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Déclaré fidèle, statut : infidèle.
Mieux prédire la fidélité comportementale à partir de mesures déclaratives
Laurent Maubisson*
Enseignant-chercheur contractuel
CRM - Université Toulouse 1 Capitole
Leila Elgaaied*
Attachée Temporaire d’Enseignement et de Recherche
CRM - Université Toulouse 1 Capitole
Fatim-Zohra Benmoussa*
Doctorante
CRM - Université Toulouse 1 Capitole
*IAE de Toulouse, 2, rue du Doyen Gabriel Marty, 31042 Toulouse
Déclaré fidèle, statut : infidèle.
Mieux prédire la fidélité comportementale à partir de mesures déclaratives
Résumé
La relation consommateur-marque a longtemps été abordée au travers du concept de fidélité.
L’objectif de cette recherche est d’offrir un nouvel angle d’approche à travers le concept
d’infidélité. Par le truchement d’une étude qualitative exploratoire croisant entretiens
individuels et focus group, ce concept est exploré dans le cadre des relations de couple et de
consommation, faisant ainsi l’analogie entre les deux domaines. La distinction conceptuelle
entre fidélité et infidélité est clairement mise en avant et rejette l’idée de deux extrêmes d’un
même continuum. Une mesure du concept d’infidélité envers une marque est alors proposée.
Un modèle permettant de tester la capacité prédictive de mesures déclaratives de fidélité et
d’infidélité sur la fidélité comportementale est mis à l’épreuve sur un échantillon de 370
individus. Les résultats montrent que la mesure de l’infidélité a un meilleur pouvoir prédictif
sur la fidélité comportementale.
Mots-clés : Infidélité, fidélité, marque, satisfaction, mesures déclaratives
Self-declared loyal, status: disloyal.
Towards a better prediction of behavioural loyalty using self-report measures
Abstract :
So far, the consumer-brand relationship has mostly been grasped through the concept of
loyalty. The purpose of this research is to offer a new perspective, by studying consumer
disloyalty. Based on an exploratory study, using individual interviews and focus groups, the
concept was examined through the marriage metaphor and adapted to the consumer-brand
context. It appears clearly that disloyalty and loyalty are two distinct constructs rather than
two extremes of the same continuum. A measurement scale of disloyalty was then developed.
A model comparing the predictive power of self-report measures of loyalty and disloyalty was
tested among a sample of 370 individuals. Our results show that disloyalty is a better
predictor of effective behavior than self-declared loyalty.
Key-words: disloyalty, loyalty, brand, satisfaction, self-report measures
1
Déclaré fidèle, statut : infidèle
Mieux prédire la fidélité comportementale à partir de mesures déclaratives
Introduction
En 1985, lors du premier congrès de l’Association Française de Marketing, Dufer, Moulins et
Dumas (1985) posaient déjà la question de la relation entre satisfaction et fidélité. En effet, si
les managers s’attèlent à satisfaire le consommateur, c’est notamment en considérant
l’équation « un consommateur satisfait est un consommateur fidèle ». Pourtant dès cette
première recherche, les auteurs déclarent le divorce entre la satisfaction et la fidélité, montrant
par là le décalage qui peut exister entre ces deux concepts. Il semble en effet qu’un
consommateur puisse se déclarer fidèle s’il est satisfait ; il y a là une intention de fidélité.
Ceci dit, entre le déclaratif et le comportement réel subsiste un doute que les managers ont du
mal à contrôler malgré les différents programmes de fidélité et les actions de fidélisation en
masse. Il est alors possible de considérer la fidélité à travers le postulat : le consommateur est
fidèle jusqu’à preuve du contraire, autrement dit, jusqu’à ce qu’il y ait infidélité à la marque.
Cette logique introduit donc un nouvel angle d’approche celui de l’infidélité que nous nous
proposons d’explorer, 27 ans après cette première remise en cause de la relation
satisfaction/fidélité en France.
Opposée sémantiquement à la fidélité, l’infidélité peut être entendue comme la fin d’une
relation de fidélité. Pourtant à s’y pencher de plus près et à analyser l’importance accordée à
l’infidélité dans les relations de couple, cet angle d’approche permettrait d’enrichir la
compréhension des relations entre le consommateur et la marque. Partant d’une analogie entre
l’infidélité dans le couple et l’infidélité face aux marques, prenant à contre courant les
théories classiques sur la fidélité, nous nous interrogeons sur le concept d’infidélité et posons
la question de recherche suivante : le concept d’infidélité est-il distinct de celui de fidélité ?
2
En d’autres termes, il s’agira de déterminer si les deux phénomènes impliquent les mêmes
causes et conséquences. D’un point de vue marketing, notre questionnement nous amènera à
nous interroger sur l’effet du principal déterminant identifié dans la littérature, la satisfaction :
le lien satisfaction-infidélité est-il aussi riche de sens que celui satisfaction-fidélité ? Il
soulève également l’épreuve de validité prédictive : une mesure déclarative de l’infidélité
permet-elle de mieux prédire le comportement de fidélité du consommateur qu’une mesure
déclarative de la fidélité ?
Nous aborderons dans un premier temps les travaux portant sur la fidélité et son principal
antécédent, la satisfaction, et faisons un rapprochement avec le concept d’infidélité. Nous
exposerons ensuite les choix méthodologiques en détaillant la phase qualitative exploratoire et
le modèle qui en découle, puis l’étude quantitative. Les résultats de cette étude seront enfin
détaillés et discutés.
1. Cadre théorique
1.1. La fidélité à la marque, un concept clé en marketing
Depuis quelques décennies, la notion de fidélité à la marque a suscité beaucoup d’intérêt de la
part des chercheurs en marketing et continue d’être régulièrement étudiée. Il s’agit en effet
d’un des concepts-clés dans notre discipline, ce qui n’est pas surprenant au regard de l’intérêt
managérial qu’il représente ; la fidélisation des clients étant directement associée à
l’accroissement des profits (Lichtlé et Plichon, 2008). L’étude de la littérature sur ce thème
fait émerger une multitude de conceptualisations différentes de ce phénomène. Les premiers
travaux se sont concentrés essentiellement sur la manifestation comportementale de la fidélité.
La fidélité comportementale renvoie ainsi uniquement au comportement observable, sans tenir
compte de l’attitude ou des motivations du consommateur. Les recherches qui s’inscrivent
3
dans ce courant ne portent donc « aucune considération (…) à ce que le sujet pense ou à ce
qui se passe dans son système nerveux ; son comportement est la manifestation totale de ce
qu’est la fidélité à une marque » (Tucker, 1964).
Assez rapidement, cette approche fondée uniquement sur les aspects observables a été remise
en question, essentiellement en raison de la difficulté de distinguer la fidélité réelle d’un
simple comportement d’achat répété, que l’on pourrait qualifier de fausse fidélité ou de
fidélité trompeuse (« spurious loyalty » e.g. Day, 1969). Cela a amené les chercheurs à
prendre en compte les motivations sous-jacentes au comportement présumé fidèle en
introduisant une composante attitudinale. Cette démarche suggère ainsi que la fidélité ne se
limiterait pas à une réponse strictement comportementale mais traduirait également les
motivations et le processus psychologique de prise de décision du consommateur (Jacoby et
Kyner, 1973). A l’inverse de la fidélité trompeuse, mais dans la même logique, il a été montré
que la fidélité pouvait ne pas transparaitre au travers du comportement. Cette fidélité cachée
est dite « latente » (Dick et Basu, 1994) et se caractérise par l’absence d’une fidélité
comportementale mais par une forte fidélité attitudinale. Comme pour d’autres types de
comportements, la littérature en psychologie cognitive met en évidence de nombreux cas où
l’attitude et le comportement peuvent être en décalage, notamment lorsque les contraintes
situationnelles sont fortes. Dick et Basu (1994) proposent une classification qui synthétise les
différentes formes que peut prendre la fidélité en fonction des niveaux de l’attitude et du
comportement (fort vs. faible). Celle-ci est présentée dans le tableau 1.
Composante attitudinale
Forte Faible
Composante
comportementale
Forte « Vraie » fidélité Fidélité trompeuse
Faible Fidélité latente Aucune fidélité
Tableau 1. Typologie des formes de la fidélité (adapté de Dick et Basu, 1994)
4
Aujourd’hui, la prise en compte de manière conjointe du comportement et de l’attitude semble
être une approche majoritairement admise. La fidélité est en effet généralement appréhendée
dans les travaux récents comme un concept bidimensionnel (Lichtlé et Plichon, 2008).
Parallèlement au courant qui porte sur la conceptualisation de la fidélité, un second courant
s’intéresse aux déterminants de cette dernière. Dès les premiers travaux, la satisfaction a été
identifiée comme un antécédent crucial (Engel, 1968). Un très large pan de la littérature a
depuis été consacré à la relation entre satisfaction et fidélité. De nombreux auteurs mettent
ainsi en évidence un lien significatif entre la satisfaction et la fidélité à la marque (e.g. Bass,
Pessemier et Lehman, 1972 ; Kraft, Granbois et Summers, 1973). Néanmoins, assez
rapidement des questionnements sont apparus quant à la réelle capacité de la satisfaction à
prédire des comportements effectifs. Déjà en 1985, Duffer, Moulins et Dumas (1985)
indiquaient que « (1) la satisfaction rend bien compte de l’intention de fidélité ; (2) par contre,
en général, elle ne se trouve pas significativement associée au comportement de fidélité ».
Ce constat semble suggérer que la satisfaction constitue une condition nécessaire mais non
suffisante pour générer une fidélité avérée sur le plan comportemental (Dufer et Moulins,
1989). Or, d’un point de vue managérial, favoriser la satisfaction du client a pour objectif
d’atteindre un taux de nourriture élevé (principal indicateur de la fidélité comportementale).
Tout l’enjeu est donc de savoir pourquoi la satisfaction n’a pas d’effet direct satisfaisant sur la
fidélité comportementale alors que son influence sur la fidélité attitudinale semble avérée. En
outre, le problème est également de comprendre le décalage qui existe entre la fidélité
attitudinale et la fidélité réelle. Sur le plan académique, peu d’éléments permettent d’apporter
une réponse claire et tranchée. Aujourd’hui encore des travaux récents continuent de
s’interroger sur les conditions dans lesquelles la satisfaction peut donner lieu au rachat
systématique d’une marque donnée (e.g. Chandrashekaran et al., 2007). Dans la littérature
marketing deux types de construits sont régulièrement mobilisés pour capturer cette fidélité
5
attitudinale déclarative et évaluer ainsi ses effets sur les comportements : l’intention de
fidélité et l’engagement. Ces deux variables traduisent deux approches différentes et renvoient
à deux paradigmes opposés (transactionnel vs. relationnel ; cf. Frisou, 1996). La première
approche consiste le plus souvent à recueillir des intentions de rachat. En ce qui concerne la
seconde approche, l’engagement dans une relation est traditionnellement appréhendé comme
le désir de maintenir durablement une relation qui compte aux yeux de l’individu (Morgan et
Hunt, 1994).
Au regard de la littérature, il semble donc intéressant de pouvoir tester, d’un point de vue
empirique, les propositions de recherche suivantes :
P1 : Plus la satisfaction d’un consommateur à l’égard d’un produit est élevée, plus sa
fidélité attitudinale (engagement et intention) envers la marque qui commercialise
ce produit est forte.
P2 : Plus la fidélité attitudinale (engagement et intention) du consommateur est élevée,
plus fort est son comportement de fidélité.
1.2. Vers un nouvel angle d’approche centré sur l’infidélité
La présente recherche ne remet pas en cause le concept de fidélité et ne prétend pas en
proposer une nouvelle conceptualisation qui n’apporterait pas de nouveauté par rapport à la
littérature déjà très abondante sur ce thème. De plus, certaines publications récentes semblent
suggérer que le concept de fidélité commence peu à peu à s’essouffler et qu’un renouveau
serait nécessaire (e.g. Kabiraj et Shanmugan, 2010). Certains auteurs ont en effet déploré
l’aspect trop restrictif à travers lequel le rapport consommateur/marque était généralement
étudié, suggérant ainsi que d’autres perspectives sont à envisager, notamment autour de la
manière d’appréhender la fidélité du consommateur (e.g. Fournier et Yao, 1997). En
l’occurrence, l’objectif de ce travail est d’examiner un nouvel angle d’approche pour tenter de
6
mieux cerner cette relation consommateur/marque, à travers la notion d’infidélité. En effet, si
la fidélité a fait l’objet d’une littérature particulièrement riche, l’infidélité a été très peu
étudiée en comportement du consommateur. Cela est probablement dû au fait que l’infidélité
n’est généralement pas appréhendée comme un concept à part entière mais uniquement
comme l’opposé de la fidélité. Or, il paraît légitime de se demander si fidélité et infidélité sont
réellement des antonymes et s’ils renvoient aux deux pôles d’un même continuum. La
question est de savoir si l’absence des causes qui conduisent à la fidélité mènerait vers
l’infidélité. D’après la classification de Dick et Basu (1994) évoquée plus haut, le contraire de
la fidélité est bien l’absence de fidélité, et non pas l’infidélité.
D’autres disciplines telles que la psychologie ou la sociologie appréhendent l’infidélité dans
le couple comme un phénomène à part entière et essayent d’en décrypter les causes et
conséquences. La métaphore du mariage est d’ailleurs régulièrement mentionnée dans la
littérature marketing pour tenter de comprendre le rapport des consommateurs à certaines
marques, produits ou entreprises (e.g. Tynan, 1997 ; Fournier, 1998 ; Felix, 2009). Dans un
état de l’art, Blow et Harnett (2005) proposent une définition du concept d’infidélité dans le
but de proposer aux praticiens de la thérapie de couple une meilleure compréhension du
phénomène. Selon eux, l’infidélité revoit à « un acte sexuel et/ou émotionnel, exercé par une
personne impliquée dans une relation engagée, qui se produit en dehors de cette relation
initiale et constitue un abus de confiance et/ou une violation des normes convenues
(implicitement et explicitement) par l’un ou les deux protagonistes de la relation en termes
d'exclusivité romantique/affective ou sexuelle. »
Par extrapolation au domaine du rapport à la marque, l’infidélité pourrait être définie comme
un acte (ou une intention réfléchie) d’achat et/ou de consommation exercé par un
consommateur impliqué dans une relation engagée avec une marque ou une entreprise, qui se
produirait en dehors de cette relation initiale et constituerait une violation des attentes
7
(implicites et explicites) de l’un ou des deux protagonistes de la relation en termes
d'exclusivité affective ou utilitaire. Notre définition sous-entend volontairement que
l’infidélité dans le domaine de la consommation, tout comme dans le domaine des relations
interpersonnelles, peut être commise par n’importe laquelle des deux parties. Une infidélité
émanant de la marque pourrait, par exemple, désigner un changement de positionnement ou
une tentative de séduire une autre catégorie de consommateurs. En l’occurrence, nous ne nous
intéresserons dans cette recherche qu’à l’infidélité du consommateur envers la marque. La
difficulté principale réside dans l’évaluation de la notion de « relation engagée » avec la
marque. A partir de quel moment l’achat de marques concurrentes peut s’apparenter à de
l’infidélité ? Notre définition inspirée par Blow et Harnett (2005) suggère que l’implication et
l’attachement à la marque sont des conditions qui doivent exister préalablement pour pouvoir
parler d’infidélité. Néanmoins, tout comme la fidélité, l’infidélité pourrait se décliner en deux
dimensions, désignant à la fois un comportement et une attitude. Ainsi, l’infidélité
comportementale renverrait simplement à un comportement déloyal (ponctuel ou répété) de
nature sexuelle ou émotionnelle dans le contexte du couple, ou d’achat de marques
concurrentes dans le contexte de la consommation. De la même manière, il est possible de
dépasser le simple fait observable et de s’intéresser plus profondément à l’aspect attitudinal de
l’infidélité. Tout comme Huang et Yu (1999) se sont posés la question de savoir si la fidélité à
la marque est inhérente au consommateur ou à des aspects davantage situationnels, l’infidélité
pourrait être due à des prédispositions stables (e.g. recherche de variétés, tendance à se lasser
rapidement) : une intention réfléchie. Par ailleurs, elle pourrait également être due à des
facteurs contextuels ou contingents à la catégorie de produit.
Comme pour la notion de fidélité attitudinale, se pose alors la question de l’enchainement
causal satisfaction-infidélité-fidélité comportementale, qui pourrait se matérialiser par les
propositions suivantes :
8
P3 : Plus la satisfaction d’un consommateur à l’égard d’un produit est élevée, moins il
est infidèle à la marque qui commercialise ce produit.
P4 : Plus un consommateur se déclare être infidèle à la marque d’un produit, moins
fort est son comportement de fidélité.
Face à la nature exploratoire de ces propositions de recherche (au sens de Evrard, Pras et
Roux, 2009) et afin d’approfondir la notion d’infidélité, une étude exploratoire a été réalisée
dans un premier temps.
2. Phase qualitative exploratoire
Le concept d’infidélité est proposé ici comme un nouvel angle d’approche de la relation entre
le consommateur et la marque. Face à la quasi-absence de travaux en comportement du
consommateur sur ce concept, une étude qualitative exploratoire était nécessaire. Elle a eu
pour objet principal d’éclairer l’essence conceptuelle de l’infidélité et de mieux saisir les
rapprochements et/ou les différences existantes avec la notion de fidélité. Deux techniques
d’entretiens ont été mobilisées et leurs résultats croisés : (1) des entretiens semi-directifs pour
recueillir la perception personnelle sur un thème soumis à une forte désirabilité sociale et (2)
des focus group permettant une confrontation des différents points de vue sur l’infidélité.
2.1. Recueil des données
Les entretiens semi-directifs ont été réalisés auprès de 11 individus (âgés de 27 à 67 ans ; 5
femmes / 6 hommes). La diversité des profils était recherchée dans la mesure où les
perceptions diffèrent largement selon les parcours, l’âge et l’expérience de vie. Les individus
ont été invités à livrer leur propre conception de l’infidélité, entendue de manière générale. Il
était ensuite demandé aux individus de faire le récit d’une histoire d’infidélité dans le couple
9
(qu’elle soit vécue ou rapportée). Enfin, le concept d’infidélité était orienté vers les relations
consommateur/marques avec la même consigne de narration.
Ces entretiens ont été croisés aux données recueillies lors du focus group où l’objectif
principal était d’atténuer le regard du chercheur. 8 individus (4 hommes/4 femmes) ont été
réunis lors d’un apéritif. Par soucis de complétude avec les entretiens individuels, nous avons
fait le choix d’inviter des individus qui se connaissaient (certains étant en couple, d’autres
célibataires). L’objectif recherché était de confronter, de manière directe, l’opinion de
différents profils d’individus (projet de vie, éducation, croyances, situation maritale…) afin de
vérifier (1) si de nouveaux éléments pouvaient enrichir l’approche de l’infidélité dans le
couple et dans la relation consommateur-marque ; (2) apprécier les consensus ou divergences
relatives à l’objet de recherche. Cela a donc permis de « considérer le problème commun
selon différents points de vue et envisager d’autres solutions que celles qui lui étaient venues
à l’esprit » (Festinger et Katz, 1974 in Evrad et al., 2009). Les thématiques abordées étaient
les mêmes que pour les entretiens.
L’ensemble des corpus a été enregistré et transcrit à des fins d’analyse.
2.2. Méthode d’analyse
A la suite d’une lecture approfondie du corpus, nous nous sommes focalisés sur le
rapprochement vs. différence entre les concepts de fidélité et d’infidélité. Un carré sémiotique
a alors été mobilisé (Greimas, 1966). Il a permis sur la base d’une opposition sémantique de la
fidélité/infidélité, d’identifier quatre positions adoptées par les individus (Figure 1)1. Les
résultats de ce carré sémiotique ont été confrontés au domaine de la consommation afin de
mieux comprendre l’évolution du statut de fidélité à l’infidélité. Enfin une phase d’analyse de
contenu lexicale a permis d’approfondir la compréhension de la position d’infidélité.
1 Ce travail s’inscrivant dans un projet de recherche plus global, nous invitons le lecteur à consulter les travaux
de Benmoussa, Elgaaied et Maubisson (2012) pour une meilleure compréhension des modalités de construction
et d’interprétation de ce carré sémiotique.
10
2.3. Résultats de l’étude
Les quatre positions identifiées à travers le carré sémiotique doivent être définies.
Position de fidélité qui signifie l’existence d’un engagement (énoncé ou non exprimé) qui se
veut aussi bien comportemental qu’attitudinal. Dans une relation avec la marque, la fidélité
peut être ancrée dans une consommation quotidienne inconsciente. Pourtant, cette position
peut évoluer et amener l’individu vers une position de non-fidélité.
« Je ne peux pas acheter autre chose que L’Equipe. Il n’y a pas d’autres journaux
sportifs de toute façon. L’Equipe, c’est L’Equipe quoi. Si demain il y a un autre journal
qui sort, je ne peux pas l’acheter, ça reste L’Equipe. » (Alain)
Non-fidélité qui se définit par la fin d’une relation de fidélité. Il y a ici une intention
d’infidélité qui peut ou non se réaliser. La non-fidélité se manifeste par un désengagement
affectif (suppression d’une fidélité attitudinale). A noter que cette phase est souvent omise par
les individus qui, par risque de culpabilisation ou simplement par sa nature interne non
conscientisée, ne la déclare pas.
« ça nous est tous arrivé d’être en couple et de se dire « tiens avec lui, il y a un truc qui
se passe » alors qu’on est en couple à ce moment là ; et on va être amené à la revoir
cette personne, et c’est là que c’est dangereux » Céline
Infidélité qui prend forme au travers du comportement ou d’une intention réfléchie : le
passage à l’acte définit l’évolution de la non-fidélité à l’infidélité. Il n’y a plus seulement un
désengagement affectif mais une manifestation observable. Ce passage est cependant à
nuancer en ce qu’il ne découle pas systématiquement d’une position de fidélité ; certains
individus définissant l’infidélité comme un trait de caractère. L’individu est alors en mesure
de s’auto-évaluer comme étant infidèle : il est (ou devient) conscient d’être infidèle.
11
« Moi j’ai un ami qui avant même qu’il ne s’engage officiellement avec sa femme
actuelle savait qu’il allait lui être infidèle » Brenda
Non-infidélité qui se caractérise par le fait que le consommateur ne souhaite pas/plus être
infidèle. Il s’agit alors, soit d’une profonde volonté du consommateur d’entretenir une relation
exclusive avec un être ou une marque, soit d’une réaction qui fait suite à la prise de
conscience (souvent accompagnée de regrets) d’un comportement d’infidélité. Dans ce cas, le
consommateur peut à nouveau être amené à se considérer comme fidèle à la marque.
« L’infidélité ça peut servir à des gens, à des couples. C’est l’occasion de se rendre
compte que quelque chose ne va pas ou va bien et de revenir sur le droit chemin. Ça
dépend si l’on sait tirer les conséquences de son erreur. Si l’on considère cela comme
une erreur ». Elodie
Pour les modalités de construction d’un carré sémiotique, voir les travaux de Floch, (1990).
Figure 1. Carré sémiotique de la fidélité et de l’infidélité
L’identification de ces quatre positions conforte l’idée d’une distinction conceptuelle entre les
notions de fidélité et d’infidélité. Comme illustré par le verbatim suivant, il semble pertinent
d’étudier la relation marque-consommateur par le prisme de la notion d’infidélité, dans la
mesure où ce concept paraît davantage concret, saillant et intelligible pour le consommateur :
« L’infidélité a l’avantage de pouvoir se discuter dans un couple alors que c’est vrai
qu’on discute rarement de la fidélité. C’est difficile à anticiper l’infidélité. Je pense que
c’est plus facile de parler de l’infidélité dans le sens où tu es devant le fait accompli. Il
Fidélité
Non-infidélité Non fidélité
Infidélité
12
y a des faits qu’il appartient au couple de résoudre, un problème. Alors qu’en situation
normale, c’est rare de parler de la fidélité ». Elodie
L’infidélité peut, dès lors, être envisagée comme un construit à part entière. La relation
causale envisageant la satisfaction comme antécédent de la fidélité peut être interrogée cette
fois-ci sous l’angle de l’infidélité. Il est alors pertinent de comparer ces deux construits
(fidélité et infidélité) et de tester leur relation avec le taux de nourriture (Figure 2). Envisagé
comme variable dépendante dans notre modèle, le taux de nourriture se définit comme « les
achats de la marque exprimés en pourcentage des achats de la catégorie de produits effectués
par les acheteurs de la marque » (Kotler & al., 2009, p.828). Ce ratio est largement utilisé par
les managers comme indicateur de la fidélité comportementale des consommateurs. Les liens
qui structurent ce modèle correspondent donc à une déclinaison des propositions de recherche
formulées à partir de l’examen de la revue de la littérature (P1 ; P2 ; P3 et P4).
Figure 2. Modèle considéré dans cette étude
3. Phase quantitative
Afin de tester les relations d’influence de la satisfaction sur les construits de fidélité et
d’infidélité, et par ce chemin, sur le taux de nourriture, nous avons procédé à une phase
empirique quantitative que nous présenterons en deux stades : la présentation des échelles de
mesure et les tests relatifs au modèle théorique.
3.1. Les échelles de mesure
Satisfaction Fidélité
Intention
Fidélité
Engagement
Taux de
nourriture
Infidélité
13
La mesure de l’infidélité
Face à l’absence d’une échelle de mesure de l’infidélité et prenant en compte les différences
conceptuelles de ce construit avec celui de fidélité, il était nécessaire de construire une échelle
de mesure afin de tester le modèle proposé.
Pour ce faire, nous avons respecté les étapes du paradigme de Churchill (1979). La phase
qualitative a permis de générer six items (Tableau 2). Une phase de pré-test a été menée
auprès de 80 individus portant sur les sodas. Elle a permis de purifier l’échelle de mesure qui
a donné lieu à la suppression des deux premiers items (inf1, inf2), qui n’étaient pas
suffisamment corrélés à l’axe factoriel.
Inf1 L’idée d’acheter une autre marque de (produit) m’a quand même effleuré
Inf2 J’ai déjà eu envie d’acheter une autre marque de (produit)
Inf3 Il m’est arrivé de me laisser tenter par une autre marque de (produit)
Inf4 Je dois bien reconnaitre avoir acheté, même occasionnellement, une (ou
plusieurs) autre(s) marque(s) de (produit)
Inf5 Il m’est arrivé de craquer pour une autre marque de (produit)
Inf6 Je dois bien avouer avoir été au moins une fois infidèle à ma marque de
(produit)
Tableau 2 - Items générés dans la phase qualitative de l’étude
La structure factorielle finale de cette échelle est satisfaisante (construit unidimensionnel ;
variance expliquée > 80%). Elle est également fiable et valide au regard des indicateurs
couramment mobilisés dans la littérature (coefficients alpha et rho) et sa robustesse a été
éprouvée sur quatre catégories de produit (Tableau 3). En revanche, la qualité de l’ajustement
du modèle de mesure aux données n’est pas satisfaisante sur trois indicateurs (RMSEA, GFI
et AGFI) pour une seule catégorie de produit : les téléphones portables. A ce stade de la
recherche, nous croyons que cette faiblesse incombe à la nature du produit considérée (produit
le plus impliquant) : ce qui montre qu’une adaptation de l’outil proposé dans ce travail doit
certainement être envisagée en fonction de l’objet de l’étude.
Ces résultats sont issus de la collecte finale des données. Les questionnaires ont été
administrés à un public d’étudiants d’école de commerce (N = 370 ; 55,1 % de femmes ; âge
14
moyen 21 ans). Quatre catégories de produits ont été considérées: les chaussures (24,9% de
l’échantillon), les sodas (25,1%), les téléphones (25,7%) et les parfums (24,3%). Ces choix de
produits se justifient par la cohérence avec une cible de jeunes consommateurs et par le
souhait de réaliser cette étude sur des produits plus ou moins impliquant.
Chaussures Soda Téléphone Parfum TOTAL
N = 92 N = 93 N = 95 N = 90 N = 370
Items λi R2 λi R2 λi R2 λi R2
Inf3 .810 .657 .780 .608 .878 .772 .936 .875 .786 .618
Inf4 .957 .915 .942 .887 .948 .899 .977 .954 .866 .750
Inf5 .841 .707 .811 .658 .931 .866 .953 .907 .887 .787
Inf6 .859 .738 .896 .803 .951 .905 .962 .925 .920 .846
Var. totale 81,40 % 80,35 % 89,61 % 93,66 % 89,64 %
Α .922 .916 .961 .977 .961
ρ .924 .918 .961 .978 .923
ρvc .754 .739 .860 .916 .750
χ² 1,961 2,901 12,683 1,669 3,434 Ddl 2 2 2 2 2 GFI .990 .982 .880 .980 .988
AGFI .949 .911 .401 .901 .939 RMSEA .000 (.000 ; .205) .070 (.000 ; .229) .238 (.124 ; .369) .000 (.000 ; .198) .044 (.000 ; .121) SRMR .012 .019 .026 .006 .012
NFI 1.000 .988 .949 .994 .992 NNFI 1.000 .985 .867 .992 .980 CFI 1.000 .995 .952 .997 .993
χ²/ddl 0,981 1,451 6,342 0,835 1,717 AIC -2,039 -1,099 8,683 -2,331 -0,566
Tableau 3 - Propriétés de la mesure de l’infidélité
Les autres échelles de mesure
Les propriétés statistiques des échelles de mesure mobilisées dans ce travail et issues de la
littérature sont présentées dans l’annexe 1. La satisfaction est mesurée par une adaptation de
l’échelle de Oliver (1997) couramment mobilisée dans les recherches francophones (e.g.
Plichon, 1999 ; Maubisson, 2012) et dont les propriétés statistiques sont satisfaisantes (cf.
annexe A1). La fidélité attitudinale est appréciée par le truchement de ses deux facettes :
l’engagement et l’intention de réachat (items issus des travaux de Beatty, Kahle et Homer,
1988). Enfin, la fidélité comportementale a été appréciée à partir du score qui exprime le taux
de nourriture. Il évalue ainsi le pourcentage d’achat de produits de la marque choisie par le
15
consommateur parmi l’ensemble des produits achetés dans la même catégorie de produit
durant une certaine période (estimée arbitrairement à partir de la durée de vie du produit et de
sa fréquence de consommation). Il correspond donc au ratio :
avec :
FIDcpt = Estimation de la fidélité comportementale du consommateur k
Achat_Mque Ak = Nombre d’achats réalisés par le consommateur k pour p période de la
marque dont il se dit le plus fidèle
Achat_Mque Xk = Nombre d’achats réalisés par le consommateur k pour p période de
produits d’autres marques mais qui entrent strictement dans la même
catégorie de produit
3.2. Analyses des relations de causes à effets
Suivant le modèle exposé en figure 2, les relations entre les mesures déclaratives de la fidélité
attitudinale (engagement et intention) sur le comportement de fidélité (taux de nourriture),
puis de la mesure déclarative de l’infidélité sur cette même variable dépendante sont testées
de manière isolée. L’objectif est alors de comparer la capacité prédictive de ces échelles. Dans
un deuxième temps, le modèle structurel est testé dans sa globalité, à partir d’une méthode
multigroupe (chaque groupe étant défini à partir de la catégorie de produit considérée).
L’objectif est alors d’approfondir l’étude des relations satisfaction-fidélité comportementale,
en considérant comme médiateurs les mesures déclaratives de fidélité et d’infidélité.
Tests du pouvoir prédictif des mesures déclaratives sur le comportement de fidélité
Afin de tester le pouvoir prédictif des mesures déclaratives de la fidélité et de l’infidélité sur
le comportement de fidélité, le test isolé des propositions P2 et P4 (Figure 2) sont réalisés à
partir de la méthode des équations structurelles. Concernant les variables indépendantes
relatives au test de P2, un lien de colinéarité a été autorisé puisqu’il s’agit de deux facettes
Σ Achat_Mque Ak / p=1
FIDcpt = ( Σ Achat_Mque Ak + Σ Achat_Mque Xk ) p=1 p=1
16
(engagement et intention) d’un même concept (fidélité attitudinale). Les résultats de ces
premières analyses sont présentés dans les tableaux suivants.
Chaussures Soda Téléphone Parfum
N = 92 N = 93 N = 95 N = 90
Coef.
stand.
Coef.
struct. p.
Coef.
stand.
Coef.
struct. p.
Coef.
stand.
Coef.
struct. p.
Coef.
stand.
Coef.
struct. p.
Fid. engagement
Fid. comportementale .244 .030 .027 .331 .030 .009 .260 .030 .055 .431 .055 .000
Fidélité intention
Fid. comportementale .206 .052 .082 .099 .019 .437 .093 .014 .484 .166 .037 .129
R2 .134 .155 .109 .285
Colinéarité (r de pearson) .313 (p = .015) .545 (p < .001) .663 (p < .001) .497 (p < .001)
Infidélité
Fid. comportementale -.434 -.126 .000 -.546 -.064 .000 -.779 -.115 .000 -.755 -.103 .000
R2 .188 .298 .607 .570
Tableau 5 - Tests isolés des relations P2 et P4
χ² ddl RMSEA SRMR NFI NNFI CFI χ²/ddl AIC
M0 1811.29 40 1851.3
M1 43.56 20 .057 .025 .976 .973 .987 2.178 123.56
M0 : Modèle indépendant de référence
M1 : Modèle structurel ; intervalle de confiance (IC) du RMSEA (90%) : [.034 - .080]
Tableau 6 - Indices d’ajustement du modèle isolé fidélité attitudinale-fidélité
comportementale (analyse multigroupe fonction de la catégorie de produit)
χ² ddl RMSEA SRMR NFI NNFI CFI χ²/ddl AIC
M0 1732.97 84 1788.97
M1 64.10 48 .030 .034 .963 .983 .990 1.335 192.10
M0 : Modèle indépendant de référence
M1 : Modèle structurel ; intervalle de confiance (IC) du RMSEA (90%) : [.000 - .048]
Tableau 7 - Indices d’ajustement du modèle isolé infidélité-fidélité comportementale
(analyse multigroupe fonction de la catégorie de produit)
Ces résultats indiquent clairement les faiblesses des mesures déclaratives de la fidélité en ce
qui concerne leur capacité à prédire le comportement de fidélité. D’une part parce que seule la
facette "fidélité engagement" semble avoir un effet significatif sur le taux de nourriture, quand
bien même celle-ci est moyennement mais significativement corrélée à la facette "fidélité
intention" (qui n’a pas d’effet significatif sur le taux de nourriture). D’autre part, parce qu’en
comparant les coefficients structurels standardisés et les coefficients de détermination (R2) des
deux modèles traités isolément, la capacité à prédire la fidélité comportementale (force du lien
17
et pourcentage de variance expliquée) est plus forte pour la variable "infidélité" que pour les
deux facettes de la fidélité attitudinale étudiées.
Il convient à présent de mettre en jeu au sein de ce modèle, le principal antécédent de la
fidélité (la satisfaction), et de tester de manière globale l’ensemble de ces liens.
Tests du modèle structurel
Le modèle présenté dans la figure 2 a été testé par la méthode des équations structurelles à
partir du logiciel AMOS. Une analyse multigroupe, conduite sur les quatre sous unités
d’analyse (chaussures, soda, téléphone, parfum), a été réalisée afin de tenir compte de la
particularité de chaque catégorie de produit. Le test du modèle contraint (vs. non contraint à
égalité dans l’évaluation des paramètres) indique une différence significative (p = .084) qui
dépasse légèrement la norme de 0,05 (Tableau 8). Cependant, comme l’indiquent El Akremi
et Roussel (2003), si l’estimation des paramètres (bêta et R2) est différente d’un groupe à
l’autre, cette condition peut s’avérer suffisante pour commenter les différences de paramètres
estimés. C’est précisément le cas dans notre étude, puisque l’analyse de ces coefficients est
riche d’enseignements (Figure 3 et Tableau 9).
Modèle Valeur du Chi-2 ddl
Indépendant 460.652 228
Contraint 586.163 333
125.511 105
p .084
Tableau 8 - Test du rôle modérateur de la catégorie de produit
18
Figure 3. Diagrammes des relations entre les variables latentes
Chaussures Soda Téléphone Parfum
N = 92 N = 93 N = 95 N = 90
Coef.
stand.
Coef.
struct. p.
Coef.
stand.
Coef.
struct. p.
Coef.
stand.
Coef.
struct. p.
Coef.
stand.
Coef.
struct. p.
Satisfaction
Fid. engagement .331 .525 .003 .420 .622 .000 .570 .930 .000 .470 .871 .000
Satisfaction
Fid. intention .422 .331 .000 .724 .496 .000 .795 .970 .000 .430 .466 .000
Satisfaction
Infidélité .129 .088 .249 -.175 -.200 .118 -.340 -.433 .001 -.078 -.134 .479
Fid. engagement
Fid. comportementale .168 .021 .076 .167 .015 .079 -.073 -.009 .333 .160 .019 .024
Fidélité intention
Fid. comportementale .30 .076 .003 .176 .034 .070 .042 .006 .587 .239 .049 .000
Infidélité
Fid. comportementale -.458 -.131 .000 -.495 -.058 .000 -.788 -.118 .000 -.715 -.093 .000
Tableau 9 - Test des relations entre les différentes variables du modèle
Les indices d’ajustement de ce modèle structurel sont très satisfaisants (Tableau 10) et nous
permettent à présent de commenter ces résultats.
Chaussures Soda
s
Téléphones Parfum
s
Satisfaction
Fidélité
engagement
Fidélité
intention
Infidélité
Taux de
nourriture Satisfaction
Fidélité
engagement
Fidélité
intention
Infidélité
Taux de
nourriture
Satisfaction
Fidélité
engagement
Fidélité
intention
Infidélité
Taux de
nourriture Satisfaction
Fidélité
engagement
Fidélité
intention
Infidélité
Taux de
nourriture
,331
,422 ,305
-,458
,420
,724
-,495
,570
,795
-,340 -,788
,470
,430
,160
,239
-,715
R²=,324 R²=,357
R²=,621 R²=,630
19
χ² ddl RMSEA SRMR NFI NNFI CFI χ²/ddl AIC
M0 4804.33 364 13.20 4916.33
M1 460.65 288 .040 .087 .904 .951 .961 1.60 724.65
M0 : Modèle indépendant de référence
M1 : Modèle structurel ; intervalle de confiance (IC) du RMSEA (90%) : [.033 - .047]
Tableau 10 - Indices d’ajustement du modèle structurel
De manière générale, les résultats de cette étude corroborent ceux issus de la littérature : la
satisfaction a une influence positive et systématique sur les deux facettes de la fidélité évaluée
par une méthode déclarative, à savoir, l’engagement et l’intention de réachat. En revanche,
l’effet de ces deux mêmes variables sur le taux de nourriture (évaluation de la fidélité
comportementale) semble plus contrasté ; alors qu’il est systématiquement significatif entre la
variable "Infidélité" et cette même variable dépendante. Notons ici que la polarité de la
relation entre les variables "Infidélité" et "Taux de nourriture" est négative étant donnée la
nature des variables considérées.
Par ailleurs, à la lumière des coefficients standardisés et R2, il semble que la mesure de
l’infidélité (déclarative) ait un pouvoir prédictif plus important sur l’évaluation de la fidélité
comportementale pour les produits plus impliquant (téléphone et parfum) que pour les autres
(chaussures et soda). Ainsi, et quelle que soit la catégorie de produit considérée, la mesure de
l’infidélité reste le meilleur indicateur pour anticiper la fidélité comportementale.
4. Discussion et conclusion
Cette recherche avait pour vocation de contribuer à mieux comprendre les déterminants de la
fidélité comportementale du consommateur en envisageant d’élargir l’angle d’approche
traditionnel. Partant du constat que la satisfaction et l’intention de fidélité prédisent de
manière peu satisfaisante la fidélité comportementale, notre proposition de départ consistait à
envisager un changement de focus afin d’étudier la relation consommateur/marque sous
l’angle de l’infidélité.
20
Dans un premier temps, une étude qualitative exploratoire, basée sur l’analogie des relations
de couple, a permis d’approfondir la réflexion sur la conceptualisation de l’infidélité. Cette
approche a permis de revenir sur les essences conceptuelles de la fidélité et de l’infidélité.
Nos résultats suggèrent que les deux notions ne se situent pas aux deux extrémités d’un même
continuum et ne représentent pas nécessairement les deux antipodes d’un même phénomène.
Sur le plan théorique, l’une des principales contributions de cette recherche réside dans
l’adaptation du concept d’infidélité au domaine du marketing. Partant d’une définition
développée dans le cadre des rapports de couple, nous avons proposé une définition de
l’infidélité dans le cadre de la relation consommateur/marque.
Les deux principaux apports issus des résultats de cette étude qualitative sont :
(1) d’avoir montré que le concept d’infidélité fait sens pour le consommateur : il s’agit du
moment où il conscientise son action (ou intention réfléchie) d’infidélité, où il peut ressentir
un sentiment de regret ou de culpabilité. Sans en faire une fin en soi, les marques peuvent y
voir un levier d’action de reconquête ou de fidélisation (en favorisant l’anticipation de ce
sentiment chez le consommateur par exemple). Ces actions peuvent être orientées aussi bien
vers des chemins utilitaires (e.g. équipements Apple exclusifs à la marque ; ou encore
pratique du produit exclusive à Apple) ou affectifs (e.g. attachement à Steve Job, à l’histoire
de la marque…). Les individus semblent en effet moins préoccupés par la fidélité (situation
normale) que par l’infidélité (facteur déclenchant).
(2) de proposer un modèle qui permet, en partie, de mieux comprendre la relation
consommateur/marque. Par exemple2, un consommateur satisfait de ses premières expériences
avec un produit ou un service peut débuter une relation fidèle avec une marque (e.g. avec un
opérateur téléphonique tel que Orange) : cela correspond à la situation de "fidélité". Au bout
d’un certain temps, au fil de discussions avec ses proches, il peut être amené à penser à une
2 Cet exemple est issu d’une des introspections réalisées par les auteurs. Elles n’ont pas été présentées dans ce
document faute de place, mais participeraient à enrichir la robsutesse du modèle.
21
autre marque, à se renseigner auprès d’enseignes concurrentes à propos de leurs offres (e.g.
forfaits avantageux chez Free mobiles). Il ne pense plus exclusivement à sa relation avec la
première marque : il est dans la situation de "non-fidèlité", c’est le moment où il dérappe3.
Après le changement de marque, il se rend compte des avantages perdus, du coût de
changement, de la fin de son histoire avec la marque (e.g. points du programme de fidélité
changement de mobile, oubli du changement de code PIN, habitude machinale du numéro
pour consulter la messagerie, configuration des réseaux web, MMS, premier forfait mobile
payé avec son premier job, voie de l’hotesse de la messagerie). Sa situation l’amène à
repenser à son infidélité. Et c’est à ce stade que le travail des marques paraît insuffisant au
regard des résultats de cette recherche : à notre connaissance, la situation où le consommateur
ne souhaite plus être infidèle (non-infidélité) ne fait pas l’objet de programme spécifique.
Comme dans un couple, il semble que quelque chose s’est brisée et que les marques
rechignent à pardonner, à repartir de l’avant (plutôt que repartir à zéro). Aujourd’hui, et pour
prendre exemple sur les brillants travaux de Lars Meyer-Waarden (2012), les distributeurs
parmi tant d’autres semblent ne proposer que des programmes de fidélité (plus ou moins
efficaces) et ne paraissent pas disposer de plans pour "lutter" contre l’infidélité.
Face à la saillance du concept d’infidélité à l’esprit du consommateur, une échelle de mesure
a ensuite été créée sur la base des éléments issus de l’étude exploratoire. Cet instrument de
mesure constitue un apport méthodologique majeur. Ces propriétés statistiques sont très
satisfaisantes sur trois des quatre catégories de produit considérées dans cette étude.
L’étude quantitative réalisée ensuite a permis de tester, sur ces quatre catégories de produits,
un modèle dans lequel la variable à expliquer est le taux de nourriture. Cette mesure factuelle
de la fidélité comportementale représente un indicateur indispensable pour les professionnels
désireux d’évaluer leur capacité à fidéliser les consommateurs. Conformément aux
3 Vocabulaire emprunté au champ lexical fréquemment employé par les répondants
22
conclusions issues de la littérature (Dufer et Moulin, 1989), nos résultats montrent que la
satisfaction à la marque prédit de manière assez efficace la fidélité attitudinale et l’intention
de fidélité. En revanche, la satisfaction explique assez peu l’infidélité. C’est pourtant la
variable d’infidélité qui explique le mieux le comportement effectif, capté à travers le taux de
nourriture. En outre, il s’agit de la seule variable indépendante dont l’effet reste significatif
quelle que soit la catégorie de produit. Ce résultat est particulièrement important dans la
mesure où il présente des implications considérables d’un point de vue managérial. Il
semblerait ainsi :
- qu’il soit préférable de mesurer l’infidélité auto-déclarée au lieu de s’intéresser à la
fidélité attitudinale ou à l’intention d’être fidèle lorsque les managers souhaitent évaluer
la Customer Long Time Value ;
- qu’il soit pertinent au contraire de privilégier des indicateurs déclaratifs relatifs à
l’évaluation des facettes de la fidélité lorsque les managers veulent mesurer la
performance de leur service clientèle (satisfaction) sur la fidélité de leur client.
Par ailleurs, nos résultats mettent en évidence des différences importantes entre les différentes
catégories de produit testées. Par exemple, il est intéressant de noter que la fidélité exprimée
sous forme d’engagement n’a d’effet significatif sur le comportement que pour la catégorie
des parfums. Cela peut s’expliquer par le fait qu’il s’agisse de la catégorie de produit dont la
dimension hédonique subjective est la plus forte. A l’inverse, nous avons pu noter que la
satisfaction n’influence l’infidélité que dans le cas des téléphones portables. Une voie de
recherche possible consisterait à approfondir l’étude de ces processus en envisageant
également d’étudier la satisfaction et l’insatisfaction de manière parallèle. Bien évidemment,
afin de gagner en validité externe, il conviendrait de reproduire cette étude sur d’autres
catégories de produit ou service. Enfin, d’autres variables n’ont pas été intégrées au cours des
traitements réalisés dans ce travail (recherche de variété, implications dans la catégorie de
23
produit, âge…) par soucis de clarté, mais permettraient de nourrir le modèle structurel testé et
d’approfondir la discussion des résultats.
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26
Annexe 1 : Propriétés des mesures
- Pour les échelles empruntées à la littérature, seuls les indicateurs issus de l’analyse
factorielle confirmatoire sont présentés.
- Pour l’échelle de l’infidélité proposée dans ce travail, les résultats issus des analyses
factorielles exploratoires précèdent ceux des analyses factorielles confirmatoires.
La satisfaction
Sat1 : Je suis satisfait de mon parfum.
Sat2 : J’ai eu une bonne idée quand j’ai décidé de choisir ce parfum.
Sat3 : Ce parfum est un bon choix pour moi.
Chaussures Soda Téléphone Parfum TOTAL
N = 92 N = 93 N = 95 N = 90 N = 370
Items λi R2 λi R2 λi R2 λi R2
Sat3 .956 .914 .826 .683 .990 .981 .967 .934 .947 .896
Sat2 .838 .702 .996 .991 .865 .749 .898 .806 .886 .785
Sat1 .827 .684 .725 .525 .836 .699 .789 .622 .783 .612
Var. totale 84.14 % 81.09 % 86.90 % 85.36 % 83.89 %
α .906 .879 .924 .909 .903
ρ .908 .890 .927 .917 .907
ρvc .767 .733 .809 .788 .765
La fidélité attitudinale : facette engagement
Eng1 : Si cette marque de parfum n’est pas disponible lorsque je souhaite l’acheter, cela me
laisserait indifférent(e) d’avoir à choisir une autre marque.
Eng2 : Je me considère comme très fidèle à cette marque de parfum.
Eng3 : Si une autre marque de parfum est en promotion, j’achèterai celle-ci plutôt que ma
marque habituelle de parfum.
Chaussures Soda Téléphone Parfum TOTAL
N = 92 N = 93 N = 95 N = 90 N = 370
Items λi R2 λi R2 λi R2 λi R2
Eng1 .874 .763 .918 .844 .980 .961 .917 .840 .922 .849
Eng3 .926 .857 .828 .686 .934 .872 .873 .761 .887 .787
Eng2 .872 .760 .864 .746 .837 .700 .848 .720 .850 723
Var. totale 86.18 % 83.78 % 89.30 % 84.85 % 85.68
α .919 .903 .939 .909 .916
ρ .920 .904 .942 .911 .917
ρvc .794 .758 .844 .774 .786
27
La fidélité attitudinale : facette intention
Int1 : J’achèterai à nouveau cette marque de parfum dans un futur proche.
Int2 : Il est probable que j’achète à nouveau cette marque de parfum.
Int3 : Je n’achèterai plus jamais cette marque de parfum.
Chaussures Soda Téléphone Parfum TOTAL
N = 92 N = 93 N = 95 N = 90 N = 370
Items λi R2 λi R2 λi R2 λi R2
Int2 .855 .731 .898 .806 .999 .999 .923 .853 .956 .914
Int1 .779 .607 .839 .705 .870 .757 .937 .878 .877 .769
Int3 .465 .216 .684 .468 .876 .768 .776 .602 .779 .607
Var. totale 65.50 % 76.59 % 88.92 % 84.72 % 83.78 %
α .733 .845 .936 .908 .901
ρ .753 .852 .940 .912 .906
ρvc .518 .659 .841 .777 .763
L’infidélité à la marque
Inf1 : L’idée d’acheter une autre marque de parfum m’a quand même effleurée.
Inf2 : J’ai déjà eu envie d’acheter une autre marque de parfum.
Inf3 : Il m’est arrivé de me laisser tenter par une autre marque de parfum.
Inf4 : Je dois bien reconnaitre avoir acheté, même occasionnellement, une (ou plusieurs)
autre(s) marque(s) de parfum.
Inf5 : Il m’est arrivé de craquer pour une autre marque de parfum.
Inf6 : Je dois bien avouer avoir été au moins une fois infidèle à ma marque de parfum.
Chaussures Soda Téléphone Parfum TOTAL
N = 92 N = 93 N = 95 N = 90 N = 370
Items λi R2 λi R2 λi R2 λi R2
Inf3 .810 .657 .780 .608 .878 .772 .936 .875 .786 .618
Inf4 .957 .915 .942 .887 .948 .899 .977 .954 .866 .750
Inf5 .841 .707 .811 .658 .931 .866 .953 .907 .887 .787
Inf6 .859 .738 .896 .803 .951 .905 .962 .925 .920 .846
Var. totale 81,40 % 80,35 % 89,61 % 93,66 % 89,64 %
α .922 .916 .961 .977 .961
ρ .924 .918 .961 .978 .923
ρvc .754 .739 .860 .916 .750
χ² 1,961 2,901 12,683 1,669 3,434
ddl 2 2 2 2 2
GFI .990 .982 .880 .980 .988
AGFI .949 .911 .401 .901 .939
RMSEA .000 (.000 ; .205) .070 (.000 ; .229) .238 (.124 ; .369) .000 (.000 ; .198) .044 (.000 ; .121)
SRMR .012 .019 .026 .006 .012
NFI 1.000 .988 .949 .994 .992
NNFI 1.000 .985 .867 .992 .980
CFI 1.000 .995 .952 .997 .993
χ²/ddl 0,981 1,451 6,342 0,835 1,717
AIC -2,039 -1,099 8,683 -2,331 -0,566