - 5

Quels résultats ?La comparaison des chiffres du ministère de l’Intérieur etde ceux de « l’observatoire de l’état d’urgence » mis en placepar le journal Le Monde est édifiante. Entre la mi-novembre et la mi-décembre, 360 personnes ont été assignées à résidenceet 334 interpellées. Ondénombre 287 gardes à vue.Lors des 2 700 perquisitionsréalisées, la police a pu saisir431 armes, dont 41 considéréescomment étant des armes deguerre. Le Premier ministrea affirmé que plusieurs projetsd’attentats avaient été déjoués, sans que l’on en sache plus. SelonJean-Jacques Gandini, avocat au barreau de Montpellier, « à l’issue dece déploiement de force sans précédent, la section antiterroristedu parquet de Paris n’avait, au 15 décembre, ouvert quedeux enquêtes préliminaires. Maigre bilan ». Une seule miseen examen a été décidée en tout et pour tout. n

AnalyseiJean-Jacques Gandini, « Vers un état d’exceptionpermanent », Le Mondediplomatique n° 742,janvier 2016, p. 12-13.

Ressourcesi• Observatoire de l’étatd’urgence :http://delinquance.blog.

lemonde.fr.• Recensement des faits liés àl’état d’urgence en France :www.laquadrature.net.

Il l’a ditI« L’histoire montre que toutes les lois d’exception,telles que les lois scélérates votées en 1883-1894 […]ou la loi sur l’état de siège prévue pour défendrela République et qui fut utilisée en 1852 pourpermettre le coup d’État napoléonien et en 1871pour écraser la Commune, sont par la suitedétournées de leurs buts primitifs. »Francis Vals (sic !), député SFIO de l’Aude, en avril 1955

2 700perquisitions et

2 enquêtes

Quelles évolutions ? Quels risques ?La loi de 1955 n’a pas été jugée contraire à la Constitution, bienqu’antérieure. Elle a cependant une application circonstancielle,« soit en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves àl’ordre public, soit en cas d’événements présentant, par leur

nature et leur gravité,le caractère decalamité publique ».Le gouvernement,considérant que la

menace terroriste a un caractère durable sinon permanent, souhaiteinscrire certaines des mesures de l’état d’urgence dans la durée.Constitutionnaliser l’état d’urgence, c’est permettre à une seulepersonne, le président de la République, de l’instaurer sanslimitation de durée et sans l’accord du parlement. C’est aussidonner un quasi plein pouvoir aux forces de l’ordre qui sepasseront du contrôle du judiciaire. Cette démarche de transfertspermanents de prérogatives du pouvoir judiciaire aux pouvoirsexécutif et administratif n’est pas sans rappeler le « Patriot Act »américain. L’utilisation des assignations à résidence contre desmilitants, les restrictions au droit à manifester que l’on a puconstater deviendraient ainsi une possibilité permanente, dans uneforme d’instrumentalisation du terrorisme pour étouffer lacontestation sociale. Le droit de manifester, notamment, n’est pasnégociable : ne pas céder au terrorisme, c’est continuer à vivre etdonc lutter. Comme l’écrivait Benjamin Franklin, « Un peupleprêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mériteni l’une ni l’autre, et finit par perdre les deux ». n

Constitution

Les précédentsLa loi du 3 avril 1955 instituant l’état d’urgence a étérédigée pour faire face aux « événements » qui avaientalors lieu dans les départements algériens. Cet état

d’exception a étédéclaré à troisreprises lors de laguerred’Algérie :au printemps1955, donc,au momentdes premières

opérations de « maintien de l’ordre », puis en 1958 aulendemain du coup d’État du 13 mai et enfin en 1961 pourfaire face au putsch des généraux. Il durera jusqu’au 31 mai1963. Depuis, l’état d’urgence a été décrété par LaurentFabius pour la seule Nouvelle-Calédonie en 1984 et parDominique de Villepin lors des émeutes de la fin 2005 pourl’Île-de-France et 24 autres départements. C’est donc lapremière fois qu’il s’applique sur la totalité du territoiremétropolitain depuis la guerre d’Algérie. n

Quelles mesures ?L’état d’urgence permet de conférer par décret pris enConseil des ministres à l’autorité civile (ministre de l’Intérieuret préfets) des pouvoirs de police exceptionnels en matièrede circulation et de séjour des personnes, de perquisition,de confiscation des armes, de réunion, de presse, ce sur toutou partie du territoire national et pour une durée maximalede douze jours. Toute prolongation nécessite une loi.

La loi du 19 novembre 2015, votée à la quasi unanimitépar le Parlement, instaure la prolongation de l’état d’urgencepour une durée de trois mois et modifie la loi de 1955.Les modifications essentielles portent sur l’extensiondu régime d’assignation à résidence et de perquisitions,sur l’ajout de la possibilité de dissoudre des associationsou groupements, sur l’introduction de possibilités de recoursdevant la juridiction administrative et sur la suppressiondes pouvoirs exceptionnels en matière de spectacles, de presseet de cinéma. n

6 fois

en 60 ans

Et la démocratie ?

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6 - US MAGAZINE - Supplément au no 758 du 9 janvier 2016

De sa jeunesse mouvementée enMartinique, Edwy Plenel gardeencore aujourd’hui le souvenir

de ces hommes et de ces femmes quiont été traités au mieux comme desinférieurs, au pire comme des catégo-ries menaçantes à surveiller et à punir.Sa vie fut largement déterminée par lechoix de son père de les soutenir, choixcourageux qui lui valut les brimades del’administration et même la sépa rationd’avec son jeune fils confié pendantdeux ans à une famille antillaise (voirencadré ci-dessous). Edwy Plenel estresté depuis fidèle à la conception dela République héritée de son père. Unerépublique démocratique et sociale,adossée à une école pensée commeun lieu de bataille contre les fatalités,les autoritarismes et les conserva-tismes. Une république promessed’émancipation, qui tire fierté de sapluralité plutôt que de son uniformité.

Aux sources d’un engagementContrairement à toute la générationmilitante qui lui est contemporaine,et dont le point de départ ou de repèreest le Paris de Mai 68, l’itinérairepersonnel d’Edwy Plenel doit beau-coup à la force propulsive d’un mouve-ment au long cours, celui de la déco-lonisation, dont la capitale del’hexagone n’est pas le cœur. Cedécentrement est la pierre angulaire de sonengagement politique, qui se poursuivra plustard sous d’autres formes. C’est depuis Alger,où il habite jusqu’à ses 18 ans, qu’il rejoint en

1969 la LCR, « la branche la plus démocra-tique du trotskisme » selon lui, pour laquelle ilcommence à écrire des articles sur les Antillesou l’Algérie indépendante. Arrivé en Francel’année suivante, il devient vite responsabledu secteur lycéen, puis, de 1976 à 1978, perma-nent à Rouge quotidien, le journal du parti. Leservice militaire, qui est pour lui l’occasiond’organiser des comités de soldats et de faire dela propagande antimilitariste, est un tournantmajeur de sa vie. Il y rencontre des jeunesgens venus de tous horizons, de tous milieux etde toutes origines. Revenu à la vie civile, il faitdes piges pour le Matin de Paris, puis devientjournaliste au Monde en 1980. Il y resterajusqu’en 2005. Il est d’abord responsable de larubrique éducation. En plus de son « empreintefamiliale inconsciente », c’est le militantismeau sein du secteur lycéens de son ancien partiqui l’a amené à participer à de nombreux débatssur l’école avec divers courants pédagogiques.Lui qui n’a jamais validé son cursus à SciencesPo regrette de ne pas s’être donné les moyens

de suivre sérieusement des étudesaprès son bac, mais revendique unesolide formation d’autodidacte, aupoint d’écrire en 1985 un livre sousforme de thèse : La Républiqueinachevée : l’État et l’École en France.Derrière la réflexion sur l’éducation,son objectif est de réhabiliter l’imagi-naire de ceux qu’il appelle les« vaincus victorieux » de l’histoire,vaincus sur le moment mais dont lesidéaux sont la promesse du progrèsdémocratique, contre la Républiquedes vainqueurs et de l’ordre établi.

Éthique et responsabilitésSa période de travail au Monde sedivise en deux moments biendistincts : celui où, de 1980 à 1996, ilacquiert de l’expérience et développeune conception du métier et du rôlesocial du journaliste. Puis la phase deprise de responsabilité au sein dujournal, qui durera dix ans. Les seizepremières années sont, de son propreaveu, les plus formatrices. Ancré dansun cadre collectif, il y apprend à conce-voir le journal comme un lieu departage, une sorte d’université popu-laire. Ce sont aussi les années de l’ap-prentissage des rapports au pouvoirpolitique. C’est dans ces circonstancesque naît l’essence de la pratique jour-nalistique d’Edwy Plenel : un journa-

lisme d’enquête et d’investigation, qui n’hésitepas à bousculer le nouveau gouvernement,et qui apprend au public les informations qu’ilne connaîtrait pas autrement. L’affaire des Irlan-dais de Vincennes ou du Rainbow Warriorsont le produit de ce journalisme de conviction,qui porte déjà en germes le projet postérieurde Médiapart.À cette époque, le journal est contrôlé parses salariés, qui le portent à sa direction, aumoment où il était vice-président de la sociétédes rédacteurs. Commence alors, selon sespropres mots, un « apprentissage négatif ».Bien qu’il participe pleinement à l’essor de ladiffusion du journal et à sa reconnaissancecomme un quotidien de référence, la criseéconomique, les dissensions internes et lespressions externes viennent lui rappeler bruta-lement les limites de l’indépendance d’unjournal, jusqu’à son départ conflictuel en2006. Lucide, il reconnaît avoir été trop« présomptueux » et s’être fait des illusions surses marges de manœuvre.

PORTRAIT EDWY PLENELDEPUIS PLUSIEURS ANNÉES, le patron de Médiapart contribue, avec ses acolytes, à donner un nouveau tonà la presse hexagonale. Rencontre avec un professionnel militant... et exigeant !

Un journaliste en quêtede radicalité concrète

« Son objectif est de réhabiliter

l’imaginaire de ceux qu’il appelle les

“vaincus victorieux” de l’histoire »

Tel père...Décembre 1959. Suite à trois jours d’émeutes à

Fort-de-France, trois jeunes hommes sont vic-

times de la répression, dont un collégien de

15 ans du nom de Christian Marajo. Quelques

jours après, lors de l’inauguration d’une école,

le père du journaliste, Alain Plénel, vice-recteur

de Martinique, demande dans son discours que

l’établissement porte le nom du collégien. Ren-

voyé en France en représailles, il est soutenu par

une grève de l’éducation sur l’île suivie à 90 %.

Militant anticolonial de surcroît, Alain Plénel est

empêché de retourner en Martinique par la

police en 1963. Il faudra attendre 1982 pour qu’il

soit officiellement réhabilité.

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Supplément au no 758 du 9 janvier 2016 - US MAGAZINE - 7

Médiapart naît bien sûr de sa détermination àpromouvoir un journalisme indépendant. Maisaussi de son désir de penser et de faire advenirles conditions concrètes de la pratique de cegenre exigeant de journalisme, après avoir tiréla leçon de ses erreurs. Ewdy Plenel a l’art dela formule. Celle qui éclaire toujours davantagequ’elle ne brille. « Seuls nos lecteurs peuventnous acheter ! », telle est la devise de sonjournal en ligne qui va à contre-courant desgrands organes de presse, rachetés les uns aprèsles autres par des industriels. Dans Le Manifeste de Médiapart – Combatpour une presse libre, les objectifs et les enga-gements sont très clairs : inventer une pressenumérique de référence, qui défend la valeur del’information, de son analyse et de son appro-fondissement, mais aussi la participation deson lectorat, via les fameux blogs qui luipermettent de réagir, voire de lancer des débats.Ce combat pour une presse libre se positionnea contrario d’une logique de flux d’informationen continu qui ne prend aucun recul par rapportaux agendas de communication des pouvoirspolitiques et des grandes entreprises, et favorisela passivité de l’opinion publique. Après plusde sept ans d’existence, le bilan est plutôtencourageant : « une réussite qui surprend,même si elle est encore fragile ».

Un journaliste militantFace à la crise du métier, le modèle reven-diqué par Médiapart peut s’enorgueillir de fairementir – pour l’instant du moins – la fatalitééconomique néolibérale des plans de licencie-ment et rachats de journaux par des grandsgroupes : 117 000 abonnés payants, plusieursmillions de visiteurs par mois, un chiffre d’af-faires de plus de 10 millions d’euros et unbénéfice net de plus d’1 million. Le redresse-ment fiscal de plus de 4 millions d’euros exigéaprès les révélations de l’affaire Cahuzac et liéau taux de TVA réduit réservé pour l’instant àla presse imprimée ne met pas en péril l’en-treprise mais ralentit le projet de ses dirigeants

de la transformer en société de presse à but nonlucratif. Il est en tout cas impossible pour l’ins-tant d’affirmer si ce journal restera une « réserved’Indiens » ou s’il servira d’exemple à d’autresprojets porteurs des mêmes valeurs, mais unechose est sûre, Médiapart est utile au secteur engénéral et en particulier à ceux et celles qui enson sein veulent porter concrètement l’espoird’une alternative à un journalisme dominant quin’a plus l’indépendance pour boussole ni lavolonté de jouer un rôle dans les grands débatssociétaux pour moteur.En effet, Edwy Plenel refuse d’instaurer uneséparation artificielle entre son métier et sonengagement pour une société soucieuse dedémocratie, d’émancipation et de justicesociale. Inspiré par le pragmatisme radical duphilosophe John Dewey et du sociologueRobert E. Park, il ne pense pas qu’il existe deprogramme global qui s’impose-rait d’en haut ni d’homme provi-dentiel. Contre une logique oligar-chique au nom des exploiteurs, etmême contre une logique avant-gardiste au nom des opprimés, ilfaut selon lui, face à la crise decivilisation actuelle, tout reconstruire par en bas,en réunissant des gens différents sur des causesconcrètes pour inventer des réponses nouvellesen prenant les problèmes à la racine. Pour exemple, il cite Ada Calau, militante dudroit au logement devenue maire de Barcelone,et Podemos, du côté des « radicalités authen-tiques, qui ne se payent pas de mots et s’em-parent de l’imaginaire concret des peuples ».Ses convictions, il les défend avec vigueurdans Dire Non, paru en 2014, un « appel àl’exigence démocratique autour de l’horizon del’idéal d’égalité, moteur de la vitalité de laRépublique », au moment où, à ses yeux, laprésidence Hollande marche dans les pas decelle de Sarkozy et où les espoirs déçus etautres promesses trahies nourrissent la menacedu ralliement populaire aux solutions autori-taires et aux passions inégalitaires.

Retour aux sources anticoloniales ?Cette critique incisive des discours de haine etdes pratiques de discrimination issus de l’ima-ginaire inégalitaire de l’extrême droite, on laretrouve dans un autre de ses livres paru lamême année : Pour les musulmans. L’idée dela rédaction de cet essai s’impose à lui enaoût 2013, en écrivant un article sur le coupd’État du maréchal Sissi en Égypte. Cet événe-ment marque à ses yeux un coup d’arrêt auprocessus des révolutions arabes enclenché auprintemps 2011 qui, en éloignant l’espoir delibération des dictatures sanguinaires et desmonarchies obscurantistes là-bas, nourrit enFrance et en Europe les idéologies réaction-naires et racistes qui stigmatisent l’islamcomme incompatible par essence avec la démo-cratie. Prenant pour modèle le Zola de Pour lesJuifs et de J’accuse, Plenel se livre à une généa-

logie des courants de la droite antirépublicaine,incarnée aujourd’hui par Sarkozy et Le Pen, etde sa haine de l’égalité. Convoquant Sartre etFanon, il analyse avec finesse les correspon-dances entre l’antisémitisme exacerbé des anti-dreyfusards de l’époque qui a eu pour abou-tissement le génocide et l’islamophobie actuellequi réactive une logique identique de boucémissaire et annonce le pire. Il questionne aupassage le rapport d’une majorité de Françaisagnostiques ou athées suite au processus histo-rique de déchristianisation aux minorités cultu-relles et religieuses avec qui ils vivent et lesappelle à faire cause commune : « Le foulardque porte une musulmane, la prière querespecte un fidèle [...] tous ces choix qui relè-vent de la liberté de conscience importentmoins que les engagements concrets des inté-ressé-e-s dans ce que nous avons en partage,ce que nous construisons ensemble ».

Enfin, il dénonce avec virulence « le nœud dublocage français » : la nostalgie d’un modèled’assimilation issu de l’empire colonial, où« l’Autre n’était reconnu tel que selon le bonvouloir dominateur, et à la seule condition des’y soumettre » et propose pour le dépasserun « horizon de réconciliation avec nous-mêmes », qui nous apprenne enfin à « penserà la fois l’universel et le singulier, la solidaritéet la diversité, l’unité et la pluralité ». Danscette optique, la lutte pour la levée de l’état d’urgence, à laquelle son journal s’associepubliquement, et en particulier contre la sinistresymbolique de la déchéance de nationalitépour les binationaux, lui apparaît comme essen-tielle, et pourrait s’avérer être, pour de jeunesgénérations si importantes aux yeux d’unhomme soucieux d’éduquer et de transmettre,un moment fondateur. n

Portrait réalisé par Grégory Bekhtari

« Seuls nos lecteurs peuvent

nous acheter ! Telle est la devise de son

journal qui va à contre-courant »

BIBLIOGRAPHIE RÉCENTE

◗ Combat pour une presse libre, Le Manifeste de Mediapart, Galaade, Paris, 2009.

Dire Non, Don Quichotte, Paris, 2014 ◗ Pour les musulmans, nouvelle édition revue et augmentée,

La Découverte, Paris, 2016 ◗ À paraître le 13 mars 2016 chez Don Quichotte :

Dire Non : contre les peurs et les haines, nos causes communes.

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8 - US MAGAZINE - Supplément au no 758 du 9 janvier 2016

ACTUALITÉ

ENQUÊTE SUR L’AP...Plus de 60 % des enseignants du lycée Duby d’Aix-en-Provence ont répondu au questionnairesur l’accompagnement personnalisé. Cinq ans après sa mise en place, le jugement est sévère. Mais leministère de communiquer sans relâche sur l’impérieuse nécessité de l’élargir à l’ensemble du secondaire !

CARTON ROUGE !Le 26 janvier, à l’appel de l’intersyndicale, dans la grève et dansla rue, les enseignants du second degré le rediront une nouvellefois : OUI, le collège a besoin de mesures fortes pour faire faceaux difficultés qu’il rencontre, NON à la réforme « college2016 ».

Àl’heure de son introduction au collège,la section SNES-FSU du lycée Dubyd’Aix-en-Provence a consulté l’en-

semble des collègues de l’établissement poursavoir quel contenu pédagogique donner auxheures d’AP et mesurer le degré de satisfac-tion du dispositif existant. Il en ressort quel’immense majorité des collègues juge sévè-rement les aspects censés être les plus nova-teurs de l’AP, à savoir les « ateliers trans-versaux ». Les élèves, qui effectuent leurschoix à partir d’une longue liste en débutd’année, participent dans ce cadre à des pro-jets annuels ou semestriels les plus divers àraison d’une heure hebdomadaire. Or nonseulement ces heures, prises sur l’enseigne-ment disciplinaire, ne sont d’aucune utilitépour les élèves qui les sèchent ou les contour-nent massivement, mais elles ne sont profi-tables in fine qu’aux élèves les plus doués.

Vingt pour cent des élèves qui entrent aucollège sont en difficulté ou en grandedifficulté. Le collège aujourd’hui ne

parvient pas à les remettre en selle et beau-coup d’entre eux le quittent sans qualificationou sans diplôme, sans possibilité réelle d’in-sertion dans l’emploi et dans la société. Outre le coût humain d’une telle situation,la facture est lourde en terme de dispositifsd’accompagnement, d’insertion, de forma-tion… Investir massivement dans le collègeest une nécessité, une urgence.

Des propositions inacceptablesFace à cela que propose le ministère avec col-lège 2016 ?• Une diminution de l’horaire élève, un renvoiau local, une avalanche de prescriptions, uneaccumulation de conseils divers, une stigma-tisation de certaines disciplines scolaires, uneinterdisciplinarité bradée... !• Un mépris total pour la parole des personnelsqui n’obtiennent jamais aucune réponse auxquestions qu’ils posent lors des journées deformation, que l’administration tente d’inti-

mider en faisant appel à des arguments d’au-torité qui datent d’un autre âge !Parce que nous ne voulons pas de « moinsd’école », parce que nous voulons être entendu-e-s, parce que la ministre doit quitter le terrainde l’autoritarisme pour revenir sur celui desdiscussions avec la profession pour une autreréforme, parce qu’elle doit revenir sur les dis-positifs de la réforme Chatel du lycée au lieude se contenter d’un faux-semblant de bilan...Adressons-lui, tous ensemble, un carton rouge !

Afficher nos revendicationsDans les académies et les départements sontprévus des rassemblements et des manifes-tations qui doivent converger avec les cortègesde l’intersyndicale Fonction publique pournos salaires et nos carrières. Il s’agit, dansces manifestations, d’être visibles sur nosrevendications pour le second degré : abro-gation de collège2016, remise à plat de laréforme Chatel du lycée, créations des postesnécessaires pour faire baisser les effectifs declasse, assurer des temps d’enseignement engroupes et cesser la multiplication des com-pléments de service... n Roland Hubert

Le moins par le moinsBilan : moins d’heures de cours pour lesplus faibles, plus de culture pour les

meilleurs. Le dispositif accentue donc lesinégalités scolaires. Le deuxième grandenseignement du questionnaire réside dansle désir très majoritaire des professeurs deconférer à l’AP un contenu disciplinaire, desoutien ou d’approfondissement, singuliè-rement en mathématiques et français, avecun effectif moyen de 17 élèves. Autrementdit renouer avec les dédoublements rognés,voire supprimés... du fait de l’introductionde l’AP en 2010 !On conçoit mieux dans ces conditions pour-quoi le ministère tarde tant à établir un bilande la réforme du lycée lequel infirmerait trèscertainement le bien-fondé de l’introductiondes EPI et de l’AP au collège. Résultatsdétaillés de l’enquête consultables :http://www.aix.snes.edu/Accompagnement-personnalise-l.html. n

Rodolphe Pourrade, S1

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Supplément au no 758 du 9 janvier 2016 - US MAGAZINE - 9

DÉRIVES MANAGÉRIALES : ÇA CONTINUE !La réforme du collège va dans le

sens d’un renforcement de l’auto-

nomie des établissements et donc

du pouvoir du chef d’éta blissement.

Voici une fois de plus un exemple

des dérives qui se multiplient dans

un collège de l’académie d’Or-

léans/Tours.

À la surprise de la chef d’établis-

sement sur les VS, les heures d’ATP

n’ont pas été pondérées d’où une

économie d’HSA, validée par le

DASEN en réponse au recours for-

mulé par un enseignant. La DSDEN

redonne alors onze HSE à l’établis-

sement, pour du « décloisonne-

ment » en Sixième, un dispositif mis

en place les années précédentes.

Le 8 janvier, la chef s’empresse

d’envoyer à l’équipe de Lettres

un message dont voici quelques

extraits : «  Le décloisonnement

Sixième, comme convenu avant les

vacances de la Toussaint, va être

remis en place au second semestre.

Ce choix avait été fait pour éviter

encore des changements d’emplois

du temps pour les élèves au cours

d’un même semestre.

Ce qui n’était pas envisageable au

premier semestre faute de moyens,

peut donc l’être au second. Aussi,

je souhaite que chaque enseignant

concerné par le décloisonnement

Sixième dans l’une des trois disci-

plines français, maths et histoire,

me précise  via sa boîte mail avant

16 h 30 ce soir, s’il est prêt à s’in-

vestir dans ce dispositif pour le

second semestre. Le cas échéant,

je souhaite que l’enseignant motive

son refus.

Nos missions consistent à mettre

en place tout ce qui favorise la

réussite de nos élèves.

Nous avons actuellement les

moyens nécessaires pour le faire.

Il me semblerait mal venu, au nom

d’un bien être personnel ou d’un

quelconque objet du même genre,

d’en oublier nos missions premières

et de devoir rendre à la fin du mois

11 heures qui nous permettent de

fonctionner au-delà même de ce

dispositif de décloisonnement.

J’attends donc, avant 16 h 30 ce

soir, une réponse individuelle de

chacun par rapport à la remise en

place de ce dispositif. Une non-

réponse de la part de l’enseignant

supposera qu’il est prêt à prendre

en charge le décloisonnement ».

L’équipe de Lettres lui a adressé

son refus collectif...

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COLLÈGE : DU PÉDAGOGIQUE PLUTÔT QUE DU STRUCTUREL Le collège dans sa structuration actuelle n’a pas donné toute sa mesure, de par les conditionsd’enseignement et de vie scolaire qui lui sont réservées, et parce que les contenus et les pratiquesd’enseignement méritent d’être revisitées.

Avant de diminuer les horaires des élèveset de multiplier les prescriptions et lesdispositifs, autrement dit jouer sur la par-

tie visible de l’iceberg comme le fait la réforme,il y a d’autres urgences. Le projet du SNES-FSU part de la certitude que tous les jeunessont éducables, et du constat que les inégalitésde réussite scolaire recouvrent largement lesinégalités sociales. Améliorer le collège, c’estvouloir y faire réussir tous les élèves dans lecadre d’une scolarité obligatoire prolongée à18 ans. Ceci suppose de sortir de sortir del’idéologie d’un bloc école-collège : les col-légiens ne sont ni des écoliers, ni des lycéens.Ils méritent un collège adapté à leur tranched’âge et aux expériences complexes qu’ilsvivent en famille, entre eux et sur le net.

Les leviers possiblesPour cela, des leviers existent :• améliorer les conditions d’enseignementdans les classes pour pouvoir varier les situa-tions pédagogiques et travailler en petitsgroupes dans toutes les disciplines. Favoriserla coopération entre les élèves plutôt queles groupes de niveau ou de besoin enfer-mant dans leurs difficultés les élèves fragilesau lieu de les stimuler ;• bâtir des programmes plus cohérents au filde la scolarité et entre disciplines, pour faciliterla tâche d’appropriation des enseignants etdes élèves. Construire progressivement l’in-terdisciplinarité en partant des programmes ;• travailler la mixité sociale et scolaire detous les établissements et leur attractivité

face au secteur privé, en particulier ceux del’éducation prioritaire les plus ghettoïsés ;• former les enseignants aux résultats de larecherche en pédagogie, en didactique, ensociologie de l’éducation au lieu de les formateraux dernières lubies de réformateurs hors-sol.Ce projet est-il compatible avec le tempspolitique et les impératifs de la com’, avec

les investissements que la Nation est prêteà consentir pour les milieux populaires ?Avec les modes de management engagésactuellement dans la fonction publique ?Ses objectifs sont-ils partagés ? Faire entendre sa nécessité est tout l’enjeudes mobilisations en cours. n

Valérie Sipahimalani

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ACTUALITÉ

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EN COLLÈGENE PAS SE LAISSER FAIRELes pressions pour faire comme si la répartition de la DHG devait être la mise en musiquede la réforme sont fortes, y compris dans ses dispositifs AP et EPI qui sont pourtant comprisdans les horaires disciplinaires.

PRÉPARATION DE RENTRÉE :OFFENSIFS ET VIGILANTSLa prochaine rentrée se prépare dans les académies et les établissements. Les conseils d’administrationvont être réunis dans les semaines qui viennent pour décider de la répartition des moyens.

Il n’est pas possible de discuter de la répar-tition des marges horaires et de l’organi-sation des enseignements avant d’avoir

connaissance des moyens alloués. La dota-tion 2016 ne saurait être en retrait par rapportà 2015. Elle doit tenir compte des effectifset du nombre prévisionnel de divisions afinde ne pas aboutir à des classes trop lourdesnotamment en éducation prioritaire. Le caséchéant, comme actuellement en Bretagneou en Guadeloupe, ne pas hésiter à demanderun complément de dotation aux DASEN.La logique des 26 heures de cours parsemaine pour les élèves ne doit pas conduireà supprimer des dispositifs fonctionnant au-delà de ces horaires, notamment en éduca-tion prioritaire.

Vigilance requiseIl faut autant que faire se peut continuer depréserver des groupes en sciences et en tech-nologie et maintenir l’offre de formation(langues anciennes et régionales en particu-

lier), de façon à préserver les postes. Nousrappelons aussi que l’EIST (Enseignementintégré de science et technologie) n’est enaucun cas une obligation et ne peut se mettreen place qu’avec l’accord des collègues etdu CA. Ces revendications sont compatiblesavec la circulaire du 30 juin 2015 déclinantla réforme du collège, sur laquelle les chefsd’établissement ne sauraient s’appuyer pourles refuser.

Ne pas se résigner à l’évitableIl faut enfin refuser tout chantage aux groupesen échange d’AP ou d’EPI, ou d’une semes-trialisation des enseignements artistiques. Laprésentation au CA du contenu et des moda-lités précises d’organisation de ces dispositifsn’est pas d’actualité, aucun texte n’imposede le faire avant la rentrée 2016.La bataille contre la réforme du collège sepoursuit, la répartition des moyens doit doncse faire au plus près de l’existant afin d’êtreréversible. n Valérie Sipahimalani

Le contexte est particulier : en collège c’estl’occasion de jeter une poignée supplé-mentaire de grains de sable ; en lycée,

où l’on attend une forte poussée démogra-phique, c’est l’exigence d’un bilan de laréforme des lycées qui doit s’imposer. Le second degré public est doté de 2 804créations d’emplois d’enseignants pouraccueillir plus de 37 000 lycéens supplémen-taires, alors que le ministère ne cesse d’af-firmer depuis deux ans que 4 000 emploissont programmés pour la réforme des col-lèges dont il entend imposer la mise en œuvreen un an. Cherchez l’erreur !

En collège, la réforme sinon rienLes premiers échos provenant des académiesmontrent que les recteurs cherchent tant bienque mal à « vendre » cette réforme en limitantpar exemple pour cette année les suppressionsde classes bilangues par consommation d’unepart importante de la dotation globalisée ;ailleurs l’administration met en place de nou-

velles procédures d’allocation des moyens encollège dans la perspective de charger encoreplus les classes. Les conséquences que pourraitavoir la mise en œuvre de la réforme sur lespostes, sur la possibilité de travailler avec lesélèves des contenus formateurs, son impactsur les emplois du temps et l’organisation dutravail se précisent. Les collègues sont parfoissommés de produire à la hâte des projets d’EPIou d’accompagnement, avec pour seul objectifde montrer que la réforme se met en place et

comme si cela n’avait rien à voir avec lescontenus des nouveaux programmes. Maisqu’importent les contenus pourvu qu’on aitl’ivresse... de la com’ !

En lycée, bricolages en tout genreDans ce contexte extrêmement contraint, leseffectifs par classes risquent d’exploser enSeconde. Les chefs d’établissement pourrontêtre tentés de proposer d’utiliser la « marged’autonomie » pour desserrer l’étau en dimi-nuant le nombre de séances en groupe réduit(TP, enseignements technologiques...), ce quiserait inacceptable. Les tentatives de diviserles collègues, selon les disciplines, doiventêtre aussi fermement rejetées.Les élus au CA vont avoir plus de travailencore cette année lors de la préparation dela DHG. Sa prise en charge collective, lesheures d’information syndicales, sont desnécessités pour mobiliser et obtenir des condi-tions décentes pour la rentrée 2016. n

Fabienne Bellin, Michel Galin©

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NOMBREUX POINTS À ÉCLAIRCIRLe ministère de l’Éducation nationale a communiqué au SNES-FSU ses orientations pourla mise en œuvre, pour les professeurs, CPE et CO-Psy, des dispositions issues du cycle PPCR.Les premières discussions devraient s’ouvrir dans les prochaines semaines.

Le ministère indique qu’il mettra en placeune revalorisation des bornes indiciairesde la grille des certifiés, CPE et CO-

Psy (+ 140 € nets mensuels en début et finde carrière ; + 50  € nets mensuels surchaque échelon), l’ouverture d’un grade dedébouché de carrière pour atteindre la hors-échelle A – HEA (environ + 677  € netsmensuels par rapport à l’actuel indice ter-minal de la hors-classe) et sur les indicesde la hors-échelle B pour les professeursagrégés (environ + 357 € nets mensuels parrapport à l’actuel indice terminal de la hors-classe). La carrière se déroulerait sur troisgrades, le troisième étant accessible auxdétenteurs de la hors-classe, soit après avoirexercé certaines fonctions pendant la car-rière (éducation prioritaire...), soit aprèsavoir atteint le dernier échelon de la hors-classe, selon les mêmes critères que la hors-classe actuelle.Concernant l’avancement, celui-ci serait àrythme unique dans chaque grade, sauf enclasse normale pour le passage du 6e au7e échelon où le rythme serait différencié(3 ans d’écart entre les deux rythmes). Leministère réfléchit aux modalités d’évaluationdes personnels et à leur prise en compte dansla nouvelle carrière.

Pas de blanc-seingPour le SNES-FSU, de nombreux points res-tent à éclaircir : structure de carrière, duréede parcours de la classe normale et de lahors-classe, rôle de l’évaluation, contrôleparitaire des opérations de gestion. Il parti-cipera aux discussions sur la base de sesmandats : les mesures doivent concerner l’en-

semble des personnels, tous doivent pouvoirparcourir en une carrière entière la classenormale et la hors-classe, l’évaluation doitconserver le principe de la double notationet être déconnectée de l’avancement, la trans-parence et l’équité de traitement doivent êtregaranties par le contrôle paritaire. n

Xavier Marand

FONCTION PUBLIQUE : SALAIRESET CARRIÈRES : ÉTAT D’URGENCE !Le gouvernement ayant annoncé l’application du protocole sur les Parcours professionnels,les carrières et les rémunérations (PPCR), plusieurs réunions ont eu lieu ou sont programméessans que l’on ait de visibilité sur l’ensemble des chantiers.

Le rendez-vous salarial en février, qui doittraiter de la valeur du point d’indice etdont la FSU avait obtenu au cours de la

négociation qu’il soit avancé, aura lieu finfévrier. La FSU entend bien y défendre l’ur-gence de la revalorisation des traitements etde la programmation d’un rattrapage despertes. C’est à la fois une question de pouvoird’achat pour les agents et aussi d’attractivitédes métiers de la Fonction publique. Surtout

quant on sait que les politiques d’austéritése sont montrées jusqu’ici totalement inef-ficaces pour combattre le chômage.

Et la grille ?Pour la mise en œuvre du protocole PPCR,l’administration annonce la publication d’en-viron 500 textes réglementaires d’ici le prin-temps 2017. La FSU a demandé que soit rapi-dement établi un calendrier des travaux afin

de vérifier que l’en-semble des engage-ments est bien pro-grammé et que soitprécisé quelle adminis-tration traite quels dos-siers. Elle a ainsicontesté que le premiersujet abordé suite à la

négociation s’agissant du déroulement descarrières soit celui sur les modalités d’avan-cement d’échelon. L’administration rechercheen effet les moyens de distinguer une propor-tion limitée de fonctionnaires dont la carrièreserait significativement accélérée, alors quecette approche avait été fortement contestéeen mai dernier. En revanche, le protocolePPCR comporte une disposition essentielledevant rendre effectif le déroulement d’unecarrière sur au moins deux grades et il estindispensable de donner toutes les instructionsutiles aux chefs de service.Enfin, la rénovation des grilles doit permettreà chacun de voir sa situation s’améliorer. Pourles corps enseignants et assimilés, celle-ci doitse dérouler en quatre étapes de 2017 à 2020.La concertation sera conduite par le ministèrede l’Éducation nationale. n Anne Féray

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ACTUALITÉDE QUOI TOMBER DANS LA DÉCHÉANCELe débat sur la déchéance de nationalité, non content de diviser à la fois dans les rangs de la majorité et de l’opposition, suscite des déchirements au sein même du gouvernement.

La volonté exprimée par le gouvernementd’élargir la possibilité de déchoir unepersonne de sa nationalité aux binatio-

naux nés Français pose bien plus de ques-tions qu’elle ne résout de problèmes. LePremier ministre lui-même avoue l’ineffi-cacité de cette possibilité de déchoir de leurnationalité française les auteurs d’actes ter-roristes : aucune considération, en particuliersûrement pas la peur d’être déchu de sanationalité française, n’arrêtera un kamikazedécidé à se faire exploser. Cette mesure ne peut donc qu’être « sym-bolique », de l’aveu même de Manuel Valls.Mais quel symbole : celui de rompre l’éga-lité républicaine et de créer deux catégoriesde Français, ceux qui peuvent être déchuset les autres, les enfants « d’origine étran-gère » et les « vrais » Français.

Imposer la marche arrièreLe coup de force de l’exécutif en gêne plusd’un à gauche. Nombreux sont les élussocialistes qui s’y opposent, et même Chris-tiane Taubira, garde des Sceaux, refuse deporter le projet de loi à l’Assemblée.Et ce n’est pas l’idée d’étendre cette mesurede déchéance à toute personne condamnéepour acte de terrorisme, comme le proposele Président lors de ses vœux en début d’an-née, qui arrangera les choses ! La Francefabriquerait ainsi des apatrides, ce qui estcontraire au droit international et à la décla-

ration des droits de l’Homme. Non, déci-dément, il est temps que le gouvernement,revienne sur cette proposition. Plusieurs ini-tiatives ont déjà été prises (UNEF, SOS-Racisme...), d’autres sont à venir pour s’op-

poser à ce projet. Le SNES-FSU y prendratoute sa place (en œuvrant si possible à leurunification) et mènera le débat dans lessalles des professeurs. n

François Sauterey

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UN JEU DANGEREUX2016 commence dans un contexte politique très inquiétant, puisquele projet de réforme constitutionnelle voulu par le gouvernementprévoit d’inscrire l’état d’urgence dans la Constitution.

Le gouvernement prétend que réviser laConstitution ne constituerait pas un bou-leversement fondamental, car on ne ferait

ainsi que « sécuriser juridiquement » lesconditions d’instauration et de prorogationde l’état d’urgence. Cela constituerait pourtantbien une normalisation d’une situation d’ex-ception qu’il convient d’interroger. Une étapedangereuse pour la démocratie serait franchiesi cette réforme, rompant l’équilibre entreles pouvoirs et renforçant le pouvoir exécutifau détriment des pouvoirs législatif et judi-ciaire, devait être adoptée.

Empêcher la libre expressionDéjà problématique dans le cadre du fonc-tionnement de la démocratie, la constitu-tionnalisation de l’état d’urgence devien-drait une arme redoutable si elle venait à

passer entre les mains d’un parti anti-démo-cratique.Si personne ne trouve à redire à des mesuresqui visent à empêcher des terroristes demener leurs activités sanglantes, il est enrevanche inacceptable que l’état d’urgenceait été utilisé pour empêcher la libre expres-sion de militant-es pacifiques, notammenten marge de la COP 21. Le risque que lesmanifestations contre la réforme du collègele 26 janvier prochain soient interdites existede fait. Le SNES et la FSU continuent d’œu-vrer pour le respect des libertés publiqueset de l’état de droit, et s’opposent à toutesles velléités de pérennisation ou d’institu-tionnalisation de l’état d’urgence. Ils parti-ciperont aux initiatives visant à faire obstacleà cette révision constitutionnelle. n

Aurélia Sarrasin© A

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Supplément au no 758 du 9 janvier 2016 - US MAGAZINE - 13

GRÈCE : NOUVELLES COUPESDANS LES PENSIONSLa question des retraites est au centre des négociations entre le gouvernement grec et les institutions européennes, qui en font la condition de l’octroi d’une nouvelle tranche de crédit pour le remboursement de la dette publique.

Les pensions ont déjà été réduites de40 % par les deux précédents mémo-randums (plans d’austérité de 2010 et

2012) de la troïka. La mise en œuvre dutroisième mémorandum imposé à la Grèceaprès le coup de force contre le gouverne-ment grec de juillet 2015 a provoqué unpremier train de mesures à l’automne der-nier : diminution des départs anticipés, sup-pression du complément versé aux pensionsles plus basses, hausse des cotisations santéde 4 à 6 % pour les pensions principales.Cette fois, pour trouver 1,8 milliard d’euros,le gouvernement propose un nouveau sys-tème à deux étages.La première partie est forfaitaire : 384 eurospar mois (soit le seuil de pauvreté) pour15 ans de cotisations à partir de 67 ans (40ans à partir de 62 ans), avec une décote pourceux qui ne respectent pas ces critères.La seconde partie sera calculée sur le mon-tant des cotisations. Le taux de remplace-ment des pensions sera fixé à 55-65 % dusalaire moyen de la carrière contre 70 %

aujourd’hui. Le gouvernement fait valoirque le taux de remplacement sera plus élevépour les petites pensions (du fait de la pen-

sion forfaitaire). Mais le nouveau systèmeva entraîner une baisse importante des pen-sions, de l’ordre de 15 % pour la pensionmoyenne (actuellement 750 euros) et de35 % pour les pensions de 2 000 euros (quiconcernent 55 000 personnes sur 2 millionsde retraités).

Refuser le diktat des créanciersCes mesures qui devraient entrer en vigueuren 2017 sont durement ressenties. Dans unpays où le chômage est très élevé et les allo-cations très faibles, les retraites jouent unrôle vital dans la cohésion sociale : 52 %des familles grecques vivent avec la pensiondu grand-père ou de la grand-mère.Mais cela ne suffit pas pour les créanciersqui voudraient réduire le taux de rempla-cement du salaire par les pensions à 50 % ! Des mouvements contre cette réforme ontcommencé et un appel à la grève généralea été lancé pour le 4 février par les deuxgrandes confédérations syndicales. n

Daniel Rallet© F

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Formation, traitements de données d’ex-périmentations du ministère, partici-pation à la mise en place des

programmes du collège, fourniture(payante ?) de logiciels, conseil en organi-sation et déploiement de solutions… Cetaccord, non exclusif, met à mal le principede neutralité (et donc de laïcité) de notresystème éducatif, tout en tournant le dos àla volonté du gouvernement Ayrault defavoriser l’utilisation des solutions libres.La formation portera en effet sur lesproduits Microsoft, notamment Office, sansparler de l’accompagnement d’enseignantsqui opteront pour les «  solutions mobilesutilisant les technologies Microsoft enclasse ». Qu’achèteront donc ensuite lesélèves ainsi formés ? Et que dire du livreblanc destiné à l’apprentissage du code, quis’ajoutera aux formations « à l’animationdes cours d’initiation au code » ? La forma-tion continue est confiée à un opérateurprivé !

Flatteries et corruptionOn y apprend aussi que chefs d’établissementet cadres académiques sont « le maillon leplus important de la chaîne éducative ». Ilssont 2 500 à être concernés par « l’accom-pagnement (...) pour la réussite du change-ment numérique des établissements ».Le ministère joue aussi les entremetteurs :Microsoft apportera un « support financier,technique, opérationnel et commercialaux (...) acteurs français de l’e-Éducation »,s’ils utilisent Windows. Ainsi les éditeurspourront « intégrer leurs manuels numériquesà Office 365 Éducation » ! On achète lalicence pour un an, et on a gratuitement unmanuel scolaire...Aucun ministre n’est jamais allé aussi loindans un accord entre l’Éducation nationaleet une entreprise privée. Alors que la neu-tralité de l’École n’a jamais été autant aucentre des réflexions, cet accord doit êtredénoncé. C’est la porte ouverte à une priva-tisation partielle du système éducatif !

Le SNES-FSU est signataire de l’appel initiépar l’APRIL(1), un partenariat indigne desvaleurs affichées par l’Éducation natio-nale(2). n Jean-François Clair

(1) Association pour la promotion et la recherche eninformatique libre.(2) www.april.org/microsoft-educ-nat-partenariat-indigne.

MICROSOFT-FRANCE ÉDUCATION NATIONALE :PARTENARIAT INDIGNEFin novembre, le ministère a signé un accord de 13 milliards d’euros sur 18 mois avec Microsoftqui permettra à l’éditeur de s’immiscer comme jamais dans l’École. Du jamais vu !

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EXPRESSION DES COURANTS DE PENSÉE SUR LE UNITÉ ET ACTION

Oui au rapport d’activité

La période couverte par le rapport d’activité,commencée avec la nomination de M. Valls, amarqué un durcissement gouvernemental : poli-

tique économique multipliant les cadeaux aux entre-prises, politique sociale conjuguant autoritarisme etvolonté de remettre en cause le code du travail. Ellese termine, après les événements tragiques de l’année2015, dans un contexte politique et social dominé parl’état d’urgence et la banalisation des discours d’ex-trême droite.

Avec la FSU, le SNES a œuvré pour maintenir une unitésyndicale face à ces attaques contre les salarié-e-s,alors que certaines organisations ont fait le choix desoutenir le gouvernement. Portant dans la FSU sonmandat d’un front unitaire contre l’austérité qui n’a pasabouti, il a contribué à la présence active de la FSUdans les actions interprofessionnelles. Il a su prendresa place dans les actions contre la précarité, pour lesretraité-e-s ou en être à l’initiative. Il s’est engagé, avecla FSU, dans la mobilisation citoyenne à l’occasion dela COP21.

Le SNES-FSU a pesé sur la définition du nouveausocle et les nouveaux programmes en publiant sesanalyses et en organisant plusieurs consultations descollègues. Dès avril 2015, il a été à l’initiative contrele projet de réforme du collège. Il a quitté les discus-sions dès la deuxième séance devant le refus minis-tériel de revoir son projet. Rassemblant l’intersyndi-cale du second degré il a fédéré les initiatives prisespar les établissements dans des rendez-vous natio-naux : pétition, journées de grève nationale, mani-festation nationale. Il a accompagné les collègues quirefusaient collectivement les formations/formatageimposées par le ministère. Cette détermination et cetteprésence dans les établissements, les médias et lesréseaux sociaux ont permis que le mouvement, soutenupar la population, reprenne dès la rentrée 2015, alorsque la ministre répétait à l’envi que le sujet était clos.De même, il a obtenu l’ouverture d’un bilan de la

réforme du lycée qui, même limité, est l’occasion deporter les revendications des personnels.

Il a joué un rôle moteur dans la FSU et dans l’intersyn dicaleFonction publique pour construire des actions unitaires etobtenir rapidement l’ouverture de discussions salariales.

C’est avec cette volonté qu’il a pris toute sa place dansla délégation FSU lors des discussions PPCR(1) dont ila rendu compte régulièrement dans L’US. Tout aulong de ce processus il a eu le souci de porter lesattentes et exigences de la profession tout en travaillantà la construction du rapport de force. Il a ainsi orga-nisé avec les autres syndicats FSU de l’éducation uneconsultation des syndiqué-e-s à partir de laquelle il aporté dans la FSU le mandat de signer le protocoleministériel. Devant la tentative de passage en force duministère qui voulait imposer un protocole n’ayant pasrecueilli un accord majoritaire, le SNES a exigé uneméthode de travail associant toutes les organisationssyndicales représentatives. Il poursuivra, en lien avecla FSU et en informant la profession, son travail pouravancer auprès des ministères de la FP et de l’Édu-cation nationale les revendications des personnels surles salaires, le déroulement de carrière et l’évaluation.

Toute son action a été guidée par une orientationclaire : construire avec nos professions les revendi-cations à partir d’un travail d’analyse, informer lessyndiqué-e-s sur les questions et enjeux (métier,système éducatif, fonction publique, politique gouver-nementale…), rassembler pour construire le rapport deforce et les actions, rechercher l’unité la plus large.

La majorité U&A du bureau national vousappelle à approuver son action en votant oui auxrapports d’activité et financier présentés par les

membres U&A du secrétariat national.

(1) Parcours professionnel, carrières, rémunérations.

Pour tout contact : [email protected]

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Supplément au no 758 du 9 janvier 2016 - US MAGAZINE - 15

RAPPORT D’ACTIVITÉ ÉCOLE ÉMANCIPÉE

Pour un SNES offensif contre lesréformes libérales du gouvernement

élèves. Si le SNES mène une bataille résolue sur laréforme du collège il n’a malheureusement pas voulumener celle du socle : comme si les deux n’allaient pasensemble. La réforme de l’éducation prioritaire a mis en placeune nouvelle carte des établissements prioritaires àmoyens constants , sortant du disposi t i f desétablissements fragiles. De nombreuses luttes ontalors été menées dans les établissements concernésmais le SNES a fort peu coordonné cette bataille etn’a pas cherché à l’élargir. Or l’éducation prioritaireest le laboratoire de toutes les déréglementationslibérales que subit l’école. Les collègues de REP+expérimentent le management agressif des chefs quitentent d’imposer des tâches supplémentaires pourcompenser la pondération. Ainsi au lieu d’avoir dutemps libéré ils se retrouvent avec du travailsupplémentaire...Enfin, s’il est vrai que le SNES mène une vraie bataillecontre la réforme du collège, il faut aussi constaterqu’il ne met pas la même détermination dans lesactions fédérales, Fonction publique, ou inter -professionnelles. Il est passé totalement à côté de lamobilisation interprofessionnelle du 8 octobre avec laCGT et Solidaires. I l a occulté la nécessairemobilisation sur les salaires des fonctionnaires à laveille de l’ouverture des négociations salariales defévrier, les premières depuis 6 ans ! Il s’est alors faitprendre de cours par un appel à la grève de FO, CGTet Solidaires le même jour que la grève collège,hésitant à s’y rallier alors que tout imposait d’articulerles différentes mobilisations. Face à une politiqueglobale d’austérité, le SNES-FSU se doit de tenirtous les bouts.

Pour toutes ces raisons, l’École Émancipée appelle à voter

Contre le Rapport d’Activité National.

Depuis le dernier congrès, plusieurs réformes ontété menées dans le second degré qui ont mis lastratégie syndicale du SNES à l’épreuve.

Toujours porté à valoriser de maigres avancées, touten minimisant les vrais reculs, le SNES a sous-estiméla volonté de Hollande de réformer l’école dans unsens toujours plus libéral : une école des compétenceset non plus des savoirs émancipateurs, une école de laconcurrence de tous contre tous, où l’autonomie desétablissements est d’abord un moyen pour les chefs decaporaliser les enseignant-es.Face à la réforme des statuts (décrets ORS et IMP) leSNES a fait le choix de mener la nécessaire batailletechnique au ministère mais sans la combiner à uneaction collective des collègues pour créer un rapport deforce. On ne peut que déplorer son abstention lorsqu’ils’est agi de s’exprimer au comité technique ministérieltant le projet de décret posait problème : tout unensemble de tâches qui relevaient de la libertépédagogique est rendu obligatoire, offrant aux chefsd’établissement des moyens de contrainte nouveaux surles enseignant-es. Leur pouvoir en sort renforcé.L’indemnitaire est privilégié sur les décharges,accroissant la charge de travail, et même le système depondération s’avère pervers. On est loin du mandat deréduction du temps de travail du SNES, ni d’unquelconque progrès pour les collègues. Le SNES n’apas voulu pointer les dangers que contenaient lesprojets de décrets en 2014. Confiant dans legouvernement, il a été sourd aux alertes de l’EE et s’estretrouvé piégé lors de la publication des circulaires.De même, la direction UA n’a pas vu le piège dunouveau projet de socle de compétences. Plusambitieux que celui de 2005, le socle à la mode Peillonfut considéré comme acceptable par le SNES. Or ildemeure la pierre angulaire de l’école libérale. Lesnouveaux programmes et le volet évaluation qui lesaccompagne en font la démonstration : ce sontdésormais les compétences qui seront l’objectif del’école qui renonce de fait à faire réussir tout-es les Pour tout contact : [email protected]

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16 - US MAGAZINE - Supplément au no 758 du 9 janvier 2016

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EXPRESSION DES COURANTS DE PENSÉE SUR LE ÉMANCIPATION

Sanctionner une orientation qui mène à des échecs,se regrouper pour changer l’orientation du SNES !

La direction U&A du SNES national a ouvert cemandat sur un signal clair : au Conseil Supérieur del’Éducation de mars 2014, le refus de combattre le

projet de nouveaux statuts pour les enseignantEs descollèges et lycées. Plus globalement, le rapport d’activitéaffirme son attachement aux « équilibres trouvés lors del’écriture de la loi de refondation », autrement dit sonrefus de lutter contre l’ensemble de la politique éduca-tive du gouvernement. On voit aujourd’hui les résultatsde cette intégration dans un « dialogue social » reven-diqué plusieurs fois dans le rapport...

Sur les statuts : la direction du SNES a refusé derevendiquer le retrait du projet Peillon de casse desstatuts (alourdissement des tâches, hiérarchie intermé-diaire, marche à l’annualisation, etc.). Dès cette rentrée,ces statuts ont permis des offensives managériales deschefs d’établissement. Ainsi dans certains établisse-ments en éducation prioritaire, les collègues ont déjàles heures de concertation inscrites dans l’emploi dutemps avec réunion obligatoire sous la direction du chefd’établissement. Ailleurs, ces nouveaux textes sontutilisés pour essayer de contraindre les collègues à alleraux formations-formatage sur la réforme du collège.

Sur l’éducation prioritaire (EP) : la direction nationaledu SNES n’a pas remis en cause la réforme de l’EPelle-même qui, tout en reprenant des moyens et en faisantsortir des établissements de l’EP, en fait un laboratoirede la déréglementation. Difficile dans ces conditionsd’unifier la lutte. En outre, elle a traité l’éducation prio-ritaire comme un cas à part, alors qu’on y trouve unconcentré explosif des problèmes communs. Elle n’apas voulu s’appuyer sur les mobilisations des établisse-ments en mettant en avant les revendications communes(comme l’abaissement des effectifs).

Sur la précarité : la précarité gangrène le systèmeéducatif, notamment dans les académies les plus popu-laires. Nous constatons qu’une fois encore, ce problèmeest considéré comme un problème catégoriel à part,

alors que l’enjeu est de rassembler, titulaires et non-titulaires, pour réussir des mobilisations d’ampleur surcette question cruciale.

Sur la réforme du collège : élément moteur de l’inter-syndicale, sur la position – claire pour une fois – d’abro-gation de la réforme, la direction du SNES n’a pascherché à utiliser le succès de la grève du 19 mai 2015,alors que la dynamique de mobilisation était très bonne,pour mettre en débat la grève jusqu’au retrait du projetgouvernemental (avec à la clé la question des examens).De même, comment comprendre que la direction duSNES demande l’abrogation de la réforme, quand dansle même temps elle accepte de discuter la mise en placede nouveaux programmes de collège... qui en sont laconcrétisation ? Pourquoi ne pas avoir appelé avant lagrève du 26 janvier 2016 à lui donner des suites (recon-ductions, coordination...) ?

Face à l’état d’urgence : jusqu’au 18 janvier, les direc-tions de la FSU et du SNES ont refusé de demander lalevée de l’état d’urgence, le retrait du projet de loicontre le crime organisé et de la déchéance de nationa-lité, qui n’entendent pas nous protéger, mais remettenten cause les libertés fondamentales de touTEs. Commeen témoignent la demande du gouvernement de déro-gation à la Convention Européenne des Droits del’Homme, les perquisitions souvent arbitraires etbrutales, les assignations à résidence de militantEsécologistes, les interdictions de manifestation sousprétexte de sécurité (quand les marchés de Noël et lesmatchs de football avaient lieu).

C’est pourquoi nous vous appelonsà voter CONTRE le rapport d’activité

(et CONTRE le rapport financier qui en estla conséquence) et à rejoindre Émancipation

pour changer l’orientation du SNES.

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Supplément au no 758 du 9 janvier 2016 - US MAGAZINE - 17

Les premiers documents ministériels proposent d’ali-gner le rythme des promotions d’échelon au rythmeactuellement le moins favorable : celui de l’ancienneté,sauf pour une petite partie de « méritants » choisis par leschefs d’établissement. Des promotions d’échelon aurythme de l’ancienneté ? Pour chaque enseignant, ceserait la perte de dizaines de milliers d’euros sur unecarrière.Le texte de la CA nationale du 13 janvier 2016 pointe les«  réels dangers » que contient cet accord et demande« ... que la durée théorique moyenne de carrière pouratteindre la fin de la hors-classe soit au moins identique »(ndlr : oui, nous en sommes là !).Précisément le projet PPCR vise à instaurer un rythmeunique : celui de l’ancienneté pour tous. Il faut doncdemander son retrait et la FSU doit retirer sa signature de cetaccord et arrêter de participer aux groupes de travail.

Dépasser le système paralysant des « tendances », c’est ceà quoi nous entendons contribuer. C’est dans cet espritque nous nous refusons à donner une « consigne de vote »de « tendance » sur le rapport d’activité.

Pour tout contact : [email protected]

RAPPORT D’ACTIVITÉ UNITÉ, REVENDICATIONS, INDÉPENDANCE SYNDICALE (URIS)

L’heure est à la grève pour l’abrogation de la réforme des collèges, pour la fin du geldu salaire, pour l’abandon de PPCR. Non auxpromotions d’échelon au rythme de l’ancienneté !

Décrets d’août 2014 sur nos obligations de service Rappelons-nous qu’au Comité Technique Ministérieldu 27 mars 2014 les représentants du SNES se sontabstenus sur le texte. Plusieurs académies s’étaientprononcées pour un vote contre et montraient les dangersque comporte le décret : « … la référence... au tempsde travail de l’ensemble des fonctionnaires (1 607heures) [...], contient le risque d’une annualisation etd’une comptabilisation de l’ensemble des missions liéesà l’enseignement. Cette référence doit DISPARAÎTRE ».L’administration utilise le nouveau décret pour nousimposer les «  formations-formatage » à la réformedu collège.

Nous faisons le choix de publier, comme contribution aurapport d’activité, un texte d’actualité qui, nous l’es-pérons, éclaire les enjeux de la discussion.

La colère monte. Nombre de collègues le disent ouverte-ment : « Ce qu’il faut, c’est une vraie grève ».Au moment où des syndicalistes de Goodyear sontcondamnés à des peines de prison ferme, afin de pouvoirmener les nécessaires actions de grève et de manifestation,le SNES, comme toutes les organisations syndicales, nedoit-il pas demander la levée immédiate de l’état d’ur-gence ?

L’heure est à la grèveLe 26 janvier, la grève est appelée par le SNES et laplupart des syndicats du second degré sur une revendica-tion claire : l’abrogation de la réforme des collèges. Cettegrève s’annonce massive. Ne faut-il pas alors appeler à latenue d’assemblées générales débattant de la grève, lavraie, jusqu’au retrait ? Le 26 janvier, il y a également grève sur les salaires dans laFonction publique à l’appel de la CGT, FO et Solidaires.Pourquoi faudrait-il opposer ces deux initiatives ? Opposerl’aspiration au combat sur chaque revendication particulièreet l’aspiration au combat d’ensemble contre le gouverne-ment ? Pourquoi au nom de l’élargissement, de l’unité,faudrait-il faire disparaître une revendication ?Nul doute que les enseignants sauront déjouer les tentativesde division. Ce dont il s’agit, c’est de préparer l’action d’ensemble, lagrève générale qui permettra de gagner sur la réforme descollèges, les salaires, le PPCR. Car la question de l’accord PPCR est incontournable.

Des promotions d’échelon au rythme de l’ancienneté ?

Des discussions ont lieu pour toute la fonction publiqueet au ministère de l’Éducation nationale pour appliquerl’accord PPCR (parcours professionnels, carrières, rému-nérations).

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Restaurationi

Le flop de la TVAOn se souvient que le taux de TVAdans ce secteur avait été baisséen 2009 de 19,6 % à 5,5 %. Cettemesure a fait un flop magistral !Elle a coûté, selon la Cour descomptes, 2,6 Mds € par an enmoyenne, bien que le taux ait étérelevé, depuis 2009, à 7 % puis 10 %.Et surtout, elle n’a permis la créationque de 6 000 à 9 000 emplois,alors que les professionnelss’étaient engagés à créer 40 000emplois supplémentaires sur deuxans. De plus, la baisse de TVA n’a étérépercutée qu’à 20 % sur les prix.Cette mesure a permis« d’améliorer la marge desentreprises du secteur », conclutla Cour des comptes.

Chiffrei

62Les 62 personnes les plus richesdu monde ont autant d’argentque les 3,5 milliards d’humainsles plus pauvres.

Rapport ONG Oxfam, janv. 2106

Françaisi

La santé en 5 chiffresSelon le panorama annuel dela santé de l’OCDE, évoqué par les« Décodeurs  » du Monde, on relève :• Espérance de vie : 82,3 ans.Depuis 2000, les femmes ont« gagné » 2,6 ans en moyenneet les hommes, 3,7 ans.• Tabac : 24,1 % de fumeursquotidiens  parmi les 15 ans et plus.28,7 % des hommes fument contre20,2 % des femmes.• Alcool : 11,1 litres par habitant.Cette consommation situe la Franceau 4e rang de l’OCDE, mais a reculéde 3,8 litres depuis 2000.• Obésité : un adulte sur sept. Laproportion progresse (un sur neufen 2000), mais la France reste un despays les moins touchés de l’OCDE.• Reste à charge des dépenses de

santé pour les patients : 7 %. Moinsque la moyenne de l’OCDE (20 %).

Culturei

Poids lourd de l’économieLe cabinet EY et France Creative,dans un rapport portant sur laculture et la création en France,mettent en évidence que les dixsecteurs étudiés (arts visuels,musique, spectacle vivant, cinéma,

ECO/SOCIAL

18 - US MAGAZINE - Supplément au no 758 du 9 janvier 2016

ÉCONOMIE

Une politique monétaire inéditeLa déflation est une réalité. Seules les banques centrales mettent en œuvre des moyenspour lutter contre elle. Jamais la création monétaire n’a été aussi importante, jamais les tauxd’intérêt n’ont été aussi bas. Pourtant, la crise financière et la récession menacent.

Les politiques économiques des pays développés,à commencer par ceux de l’Union européenne,restent fortement ancrées dans le libéralisme

économique qui leur impose l’austérité pourcomprimer le déficit budgétaire. La baisse desdépenses publiques se traduit par une chute desinvestissements publics, qu’ils soient le fait de l’Étatou des collectivités territoriales. Le processus défla-tionniste actuel qui se traduit par la baisse des prixà la production devrait plutôt inciter les gouverne-ments à favoriser la croissance par un « choc » dela demande. Mais les gouvernements jettent unvoile pudique sur la réalité en s’abritant derrière unfaible taux d’inflation, de 0,1 % en novembre pourla France.

Alimenter les marchés financiersD’où peut provenir le salut ? Apparemment desseules politiques monétaires, apanage des banquescentrales. Ces dernières ont toutes suivi la mêmeorientation jusqu’au 16 décembre 2015. Elles ont

baissé les taux d’intérêt – ils sont partout proches dezéro – tout en s’engageant dans un vaste mouvementde création monétaire pour à la fois soutenir l’acti-vité, lutter contre la déflation et permettre aux mar-chés financiers de sortir de la crise financière ouverteen août 2007. Jamais le monde n’avait connu unetelle expansion de la création monétaire. Ainsi la BCE – Banque centrale européenne indé-pendante de tout pouvoir démocratique – a annoncéla création de 60 milliards d’euros par mois (d’abordjusqu’en septembre 2016 puis, désormais, jusqu’enmars 2017), soit le passage de 1 140 à 1 500 mil-liards d’euros. Elle a d’abord racheté des titres de ladette publique des États de la zone pour aller vers lerachat de ceux des municipalités et des régions. Il estmême question des obligations des grandes socié-tés. L’objectif est de fournir des liquidités auxbanques et aux opérateurs financiers pour qu’ilspuissent continuer à alimenter les marchés financierstout en baissant l’ensemble des taux d’intérêt afin de

favoriser l’endettement des entreprises, de l’Étatet des ménages. Les conséquences attendues sontl’augmentation de l’investissement des entrepriseset, sur le terrain monétaire, la baisse de l’euro pourfavoriser la compétitivité des entreprises.

Faible croissanceMario Draghi, le président de la BCE, s’est félicitéde sa politique monétaire, prétendant qu’elle avaitpermis de hausser le taux d’inflation de 0,5 % touten alimentant la croissance à hauteur de 0,4 %, sui-vant la dernière note de conjoncture de l’INSEEtitrée « Résistance » – l’Institut ne fait pas la preuved’un furieux optimisme pour 2016. Cette politiquea habitué les marchés financiers à l’argent facile sansque l’investissement productif ne progresse signi-ficativement.Le 16 décembre 2015, la FED – la banque deréserve fédérale américaine – a changé sa poli-tique. Elle a décidé – c’est un tournant – d’aug-menter ses taux directeurs d’un petit 0,25 % dans

un premier temps, faisant passer lafourchette de 0/0,25 % à 0,25/0,50 %de manière à habituer les marchés àcette nouvelle donne. Pour Janet Yel-len, sa présidente, ce serait en raisonde la bonne santé de l’économie amé-ricaine. Une bonne santé toute relativecar la croissance n’aura été en 2015que de 2,4  %, malgré la créationmonétaire.

Risques de crises financièresLes conséquences peuvent se conju-guer en catastrophes. La hausse du dol-lar face aux autres monnaies – et passeulement l’euro qui pourrait être endessous de 1 $ – sera l’étincelle qui

mettra le feu à la plaine du surendettement des paysémergents et des autres. L’augmentation des tauxd’intérêt à long terme (dix ans) qui s’ensuivrait neresterait pas limitée aux États-Unis. Les marchésfinanciers sont interconnectés et les taux des pays dela zone euro suivraient. Le service de la dette pro-gresserait ainsi que les déficits...Se dévoilent les limites d’une politique monétairesans relais du côté des politiques budgétaires. Lacréation monétaire libère les marchés financiersd’une part d’incertitude mais elle se heurte à de nou-velles contradictions qui tiennent à la formation debulles spéculatives. Elles risquent d’éclater. L’incertitude se nourrit de nouvelles causes liées àde nouveaux fonctionnements de ces marchés. Lescrises financières qui commencent, via la Chine etla baisse des cours des matières premières, serontplus profondes avec moins de moyens pour lescombattre. n

Nicolas Béniès

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télévision, radio, jeu vidéo, livre,presse, création publicitaire)représentaient, en 2013,« 83,6 Mds € de revenus et1,3 million d’emplois », soit« plus du double des emplois liésà la production automobile ».La croissance de ces secteursa enregistré entre 2011 et 2013 unecroissance de + 1,2 %, supérieureau reste de l’économie française(+ 0,9 % sur la même période).Ce sont aussi des secteurs fragiles.Une étude faite, après les attentatsdu 13 novembre, montre qu’unebaisse de fréquentation de 20 %pendant un an se traduirait parla perte de 20 000 emplois.

Déplacési

60 millionsPour l’Agence des Nations Uniespour les réfugiés, 2015 verra unehausse sans précédent desdéplacements forcés dans le monde.Elle compte en effet, à la mi-2015,20,2 millions de réfugiés (en haussede 700 00 en un an), 1 million dedemandeurs d’asile (en hausse de78 % par rapport à la même périodeen 2014) et 34 millions de personnesdéplacées dans leur propre pays(2 millions de plus par rapportà 2014). En tenant compte del’accélération intervenue au2e semestre, le HCR pronostiqueun nombre de déplacements forcésdans le monde qui dépassera, pourla première fois, 60 millions.

Énergies renouvelablesi

26 % de l’électricitémondialeEn 2020, selon l’Agenceinternationale de l’énergie, le quartde la production mondiale (26 %),contre 22 % en 2013, aurait pourorigine les énergies renouvelables(éolien, solaire, hydroélectricité,etc.). D’ici 2020, 700 gigawattsde nouvelles capacités vertes serontmis en service, soit l’équivalentde 700 réacteurs nucléaires.Ce qui représente les deux tiersdes nouvelles capacités installéesd’ici cette date.À noter que, dans de nombreux pays,le coût de production des énergiesrenouvelables, notamment l’éolienterrestre et le solairephotovoltaïque, ont fortementbaissé, ce qui les rend compétitivespar rapport à d’autres typesd’énergies. 230 milliards de dollarsseront mobilisés chaque annéed’ici 2020 pour développerles renouvelables.

Suite page 20 ‰‰‰

Vous avez coordonné récemment un ouvragecollectif intitulé Un impôt juste pour unesociété juste. Quels sont les enjeux ?L’impôt est un acte citoyen. Il estd’autant mieux accepté qu’il estjuste et perçu comme tel. Ordepuis trente ans, lesréformes ont organiséun allégement d’im-pôt sur les ménagesles plus riches et lesentreprises, notam-ment les plus grandes,et ont multiplié lesniches fiscales, quiprofitent surtout auxplus riches. Le sys-tème fiscal est illi-sible et injuste.On a donc besoinaujourd’hui d’unevraie réforme. Il faudraitlancer un large débatpublic car les citoyen-nesdoivent se réapproprier cettequestion : la fiscalité est un levier au service d’unenouvelle société. Elle doit fournir au pouvoir publicles ressources pour financer des dépenses démo-cratiquement décidées. Le bon niveau d’impôtdépend de ce que l’on veut financer. 

Vous avez plus particulièrement écrit sur le quo-tient familial et conjugal. En quoi le mode d’im-position actuel, basé sur ces deux quotients, est-il inégalitaire ?Le dispositif de quotient familial et conjugal seveut un outil de politique familiale inséré dansl’impôt sur le revenu (IR). Mais c’est un systèmeinégalitaire car il procure une réduction d’impôtd’autant plus élevée que les revenus du ménage sontimportants. De plus, il défavorise les femmes etconstitue un frein à leur emploi. En France, l’IR est familialisé, il se base sur lesménages et non les personnes. L’imposition com-mune du couple est obligatoire. Pour calculer l’im-pôt, on somme les revenus du ménage et on divisepar le nombre de parts : on obtient le quotientconjugal ou familial, qui représente virtuellementle revenu d’une part. On applique sur ce quotient lebarème d’impôt et on multiplie par le nombre departs pour obtenir l’impôt du ménage. Si les conjoints ont des revenus équivalents, l’im-position commune (quotient conjugal QC) ou sépa-rée revient au même. Par contre, s’il existe unécart, le QC procure une réduction d’impôt d’autantplus forte que l’écart est grand. Pour un niveaufixe du revenu le plus fort (celui de l’homme, trèsmajoritairement), la réduction est maximale quandsa conjointe a un revenu nul, c’est-à-dire si elle est

au foyer... Ainsi, un homme quitouche 10 000 € par mois et dont la

femme est au foyer bénéficie,avec ce système, d’une réduc-

tion d’impôt de 11 000 € paran ! Par contre, deux conjoints

au SMIC ne bénéficientde rien. De même bien

sûr que les ménagesnon imposables. Le

QC repré sentedonc une primeà l’inégalité derevenus dans lecouple et auxplus hauts reve-

nus. Et il équi-vaut à subvention-ner les couplesdont la femme estau foyer. Le manqueà gagner pour l’État

se situe entre 6 et 9 milliardset les 10 % de foyers les plus

riches se partagent 53 % de cette somme !Même chose pour le quotient familial : un enfant« apporte » une réduction d’impôt d’autant plusforte que les revenus de ses parents sont élevés ! En2009, ce dispositif coûtait 14 milliards, dont 46 %allaient aux 10  % de ménages les plus riches.Même si la réduction procurée par le quotientfamilial a été depuis plafonné, il reste fortementanti-redistributif.

Vous proposez de remettre en cause ce dispositif.Quelle serait, selon vous, une politique familialesatisfaisante ?Il faudrait cesser de vouloir faire de l’impôt unoutil de politique familiale et s’en tenir au prin-cipe : « de chacun selon ses capacités, à chacunselon ses besoins ». La fiscalité s’en tiendrait àconsidérer les revenus d’une personne pour défi-nir sa faculté de contribuer. La politique familiales’occuperait d’apporter le soutien de la sociétéaux charges familiales des ménages à traversprestations et services. Nul doute que cette sépa-ration des fonctions rendrait l’impôt comme lapolitique familiale plus lisibles et plus justes.Car la politique familiale est tout aussi opaqueque l’impôt.Il s’y empile des prestations à caractère universel,ou sous conditions de ressources, des servicesdont le coût varie selon le revenu, et le quotientfamilial qui distribue une aide augmentant avec lerevenu. Il serait là aussi urgent de les remettre àplat pour privilégier des prestations universelles etle développement de crèches pour lever les obs-tacles à l’emploi des femmes. n

Propos recueillis par Monique Daune

Supplément au no 758 du 9 janvier 2016 - US MAGAZINE - 19

SYSTÈME FISCAL

« Illisible et injuste »Christiane Marty, membre de la Fondation Copernic, coauteure et coordinatrice de l’ouvrage Un impôt juste pour une société juste, considère qu’il faut une vraie réforme fiscale.

© Fotolia.fr / Kotoyamagami

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ECO/SOCIALLogementi

« Tanguy » malgré euxUne étude de la Fondation Abbé-Pierre montre que le phénomène«  Tanguy  », ces jeunes qui nepeuvent quitter le domicile parental,devient massif. 4,5 millions dejeunes majeurs, dont 1,3 million deplus de 25 ans, sont hébergés chezleurs parents ou des amis. 1,9 milliond’entre eux sont étudiants, mais,fait nouveau, 1,5 million sontde jeunes travailleurs que la chertédes logements et la précarité del’emploi bloquent dans leur projetde «  décohabitation  ». Pire, leretour au domicile parental aprèsdes mois d’autonomie est de plusen plus fréquent. En 2013, 338 000plus de 25 ans, non-étudiantssont revenus chez les parentsou grands-parents.

Mer de Glacei

Moins 3 mètresLa Mer de Glace, le plus grandglacier français, sur le Mont-Blanc,a perdu 3,6 mètres d’épaisseur lorsde l’année écoulée, soit trois foisplus que lors d’une année ordinaire.Depuis 30 ans, ce glacier perd enmoyenne 1 mètre d’épaisseur par an.Il n’y a qu’en 1995 et en 2001 qu’il agagné quelques centimètres, tandisque, déjà, il perdait plus de 3 mètresen 2003 et 2009. Pour 2015, ce sontles chaleurs caniculaires de l’été,mais aussi la faiblesse desprécipitations entre octobre 2014et mai 2015 qui sont à l’originede la perte d’épaisseur du glacier.

Aller-retour domicile-travaili

50 minutesCe temps moyen s’est allongéde 10 minutes en 12 ans. Pendantce temps, la proportion des salariésqui mettent plus d’une heure etdemie est montée à 16 % (+ 4 pts).Ce temps moyen cached’importantes disparités : leshabitants de la région parisienneont un temps de déplacement deuxfois plus important que ceux despetits pôles urbains (68 minutescontre 35 minutes). Une grandemajorité des trajets en directiondu lieu de travail se font envoiture, loin devant les transportsen commun, la marche à pied,la  moto  ou le vélo. En 12 ans, lerecours aux  transports  encommun a baissé (de 15  % à 11  %),de même que la marche à pied(de 17  % à 7  %).

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‰‰‰ Suite de la page 19

Les avis sur l’accord deParis et les décisions dela COP21 sont partagés.

Certains y voient un accordhistorique alors que d’autrespointent de graves lacunes etinsuffisances. Il faut pour-tant rappeler qu’on partaitde loin.

Un accord universelsur le climatIl aura fallu cette conférencepour effacer l’échec deCopenhague (2009) etl’inef ficacité du protocolede Kyoto (1997) et pourqu’un consensus émergesur la réalité du réchauffe-ment  climatique d’originehumaine. C’est la premièrefois que tous les pays parti-cipant à la Convention desNations Unies sur les changements climatiques(instituée à Rio en 1992) s’accordent sur la néces-sité de limiter la hausse de la température moyenneà 2 °C (voire 1,5 °C) par rapport à l’ère préindus-trielle. Inédits aussi l’engagement de tous à réduireles émissions de gaz à effet de serre et l’accord surun principe de « responsabilités communes mais dif-férenciées » impliquant des transferts de technolo-gies et financiers ainsi que des efforts plus consé-quents des pays développés. 

Mais tout reste à faire…Un objectif ambitieux a ainsi été élaboré : les émis-sions nettes de gaz à effet de serre (GES) devrontêtre nulles après 2050 ; et pour les plus optimistesnous serions effectivement entrés dans une « éco-nomie bas carbone » dont témoigneraient la baissedu coût de production des énergies renouvelableset la chute des cours boursiers de certaines com-pagnies spécialisées dans les extractions et l’ex-ploitation de ressources carbonées. Il existe enfin une dynamique politique autour duclimat, avec des coalitions associatives, syndicaleset citoyennes, mais aussi des villes qui s’engagentvolontairement et concrètement pour le climat.Toutes ces mobilisations sont indispensables etdevront être amplifiées pour contraindre les sphèrespolitiques et économiques à aller beaucoup plusloin ; car si l’accord et les décisions de Paris ouvrentune voie intéressante, ils ne sont pas suffisantspour aboutir à l’objectif affiché de + 2 °C maxi-mum. Même si la météo, en France métropolitaine,retrouve un caractère presque normal après de nou-veaux records de douceur qui ont marqué les esprits,il faut rappeler que la tendance au réchauffement cli-

matique est une réalité installée sur la durée. Depuisle XIXe siècle, la température a augmenté enmoyenne sur la planète de 0,8 °C, et la somme descontributions nationales annoncées au conditionnelpour la COP21 place la planète sur la trajectoired’une hausse de plus de 3 °C d’ici la fin du siècle.Des millions de personnes, généralement situéesdans les pays pauvres, sont en première ligne de lamontée des eaux, de la multiplication des cata-clysmes météorologiques et de la pollution.En outre, l’agenda proposé ne permet pas d’enga-ger assez rapidement la transition et rien n’est orga-nisé ni prévu pour contraindre un pays à respecterses engagements ou à en relever le niveau.

... pour changer de système et non de climatLes accords internationaux sur le commerce, laconcurrence et les investissements montrent pour-tant qu’il est possible, quand la volonté politiqueexiste, de mettre en œuvre des dispositifs coercitifs...Le climat ne bénéficie pas de la même attention quele libéralisme économique, qui ne fait par ailleurspas bon ménage avec le respect de l’environne-ment et le développement durable.Par l’engagement et les mobilisations, c’est bienl’ensemble du système économique, social et poli-tique qui doit être transformé. La lutte contre leréchauffement climatique nécessite des engage-ments internationaux plus forts. Mais au niveaude chaque pays c’est aussi par un renforcementdes solidarités et des droits des travailleurs, et parla réduction des inégalités que l’on parviendra àengager une transition écologique qui englobe laquestion de l’énergie. n

Hervé Moreau

COP21

Tout commence en 2016Avec la COP21 le réchauffement climatique a été sous les projecteurs de l’actualité une bonne partie de l’automne. Le soufflé médiatique est à présent retombé alors que les suites vont être déterminantes.

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DOSSIERLe lycée

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Supplément au no 758 du 9 janvier 2016 - US MAGAZINE - 21

Un lycée qui construise la société de demain se doit d’êtredémocratique, c’est-à-dire de permettre la rencontre et laréussite au sein des mêmes classes de filles et de garçonsde tous les milieux sociaux. Ce n’est malheureusement pasle cas à l’heure actuelle, alors que c’était un des objectifs

affichés de la réforme de 2010, dite « Chatel  ». À l’heure où leministère a ouvert le bilan de cette réforme, en annonçant clairementne pas vouloir y toucher, nous en faisons dans ces pages un inventairecritique. Accompagnement personnalisé, enseignements d’exploration,tronc commun, dotation globalisée, accent sur les langues vivantes,ces nouveautés auront permis de supprimer des moyens par lasouplesse qu’ils induisent dans la gestion des personnels, mais n’ontguère profité aux élèves. Cette situation est d’autant plus inquiétanteque la réforme du collège entend appliquer les mêmes recettes, avecla même urgence et le même manque de réflexion. Pourtant, d’autreschoix sont possibles, s’appuyant davantage sur la diversificationpédagogique que sur les modifications structurelles ou l’autonomie.

Avec la FSU, le SNES partage le projet de

porter la scolarité obligatoire à 18 ans,

nécessité pour répondre à la demande d’une

société et d’un monde du travail toujours

plus complexes. Réussir sa vie personnelle,

de citoyen et professionnelle suppose un

bagage important que seule une formation

initiale permettant d’aborder tous les

champs de la culture peut offrir. La place des

jeunes est au lycée général, technologique

ou professionnel, nulle part ailleurs.

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Dossier coordonné par Véronique Ponvert et Valérie Sipahimalani, réalisé par Fabienne Bellin, Yves Cassuto, Sandrine Charrier,

Romain Geny, Sigrid Gerardin (SNUEP-FSU), Claire Guéville, Amélie Hart-Hutasse, Valérie Héraut, Thierry Reygades

Objectif démocratisation©

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Le lycée

Les trois voies de formation du lycée onttoujours un public socialement marqué.Alors qu’ils ne représentent que 20,6 %

des élèves dans l’ensemble du second degré,les enfants d’origine « favorisée A »(1) repré-sentent 35,1 % des élèves de la voie géné-rale, et seulement 7 % des élèves de la voieprofessionnelle. Les enfants d’origine « défa-vorisée » sont très nettement surreprésentésdans la voie professionnelle, et sous-repré-sentés dans la voie générale.

Un déséquilibre persistantLa réforme du lycée n’a presque rien changéà cette situation : si la part des élèves d’originedéfavorisée a très légèrement augmenté dansla voie générale (+ 1,3 point entre 2009 et2014), elle a aussi augmenté... dans la voie pro-fessionnelle. La voie technologique est celledont la composition semble la moins « défor-mée » par rapport à la structure d’ensemble dusecond degré. Celle, donc, pour laquellel’orientation semble la moins influencée parl’origine sociale des élèves.

La réforme Chatel devait également rééquili-brer les séries et leur poids respectif au lycée...Le constat est accablant. La série L ne s’est pasrétablie, la série ES stagne, la série S qui, sansdoute, sert toujours de série refuge, a vu sonpoids relatif repartir à la hausse depuis 2011.Quant à la voie technologique, les séries

tertiaires continuent de décliner, et les sériesindustrielles ont connu un très léger rebond quin’efface pas la dégradation des années précé-dentes. n

(1) Catégorie socioprofessionnelle regroupant chefs d’entre-prise, professions libérales, cadres A de la Fonction publique...

Rapports officiels sur le bilan du lycée❱❱ Cour des comptes : « Le coût du lycée » (sept. 2015).❱❱ IGEN-IGAENR  : « Des facteurs de valeur ajoutée des lycées » (juill. 2015).❱❱ IGEN-IGAENR  : « Suivi de la mise en œuvre de la réforme du lycée

général et technologique » (janv. 2012).❱❱ IGEN-IGAENR  : « Propositions pour une évolution du baccalauréat » (déc. 2011).

Consultation des lycéens :fin 2015-avril 2016À partir des rapports des Inspections générales etdes études de la DEPP, la DGESCO a établi un questionnaireproposé à un échantillon représentatif de lycéens ; lerésultat de ces travaux viendra nourrir le bilan des lycées.

État des lieux

Inégalités sociales, hiérarchies scolairesLes réformes successives du lycée avaient pour objectif affiché le rééquilibrage des voies et des séries,

ainsi que leur démocratisation ; qu’en est-il réellement ?

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Source : MEN, RERS, 2015

Àl’heure où le ministère engage un pré-tendu bilan des réformes du lycée, lavoie professionnelle initiale publique

évolue en pleine contradiction. Au cœur d’en-jeux majeurs, elle tient un rôle prépondérantdans la lutte contre le décrochage scolaire, lelycée professionnel (LP) étant souvent le der-nier rempart contre les sorties sans qualification.

Outil de démocratisationElle est aussi incontournable pour atteindrel’objectif des 60 % d’une classe d’âge diplô-mée de l’enseignement supérieur, le bacca-lauréat professionnel étant le deuxièmediplôme de niveau IV obtenu en France. Pour-tant, la réforme de 2008 n’est pas remise en

cause malgré son cortège de dispositifs inopé-rants qui ont fortement dégradé les conditionsd’études des élèves, accroissant leurs diffi-cultés lorsqu’ils/elles poursuivent leurs étudeset rendant leur insertion professionnelle encoreplus ardue, même hors contexte de crise. Lesélèves ont perdu une année pour maîtriser lescontenus de formation quand, dans le mêmetemps, l’approche et les certifications par com-

La voie professionnelle

Des enjeux importants pour l’avenirpétences généralisées à l’ensemble des disci-plines vident ces contenus des savoirs profes-sionnels et généraux pourtant indispensables àce double objectif. Le contexte social tendu quenous subissons percute aussi les enseignant-eset les familles qui éprouvent de plus en plus dedifficultés à trouver des entreprises pouraccueillir nos élèves en stage. Quant à la pro-motion insistante de l’apprentissage par legouvernement et les régions, enfermés dansleur dogme de l’adéquationisme malgré soninefficacité et son coût, elle contribue à dégra-der le travail mené par les personnels de LP. Pour le SNUEP-FSU, il est urgent de redonnerdu temps d’enseignement aux élèves de lavoie professionnelle. Il est indispensable ausside remettre les savoirs généraux et profes-sionnels au cœur des disciplines et d’octroyerdes moyens à la hauteur des enjeux importantsque représente cette voie de formation. n

Évolution du poids des séries de Terminale générale et technologique (en %)

Redonner du temps

d’enseignement aux élèves

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Les effectifs en lycée général et technolo-gique continuent de croître aux rentrées2015 et 2016 où 40 000 élèves (+ 2,7 %)

puis 29 500 (+ 1,9 %) sont attendus, prolon-geant une période de croissance quasiconstante depuis la rentrée 2009. Tous lesniveaux sont concernés mais la classe deSeconde explose avec un gain de 19 500élèves. L’accroissement des taux d’entrée enSeconde a été possible en raison des effetsconjoints de la baisse des taux de redouble-ment ainsi que celle du nombre des orienta-tions vers l’apprentissage en fin de Troisième,et de la croissance démographique.

Explosion des effectifsMal anticipée, l’explosion des effectifs alliéeaux logiques structurelles de la réforme Chatela engendré une importante dégradation desconditions de travail des enseignants commedes élèves. À titre d’exemple, entre 2010 et 2011, leseffectifs en lycée (hors post-bac) augmen-tent de 0,3 % et cela se traduit par la sup-pression de 736 divisions. Le nombre declasses à plus de 30 élèves a augmenté (de72,8 % en 2009 à 80,9 % en 2013 en SecondeGT, de 41,4 % à 50,3 % en Première et de39,3 % à 46,2 % en Terminale).

État des lieux

Un lycée sous pression Pendant que la réforme du lycée permettait de supprimer des moyens, les effectifs des lycéens sont repartis fortement à la hausse.

Le constat est sans appel : les effectifs par classe ont augmenté et le nombre d’heures d’enseignement par élève a diminué.

En septembre dernier, quand la ministre de l’Éducation nationale répond à la Cour descomptes qui trouve le lycée trop cher, elle sefélicite de la réduction des coûts et souligne quele nombre d’heures d’enseignement par élèvesoit passé de 1,39 en 2009 à 1,3 en 2014. Ellereconnaît aussi dans les marges horaires unvivier d’économies potentielles, en témoignel’exemple des options facultatives qui ne sontpas financées mais mises en place sur desfonds propres à l’établissement. Tous ces choixpolitiques engendrent inévitablement dans leslycées un appauvrissement général de l’offrede formation et de l’encadrement des élèves.n

Sur les 819 700 élèves inscrits en Troi-sième en 2013, 60,3 % ont poursuivileurs études en Seconde générale et tech-

nologique et 34,5 % dans la voie profession-nelle. Depuis 2007, le nombre de jeunes quichoisissent la voie pro est en diminution, ycompris pour ceux qui choisissent l’appren-tissage, qui perd plus de 2 points (5,5 % en2013-2014).Pendant la même période, les sorties en fin deTroisième ont baissé passant de 1,8 % à 1,3 %ce qui représente encore 10 000 jeunes.Pour autant, la proportion d’élèves inscrits enTerminale générale ou technologique baisserégulièrement (respectivement 47,4 % et20,1 % en 2013-2014) quand ceux des Ter-minales pro augmentent (32,4 %). Ce phé-nomène s’explique en fait par la réforme du« bac pro 3 ans » qui fait que plus de jeunesinscrits en Seconde pro accèdent à la Ter-minale. Mais entre la Seconde et la Terminalele lycée « perd » 100 000 jeunes en décro-chage scolaire. L’essentiel des bacheliersgénéraux et technologiques continuent dansl’enseignement supérieur quand un bachelierpro sur deux poursuit essentiellement en BTS,pour moitié en apprentissage.

Les bacheliers de la série S se distinguentpar la diversité de leur orientation ; 53,3 %vers une filière générale à l’université, 18,7 %en CPGE, 11,6 % en IUT, 5,8 % en STS.36,6 % des bacheliers techno poursuivent enBTS et 32 % à l’université. Ces chiffres ne tien-nent pas compte des poursuites en apprentis-sage qui sont importantes pour les bacs techno(de l’ordre de 20 %).

Réorientations empêchéesLa question des passerelles est souvent évoquée,en fait elles n’existent pratiquement pas saufpour des réorientations en fin de Seconde, sou-vent vers la voie professionnelle. Les passerellesde la voie pro vers les séries techno ou généralesont pratiquement disparu. En fait, les lycéensprofessionnels attendent l’obtention du bacpour envisager des changements de parcours deformation vers l’université ou vers des forma-tions professionnelles supérieures courtes endécalage avec leur spécialité de bac (la com-munication, les sports, le management).On le voit, les parcours des lycéens restentassez rigides. Les tentatives de rescolarisa-tion, en dépit de la tâche énorme des person-nels de la Mission de lutte contre le décrochage

scolaire (MLDS) et des CO-Psy, restent mar-ginales et ne concernent qu’une faible pro-portion de jeunes en difficulté.Il reste bien du travail pour décloisonner lesformations et offrir à chaque jeune un par-cours de réussite du second degré vers l’en-seignement supérieur. n

Rentrée 201360 % des élèves de Troisièmeont poursuivi leurs études en Seconde GT, 35 % en voieprofessionnelle ; pour 28 %en LP, sous statut scolaireou en tant qu’apprentis.

Session 201478,3 % des jeunes d’une génération obtiennentun baccalauréat : 38 % un bac général, 16,2 %, un bac technologique et24,1 % un bac professionnel.

Répartition genréeEn 2014, les filles représentent 53 % du totaldes admis au bac, et + de 56 % pour les seulsbacs généraux.

Chiffres

Source : l’état de l’école 2015

D’une voie à l’autre

Des parcours qui restent rigidesLes parcours des élèves dans les différentes voies du lycée restent assez figés dans l’ensemble,

et les réorientations interviennent peu en cours de route.©

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Les passerelles n’existent

pratiquement pas sauf pour des

réorientation en fin de Seconde

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Présenté comme emblématique de laréforme, le « tronc commun », qui devaitfaciliter les « passerelles » au cours du

cycle terminal en cas d’erreur d’orientation(et représentait une économie de moyens avecdes divisions mélangeant des élèves de diffé-rentes séries), a fait long feu. Il ne comprenden réalité que très peu de disciplines (ni lesmathématiques ni l’histoire-géographie parexemple...).

Disparités, inégalitésUn des principaux effets de la réforme,dénoncé par un grand nombre de collègueset par le SNES-FSU, a été de multiplier dansl’emploi du temps les heures dont les conte-nus sont flous, souvent définis localement, etles horaires variables d’un lycée à l’autre.L’Accompagnement personnalisé est emblé-matique de cette dérive. Les 72 heures par anet par élève prévues par les textes sont rare-ment respectées, l’AP a souvent lieu en classeentière, tout cela pour une efficacité contes-table. Il ne permet pas, en effet, de remplir sesobjectifs de remédiation, d’approfondisse-

ment comme d’orientation.Le refus par le ministère derattacher l’AP aux disci-plines participe de cettedésorganisation. Les enseignements d’explo-ration de Seconde (EE)sont présentés comme lemoyen de faire découvrir des champs disci-plinaires aux élèves de Seconde afin de faci-liter leurs choix d’orientation ultérieurs. Ils ontpermis par exemple de rendre obligatoirel’économie (SES ou PFEG), dans le cadred’un horaire peu satisfaisant (1 h 30 parsemaine). La question de leur statut et de leurévaluation n’est pas non plus sans poser pro-blème. De nouveaux EE sont apparus au grédes expérimentations locales, tels que « Infor-

matique et création numérique » dont le minis-tère promet la généralisation à la rentrée 2016,sans cadrage précis. L’offre est inégalitaired’un lycée à l’autre, et les élèves ne peuventchoisir qu’en fonction des places disponiblesdans des groupes contraints par les moyensdisponibles, en contradiction avec leur objec-tif. La semestrialisation et les « barrettes » sontcourantes, contraintes supplémentaires dansl’organisation des enseignements. n

Réforme Chatel

Efficacité pédagogique douteuseLes dispositifs implantés au titre de la réforme ont avant tout brouillé l’organisation et la portée des enseignements.

Baccalauréat

Les mirages du renvoi localAvec la réforme du lycée, s’est aussi mise en place une réforme de l’évaluation certificativequi laisse une place de plus en plus importante à l’organisation locale des examens.

Des heures auxcontenus floussouvent définis

localement

Contrôle en cours de formation (CCF),épreuves en cours d’année (ECA), pos-sibilité de conserver ses notes en cas

d’échec au bac... Toutes ces évolutions inter-rogent à la fois l’organisation des enseigne-ments et la place du baccalauréat, premiergrade universitaire.La majorité des nouvelles épreuves sont orga-nisées sous la forme d’ECA sur le temps decours des élèves et souvent évaluées par l’en-seignant de la classe. Ces épreuves peuventcependant fonctionner de façon différente.Les épreuves de projet des séries technolo-giques, basées sur le principe d’un oral endeux parties, sont de nature variable selon lesséries, parfois tout ECA, parfois mixte. Il en vade même pour les enseignements de spécialitédes séries générales. En série L, l’évaluation deDroits et grands enjeux du monde contempo-rain (DGEMC) est une épreuve ponctuellealors que celle d’Informatique et sciences dunumérique (ISN) en série S est exclusivementorganisée en cours d’année. Certes, l’organi-sation locale d’épreuves existait avant laréforme avec les TPE et les Évaluations descapacités expérimentales (ECE), mais ces der-

nières bénéficient encore d’un cadrage natio-nal et rectoral fort en terme de modalités et decalendrier. Ce n’est pas le cas des nouvellesépreuves où le renvoi au local a laissé la placeà toutes les improvisations. La vie des éta-blissements en est profondément perturbée !

Diplômes « maison » ?Plus largement se pose la question de la cohé-rence et des finalités du bac. D’une série àune autre, le poids des ECA (hors TPE etsérie L) varie de 6,9 % en série ES à 27,5 % enSTD2A ! Le danger du diplôme local n’estjamais très loin... Le dernier texte sur le droitau redoublement après un échec au bac, sur laconservation des notes supérieures à 10 pourune période de cinq ans et sur les modalités deparcours, laisse par ailleurs entrevoir un projetde diplôme à la carte. Des épreuves terminales du bac, nationales etanonymes semblent donc concentrer pour leministère en particulier toutes les critiques.Trop coûteuses ? Un coût négligeable devantcelui de la scolarité ! Elles constituent pourtantun gage d’égalité de traitement devant l’exa-men et la garantie d’un diplôme national. n

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Démocratie lycéenne,pour une meilleure

complémentarité entre lieude vie et lieu d’apprentissageL’acte 2 de la vie lycéenne a montré les nom-

breuses difficultés à faire vivre les instances

et à favoriser l’expression et l’engagement

collectif des lycéens. Leurs préoccupations

mêlent autant le bien-être au lycée que l’or-

ganisation pédagogique (l’aide, le travail per-

sonnel, l’orientation). Ils revendiquent des

espaces privilégiés d’expression et d’épa-

nouissement comme des espaces de travail et

de détente identifiés. Pour le CVL, ils atten-

dent un budget spécifique, des temps et des

espaces dédiés, un fonctionnement mieux

défini et l’implication des proviseurs. La place

des élus en CA, le lien avec le CVL restent trop

marginaux. Quelques signes ont été donnés

par le ministère dont l’augmentation des

fonds lycéens, la généralisation des Maisons

des lycéens, la non-comptabilisation des

absences pour réunion. La réforme de 2010

n’a pas eu les effets escomptés. Dans son

bilan, le ministère lie la démocratie lycéenne

à l’autonomie de l’établissement, la renvoyer

ainsi à la gouvernance de l’EPLE revient à

en réduire la portée.

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Sous couvert de « libérerles initiatives » pourmieux «  s’adapter aux

nécessités locales », au nomd’une autonomie accrue desétablissements, le rôle du chefd’établissement dans ledomaine pédagogique a étérenforcé, avec l’appui d’unconseil pédagogique aux com-pétences étendues. Avec la disparition du cadragenational des heures à effectifsréduits, l’établissement et sonCA se sont vus attribuer la res-ponsabilité de répartir entreles disciplines la marge horairede 10 h 30 en Seconde puis de7 heures à 16 heures en Pre-mière et Terminale. Celle ausside définir les enseignementsd’exploration.

Éclatement du système éducatifMais bien loin de donner desmarges d’initiatives auxéquipes par des moyens sup-plémentaires, ce dispositif aconsisté en fait à laisser gérerla pénurie au local. Cela surfond de polarisation des poli-tiques scolaires sur l’établis-sement, avec le développe-ment des politiques de projetdepuis les années 1980 et un

Autonomie

Concurrence généraliséeLa réforme du lycée s’est accompagnée de modifications de la réglementation du fonctionnement des établissements.

glissement progressif vers unpilotage par les résultats et lesobjectifs, chaque établissementétant renvoyé en fin de compteà la responsabilité de traiter sesdifficultés.Les équipes pédagogiques sontmises en concurrence pourgrappiller heures de cours(entre LV1 et LV2, entre EE etoptions...) et heures de dédou-blement ou d’accompagne-ment. Les personnels y sontdessaisis de leur liberté péda-gogique (interdiction d’éva-luation des EE par exemple), etn’ont pas gagné avec le conseilpédagogique un espace de déli-bération démocratique sur lessujets qu’ils ont à trancher col-lectivement.La réforme du collège reprendtous ces éléments qui condui-sent à l’éclatement du systèmeéducatif avec la définitionlocale des horaires, des conte-nus, des modalités d’évalua-tion... n

Chaque établissementest renvoyé à laresponsabilité detraiter ses difficultés

Trois questions à...

Quelle place occupent les nouveaux dispositifs édu catifs dans le lycée issu de la réforme Chatel ?Ces dispositifs (enseignements d’exploration, accompagnement per-sonnalisé...) sont supposés permettre davantage d’adaptation aux besoinsde chaque élève et participer d’une organisation plus souple du systèmescolaire. Pour cela, ils institutionnalisent des temps dissociés des ensei-gnements et programmes disciplinaires. Leur place dans le lycée actuelest cependant à relativiser car, au-delà des interrogations que peut sus-citer le principe même de personnalisation, les dispositifs qui le maté-rialisent se heurtent à des moyens souvent limités qui impactent de faitson effectivité.Comment s’organise l’Accompagnement personnalisé (AP) dans les établissements ? Les établissements disposant d’une certaine autonomie de mise enœuvre, on observe une grande disparité dans les formes d’AP proposéesaux élèves d’un établissement à l’autre : mise en barrettes ou organisationpar classe, effectifs plus ou moins réduits, prise en charge par desenseignants de la classe ou non... Son contenu varie également entre et

au sein des établissements : selon la perception du dispositif par les ensei-gnants et son insertion ou non dans un projet d’équipe, il est consacrédans des proportions très diverses à des activités essentiellement disci-plinaires, à l’orientation, à des projets transversaux.Quels en sont les impacts sur le métier enseignant ?On peut faire l’hypothèse que la diversité de la mise en œuvre de ces dis-positifs en fonction des contraintes et interprétations locales contribue àune hétérogénéisation des conditions de travail. Par ailleurs, ces nouveauxdispositifs s’inscrivent dans ce qui semble être une évolution du métier versplus de missions sortant du cadre de l’enseignement disciplinaire et enga-geant davantage la personne enseignante. On peut souligner la charge detravail et les incertitudes que cela suscite, en l’absence notamment de réelleformation à ces nouvelles missions. Une partie des enseignants puise mal-gré cela une vraie motivation dans ce qui est perçu comme une opportu-nité nécessaire d’innovation pédagogique, de travail en équipe. Cesinjonctions multiples, parfois contradictoires, peuvent cependant êtresource de déstabilisation professionnelle, particulièrement pour ceux quiles vivent comme trop opposées à leur vision du métier. n

Camille Giraudon, doctorante en science politique au CRAPE (Centre de recherches sur l’action politique en Europe), Université de Rennes 1.

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Après quatre années de la réforme de lavoie technologique, le ministère de l’Éducation nationale s’engage dans la

rédaction de son bilan. Le SNES-FSU, pour sapart, a réalisé ces derniers mois une enquêtesur les quatre principales séries technolo-giques STI2D, STMG, ST2S et STL auprèsdes enseignants qui ont eu la charge de lamettre en place. Plus d’un millier de réponsesindividuelles ou collectives nous permettent dedresser un bilan exhaustif de la situation dansles établissements et de l’appréciation descollègues. Les remontées font apparaître quela réforme a été le prétexte à une réduction desmoyens sans atteindre les objectifs fixés : pasde rééquilibrage des séries générales et scien-tifiques vers les séries technologiques, pasde progression du nombre de filles vers lesséries industrielles. La progression globalereste inférieure à la démographie en lycée.Les élèves ont été concentrés dans des classesmoins nombreuses, dégradant ainsi leursconditions de travail. L’organisation pédagogique et la répartitiondes heures à effectif réduit sont extrême-ment variables dans les établissements ; àdéfaut d’un pilotage national chacun faitcomme il peut. La diminution des heuresdisciplinaires pour financer l’accompagne-ment personnalisé n’est pas efficace.L’évaluation est biaisée, réalisée par des jurysfragilisés. Chronophage, elle impacte le temps

de formation y compris en technologique enLV alors que le temps de présentation duprojet est insuffisant. L’apparition du contrôleen cours de formation masque l’absence deconnaissances au bénéfice d’hypothétiquescompétences. Les poursuites d’études révèlentla disparition du sens technologique des for-mations et hypothèquent le renouvellement en

Réformes des séries technologiques

Le SNES publie les analyses des enseignantsEn 2010, le ministère a lancé la réforme de la voie technologique avec pour ambition

de mieux la distinguer de la voie générale et de la voie professionnelle.

techniciens, de productionde biens et de services,aptes à répondre auxbesoins d’un nécessairedéveloppement écono-mique et social.

Un bilan sans appelLes collègues confirmentdonc les positions et lesmandats du SNES, tant surles voies technologiquesque générales. Appuyésdes témoignages des ensei-gnants, les demandesgagnent ainsi en efficacitéet en crédibilité lors desconfrontations avec l’ad-ministration et le minis-tère : accompagnementpersonnalisé adossé auxdisciplines, horaire natio-nal pour les dédouble-ments, etc.

La stratégie syndicale de rester au plus prèsdes analyses des collègues et de se donner lesmoyens de la faire connaître est pertinente.Le SNES-FSU a publié les résultats decette enquête (www.snes.edu/-Actualites-et-preparation-de-rentree-.html) et porte les syn-thèses des analyses des collègues auprès duministère et de l’inspection générale. n

Les propositions du SNES-FSU

Culture commune, ambition et réussite partagéesL’élévation générale du niveau de qualification de la population est indispensable

à l’insertion dans la société et à l’accès à des métiers qui nécessitent des compétences de plus en plus complexes.

Une telle ambition impose de prolongerjusqu’à 18 ans la scolarité obligatoire.La structuration du lycée en voies pro-

posant des modes différents de constructiondes savoirs et en séries aux colorations dis-ciplinaires est une réponse permettant derépondre aux attentes des jeunes. Les collé-giens ont en effet développé des appétencespour certaines disciplines scolaires et desfaçons spécifiques d’aborder et de construiredes connaissances au fil des années. Il s’agit donc de conjuguer début de spé-cialisation et acquisition d’une culture com-mune vivante et en prise avec les évolu-tions du monde. Construire du commun pardes chemins différents sans enfermer lesjeunes est possible, dès lors que les équi-

libres disciplinaires ont été pensés avec ledouble souci de l’identification de l’apportspécifique de chaque discipline et de leurcomplémentarité.

Des disciplines au centreLa question centrale qui se pose alors n’estpas tant celle de savoir à quel moment unediscipline sort du parcours de formation d’unlycéen que celle de définir ce qu’elle doit luiavoir apporté. Pour ce faire, il est nécessairede penser des programmes en repérant les« incontournables » dans chaque discipline,de préciser les articulations entre les domi-nantes et les disciplines obligatoires nondominantes de la série, de travailler aussil’articulation avec les options. L’interdisci-

plinarité peut jouer un rôle précieux dansces articulations et dans la construction de lacohérence que le lycéen doit percevoir danssa formation. Aucun champ de la culture nedoit être absent de la formation d’un lycéen,mais leur approche peut être diversifiée dansles contenus et dans les pratiques. Aller vers une égale mixité sociale dans cha-cune des voies et séries nécessite de jouer surdifférents tableaux  : travailler avec lesfamilles sur les représentations qu’elles peu-vent avoir des filières et la réalité des for-mations proposées ; proposer au collège descontenus de formation qui permettent uneorientation choisie et non par défaut ; amé-liorer la carte des formations et prévoir despasserelles entre les formations, etc. n

La stratégie syndicale de rester au plus

près des analyses des collègues est pertinente

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L’US Mag : Le ministère veut «  mieux informer  » les élèves de Terminale sur les débouchés et les taux de réussite de chaque filière : est-ce une bonne idée ?Cela s’appuie là encore sur le présupposé d’une désorientationdes étudiants d’Université. Le hiatus entre l’Université et leprojet professionnel n’a d’autre fondement que la volonté de pliertoujours plus cette institution aux logiques économiques à courtterme. Or, à entendre les étudiants entrant en L1, le choix del’Université est rarement hasardeux. Il s’appuie le plus sou-vent sur un goût prononcé pour la discipline et une vision plu-

tôt précise de son avenir pro-fessionnel. Ainsi, et contrenombre d’idées reçues, c’est àl’Université que l’on rencontreles taux les plus importantsd’étudiants disposant d’un pro-jet professionnel précis. Il n’y adonc pas, d’un côté, des for-mations professionnelles avecdes étudiants se projetant dansun emploi et, de l’autre, desfilières (trop) académiques avecdes étudiants perdus. Le « bonsens des études » n’est pas unecaractéristique intrinsèque desformations sélectives ou profes-sionnalisantes. Surtout, les politiques d’orien -tation récentes ont davantage viséà gérer les flux de nouveauxbacheliers qu’à améliorer leursconditions de réussite dans l’en-seignement supérieur. C’est ainsiqu’on cherche à leur attribuer des« destinées naturelles » (expres-sion de G.  Fioraso) : les bache-liers technologiques en IUT, lesbacheliers professionnels en STS,etc. Chaque profil à sa place. C’estmoins une logique d’aide à l’ac-complissement des projets scolaireset professionnels qu’une logiquede tri et de répartition des étudiantsselon leur profil scolaire (et par-tant, social), dans un souci d’effi-cacité et de rentabilité. Mais il fau-

drait une fois pour toutes admettre que l’orientation post-bac estun processus long et non linéaire, qui nécessite des essais, despauses, des bifurcations et que l’Université, service public d’en-seignement supérieur, permet tout cela. n

(1) Deux tiers des bacheliers généraux demandent l’Université en premiervœu (NDLR).

Entretien

Orientation post-bac :rompre avec les idées reçuesEntretien avec Romuald Bodin et Sophie Orange, sociologues, auteurs de L’université n’est pas en crise, éditions du Croquant, 2013.

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L’US Mag : Les étudiants qui vont à l’Université font-ils ce choix «  par défaut  » ?L’orientation à l’Université est souvent décrite comme étantplus qu’ailleurs une orientation « par dépit ». Or, les recherchesmontrent une autre réalité. C’est au sein des écoles supérieuresde commerce, d’arts, dans les IUT et les BTS, formations pour-tant sélectives, que l’on rencontre le plus d’orientations pardéfaut. Les licences universitaires, quant à elles, peuvent s’en-orgueillir d’un taux assez élevé de premiers vœux satisfaits(1). La vision négative de l’orienta-tion vers l’Université tient pourbeaucoup à un amalgame opéréentre les idées de sélection etd’élection. On a tendance à pen-ser que l’orientation vers desfilières sélectives, nécessitant depasser un concours ou de consti-tuer un dossier de candidature,relève d’une démarche active etpositive. À l’inverse, se dirigervers l’Université, où cela n’estpas requis, ne pourrait s’appa-renter qu’à une démarche pas-sive et ne saurait être considérécomme un choix véritable.

L’US Mag : L’abandon enpremier cycle universitairetraduit-il un « échec »fréquent à la faculté ?Tout d’abord, on peut s’éton-ner que la question de l’aban-don soit régulièrement posée àl’Université et pas ou peu auxautres filières, comme sicelles-ci n’étaient pas concer-nées. Or, l’Université connaîtun taux d’abandon proche decelui des CPGE et inférieur àcelui de nombreuses écoles.Ensuite, il faut dire ce quel’on entend par abandon etéchec, car ces termes sontsouvent utilisés sans être défi-nis. Or, ils recouvrent et agrè-gent des situations différentes : échec aux examens, absence auxexamens pour cause de réussite à un concours, réorientation versune autre formation, entrée dans la vie active, non-réinscription d’unquinquagénaire en reprise d’études pour le plaisir, etc. Plus encore,en étudiant les parcours des étudiants, on s’aperçoit que le premiercycle universitaire joue aussi un rôle de classe préparatoire auxconcours d’entrée dans certaines formations, telles que les écolesdu travail social, paramédicales ou même de commerce.

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MÉTIER

28 - US MAGAZINE - Supplément au no 758 du 9 janvier 2016

Ce que les professeurs de languesvivantes ont vécu avec la réformeChatel des lycées laisse augurer du pire

au sujet de la réforme du collège. Lesprogrammes par cycle ont compliqué letravail des enseignants car, à défaut derepères annuels, ils doivent déterminer seulsles contenus d’enseignement à répartir parniveau. De plus, ces programmes étantcommuns à toutes les langues, ils ont donnélieu à de nombreuses déclinaisons desmêmes notions et thèmes entre les langueset les professeurs. Une des conséquencesest que les élèves ont l’impression de refairesans cesse les mêmes choses. Les « groupesde compétences  » ont vu leurs effectifsgrossir d’année en année, et donc le nombred’élèves à prendre en charge. Enfin, lesprofesseurs de LVER de lycée ont vu leurquantité de travail augmenter de façon consi-dérable sans aucune contrepartie, avec l’in-troduction d’épreuves en cours d’annéemenées sans aucun cadrage national, et lamultiplication des réunions.

La réforme Chatel des lycées a engendréune souffrance réelle et alarmante, qui n’ajamais été prise en compte, et elle se retrou-vera sans doute chez les enseignants decollège avec la réforme en cours.

Le SNES-FSU vous consulteL’introduction d’une LV2 à 2 h 30 dès laclasse de Cinquième, combinée à la sup-pression des classes bilangues et des sec-tions européennes, conduit à une augmen-tation du nombre de groupes-classes parenseignant et à une multiplication desséquences à préparer. Le souhait des corps d’inspection de passerles séances à 45 minutes – au prétexte de ladiminution de l’exposition des élèves à lalangue (comme si cela avait été le souhaitde la profession) – ne viendrait qu’accen-tuer la dégradation des conditions de travail.Le SNES-FSU consulte actuellementles collègues sur cette question. Rendez-vous sur : https://fr.surveymonkey.com/r/Quest-Langues-vivantes. n

MALGRÉ UN DISCOURS INSTITUTIONNEL faisant des langues vivantes une priorité, les réformes se succèdentet mettent à mal ces enseignements. Diminution des horaires hebdomadaires, appauvrissement de l’offreet prescriptions pédagogiques contestables engendrent une souffrance professionnelle importante.

Trop-plein en Langues vivantes et régionales

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ÉVALUATION AU COLLÈGE. Loin de toute réflexion sur les relations entre la réussite de tous les élèves et les pratiques d’évaluation, les textes parus au B.O. n° 3 du 21 janvier 2016 consacrent la volonté d’obligerles professeurs à rendre des comptes.

Toujours plus de cases tu remplirasL

es bulletins scolaires, rebaptisés bilanspériodiques, devront comprendre, enplus des éléments actuels, les parties de

programme travaillées durant la période, desindications sur l’accompagnement person-nalisé (qui le prend en charge, ce qui s’y estfait, l’implication de l’élève), les EPI, lesparcours, les dispositifs (PPRE, PAP, etc.).L’application LSun (Livret scolaire unique

numérique), en cours de développement auministère, devrait prendre ces nouveautésen charge, dont l’«  annexe de correspon-dance » avec les responsables de l’élève.

Travailler plus pour... rienDeux bilans de fin de cycle (fin de Sixièmeet de Troisième) donneront une évaluationdes niveaux de maîtrise du socle, sur une

échelle de 1 à 4 (1 : maîtrise insuffisante,2 : maîtrise fragile, 3 : maîtrise satisfaisante,4 : très bonne maîtrise) pour chacune desquatre composantes du domaine 1 et cha-cun des quatre autres domaines. Le socleest considéré maîtrisé si l’élève se situe auxéchelons 3 ou 4 en fin de cycle 4. L’en-semble est complété d’« une appréciation surles acquis scolaires du cycle et, le caséchéant, des conseils pour le cycle suivant ».La note de service précisant le cadrage desépreuves du DNB n’est pas encore parue. Lecontrôle continu est remplacé par l’évaluationdu socle, l’épreuve d’histoire des arts parune épreuve orale reposant sur les EPI ou lesparcours, et les écrits s’ouvrent à la techno-logie et aux sciences, les grandes oubliéesétant les disciplines artistiques et l’EPS.Sous couvert de simplification et de trans-parence vis-à-vis des familles, ces disposi-tions vont générer du travail supplémentairepour les personnels, sans efficacité pédago-gique prévisible. Elles visent aussi à imposerun changement des pratiques d’évaluationet des objectifs de la scolarité. Un programme que les personnels saurontapprécier...Voir aussi : www.snes.edu/Evaluation-cadrage-bureaucratique.html. n

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Alors que les enseignants sont convo-qués au chevet de la citoyenneté aurythme des dramatiques événements

de 2015, la réforme du lycée héritée d’ungouvernement de droite maintient depuis2012 son hypocrite garrot sur l’horairedestiné à l’enseignement de la philosophiedans les séries scientifiques et technolo-giques (soit deux élèves sur trois, horsbac pro). Outre le fait que l’enseignementmoral et civique, faute d’être accompagnéd’une dotation horaire, ne concerne lesprofesseurs de philosophie que de façontrès marginale(1), c’est l’avenir de l’ensei-gnement de la philosophie en séries technologiques qui se joue en ce moment,alors que le ministère envisage enfin desajustements « techniques » de la réformeChatel.

Lettre à la ministreAussi, le SNES-FSU s’est adressé à laministre, un an après avoir obtenu unetimide consigne ministérielle destinée àencourager les cours de philosophie à effec-

tifs réduits en séries techno-logiques. Dans sa lettre àla ministre(2), le SNES-FSU rappelle son exi-gence d’un retour àun horaire en classedédoublée garantip a r u n e g r i l l ehoraire nationaledans toutes les dis-ciplines et particuliè-rement en philoso-phie. Mais il ajoute quefaute d’être contrai-gnante, cette consigne nesuffira pas à inverser la ten-dance à un dépérissement programméde cet aménagement horaire indispensable.Or, au-delà d’une revendication strictementcorporative, il s’agit bien d’une remise encause de la démocratisation de l’enseigne-ment de la philosophie, restée en panne auxportes des lycées professionnels. Si enseigner la philosophie dans toutes lesséries contribue à faire vivre la laïcité, réta-

blissons les conditions de sonenseignement dans les

séries qui accueillent lesélèves des milieuxpopulaires, commecela avait été amorcéen 1994, en instau-rant des dédouble-ments . Resterai talors, excusez dupeu, à (ré)ouvrir le

chantier urgent desépreuves du baccalau-

réat en séries techno -logiques...

Face à ces dossiers en souf-france, l’heure n’est plus à tergiver-

ser, car après 2016, l’horizon risque des’assombrir davantage ! n

Jean-François Dejours Responsable national du groupe philo

(1) www.snes.edu/-questionnaire-s-2015-.html(2) www.snes.edu/Lettre-du-SNES-a-la-Ministre.html

Supplément au no 758 du 9 janvier 2016 - US MAGAZINE - 29

L’objectif était d’informer et d’échangersur les problématiques spécifiques aumétier, sur la place du professeur docu-

mentaliste dans la réforme du collège maiségalement sur l’application du décretd’août 2014 sur les obligations de service. La journée a été l’occasion de revenir sur lagenèse des textes (référentiel d’Éducationaux médias et décret 2014-940 sur les obli-

gations de service) et les avancées obtenuespar le SNES-FSU, mais également de poin-ter les difficultés rencontrées au quotidiendans les établissements.

Quid du rôle pédagogiquedu professeur documentaliste  ?L’entrée dans les programmes du collèged’un référentiel d’EMI à la rentrée 2016,

point d’ancrage pour la reconnaissance durôle pédagogique du professeur documenta-liste, ne répond ni aux préoccupations de laprofession ni aux revendications du SNES-FSU. Il demande la formalisation de contenusspécifiques en Information Documentationdont l’enseignement serait confié au profes-seur documentaliste sur un horaire identifié.Ainsi, faute d’horaire identifié, sa mise enœuvre sera difficile, sauf à accepter des bri-colages locaux.

De la difficile applicationdu décret sur les ORS Le décret d’août 2014 est une avancée pourla reconnaissance des heures d’enseignementeffectuées pour les professeurs documenta-listes. Le SNES-FSU dénonce les interpréta-tions des chefs d’établissement et revendiquel’application du bon décompte des heuresd’enseignements effectuées tel que prévudans le décret 2014-940 et la note de service2015-057 (décompte de 2 heures dans le ser-vice pour une heure d’enseignement).Face à l’absence de réponses satisfaisantes dela part de l’Institution, pour défendre notremétier, ses spécificités et sa place dans lesecond degré, le SNES-FSU appelle les col-lègues à se mobiliser, dans un premier tempsle 26 janvier. n

Virginie Pays et Claire RichetGroupe Documentation

PROFESSEUR DOCUMENTALISTE. Le SNES-FSU a organisé à Paris, le 11 janvier dernier, une journée de réflexion qui a réunit cent trente professeurs documentalistes.

Une profession dans la tourmente

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PHILOSOPHIE. L’avenir de l’enseignement de la philosophie en séries technologiques se jouera-t-il en 2016 ?

Rétablir les conditions de son enseignement

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CATÉGORIES

30 - US MAGAZINE - Supplément au no 758 du 9 janvier 2016

Si vous êtes promouvable à un échelondurant l’année scolaire 2015-2016 (pourretrouver vos dates de promouvabilité,

vous pouvez utiliser notre outil de calcul enligne : www.snes.edu/Promotion.html), vouspouvez nous envoyer la fiche syndicale desuivi individuel présente dans le supplémentspécial «  évaluation  » à L’US n° 755 du24 octobre 2015.À partir des tableaux fournis par l’adminis-tration, vos élu-e-s du SNES-FSU contrôle-ront toutes les situations pour lesquelles ils ontdes éléments. La fiche syndicale de suiviindividuel se relève donc être un outil indis-pensable. Remplie avec précision et accom-pagnée des copies des documents nécessaires,cette fiche permettra à vos élu-e-s de cor -riger les éventuelles erreurs.Fournir aux élu-e-s du SNES-FSU, dont l’ex-pertise est reconnue par tous, toutes les infor-mations nécessaires aux vérifications qu’ils

S N E P e t S N E S u p :6 sièges) , le SNALC(2 sièges), le SGEN (1siège) et FO (1 siège).Du fait du nombre deleurs élu-e-s, seuls lessyndicats de la FSU sonten capacité de défendreles intérêts individuelsde chacun et collectifsde la profession, et dec o m m u n i q u e r d e srésultats fiables à l’is-sue des travaux de laCAPN.Le bilan de la dernièreCAPN (avec les barres

de promotion 2015) est disponible surnotre site : www.snes.edu/Agreges-bilan-avancement-2015.html. n

Serge Deneuvéglise

Si le ministère a abondamment commu-niqué sur les créations d’emplois dansl’Éducation nationale, pour la première

fois depuis trois ans, les CPE en sont exclus ! Pourtant, leurs sollicitations professionnellesne manquent pas dans une actualité où le« vivre ensemble », la citoyenneté et la laïcitésont régulièrement convoqués.Les tensions d’une charge de travail excessiveet de dépassements horaires fréquents qui endécoulent font pourtant bien partie du quoti-dien des CPE. Alors que la circulaire du10 août décline les obligations de service encycles hebdomadaires de 35 heures inscritesà un emploi du temps sur 39 semaines, desinterprétations locales tentent encore d’encontourner l’application.

Deux priorités : emplois et missionsLa réforme du collège, tant contestée, risquede plus d’accroître le « périmètre » de la viescolaire avec une pause méridienne étendue,la création d’un parcours citoyen, du conseilde la vie collégienne, une contribution sou-haitée à l’enseignement moral et civique... Dela même façon, les CPE seraient invités àprendre place dans la mise en œuvre desenseignements pratiques interdisciplinaires.Pourtant, les suppléances, de plus en plusdifficilement assurées par un vivier de titu-laires remplaçants exsangue, nécessitent un

recours accru aux personnels contractuels. Enfin et surtout, l’actualisation des missionsdes CPE actée par la circulaire (2015-139) du10 août dernier, porte une réelle ambitionéducative qui risque de ne pouvoir être tenuedans ces conditions. La « grande mobilisationpour les valeurs républicaines  » trouve icisa limite implicite.Le SNES-FSU a chiffré à 740 le nombre depostes à créer pour répondre aux besoinsimmédiats(1), comme première étape d’uneprogrammation pluriannuelle des recrutements. Le dernier collectif national CPE du SNES-FSU s’est donc adressé en ce sens à la ministrede l’Éducation(2). D’une part, il a rappelé cette

exigence de créations d’emplois et, d’autrepart, celle d’une clarification de l’applicationdes textes réglementaires à l’échelon local. Iln’a par ailleurs pas manqué d’insister sur lanécessité d’une nouvelle étape de reconnais-sance du métier par la création d’une agréga-tion d’éducation, ouvrant la voie à celle d’uncorps d’inspection spécifique, issu du corps. Lagrève du 26 janvier sera une occasion pour lesCPE de rappeler à la ministre cette interpella-tion, restée sans réponse pour l’instant. n

Valérie Héraut(1) www.snes.edu/Aucune-creation-de-poste-de-CPE.html(2) www.snes.edu/-Actualites-5753-.html

CPE. Le ministère, en annonçant qu’il n’y aurait pas de création de postes de CPE et en s’accrochant à une réforme du collège chronophage pour les personnels, fragilise un corps qui avait pourtant obtenu une reconnaissance par la circulaire du 10 août 2015.

Répondre aux besoins immédiats

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devront effectuer : c’est lemoyen le plus sûr de s’assu-rer que ses droits seront res-pectés.

Communicationdes résultatsÀ la fin de la CAPN, lescommissaires pari tairesagrégés nationaux du SNES-FSU informeront les adhé-rents de leur résultat .D’autres organisations syn-dicales tentent de faireaccroire qu’elles sont pré-sentes lors de la commissionen envoyant des courriers deréponse, en particulier sur les boîtes pro-fessionnelles sans demander d’ailleursl’avis des collègues. Seuls ont des élu-e-sen CAPN les syndicats de la FSU (SNES,

LA CAPN DES PROFESSEURS AGRÉGÉS relative à l’avancement d’échelon pour l’année en cours se déroulera du 16 au 18 février 2016. Lors d’opérations de gestion qui apparaissent bien souvent comme complexes et mécaniques, les élu-e-s du SNES-FSU s’assureront du respect du droit de chacun et de tous.

Bientôt la CAPN d’avancement d’échelon

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Supplément au no 758 du 9 janvier 2016 - US MAGAZINE - 31

Le SNES-FSU a obtenu que le minis-tère précise la partie de la note deservice mutations 2016 consacrée aux

bonifications liées à l’exercice dans unétablissement de l’éducation prioritaire(REP/REP+).S’il est vrai que cette « précision » va per-mettre un traitement plus « normal » et plusclair de la situation des demandeurs de muta-tion de ces établissements, il reste que la« clause de sauvegarde », telle qu’elle a étéconçue dès son introduction, entrave lesstratégies des collègues des établissementsqui ont été déclassés en «  gelant  » leurancienneté de poste au 31 août 2015.

Mauvaise piocheEn d’autres termes, une collègue arrivéedans un établissement APV à la rentrée2013, au motif que son établissement n’estdevenu ni REP, ni REP+, ne peut prétendrequ’à la prise en compte de deux années deposte en APV (120 points) jusqu’au mou-vement 2018. En sorte que sa stratégie quivisait à muter avec une bonification signi-ficative au terme de cinq années de poste(300 points) a été, de fait, rendue caduquepar l’administration.

Des points... et des moyens !Sur le fond, le SNES-FSU regrette que lalogique de la « noria »soit, en dehors de lapondération horaire de1,1 obtenue avec laréforme des décrets sta-tutaires, la seule réponsedu gouvernement à ladifficulté que rencon-trent les collègues dansces établissements. Il estvrai que donner une« prime au départ » de320 points au terme decinq années d’exercicecoûte infiniment moinscher que d’améliorer lesconditions de travail despersonnels, de réduiresignificativement leseffectifs des classes, d’améliorer l’encadre-ment des élèves avec des surveillants, desCPE, des infirmières, des conseillers d’orien-tation psychologues, des assistantes sociales,voire d’apporter une aide au logement signi-

ficative à tous nos collègues... toutes choses quiont un coût certain qu’en ces temps de disettebudgétaire le gouvernement n’a, hélas, bien sûret malheureusement, nulle intention de mettreen œuvre. n Lionel Millot

Le dispositif de recrutement réservé auxcontractuels de la loi Sauvadet est bienprolongé jusqu’en 2018 et la commis-

sion du Sénat a adopté le 15 décembredernier la prolongation jusqu’en 2020, maissans tenir compte des modifications desconditions d’éligibilité préconisées par leSNES-FSU. L’accès au concours réservéreste donc très limité ! En raison de l’ur-gence déclarée par le gouvernement, l’as-semblée plénière du Sénat se tiendra les 26et 27 janvier prochains, et sera suivie sinécessaire d’une commission mixte paritairepour rédiger les articles adoptés dans destermes différents.

Encore beaucoup à gagnerEn l’état actuel du texte, on peut dire queles questions que nous portons n’ont pas ététraitées, le gouvernement s’est simplementcontenté de décaler les périodes d’admissi-bilité de la façon suivante :• quatre ans d’ancienneté à la date de l’ad-

missibilité ;

• être en poste entre le 1er janvier et le31 mars 2013 ;

• détenir deux ans d’ancienneté avant le31 mars 2013.

À noter que les agents en poste du 1er janvierau 31 mars 2011 resteront admissibles !Le SNES-FSU rappelle les amendementsdéposés auprès du ministère dans le cadredu projet de loi de déontologie pourune nécessaire réécriture et s’engage à exercer les pressions indispensables pour lesvoir aboutir :• entrée directe à l’ESPE, pour les contrac-

tuels ayant une certaine ancienneté ;• inscription à partir de quatre ans d’ancien-

neté sans référence calendaire ;• suppression de la limitation imposée par les

temps incomplets (quotité d’au moins 70 %d’un temps complet et de la référence auseuil de 50 %) ;

• ouverture de l’accès aux recrutements réser-vés pour les vacataires (recrutement dontnous avons fait reconnaître l’illégalité) ;

• ouverture de l’accès réservé pour les

contractuels des établissements d’ensei-gnement à l’étranger ;

• élargissement de la période de vérificationde la condition d’emploi.

La FSU est intervenue en ce sens auprès desparlementaires. n

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NON-TITULAIRES. Si le législateur a confirmé la prolongation du dispositif contenu dans la loi Sauvadet jusqu’à 2018 voire 2020, il a malencontreusement omis de prendre en considération les amendements essentiels portés par le SNES-FSU...

Pour une titularisation facilitée

MOUVEMENT ÉDUCATION PRIORITAIRE. Les représentants du SNES-FSU ont obtenu que les candidats exerçant en APV soient traités équitablement lors des opérations de l’Inter. Cette victoire, insuffisante en l’état, est un jalon pour obtenir la remise à plat de la fameuse « clause de sauvegarde ».

Vers la fin d’une iniquité ?

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Les CPGE sont des formations post-bacqui recrutent sur dossier et sont dispen-sées dans les lycées, ce qui facilite la

transition pré-bac/post-bac. Les 1 200classes réparties dans 500 lycées sur tout leterritoire constituent un maillage territorial

auquel le SNES-FSU est attaché. Le nombred’étudiants en CPGE a plus que doublédepuis 1980. Les CPGE offrent des débouchés vers lesgrandes écoles ou les cycles master de l’uni-versité. Il existe des :

• prépas scientifiques qui attirent près desdeux tiers des préparationnaires ;• prépas économiques et commerciales(25 %) ;• prépas littéraires environ 15 %.Les étudiants des filières scientifique etéconomique et commerciale ont la quasi-cer-titude d’intégrer une grande école (ingé-nieur, management, ENS) après leurs annéesde prépa. En filière littéraire, les débouchésse sont élargis au-delà des ENS depuis lamise en place, en 2009, de la banqued’épreuves littéraires (BEL) qui conduitaux écoles de management, IEP, etc. Cer-tains étudiants de prépa poursuivent à l’uni-versité, leurs études en prépa sont alors vali-dées via les ECTS (abréviation du termeanglais qui signifie Système européen detransferts et d’accumulations des crédits)selon une grille nationale.

Une ouverture vers de nouveauxpublics qu’il faut poursuivreEn 2014, sur l’ensemble des jeunes étu-diants à l’université, 30 % d’entre eux ontdes parents cadres supérieurs ou exerçantune profession libérale et 23,5 % ont desparents ouvriers ou employés, alors qu’en

SUR LE TERRAIN©

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Osons démocratiser la prépa

DEPUIS LE 20 JANVIER, LA PROCÉDURE ADMISSION POST-BAC (APB) est ouverte aux candidatures des futurs bacheliersqui souhaitent postuler dans une formation supérieure. Les classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) en fontpartie. Implantées majoritairement dans des lycées publics, elles accueillent des étudiants issus de différents bacca-lauréats, généraux ou technologiques.

Les CPGE

32 - US MAGAZINE - Supplément au no 758 du 9 janvier 2016

LES CPGE EN CHIFFRES (SOURCE DEPP, 2015)

84 200 étudiants inscrits en CPGE

7 % des poursuites d’étude

des bacheliers

83,4  % dans le secteur public

42 000 en première année

93,5 % proviennent

d’un baccalauréat général

70,1 % de bacheliers

scientifiques

14,5 % de bacheliers économiques

8,9 % de bacheliers littéraires

5,5 % d’un baccalauréat technologique

1 % étaient déjà bacheliers et

proviennent d’autres filières du supérieur

Part des filles parmi les étudiants de CPGE

Filière scientifique  : 28,9 %Filière économique et commerciale  : 54,9 %Filière littéraire  : 74,3 %

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CPGE ils sont respectivement 49,5 % et16,5 %. Les origines sociales sont, elles,comparables en Master et en CPGE avec destaux respectifs de 33,5 % et 17,5 %. Mais ily a des évolutions encourageantes : concer-nant les boursiers, une démarche volontaristecommence à porter ses fruits. En effet, entre2008 et 2014, le taux de boursiers à l’uni-versité est passé de 31 à 35 % alors quedans le même temps, il est passé de 21,9 à27,7 % en CPGE. Les classes ATS (Adaptation techniciensupérieur) permettent d’accueillir un nou-veau public, puisqu’il s’agit de classes pré-pas en un an qui s’adressent aux détenteursde BTS ou DUT souhaitant intégrer unegrande école. Les prépas réservées aux bacheliers tech-nologiques ont permis de diversifier le vivierd’étudiants dans les filières scientifiques etéconomique et commerciale. Pourtant cesclasses ont parfois du mal à recruter, carces bacheliers préfèrent souvent, pour desraisons économiques ou personnelles, lescursus courts.

Lutter contre l’autocensure...Des études ont montré que dans une centained’établissements aucun élève ne postulait enCPGE. Pour le SNES-FSU, il est doncimportant de lutter contre les stéréotypeset l’autocensure des futurs étudiants. Telleest l’ambition affichée de dispositifs commeles « cordées de la réussite » (voir encadré)ou celui des « Meilleurs Bacheliers » per-mettant aux 10 % des meilleurs élèves dechaque lycée, selon les résultats du bac,d’accéder à une filière sélective. Cepen-dant, ces dispositifs « compte-goutte » neconstituent pas une politique incitative d’en-semble. Un exemple à Aubervilliers : le lycée LeCorbusier propose entre autres des CPGETSI (Technologies et sciences industrielles)ouvertes aux titulaires d’un bac STI2D. Unformidable travail est fait par les profes-seurs pour le recrutement des élèves, mais,même acceptés, «  certains ne confirmentpas leur inscription à cause des difficultésd’hébergement, et ce n’est pas faute de sol-liciter régulièrement les autorités et l’officeHLM », précise Manuel Combes, profes-seur du lycée.

... et offrir des conditions d’étudespermettant la réussite de tousL’ouverture du futur campus Condorcetconstitue un certain espoir, car 150 loge-ments étudiants seraient accessibles en 2018.La question d’un hébergement dédié auxélèves de prépa est un facteur clé de leurréussite, « car il donnerait accès à des lieuxcalmes de travail le soir, ce dont disposentrarement les élèves chez eux » souligneManuel Combes. « Et cela permettrait de seconfronter à armes égales avec les élèves deprépa en régions ». Il constate aussi que

« certains se découragent car ils ont peurdes concours », alors que de nombreusesécoles recrutent sur dossier mais cela estmoins connu. Pour le SNES-FSU, la démocratisation desCPGE passe aussi par la défense des prépasdites de proximité. La présence de lycéesdisposant de CPGE sur l’ensemble du ter-ritoire, y compris dans des villes moyennes,est un atout supplémentaire pour cette voiede formation : les élèves peuvent en effet

postuler pour des classes installées assezprès de chez eux, ce qui est pratique et ras-surant pour eux-mêmes et leurs familles.Certains lycées proposent aussi des places eninternat, dont les tarifs sont relativementpeu onéreux. Or, les menaces rectorales defermeture sont de plus en plus fortes surces classes, à qui on impose d’atteindre 48élèves. Chaque année le SNES-FSU accom-pagne à tous les niveaux – local, rectoral etministériel – les collègues qui luttent contredes projets de fermetures. En décembre2015, la mobilisation a été gagnante à Saint-Brieuc, les collègues du lycée Rabelais ayantpu sauver la prépa de physique-chimiecaractérisée, dans ce lycée, par une mixitéaussi bien sociale que de genre.Mais c’est surtout grâce à l’établissementd’une école et d’un enseignement secon-daire de qualité sur tout le territoire pourlequel se bat le SNES-FSU que les classespréparatoires cesseront d’être une institutionde reproduction sociale. n

Trois questions à...

L’US Mag : Qu’est-ce que le dispositif des « cordées de la réussite » ?Le programme « cordées de la réussite » a été lancé en 2008, sous la forme d’un labelnational attribué dans le cadre d’un partenariat entre le ministère chargé de l’Ensei-gnement supérieur et le ministère en charge de la Politique de la ville. À son origine,ce programme a visé en priorité les 215 quartiers de la dynamique espoir banlieues. Celabel est attribué à des projets constituant des partenariats entre des établissements d’enseignement supérieur (grandes écoles, universités…) et des lycées ou collèges. Cespartenariats prennent diverses formes, la plus visible étant la mise en place de tutoratpar des étudiants du supérieur auprès d’élèves du secondaire. Il y a actuellement375 cordées réparties sur tout le territoire.Ce fut aussi une opération de communication pour le gouvernement de l’époque en direc-tion des jeunes des quartiers sensibles, dans le but de les inciter à envisager des étudessupérieures. L’US Mag : Comment le dispositif s’est-il mis en place dans ton établissement ?Il s’agit d’un partenariat entre le lycée Saint-Louis, l’école des Mines de Paris, et six lycéessitués dans des quartiers prioritaires, choisis par le ministère de l’Éducation nationale,une majorité étant dans l’académie de Créteil. Les élèves des lycées partenaires admisà Saint-Louis reçoivent des aides méthodologique et pédagogique : cours de soutien, stagesde langues, parrainage par un professeur du lycée. Nous avons aussi un budget pour l’achatde livres ou mini-ordinateurs qui sont prêtés aux étudiants. Les équipes enseignantes etde direction de Saint-Louis et des lycées partenaires sont en contact et se rencontrent régu-lièrement. Quelques étudiants de l’école des Mines participent à l’opération, sous lecontrôle d’un enseignant.L’US Mag : Quel bilan tires-tu de ce dispositif ?La démarche de cette cordée nous a paru intéressante au début, dans le contexte où l’onreprochait aux classes prépas un recrutement peu diversifié socialement, et beaucoup decollègues se sont engagés bénévolement dans cette action. Mais il faut bien reconnaîtreaprès quelques années de fonctionnement que le nombre d’élèves concernés est très faible.En moyenne, chaque année, une quinzaine d’élèves des six lycées partenaires intègrentla prépa du lycée Saint-Louis, soit environ 2,5 % de l’ensemble des élèves de premièreannée. Il sont suivis par une vingtaine d’enseignants, comme tuteur ou professeur réfé-rent d’un lycée partenaire, soit presque 20 % des enseignants du lycée. D’ailleurs, si lelycée Saint-Louis compte environ 25 % de boursiers parmi ses élèves, il le doit plutôtà une politique volontariste dans le processus d’admission et à un tarif d’internat réduitpour les élèves boursiers.

Supplément au no 758 du 9 janvier 2016 - US MAGAZINE - 33

Françoise LachizeProfesseur au lycée public Saint-Louis à Paris

Ont participé à la rédaction de cet article : Armelle Expert, Julien Luis, Christophe Schneider

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co-operare qui signifie agir ensemble) appa-raît comme un prolongement du combatsyndical mené pendant près de trois ans etdemi par « les Fralibiens » contre le géant del’agroalimentaire Unilever. La société estégalement basée sur quelques principesfondateurs du mouvement coopératif commele contrôle de l’outil de production par lescoopérateurs-salariés, un fonctionnementdémocratique et transparent de la société, oula recherche d’un profit économique subor-donné à la promotion et à l’épanouissement

des coopérateurs. Il s’agit au quotidien defaire vivre ses principes. « L’assemblée géné-rale demeure souveraine » rappelle ainsi ledirecteur. Avec quinze réunions en 2014 etune bonne vingtaine en 2015, on est en effettrès loin de la réunion annuelle prévue par lesstatuts de la société.Les coopérateurs discutent alors des orien-tations commerciales, du choix des parte-naires. « On recherche toujours l’accord leplus large possible » insiste O. Leberquier, àl’image de ce qui s’est passé pour les salaires.

La coopération est «  avec la mutualité,le mouvement social le plus ancien et leplus puissant de notre pays » rappelle

l’historien Michel Dreyfus. Née dans lepremier tiers du XIXe siècle, elle constituealors une réponse aux besoins nés de la révo-lution industrielle. Deux siècles plus tardelle peut apparaître comme une solution auxdéfis posés par le capitalisme et la mondia-lisation. C’est en effet la forme coopérativequ’ont choisie 58 des 187 salariés de l’ex-Fralib pour poursuivre leur activité. Lecapital social a été fixé à 177 000 eurosdivisés en 3 540 parts de 50 euros chacune.Chacun des 59 actionnaires dispose de 60parts, soit 3 000 euros d’investissement. « Ils’agissait du modèle économique qui serapprochait le plus de nos valeurs » souligneainsi Olivier Leberquier, directeur général dela SCOP.

Les valeurs de la SCOP-TIElles sont mentionnées dans le préambuleaux statuts de la société : « prééminence dela personne humaine, démocratie, solidaritéet partage ». D’autres, « découlant des troispremières  », sont également affirméescomme « la reconnaissance de la dignité dutravail, le droit à la formation, le droit à lacréativité et à l’initiative ». La SCOP (du latin

LE 25 SEPTEMBRE 2015, aux termes d’une longue bataille syndicale et juridique, la Société coopérative ouvrière pro-vençale de thé et d’infusion (SCOP-TI) a lancé sa boîte de thé 1336, chiffre symbole, comme le nombre de jours d’oc-cupation de l’usine Fralib à Gémenos. Dans cette période de désespérance sociale et politique, L’US Mag a choisi demettre en lumière ce qui est l’aboutissement d’une lutte collective.

FENÊTRE SUR

34 - US MAGAZINE - Supplément au no 758 du 9 janvier 2016

La coopération comme modèle économique

LA SCOP-TI : L’ABOUTISSEMENT D’UNE LONGUE LUTTE◗ 28 septembre 2010 : Unilever

annonce sa décision de délocali-

ser la production de Gémenos en

Pologne.

◗ 3 janvier 2011 : les salariés annon-

cent leur volonté de maintenir une

activité industrielle sur le site.

◗ 10 janvier 2011 : Premier plan

social. Les salariés engagent une

action en justice.

◗ 7 février 2011 : le tribunal de

grande instance de Marseille casse

le plan social.

◗ 17 avril 2011 : second plan social.

◗ 2 septembre 2011 : début de l’oc-

cupation de l’usine.

◗ 17 novembre 2011 : La cour d’ap-

pel d’Aix-en-Provence casse le

deuxième plan.

◗ 12 janvier 2012 : troisième plan

social.

◗ 30 janvier 2012 : les salariés

déposent un projet alternatif de

reprise de l’activité.

◗ 2 août 2012 : Marseille Pro-

vence métropole rachète le site

de l’entreprise pour 5,3 millions

d’euros.

◗ 14 novembre 2012 : en AG les

salariés adoptent les statuts de leur

SCOP.

◗ 28 février 2013 : La cour d’appel

d’Aix-en-Provence annule le troi-

sième plan social.

◗ 17 mai 2013 : occupation du minis-

tère de l’Agriculture.

◗ 26 mai 2014 : Unilever accepte de

verser 19,6 millions d’euros équi-

valent aux retenues sur salaire, aux

indemnités de licenciement.

◗ 21 août 2015 : redémarrage de la

production.

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Les Fralib

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à rebours de l’entreprise agroalimentairedéterritorialisée, fait le choix de s’ancrerdans le tissu économique régional. Jusqu’en1998  l’usine Fralib s’approvisionnait enFrance et particulièrement en Provence (ver-veine, tilleuls, mélisse), puis Unilever adécidé d’importer les plantes d’AmériqueLatine et de Pologne. Le volume de plantesissues de l’agriculture française est passé de500 tonnes à environ 15 tonnes. L’objectif estainsi de renouer avec la production locale etde redynamiser un secteur d’activités (plantesmédicinales et aromatiques locales) danslequel la région dispose de nombreux atouts.Aux lendemains des élections régionales quiont vu le FN gonfler ses scores en PACA,O. Leberquier rappelle opportunément qu’ils’agit du seul parti qui a voté contre le pro-jet de subvention de la Région en directiondes salariés en 2011... n

Supplément au no 758 du 9 janvier 2016 - US MAGAZINE - 35

Après dix mois de discussion c’est le salaireunique par catégorie professionnelle qui aobtenu le consensus le plus large (75 % descoopérateurs).

L’aboutissement d’une lutte syndicaleLa SCOP ne figurait pas dans les projets ini-tiaux des salariés. Ces derniers souhaitaientsimplement le maintien de l’activité indus-trielle et des emplois. La création du rap-port de force avec Unilever a été rendue pos-sible par un syndicalisme de terrain. « Celaconsiste pour 90 % à se donner le temps decomprendre la société » souligne O. Leber-quier. « Nous disposions d’analyses qui mon-traient que le site de Gémenos était rentable.En 2009 avec 187 salariés nous parvenionsà produire près de 1,3 milliard de sachets dethé, c’est-à-dire plus qu’en 1989 lorsque laproduction était répartie sur deux sites(Le Havre et Gémenos) qui comptaient àeux deux 300 salariés. En partant des grillesde salaires nous nous sommes rendu compteque sur la même période, alors que le SMICétait passé de 740 euros à 1 464 euros, lesalaire d’un opérateur était passé de1 082 euros à 1 515 euros. Nous avions ainsiperdu près de 40 % de pouvoir d’achat parrapport au SMIC alors même que la pro-ductivité augmentait. Avec un salaire mensuelde près de 393 500 euros, le PDG d’Unile-ver touchait lui 273 SMIC. » Le code du tra-vail peut ainsi permettre aux salariés de se sai-sir de leur appareil productif, de mieux lecomprendre.

Une société provençaleLa société met en avant son inscription dansl’espace provençal. Il s’agit ainsi de renoueravec un passé économique et industriel etde rappeler qu’historiquement les thés del’Éléphant sont nés à Marseille. La Sociétédes thés de l’Éléphant a été fondée en 1927par deux frères, Pétrus et Lazare Digonnetqui, dès 1892 s’étaient lancés dans l’impor-tation et la vente de thé sous le nom de Mai-son P. L. Digonnet et Cie, puis Établisse-ments Lazare Digonnet. C’est en 1975 que l’entreprise est rachetée parle groupe Unilever. En 1977 la marque Élé-phant est intégrée à Fralib (Française d’ali-

mentation et de boissons), filiale de la firmetransnationale. En rappelant le caractère pro-vençal de l’entreprise il s’agit moins dedéfendre une identité que de proposer unmodèle de développement économique qui,

Trois questions à...

L’US Mag : Quelle est la réalité des délocalisationsen France ? Le terme de délocalisation désigne les mécanismesde mobilité géographique des entreprises et ducapital. Les délocalisations ont d’abord affecté,dans les années 1960-1970, les métiers où la main-d’œuvre constituait une part importante du coût derevient (textile, habillement...), impactant lesrégions qui s’y étaient spécialisées (Champagne-Ardenne, Nord-Pas-de-Calais...), avant de s’étendrepar la suite aux services. Chronologiquement, lespays d’Afrique du Nord ont accueilli les premièresopérations délocalisées, suivis par l’Europe del’Est puis par les pays émergents notamment asia-tiques. Les délocalisations constituent donc unphénomène ancien et massif. Localisé à l’originedans certaines branches du secteur industriel, il estdésormais plus diffus et généralisé.L’US Mag : Comment lutter contre ce mouve-ment de délocalisation ? Nous sommes aujourd’hui dans une dynamiquetrès concurrentielle où les délocalisations ont prisune ampleur considérable. Quelques élémentspourraient à terme ralentir ce mouvement. D’abordla hausse des salaires dans les pays émergentspourrait modifier les schémas classiques de loca-lisation industrielle. Ensuite, la hausse du coût del’énergie, donc des transports, pourraient modifierla répartition mondiale des activités. D’ailleursnous constatons ces dernières années une aug-

mentation du nombre de relocalisations en France.Ceci étant, pour le moment les délocalisationsl’emportent très largement sur les relocalisationsqui restent épisodiques.L’US Mag : Les coopératives comme celles fondéesà Gémenos peuvent-elles constituer une alter-native à ces délocalisations ? Les formes coopératives apparaissent comme unesolution envisagée par les salariés d’entreprisesmenacées qui se heurtent aux questions de renta-bilité financière des banques et des actionnairesempêchant toute étude d’alternatives favorables àl’emploi et à la cohérence territoriale. Les socié-tés coopératives et participatives telles que laSCOP-TI des anciens salariés de Fralib mais aussiles sociétés coopératives d’intérêt collectif favo-risent l’ancrage et le maintien des sites de pro-duction en France. En 2014, on comptait enFrance 2 680 sociétés coopératives employantprès de 50 000 personnes et générant un chiffred’affaires de 4,4 milliards d’euros. Nous n’avonspas suffisamment de recul actuellement pour diresi les formes coopératives sont une alternativeaux délocalisations. Comme les autres entreprises,elles sont confrontées à la concurrence quis’exerce à l’échelle mondiale. Certains projetsaboutissent, d’autres pas, à l’image de ce quis’est passé pour l’horloger Lip. Peut-être fau-drait-il un soutien plus affirmé de la puissancepublique. n

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Dalila MessaoudiEnseignante à l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines,D. Messaoudi est spécialisée en géographie économique et industrielle.

Rubrique réalisée par Nicolas Sueur

Pot de thé contre pot de terreUnilever : multinationale anglo-néerlandaise fondée

en 1930 par la fusion de la compagnie néerlan-

daise de margarine Unie et du fabricant de savon

Lever Brothers. Les sièges sociaux sont situés à

Londres et à Rotterdam. Présente dans près de

100 pays, elle est la quatrième firme transnationale

sur le marché de l’agroalimentaire derrière Nestlé,

Pepsico et Mondelez International. L’entreprise

vend des boissons, des glaces, des produits d’en-

tretien du corps et de la maison. En 2013 la société

emploie 174 000 personnes pour un chiffre d’af-

faires de 49,8 milliards d’euros. Unilever possède

plus de 400 marques dans le monde, dont 13 ont un

chiffre d’affaires s’élevant à plus d’un milliard

d’euros et 8 à plus d’un demi-milliard d’euros.

Pour prolonger◗ Messaoudi D. (2016), « Les territoires français de l’automobile à l’épreuve des mutations des systèmes

productifs  » in Les territoires français à l’épreuve des mutations industrielles, Bulletin de l’Association

des Géographes Français, n° 2015-4, p. 495-510.

◗ Messaoudi D. (2014), « Les délocalisations industrielles dans les mutations des systèmes productifs

français », Revue Géographique de l’Est [en ligne], vol. 54/1-2| 2014, mis en ligne le 15 octobre 2014.

URL : http://rge.revues.org/5153.

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CULTURE L iv res/Revues

À LIRE

En direct des États-UnisJohn Lee Burke poursuit ses aven-tures via celles de Dave Robicheaux,policier de cette Louisiane rempliede fantômes et de racismes commed’assassins en série qui ont pour-tant pignon sur le Mississippi.Lumière du monde – une bien belledéfinition de la nature encore sau-vage – se déroule au Montana où lafamille de Dave est en vacances encompagnie de Clete Purcell et de safille Gretchen. Une sorte de passagede témoins déjà perceptible dans leprécédent, Créole Belle vers lesfilles, écrivaine et cinéaste. Une his-toire compliquée de familles avecce qu’il faut de meurtres pour héri-ter, de cruautés et de vengeances.Sans oublier le pédophile, le flicpourri jusqu’à la moelle et les insuf-fisances de la police qui se laisseberner par la puissance de l’argent.« Les hommes grands ne nous appa-raissent grands que parce que nousvivons à genoux » pourrait être undes résumés de ce roman plein debruits et de fureur pour retrouver lecontact avec la nature luxuriante.James Lee Burke tombe dansquelques pièges dus à son long com-pagnonnage avec Dave mais reste undes grands auteurs de notre temps. Ilsait mettre en scène la barbarie.Walter Mosley suit un autre che-min. Il est devenu l’auteur encensépar les présidents démocrates à par-

Le coin du polar

Ils sont onze : Kol le syndicaliste et Betty, Dylan,prof d’anglais et poète, Dorith et Muriel,joyeuses et déchirées à la fois, l’Enfant-loup, une

force de la nature, Suzana, infirmière en psychia-trie, Rousseau, le bel homme enseignant en éco-nomie, Hurel, industriel, lecteur de Marx et deKropotkine, Issac, distributeur de film, Victoria,l’artiste que personne n’attendait. Ils ont en com-mun de ne pas se soumettre à la société commeelle est, avec sa violence économique et ses injus-tices. Pour eux, tous les journalistes et éditorialistespayés pour conserver tous les privilèges des pos-sédants sont des ennemis.Alors, la vieille question se pose de nouveau : quefaire ? Constitués en « brigades du rire », par jeumais aussi pour vivre debout, ils kidnappent PierreRamut, l’éditorialiste vedette de Valeurs Fran-çaises. Mais, pour eux, il ne s’agit pas de repro-duire les vieilles recettes révolutionnaires qui ontfait long feu. Dans un bunker transformé en ate-lier, le chien de garde est installé devant une per-ceuse à colonne. Forcé de travailler selon ce qu’ilprescrit dans ces papiers hebdomadaires – semainede 48 heures, salaire de 20 % inférieur au SMIC,travail le dimanche – Ramut saura désormais de

quoi il parle... Gérard Mor-dillat nous a habitués depuisVive la sociale (éditionsMazarine, 1981), LesVivants et les morts (Cal-mann-Lévy, 2004) et Notrepart des ténèbres (Cal-mann-Lévy, 2008) à cesvastes fresques historiqueset sociales portées par unpuissant souffle critique. Ila l’art de plonger le lecteur dans sa narration trèsfluide et rythmée faite de multiples portraits auxchemins de vie complexes et attachants. Sonœuvre a, plus que les autres, une dimension socialeet politique salvatrice. Par le roman, Gérard Mor-dillat met à l’honneur le monde ouvrier et l’en-gagement contre les diktats du libéralisme et de sapensée dominante.La brigade du rire est une farce tragi-comiquequi nous parle du monde d’aujourd’hui, de sesinjustices, de ses luttes... un authentique roman dutemps. n Stéphane Rio• La Brigade du rire, de Gérard Mordillat. ÉditionsAlbin Michel, 2015.

tir de Bill Clinton. Il est passé dughetto de Los Angeles, Watts, àNew York pour des enquêtes d’undétective privé, Leonid McGill.En bout de course est la troisièmerencontre. Il sait décrire le nouvelenvironnement – New York resteun personnage à part entière – tout enfaisant la part belle aux affairesdomestiques sans oublier l’enquête.Le début ressemble à un de ceuxqu’affectionnait Chandler, le pèredes polars. Il faut le prendre non pascomme une facilité mais comme unhommage, une référence. Unefemme charge McGill de la protéger.Elle offre une somme colossalequ’il est obligé d’accepter... Uneembrouille forcément. Walter Mosley fait passer les insuffisancesde l’intrigue par le style, bien renduen français. La barbarie se fait doucemais elle est, néanmoins, très pré-sente. Comme chez Burke, lamusique – blues, jazz, country, rap...– est omniprésente.

Retour en France :l’âge du jazzClaude Izner change d’âge sanschanger d’espace. Paris, 1921. LaFrance se remet difficilement et de laguerre et de la grippe espagnole. Lejazz, cette musique venue d’ailleurs,sert de carte de visite à la nouvellegénération. Les musiciens de jazzarrivés dans les bagages de l’arméeaméricaine sont restés à Paris. Lescabarets s’orientent vers ces nou-

Notre sélection� LE COURAGE DE SURVIVRE

La Kinderzimmer accueillit lesbébés de déportées nés àRavensbrück de juin 1944 jus-qu’à la libération du camp.L’espoir s’accrochait à la vietandis que les femmes ten-taient de les sauver du froid etde la faim... Inspiré du témoi-gnage de M.-J. Chombart de

Lauwe, le roman décrit le quotidiendes détenues avec précision. Quand lecourage se nichait dans le moindregeste de solidarité, dans le maintien del’hygiène corporelle, dans la capacitéà rester debout, à se souvenir et àimaginer de belles choses… Un beaulivre mémoire. C. Pillé• Kinderzimmer, Valentine Goby, Actes Sud,2014, Prix des libraires 2014.

� LE PHŒNIX DE L’ANTISÉMITISMERomain Delorme — ainsi s’ap-pelle-t-il au début d’une his-toire non chronologique — estaussi Maxime Tillier, nom qu’ilprendra après des décou-vertes sur sa naissance, per-sonnage central de ce roman.Flic — on écrit flique à la fin

du XIXe —, agent secret, fils de gen-

darme il participe aux grands événe-ments de ce siècle pourrissant qui setermine par la Première Boucheriemondiale. Le récit commence là. Lenarrateur a 43 ans lorsqu’il s’engage.Il y découvrira l’imbécillité de l’anti-sémitisme. Manière de raconter, pourRoger Martin, cette période qui va dela Commune à la fin de l’affaire Drey-fus et à la mort de Zola, vraisembla-blement assassiné par ces antisémitesavec l’aide d’une partie de l’armée etde la police. Les anathèmes, lesinsultes, les annonces de l’anéantis-sement total de la soi-disant «  racejuive » se retrouveront tout au long del’histoire de cette France républicaine.Il met en scène le préfet Andrieux,père d’un certain Louis Aragon, faisantécho à la biographie de Philippe Forestparue aux éditions Gallimard. Delorme/Tillier meurt en 1940 au moment de lapromulgation par Pétain du décret surles Juifs les privant de droits et denationalité. Le cri du mourant « ça nefinira donc jamais  » est encore lenôtre… Oui, Il est des morts qu’il fautqu’on tue pour pouvoir faire vivre lafraternité. Nicolas Béniès • Il est des morts qu’il faut qu’on tue, RogerMartin, Cherche Midi, 2015, 540 p.

UN ROMAN DE NOTRE TEMPS

La lutte des classes en riant

veaux rythmes. La danse quitriomphe, le fox-trot, Le pas durenard, le titre de cette saga. Le per-sonnage central, le pianiste JimmyNelson, est à la recherche du secretde sa naissance. On se dit que Vic-tor Legris n’est pas très loin. Lesindices sont nombreux. Les lecteursde la série précédente les reconnaî-tront. Les autres se trouveront, à unmoment ou à un autre, obligés d’yaller voir. Comme d’habitude, lesdeux sœurs qui utilisent un pseudo-nyme unique, renseignent sur la vie,sur les livres, sur les lieux, sur Parisde l’époque. Une intrigue spécifiquedouble celle de la série. Le Mi-Ka-Do est le cabaret qui accueilleJimmy et une ribambelle de mortstouche la troupe réunie autour delui. Pourquoi ? Quel rapport avec ladisparition du financeur fou decinéma – l’autre anti-art en train deprendre de l’importance ? D’un seulcoup vous êtes transporté dans ceParis des années 20. Un seulreproche : la bande-son n’est pascomplète. n

Nicolas Béniès• Lumière du monde, James Lee Burke, tra-duit par Christophe Mercier, Rivages/Thril-ler ; En bout de course, Walter Mosley,traduit par Oristelle Bonis, Babel/ActesSud ; Le pas du renard, Claude Izner, 10/18.

Beaux livres, essais, polars,CD jazz, festivals, films... :

CRITIQUES SUR LE SITE

WWW.SNES.EDU

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Supplément au no 758 du 9 janvier 2016 - US MAGAZINE - 37

NOS COLLÈGUES ENREGISTRENT� UN PASSAGER CLANDESTIN ?Michel Fernandez, prof àLyon, est aussi saxo-phoniste. Il participe desprésents du jazz en sesituant dans la lignée deJohn Coltrane, commepresque tout le monde,mais aussi de John Tchicai — un mélangeCongo/Europe du Nord, le chaud et lefroid — et de l’afro beat de Fela Kuti. Ilvient à la fois de sortir un nouvel album,Passages, et de constituer un nouveauquartet : Linda Gallix au piano, FrançoisGallix à la contrebasse et Jack Pirastruà la batterie. Ils font la preuve quel’énergie, le plaisir de jouer, de créer dela musique ne font pas partie du passé.Ils et elle partagent cette intensité decette musique qui ne supporte pas la tié-deur. Un album réussi. Cerise sur legâteau, cet enregistrement est réalisépour un nouveau label, « Jazz in situRecords ». N. B.• Passages, Michel Fernandez quartet, Jazz insitu records, [email protected]

Le coin de la BD Histoire d’un lieu

Fantaisie débridéeFanny 11 ans, se réveille unmatin face à 2 adolescentsinconnus… ses parents ! Ellese plaignait de la Sixième,eux juraient qu’ils adore-raient y retourner : voilà leurvœu exaucé par magie.Ils réussissent à s’inscrireau collège et les « pseudo-cousins » sont admis dans la mêmeclasse que Fanny. Finis les petits secrets,finie la vie tranquille, ses parents semêlent de tout, apportent leur expé-rience et leur savoir, récoltant au pas-sage l’admiration des ados.Tout ça ne sera pas simple à vivre maisses (petits) parents sauront l’aider àmieux comprendre certains enfants etcertains adultes sans s’arrêter aux appa-rences. Un style alerte et bourré d’hu-mour dans la lignée des classiques dejeunesse. C. Pillé• Mes parents sont dans ma classe, L. Blanvil-lain, EDL, coll. Neuf, 2015.

FOR THE KIDS

En 2015, Chris Ware obtient le prix spécial dujury d’Angoulême pour Buildings Stories, unouvrage iconoclaste, une boîte contenant

14 albums, livres, journaux ou posters, dont le lecteurdoit choisir l’ordre de lecture afin de reconstituerl’histoire d’un immeuble de quelques étages à Chi-cago. Une machine à écrire, à raconter des histoires,à la manière de la Vie mode d’emploi de Pérec. En1989 Richard Mac Guire avait lui aussi travaillé surla mémoire d’un lieu avec la publication des six premières planches de Here dans le magazine Rawd’Art Spiegelman. Vingt-cinq ans plus tard, le projetse déploie sur plus de trois cents pages. L’album Ici rend compte du même espace sur des cen-taines d’années de 3 000 000 avant J. C. à 2314. En304 dates, on assiste à l’évolution d’une maison amé-ricaine : la maison de Perth Amboy dans le New Jerseyoù l’auteur a vécu enfant. De la préhistoire à 1907, datede la construction de la maison, en passant par 1609 oùun couple d’Indiens se retrouve pour faire l’amour, l’au-teur multiplie les allers-retours dans le temps. Si l’es-sentiel des scènes se passent entre 1957, date de nais-sance de Mac Guire, et aujourd’hui, l’album surprendégalement par l’évocation elliptique d’un futur marquépar des catastrophes écologiques. Chaque double pagedatée dans un cartouche en haut à gauche retrace l’his-toire d’un coin de salon délimité par une fenêtre et unecheminée. Au cœur de chacune d’entre elles, desvignettes surgissent à la manière des fenêtres d’unécran d’ordinateur, en dessins au crayon, en aquarelleset en collages. Ce sont des images d’une autre époque

qui lui font écho. Êtresvieillissants, mères à l’en-fant, scènes de dispute,jeux, soirées dansantes,photos de famille et sapinsde Noël se superposent.À la manière de Proust,un son, un geste, un moten appelle un autre et rapproche les espaces temporels.Les scènes du quotidien entrent en résonance avec ten-dresse et dérision. Mais dans un double mouvement,cette histoire d’un lieu met également à distance lesévénements à travers l’humour et les nombreux traitsd’esprit qui émaillent l’œuvre : le récit d’une blaguesur la mort s’achève par l’infarctus d’un des person-nages, un Indien qui évoque l’histoire d’un monstredes origines voisine avec un enfant de 1975 déguiséen ours. L’utilisation analogique des images crée unlangage poétique et invite à la relecture. La linéaritéde l’histoire est brisée et enrichie par ces pages quidonnent à voir plusieurs choses en même temps. Lelecteur lève un à un les voiles et de la froideur deslumières à la Hopper naît une subtile émotion. Cettefemme lumineuse et fantomatique de 1957 qui encadrele récit à la recherche d’un livre ou d’une mysté-rieuse idée n’apparaît-elle pas à la fois comme lamétaphore de la démarche de l’artiste et l’imageretrouvée de la mère ? n Stéphanie Marco• Ici, de Richard Mac Guire, Gallimard, 2015.

UN CONCOURS, UN OSCAR POTENTIEL. TAVERNIER, DIMANCHE À LA CAMPAGNE

Redécouverte d’un grand cinéaste

UNE RÉFLEXION NÉCESSAIREPascal Ory, en historien, veut,à son tour, tirer les ensei -gnements du 7 janvier 2015. Ilavait, sans doute, terminé sonlivre au moment des attentats denovembre, en conséquenceCe que dit Charlie ne prend pas

en compte cette nouvelle dimension de la barbaried’un monde qui ne se comprend plus. Il proposeTreize leçons d’histoire avec des entrées comme«  Sidération  », «  Religion  », «  Laïcité  », «  Ter-rorisme  » pour terminer sur «  Le principe d’in-certitude  » une des données fondamentales denos sociétés. Il aborde aussi cette permanencede l’antisémitisme dont la société française n’ar-rive pas à se débarrasser… Visiblement écrit unpeu trop rapidement, il donne des éléments d’ap-préciation pour prendre du recul. Il ouvre aussides controverses. C’est son intérêt. Il ne faudraitpas le laisser sans réponse… N. B.• Ce que dit Charlie. Treize leçons d’histoire, Le Débat/Gallimard.

Si vous avez le malheur de lirela page 4 de couverturecomme on le fait habituelle-

ment pour avoir une idée du livre,vous passerez à côté d’un de cesouvrages coupables de vous fairedécouvrir une nouvelle lectured’une œuvre d’art mêlant adroi-tement peinture et cinéma, passé etprésent. Cette page présente lacollection « Clefs concours »comme des ouvrages liés à la pré-paration des concours de l’Édu-cation nationale !En fait, cet ouvrage de ThomasPillard, Tavernier, Un dimancheà la campagne, est un voyagedans le monde de Bernard Taver-nier et une thèse sur ce film tournéen 1983. Ces années 1980 sontdes années de désenchantementdans lesquelles le post-moder-nisme triomphe. Il va de pair avecle libéralisme et cherche à com-battre l’idée même d’avant-gardeen art. Un dimanche à la cam-pagne est à la fois une réaction etune interrogation sur la moder-nité. En même temps, le contextedu film est celui de la fin du XIXe,

manière aussi de sesituer dans notre pré-sent via ce vieuxpeintre à la recherchedu temps perdu, passéà côté de l’impres-sionnisme. L’auteurse sert aussi de la bio-graphie de Tavernierlié par toutes sesfibres à Lyon pourexpliquer l’espaceutilisé. Par un processus logique, ThomasPillard est à la fois historien, ana-lyste des tendances des arts, ciné-phile pour rendre compte de cefilm qui fut mal reçu et mal com-pris. Cette fin du XIXe fait ladémonstration d’une interpénétra-tion de tous les arts. Proust, Bau-delaire, Mallarmé, Fauré pratiquentles échanges féconds entre passé etprésent. Une manière aussi de lut-ter contre la pression de ces années1980 de reconstruire le passé pourjustifier le présent. Le travail demémoire est nécessaire. Les tracesdu XIXe restent présentes dans laFrance d’aujourd’hui. Le film est

vu ici comme une« composition conti -nue » chère à Wagnerpermettant de renou-veler notre regard surce film. Beaucoupd’autres entrées sontproposées obligeant àaller voir ou revoir cefilm. Le désarroi deLadmiral devant laphotographie indiquetous les blocages

devant les transformations de lasociété qui remettent en causetoutes les positions acquises.Ce livre est complété par des docu-ments dont le scénario écrit en col-laboration par Bertrand et ColoTavernier, le dossier de presse, lesréactions des critiques et... descartes postales. Il démontre queBertrand Tavernier est un« cinéaste inclassable ». Enfin, aulieu de lire la page 4 de couverture,lisez plutôt la préface de BertrandTavernier... n Nicolas Béniès• Tavernier. Un dimanche à la cam-pagne, Thomas Pillard, collectionClefs concours, Atlande, 351 p.

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CINÉMAUne grande artiste

Janis Joplin compte parmices rares artistes mythiquesqui ont traversé les époquesmusicales sans jamais rienperdre de leur prestige,sans que jamais leur talentsingulier ne soit terni. Ellereste unique. Le film

d’Amy J. Berg retrace, dans uneconstruction remarquable, le par-cours mouvementé et passionnantde cette personnalité hors du com-mun, une femme à la fois puissante,sensible et vulnérable.La qualité première de ce docu-mentaire est de laisser une part demystère planer sur le personnage.Elle apparaît ici dans toutes sescontradictions, comme une artisteextravertie à l’apparence souventtapageuse et provocatrice. Maisaussi comme une personne peusûre d’elle, de sa beauté, de soncharme, voire de son talent. Yavait-il, au-delà de sa notoriété,l’attente d’une autre forme dereconnaissance pour lutter contreun doute persistant, les traces d’uneadolescence douloureuse ? Unmagnifique portrait de l’artiste, sen-sible et flamboyant. n F. D.• Janis, un film d’Amy J. Berg (USA).

SÉRIELuther, série « détente »Luther, policier londonien, a desintuitions fulgurantes et des pul-

sions violentes. Souvent prisau piège d’adversaires retors,il résout les enquêtes enmarge de la loi tout en pro-tégeant les plus faibles.I. Elba incarne ce person-nage têtu et tendre qui se

dévoue entièrement à son travail. Illui confère par sa carrure et son élé-gance un charisme rare, confortépar le style soigné de la série. Àsavourer sans modération. n

C. Pillé• Série créée par N. Cross, BBC 1.

RADIOAffaires sensiblesFabrice Drouelle possède d’incon-testables talents de conteur, et unevoix envoûtante autant que mysté-rieuse ; il raconte donc, au fil deces « affaires », des faits non éluci-dés ou volontairement tus de pansentiers de notre histoire commune(sombres faits divers, événementsdramatiques, secrets d’État), et nousaide ainsi à décrypter et révéler lessecrets du présent. Le narrateur mêleà son récit des témoignages inédits,des documents d’archives (INA) etnous plonge dans un récit qui s’ap-parente à une enquête policière...Passionnant. nVéronique Ponvert• Du lundi au vendredi, de 15 heures à16 heures, France inter.

MUSIQUE• CLASSIQUELe Quatuor d’ItalieDeux violons, unalto, un violoncelle :le quatuor à cordesest sans doute laforme la plus pure dela musique et ceux de Beethovensont assurément un des sommets dugenre. Le Quartetto Italiano, fondéen 1945 et dissous en 1980, en adonné une interprétation inégalée :ample, rayonnante, généreuse, d’uneabsolue sensibilité – qu’on pense au3e mouvement du quatuor n° 15 –,elle ne peut que laisser interdit qui

entend cette musique pour la pre-mière fois. Decca vient d’éditer l’in-tégrale des enregistrements du Quar-tetto Italiano. L’occasion de seplonger dans l’univers des quatuorsde Beethoven, mais aussi de Haydn,Mozart, Schubert, Brahms, Ravel,Webern et tant d’autres, magnifiéspar ces interprètes prodigieux...Par ailleurs, la Biennale des qua-tuors à cordes se tient du 15 au24 janvier, à la Philharmonie deParis. Sera notamment interprétéel’intégrale des quinze quatuors deChostakovitch. n Nicolas Morvan• Quartetto Italiano, Complete Decca,Philips & DG Recordings.

• ROCKNouvelle étoileUrbain, expérimental,riche, éblouissant,Blackstar. Bowie aconstruit sur ses an -goisses métaphysiques et religieuses– références à l’étoile noire Saturne,associée à la vieillesse ou à Lazare etdonc à la mort – un album, sorti le8 janvier. Rétrospectivement, ilannonce la mort de l’artiste. Il a étéenregistré avec un Quartet Jazznew yorkais influent qui confère àcette dernière 26e constellation un sontrès chaleureux aux accents avant-gardistes loin de l’album paru en2013. Bowie, c’était sans doute sonobjectif, laisse un grand vide dans lacréation actuelle. n Éric Loizeau• Blackstar, David Bowie, Sony.

• JAZZTriple anniversaireC’est l’hiver ! Le jazz prend sesquartiers dans le Val-de-Marne. Lefestival « Sons d’hiver » fêteson 25e anniversaire en invitantMichel Portal, qui, lui soufflera80 bougies. Beaucoup d’invités :

Muhal RichardAbrams, pianistee t f o n d a t e u rd e l ’ A A C M , Bernard Lubat,Daniel Humair,Tony Malaby,Louis Sclavis, leduo Hasse Poul-s e n / H é l è n eLaba r r i è r e e tTony Allen quirend hommage à Art Blakey. Destables rondes : « Tambours-Confé-rences », le développement d’unprojet coopératif et une réflexionde Raphaël Imbert sur « Musiqueet spiritualité » complètent ce festival. n Nicolas Béniès• Jusqu’au 21 février. Renseignements :01 46 87 31 31, www.sonsdhiver.org.

THÉÂTREThéâtre et mondialisationSur notre monde, où les valeurs néo-libérales ne dominent pas seulementles entreprises mais irriguent toute lasociété, que nous dit le théâtre ?• Comment on freine de ViolaineSchwartz met en relation, à traversl’exemple du vêtement, la produc-tion dans des ateliers du bout dumonde où trime un prolétariat sous-payé et notre dépendance à laconsommation.• La boucherie de Job de l’ItalienFaust Paravidino met en scène l’op-position d’un honnête boucher etde son fils qui veut redresser l’en-treprise avec des méthodes libéralesqui font peu de cas de l’humain.• Sous la glace de Falk Richter nousinterpelle sur le culte de la compéti-tivité à travers le cas de trois consul-tants. n Micheline Rousselet• Théâtre de la Commune, Aubervil-liers, jusqu’au 31 janvier.

CULTURE Cinéma/Théât re/Spectac leJE SUIS LE PEUPLE, UN FILM D’ANNA ROUSSILLON (FRANCE-ÉGYPTE)

Au creux d’une révolutionA

lors que la révolution éclate place Tahrir au Caire, les habitantsdes campagnes suivent le cours des événements sur leurs écransde télévision. Du renversement de Moubarak à l’élection et la

chute de Morsi, le film retrace ces bouleversements du point de vuede Farraj, un paysan de la vallée de Louxor, de ses proches et dequelques-uns de ses voisins.Anna Roussillon, dont Je suis le peuple est le premier long-métrage,a grandi en Égypte. Agrégée d’arabe, elle se partage entre Paris, l’Égypte et Lyon où elle enseigne. En 2009, au cours d’un de sesséjours en Égypte, elle rencontre Farraj dans le champ où il travaille.Il a sa pioche à la main et elle, sa caméra. En 2011, elle décide de réa-liser un film avec lui. Le projet est flou mais le sujet pourrait bien êtrede montrer un village qui est, pour ses habitants, le centre du monde,alors que tout le désigne comme une marge de la société.Lorsque la révolution éclate, un choix se pose pour elle : restera-t-elle auvillage où rien ne bouge ou bien se rendra-t-elle au Caire au sein de l’écla-tement révolutionnaire ? Anna Roussillon opte pour le village et il

résulte de son choix un film qui répond avechumour, spontanéité et un réjouissant plaisirde vivre, à la question : « Comment se trans-met une onde de choc faite de tensions, d’af-frontements, de revendication, d’espoir, decolère quand autour de soi, rien ne bouge ? ».Comment vit-on une révolution « en creux »quand les seuls changements immédiatssont, pour les ruraux, les pannes d’électri-cité ou la pénurie de bonbonnes de gaz ?Je suis le peuple s’attache au déroulementdu quotidien laborieux, aux travaux des champs, à la vie d’unefamille. Au gré des conversations, il donne lieu à des analysessimples et pleines de bon sens des événements, devient un contre-champ nécessaire à la place Tahrir. Comme jamais, la télévision, omniprésente, joue son rôle de fenêtre ouverte sur le monde. Passionnant, savoureux et grave. n Francis Dubois

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Faire vivre les revues pour faire vivre la réflexion

Une revue historiqueLe Mouvement social est la plusvieille revue consacrée à l’histoire dumouvement ouvrier et du travailsocial. Ce n° 253 se partage en troisdossiers. Le premier sur le désen-clavement de l’histoire de la psy-chiatrie via une étude sur les fousdans l’armée française et une autresur les conséquences de la construction duMur de Berlin. Le deuxième sur une histoiretransnationale du travail social et de la for-mation, et le troisième sur les limites d’unimpérialisme culturel, celui du théâtre fran-çais dans l’Europe de Napoléon.Nicolas Béniès• Le Mouvement social, oct.-déc. 2015, La Découverte.

MUSIQUEDenez, un touche à toutes les musiquesLa dernière fois que nous avons parléde ce musicien, il vivait dans un envi-ronnement acoustique, pour ce nou-vel opus, «  Remix  », il a décidé dechanger d’atmosphère. Le hip-hop,l’électronique par la collaborationavec le « metteur en ondes », James Digger qui,lui-même lui conseilla une collaboration avec lerappeur Masta Ace. Le résultat, cet album deDenez, un album résolument inscrit dans letemps présent. N. B.• Remix, album de 4 titres en complément de la sor-

tie d’un coffret chez Coop Breizh. Denez est en tour-

née dans toute la France.

Cinémathèque FrançaiseERRATUM : dans les deux pages de L’US Mag dedécembre consacrées à cette institution, l’en-tretien avec Serge Toubiana a été fortementréduit et une malencontreuse coquille a attribuéle nom de « July » et non « Daney » à son pré-décesseur à la direction des « Cahiers ducinéma ». L’intégralité de cet entretien inédit estsur le site  www.snes.edu/Serge-TOUBIANA-entretien-avec-le-directeur-de-la-Cinematheque-Francaise.html.

• Nomination : le CA de la Cinémathèque Fran-çaise, présidé par Costa-Gavras, a désigné Fré-déric Bonnaud, autre homme de médias et pas-sionné de cinéma, directeur des Inrocks (et àl’occasion animateur de débats passionnantssur le site de Mediapart), pour prendre la suitede Serge Toubiana à la direction générale àcompter du 1er janvier 2016. P. L.

Supplément au no 758 du 9 janvier 2016 - US MAGAZINE - 39

Suivre l’actualité culturelle sur

www.snes.eduLes pages culture de ce magazine sont complétéeschaque semaine par de nombreux nouveaux articlessur www.snes.edu/-Culture-.html. Une dizaine derubriques à consulter, parmi lesquelles sont le plusfréquemment actualisées : cinéma, théâtre, musique,arts plastiques, rencontres et débats, festivals,livres et créations de collègues... Est accessible enpermanence la liste de la centaine de lieux culturelset festivals partenaires « Réduc’SNES » (tarif réduitsur réservation et présentation de la carte SNES)dans toute la France... Chacun peut solliciter des lieuxou festivals qui ne seraient pas partenaires pourqu’ils le deviennent, et nous en informer...

[email protected]

L’US Mag : Depuis sa création en 1984,le salon a connu un fort développement.Quel rôle ont joué les enseignants dans sonsuccès ?S. V. : Les enseignants ont joué un rôle trèsactif pour que la littérature jeunesse soitreconnue et pour mettre les enfants à soncontact. Y compris individuellement lorsqueles instructions officielles sont devenuesmoins claires. La préparation des rencontresavec les auteurs et les illustrateurs se fait surl’année entière, surtout en maternelle et enélémentaire. Cela fait des enseignants lescomplices et les partenaires du salon. Il y aaujourd’hui un effet « de génération », lesjeunes enseignants qui ont été « biberonnés »à la littérature de jeunesse la transmettentnaturellement.L’US Mag : Existe-t-il un partenariat entre l’Éducation nationale et le SLPJ ?S. V. : Nous avons deux sortes de partena-riats avec l’EN. Un partenariat nationalréduit financièrement et un partenariat avecla direction départementale de l’EN enSeine-Saint-Denis pour faire circuler desmalles de livres et former les enseignants àla littérature jeunesse. Nous cherchons àles aider à articuler au mieux l’aspect péda-gogique de la littérature jeunesse avec l’as-pect lecture plaisir.L’US Mag : Le salon accueillait surtout desenfants de maternelle et élémentaire...S. V. : Depuis environ deux ans, les collé-giens de Seine-Saint-Denis sont devenusnotre public majoritaire, surtout les Sixième-Cinquième. L’opération « Culture et art aucollège » menée avec le département, permetde procurer aux élèves une vraie éducationartistique autour d’un auteur ou d’un illus-trateur en 40 heures pendant le temps scolaire.

L’US Mag : Vous parlez de la littérature jeu-nesse comme du « 10e art » ?S. V. : C’est une façon un peu provocatricede porter le débat sur ses qualités artistiqueset littéraires. Il y a encore un manque dereconnaissance des auteurs et illustrateursjeunesse. Les enfants forment un public par-ticulier qu’il faut prendre très au sérieux ! Lacomplémentarité de l’image et du texte dansles albums par exemple est une véritableécriture narrative et permet de développerdes espaces imaginaires incroyables...L’US Mag : Qu’est-ce qui vous a incitée àmaintenir la tenue du salon malgré les condi-tions particulières de cette année ?S. V. : C’est un moment précieux pour lesenfants, les jeunes et les familles qui ren-contrent le livre vivant à travers les auteurs etles illustrateurs, un moment qui suscite unvéritable intérêt, une véritable attente. Lesattentats auraient pu nous pousser à nousreplier sur nous-mêmes. Il faut au contraireêtre ensemble, continuer à rêver, trouver lesmots pour comprendre ce qui nous arrive !Pour cela, 60 éditeurs se sont associés pourpublier Eux, c’est nous, un livret contenant untexte de D. Pennac et un texte documentaireexpliquant aux jeunes qui sont les réfugiés.Un livre qui peut aider les enseignants. n

Propos recueillis par Catie Pillé• Renseignements sur http://slpj.fr

ENTRETIEN AVEC SYLVIE VASSALLO, DIRECTRICE DU SALON DU LIVRE ET DE LA PRESSE JEUNESSE

Littérature jeunesse, le 10e art !

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Évidemment, on hésite : le spectacle dureplus de 4 heures, c’est un « temps long »auquel le spectateur n’est plus habitué ;

le sujet est ardu : la révolution française et lalente élaboration de la République. Sans par-ler du décor – nu, austère, fait de murs noirs etde quelques chaises –, de l’action – dense,intense mais quasiment entièrement consti-tuée d’échanges verbaux... – J. Pommerat nechoisit pas la facilité. Pour autant, dès les pre-miers instants, le spectateur est happé par ce quirestera une expérience théâtrale inédite : lesacteurs, disséminés dans la salle, se mêlent aupublic qui, de fait, vit en direct les débats desétats généraux, se prend pour tel député, semet à applaudir à telle proposition de loi…On s’y croit. Louis XVI et la Reine, le TiersÉtat, la Noblesse posent un décor daté quinous renvoie pourtant un effet miroir : l’ac-tualité des débats est saisissante, et leur com-plexité (sur les libertés, notamment, écho à

l’état d’urgence) n’est pas esquivée, mais ren-due au contraire à travers la violence et l’âpretédes échanges. C’est un spectacle éblouissant,par la maîtrise totale de sa mise en scène etl’énergie qui s’en dégage. Quant au public, ilest bien plus que spectateur : il prend une partactive à la pièce qui se joue. C’est un grandmoment de théâtre. n Véronique Ponvert• Ça ira (1). Fin de Louis, Joël Pommerat, CompagnieLouis Brouillard.

Prendre le pouvoir !

Hommage en forme d’espoirTignous, né en 1957, caricaturiste engagé

est mort le 7 janvier 2015. Ses dessins

donnaient l’image d’une société éclatée,

injuste, violente partagée entre les très

pauvres et les très riches. Les écarts de

revenus n’ont jamais été aussi impor-

tants qu’aujourd’hui. Il nous le dit dans ces

deux petits ouvrages tout en ouvrant la

porte à l’espoir d’un autre monde. Avec ce

qu’il faut d’ironie et d’humour. N. B.• Tas de riches, Tas de pauvres, Tignous, Folio/Gallimard.

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DROITS ET LIBERTÉSViolencesi

Passage à l’acteL’attaque de pompiers à Ajaccio a pro-voqué des réactions racistes en Corse,et entre autres, la mise à sac d’unesalle de prière. Ces violences ne peu-vent être tolérées et ne doivent pasengendrer un climat de racisme et desuspicion générale sur l’île.Les autorités ne doivent pas donneraux auteurs de sentiment d’impunité.De ce point de vue, la réaction du pré-fet de Corse, qui a reçu les organisa-teurs des manifestations racistes, n’estpas de très bon augure. Partout enFrance, de tels actes risquent de sereproduire, en Corse comme ailleurs.

Ni sexisme ni racisme !De nombreuses violences sexistes onteu lieu le 31 décembre dernier sur laplace principale de Cologne. Réactionde la maire de Cologne : donner desconseils aux femmes pour éviter queles événements se reproduisent ! Nousn’avons pas besoin de règles de com-portement pour les femmes, ce sontles auteurs des faits qui doivent rendredes comptes. Ce ne sont pas lesfemmes qui portent la responsabilitéde ces agressions. Le SNES-FSU sou-tient les mouvements féministes alle-mands qui ont manifesté pour refuserle sexisme comme le racisme.

Antisémitismei

Agression à MarseilleLundi 11 janvier, un enseignant d’uneécole juive de Marseille a été agressé,parce qu’il marchait dans les rues dela ville, sa kippa sur la tête. Un jeunel’a attaqué à coups de machette, uni-quement parce qu’il était juif. Il fautcondamner, refuser, tous les racismes– ici l’antisémitisme – qui hélas aujour-d’hui s’expriment de plus en plusouvertement et de plus en plus vio-lemment. L’école doit jouer tout sonrôle d’éducation et retransmettre lesvaleurs d’égalité et de tolérance quisont les nôtres.

Condamnationi

Salariés de Goodyear :9 mois fermes !Pour la première fois depuis 2003 – etla condamnation à 10 mois fermesde José Bové – une peine de prisonferme vient d’être prononcée dans lecadre d’un conflit social : celui des«  Goodyear  ». Il s’agit bien d’unepeine politique : le procureur a main-tenu les poursuites, alors même queles cadres de l’entreprise, retenusdans l’entreprise pendant une nuit,avaient retiré leurs plaintes. Ce mêmeprocureur avait requis des peines dedeux ans dont dix mois ferme.

Le ministère a lancé la der-nière semaine avant lesvacances de décembre une

campagne de lutte contre lesLGBTphobies. L’affiche estintéressante, interrogeant lesquestions de genre et d’orien-tation sexuelle. Le guide d’ac-compagnement rappelle lesenjeux de la campagne etdonne des pistes d’exploita-tion pédagogique pour les per-sonnels. Un guide spécifiquesur le harcèlement à caractèreLGBTphobe a (enfin) été pro-duit. Une déclinaison spéci-fique pour le supérieur est éga-lement sortie pour lesétudiant-es et les personnelsdes universités.

Cachez ce genre que je ne saurais voir ?Il reste que l’intitulé de la campagne, réduit à« homophobie », interroge fortement, alors quel’objectif décrit est bien de lutter contre l’homo-phobie, mais aussi la lesbophobie, la biphobie, latransphobie et leurs spécificités. Les références ne

sont pas complètes, loin s’enfaut. Les questions d’identitéde genre et de transphobie sontmal définies et (mal)traitées,comme si le ministère avaitpeur de ces questions. Il estaussi vraiment regrettable quecette campagne soit sortie àcette date, peu judicieuse,notamment pour que leséquipes l’intègrent dans le pro-gramme annuel d’éducation àla citoyenneté de l’établis -sement.

Un enjeu importantAlors que les enquêtes citéesdans la campagne rappellentbien les conséquences desLGBTphobies sur la santé et

la réussite scolaire des jeunes, LGBT ou non(les LGBTphobies touchent tous les élèves), leSNES-FSU appelle les personnels à s’emparerde cette campagne, à veiller à son affichage effec-tif, et à ce que ces questions soient traitées dansles établissements. n

Olivier Lelarge

En Normandie et en Bretagne, les départe-ments et les DASEN prévoient des ferme-tures de collèges (6 en tout) pour la rentrée

2016. Si les économies budgétaires sont l’argu-ment premier, ce n'est sans doute pas un hasardque ces fermetures se situent dans des zones deforte influence de l'enseignement privé catho-lique.

Le collège Montaigne à VannesDans le Morbihan il faut des années de bataillespour ouvrir un établissement public et laïquemais quelques mois seulement au conseil dépar-temental et à la DASEN 56 pour fermer un col-lège de 213 élèves !Situé dans des quartiers populaires de Vannessud, ce collège de proximité remplit pleinementsa mission de service public et obtient des résul-tats satisfaisants. Classé REP, ce maillon indis-pensable du réseau scolaire public est au centred'un dispositif de soutien aux élèves en diffi-culté avec une ULIS et une SEGPA. Les passe-relles d'un dispositif à l'autre sont très appré-ciées des parents. Le conseil départemental et la DASEN justi-fient leur décision par la baisse des effectifs et

l'absence de mixité sociale, et stigmatisent ainsiles familles modestes.  L’absence de politiquede la ville a favorisé la baisse démographiquedans ces quartiers. Cette fermeture engendrera inévitablement dessurcoûts pour les familles modestes qui devrontdésormais assumer transports et demi-pensiondans un collège plus éloigné et fragilisera encoreplus l’ensemble du réseau public d’éducation,pourtant déjà minoritaire sur Vannes, avec seu-lement deux collèges publics pour quatre collègesprivés (trois catholiques + Diwan).Le SNES-FSU au sein d’un collectif constitué deparents, de syndicats, d'associations et de poli-tiques se bat depuis plusieurs mois pour le main-tien de ce collège : manifestation, pétitions,audiences, interpellation de la ministre, cour-riers des parlementaires...Le CA du collège et le CDEN ont déjà voté à unetrès large majorité (80 %) POUR le maintien ducollège mais il y a tout à craindre que ces deuxavis ne suffiront pas et que ce collège publicsoit sacrifié sur l’autel des politiques publiquesde restriction budgétaire ! n

Michel Galin avec le S2 du morbihan

FERMETURE DE COLLÈGES DANS L'OUEST

La laïcité remise en cause

CAMPAGNE «  L’HOMOPHOBIE N’A PAS SA PLACE À L’ÉCOLE »

Mieux vaut tard que jamais

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DANS LA CLASSE

Supplément au no 758 du 9 janvier 2016 - US MAGAZINE - 41

DonnéesiLes textes de référence :◗ Une séquence d’observationest insérée dans l’emploi dutemps de l’année scolaire pourtous les élèves des classesde Troisième, en applicationdes dispositions de l’articleD. 332-14 du code de l’éducation. • Article D. 332-14 du code del’éducation [article 8 du décretdu 24 août 2005 relatif auxdispositifs d’aide et de soutienpour la réussite des élèvesau collège].• Articles D. 331-1 et suivantsdu code de l’éducation [décretn° 2003-812 du 26/08/2003  relatifaux modalités d’accueil en milieuprofessionnel d’élèves mineursde moins de seize ans].

Chiffrei

700 000 à 800 000C’est le nombre d’élèves deTroisième qui partent chaqueannée en stage de découverteen milieu professionnel, soitla moitié de l’effectif.

42 %Des stages ont lieu avantles vacances de Noël(statistique du Conseilnational éducation-économie).Les mauvaises languesdiront que les commerçantsaccueillent les élèves pouremballer les cadeaux...

OrientationiNe pas se tromper d’objectifs !La manière discriminante dontles élèves trouvent ou non un lieude stage et la possibilité qu’ilait un lien avec leurs souhaitsconduit à relativiser l’idée quece stage servirait avant toutà tester son projet d’orientation.La question n’est-elle pasdavantage de permettre auxélèves de s’interroger sur laréalité du quotidien de ceuxqui travaillent, de la complexitéde leurs activités etd’appréhender comment lesproblèmes professionnels sontrésolus ? Ceci suppose unepréparation et une exploitationqui ne se centrent pas seulementsur le cadre du travail mais sur son contenu. C’est en cela queles CO-Psy peuvent y contribuer.

STAGE D’OBSERVATION EN TROISIÈME

Découvrir le milieu professionnelL

es élèves de Troisième doiventaccomplir un stage qui prend laforme d’une séquence d’ob-

servation en milieu professionnelde cinq jours. Il est intégré au« parcours avenir ».Une convention définit les condi-tions du stage  : les élèves sontencadrés par un adulte (qui n’apas de formation dédiée à cetaccueil) et peuvent participer àdes activités mais celles-ci nedoivent pas être dangereuses(machines ou produits) ou êtreun travail productif. Le stage peutainsi se révéler plus ou moinsintéressant si les élèves sont can-tonnés à un seul rôle d’observa-tion ou relégués à des tâchesrépétitives (rangement du stock,archivages de dossier...). Heu-reusement certains stages sontstimulants et cela dépend beau-coup de la disponibilité du tuteur.Une fois le stage achevé, lesélèves doivent rendre un dossierqui sera évalué.L’intérêt du stage est de permettred’approcher le milieu profession-nel et de pouvoir constater, notam-ment pour les élèves qui vontdemander une orientation en lycéeprofessionnel, si le métier corres-pond bien à l’image qu’ils s’enfont, ou d’explorer un secteur pro-fessionnel. C’est en tout cas l’ob-jectif qui lui est assigné. Pourtant

« ennui », « piston » et « près dechez moi » sont les mots clés quel’on retrouve sur les forums d’adossur internet(1) aux côtés de rares« génial », « ça m’a vraiment plu ».

Une expérience de qualitéObtenir un stage de qualité dans undomaine qui les intéresse est dif-ficile pour les élèves. Certains sec-teurs professionnels n’accueillentpas d’élèves (crèches, hôpitaux)ou uniquement des élèves plusâgés des séries technologiques ouprofessionnelle. Il existe une inéga-lité d’accès à ces stages selon lemilieu social ou le territoire quin’offre pas les mêmes opportuni-tés. La plupart des élèves trouventun lieu de stage par le biais duréseau familial ou amical et ceuxvenant des milieux populaires ouayant des origines étrangères ont

plus de difficultés à obtenir desstages intéressants. Ce constatmobilise les équipes enseignantescomme dans l’initiative « viensvoir mon taf »(2) de Romain-ville (93) et souvent par la consti-tution de banques de stages pourles élèves sur le carreau. La réali-sation du dossier est individuelle,se fait le plus souvent à la maisonce qui participe de ces inégalités.Malgré tout ce stage est le plussouvent plébiscité par 84 % desélèves selon le CNEE (Conseilnational éducation-économie) caril est un passage symbolique versplus d’autonomie. Pour être plusprofitable, il faudrait plus d’équitédans l’accès aux stages, unmeilleur accompagnement. n

(1) www.goog.gl/DZLjLO(2) www.viensvoirmontaf.fr

TÉMOIGNAGE

« une première expérience positive »Olivier David, professeur d’histoire-géographie et professeur principal de Troisièmedu collège du Réseau d’Éducation Prioritaire Fernand-Léger du Petit-Quevilly (76).

Quel est l’intérêt du stage de Troisième pour les élèves ?Le premier atout du stage est la sortie du quotidien parents-col-lège. Se confronter à un autre rythme, appréhender lescontraintes du monde du travail (les horaires, par exemple) aaussi de l’importance. Par ce biais, l’orientation est travailléeà travers le choix des métiers. Ce stage permet en outre demodifier singulièrement la représentation un peu « bisou-nours » qu’ils ont du salariat. Comment les élèves choisissent-ils leur stage ?On peut déplorer que le choix du stage se fasse trop rarementpar rapport à leurs idées d’orientation. Beaucoup le font parrapport à la proximité géographique de l’entreprise ou du ser-vice qui les accueille ou bien dans l’univers professionnel dela famille (entreprise familiale, service ou société qui salarieun proche).Des contraintes s’exercent malgré eux : les problèmes desécurité (police) ou de confidentialité (industrie) ou d’âge quifont que l’accueil n’a pas pu se faire.

Le choix des stages est-il socialement marqué(fonction du milieu socioprofessionnel parental) ?Les entreprises dans lesquelles ils effectuent leur stage sont sur-tout des commerces et des services proches. Les plus perspi-caces décrochent malgré tout des stages dans des grossessociétés ou des grandes administrations.Quel est l’impact de ce stage pour l’équipe éducative ?C’est un énorme travail pour toute l’équipe pédagogique. Leconseiller principal d’éducation et le professeur principal doi-vent surtout veiller à ce qu’aucun élève ne reste sans stage. Parailleurs, les résultats sont souvent à prendre avec humilité et nepermettent pas à l’équipe d’en tirer de réels enseignements. Pasplus pour les élèves d’ailleurs, qui se découvrent rarement desvocations à l’issue de leur stage. Généralement leurs impres-sions sur leur orientation future ne sont guère modifiées.Pour autant cette première expérience est jugée positivementpar une grande majorité d’élèves. Preuve en est, certains gar-dent d’excellents contacts avec l’entreprise et son personnel. n

Rubrique réalisée par Clément Lefèvre et Fabienne Sentex

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au mode de scrutin majoritaire à deux toursqui nécessite de passer des alliances. Enl’état actuel des choses, il me semble queça rend extrêmement improbable unevictoire à l’élection présidentielle.

L’US : Le FN se proclame le «  premier parti deFrance », qu’en pensez-vous ?J. G. : Le fait que le débat public sefocalise autour de ce label est un peudommage. Ça ne veut pas dire grand-chose,« premier parti de France ». C’est unecatégorie de propagande plus qued’analyse. On ne peut pas reprocher au FNde s’en saisir, mais on peut regretter quebeaucoup de médias ne fassent pas preuvede plus de distance lorsqu’ils reprennent ceslogan. Sur le fond, la science politiquerecourt à bien d’autres critères que le poidsélectoral pour apprécier le poids d’unparti : nombre de militants, nombre d’élus,ramifications dans la société civile... De cepoint de vue, il semble présomptueuxd’affirmer que le FN serait le premier parti

42 - US MAGAZINE - Supplément au no 758 du 9 janvier 2016

ENTRETIEN JOËL GOMBIN

L’US : Peut-on parler d’une victoirepour le Front National lors desélections régionales qui viennent de se dérouler ?Joël Gombin : Institutionnellement,non, bien sûr : aucune Région n’estdirigée par le FN. Et cela semblaitbien être l’essentiel pour l’exécutifet la direction du Parti socialiste,mais aussi pour les candidats de LRqui se sont trouvés opposés au FNau second tour.Mais l’essentiel n’est sans doute paslà. D’un point de vue politique, cetteséquence électorale constitue bienune nouvelle victoire pour le Frontnational. En effet, le cadragemédiatique de ces élections a toutentier tourné autour de ce parti ; lesstratégies des autres acteurspolitiques se sont organiséesessentiellement par rapport à lui ; etsurtout, le FN a apporté la preuve desa capacité à encore progresserélectoralement. Le nombre de voix qu’il a recueilliau second tour a dépassé le nombrede voix obtenu par Marine Le Penlors de la présidentielle de 2012,montrant ainsi que les succèsenregistrés par le FN depuis 2012 nedoivent pas qu’à une meilleuremobilisation (ou plutôt une moindredémobilisation) des électeurs du FN, quiexiste sans doute, mais aussi à unevéritable progression de son potentielélectoral. Tout cela permet au FN de demeurer aupremier plan du débat public, etd’alimenter le récit qu’il propose d’uneprogression inarrêtable, liée à sa stratégiede dédiabolisation et à l’état des choses.Il faut toutefois apporter une nuanced’importance. Elle tient à l’incapacitéconfirmée du Front National à l’emporterau second tour d’élections au scrutinmajoritaire. Il ne s’agit pas tant d’unhypothétique « plafond de verre » (jen’aime pas ce terme, à la fois parce qu’ildétourne un terme originellement utilisépour désigner les discriminationsprofessionnelles à l’égard des femmes, etparce qu’il renvoie implicitement à unaspect presque magique) que du fait que le« superbe isolement » du FN dans le champpolitique français est désajusté par rapport

du pays, au même titre que le PCFen 1945 par exemple.

L’US : Dans vos travaux, vous avezanalysé les distinctions géographiquesdu vote d’extrême droite, en remettanten cause le mythe des «  deux FN » :l’un protectionniste et ouvriériste dansle Nord, l’autre xénophobe etidentitaire dans le Sud. Les dernièresélections confirment-ellesvos analyses ?J. G. : Je n’ai pas encore procédé àl’analyse détaillée des profilssociodémographiques des électeurslors de ces élections, matériau surlequel j’ai en effet tenté d’esquisserune typologie plus fine et plusnuancée que celle du FN du Nordcontre le FN du Sud. Il reste quecette typologie, si elle a le mérited’attirer l’attention sur le fait que lesélecteurs du FN ne constituent pasplus un ensemble homogène que leparti lui-même, risque de faireoublier le fait que le FN existeégalement dans d’autres territoiresque ces deux archétypes, et qu’eux-mêmes sont plus complexes que lesstéréotypes qu’on peut parfoisdévelopper à leur égard. Il mesemble par exemple difficile de

comprendre le vote FN dans le Vaucluse –où il dépasse les 50 % au second tour desrégionales – si on ne le rapporte qu’àl’histoire post-coloniale, même si elle a sonimportance. Sait-on par exemple que letaux de pauvreté est plus élevé dans leVaucluse que dans le Pas-de-Calais ? Il mesemble qu’il faut donc à la foiscomplexifier l’analyse, et souligner ce quiunifie le phénomène frontiste – laprégnance des inégalités pour ce qui est desdéterminants objectifs, un discoursidentitaire et culturellement antilibéral dupoint de vue de l’offre politique mais aussides discours de justification des électeurs.Partout en France, l’immigration est de loinl’enjeu le plus mis en avant par lesélecteurs du FN.

L’US : Quels sont les thèmes structurants dansles discours des dirigeants FN et lesquelsdéterminent le plus le vote frontiste ?J. G. : Il y a, me semble-t-il, deux pôlesdominants dans le discours frontiste

Souveraineté, identité, inégalité, fonds de commerce du FNPolitiste à l’Université de Picardie Jules-Verne et membre de l’Observatoire des radicalités politiques

(Fondation Jean-Jaurès), Joël Gombin consacre ses recherches à l’implantation du Front National notamment

en région Paca. Il a contribué tout récemment à l’ouvrage Les Faux-Semblants du Front National.

Pour L’US Mag, il analyse le score réalisé par l’extrême droite lors du second tour des élections régionales.

« D’un point de vue politique, cette séquence électorale

constitue bien une nouvelle victoirepour le Front national »

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actuel : celui de la souveraineté (plutôt misen avant par un Florian Philippot) et celuide l’identité (plus prégnant chez MarionMaréchal-Le Pen, par exemple). Ces deuxthèmes sont évidemment pluscomplémentaires que concurrents : dansl’imaginaire frontiste, la souveraineténationale s’appuie sur une homogénéitéidentitaire du peuple, menacée tant par sesélites qui auraient trahi que par l’ennemi del’intérieur qui en met en péril l’identité –aujourd’hui, essentiellement la figure dumusulman. La force de ce discours estd’offrir à la fois une explication – fût-ellesimpliste – de la réalité à laquelle les genssont confrontés, et une vision de la manièred’y échapper. De plus ce discours entre en résonanceavec ce que Gramsci appelle le senscommun. Or c’est précisément ce quimanque aux autres partis, notamment àgauche.

L’US : Depuis quelques années, la structurationde plus en plus forte du parti d’extrême droiteest-elle le facteur principal de sonenracinement ?J. G. : Principal, je ne sais pas. Il est clairqu’après la scission mégretiste de 1998-

1999 l’appareilpartisan avait été trèsaffaibli et, danscertainesfédérations, laissépresque en friche. Lareconstruction a étéentamée avantl’arrivée de MarineLe Pen à la tête duparti en 2011,notamment quandLouis Aliot étaitdirecteur de cabinet de Jean-Marie Le Pen,mais elle s’est clairement accélérée cesdernières années. Des logiques « gagnant-gagnant » se sont ainsi mises en place entrele centre partisan et ses cadres locaux : lalogique ascensionnelle du parti au plannational permet à ces cadres d’accumulerdu capital politique, dont ils font en retourprofiter le parti. Steeve Briois en est lemeilleur exemple : il a mis son travail deterrain de longue date à Hénin-Beaumontau service de Marine Le Pen en lui offrantsa circonscription, et en a été payé deretour en devenant maire de la ville. Le faitque Marine Le Pen l’ait choisi commesecrétaire général du parti après son

élection à laprésidence en 2011ne doit rien auhasard.

L’US : Cette montée duFN n’obligera-t-ellepas, selon vous, à unerecomposition dusystème politique

Partout en France, l’immigration est de loin l’enjeule plus mis en avant par les électeurs du FN

Dans l’imaginaire frontiste, la souveraineténationale s’appuie sur une homogénéité

identitaire du peuple, menacée tant par ses élitesqui auraient trahi que par l’ennemi de l’intérieur

qui en met en péril l’identité – aujourd’hui,essentiellement la figure du musulman

français qui apparaît aujourd’hui sans cohésionni dynamisme ?J. G. : La question qui est aujourd’huiposée est celle de savoir dans quellemesure un jeu à trois acteurs – PS et sesalliés, LR et leurs alliés, FN – peut semaintenir dans la durée alors que lesinstitutions et notamment les modes descrutin sont conçus pour fonctionner avecdeux blocs politiques. En l’état actuel deschoses, tant le PS que LR composent aveccette situation – elle a permis à LR deremporter une large victoire auxdépartementales malgré un scoremodérément bon au premier tour, et au PSde conserver un nombre presque inespéréde Régions, au prix il est vrai de sadisparition de la scène régionale dans deuxRégions. Mais le danger principal de cettesituation, c’est que le FN venant troubler lejeu et le rendant presque imprévisible, lelien entre la demande électorale (ce que lesélecteurs votent) et ce qui sort du processusélectif (qui est élu) se distend trèsfortement. Or ce lien est au cœur du contratdémocratique. Dès lors, le distendre, c’est affaiblir laconfiance dans les institutions politiques.Cette défiance étant elle-même un facteurmajeur du vote FN, on voit qu’il s’agit làd’un cercle vicieux qu’il faudra bienrompre, d’une manière ou d’une autre... n

Entretien réalisé par Stéphane Rio

POUR ALLER PLUS LOIN◗ Sylvie Crépon, Alexandre Dezé et NonnaMayer (sous la direction), Les Faux-Semblantsdu Front National. Sociologie d’un parti poli-tique, éd. Presse de Sciences Po, 2015.

◗ Valérie, Igounet, Le Front National de 1972 ànos jours. Le parti, les hommes, les idées,Seuil, 2014.

◗ Joël Gombin, «  Les trois visages du voteFN », Le Monde Diplomatique, décembre 2015.

◗ Serge Halimi, «  Le Front National verrouillel’ordre social  », Le Monde Diplomatique, jan-vier 2016.

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INTERNATIONAL

AMÉRIQUE DU SUD. Le SNES-FSU renforce ses relations avec les syndicatsdu sous-continent. Il a participé au Mouvement pédagogique latino-américain.

Défendre l’éducation publique

Maroci

Violences policières

Le 7 janvier, dans plusieurs villesdu Maroc (Casablanca, Tanger, Mar-rakech, Fès, Oujda, Tanger, Inez-gane…), des enseignants stagiaires— 20 000 selon les organisateurs —ont manifesté pour réclamer l’an-nulation de deux décrets du minis-tère de l’Éducation nationale portantsur la séparation entre la forma-tion et le recrutement, et sur lesbourses d’études. Ces manifesta-tions ont été sévèrement réprimées,les enseignants stagiaires frappés àcoups de matraque. Plusieurs ontété hospitalisés, certains dans unétat grave. Des courriers intersyn-dicaux ont été adressés au ministrede l’Éducation, au président du gou-vernement, au ministre de la Justiceet des Libertés, et au ministre de l’In-térieur. Le SNE-FDT appelle à unegrève nationale dans le secteurpublic et les communes, le 11 févrieravec des marches régionales.

Québeci

Dégel salarialAprès une mobilisation historique del’ensemble de la Fonction publiqueà l’automne, plusieurs syndicats vien-nent de signer une entente de prin-cipe avec le ministre. Selon cet accordvalable pour cinq ans, les conditionsd’études seraient préservées (effec-tifs par classe, personnels de sou-tien…), et les salaires augmenteraientde 9,15 % sur cinq ans. Moins qu’es-péré, mais plus que le quasi-gel ini-tialement proposé par le ministre. Cesont maintenant les assemblées géné-rales des personnels qui vont vali-der ou non cet accord.

Burundii

Dans le chaosLe Burundi s’enfonce dans la crise :les opposants sont traqués, empri-sonnés, torturés, tués. Les syndica-listes figurent parmi les cibles.  Cer-tains militants se sont réfugiés dansles pays voisins, d’autres se ter-rent.  Le compte du syndicat ensei-gnant STEB a été fermé par les auto-rités, et par prudence les locaux ontété désertés. Dans ce chaos, lesécoles fonctionnent encore, inter-rompues parfois par une arrestationou un échange de tirs.

Le SNES-FSU, avec la Centrale des Syndicats duQuébec, a organisé un atelier sur la représen-tation syndicale les 6 et 7 janvier 2016 à Abid-

jan, avec quinze militants ivoiriens, de cinq syndi-cats. Dans les années 1990, la fin du parti unique asuscité la création d’une kyrielle de partis. Les syn-dicats ont suivi le même processus : aujourd’hui,dans l’Éducation, il existe une centaine d’organi-sations ! Conséquence, les collègues ne font plusbeaucoup confiance aux syndicats. Et d’autre part,comme l’a exprimé le représentant du ministre del’Éducation nationale et de l’Enseignement tech-nique à l’ouverture de l’atelier : « Le dialoguesocial est difficile voire impossible ». Le représen-tant du ministre de l’Emploi, des Affaires socialeset de la Formation professionnelle ajoutant : « il estimportant que les élections sociales puissent sedérouler cette année ».

Une prioritéLes expériences des syndicats français et québécois,tout à fait différents, ont alimenté les échangesavec l’ensemble des cinq syndicats ivoiriens del’IE, regroupés dans l’Internationale de l’Éducationsection Côte d’Ivoire (IESCI). L’objectif était derecenser les enjeux d’un scrutin dans l’Éducation et

de formuler des propositions aux ministres : quipourra voter ? où organiser le vote ? comment assu-rer son bon déroulement ? sur quelles bases appe-ler à voter ? quelles commissions de dialogue créersur la base des résultats ? quelles contrepartiesdemander en termes de moyens syndicaux ? Lanécessité de réfléchir dès maintenant à des alliancesa également émergé.Les syndicats présents ont décidé d’organiser, avecle soutien du SNES-FSU et de la CSQ, une tournéedans le pays pour sensibiliser les collègues, aumoyen d’un dépliant, à l’intérêt d’élections pro-fessionnelles. En parallèle, les syndicats de l’IESCIvont devoir convaincre les autorités de tenir bon faceaux syndicats qui estiment que les élections socialesne sont vraiment pas une priorité... n

Florian Lascroux

La troisième édition de cette réunion de 34 syn-dicats latino-américains (18 pays) de l’éducations’est tenue à San José, capitale du Costa Rica,

du 2 au 4 décembre 2015. Pour les syndicats euro-péens de l’éducation, le SNES-FSU était repré-senté ainsi que Laraforbundet (Suède) et UEN(Norvège). À noter également la présence de laNEA pour les États-Unis d’Amérique.

Force de propositionsSelon Hugo Yasky, président de la régionale del’Internationale de l’Éducation pour l’Amériquelatine (IEAL), le Mouvement pédagogique (MP)est un processus politique de transformation socialeet d’intégration enraciné dans la pédagogie de terrain.Il va jusqu’à proposer une réflexion sur l’intégrationdes syndicats européens dans le mouvement. Ildéfend l’éducation publique comme un bien et un

droit social. Dans cette perspective, le MP se veutforce de propositions et alternatives aux politiquespubliques d’éducation. Le SNES-FSU a rappeléque c’est parce qu’il s’inscrit dans cette démarche,qu’il soutient financièrement l’initiative de l’IEALpour construire un site intitulé Observatoire latino-américain des politiques éducatives (OLPE) dontl’existence permettra de renforcer la coopérationentre ces pays et le nôtre.Dans le cadre du mandat politique de l’IE, reçu àOttawa, de défendre l’éducation publique contre lesprivatisations, un chercheur de l’Université de Roe-hampton a exposé les stratégies adoptées par lesmultinationales qui se concrétisent notamment par laprésence au sein de gouvernements « techniques », deministres qui défendent les intérêts de ces entreprisesau détriment du service public et de la réduction desinégalités qu’elles prétendent combattre.Cela fait 25 ans que les Latino-Américains luttentcontre le processus de privatisation et ils mettront enplace un plan spécifique avec recherche, publicationset campagne prenant la Colombie, le Brésil, l’Ar-gentine et le Chili comme objets d’étude. Notre paysn’est pas épargné et le SNES-FSU continuera àapporter sa contribution financière et thématique àl’OLPE (par échange d’articles traduits en espagnol)sur ce thème, sur l’évaluation des enseignants et surl’éducation multilingue. n Henri Nouri

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EN CÔTE D’IVOIRE, comme dans la plupart des pays d’Afrique francophone, nul ne connaîtle poids réel de chaque organisation syndicale. Des syndicats extrêmement nombreux.

Vers des élections professionnelles,enfin ?

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Supplément au no 758 du 9 janvier 2016 - US MAGAZINE - 45

Burkina Fasoi

Attentats de OuagadougouLe SNES–FSU a été bouleversé parl’annonce de la disparition descamarades enseignants et retrai-tés de la Confédération syndicalequébécoise (CSQ) lors des atten-tats perpétrés à Ouagadougou levendredi 15 janvier. Le SNES-FSUprésente aux familles et prochesdes victimes ses condoléances lesplus sincères. En ces momentsdifficiles et douloureux, nos pen-sées vont à l’ensemble des per-sonnels de l’éducation. Noussavons que l’engagement de tescollègues dans les activités decoopération au Burkina Faso étaitfort et remarquable.

Royaume-Unii

Victimes de l’austéritéLes enfants défavorisés sont for-tement touchés par les coupesdans le budget de l’éducation (26novembre 2015). Les syndicatsd’enseignant(e)s ont commentéle rapport du Sutton Trust inti-tulé « Background to Success », ensoulignant que les mesures d’aus-térité qui frappent le financementdes établissements scolaires ren-dent extrêmement difficile l’ac-cès à une éducation de qualitépour les élèves issus des commu-nautés les plus pauvres.

Gaboni

Grève d’une semaine

Constatant l’absence de réponsedu ministère à ses doléances, leSENA entame une grève d’unesemaine, renouvelable. Parmi lesrevendications : des équipementsde base (manuels scolaires,tables-bancs...), le recrutement etla formation de nouveaux ensei-gnants dans les filières scienti-fiques, le renforcement des effec-tifs de surveillants, la réactivationdes commissions paritaires, lepaiement de vacations et deprimes...

Dans plusieurs villes du sud-est de la Turquie àmajorité kurde, des établissements scolairesont été évacués puis occupés par les forces

armées. Il s’agit là d’une zone de conflits en proieà de violents affrontements depuis que le cessez-le-feu entre le PKK (Parti des travailleurs du Kur-distan) et le gouvernement Erdogan a volé en éclatsen juillet 2015. Environ 3 500 enseignant(e)s deCizre et Silopi ont été prévenus par SMS par leministère de l’Éducation qu’ils devaient quitterles établissements afin de suivre des actions deformation continue pour une durée indéterminée.

Couvre-feu militaire : pas d’écolePlacés sous couvre-feu militaire, certains quar-tiers des villes comme Diyarbakir et Cizre sontdevenus des no man’s lands. Pris au piège descombats, les civils se retrouvent confrontés à descoupures d’eau, d’électricité et les enfants et ado-lescents se voient privés d’un droit essentiel, l’ac-cès à l’éducation. On déplore de nombreux mortset blessés. Mais cette situation ne semble pas pourautant choquer le ministère de l’Éducation.Selon les termes du syndicat enseignant EGITIMSEN, le ministère « bafoue le droit à l’éducationen faisant évacuer les établissements et en laissantl’armée, la police et les forces spéciales les occu-per ». La raison officielle invoquée pour la mise enplace du couvre-feu est le rétablissement de l’ordrepublic et la sécurité des personnes et des biens.

Les chiffres sont édifiants. Entre août et décembre2015, 362 000 élèves et 16 800 enseignants ontété directement touchés par le couvre-feu. Pour lasecrétaire générale d’EGITIM SEN, Sakine EsenYilmaz, « il y a urgence à ce qu’un processus denégociation entre les deux parties redémarre afind’aboutir au cessez-le-feu et de résoudre le conflitde manière pacifique et démocratique ».

Une solidarité internationale nécessaireEGITIM SEN s’est adressé de façon solennelle àl’Internationale de l’Éducation et à sa structurerégionale qu’est le Comité syndical européen de l’Éducation pour demander qu’une mission desolidarité soit mise en place dans les meilleursdélais, que des lettres de protestation soientenvoyées au président Erdogan et qu’une pétitioninternationale appelant à un processus de paix cir-cule au sein des organisations membres de l’IE.Une première démarche a été faite le 5 janvier parle secrétaire général de l’IE sous forme de lettreadressée au gouvernement Erdogan.Le SNES-FSU agira pour la mise en œuvre deces demandes à travers son action internatio-nale, s’adressera au gouvernement français ainsiqu’aux autorités diplomatiques. Il participerapleinement à la mission de solidarité inter -nationale et popularisera les exigences du syn-dicat EGITIM SEN. n

Odile Cordelier

EXTRAIT DE LA LETTRE DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L’INTERNATIONALE DE L’ÉDUCATION« L’IE demande aux autorités turques de mettre fin aux conflits violents à l’est de la Turquie, de permettre

aux enseignants de retourner sur leurs lieux de travail y compris pour ceux et celles qui sont en poste à Cizre

et Silopi, et de faire en sorte que les forces armées ainsi que la police quittent tous les bâtiments scolaires

qu'ils occupent actuellement , afin que les cours puissent reprendre dans les meilleurs délais...

Nous avons informé l’UNICEF et l'UNESCO de nos préoccupations. »

Message de Sakine Esen Yilmaz,  secrétaire générale d’EGITIM SEN.

« Votre solidarité est cruciale non seulement pour nous mais aussi pour les valeurs universelles de l'humanité. »

TURQUIE. Soutien et solidarité en direction des camarades d’EGITIM SEN.

L’éducation prise en otage

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Définitioni

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Un espace numérique de travail (PIM pourPersonal information manager) désigneun ensemble d’outils en ligne qui agrègel’information et permet un accès à dis-tance de ressources numériques. Ce termeest couramment utilisé dans les collèges,les lycées et les universités françaisespour désigner un portail intranet. On parleégalement d’environnement numériquede travail, de bureau virtuel, de cartable enligne et de plateforme de travail collabo-ratif. Certaines applications Web (LMS) per-mettant l’enseignement à distance (FOAD)peuvent offrir des services similaires à unespace numérique de travail.

Chiffrei

40 %Seulement 40 % des élèves indiquent que l’ENT améliorela communication entre eux.

Bibliographiei

◗ Du cartable électronique aux espacesnumériques de travail, La documentation

française, 2004 (Cahiers pra-tiques du développementnumérique du territoire).◗ Jean-Paul Droz, Créer unespace numérique de travailen milieu scolaire, Terri torialédition, 2008.

Formationi

Ça coinceLes élèves, informés mais peu formés : sideux élèves sur trois (66 %) ont bénéficiéd’une présentation de l’ENT, seulement unsur quatre (26 %) a suivi une formationpour utiliser l’ENT. Les parents d’élèves,parents pauvres de l’accompagnement :en effet, seuls 13 % d’entre eux déclarentavoir bénéficié d’une action de communi-cation ou d’animation liée à l’ENT durantl’année en cours, et 95 % n’ont jamaissuivi de formation pour utiliser l’ENT.Selon le rapport EVALuENT 2014 qui pré-sente les résultats de l’enquête en lignemenée du 31 mars au 6 juin 2014 auprès desusagers de 29 académies.

46 - US MAGAZINE - Supplément au no 758 du 9 janvier 2016

Plateforme de services à destination desdifférents membres de la communautééducative mais aussi vitrine de l’établisse-

ment sur internet, l’ENT est supposé devenir unoutil de travail au quotidien, autour de plusieurscatégories d’usage : ◗ tâches scolaires ou pédagogiques : rechercherun document sur le Web, faire une note de lecture,préparer un cours, participer à une discussion enligne, mettre un document à disposition... ;◗ vie scolaire, le plus fréquemment utilisé : infor-mation, gestion des absences, suivi des notes... ;◗ communication entre les différents usagers pardes outils multiples : messagerie interne, chat,forum, liste de diffusion, blog...Dans l’absolu, l’outil peut paraître très sédui-sant. Sur le terrain, la machine semble beaucoupmoins huilée. Problèmes dans la dis-tribution des identifiants à la rentréepour les enseignants (surtout ceux àcheval sur plusieurs établissements),les élèves et les parents, problèmes deconnexion et/ou de disponibilité d’or-dinateurs dans l’établissement... l’ou-til censé faciliter le travail le com-plique parfois, le retarde souvent parmultiplication des manipulations.

« Quand ça marche »L’ENT supposerait l’existence destructures d’assistance et de main-tenance performante. Or, avec lesrécentes baisses des dotations budgétaires, lesRégions serrent la vis. Dans l’académie de Poi-tiers, le redéploiement des postes de techni-ciens a entraîné une mutualisation des person-nels entre plusieurs établissements ! Vous avezun problème... priez pour qu’il survienne le jouroù le technicien est là !Autre problème, les risques de piratage. Unlycée d’Île-de-France en a été victime l’an der-

nier, un élève ayant modifié son bulletin. Lecoupable a été démasqué par hasard, des pro-fesseurs avaient conservé une trace écrite desappréciations. Une fraude, certes marginale,mais malheureusement possible, voire facileselon les conclusions de l’enquête.Par ailleurs, l’ENT intègre de plus en plus desolutions développées sur le logiciel libre (cequi peut parfois expliquer certains ratés) mais, àl’intérieur, c’est souvent un autre logiciel qui estutilisé comme vie scolaire ou pronotes. Au final,l’ENT n’est que le portail d’entrée qui fait accé-der à Vie scolaire ou Pronote. Par contre, ladonne devrait changer car le nouveau livret sco-laire, qui arrive avec la réforme du collège, seraune application nationale à laquelle on devraitdonc accéder à travers l’ENT.

Les ENT se sont donc généralisés, au profit denombreuses entreprises prospérant sur cette rentede plusieurs dizaines de millions d’euros queversent chaque année les collectivités locales oules établissements, sans que la sécurité ne soittotale, sans garantie d’un bon fonctionnement.Comment dire ? Peut mieux faire ! n

CHANGER D’ÈREESPACE NUMÉRIQUE DE TRAVAIL (ENT)

Peut mieux faire !Censés faciliter les missions des enseignants, devant améliorer les relations entre les membres de la communauté éducative, les ENT, en voie de généralisation dans les établissements depuis 2013, sont encore bien loin de donner satisfaction.

Quels freins rencontrez-vous à l’utilisation régulière de l’ENT ?

◗ Cécile, enseignante en collège : « Nous avons l’ENT pour la deuxième année... au final, je ne vois pas trop le

positif. Remplir le cahier de textes est en fin de compte faussement plus facile, et véritablement plus fastidieux

(obligation supposée de mettre les DS en pièces jointes par exemple, sauf qu’on n’y arrive pas... et que ça prend

du temps de tout de même essayer !). L’impression d’être surveillés est réelle, d’autant que notre chef d’éta-

blissement s’est mis sur toutes les listes de diffusion. On peut recevoir des mails d’élèves ou de parents d’élèves

n’importe quand pour n’importe quelle raison... On reçoit des mails du principal à n’importe quelle heure pour

nous prévenir – du jour au lendemain, j’exagère à peine – de la date de telle ou telle réunion, commission éduca-

tive, modification de planning... comme si nous devions être connectés sur l’ENT à peu près tout le temps. »

◗ Des élèves de Première ES : Dans cette classe, sur les vingt élèves, quatorze se servent régulièrement de

l’ENT dont onze avec pour seul usage Pronote. Donc seulement trois élèves utilisent les autres fonctions dispo-

nibles sur l’espace numérique. Aymeric avoue préférer « noter ses devoirs de façon traditionnelle par écrit sur

son agenda ».  Pour Jimmy, « le fil d’actualité de l’ENT fournit tout et n’importe quoi avec trop “d’humeurs”

sans intérêts. Au bout du compte, il est très difficile d’y retrouver l’information recherchée sauf à remonter

toute la file et ça prend du temps ». Chloé considère que cet outil « ne sert pas à grand-chose pour les élèves qui

disposent d’autres réseaux sociaux pour se connecter ». En revanche Thomas y voit un côté pratique car « on

a accès à tout avec un seul mot de passe ».

Rubrique réalisée par Thierry Pétrault

MO

IGN

AG

ES

Source : exploitation de l’enquête EVALuENT 2014, académie de Nice

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